Droit de l’Entreprise I Prof- Mme B. OULHADJ ENCG-Settat
Ecole Nationale de Commerce et de Gestion de Settat Université Hassaner 1
DROIT DE L’ENTREPRISE I. COURS Semestre I
Professeur : Mme Badia OULHADJ
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SOMMAIRE
DOSSIER I. LA FORMATION DU DROIT DE L’ENTREPRISE Thème 1. Notions fondamentales 1. La règle de droit est une règle obligatoire 2. La règle de droit est une règle générale et abstraite 3. La règle de droit est une règle permanente Thème 2. Les classifications du droit 1. La distinction droit public/droit privé 2. La distinction droit national/droit international
DOSSIER II. Les sources du droit de l’entreprise Thème I. Les actes de l’autorité publique 1. Nomenclature des actes de l’autorité publique 2. La force obligatoire des actes de l’autorité publique 3. La disparition des actes de l'autorité publique Thème II. Les usages 1. Les usages internationaux 2. Les usages internes 3. La force juridique et preuve des usages
DOSSIER III. L’EXERCICE DE LA JUSTICE
Thème 1. Principes de fonctionnement de la justice I. La justice est un service public 1. L'égalité 2. La gratuité 3. La permanence et l'accessibilité II. Toute personne juridique a le droit d'agir en justice pour faire respecter ses droits.
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1. L'action en justice 2. Conditions 3. Tout justiciable dispose de voies de recours contre une décision de justice. Thème 2. L’organisation judiciaire I. Les juridictions de droit commun II. Les tribunaux administratifs III. Les tribunaux de commerce Thème 4. Quelques règles de procédures I. Principes généraux de procédures II. Compétence territoriale d’une juridiction DOSSIER III ; LES ACTEURS DE LA VIE JURIDIQUE Thème 1. Les personnes physiques I. La personnalité juridique II. L’identification des personnes physiques III. La capacité des personnes physiques 1. Les incapacités de jouissance 2. Les incapacités d’exercice Thème 2. Les personnes morales I. Conditions d’existence des personnes morales II. Les différentes personnes morales 1. Les personnes morales de droit public 2. Les personnes morales de droit privé 3. Les personnes morales de droit mixte III. Les attributs de la personne morale 1. L'état de la personne morale 2. Le patrimoine de la personne morale 3. Les pouvoirs de la personne morale
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DOSSIER IV. LES CHOSES ET LES DROITS DISPONIBLES Thème 1. La classification des choses objets de droits subjectifs I. Les choses appropriables et les choses nonappropriables II. La classification des choses selon leur nature 1. Les choses fongibles et les choses non fongibles 2. Les choses consomptibles et les choses non consomptibles 3. Les choses frugifères et les choses non frugifères III. La classification des choses en biens meubles et biens immeubles 1. Les immeubles. 2. Les meubles Thème 2. La classification des droits disponibles I. Les droits personnels 1. Définition 2. Les caractères du droit personnel II. Les droits réels 1. Les droits réels principaux 2. Les droits réels accessoires III. Les droits intellectuels ou de clientèle (droits de propriété incorporelle) 1. La propriété littéraire ou artistique (littérature, théâtre, cinéma, musique, peinture, 2. La propriété industrielle DOSSIER V. LA SOURCE DES DROITS ET DES OBLIGATIONS Thème 1. Le contrat : une technique juridique des échanges I. Le tableau des différents contrats 1. Les contrats de fourniture de biens 2. Les contrats de prestation de service II. Les caractéristiques essentielles du régime du contrat 1. La négociation des contrats 2. Les conditions de validité des contrats Thème 2. Les faits générateurs de la responsabilité
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I. La responsabilité civile délictuelle – responsabilité du fait personnel II. Responsabilité délictuelle et responsabilité contractuelle III. La responsabilité pénale
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DOSSIER I. LES SOURCES DU DROIT DE L’ENTREPRISE
Thème 1. Notions fondamentales I. Définition de la règle de droit Le droit peut être définit comme étant l'ensemble des règles qui gouvernent les rapports des hommes dans la société et dont le respect est assuré par l'autorité publique : on parle en ce sens de droit objectif, le terme "objectif" étant tiré de l'objet de la discipline, qui est d'élaborer un corps de règles pour le gouvernement de la société. Ce droit objectif peut être envisagé dans sa totalité : exemple le droit marocain... On appelle aussi du pouvoir accordé à une personne d'user d'une chose ou d'exiger d'un autre individu l'exécution d'une prestation. Sous cet aspect, on n'évoque plus le droit en général, mais un droit ou des droits et l'on utilise l'expression droit subjectif, le terme "subjectif" évoquant le titulaire de la prérogative juridique, on parle par exemple du droit de propriété : j'exerce le droit de propriété sur cette maison. Pour mieux saisir le sens du mot droit il est nécessaire de connaître les caractéristiques qui font sa spécificité. 1. La règle de droit est une règle obligatoire Dire qu'une règle de droit est obligatoire veut dire qu'elle est impérative, donc assortie d'une sanction. La sanction constitue son principale support, sans la sanction on ne peut pas parler d'une règle de droit ; chaque fois qu'il y a violation de la règle de droit, l'Etat intervient pour faire appliquer la sanction. Le caractère obligatoire traduit la nécessite pour les sujets de droit de se soumettre à la loi, de préférence volontairement, à défaut par la voie de la contrainte. 2. La règle de droit est une règle générale et abstraite Dire qu'une règle de droit est générale, cela veut dire qu'elle s'adresse à tous et non à tel ou tel individu en particulier. Le caractère de la généralité signifie encore que cette règle est impersonnelle et objective. Cela signifie que la règle de droit s'applique indifféremment à tout moment et à chaque individu peu importe son statut social. Le caractère de la généralité entraîne une conséquence très importante : l'égalité devant
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la loi. Il s'ensuit que tous les individus sont soumis aux mêmes lois sans qu'il y ait de distinction entre eux. Il n'y a pas de privilèges en droit. 3. La règle de droit est une règle permanente La règle de droit est destinée à régir l'avenir sans limitation de temps, il est dans la nature de la loi de garder indéfiniment sa force obligatoire. Cependant, permanence ne signifie pas perpétuité. La règle de droit reste en vigueur aussi longtemps qu'une autre règle de droit ne l'a pas abrogée. II. Les classifications du droit Il est impossible de dresser un inventaire exhaustif et précis de toutes les règles juridiques, nous ne pourrons donc faire apparaître ici que les normes essentielles se rapportant à l'activité économique. 1. La distinction droit public/droit privé Cette distinction est basée sur le critère dit organique : à la base de la séparation du droit public et du droit privé il y a la distinction fondamentale entre les gouvernants (ceux qui détiennent le pouvoir l'autorité) et les gouvernés (ceux sur qui s'exerce ce pouvoir) et qui obéissent à cette autorité.
Le droit public s'applique dès qu'un gouvernant fait partie d'un rapport juridique, on peut définir donc ce droit comme étant l'ensemble des règles juridiques relatives au statut des gouvernants, à leur pouvoir, et à leur rapport avec les gouvernés. Le droit public est le droit qui régit les rapports dans lesquels intervient l'Etat.
Le droit public se subdivise en plusieurs branches : Le droit constitutionnel : il fixe les règles de base concernant l'organisation de
l'Etat. Les principaux pouvoirs institués par la constitution de 1996 en vigueur aujourd’hui sont : le Roi, le Gouvernement et le Parlement. Elle a en outre institué le Conseil Constitutionnel, un Conseil Supérieur de la Magistrature, une Haute Cour, un Conseil Economique et Social et une Cour des Comptes. Le droit administratif (régit l'administration aussi bien dans ses rapports internes que les rapports avec les administrés) ; Les finances publiques (réglementent les recettes et les dépenses de l'Etat). Le droit privé est une branche du droit qui s'applique aux rapports des particuliers entre eux. Le droit privé est applicable aux droits et obligations qui naissent des actes (principalement les contrats) ou des faits (principalement les fautes) accomplis par les particuliers les uns à l'égard des autres. Le droit privé indique par exemple comment
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se forment les contrats, quels sont les effets des contrats et la sanction de leur inexécution. On distingue parmi les branches du droit privé le droit civil, c'est le Dahir formant code des Obligations et contrats (D.O.C).
Le Droit commercial s'intéresse aux opérations juridiques faites par les
commerçants soit entre eux, soit avec leurs clients. On peut le définir comme l'ensemble des règles auxquelles sont soumises les entreprises commerciales industrielles et financières, en raison des actes qu'elles font dans l'exercice de leur activité. Le droit maritime est formé par les règles juridiques applicables à la navigation ou transport des voyageurs et des marchandises par mer. Dans le droit social on distingue le droit du travail qui est composé des règles juridiques applicables aux relations qui s'établissent entre employeurs et travailleurs au sein de l'entreprise et le droit de la sécurité sociale, ce droit protège l'individu contre les événements qui entraînent la perte ou la diminution de ses revenus à la suite d'un risque bien déterminé (maladie, invalidité, décès, maternité, ...). Le droit pénal est une branche du droit dont les caractéristiques ne permettent pas de le classer aisément dans l'une ou l'autre des branches du droit, certains auteurs le classe parmi les branches du droit public car son application fait intervenir l'Etat, d'autres au contraire le considèrent comme une branche du droit privé en raison de son objet, le droit pénal s'applique lorsque les individus commettent une infraction, en mettant en oeuvre les sanctions prévues par la loi à cet effet.
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Thème 2. Les sources du droit de l’entreprise Toute règle de droit peut, à un moment ou à un autre, être appelée soit à régir une situation économique donnée, soit à avoir un rapport avec cette situation. Les acteurs de la vie économique doivent avoir une connaissance des règles qui régissent la vie des affaires, ils encourent en cas d'infraction à ces règles des sanctions civiles ou pénales. Nous allons nous intéresser donc aux normes essentielles se rapportant à la vie économique. Les principales sources du droit de l'entreprise sont d'origine nationale, cependant, il puise également sa source dans les règles internationales. S'agissant des sources nationales, les règles juridiques constituant le droit de l'entreprise émanent d'actes de l'autorité publique, mais bien souvent, ces règles ne prennent leur sens et leur portée que dans la mesure où elles sont complétées par les usages et interprétées par les décisions de justice voire assorties de commentaires de juristes. I. Les sources directes Ces actes sont la principale source du droit de l'entreprise. Bien que communément et abusivement dénommés "lois", ils se présentent en fait sous des formes distinctes et leur force obligatoire est inégale. En vertu du principe dit de "légalité", la force obligatoire de ces actes est liée à leur origine : les règles constitutionnelles qui sont à la source de toutes les autres, ont naturellement une autorité supérieure et fixent l'autorité que l'on doit reconnaître aux autres normes.
A. Les sources nationales La constitution Ont valeur constitutionnelle le texte de la constitution révisée en 1992 et 1996 et son préambule. La constitution détermine l'organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics. Elle a ainsi précisé la compétence du parlement et de l'exécutif pour élaborer des règles de droit (lois et règlements). La constitution est complétée par des lois organiques, n'ayant pas le caractère de lois constitutionnelles, fixant les modalités de l'organisation et du fonctionnement de ces pouvoirs publics. Les Dahirs (décrets royaux) Les dahirs sont des textes législatifs édictés par le Roi. La constitution marocaine reconnaît au Roi un pouvoir législatif, il peut donc soumettre, par dahir, tout projet ou proposition de loi, à une approbation par référendum (consultation populaire).
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Les lois Les lois sont des textes votés par le parlement. La loi au sens strict est un texte voté par le parlement. On utilise parfois ce mot pour désigner tout acte émanant de l'autorité publique. Les lois ne peuvent être prises que dans les domaines définis par la constitution dans son article 45 (libertés des citoyens, état civil, organisation de la justice, régimes électoraux, détermination et recouvrement de l’impôt …). L'initiative des lois appartient tant au premier ministre (projet de loi) qu'aux députés (proposition de lois). Chaque texte est déposé sur le bureau du parlement, il est examiné par des commissions permanentes (deux sessions : printemps, automne). Après débat général, il peut être apporté des modifications (amendements) aux textes en discussion, ensuite le texte est voté. Procédure de mise en vigueur : une fois adoptée, la loi, pour entrer en vigueur, doit être promulguée et publiée. La promulgation qui est l'ordre d'exécution de la loi résulte d'une décision (dahir) du Roi. La publication de la loi se fait par insertion au bulletin officiel.
La loi reste en vigueur tant qu'elle n'est pas abrogée, cette abrogation peut être expresse une loi dit que telle autre loi est abrogée ou tacite lorsque le texte nouveau est inconciliable avec les dispositions anciennes et incompatible avec leur maintien. La loi est subordonnée à la constitution et ne peut donc comporter de dispositions qui lui soient contraires. Mais les juridictions administratives et judiciaires sont incompétentes pour contrôler la conformité de la loi aux dispositions de la constitution. Ce contrôle relève d'un organe spécifique, crée récemment, c'est le conseil constitutionnel. Les textes émanant du pouvoir exécutif Les règlements autonomes : ce sont des textes juridiques pris par le premier ministre dans les domaines réservés au gouvernent par la constitution Les décrets d’application: complètent les dispositions de la loi sur des points précis prévus par ladite loi, ou précisent les conditions d’applications d’une loi. Ils doivent respecter l’esprit de la loi.
B. Les sources internationales : les traités et les accords
Aperçu général Les traités internationaux sont des accords conclus entre Etats souverains, fixant les règles obligatoires à appliquer aux situations qu'ils soumettent à leur compétence. Ils empruntent parfois d'autres appellations : charte, protocole, accord, convention, pacte. Ces traités ont une
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portée très variable, mais leur régime juridique est le même. Les traités bilatéraux : ces traités règlent un problème très particulier entre deux Etats. Le Maroc est ainsi engagé avec de nombreux pays dans des conventions douanières, des conventions fiscales, des conventions d'établissement (fixant le droit des marocains à accomplir des affaires à l'étranger, et celui des étrangers à en accomplir au Maroc....).
