La politique culturelle de la Ville de Nantes Nantes et la culture de l’échange Ville de Jules Verne et de Julien Gracq, Nantes est une ville propre à engendrer le rêve. « Nantes… où j’ai l’impression que peut m’arriver quelque chose qui en vaille la peine» disait André Breton qui y « inventa » le surréalisme, dans une rencontre fulgurante avec Jacques Vaché, et qui, tandis qu’il rendait visite à Geneviève Mallarmé, déclarait être hanté, dans ses vagabondages nocturnes, par le fantôme d’Arthur Rimbaud. Nantes est aussi la ville ville de Jacques Demy qui prit le passage Pomeraye, le quai de la Fosse ou La Cigale comme décors pour raconter l’histoire de « Lola » en pensant à « Nadja », tandis que JeanChristophe Averty, revenait sur leurs pas, dans son ready-made cinématographique « Le rêve d’une ville ». Quant à Pierrick Sorin, il pourrait faire sienne la devise des surréalistes « amour, humour, poésie, liberté ». Nantes reste un port, un lieu de départ, un lieu d’accueil, une ville de confluences. Les grands voiliers n’accostent plus sur le quai de la Fosse, Feydeau n’est plus une île, mais il reste la mémoire de l’eau, propre à favoriser les émergences. Ouverte sur le monde, Nantes aime se confronter à d’autres horizons, et toujours fait flamber l’imagination.
Initiateur de formes culturelles nouvelles, Jean Blaise, avec le festival « Les Allumées », a révélé et réveillé la ville en rapprochant les cultures et en l’investissant jusque dans ses interstices. Le public se presse aujourd’hui aux grands rendez vous que lui donnent La Folle Journée, Royal de Luxe, Le Festival des trois continents, Claude Brumachon, Le printemps des arts, Les Utopiales, Scopitone, Les rendez vous de l’Erdre… Le musée des Beaux-arts se plaît dans un face à face entre Ingres et Picasso, La Tour et Richter. Le palais de justice de Jean Nouvel fait face aux immeubles baroques du quai de la Fosse hanté par la mémoire d’un sinistre commerce. Tandis que, bientôt le long de l’estuaire, des artistes de notre temps s’installeront, entre les usines et les r affineries. C’est là sans doute qu’il faut chercher la clé de cet te ville, dans ce dialogue entre réel et imaginaire, entre passé et futur, dans cette culture de la rencontre et de l’échange. Nantes où flotte toujours un parfum d’aventure…
I - Les grandes lignes de la politique culturelle Depuis les lois de décentral isation, on a assisté à un accroissement progressif de l’intervention des Collectivités locales dans les politiques culturelles (Les villes f inancent aujourd’hui 70 % de la culture en France). On le voit bien, Nantes a misé sur la culture au cours de ces 15 dernières années, la municipalité ayant compris que c’est à travers la culture qu’elle jouerait son développement et sa modernisation. La politique culturelle de la Ville de Nantes contribue certainement à faire de Nantes une grande métropole culturelle régionale, ouverte sur le monde qui poursuit un double objectif, la proximité et la diversité, afin que chaque nantais puisse accéder, selon son choix, à des pratiques culturelles différentes et à des propositions artistiques variées. Quelques chiffres clé : Budget culture : 65
Millions d’ €, total subventions : 16 millions d’€ ; 250 associations subventionnées.
La politique culturelle de la Ville Nantes peut se résumer en quatre enjeux : > Une conception de la culture qui ne doit pas être limitée à la seule définition des Beaux-Arts mais ouverte aux sciences et techniques, aux capacités d’expressions écrites et orales de la pensée, au patrimoine et à l’art dans la Ville. La politique culturelle dans une collectivité est, au même titre qu’une politique éducative notamment, un levier essentiel dans l’accès aux savoirs et dans l’organisation de la vie sociale. > Une volonté de s’adresser au plus grand nombre, et notamment aux personnes les plus éloignées de la culture, avec une attention portée aux publics très défavorisés ou empêchés. C’est l’objectif de démocratisation, qu’on retrouve plus généralement depuis quelques années sous l’appellation de proximité.