Les traités d'unification du droit : en l'absence de traité, les lois de chaque pays ont tendance à régir les affaires dès l'instant où elles ont affaire avec ce pays. Pour éliminer les contradictions pouvant exister entre ces différentes législations à propos d'une même opération juridique, les Etats concluent entre eux des traités tendant à soumettre à une régime identique certains aspects des affaires par exemple : la vente des marchandises ou leur transport. Les traités d'organisation économique : Ces traités à la différence des
précédents, n'ont pas pour objectif principal de trancher des difficultés juridiques, leur but est de faciliter les relations économiques entre Etats. D'où des règles de droit que le juriste et l'homme d'affaires ne peut ignorer. Le régime juridique des traités Les traités, pour entrer en vigueur, doivent être ratifiés et publiés au Bulletin officiel. C'est le Roi qui ratifie les traités, c'estàdire confirme les engagements internationaux pris par le Royaume du Maroc.
C. La hiérarchie des normes En vertu du principe dit de "légalité", la force obligatoire de normes juridique est liée à leur origine : les règles constitutionnelles qui sont à la source de toutes les autres, ont naturellement une autorité supérieure et fixent l'autorité que l'on doit reconnaître aux autres normes. Chaque texte de niveau inférieur doit être conforme aux textes du niveau supérieur. Le Conseil constitutionnel est chargé de vérifier la conformité des lois et des traités à la Constitution. Les traités déclarés non conformes à la Constitution ne peuvent être ratifiés qu’après révision de celleci. D. La disparition des normes juridiques En règle générale, les lois et règlements sont destinés à régir l'avenir sans limitation de temps, il est dans la nature de la loi de garder indéfiniment sa force obligatoire. Cependant,
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permanence ne signifie pas perpétuité, les textes restent en vigueur aussi longtemps qu'ils ne sont pas abrogés. On distingue en ce qui concerne l'abrogation: L'abrogation expresse Le pouvoir d'abroger revient naturellement à l'autorité qui a le pouvoir de faire la loi ou le règlement. L'abrogation expresse résulte d'un article de la loi ou du règlement qui indique que tel ou tel autre texte est abrogé. L'abrogation tacite L'abrogation peut être tacite, c'estàdire résulter implicitement d'un nouveau texte, la loi nouvelle est en opposition avec les dispositions antérieures, sans préciser qu'elle les abroge. Les textes successifs étant incompatibles entre eux, l'ancien et le nouveau ne peuvent recevoir application en même temps, il faut donc choisir entre les deux lois, c'est la plus récente qui l'emporte. II. Les sources indirectes : la doctrine et la jurisprudence A. Définition L’ensemble des décisions de justice : c’est la série de décisions concordantes rendus sur un point de droit déterminé. B. Valeur juridique Elles n’ont pas de force obligatoire directe. Elles interviennent en application de textes existants ou inspirent de nouveaux textes.
III – Les sources spécifiques A. Les usages Les usages sont des pratiques qu'un emploi constant transforme en une règle de droit non écrite. On distingue parfois usages et coutumes. En pratique, ces deux expressions peuvent être tenues pour synonymes. Les usages tiennent une grande place dans la vie des affaires et cela pour trois raisons: D'abord, la diversité des relations d'affaires est telle que le législateur n'a pas la possibilité de tout prévoir. Aussi la loi s'en remetelle souvent aux usages pour indiquer la règle à suivre. Par exemple, certains articles du DOC invitent les tribunaux à se reporter aux usages pour interpréter les contrats. Ensuite, les transactions commerciales sont nécessairement rapides ; les commerçants n'ont pas le temps de préciser jusque dans les détails les conditions de leurs contrats ; ils s'en rapportent donc à ce qu'il est d'usage de faire en pareille circonstance. 1. Définition des usages Les usages doivent présenter un caractère obligatoire par l’existence simultanée de 2 éléments : Un élément matériel : usage répété longtemps Un élément moral : les personnes concernées considèrent la pratique de l’usage comme
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obligatoire 2. Valeur de l'usage commercial La valeur de l'usage est liée à ses conditions d'élaboration : il est opposable à tous les professionnels qui travaillent dans le même secteur professionnel et dans la même localité. La règle est logique puisque les partenaires économiques sont des commerçants avertis et susceptibles de connaître les règles applicables à leur activité. Ces usages n'ont cependant pas de valeur impératives : s'ils s'appliquent dans le silence du contrat, ils peuvent cependant être écartés par une stipulation conventionnelle. A l'égard des tiers, professionnels d'une branche d'activité différente ou d'une autre localité, l'usage est au contraire inopposable lorsque du moins le contractant ne l'a pas formellement accepté. La nature fondamentalement contractuelle de ces usages détermine leur portée. L'usage s'impose aux textes simplement supplétifs. En revanche, il s'efface devant un texte impératif car l'ordre public ne saurait tolérer l'existence de particularismes professionnels ou locaux, ils ne peuvent donc pas déroger à une loi d'ordre public. B. Les conventions et les accords collectifs Il s’agit du droit négocié qui vient compléter les règles du droit du travail Les conventions traitent de l’ensemble des conditions d’emploi Les accords se limitent à un point particulier Leur champ d’application peut concerner une entreprise précise, une branche ou plusieurs professions
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DOSSIER II. L’EXERCICE DE LA JUSTICE Nul ne peut se faire justice à soimême. Rendre la justice est une fonction essentielle de l'Etat. Celuici doit organiser le service public de justice pour qu'il soit apte à «bien dire le droit». Le service public de justice doit garantir un service public de qualité. Son organisation repose sur de grands principes qui permettent à toute personne qui réside au Maroc (tout justiciable) de faire reconnaître ses droits en justice. La fonction de juger est la prérogative du pouvoir judiciaire. Celuici doit l'exercer sans pression du pouvoir politique et de l'administration. Tout justiciable doit pouvoir, dans certaines conditions, lorsqu'il estime que la justice ne lui a pas été rendue, exercer des recours qui lui permettent de faire à nouveau juger son litige par un autre juge. Il est donc important pour toute personne d'être en mesure de répondre aux questions suivantes: Qui peut agir en justice ? Quelle juridiction saisir ? Selon quelles règles et par qui la justice seraelle rendue ?
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Thème 1.
Principes de fonctionnement de la justice
I. La justice est un service public La justice étant un service public doit respecter les principes d'égalité, de gratuité et de permanence. 1. L'égalité L’égalité repose sur la neutralité, l'impartialité des juges. Tous les justiciables sont jugés pour une même sorte d'affaire par la même catégorie de tribunaux et selon les mêmes règles de procédure 2. La gratuité La gratuité doit permettre à tous de demander justice. Les plaideurs n'ont pas à payer leurs juges qui sont payés par l'Etat. De plus, cette gratuité assure l'égalité des citoyens devant la justice en permettant aux plus déshérités de s'adresser à elle pour défendre leur droit. Il faut cependant remarquer que si les plaideurs n'ont pas à payer leur juges, ils doivent payer certains auxiliaires de justice dont les services sont obligatoires (avocat, l'huissier...).Pour aider les justiciables dont les ressources ne permettent pas l'engagement de ces frais de justice, l'Etat a prévu une «aide judiciaire». 3. La permanence et l'accessibilité La permanence et l’accessibilité du service public de justice nécessitent que les tribunaux soient nombreux et répartis sur le territoire. A tout moment la justice doit pouvoir être saisie ; un roulement permet aux plaideurs de trouver des juges pendant les mois d'été et les périodes de vacances. En cas d'urgence, il est possible de saisir le juge à tout moment, même le dimanche. Cette procédure d'urgence, dite procédure des référés, permet au tribunal de prendre des mesures provisoire immédiates qui sauvegardent l'intérêt du plaideur, sans trancher sur le fond du litige, ce qui prendrait beaucoup plus de temps (exp. ordonnance de référé retirant provisoirement la diffusion d'un film en attendant la décision du tribunal). II. Toute personne juridique a le droit d'agir en justice pour faire respecter
ses droits.
1. L'action en justice C’est le fait de saisir une juridiction pour obtenir la reconnaissance d'un droit. Le juge valablement saisi est obligé de statuer sous peine de «déni de justice». 2. Conditions Le droit d'agir en justice est subordonné à deux conditions : Le demandeur doit justifier d'un intérêt, quelle que soit la nature, pécuniaire ou morale, de cet intérêt ;
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Cet intérêt doit être personnel
Il n'est pas possible de saisir un tribunal pour défendre l'intérêt d'autrui. Cette règle reçoit une exception pour les associations constituées pour la défense des intérêts de leurs membres et pour les syndicats, à conditions que l'intéressé ait donné son intérêt à l'action. 3. Tout justiciable dispose de voies de recours contre une décision de justice. L'organisation judiciaire comporte deux degrés de juridictions. Ainsi lorsqu'un plaideur s'estime mécontent d'une décision de justice rendue à son endroit par une juridiction de premier degré, il peut faire appel de cette décision et demander que l'affaire soit à nouveau jugée par une juridiction du second degré ; les litiges de faible importance ne sont pas susceptible d'appel. Ils sont rendus en «premier et dernier ressort» alors que les autres sont rendus à charge d'appel. Il existe une juridiction de cassation (la cour suprême) dont le rôle est de juger si les décisions rendues par les autres juridictions sont conformes aux règles de droit. Tout plaideur qui estime cette conformité non respectée peut se pourvoir en cassation pour obtenir que la décision contestée soit casée et ce, quelle que soit l'importance du litige.
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Les voies de recours
Cour suprême
Juge du droit Et non des faits recours = Pourvoi en cassation
La cour d'appel
2e degré de juridiction (Réforme le jugement)
voie de recours = Appel
Tribunal de première instance
Juridictions de premier degré Jugent en premier ressort (à charge d'appel) er Exceptionnellement en 1 et dernier ressort.
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Thème 2. L’organisation judiciaire
L'autorité publique n'a pas achevé sa tâche lorsque elle a édicté les normes nécessaires au gouvernement de la société lois et règlements, il lui faut ensuite procéder à la solution des conflits qui opposent les particuliers, soit entre eux, soit à l'administration, autrement dit rendre la justice. Au Maroc, l'organisation judiciaire a subi une grande réforme en vertu du Dahir portant loi qui date du 15 Juillet 1974, complété par le récent Dahir du 10/09/1993 qui crée les tribunaux administratifs. En vertu de ces textes, les organes judiciaires au Maroc se subdivisent en trois grandes catégories : les juridictions de droit commun, les juridictions de l'ordre administratif, les juridictions commerciales et les juridictions d'exception.
I. Les juridictions de droit commun Une juridiction de droit commun est une juridiction qui a une compétence générale, voire de principe. L'article premier du Dahir du 15/07/1974 qui définit l'organisation judiciaire au Maroc précise: ‘‘L’organisation judiciaire comprend : Les juridictions communales et d'arrondissement... Les tribunaux de première instance ; Les cours d'appel ; La cour suprême....’’ 1. Les juridictions communales et d'arrondissement 1° Composition : ces juridictions sont créées au niveau de chaque commune rurale et arrondissement urbain. Elles se composent d'un juge (juge unique) assisté d'un greffier et d'un secrétaire. Les juges sont désignés soit parmi les magistrats professionnels (juges de carrière), il peut s'agir également d'un simple citoyen appelé juge populaire. 2° Compétence : la compétence des juridictions communales et d'arrondissement se limite aux affaires civiles et pénales. Pour les affaires civiles, le montant litigieux ne doit pas dépasser 1000 DHS. En ce qui concerne les affaires pénales, ces juridictions connaissent des infractions moins graves, notamment les infractions qui ne sont passibles que d'une amende exp. les contraventions. Parfois elles jugent aussi quelques les infractions économiques notamment les fraudes sur les marchandises. Les juridictions communales et d'arrondissement ne sont pas compétentes pour les litiges relatifs au statut personnel et les affaires immobilières ainsi que les résiliations des baux commerciaux fondées sur le défaut de payement. La compétence de ces juridictions se limite essentiellement aux loyers.
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2. Les tribunaux de première instance (juridiction de premier degré) 1° Composition: En plus du président, les tribunaux de première instance sont composés de d'agents judiciaires et d'auxiliaires de justice: Les juges du jugement: ce sont des magistrats assis, ils se répartissent entre juges et juges suppléants. Les magistrats du ministère public appelé également parquet, celuici représente la société entière et l'intérêt général, il s'agit du procureur du Roi et de ses substituts. Les auxiliaires de justice qui sont le secrétariat greffe et le secrétariat du parquet. Le tribunal de première instance est une juridiction à juge unique, assisté d'un greffier. En matière pénale, la présence du ministère public est obligatoire. 2° Compétence : Il est divisé en 6 sections et cela suivant la nature des affaires: civiles ; de statut personnel et successoral ; commerciales ; immobilières, sociales et pénales. Il s'agit donc d'une juridiction à juge unique, sauf en matière sociale où on applique le principe de la collégialité puisque le juge est assisté de 4 assesseurs, comprenant un nombre égal d'assesseurs employeurs et d'assesseurs ouvriers. Avec la création des tribunaux de la famille, les litiges concernant les divorces relèvent désormais de ce tribunal et non pas du TPI. Le montant litigieux que ces tribunaux sont appelés à connaître peut être porté jusqu'à la valeur de 3000 DHS, que ce soit en premier ou en dernier instance. Lorsque le montant du litige ne dépasse pas cette somme, l'appel est exclu, mais subsiste le pourvoi en cassation devant la cour suprême. En matière pénale, ces tribunaux ne tranchent que les contraventions et les délits, pour ce qui est des crimes, c'est la cour d'appel qui est compétente. 3. La cour d'Appel (juridiction du second degré) 1° Composition: La cour d'appel est une juridiction collégiale, cela veut dire que ses décisions ne sont pas rendues par un juge mais par plusieurs juges formant un collège. Le principe de la collégialité de la justice présente de nombreux avantages. D'abord, la collégialité contribue au bienjugé en faisant place à une discussion entre les juges au moment des délibérations, pesant les mérites de chacune des thèses en présence. Ensuite la collégialité est un facteur d'indépendance, car le secret du délibéré empêche d'attribuer la décision un tel juge nommément désigné. Enfin la collégialité est garante de l'impartialité des juges qui se contrôlant respectivement, ne peuvent favoriser ou défavoriser l'un des plaideurs. Les cours d'appel forment ce qu'on appelle les juridictions du second degré. Elles sont constituées de deux types de personnels: Les magistrats du siège appelés conseillers et qui sont chargés de rendre la justice.