> Une prise en compte de toutes les formes culturelles et mouvements artistiques, dans une égalité de traitement entre les styles. On parle de plus en plus de diversité culturelle. On a effectivement intégré depuis des années les formes qui étaient qualifiées de populaire (chanson, cirque, musiques actuelles…). Une politique donc qui veut s’attacher autant à la valorisation du patrimoine qu’à la création contemporaine, en privilégiant toujours qualité, innovation et recherche. > L’évolution nécessaire pour que Nantes devienne une métropole, une grande ville culturelle, à l’échelle de l’Europe et au niveau international, avec l’affirmation d’une ouverture sur le monde.
Ces enjeux et objectifs doivent être déclinés dans chacun des domaines artistiques et culturels qui caractérisent une politique culturelle municipale : > Le patrimoine ; > Le spectacle vivant (musique, théâtre, danse) ; > Les arts visuels (arts plastiques, audio visuel, cinéma) ; > Le livre et la lecture ; > La culture scientifique et technique
Des orientations stratégiques des objectifs opérationnels Dans le projet de mandat (qui s’achève), les fondements suivants avaient été réaffirmés > Consolider les principales structures et les projets existants > Garder une capacité d’innovation et d’initiative en matière de création pour de nouveaux projets
> Renforcer la politique culturelle et artistique auprès des citoyens et dans les quartiers > Réaffirmer en permanence les objectifs et les missions de service public des équipements culturels > Assurer une bonne gestion et utilisation des moyens > Développer une politique d’évaluat ion. Pour répondre à ces enjeux, la politique culturelle a fait l’objet d’une formulation sous forme d’un plan d’action. 7 orientations stratégiques et 20 objectifs opérationnels ont été définis dont je reprendrai ici les grandes lignes.
Orientation 1 : Affirmer la politique culturelle nantaise du local à l'international Une Politique culturelle de proximité : La culture pour tous les Nantais, dans tous les quartiers. Premier des objectifs de la politique culturelle, la politique culturelle de proximité doit apporter une réponse aux citoyens en matière d’offre artistique et culturelle, comme en terme d’usage des équipements existant et de mise en place d’équipements complémentaires. ème
L’objectif de proximité qui a fait l’objet d’une abondante littératu re, peut être vue en ce début du 21 siècle, comme une réponse à une crise : crise de la démocratisation et son corrolaire, crise de l’action publique (la démocratisation a été vécue au cours de la décennie passée, comme un « échec » . cf dernière enquête d’O. Donnat sur les pratiques culturelles des Français et les pouvoirs publics ont été mis face à l’incapacité d’atteindre les gran ds idéaux véhiculés par Malraux, l’élitaire pour tous….), crise de légitimité (entrée des arts populaires), crise du lien social (la société s’est disloquée socialement….voir banlieues) Si la démocratisation est un objectif quasiment inatteignable, cela ne doit pas empêcher d’y tendre. Quant à la politique culturelle de proximité, on peut la voir comme l’en semble des moyens à mettre en œuvre pour rendre accessible la culture à tous les citoyens. La politique culturelle de proximité ne doit pas être entendue dans la seule acception géographique. Elle induit aussi la lutte contre l’exclusion culturelle, l’égalité de traitement sur le territoire, l’aller - retour entre le centre ville et la périphérie, la mise en œuvre de tous les modes de médiation. Elle induit aussi la notion de diversité culturelle, c’est à dire de prise en compte de manière égale, de toutes les pratiques culturelles et artistiques. Il s’agit là de considérer que démocratiser la culture, c’est permettre à chaque individu d’avoir accès à la pratique culturelle de son choix. Et donc de donner les moyens du choix. Cela a supposé une nouvelle façon de travailler : les collaborations entre les niveaux culturels, socio-culturels, associatifs et éducatifs. Ce qui n’était pas évident si on se souvient de la fracture entre les mondes culturel et socio-culturels. Devant contribuer à la cohésion sociale, la politique de proximité est un des enjeux majeurs de la politique culturelle municipal. C’est pour cela qu’une évaluation est conduite actuellement sur certaines actions de proximité et sur les établissements culturels municipaux et non municipaux. J’y reviendrai tout à l’heure.