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Le ministère public composé du procureur général du Roi et de ses substituts généraux. En matière pénale, sa présence est obligatoire, il représente l'intérêt général. Le secrétariat greffe et le secrétariat du parquet. La cour d'appel se divise en chambres qui correspondent normalement aux sections des tribunaux de première instance. A la tête de chaque chambre se trouve un président et la cour d'appel est dirigée par un président. 2° Compétence: La cour d'appel connaît des appels contre les jugements des tribunaux de première instance (premier degré). Le principe du double degré de juridiction (l'appel) permet à tout plaideur qui n'a pas obtenu satisfaction devant ses premiers juges (tribunal de première instance) de demander un nouvel examen de son procès à la juridiction hiérarchiquement supérieure (la cour d'appel). Le principe du double degré de juridiction est considéré comme une garantie de bonne justice: tout juge étant faillible (peut commettre une erreur), il est bon que soit offerte une possibilité de redressement des erreurs involontaires, confiée à des magistrats plus expérimentés. La réforme judiciaire de 1974 dote la cour d'appel, en plus des compétences mentionnées ci dessus, d'une autre attribution notamment en ce qui concerne les crimes. C'est la chambre criminelle qui les juge, elle est composée de cinq magistrats de carrière. 4. La cour suprême La cour suprême a été créée au lendemain de l'indépendance du Maroc en vertu du Dahir du 27/09/1957. C'est le sommet de la pyramide des tribunaux judiciaires du royaume. Toute décision en dernier ressort (arrêts émanant de la cour d'appel ou exceptionnellement, jugements rendus en premier et dernier ressort) peut être attaquée par un pourvoi en cassation formé par le plaideur qui n'a pas obtenu gain de cause. Par son pourvoi, ce dernier demande à la cour suprême d'examiner l'arrêt ou le jugement attaqué et de dire s'il a été rendu conformément aux règles de droit en vigueur. La cour suprême ne peut pas réexaminer les faits et en donner une autre version. Elle doit considérer ces faits comme établis par l'arrêt ou le jugement attaqué. Ce que le plaideur demande à la cour suprême, c'est de dire si les règles de droit (lois et règlements) ont été bien appliquées à ces faits, si la cour ou le tribunal dont la décision est attaquée a bien appliqué à l'affaire qui lui était soumise la règle de droit qui devrait être mise en oeuvre et si cette règle a été bien comprise, bien interprétée par cette décision. Ce rôle de la cour suprême est résumé par la formule: la cour suprême ne juge pas les faits, elle juge les jugements. La cour suprême joue donc un rôle d'une extrême importance. En examinant les arrêts et les jugements attaqués du seul point de vue de la correcte application de la loi, la cour suprême émet son point de vue sur le sens de la règle de droit et sur l'interprétation qu'il convient de lui donner. Ses arrêts orientent les diverses juridictions du royaume en leur indiquant comment il convient d'interpréter telle ou telle règle de droit, elle contribue à la formation de ce qu'on
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appelle la jurisprudence. 1° Composition: La cour suprême comprend cinq chambres: une chambre civile dite de première chambre ; une chambre de statut personnel et successoral ; une chambre pénale, une chambre sociale et une chambre administrative. Chacune de ces chambres peut être divisée en sections. Concernant le personnel de justice qui siège à la cour suprême, celleci comprend les magistrats de siège qui sont le premier président, les présidents de chambres et les conseillers. Le ministère public est représenté par le procureur général du Roi, assisté par des avocats généraux ; d'un secrétariat greffe et d'un secrétariat du parquet. 2° Compétence: l'article 353 du code de la procédure civile énumère les compétences de la cour suprême qui sont au nombre de sept dont les plus importantes restent à notre avis les suivantes: les pourvois en cassation formulés contre les décisions rendues en dernier ressort par toutes les juridictions du royaume ; les recours en annulation pour excès de pouvoir formulés contre les décisions du premier ministre. 3° Mécanisme du pourvoi en cassation: le jugement du pourvoi est susceptible de donner lieu à un arrêt de rejet, à un arrêt de cassation avec renvoi, à un arrêt de cassation sans renvoi. L'arrêt de rejet: est prononcé par la cour suprême lorsque aucun des moyens présentés n'est reconnu fondé, l'arrêt de rejet met définitivement fin à la procédure. L'arrêt de rejet ne peut plus faire l’objet d'aucun recours, la décision attaquée à tort devient irrévocable, et c'est elle qui reçoit exécution ; L’arrêt de cassation avec renvoi : si la cour suprême estime que la loi a été violée (mal jugée en droit, inobservation des formes de procédure, manque de base légale...), elle peut annuler la décision irrégulièrement rendue sans pouvoir lui substituer sa propre décision. Pour le rejugement de l'affaire, elle doit renvoyer à une autre juridiction de même nature et de même degré ; L'arrêt de cassation sans renvoi : cet arrêt est rendu notamment lorsque le renvoi est inutile, parce que la juridiction inférieure n'aura rien à juger. C'est l'hypothèse de la cassation pour contrariété de jugement, le tribunal de première instance et la cour d'appel rendent à propos de la même affaire des jugements complètement contraires, la cour suprême rétablie la légalité en annulant la décision rendue en contradiction avec la règle de droit.
II. Les tribunaux administratifs
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Ces tribunaux ont été crées en vertu de la loi 4190 adoptée le 11/07/1991 promulguée par Dahir du 10/09/1993.publié au B.O du 3/11/1993. Ils sont devenus effectifs le premier mars 1994. Le décret du 3/11/93 fixe le nombre de ces tribunaux à sept (art. 1): Rabat Casablanca Fès Marrakech Meknès Agadir Oujda. 1. Organisation Comme le tribunal de première instance, le tribunal administratif tient ses audiences et rend ses jugements par trois magistrats assistés d'un greffier. La présence du commissaire royal de la loi et du droit est obligatoire. Celuici expose en toute indépendance ses conclusions écrites et orales sur les circonstances de fait et les règles de droit applicables et cela sans prendre part aux jugements. Les jugements rendus par le tribunal administratif sont portés en appel devant la cour suprême. 2. Compétence Les tribunaux administratifs exercent des compétences assez variées. Ils statuent en premier ressort notamment sur : les recours en annulation pour excès de pouvoir contre les décisions administratives à l'exception des actes réglementaires ou individuels du premier ministre qui relèvent de la chambre administrative de la cour suprême ; les litiges concernant les contrats administratifs ; les actions en réparation des dommages causés par les actes ou les activités de l'administration ; les recours en matière électorale ; les litiges nés de l'application de la législation fiscale et du recouvrement des créances publiques ; les différends relatifs à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique ... En somme, les tribunaux administratifs connaissent des litiges dans lesquels l'administration est en cause. Le discours royal annonçant la création des tribunaux administratifs, souligne l'objectif principal de ce nouvel ordre de juridiction qui est le renforcement de la protection des droits de l'homme et des libertés individuelles et collectives contre les abus de l'administration.
III. Les tribunaux de commerce
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C'est le Dahir du 12/2/1997 portant promulgation de la loi n° 5395 qui institue les juridictions de commerce au Maroc. L'organisation judiciaire se trouve donc complétée par la création des tribunaux de commerce et des cours d'appels de commerce dont nous allons étudier la composition et la compétence. 1. Composition et organisation des tribunaux de commerce et des cours d'appel de commerce Contrairement à ce qui se passe en France, la composition de ces tribunaux ne comprend pas de juges élus. Les juges qui les composent sont recrutés et désignés par le ministère de tutelle qui est le ministère de la justice. Les tribunaux de commerce comprennent un président, des vicesprésidents et des magistrats, un ministère public composé du procureur général du Roi et de un ou plusieurs substituts, un greffe et un secrétariat du ministère public. Ces tribunaux peuvent être divisés en chambres selon la nature des affaires dont ils sont saisis, chaque chambre pouvant instruire les affaires soumises au tribunal et y statuer. Le président du tribunal désigne un magistrat chargé de suivi des procédures d'exécution. En ce qui concerne la cour d'appel de commerce, elle est divisée en chambres suivant la nature des affaires dont elle est saisie avec possibilité pour chaque chambre d'instruire les affaires soumises à la cours et y statuer. Les audiences de toutes ces juridictions sont tenues et leurs jugements rendus par trois magistrats, dont un président, assisté d'un greffier. 2. La compétence des tribunaux de commerce Cette compétence est très large et peut attirer devant ces juridictions même les non commerçants soit de leur plein gré soit sans leur accord. Il convient donc de distinguer les cas où ces juridictions sont compétentes pour trancher les litiges entre commerçants et ceux où elles le sont pour trancher des différends entre commerçants et noncommerçants. Cas où les tribunaux sont compétents pour trancher les litiges nés entre commerçants : ce sont les litiges où le demandeur et le défendeur sont tous les deux des entreprises commerciales. Normalement c'est la compétence d'attribution par essence de ces tribunaux. Les tribunaux sont compétents pour connaître : des actions relatives aux contrats commerciaux ; des actions entre commerçants à l'occasion de leurs activités commerciales ; des actions relatives aux effets de commerce ; des différends entre associés d'une société commerciale ; des différends à raison de fonds de commerce. Donc il s'agit de litiges commerciaux et différends pouvant naître entre entreprises
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commerciales, personnelles et sociétaires soit à raison de leur activités lucratives, soit à raison des fonds de commerce. La loi ajoute que les parties pouvant convenir de soumettre les différends cidessus énumérés à la procédure d'arbitrage. Il convient de signaler que l'arbitrage est une procédure facultative mise à la disposition des plaideurs par le législateur en matière civile ; elle est assez souvent suivie par les entreprises commerciales pour le règlement de leurs différends. Lorsque les parties se sont mises d'accord (compromis et convention d'arbitrage) sur une solution à leur conflit, c'est le juge commercial qui contrôle les conditions de fond et de forme de ces compromis et veille à leur bonne application. En ce qui concerne la compétence matérielle (montant litigieux) des tribunaux de commerce, ceuxci sont compétents pour connaître, en premier et dernier ressort des demandes dont le montant n'excède pas la valeur de 9000 dhs et en premier ressort toutes les demandes d'une valeur supérieure à ce montant. Pour les affaires de faible importance, elles sont tranchées en premier et dernier ressort par le tribunal de commerce, mais subsiste le pourvoi en cassation devant la cour suprême. Au delà de 9000 dhs, le tribunal de commerce connaît de l'action en justice seulement en premier ressort et ces jugements sont susceptibles d'appel devant la cour d'appel de commerce dont les arrêts sont, à leur tour, susceptibles d'un pourvoi en cassation. Cas où le tribunal de commerce est compétent pour trancher les litiges entre un commerçant et un noncommerçant : Un noncommerçant peut être justiciable de ces nouvelles juridictions soit de son plein gré, soit sans son accord. En effet, la loi prévoit que le commerçant peut convenir avec le non commerçant d'attribuer compétence au tribunal de commerce pour connaître des litiges pouvant les opposer à l'occasion de l'exercice de l'une des activités du commerçant. Dans ce cas, il y a une condition sine qua non pour donner compétence au tribunal de commerce dans de tels litiges, il faut qu'il y ait accord entre les parties. Un non commerçant peut se trouver justiciable des tribunaux de commerce même sans son consentement, dans les actions relatives aux effets de commerce (la lettre de change, le billet à ordre, le chèque). 3. La procédure des référés Le président du tribunal de commerce peut statuer, par voie d’ordonnance de référé quand : il y a urgence ; il n’y a pas de difficultés sérieuses quant au fond du problème (ex. désignation d’un expert).
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Les voies de recours Cour Suprême Chambre commerciale Pourvoi Cour d’appel de commerce Appel Tribunal de commerce Procès supérieurs à 9 000 dh
Procès inférieurs à 9 000 dh
Thème 4.
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Quelques règles de procédures On appelle "procédure" l'ensemble des formalités qui doivent être suivies pour soumettre une prétention à un juge. I. Principes généraux de procédures 1. La procédure peut être inquisitoire ou accusatoire Dans la procédure inquisitoire, Le juge a le pouvoir de diriger luimême l'instruction du procès. Il ordonne les mesures d'instruction qui lui paraissent nécessaire pour découvrir la vérité, il retarde ou accélère la procédure, il a le devoir de tout mettre en oeuvre pour découvrir la vérité, même contre le gré des plaideurs.. C'est la procédure utilisée en matière pénale où le litige met en jeu des intérêts publics. Dans le procédure accusatoire, ce sont les plaideurs qui font l'instruction de leur affaire rassemblant les preuves, développant leurs arguments....Cette procédure est utilisée en matière civile où les intérêts en litige sont des intérêts d'ordre privé. Le service public de justice est au service des personnes privées. Le juge n'est plus alors qu'un arbitre entre les plaideurs. 2. La procédure est contradictoire Tout jugement est le résultat d'une confrontation entre les prétentions des plaideurs. Le juge doit entendre les deux parties avec une égale attention. Chaque plaideur doit pouvoir contredire les arguments de son adversaire, opposer ses preuves à celles de la partie adverses. Ce principe est général, il est applicable à tous les ordres de juridictions, à tous les plaideurs. 3. La procédure est publique Le pouvoir de justice doit s'exercer en pleine lumière, la clandestinité faisant douter de l'impartialité du juge. Chacun peut ainsi apprécier comment la justice est rendue. Cependant dans les cas où la publicité des débats risquerait de créer le scandale, ou de divulguer des informations qui doivent rester dans le secret de famille (cas de divorce), l'audience est alors à huis clos. Tout jugement doit être lu en audience publique.
II. Compétence territoriale d’une juridiction 1. La règle La règle est la même devant toutes les juridictions: le principe est que le tribunal compétent est celui du domicile du défendeur. 2. Les exceptions
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Ce principe souffre de plusieurs exceptions notamment : Absence du domicile du défendeur : le tribunal compétent est celui du domicile du demandeur ; Pluralité de défendeurs : le demandeur peut assigner au tribunal du domicile de l'un des défendeurs ; Le défendeur est une société : le tribunal compétent est celui du siège social, mais le demandeur peut assigner au tribunal du lieu d'une des succursales de la société ; Litige en matière contractuelle le demandeur a le choix entre les tribunaux du domicile du défendeur, du lieu de la livraison de la chose ou de la prestation de service. Litige en matière délictuelle : la juridiction compétente est celle du domicile du défendeur, ou du lieu du fait dommageable.
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DOSSIER III. LES ACTEURS DE LA VIE JURIDIQUE
L ’intérêt que chacun a pour la personne humaine dépend du point de vue où il se place, de sa spécialité, de sa curiosité professionnelle. Ainsi, le commerçant privilégie dans l’homme l’aspect « consommateur », …le juriste, lui, est sensible à l’aspect « juridique » de l’individu, il voit en lui « une personne juridique », c’estàdire apte à avoir des droits et tenue d’assumer des obligations et, ce faisant, de jouer un rôle dans la vie juridique et économique. Tout être humain estil « une personne humaine » ?
Dans la vie courante, de nombreux rapports de droits sont noués entre des sociétés, des
associations, des syndicats, des communes … qui ne sont pas des individus, des personnes physiques, et sont cependant des acteurs de la vie juridique. Ce sont des « personnes morales ». Quelle est l’étendue de leur capacité juridique et sur quoi se fondentelle ? Les acteurs de la vie des affaires sont donc soit des êtres humains les personnes physiques (thème 1), soit des groupements d'individus personnes morales (thème 2).
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Thème 1. Les personnes physiques
N ous allons définir la personnalité juridique et les moyens juridiques de sa défense. I. La personnalité juridique 1. L'existence de la personnalité juridique En règle générale, tout être humain est sujet de droit et cela dès sa naissance. Cela signifie qu'il peut détenir diverses prérogatives ou être soumis à diverses obligations. La qualité de sujet de droit, c'est donc une aptitude, une possibilité d'avoir des droits subjectifs ou, inversement d'être tenu de certaines obligations dans ces rapports avec autrui. L'existence de la personnalité juridique est calquée sur la durée de la vie humaine, elle débute à la naissance et elle prend fin à la mort de la personne. 2. La protection de la personnalité juridique La personnalité juridique est protégée par un certain nombre de droits notamment: le droit à l'intégrité physique (interdiction de vendre son corps) ; le droit au respect de l'intégrité morale (le droit à l'honneur et à la réputation) ; le respect de la vie privée (intimité de la vie familiale) ; le respect de la liberté...etc. Ces droits de la personnalité étant indissolublement attachés à la personne humaine, sont en principe incessibles (hors du commerce) et absolus (s'imposant au respect de tous). Leur violation ouvre le droit à des sanctions civiles (exp. dommages et intérêts...) et/ou pénales (exp. en cas d'homicide, de coups et blessure, de diffamation, d'atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui...etc.)
II. L’identification des personnes physiques Qu'il s'agisse des personnes morales ou physiques, les éléments de base de leur identification sont le nom patronymique, le domicile, les actes de l'état civil et la nationalité. 1. Le nom patronymique Le nom patronymique est le premier élément d'identification des personnes, leur appellation
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obligatoire complétée par un prénom.
L'attribution du nom patronymique Le nom patronymique est acquis, en principe, par un rapport de filiation: l'enfant prend le nom de son père. Le prénom sert à individualiser la personne au sein de sa famille, il est librement choisi par les parents. L'usage du nom patronymique L'usage du nom patronymique et du prénom est une obligation car ils servent tous deux à individualiser chaque être humain. Le nom est lié à la personne qu’il désigne : il est immuable, c'estàdire qu'une personne ne peut en changer librement, sa transmission dans la famille doit se faire sans modification.. Toutefois, les femmes ont le droit de porter le nom de leur conjoint mais ne perdent pas le leur. Il est également possible d'utiliser un pseudonyme, nom d'emprunt qu'un individu choisi pour dissimuler son identité (le cas des écrivains, des acteurs, …). L'usage du nom est un droit. On ne peut pas en disposer ou le vendre : chaque être humain a sur son nom patronymique un droit tant incessible (hors de commerce) qu'imprescriptible (il ne se perd pas par le nonusage). Mais ce nom patronymique peut devenir objet de propriété incorporelle soit à titre commercial (exp. une enseigne évoquant l'emplacement du commerce), soit parce que devenu une dénomination sociale, il se détache de la personne physique qui le porte pour s'appliquer à la personne morale qu'il distingue (une société par exp.). Ce droit est en outre absolu, chaque personne physique peut donc interdire à un tiers d'usurper son nom. 2. Le domicile Le domicile est le siège juridique de la personne, l'endroit où elle est située pour l'application des règles du droit. La nécessité du domicile Le domicile de toute personne est au lieu où elle a son principal établissement. Le domicile ne doit pas être confondu avec la résidence qui est l'endroit où une personne séjourne sans avoir l'intention d'en faire son "principal établissement". Le caractère principal du domicile peut être déterminé par des indices probants: l'endroit où une personne séjourne le plus souvent, exerce sa profession, a sa famille... etc. Dans certaines hypothèses, la loi attribue elle même un domicile à certains individus, que ce soit en raison des liens familiaux (par exp. le mineur non émancipé est domicilié chez ses
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parents ou son tuteur ; la femme mariée a pour domicile celui de son mari), ou de leur activité: les fonctionnaires nommés à vie les juges du siège par exp. sont domiciliés au lieu où ils exercent leur fonction. L'importance du domicile La détermination du domicile est importante en cas de litige entre deux personnes: le tribunal chargé de trancher ce litige est en principe celui du domicile du défendeur ; tous les actes relatifs au procès sont notifiés aux parties à leur domicile. 3. Les actes de l'état civil L'état civil est le statut individuel (nom, prénom, âge, sexe) et familial (filiation, mariage, divorce) d'un individu par opposition à son statut professionnel. Il est très important car il est la source de droits, mais surtout d'obligations. Les principaux faits et actes de l'état civil ayant une force probante (preuve) particulière. Les actes de l'état civil sont des actes dits "authentiques" ayant pour objet de constater les événements dont dépend l'état civil des personnes, dressés par des agents officiels dits "officiers de l'état civil". Quant aux faits qui sont soumis à l'obligation de la déclaration à l'état civil, ce sont la naissance et le décès. 4. La nationalité La nationalité est un lien de droit entre une personne physique ou morale et un Etat souverain. La nationalité précise l'état des personnes au sein d'un ordre politique. Cet état indique si l'individu est marocain ou étranger. La précision de la nationalité est essentielle compte tenu de la disparité de régime entre nationaux et étrangers. Sur le plan de droit public, l'étranger n'a ni le droit de vote ni le droit d'éligibilité. Sur le plan du droit privé, les étrangers sont frappés par un certains nombre d'interdictions énumérées par le DOC notamment l'interdiction d'exercer le commerce sauf autorisation spéciale. Les règles qui gouvernent l'attribution de la nationalité aux personnes physiques ou morales sont énoncées par le Dahir du 6 septembre 1958 portant code de la nationalité. Celuici distingue deux types de nationalités: la nationalité marocaine d'origine qui se réalise selon deux voies, le Jus sanguini ou la filiation paternelle, le Jus soli ou la naissance sur le sol marocain. Le deuxième type de nationalité est la nationalité d'acquisition, elle est acquise en cours de vie, elle n'est pas automatique mais soumise à un certains nombre de conditions (mariage avec un marocain (e)). Établissement durable au Maroc ...).
III. La capacité des personnes physiques
Les personnes juridiques sont sujets actifs et passifs de droits. Ces droits, multiples et 31
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de natures très variées, permettent dans la vie en société, le respect de chacun par les autres. Ainsi pour les personnes physiques, ces droits assurent la protection de l’ « homme économique » (droit de propriété, droit au travail…) comme celle de l’ « homme physique » (droit au respect de son corps, droit de libre circulation …) ou de l’« homme intellectuel » (liberté de pensée, liberté de presse…). La reconnaissance des droits de la personne juridique étant admise, deux questions se posent : Si les hommes naissent et demeurent égaux en droits, est ce qu’ils jouissent tous des mêmes droits ? Cette capacité de jouissance ne souffretelle d’aucune exception pour les personnes physiques ? Comment s’appliquetelle aux personnes morales ? Jouir d’un droit est une chose ; pouvoir l’exercer en est une autre. Exercer un droit, c’est s’en servir (exprimer ses opinions, vendre un bien dont on est propriétaire, choisir son travail…), c’est aussi pouvoir défendre son droit lorsqu’il est attaqué, si les tiers ne le respectent pas : agir en justice pour obtenir le payement d’une créance, faire cesser une diffamation … Toutes les personnes juridiques ontelles la capacité d’exercer leurs droits ? Sinon pourquoi cette capacité n’existetelle ou estelle limitée ? Dans ces cas qui exerce leur droits à leur place ? Et, si la personne qui n’a pas la « capacité d’exercice d’un droit » l’exerce quand même, quelles sont les sanctions ? On distingue deux sortes de capacité : La capacité de jouissance : c’est l’aptitude à jouir d’un droit, à en être titulaire ; La capacité d’exercice : c’est l’aptitude, pour une personne titulaire d’un droit, à l’exercer. 1. Les incapacités de jouissance Les incapacités de jouissance des personnes physiques Certains individus sont privés de certains subjectifs. Pour les personnes physiques, l’incapacité de jouissance est très exceptionnelle, citons quelques cas de ce type d’incapacité, celle de se marier avant l’âge de la majorité matrimoniale (15 ans pour les filles et 18 ans pour les garçons). Ce type d’incapacité est appelé l’incapacité de protection. Une autre catégorie d’incapacité de jouissance est l’incapacité de sanction, elle poursuit un but répressif, et accompagne une condamnation en matière pénale. En matière commerciale, le jugement prononçant la faillite personnelle entraîne l’interdiction de diriger, administrer ou contrôler toute entreprise commerciale.
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Incapacité de jouissance des personnes morales Les personnes morales ne peuvent pas accomplir les actes qui ne concourent pas à la réalisation de leur objet social (l’objet pour lequel elles sont crées). 2. Les incapacités d’exercice En droit marocain, la majorité se situe à l’âge de 21 ans. A 18 ans, Cela veut dire qu’au dessous de cet âge, l’incapacité de l’individu est totale, il n’est pas engagé par les obligations contractées par lui, et tous ces actes sont nuls. Incapacités d’exercice des personnes physiques Des incapacités d ‘exercice existent pour protéger les incapables contre euxmêmes. Sont frappés d’incapacités d’exercice : les mineurs qui sont vulnérables en raison de leur naïveté et de leur inexpérience ; certains majeurs parce qu’ils sont gravement atteints dans leurs facultés mentales ; parce qu’ils ont un comportement anormal sous certains aspects, une déficience mentale légère et ont besoin d’être conseillés, aidés dans la vie juridique. Exercice des droits des mineurs En sont chargés : Les parents qui ont l’autorité parentale ; Le juge des tutelles ; Le tuteur contrôlé par le juge des tutelles. Le mineur peut seul faire quelques actes : Les actes dits « conservatoires » c’estàdire ceux qui permettent la conservation, la protection de ses biens (réparations par exemple) et les actes de la vie courante ; Certains actes touchant sa personnes (mariage) ou son emploi (il peut conclure un contrat de travail à partir de 15 ans (avec autorisation du tuteur) ; Les actes dits de « disposition » lui sont interdits (exp. Acheter, vendre, donner, hypothéquer un bien). Le mineur peut être émancipé : c’estàdire se voir attribuer la capacité d’un individu majeur à partir de 18 ans à la demande de ses parents, ou par décision du juge. En droit marocain, le mineur émancipé peut exercer le commerce. Exercice des droits des majeurs incapables Ces majeurs peuvent être soumis à deux régimes de protection : Le régime de la tutelle Le majeur en tutelle est incapable comme un mineur. Il est représenté par un tuteur dans tous les actes de la vie juridique.