Les actions culturelles dites de proximité se déclinent de la manière suivante : > La mise en œuvre d’actions culturelles : Trois Coups, Petite Yourte, résidences d’artistes, actions menées par les établissements culturels ( musées, ….). Il s’agit du travail mené dans les quartiers (ex Cnr – Ecole Urbain Le Verrier) ou avec les associations et centre socio-culturels (cf travail du MBA avec des associations de quartier dits défavorisés….Bief, Atelier bricolage…).
> Soutien apporté aux projets d’une centaine d’ associations culturelles intervenant dans les quartiers (Tissé Métisse, Cité Monde, Athénor, Bibliothèques de rue, …). > Une politique en direction des publics dits « spécifiques » (handicap, prisons, hôpitaux, publics en grande difficulté, la culture au service de l’ intégration des personnes d’origine étrangère type alphabétisation, foyers Sonacotra)… > Une politique d’usage des équipements. > Des équipements culturels implantés dans les quartiers : bibliothèques de quartier, lieux de répétitions ou de créations tels le studio Saint Georges des Batignolles, le Labo 18.
> Des lieux de vie et de travail mis à disposition des associations : ex. Collectif Pol’n, Ciné nantes et les associations cinéma et video (video «z’arts, mire, apo 33…), les associations du patrimoine portuaire (maison des hommes et des techniques etc….)
Une politique métropolitaine et internationale qui se décline selon deux axes complémentaires : > l’ouverture aux influences des cultures du mond e et aux créations internationales (accueil de créateurs étrangers : le Festival des 3 Continents, le LU, les Rencontres du Cinéma Espagnol, exposition d’artistes étrangers au MBA etc….) > l’exportation de son savoir -faire culturel et de ses artistes : politique d’échanges artistiques avec l’étranger, en direction principalement de quatre axes : villes jumelées ou en partenariat avec Nantes (Recife, Durban, Sarrebruck, Jacksonville, Seattle, Ruffisque, Dschang…) ; grandes ville et collectivités de l’Arc atlantique (Lisbonne, Bilbao, Anvers, Glasgow…) ; Asie ( Folle Journée au Japon, festival au Vietnam).
Orientation 2 : Une politique du Patrimoine La politique du patrimoine englobe tous les enjeux d’histoire et de mémoire d’une ville au travers de son patrimoine historique, industriel, de ses sites et de ses paysages, l’inscription dans la Ville d’œuvres d’art, ainsi que les enjeux de développement économique et touristique.
> Restauration des monuments historiques : Château, musée Jules Verne, Grues, bateaux monuments historiques (ex Le Léchalas, le Roquio). > Parcours d’interprétation de la Ville. Journées du patrimoine. Ateliers et classes patrimoine. > Mémorial à l’abolition de l’esclavage (travaux de 2007 à 2009), sur le quai de la Fosse.
Orientation 3 : Le spectacle vivant Le spectacle vivant est sans doute ce qui vaut à la Ville de Nantes sa notoriété, en France et à l’étranger. Grâce en particulier à la Folle Journée ou à Royal de Luxe. Les principaux enjeux de la politique municipale pour le spectacle vivant sont les suivants : > Conforter et développer la diffusion du spectacle vivant (Soutien aux grandes structures : l’Opéra avec la création de l’ANO ; à l’ONPL ; le LU – scène nationale ; Le TU….) ; Soutien aux musiques actuelles (Olympic, Pannonica, Bouche d’air, Salle Vasse….) ; aux festivals et grandes manifestations (Folle Journée, le Printemps des arts, Scopitone, Les Rendez vous de l’Erdre, parades de Royal de Luxe….). > Favoriser une politique de création : Subventionnement à 50 compagnies dont les compagnies émergentes (type Non Nova ou le Théâtre des 7 lieues). Action de Trempolino (aide aux groupes de musiques actuelles). > Développer les pratiques musicales amateurs : ex Musica Nantes (cf évaluation). Il s’agit de démocratiser l’entrée au CNR et soutenir et faire connaître les nombreuses associations de pratique musicale collective (chorales, groupes, etc….). Le Labo 188. Même travail à faire avec la danse et le théâtre.