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Le régime de la curatelle
Il s’agit de ceux qui, par leur prodigalité (dépenses excessives ou déraisonnables), leur oisiveté (absence de travail rémunérateur), s’exposent à tomber dans le besoin et à compromettre leurs obligations familiales. Les majeurs soumis à la curatelle ne sont que des demiincapables, ils peuvent faire seuls les actes de la vie courante (actes dits d’administration). Pour les actes les plus importants (vente, achat, hypothèque), il leur faut l’assistance d’un curateur. L’acte en ce cas est fait par l’intéressé luimême, mais pour qu’il soit valable, il lui faut la signature du curateur, attestant que l’acte a été approuvé par lui. Sur le plan de la procédure, cette incapacité d’exercice qui frappent certains majeurs pour cause de démence ou de prodigalité ne peut se prononcé que par un juge. Il faut des moyens de preuve, expertise médicale notamment, elle aboutit à placer les intéressés en régime de tutelle (les aliénés) ou en curatelle (les prodiges). Incapacités d’exercice des personnes morales Les personne morales ne peuvent pas elles mêmes agir, elle ne peuvent exercer leurs droits que par l’intermédiaire de leurs représentants. Les représentants de la personne morale n’agissent valablement que si ils respectent les statuts, la loi ou les assemblées des membres de groupe qui constituent la personne morale. Ces représentants ne sont donc que des interprètes de la volonté de la personne morale, volonté qui est effectivement exercée, mais par leur intermédiaire. La personne morale a donc la capacité d’exercice. Sanctions des incapacités L’acte fait par un incapable (qu’il s’agisse d’une incapacité de jouissance ou d’exercice) est nul : toutes les obligations auxquelles il a donné naissance s’effacent. L’acte est censé n’avoir jamais été fait. La nullité opère rétroactivement, il faut donc remettre les contractants dans l’état où ils étaient avant l’acte : par exemple pour une vente, l’acheteur doit rendre au vendeur le bien vendu, et réciproquement le vendeur doit rendre l’argent qu’il a reçu. Suivant l’incapacité qui frappent l’un des signataires de l’acte (incapacité de jouissance ou d’exercice), la nullité n’est pas la même : la nullité encourue en cas d’incapacité de jouissance est une nullité absolue ; la nullité encourue en cas d’incapacité d’exercice est une nullité relative. La nullité absolue Elle sanctionne un non respect d’une règle d’ordre public. Elle peut être demandée par toute personne y ayant intérêt et ce pendant trente ans. L’acte ne peut être confirmé. La nullité relative
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Elle protège l’incapable, elle ne donc être demandée que par lui (lorsque son incapacité aura cessé) ou par son représentant légal. L’acte peut être confirmé par l’incapable lorsque l’incapacité a cessé. Cette confirmation peut être expresse (faite par écrit) ou tacite (lorsque par exemple l’incapable exécute les obligations qui lui incombe suivant les termes du contrat.
Thème 2. Les personnes morales
L a personne morale groupe des personnes physiques en une communauté poursuivant un but spécifique et dont l'existence juridique est distincte de celle de ses membres.
I. Conditions d’existence des personnes morales Pour qu’un groupe ait la personnalité morale, il faut : Que la loi la lui ait accordée ;
Qu’il se soit constitué en respectant les formalités légales prévues dans son cas. Ce sont en général : La rédaction de « statuts » précisant son identité (raison sociale, siège social), sa nature et son but (son « objet), son patrimoine (« son capital »), ses règles de fonctionnement et de dissolution ; La publication et/ou le dépôt de ses statuts qui informent les tiers de sa création, donc de l’existence du nouvel être juridique. Cette publication fait naître l’être juridique.
II. Les différentes personnes morales Il existe une multitude d'espèce de personnes morales, pour en faire le tableau, il est commode d'utiliser la classification du droit (Droit public/Droit privé) et de distinguer les personnes morales de droit public des personnes morales de droit privé. Mais le développement de l'intervention de l'Etat dans des domaines traditionnellement réservés à l'initiative privée avait contribué à modifier cette distinction, en faisant apparaître une troisième catégorie de personne morale: les personnes morales de droit mixte. 1. Les personnes morales de droit public Les personnes morales de droit public se caractérisent par la détention de prérogative de puissance publique, leur permettant notamment, de créer, unilatéralement des règles de droit obligatoire pour leurs destinataires. Les personnes morales de droit public ne peuvent émaner d'initiatives privées, elles sont créées par la loi. En tête il convient de citer :
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l'Etat, c'est la personne morale qui est apparue historiquement la première et qui est le plus facilement reconnaissable. Les collectivités territoriales : les communes, les provinces, les régions. Les collectivités territoriales sont compétentes pour régler toutes affaires les concernant sous réserve de ne pas remettre en cause les intérêts généraux de l'Etat (représenté par le gouverneur). Les établissements publics qui sont des organismes chargés d'un service public. Le service public est une activité ayant pour but de satisfaire des besoins d'intérêt général. C'est la loi qui crée les établissements publics en les dotant d'un budget propre et d'une gestion propre. A la différence des collectivités territoriales, les établissements publics sont soumis au "principe de spécialité", c'estàdire qu'ils doivent limiter leurs interventions au domaine que la loi ou le règlement les ayant crée leur attribue. En principe, les établissements publics sont "administratifs", car ils gèrent de manière autonome, une activité normalement réservée à l'administration. Ne sont pas administratifs les établissements auxquels la loi reconnaît un caractère: industriel et commercial (établissement public industriel et commercial (EPIC)) dont le fonctionnement relève essentiellement du droit privé ; scientifique, culturel et professionnel, exemple les universités ; social, les hôpitaux. 2. Les personnes morales de droit privé
A la base de la personnalité morale, il y a en principe une communauté de volontés
individuelles. Ces volontés sont naturellement celles des personnes physiques. Mais des personnes morales existantes peuvent aussi se grouper, soit avec d'autres personnes morales, soit avec des personnes physiques. Cet accord entre les participants est un contrat dont nous examinerons les principaux types : les sociétés, les associations et les syndicats. Les sociétés C'est le Dahir formant code des Obligations et Contrats qui constitue le droit commun et le texte de base régissant les sociétés au Maroc. Ce Dahir régit les sociétés commerciales aux côtés du Dahir formant code de commerce. Les sociétés sont des personnes morales de droit privé regroupant deux ou plusieurs personnes, appelées associés, qui conviennent de mettre quelque chose en commun (les apports) en vue de partager les bénéfices ou les avantages matériels qui pourront en résulter (Art. 982 et s. du DOC). On distingue deux types de sociétés selon la nature de leurs activités:
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Les sociétés civiles : ce sont celles qui ne font pas d'actes de commerce et qui ne revêtent pas l'une des cinq formes indiquées cidessous à propos des sociétés commerciales. Dans ces sociétés civiles, les associés sont tenus personnellement et indéfiniment (mais non solidairement) des dettes sociales, au prorata de leur part dans le capital social. Si par exemple la société comprend 3 associés: A (50% du capital), B (30%) et C (20%) et si la société fait des pertes, on ne peut demander à A, B et C que respectivement 50%, 30%, 20% des dettes. Les sociétés commerciales : ce sont les cinq types de sociétés suivantes: Les sociétés en nom collectif (SNC) dont lesquelles les associés ont tous la qualité de commerçant. Au terme de la législation marocaine, cette société est celle que contractent deux ou un plus grand nombre de personnes et qui a pour objet de faire le commerce sous raison sociale. Les noms des associés pouvant seul faire partie de celleci. Les associés en nom collectif répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales: si la société a fait des pertes, il est donc possible de demander à l'un des associés de régler la totalité du passif social, cet associé se retournant ensuite contre ses coassociés pour leur demander leur part contributive. Les sociétés en commandite simple (SCS) groupant deux catégories d'associés: les commandités qui ont la qualité de commerçant et répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales ; les commanditaires qui ne sont pas des commerçants et ne répondent des dettes sociales qu'à concurrence du montant de leurs apports à la société. Les sociétés à responsabilité limitée (SARL) dont les associés n'ont pas la qualité de commerçant et ne sont responsables qu'à concurrence de leurs apports. Le nombre minimum de deux associés est à l'évidence nécessaire pour la constitution de la SARL, mais il n'y a pas de nombre maximum. Actuellement le montant du capital de la SARL doit être au moins de 10 000 dhs. Les sociétés anonymes (SA): la SA peut être définie comme une société dans laquelle tous les associés possèdent des titres négociables appelés actions, et ne sont tenus du passif social qu'à concurrence de leurs apports personnels. Le nombre des associés doit être de cinq au moins dans la société anonyme ; le capital de la SA doit être évalué exclusivement en monnaie locale (300 000 dh pour les SA ne faisant pas appel public à l'épargne, les autres à 3. 000 000 dh), un montant minimum spécial est exigé relativement à certaines sociétés anonymes telles que les sociétés de banque et les sociétés de crédits fonciers.
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Les sociétés en commandite par actions (SCA) se différenciant des sociétés en commandite simple par le fait que les commanditaires sont des actionnaires. Les groupements d’intérêt économique Les groupements d’intérêt économique (GIE) permettent à des entrepreneurs exerçant une activité économique de mettre en communs tous les moyens propres à faciliter ou à développer leur activité économique, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité. Les associations Les associations (Dahir du 15 nov 1958) groupent deux ou plusieurs personnes qui mettent en commun de façon permanente leurs connaissances ou leurs activités dans un but autre que de partager des bénéfices. Une association peut par exemple poursuivre un but charitable, culturel ou social. A la différence d'une société, une association peut faire des bénéfices, mais ne peut pas les distribuer à ses membres. Les syndicats Le syndicat est le groupement des gens de même métier ou exerçant des professions similaires. Le syndicat doit avoir exclusivement pour objet l'étude et la défense des droits ainsi que les intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu'individuels des personnes visées dans les statuts. 3. Les personnes morales de droit mixte Il s'agit des sociétés d'économie mixte où l'Etat détient une part généralement majoritaire du capital, et des entreprises nationalisées dont tout le capital est à l'Etat ou à des personnes morales de droit public. Si l'on considère le fond, ce sont des personnes morales publiques, elles gèrent un service public, il leur est fait application des règles de la comptabilité publique, le recours aux voies d'exécution forcée est interdit à leur encontre. En revanche, s'agissant de la forme, ses personnes morales de droit mixte empruntent ses règles au droit privé, du fait qu'elles se livrent à une activité économique et qu'un tel objectif rend préférable l'utilisation du droit commercial. (Exemple Etablissement Public Industriel et Commercial: ONE, SOMACA, OCP, ...).
III. Les attributs de la personne morale L'être moral est doté d'une personnalité juridique qui lui permet d'acquérir des droits, de contracter des obligations, d'ester (agir) en justice, d'engager sa responsabilité tout comme une personne physique dont elle diffère essentiellement par l'absence d'existence corporelle. Mais la personne morale doit se borner à agir dans la sphère d'activité fixée par ses fondateurs, elle doit respecter ce qu'on appelle "le principe de spécialité". La sanction de l'inobservation de
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cette règle est la nullité de l'acte.
1. L'état de la personne morale Les personnes morales sont identifiées comme les personnes physiques: Elles ont un nom (la dénomination sociale ou raison sociale) qu'elles peuvent faire protéger en justice pour éviter tout risque de confusion avec d'autres personnes. Toutes les sociétés sont désignées par une dénomination sociale sauf les sociétés en commandite simple (SCS) exerçant une activité sous raison sociale ne devant comprendre que le nom des associés commandités (soit de tous, soit d'un ou de plusieurs d'entre eux). Elles ont un domicile, généralement situé au lieu de la direction, on l'appelle siège de la personne morale ou siège social. Elles ont une nationalité: dire qu'une personne morale est marocaine veut dire qu'elle est soumise à la loi marocaine. L'ancienne législation marocaine relative à la nationalité des sociétés appelée marocanisation, considérait comme étant marocaines les sociétés ayant leur siège social au Maroc, et vérifiant d'autres conditions, notamment pour les sociétés anonymes dont la moitié du capital au moins doit appartenir aux personnes morales ou physiques marocaines. Cette législation a été abandonnée aujourd'hui au profit d'une nouvelle réglementation plus favorable à l'investissement étranger au Maroc (décret du 8 janv. 1990). 2. Le patrimoine de la personne morale La personne morale a des droits et des obligations qui lui sont propres et qui sont distincts de ceux de chacun des membres qui la composent, cela entraîne trois conséquences importantes : il n'y a pas de compensation possible entre la dette qu'une personne morale a envers un tiers et la dette que ce tiers a envers l'un des membres de l'être moral. Les créanciers de la personne morale ne peuvent se faire payer que sur le patrimoine de celle ci. Les membres de la personne morale ne sont pas personnellement tenus au payement des dettes de celleci, sauf pour certaines sociétés (SNC, et SCS: les commandités). Corrélativement, les créanciers de ses membres n'ont aucun droit sur le patrimoine de la personne morale. Ce principe connaît cependant quelques exceptions, de plus en plus, les créanciers de la personne morale peuvent se faire payer sur le patrimoine de certains membres, les dirigeants des personnes morales commerçantes (sociétés commerciales) peuvent être tenus de payer tout ou partie du passif de la personne morale lorsqu'ils ont commis des fautes de gestion. Les membres du groupement ne sont pas personnellement propriétaires des biens appartenant
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à la personne morale, elles ont seulement droit à un certain nombre de prestations fixées dans les statuts de celleci, par exemple le droit aux bénéfices, le droit de participation aux décisions, ces droits sont appelés droits sociaux. 3. Les pouvoirs de la personne morale Etant une notion abstraite dépourvue de force physique, la personne morale ne peut exercer ses droits et exécuter ses obligations que si une volonté se charge de les mettre en oeuvre pour son compte ; seules les personnes physiques peuvent exprimer cette volonté. Tout le statut juridique des pouvoirs de la personne morale tient dans la détermination des modalités selon lesquelles les personnes physiques agiront en son nom et pour son compte. Ces modalités varient selon les personnes morales mais on distingue d'une manière générale: Le pouvoir de décision Ce pouvoir consiste à décider de la conduite de la personne morale pour l'avenir et à se prononcer sur l'action menée par les organes d'exécution pour le passé, il appartient à la collectivité des personnes physiques ou morales membres du groupement. Les décisions collectives sont prises en assemblée. L'exercice du pouvoir de décision repose sur deux droits reconnus à chaque membre du groupement. L'un est le droit d'information sur les affaires de la personne morale, l'autre est le droit de vote. En principe, les décisions sont prises à la majorité, ceux qui ont la majorité possèdent le contrôle de la personne morale. Les décisions régulièrement prises s'imposent à tous les membres du groupement. Le pouvoir d'exécution Etant donné que la personne morale est une entité abstraite, elle ne peut agir que par l'intermédiaire d'une personne physique qui a le pouvoir de la représenter, ce pouvoir résulte soit de la loi (personne morale publique ou de droit mixte), soit des actes qui ont donné naissance à la personne morale (les statuts). Parmi les dirigeants de la personne morale, on appelle représentants légaux ou organe ceux qui ont la capacité d'engager la personne morale à l'égard des tiers. C'est le cas notamment des présidents des associations, des présidents ou des directeurs généraux pour les sociétés anonymes, des gérants pour les sociétés en nom collectifs, la SARL ou en commandite (simple et par action). Le pouvoir de contrôle Il appartient à la collectivité des membres de la personne morale qui l'exerce au moins une fois par an, à l'occasion du compte rendu de l'activité des dirigeants.
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DOSSIER IV LES CHOSES ET LES DROITS DISPONIBLES L es personnes juridiques (physiques et morales) jouissent de droits qui sont mis à leur disposition par la loi. Ces droits, lorsqu'ils portent sur des choses, sont appelés des biens dans le langage juridique ; ainsi le propriétaire d'une maison, est en termes juridiques, le titulaire d'un bien, a un droit de propriété sur une chose (la maison). L'utilité des choses dépend donc de l'usage juridique que l'on peut en faire. Le droit détermine ainsi: dans quelle mesure les choses sont susceptibles de faire l'objet de droits subjectifs (thème1) ; quels sont ces droits subjectifs dont elles (les choses) peuvent faire l'objet (thème 2).
Thème 1. La classification des biens
L es choses ou les biens de plusieurs classifications dont la plus fondamentale et néanmoins incomplète c'estàdire la distinction des meubles et des immeubles. C'est une classification incomplète car il existe d'autres catégories de choses qui ne rentrent pas dans cette classification. C'est pourquoi la doctrine propose d'autres critères de classification des choses, notamment celle qui intègre la catégorie de choses qui n'ont pas de propriétaire ou qui appartiennent au domaine public ou encore ne pouvant pas faire l'objet d'une propriété privée. D'autres distinctions sont apparues nécessaires, notamment la distinction des choses d'après leur rapport à la physique.
I. La classification des choses selon leur nature 1. Les choses fongibles et les choses non fongibles
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Les choses fongibles Les choses fongibles sont les choses dont il existe un nombre indéfini d'exemplaires identiques et qui sont par conséquent interchangeables: un objet fabriqué en série, des billets de banque, du blé etc..., ces choses sont des choses fongibles appelées encore choses de genre parce qu'elles sont individualisées par le genre auquel elles appartiennent. Les choses non fongibles Par opposition, les choses non fongibles appelées également choses certaines, ont une individualité ne permettant pas de les remplacer exactement, elles sont uniques : exemple telle maison, tel terrain, telle toile de maître, telle voiture immatriculée etc... Quel est l'intérêt de cette distinction ? Cette distinction a plusieurs intérêts que l'on peut souligner à travers cet exemple: quand un commerçant promet des choses fongibles, il peut livrer des exemplaires quelconques de cette choses. Si les choses qu'il se proposait de livrer à l'acheteur sont détruites même par une catastrophe naturelle (cas de force majeure), il n'est pas libéré de son engagement pour autant, car il n'a pas promis précisément les choses qui ont péri, mais des choses semblables. La situation est tout autre lorsque la vente a pour objet une chose certaine (non fongible), si celle ci est détruite, le vendeur ne peut être astreint à la livrer, il reste seulement à régler les conséquence de la perte: réparation pécuniaire à l'acheteur. 2. Les choses consomptibles et les choses non consomptibles Les choses consomptibles Les choses consomptibles sont des choses dont on ne peut se servir qu'en les détruisant, ce sont les choses qui se détruisent par le premier usage, par exemple les aliments, le tabac, le carburant, une somme d'argent...etc. Les choses non consomptibles Les choses non consomptibles sont au contraire celle dont on ne peut faire un usage prolongé, on peut en user d'une façon plus prolongée, sans en détruire la substance: le sol, une maison, des livres, des vêtements...etc. Quel est l'intérêt de cette distinction ? Cette distinction est importante lorsqu'il y a obligation de restitution. Ainsi différencieton le prêt à usage (droit de se servir d'une chose à condition de la rendre) et le prêt de consommation (droit de consommer la chose avec restitution par équivalent), c'estàdire restituer la même chose, quantité et qualité. 3. Les choses frugifères et les choses non frugifères Les choses frugifères
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La propriété d'une chose donne droit à ce qu'elle produit, il convient ici de retenir la distinction fondamentale entre le capital et le revenu. Concernant le revenu, il convient d'opposer les choses productives et celles qui ne le sont pas. La plupart des biens sont des biens qui découlent d'autres biens, par exemple, un champ donne une récolte, une maison un loyer...etc. Ces choses là sont qualifiées de frugifères. Parmi les revenus, on distingue entre les fruits et les produits. Juridiquement, les fruits sont ce qu'une chose produit périodiquement sans altération, ni diminution sensible de sa substance. Il s'agit des fruits naturels qui proviennent spontanément de la terre en l'absence de mise en valeur (foin, croît des animaux ...) ; des fruits industriels que l'on obtient par la culture, donc grâce à l'effort de l'homme (légume, blé...) et des fruits civils qui ne sortent pas matériellement de la chose mais que l'on retire d'un contrat dont la chose est l'objet (loyer d'une maison). A l'opposé, les produits sont prélevés à intervalles irréguliers, sont caractérisés par le fait qu'ils entament la substance de la chose, qu'ils finissent à la longue par épuiser: tel est le cas des matériaux extraits d'une carrière ou d'une mine. Les choses non frugifères Un petit nombre seulement de choses ou de biens ne procure aucun revenu par exemple les bijoux, ce sont des choses stériles ou non frugifères L'intérêt qu'il y a à distinguer entre les choses frugifères et les choses non frugifères se rencontre dans plusieurs situations notamment au niveau du droit fiscal: l'imposition est radicalement différente selon qu'il s'agit du capital ou du revenu.
II. La classification des choses en biens meubles et biens immeubles La distinction entre biens meubles et immeubles est une distinction fondée sur un critère physique: les immeubles ont un caractère de fixité, ils ne se déplacent pas. Les meubles sont dépourvus de ce caractère. 1. Les immeubles. On distingue entre les immeubles par nature et les immeubles par destination. Les immeubles par nature Il s'agit du sol et de tout ce qui s'y incorpore. Le terme immeuble veut dire les choses qui ne peuvent être déplacées: le sol, ce sont la surface et le soussol (carrières, mines), les choses incorporées au sol, ce sont tout d'abord les végétaux, les constructions dans tous leurs éléments, c'estàdire tout ce qui en fait partie y compris les canalisations d'eau et l'électricité. Les immeubles par destination Il s'agit en réalité pour cette catégorie d'immeubles de meubles, mais de meubles ayant un lien étroit avec un immeuble par nature. Ces meubles sont les accessoires en quelque sorte de l'immeuble: ils servent soit à sont exploitation, (exemple le tracteur servant à l'exploitation d'une terre, soit à sa décoration, exemple des gravures, des lustres...On peut dire que ces meubles forment avec l'immeuble un tout, ce qui en accroît la valeur économique.
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Des conditions juridiques sont exigées pour l'immobilisation par destination, le meuble n'acquière la qualification d'immeuble par destination que s' il appartient à la personne même qui est propriétaire de l'immeuble auquel il est destiné, les meubles et l'immeuble doivent appartenir au même propriétaire ; ensuite il faut également une volonté de créer et de maintenir un lien entre le meuble et l'immeuble. Si le propriétaire vend séparément l'immeuble ou les meubles qui lui sont affectés, la condition juridique n'est plus remplie, l'immeuble par destination perd sa qualification pour devenir un meuble. Quel est l'intérêt de cette distinction ? Supposons qu'une personne ne paye pas ses dettes et que ses créanciers obtiennent le droit de saisir ses biens. Si par exemple le débiteur est un agriculteur, propriétaire d'un domaine, les créanciers pratiqueront une saisie immobilière sur ce domaine. Devraientils pratiquer une saisie différente sur les instruments agricoles et le bétail qui sont les accessoires du fonds ? Instruments et bétails sont des meubles en réalité. Si on les considérait comme meubles juridiquement, les créanciers devraient pratiquer une saisie mobilière en ce qui les concerne. Il est clair que la solution serait mauvaise, on aboutirait ainsi à deux ventes différentes, le domaine (terre) serait vendu (adjugée) à une personne X, et les instruments agricoles et le bétail à une autre personne, ce qui entraînerait une perte de la valeur économique de l'immeuble. En considérant au contraire les meubles dont il s'agit comme des immeubles, une saisie globale pourra être pratiquée, qui sera une saisie immobilière. 2. Les meubles Tout ce qui n'est pas immeuble est meuble. Il est utile de voir les divers biens qui ont cette qualification juridique. On distingue ici entre les biens meubles par nature les biens meubles par anticipation. Les meubles par nature Ce sont les choses qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit qu'elles se meuvent par ellesmêmes, comme les animaux, soit qu'elles ne puissent changer de place que par l'effet d'une force étrangère comme les choses inanimée. Donc sont considérées comme meubles par nature toutes les choses mobiles qu'elles se déplacent elles même (animaux) ou par l'effet d'une force étrangère. Remarque 1° : des biens meubles par nature seront juridiquement considérés immeubles: s'ils perdent leur individualité pour constituer un immeuble, telles que les briques
servant à la construction d'une maison; après la construction de celleci, il n'y a plus de meubles, mais une maison, donc un immeuble ; s'ils sont l'accessoire d'un immeuble (immobilisation par destination); Remarque 2° : les biens meubles dans le langage juridique ne se limitent par au
mobilier "meubles meublants", il ne faut pas se tromper sur le sens de ce mot meuble, beaucoup plus vaste que dans le langage courant, le mot meuble peut signifier diverses choses
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notamment : marchandises, camions, navires, avions, outils etc... Meuble par anticipation Les meubles par anticipation sont en réalité des immeubles par nature traités comme des meubles (par anticipation) parce qu'ils sont destinés à le devenir dans un proche avenir en n'étant plus fixés au sol. L'intérêt de cette qualification est essentiellement d'ordre fiscal, l'impôt versé sur les meubles est moins élevé par rapport aux immeubles.
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Thème 2. La classification des droits disponibles IL est classique de distinguer parmi les droits disponibles, reconnus par la loi aux personnes juridiques, les droits patrimoniaux, et les droits extrapatrimoniaux. Ces derniers sont composés de droits familiaux et des droits de la personnalité, ceuxci n'ont aucune valeur pécuniaire et sont incessibles. Les droits patrimoniaux, eux sont évaluables en argent, ils forment le contenu du patrimoine et sont à la base du commerce juridique. Ce sont ces droits que nous étudierons en distinguant d'après leur objet : les droits dits personnels, car ils ont pour objet une prestation due par une personne juridique ; les droits dits réels (res en latin veut dire chose) car ils ont pour objet le pouvoir d'agir, à l'égard de tous, sur des choses corporelles ; Les droits dits intellectuels car ils ont pour objet le pouvoir d'agir, à l'égard de tous, sur des choses incorporelles.
I. Les droits personnels 1. Définition On l'appelle aussi droit de créance, ces deux expressions sont synonymes. Ce sont des droits qui permettent à une personne d'exiger quelque chose d'une autre personne. Celui qui est titulaire de ce droit s'appelle créancier, celui contre qui ce droit existe s'appelle débiteur. Ce qui est dû par le débiteur, c'est une prestation. La prestation peut avoir les objets les plus variés : le débiteur peut devoir une somme d'argent, ou bien des marchandises, un objet quelconque, ou même simplement un travail, un service voire une abstention. Si l'on se place du côté du créancier, le droit personnel figure dans son patrimoine comme un élément d'actif, une créance. Vu du côté du débiteur, il constitue un élément du passif, une dette. Le rapport dans son ensemble s'appelle une obligation (créance et dette constituant une obligation). La liste des droits personnels n'est pas limitative, le nombre illimité des droits personnels vient du fait que la source de ces droits est le contrat, les contractants n'ont d'autres limites dans la création des droits personnels que les limites imposées par la loi. 2. Les caractères du droit personnel Les traits caractéristiques des droits personnels, c'est qu'ils supposent un lien entre telle
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personne et telle autre, d'où leur appellation (droits personnels). Le créancier ne peut demander l'exécution de la prestation qu'à son débiteur. Si celuici n'exécute pas sa prestation, le créancier peut le poursuivre en justice, obtenir un jugement qui lui permet de poursuivre l'exécution forcée et notamment de faire vendre ses biens et de se payer sur le prix obtenu. Les droits personnels ce sont des droits qui n'ont d'effet qu'à l'égard d'une personne ou de certaines personnes déterminées et qui présentent une grande insécurité. En effet, si le débiteur n'exécute son obligation, le créancier peut saisir et faire vendre les biens figurant dans le patrimoine de son débiteur au jour de la poursuite, c'est ce qu'on appelle droit de gage général, reste à savoir si le débiteur possède des biens, en effet, le créancier ne peut aller rechercher les biens qui ont été donnés ou vendus auparavant par son débiteur, il n'a pas de droit de suite. Le créancier dépourvu du droit de suite est appelé créancier chirographaire.
II. Les droits réels
Ce sont des droits qui confèrent à leur titulaire un pouvoir portant directement sur une
chose. L'exemple type de droit réel est le droit de propriété. Ce droit donne le pouvoir d'user, de modifier voire de détruire l'objet sur lequel porte ce droit. Les droits réels n'ont donc qu'un titulaire ou sujet actif et un objet (la chose), mais pas de débiteur ou sujet passif. On distingue dans les droits réels les droits réels principaux et les droits réels accessoires. 1. Les droits réels principaux On distingue d'une part le droit de propriété dont il convient de voir la définition et les limites, et l'usufruit. Le droit de propriété : le contenu de la propriété C'est le droit qui permet à son titulaire propriétaire d'utiliser et de disposer de la chose sur laquelle porte ce droit. Ce droit est dit absolu et ne connaît que les limites prévues par la loi et le règlement. Les attributs de la propriété Le propriétaire à tous les droits sur la chose, il peut : l'utiliser à sa convenance: c'est l'usus; en percevoir le profit : c'est le fructus (les fruits et les produits) ; en disposer : c'est l'abusus, soit matériellement (destruction par exemple), soit juridiquement (vente, constitution d'une hypothèque).