Orientation 4 : la politique culturelle pour les arts visuels Le Musée des Beaux-arts, fleuron de la politique culturelle de la Ville pour les arts visuels, est un des quatre ou cinq grands musées d’art de province. Doté d’exceptionnelles collections (9000 œuvres conservées) du 13è siècle à nos jours et de nombreux chefs d’oeuvre, le musée, au cours des 15 dernières années, s’est fait connaître pour ses expositions de renommées internationales en art ancien et contemporain et sa politique d’édition. Il a développé dès le début des années 90, une action culturelle et éducative diversifiée en direction de tous les publics, les scolaires, les publics éloignés de la culture, le grand public. Il fut pionnier dans l’action dans les quartiers. La nouvelle directrice, Blandine Chavanne, anciennement directrice du musée de Nancy, a pris ses fonctions en octobre 2006. L’Ecole Régionale des Beaux -Arts : Etablissement d’enseignement supérieur (300 étudiants), au rayonnement national et international, il assume également un service de proximité de qualité pour le public local dans le cadre des cours périscolaires. En cours d’obtention de l’homologation au niveau européens (LMD). Nantes est connue en France pour sa scène artistique très active, portée par ces grandes structures municipales mais aussi par les différents lieux de diffusion de l’art contemporain de la Ville (Lieu Unique, Zoo Galerie, Ipso Facto…). De nombreux artistes en sont issus, et ont acquis une notoriété nationale voire internationale (quelques exemples, Fabrice Hybert, Pierrick Sorin, Philippe Cognée, Bruno Peinado, Christelle Familiari, Saadane Afif, Mathieu Mercier…).
La politique municipale pour l’audiovisuel et le cinéma La politique de la Ville s’exprime tout particulièrement en matière de diffusion, avec la volonté que soient montrées à Nantes les œuvres du patrimoine (classiques du cinéma, rétrospectives…) ainsi que les films art et essai, et le cinéma de recherche. La Ville soutient particulièrement « Ciné Nantes », dont l’objectif est de fédérer les différentes associations nantaises et de gérer le « Cinématographe » dans le pluralisme des esthétiques. La mission d’éducation à l’image menée par cette association est essentielle. La Ville apporte son soutien au « Festival des 3 Continents », l’une des manifestations les plus importantes de la Vil le. Elle apporte son soutien à d’autres festivals, Les Utopiales, les festivals de cinéma européen dont le Festival de Cinéma Espagnol, de plus en plus dynamique…
Orientation 5 : la politique culturelle pour le livre et la lecture Dans un environnement de textes et d'images, où exclusion rime souvent avec non maîtrise de l'écrit, la lecture constitue un enjeu social et politique considérable. L'acte de lire et d'écrire est un passage obligé pour réussir une scolarité, pour maîtriser son environnement et ses conditions de travail, pour accéder aux technologies nouvelles, pour vivre à part entière sa citoyenneté. L’objectif de la Ville est de faire de la lecture un bien véritablement partagé. Depuis 1989, l’engagement de la Ville en faveur du développeme nt de la lecture continue à se développer. L’approche privilégiée a toujours été transversale. La lecture n’est pas considérée seulement sous l’angle culturel mais également par ses impacts dans les domaines de l’éducation, du social, de la petite enfance, de la jeunesse et des personnes âgées, de la vie des quartiers. La politique municipale pour le livre et la lecture s’exprime à travers :