Le droit de propriété est perpétuel
ce qui signifie qu'à la mort de l'actuel propriétaire, ce droit ne disparaît pas mais qu'il est transféré à ses héritiers ; et il ne s'éteint pas, ne se perd pas par le nonusage. Le droit de propriété est un droit absolu, il comporte cependant des limites.
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Les limites du droit de propriété
Ces limites découlent des restrictions aux prérogatives du propriétaire. Il s'agit essentiellement des restrictions d'intérêt public. Le droit de propriété étant un droit ayant une valeur constitutionnelle, seul le législateur (le parlement) a le pouvoir de restreindre les prérogatives du propriétaire. Cependant, ces restrictions ne sauraient être arbitraires ou abusives, sous peine de censure par le conseil constitutionnel. Ces restrictions sont malgré tout nombreuses, citons notamment les nationalisations, les expropriations pour cause d'utilité publique, les réquisitions, les passages des canalisations électriques, des lignes téléphoniques, etc. A cela il convient d'ajouter qu'une abondante législation limite le droit de construire: interdiction totale ou partielle de bâtir (urbanisme, voirie, intérêt militaire...). Il existe également des limites d'intérêt privé, à ce sujet, il convient de citer l'exemple de la propriété collective. Plusieurs personnes dites copropriétaires peuvent être cotitulaires d'un droit de propriété, les prérogatives de chacune sont alors nécessairement limitées par celles des autres. Il faut donc l'accord de tous pour faire un acte de quelque importance. Les démembrements de la propriété (l'usufruit) Les démembrements de la propriété ne confèrent à leur titulaire que certains des attributs du droit de propriété. On distingue notamment l'usufruit , celuici est le droit réel qu'à une personne dite usufruitier, de jouir ("usus" et "fructus") d'une chose dont "l'abusus" appartient à une autre personne dite nupropriétaire. L'usufruit peut être établi par contrat, c'est un droit temporaire, il s'éteint avec le décès de l'usufruitier. A l'expiration de l'usufruit, le nupropriétaire retrouve "l'usus" et le "fructus" de la chose. 2. Les droits réels accessoires On appelle ainsi des droits réels qui accompagnent une créance et qui sont donc accessoires à un droit de créance (droit personnel). Pour comprendre la nature de ces droits, on prend un exemple: une personne prête par exemple 10 000 dhs à une autre personne, c'est là un droit de créance. Le droit de créance ordinaire expose le créancier (chirographaire) au danger de ne pas être payé intégralement si, au jour du payement, le débiteur n'a pas suffisamment de biens pour payer tous les créanciers. C'est la raison pour laquelle il est possible d'obtenir du débiteur des garanties de payement, appelées aussi sûretés. Or, parmi les garanties de payement, on distingue les droits réels accessoires immobiliers (l'hypothèque), et les droits réels accessoires mobiliers (le gage).
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Les droits réels accessoires immobiliers : l'hypothèque L'hypothèque désigne la sûreté portant sur un immeuble déterminé du débiteur ou sur plusieurs immeubles déterminés. Le créancier qui a obtenu ce droit par contrat, est appelé créancier hypothécaire. Celuici dispose donc sur l'immeuble hypothéqué, d’un droit réel, il peut donc le saisir et sera payé sur le produit de la vente, par préférence à tout créancier simplement chirographaire. Le propre de l'hypothèque est de réaliser une sûreté sans dépossession. Le propriétaire débiteur garde son immeuble, en perçoit les fruits, mais il ne peut l'aliéner (le vendre ou le donner). Si le débiteur vend l'immeuble hypothéqué, le créancier hypothécaire dispose du droit de suite qui lui permet de le récupérer, de le vendre et se payer sur le produit de la vente. Les droits réels accessoires mobiliers: le gage Le gage dit aussi nantissement mobilier est un contrat par lequel une personne remet, en garantie d'une dette, un meuble à un créancier (le mot gage signifie à la fois la garantie et la chose objet du gage). Le gage est une garantie une sûreté réelle portant sur un objet mobilier (bien meuble), des bijoux par exemple ou des titres de bourse. Pour constituer le gage, l'emprunteur doit remettre matériellement le gage au créancier gagiste qui possède sur l'objet remis en garantie, un droit réel. Le gage suppose donc la dépossession du débiteur et doit sauf s'il est commercial, être constaté dans un acte authentique. Si le débiteur ne paye pas sa dette, le créancier gagiste a le droit de faire vendre le gage et de se payer sur le produit de la vente par préférence aux autres créanciers chirographaires. Il existe d'autres formes de gage plus spécialisées. Dans ces formes de gage, il n'y a pas de déplacement de l'objet constituant le gage, il s'agit de: Le nantissement du fonds de commerce le fonds de commerce présente ce double caractère d'avoir une assiette fixe et de représenter une valeur constituant une solide garantie. Sa mise en gage se fait par simple inscription sur un registre au tribunal de première instance et permet au commerçant de se procurer du crédit tout en continuant à poursuivre son commerce. Le nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement Les professionnels ont la possibilité de constituer un gage sans dépossession sur l'outillage et le matériel d'équipement acheté à crédit.
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III. Les droits intellectuels ou de clientèle (droits de propriété incorporelle)
Ces droits sont appelés droits intellectuels ou droits de clientèle ou encore droit de
propriété incorporelle, ce sont des droits ayant une valeur pécuniaire (le plus souvent élevée) mais que l'on ne peut classer ni dans les droits personnels ils n'ont pas un débiteur déterminé et sont opposables à tous, ni dans les droits réels ils ne portent pas sur une chose corporelle (res), ce sont des monopoles d'exploitation concernant les domaines suivant : 1. La propriété littéraire ou artistique (littérature, théâtre, cinéma, musique, peinture, architecture, photographie...etc). Dans ce domaine, l'auteur de l’œuvre a le droit d'exploiter pécuniairement son oeuvre. Il peut en tirer des profits, certains en tirent d'énormes profits. Cela résulte de ce que l'auteur de cette oeuvre est le seul à pouvoir jouir du droit de reproduction et du droit de représentation: éditer un livre, permettre la vente des disques.... en somme, le droit d'auteur s'analyse en un droit d'exploitation exclusive. 2. La propriété industrielle
dans le domaine des découvertes scientifiques ou techniques, l'inventeur peut exploiter son invention et prendre à cet effet un brevet d'invention. L'invention brevetée est libérée de toute concurrence et défend son monopole par l'action en contrefaçon.
dans le domaine commercial, la loi accorde une protection pour les signes distinctifs qui permettent de reconnaître les différentes maisons en rivalité dans tel secteur de l'économie (exemple pour l'automobile, les marques Renault, Peugeot, Fiat ....), ce sont là des marques de fabrique ou de commerce identifiant les produits, nom commercial et enseigne grâce auxquels les établissements peuvent être distingués.
Sont également considérés comme propriété incorporelle les droits des commerçants et des industriels d'exploiter leur entreprise et à cet effet de protéger leur clientèle d'où leur appellation droit de clientèle.
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DOSSIER V. LA SOURCE DES DROITS ET DES OBLIGATIONS
L es droits subjectifs ont pour source des actes juridiques ou des faits juridiques. L'acte
juridique est un acte voulu par son auteur, accompli par lui en vue de produire des effets de droit ou de donner naissance à une obligation, la volonté de celui qui l'accomplit et donc le fondement et la source de l'acte juridique (le contrat). Le fait juridique est un fait, volontaire ou non, ou une circonstance, auxquels la loi attache des effets juridiques, ces effets se réalisent indépendamment de la volonté de l'homme (la responsabilité).
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Thème 1. Le contrat : une technique juridique des échanges L'objectif d'une entreprise est de mettre sur le marché un produit ou un service en vue de sa vente. A cet effet, elle doit exécuter de multiples opérations (engager du personnel, acquérir les matières premières, acheter ou louer des installations ou des équipements ...). L'ensemble de ces opérations constituent ce qu'on appelle les tâches de production, elles sont réalisées par différentes techniques juridiques permettant de prendre les engagements appropriés aux objectifs recherchés. L'engagement naît d'un acte de volonté, il peut prendre diverses formes notamment la rencontre de deux volontés qui s'accordent sur des obligations déterminées, il s'agit des contrats que nous allons étudier. Les contrats sont très nombreux dans la vie des affaires puisque la plupart des actes d'exploitation passent par eux. Bien que très variés, ils sont cependant soumis à un même régime de base.
I. Le tableau des différents contrats Les contrats s'ordonnent dans la vie des affaires autours de deux fonctions essentielles : la fourniture de biens et la prestation de services. A chacune de ces fonctions correspond un contrat fondamental dont dérivent des variantes spécialisées.
1. Les contrats de fourniture de biens La fourniture d'un bien résulte d'un transfert de propriété ou de jouissance.
Le transfert de propriété Il peut provenir d'un contrat de vente ou d'échange : Le contrat de vente est celui par lequel une personne s'oblige à transférer la propriété d'un bien et l'autre à le payer. Le contrat d'échange est celui par lequel les parties se donnent respectivement une chose pour une autre.
Le transfert de jouissance Il peut résulter d'un contrat de bail ou de prêt : Le contrat de bail ( ou de louage) est celui par lequel l'une des parties s'oblige pour
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faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celleci s'oblige de lui payer. Le prêt peut être à usage, l'emprunteur se servant de l'objet emprunté et devant le restituer en bon état, ou de consommation, l'emprunteur restituant une même quantité de choses de la même qualité. Autour du prêts se greffent différents contrats garantissant le remboursement de la somme prêtée, tels le contrat d'hypothèque sur les immeubles, le contrat de gage ou nantissement sur les meubles. 2. Les contrats de prestation de service
Les contrats de prestation de service sont ceux par lesquels une personne s'engage à exécuter une tâche déterminée au profit d'une autre personne, moyennant un prix déterminé. Il existe deux catégories :
Le contrat de travail tout d'abord, c’est celui par lequel l'exécutant, dit salarié, est subordonné dans l'accomplissement de sa tâche au bénéficiaire, dit employeur, qui dirige son travail et lui donne des ordres. Le contrat d'entreprise C’est celui dans lequel l'exécutant, dit entrepreneur, est libre d'organiser luimême les modalités d'accomplissement de ce qui lui est demandé : il ne reçoit pas d'ordres du bénéficiaire, dit maître d’ouvrages ou donneur d’ordres , dans l'exécution de son travail. Ainsi défini, ce type de contrat s'applique à toutes sortes de prestation : construction d'immeubles, fabrication d'objet divers, exécution de travaux, de réparations ou de transformation. Parfois, vu sa spécificité, il est doté d'un régime spécial : ainsi la prestation de transport est réglementée sous le nom de contrat de transport, celle d'accomplissement d'actes juridiques sous le nom de mandat ou de commission ... II. Les caractéristiques essentielles du régime du contrat
Quelle que soit la diversité des contrats, un régime de base les unit.
1. La négociation des contrats De nombreux contrats se concluent sans être discutés ; une entreprise propose un contrat auquel sa clientèle adhère (contrat dit d’adhésion) ; il en est fréquemment de même pour les assurances, les transports, les prestations des banques. Mais il y a des contrats moins usuels (contrats dit de gré à gré) qui supposent une
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longue mise au point appelée pourparlers par les juristes. Cette phase est particulièrement importante car elle commande la conclusion du contrat et, par suite, son succès ou son échec. Au point de vue juridique, il convient de faire trois observation : La liberté contractuelle, la règle essentielle du droit est la liberté, en conséquence, tout ce qui n'est pas expressément interdit est permis. L'interdiction ne peut résulter que de l'ordre public. La loyauté des négociateurs. Les négociateurs doivent veiller à agir de bonne foi les uns envers les autres. Le non respect de cette règle de conduite peut constituer une faute génératrice de responsabilité civile, par exemple en cas de fourniture de renseignements erronés, d'insuffisance de renseignement ou de manque de considération des intérêts du partenaire (comme laisser un partenaire engager d'importantes dépenses en vue du contrat tout en sachant que l'on ne conclura pas). La qualification juridique. Les négociateurs doivent veiller à qualifier correctement leur contrat, c'estàdire à la placer dans la catégorie juridique qui lui convient, car c'est d'elle que dépend le régime du contrat, par exemple la vente, le louage, l'entreprise ou la société. Le contrat est l'acte par lequel les parties s'engagent définitivement à assurer certaines obligations déterminées. Il a force obligatoire.
2. Les conditions de validité des contrats
Les conditions de fond Quatre conditions sont essentielles pour la validité du contrat : le consentement de la partie qui s'oblige ; sa capacité de contracter ; un objet certain qui forme la matière de l'engagement ; une cause licite dans l'obligation. 1. Le consentement : tout contrat suppose la rencontre de deux consentements non viciés. La rencontre des consentements, il n'y a pas de contrat sans l'accord de volontés des contractants (l'offre et l'acceptation). En principe, chacun est libre de contracter ou non, toutefois certains contrats sont obligatoires, par exemple l'assurance pour les véhicules terrestres à moteur. De même chacun est libre de choisir son cocontractant. Toute offre de contracter doit être maintenue pendant un délai raisonnable. L'acceptation peut être expresse ou tacite (résultant de faits ou actes qui l'impliquent). Cependant, en principe, en droit qui ne dit mot ne consent pas, cependant, il en va différemment : entre commerçants qui sont ne relation d'affaire habituelle ;
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pour les contrats renouvelables par tacite reconduction : assurance, bail, par exemple. Lorsque le contrat est conclu par correspondance (lettre, télex, téléphone, connexion télématique), les tribunaux considèrent en général que le contrat est s'est formé dès l'émission de l'acceptation. Les vices du consentement : il n'y a point de consentement valable, si le consentement n'a été donné que par erreur, ou s'il a été extorqué par violence, ou surpris par dol. (voir le titre précédent). C'est la volonté qui est le fondement de tout acte juridique, puisque c'est elle qui commande les effets des droits recherchés. Dans les actes bilatéraux, les volontés des deux parties tendent aux mêmes buts, comme elles sont en corrélation entre elles, on parle de consentement. Pour qu'elle soit efficace et produire des effets juridiques, la volonté doit être intègre, c'estàdire libre, à défaut, la loi considère l'acte juridique comme nul.