Un réseau du Livre et de la Lecture publique
Un réseau du livre et de la lecture publique dense et qui se développe en se répartissant équitablement sur le territoire avec trois médiathèques (une troisième Médiathèque dans les quartiers Est en 2007) et cinq bibliothèques de quartier. L’affirmation de la présence de Jules Verne à Nantes
Jules Verne est né à Nantes en 1828. Il y reste jusqu’à l’âge de 18 ans et c’est sans doute là qu’il puise tout son imaginaire, substrat de sa création littéraire. Il a indéniablement marqué nombre d’artistes et d’écrivains nés à Nantes ou y étant passé. En particulier les surréalistes , compagnons d’André Breton. La Ville se devait à juste titre de se réapproprier cet illustre nantais, l’écrivain français le plus lu et le plus traduit dans le monde. A l’occasion de la célébration du centenaire de la mort de l’écrivain en 2005, en coll aboration étroite avec la Ville d’Amiens, le Musée Jules Verne sur la butte Saine Anne, a été remis en valeur et plus de 50 événements (expositions, concerts, spectacles, conférences, colloques….) ont été organisés.
Le soutien aux associations : Bibliothèques associatives conventionnées, bibliothèques de rue : la Maison de la Poésie, Bibliothèque du Centre Pénitentiaire, Bibliothèque sonore…les ateliers d’écriture.
Des Evénements culturels : Lire en Fête , Biennale Le Livre et l’art au Lieu Unique. Les Utopiales / Festival international de Science fiction.
Orientation 6 : La politique culturelle scientifique et technique La culture ne peut être seulement le lieu de la seule satisfaction des loisirs et du divertissement, car elle doit aussi fournir des repères tant pour les individus que pour les sociétés. Aujourd’hui, les sciences, qui forment un support indispensable à la compréhension de notre monde, doivent encore plus nourrir toutes les réflexions et toutes les créations. Dans cette perspective, la Ville de Nantes intègre pleinement dans sa politique culturelle les arts et les sciences. La culture scientifique et technique permet notamment de mettre en œuvre des actions qui organisent et développent l’accès au savoir et à l’intelligence pour tous l es nantais.
Le Muséum (voir fiche en annexe) Contrairement à la plupart des muséums en France, celui de ème siècle dans un édifice construit à cet effet. Nantes est l’un des rares à s’être installé à la fin du 19 Riche d’un patrimoine de plus de 500 000 objets et d’une remarquable bibliothèque, le muséum de Nantes qui fêtera ses 200 ans en 2010, est l’un des musées d’histoire naturelle les plus important de France. Il accueille chaque année plus de 70 000 visiteurs dont environ 17 000 scolaires. Grâce aux animations qu’il organise, à son cycle de conférences (mardis muséum), à sa participation à des manifestations à des manifestations nationales (Fête de la Science), le muséum offre à ses publics un programme éducatif et culturel très complet. Son ouverture au milieu scientifique, mais aussi au monde associatif et aux jeunes artistes (le Péristyle s’affiche), en fait un lieu de vie et de débats.
Des manifestations : La Fête de la Science, principalement au Muséum et au Planétarium, en partenariat avec le CNRS. La Semaine de l’astronomie organisée par l’Association d’Astronomie Nantaise au Muséum. Le Soutien à différentes sociétés savantes : La Société des Sciences Naturelles de l’Ouest ; La
Société d’Astronomie de Nantes ; L’Académie de Bretagne ; La Société Académique de Nantes et de Loire-Atlantique ; La Société Dante Alighieri ; la société nantaise de préhistoire.
II – Le pilotage stratégique et la démarche évaluative Le maire de Nantes a souhaité, dès 2003, engager la Ville dans une réforme du mode de management et du fonctionnement des services, afin de replacer le citoyen-usager au cœur du service public. Pour mieux répondre aux attentes des Nantais, en mobilisant les plus justes moyens, en développant une culture de résultats et en décliner les politiques publiques thématiques dans chaque quartier sous la forme de projets sociaux de quartiers. Cette réforme s’est traduite par :
> La formulation de toutes les politiques publiques conduites par la Ville, en orientations stratégiques , en objectifs opérationnels et en actions. On vient d’en voir l’application en ce qui concerne la politique culturelle. Ceci afin de permettre aux élus, aux cadres et à tous les agents d’avoir une visibilité des actions conduites, de donner du sens à l’action, de savoir où l’on veut aller, comment et avec quelle efficacité. >Un nouveau mode de management reposant sur la conduite de projet : Identifier les objectifs à poursuivre, les moyens adaptés, les résultats à atteindre et à mesurer. A chaque action correspond un chef de projet. Chaque action ( : par exemple Développer les pratiques musicales collectives) est pilotée par un chef de projet, en collaboration avec d’autres collaborateurs le cas échéant. C’est ce qu’on appelle le groupe projet. Chaque action (projet) doit avoir un début et une fin, un budget, des bilans d’étape, un temps d’évaluation des résultats (pas nécessairement quantitatifs). Cette logique s’articule avec la logique hiérarchique qui était seule à prévaloir jusqu’ici.
La démarche évaluative Intégrée à la conduite du projet, l’évaluation d’une politique publique se propose d’apprécier les résultats et les effets de celui-ci. Ses résultats sont comparés aux objectifs fixés initialement et aux moyens mobilisés. Elle est une aide à la décision permettant d’améliorer et de corriger si nécessaire la conception, ou les conditions de mises en œuvre des actions proposées. L’évaluation permet d’éclairer et fonder les choix publics pour mieux répondre aux besoins des usagers. Par sa méthode - production de connaissance, croisement des points de vue dont celui de l’usager (qui peut être une association) - elle rend plus lisible les orientations prises et contribue au dialogue voire au débat démocratique.
Une démarche conduite en interne et animée collectivement Pour mettre en œuvre l’évaluation de ses politiques, la Ville de Nantes a adopté une démarche intégrée, pilotée en interne et non pas confiée en totalité à un cabinet extérieur, comme cela se fait généralement. La démarche d’évaluation découle des évaluations conduites par l’Etat sur les grands domaines de l’action publique (ex RMI). Elle commence à être adoptée par les Villes, Nantes faisant figure de pionnière dans le domaine.
Une évaluation est une démarche particulière régie par des règles déontologiques qui supposent une méthodologie spécifique et rigoureuse. A Nantes, l’évaluation d’un projet ou d’une action est pilotée
par le chef du projet à évaluer et le « référent évaluation » de la direction concernée. Ce qui permet de réinjecter en temps réel, dans le quotidien de l’action et de façon très opérationnelle, les résultats de l’évaluation. Elle est conduite avec l’appui méthodologique d’une cellule évaluation centrale et d’une instance de concertation, le Comité Opérationnel d’évaluation, regroupant tous les chargés d’évaluation des différentes directions de la Ville de Nantes. Ce qui permet d’assurer la neutralité et l’objectivité nécessaires à toute évaluation. Ce collège évaluatif permet également la mutualisation des expériences et l’appropriation collective de la démarche, voire la constitution d’une culture commune. Privilégiant une logique d’efficacité, l’évaluation veut produire du changement, pas seulement de la connaissance. Un cahier des charges est rédigé avant toute évaluation. Il reformule les objectifs initiaux de l’action, pose une problématique, recense les données mobilisables et les données à recueillir par enquête si besoin (enquêtes quantitatives ou qualitatives, souvent réalisées par des cabinets extérieurs). Un rapport fournit les résultats des enquêtes, les principaux enseignements (ce qu’on appelle le jugement évaluatif) et des préconisations d’action. Les résultats de l’évalu ation peuvent être restitués aux usagers ou bénéficiaires de l’action : ce qui alimente le débat public.
Enfin, elle facilite le management des équipes grâce à un diagnostic partagé, et en donnant une vision positive du service rendu.
L’exemple d’une évaluation ex ante : Musica Nantes Musica Nantes est un projet d’action publique qui veut favoriser l’accès de tous les Nantais à la formation ou à la pratique musicales collectives. L’hypothèse était de repérer et labelliser quelques associations assurant une formation musicale collective et favoriser la constitution d’un réseau. Le principe d’une démocratisation de l’entrée au conservatoire était également posée, considéré comme profitant aux familles plutôt favorisées. Afin de s’assurer de la validité de ces hypothèses et de favoriser la mise en oeuvre du projet, une évaluation a été menée entre janvier et juillet 2005. Elle est appelée ex ante en ce qu’elle précède la formulation et la conduite d’une politique.
Cette évaluation a produit des résultats concrets et utiles : un état des lieux exhaustif (850 associations musicales repérées), le repérage de 350 associations apparaissant comme faisant de la formation (une enquête quantitative par questionnaire envoyé par courrier a été réalisée par un cabinet extérieur, l’identification de 118 associations actives faisant de la pratique collective pour un public amateur. Ces dernières pouvaient constituer un socle d’ associations partenaires de la politique de la Ville. Une enquête approfondie (qualitative) auprès d’une trentaine d’entre elles a fait émerger les besoins réels de ces associations et la réalité de la pratique musicale sur le terrain. L’analyse finale et les préconisations d’actions ont permis de réorienter en partie le projet envisagé et d’a ffiner les actions à mener : information des Nantais par l’édition de guides, favoriser les collaborations entre associations, mutualisation des compétences, maillage entre les niveaux culturels, socioculturels et associatifs…
L’exemple d’une évaluation ex post (ou chemin faisant) : les Trois coups Cette évaluation s’inscrit dans l’évaluation qui est e n cours et porte sur les actions culturelles initiées par la Direction du développement culturel, dans les quartiers, et l’action culturelle des établisse ments municipaux et non municipaux. J’ai travaillé avec deux étudiants du Master EPIC, Julien Mingot et Léonard Delmaire.
Nous nous attacherons à l’exemple de l’évaluation de l’une d’entre elles, les Trois coups, opération initiée en 2003 et visant à favoriser les pratiques culturelles dans les quartiers, par une programmation de spectacles dans des centres socio-culturels (des spectacles dans cinq équipements de quartier, trois fois par an). En prévision d’une évaluation potentielle, des questionnaires avaient été distribués à chaque édition, auprès des spectateurs, depuis le lancement de cette opération. L’ évaluation a été lancée en février 2006. Six mois de travail : cahier des charges, enquête quantitative (600 questionnaires), et enquête qualitative sous forme d’entretiens approfondis avec des responsables, des artistes, du public, remise d’un rapport conséquent. L’analyse et les préconisations sont en cours. Les résultats montrent que le public touché, qui provenait jusqu’en 2006 majoritairemen t du centre ville ou de différents quartiers, et ayant déjà une pratique culturelle, est en train de changer. Pour la première année, le public est majoritairement issu des quartier d’implantation des Centres socio -culturels où ont lieu les représentations, avec une surreprésentation d’employés, de femmes…..Bref, un public assez différent du public fréquentant les lieux culturels traditionnels. Ce qui pour aller vite indique que l’action Trois coups qui visait des publics éloignés de la culture, tend à atteindre son objectif…..Ces résultats très encourageants, auxquels je ne m’attendais pas, devraient faire l’objet d’une publication dans une revue scientifique de management culturel. Ces résultats feront l’objet d’une restitution aux élus, aux chefs de proj et mais aussi à tous les partenaires des Trois coups, en particulier les associations concernées. La démarche d’évaluation marquera une étape importante pour le service public, en ce qu’elle doit produire du changement et profiter au débat public. En se développant progressivement dans toutes les collectivités, elle pourrait bien voir émerger de nouvelles compétences et de nouveaux métiers.
rganisée dans le cadre du cycle de conférences « Pour une culture partagée du développement durable », par l’Institut de Formation de l’Environnement (IFORE) en partenariat avec le Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM) et le programme européen Culture 2000 « Cult-Rural », la conférence sur la culture et le développement durable a pour objectif de tenter d’expliquer et d’illustrer la culture en tant que cinquième pilier du développement durable. Cette conférence s’adresse à l’ensemble des services de l’Etat, des collectivités, aux élus, aux responsables d’associations et aux entreprises (en fonction des places disponibles). >>>>Pourquoi la culture et le développement durable La culture a longtemps été considérée sous le seul angle des Beaux-Arts et des Belles Lettres. Pourtant, en 1871, Edward B. Taylor, un anthropologue anglais définit la culture de la manière suivante : « La culture est un tout complexe qu’incluent les connaissances, les croyances, l’art, la morale, le droit, les coutumes, ainsi que toutes autres dispositions et habitudes acquises par l’homme en tant que membre d’une société ». Cette approche sera reprise par l’UNESCO, dès sa création en 1946, qui se fixe comme objectif « d’orchestrer les diverses cultures pour aboutir, non pas à l’uniformité, mais à l’unité dans la diversité, afin que les êtres humains ne
soient pas prisonniers de leurs cultures respectives, mais puissent jouir des trésors d’une culture universelle unique autant que variée » Lors de la conférence mondiale sur les politiques culturelles à Mexico City, du 26 au 6 août 1982, l’UNESCO propose d’ailleurs la définition suivante : « La culture, dans son sens le plus large est considérée comme l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances ».
O >Conférence CULTURE ET DEVELOPPEMENT DURABLE Jeudi 12 juin 2008 9h-18h30 Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée - MuCEM CYCLE DE CONFERENCES {Pour
une culture partagée du développement durable}
Institut de Formation de l’Environnement 6, rue du général Camou - 75007 PARIS
01 42 19 25 92 – Télécopie : 01 42 19 19 76 - www.ifore.developpement-durable.gouv.fr
[email protected]
Une étape supplémentaire est franchie avec la Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle de 2001 puis la convention sur la diversité culturelle de 2005 : « héritage commun de l’humanité », elle apparaît ainsi progressivement comme indissociable de la dignité humaine et constitue même la condition première au dialogue des cultures. A ce titre, sa sauvegarde est considérée comme un impératif concret et éthique. Il apparaît donc important que le développement durable assure non seulement la préservation des ressources naturelles et de la diversité biologique, mais aussi la protection de la diversité et de la vitalité des nombreuses cultures du monde. Il est admis que la mondialisation de l’économie et les progrès technologiques de l’information et de la communication, en favorisant la circulation des biens et services culturels, favorisent les contacts et échanges culturels. Pourtant force est de constater que les relations culturelles ne sont pas partout équilibrées, justifiant le recours à des politiques publiques de nature à garantir l’expression de la diversité des formes culturelles ainsi que l’ouverture sur la pluralité des cultures du monde. Dans cette perspective les autorités françaises se sont fixées de soutenir de telles politiques. La France est ainsi un des seuls pays à faire du développement culturel l’une des priorités de l’aide publique au développement. Au niveau européen, la Constitution européenne inclut la diversité culturelle au titre des objectifs fondamentaux que poursuit l’Union européenne, l’intègre au sein de la politique culturelle de l’Union et préserve, dans le cadre de la politique commerciale, le vote à l’unanimité en matière d’accords sur les biens et services culturels, dans la mesure où ils pourraient mettre en cause la diversité culturelle au sein de l’Union. Le pilier culturel du développement durable exige par conséquent de consentir en parallèle des efforts de développement d'une culture de la durabilité et de protection de la diversité culturelle. Ainsi se dessinent les deux problématiques qui seront abordées dans le cadre de cette conférence :
l’importance de la diversité culturelle et les liens entre patrimoine et développement durable.