Le consentement intègre
Le consentement est considéré comme l'une des conditions de validité de l'acte juridique. La loi considère qu'il n'y a point de consentement valable si celuici a été donné par erreur, ou s'il a été extorqué par violence, ou surpris par dol, ce sont là les trois vices du consentement: L'erreur : on entend par erreur une fausse représentation de la réalité. Pour être prise en considération, il faut que l'erreur soit d'une gravité telle qu'elle rende l'acte inexistant. Autrement dit, sans cette erreur (involontaire), l'acte n'aurait pas existé. C'est le cas lorsque cette erreur porte sur : la substance soit des obligations nées du contrat (erreur sur la nature du contrat), soit des choses sur lesquelles porte cet accord (erreur sur la matière: placage au lieu de bois massif, par exemple) ; une qualité substantielle, c'estàdire essentielle pour la victime de l'erreur, par exemple l'authenticité d'une oeuvre d'art ; la personne du cocontractant tant dans son identité que ses qualités (compétence, solvabilité, etc) ; mais cette erreur est réservée aux contrats conclus intuitu personae (honorabilité pour l'associé en nom collectif).
Le dol est au autre vice du consentement, il consiste non plus dans l'erreur
spontanée mais dans une erreur provoquée, découlant soit des manoeuvres frauduleuses, soit d'affirmations mensongères. Cette tromperie, ou bien détermine le partenaire à donner son consentement, le dol est alors qualifié à ce moment là de dol principal, en ce sens qu'en son absence ( le dol), l'acte n'aurait pas été conclu ; ou bien le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son contractant un fait qui, s'il avait été connu de lui,
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l'aurait empêcher de contracter, c'est ce qu'on appelle le dol par réticence. La violence : elle met en cause la liberté du consentement. C'est la crainte exercée sur la volonté d'une personne en vue de l'amener à accomplir un acte juridique. Elle constitue donc un vice du consentement. Est considéré comme nul tout acte juridique accompli sous la menace de la violence. 2. La capacité Les personnes morales ne doivent conclure que des actes entrant dans leur sphère d'activité (objet social) à peine de nullité absolue. Sur la capacité des personnes physiques, mineures et majeures (voir le titre I). 3. L'objet (les obligations nées) du contrat L'objet (des obligations nées) du contrat est ce à quoi le débiteur est tenu. Ce peut être : Faire quelque chose : accomplir un acte positif, par exemple une prestation de service (contrat d'entreprise ou contrat de travail) ; Ne pas faire quelque chose : par exemple clause de secret. En pratique, cet engagement est le plus souvent l'accessoire d'une autre obligation ; tel est le cas notamment de l'obligation de nonconcurrence pesant sur un salarié ou le vendeur du fonds de commerce. Donner quelque chose, c'estàdire en transférer la propriété, tel est l'objet des obligations nées d'un contrat de vente ou d'échange. Les conditions de l'objet : L'existence de l'objet : une obligation est sans objet lorsque le débiteur s'est engagé à fournir un bien qui n'existe pas ou à accomplir un fait absolument impossible. Mais l'objet n'a pas besoin d'exister matériellement lors de la conclusion du contrat, il suffit qu'il existe à la date prévue de l'exécution de l'obligation. La licéité de l'objet : l'objet de l'obligation ne doit pas être contraire à l'ordre public ou hors commerce. Ainsi un certain nombre de biens ne peuvent faire l'objet d'un contrat car ils sont considérés comme hors du commerce juridique, par exemple : la personne humaine ; le nom patronymique ; les biens du domaine public ; les biens soumis au monopole de l'Etat dans un intérêt fiscal (tabac..) ; les produits susceptibles de porter atteinte à la sécurité des consommateurs et dont la vente est interdite par les pouvoirs publics. La détermination de l'objet : il faut que l'obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce. La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu'elle puisse être déterminée. Le problème se pose, le plus souvent, pour les sommes d'argent, notamment dans les contrats de concession. (exemple: les contrats d'approvisionnement en lubrifiants (essence et diesel), dans lesquels on ne peut pas prévoir la variation des prix de la marchandise.
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Le défaut d'équivalence des objets : la disproportion de valeur entre les prestations promises dans un contrat, cette disproportion dite lésion, n'est pas un vice général des contrats. L'anéantissement (rescision) du contrat pour lésion n'est admis que : pour certains actes passés par un mineur ou par un majeur sous curatelle ; pour certains contrats, notamment la vente d'immeuble. 4. La cause (des obligations nées) du contrat La cause (des obligations nées) du contrat est le motif déterminant du débiteur (pour quoi s'engagetil ?). Elle a un double aspect : Un aspect objectif qui est la contrepartie ; par exemple, dans un contrat de vente, l'acheteur s'oblige à verser un prix parce que le vendeur lui transfert la propriété d'un bien ; dans un contrat de société, l'associé s'oblige à un apport car il espère un profit etc. ;
Un aspect subjectif qui est le mobile du débiteur et varie selon les personnes : pourquoi acheter cet objet et non un autre, pourquoi effectuer un apport à telle société ou à telle autre ? La cause doit remplir deux conditions : exister et être licite. L'existence de la cause : il y a absence de cause lorsqu'une obligation n'a pas de contrepartie, soit qu'elle n'ait jamais existé, soit qu'elle ait cessé d'exister au moment où l'engagement a été pris. Par exemple l'agrément préfectoral nécessaire à l'exploitation d'établissement d'enseignement de la conduite automobile étant délivré à titre personnel, sa vente est dépourvue d'objet et l'obligation de payer mise à la charge de l'acheteur en contrepartie est nulle faute de cause. La licéité de la cause : la cause est illicite quand elle est prohibée par la loi, quand elle est contraire aux bonnes moeurs ou à l'ordre public. L'absence de condition de forme. En vertu du principe du consensualisme, il est de règle que le contrat est validement formé par l'échange des consentements sans qu'il soit nécessaire de le constater par écrit. Font exception les contrats dits solennels devant être faits par écrit à peine de nullité. La forme exigée peut être : un acte authentique, exigible pour le contrat de donation, la constitution d'hypothèque immobilière, les ventes immobilières... un simple écrit : notamment pour la cession (vente) d'un brevet d'invention, le contrat de bail de locaux à usage d'habitation ... Hors ces hypothèses où l'écrit est requis à peine de validité, il est cependant fréquent et conseillé d'en établir un soit : pour prouver le contrat ;
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pour permettre l'enregistrement ; pour rendre le contrat opposable aux tiers après publication (exemple contrat de société). Nullité, sanction de l'irrespect des conditions de validité des contrats. La sanction de l'irrespect des conditions de validité du contrat est la nullité ; celleci peut être relative ou absolue. Cependant, la nullité relative et la nullité absolue ont des effets identiques, la différence réside dans leur mise en oeuvre. La nullité absolue Elle frappe l'acte juridique lorsque la règle de droit qui a été violé a pour but de défendre l'intérêt collectif ; ainsi en estil lorsque l'acte est contraire à l'ordre public et aux bonnes mœurs. La nullité absolue peut être invoquée par toute personne qui y a intérêt et ce pour obtenir l'anéantissement de l'acte. L'action dans le cas de la nullité absolue ne s'éteint que par la prescription la plus longue, qui est de 15 ans. La nullité relative A l'opposé, la nullité est relative lorsque les intérêts en jeu sont uniquement ceux des parties à l'acte, ce qui est le cas lorsque le consentement est vicié ou encore en cas d'incapacité de l'une des parties contractante. La nullité relative ne peut être invoquée que par le contractant que la loi entend protéger, (la victime du dol par exemple). L'action se prescrit par un délai de 5 ans. Quant aux effets de l'annulation, ils sont les mêmes quel que soit le caractère de la nullité (absolue ou relative), l'annulation entraîne l'anéantissement rétroactif de l'acte, si bien que les choses doivent être remises en l'état où elles se trouvaient avant le contrat.
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Thème 2. La responsabilité juridique Juridiquement, être responsable, c'est devoir réparer les dommages que l'on a causé par sa faute, indemniser la victime de ces dommages Cette victime est toujours une personne juridique dont les droits ont été lésé. Outre l'atteinte aux droits des personnes privées (physiques ou morales), l'acte dommageable a pu porter atteinte à l'ordre public. Ainsi le crime de sang porte atteinte au droit à la vie d'une personne physique, de plus, il trouble l'ordre public. Pour que l'ordre règne, l'Etat demande alors à la justice de sanctionner le criminel. Sa responsabilité est pénale. Si l'ordre public n'est pas menacé par l'acte fautif, la responsabilité de son auteur est civile.
I. La responsabilité civile délictuelle – responsabilité du fait personnel Pour qu'une personne soit responsable d'un dommage, il fait qu'elle ait commis une faute et que cette faute ait causé un dommage.
1. La faute C'est un acte anormal qui n'aurait pas été commis par une personne avisée, placée dans les mêmes circonstances que l'auteur du dommage. Ce peut être : Un acte fait dans l'intention de nuire (il s'agit alors d'un délit) ou un acte fait par imprudence, sans intention de nuire (on parle alors d'un quasi délit) ; Un abus de droit ; si l'on peut toujours user de ses droits, il est fautif de le faire dans le seul but de gêner ou de léser un tiers ; c'est alors un abus de droit ; Une négligence ou une imprudence, ou même une abstention, du moment qu'elle porte préjudice. L'auteur de l'acte fautif peut être inconscient du caractère dangereux de son acte, soit qu'il est trop jeune pour en mesurer les conséquences, soit qu'il est dément. Cette inconscience ne prive pas la victime de la réparation de son préjudice, qui sera versée par la personne qui a la garde de l'inconscient, de ses propres deniers, ou sur le patrimoine de l'auteur du dommage.
2. Le dommage (ou préjudice) Le préjudice est la condition essentielle de l'existence de la responsabilité civile. S'il n'existe pas, l'action en responsabilité n'a pas lieu d'être. Il peut être de différentes natures. Pour être indemnisable, il doit présenter certains caractères.
Le préjudice peut être matériel ou moral
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Le préjudice matériel : il existe quand les droits patrimoniaux de la personne sont atteints : choses détruites, gains minorés, pertes en biens et en argent ; Le préjudice moral : il frappe des droits extrapatrimoniaux de la victime : ses sentiments, son honneur, sa sensibilité physique (douleur) ou morale (peine, frustration), ses possibilités de jouir des plaisirs de la vie (préjudice d'agrément). Préjudice matériel et préjudice moral sont souvent liés, mais pas toujours,. Ainsi le décès par accident du père de famille entraîne la peine des siens et une perte de revenus pour la famille. Le décès d'un enfant par accident entraîne également la peine de ses parents, mais pas de perte de revenus.
o Caractères du préjudice indemnisable Il faut : Qu'il soit certain et non pas éventuel ; Qu'il lèse un intérêt juridiquement protégé : (pas d'intérêt, pas d'action) on exige la justification d'un intérêt (lien de sang, de mariage, de créance ...un lien de droit) ; Qu'il ne soit pas déjà indemnisé.
3. Le lien de causalité entre la faute et le dommage La responsabilité de la personne ayant commis une faute ne peut être retenue que si cette faute est bien celle qui a causé le dommage. Le lien de cause à effet entre la faute et le dommage doit être prouvé par la victime.
La pluralité des causes
Un dommage peut être provoqué par plusieurs causes. Afin de mieux garantit la victime, la loi prévoit qu'elle peut demander l'entier paiement de l'indemnité à l'un responsable qui devra la lui verser. Il aura ensuite un recours contre ses coresponsables pour obtenir le remboursement de leur part d'indemnisation.
La cause étrangère
C'est une cause qui ne peut être imputée à celui qui est supposé avoir causé le dommage. Il s'agit : de la faute de la victime ; du fait d'un tiers ; de la force majeure càd d'un évènement naturel (inondation, tempête....). C'est un évènement qui doit être imprévisible, irrésistible. Lorsque la cause étrangère est retenue par le tribunal, elle exonère totalement ou partiellement
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le défendeur de sa responsabilité. Pour obtenir réparation de son dommage, la victime doit donc prouver : son dommage ; la faute de celui qu'elle présume être l'auteur du dommage ; le lien de causalité entre la faute du défendeur et son dommage.
II. Responsabilité délictuelle et responsabilité contractuelle Lorsque l'acte dommageable est un manquement à l'obligation générale de prudence et de diligence à l'égard d'autrui ou résulte d'une volonté de nuire sans lien aucun avec un contrat, la responsabilité de l'auteur du dommage est délictuelle. Lorsque l'acte dommageable est l'inexécution d'un contrat, la responsabilité est contractuelle.
1. La responsabilité civile délictuelle responsabilité du fait des tiers et du fait des choses
Responsabilité du fait des tiers
Dans certains cas déterminés par la loi, une personne peut responsable des fautes d'une autre. Responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs : le père et la mère, en tant qu'ils exercent le droit de garde, sont solidairement responsables de leurs enfants mineurs vivant avec eux...(les parents sont présumés avoir mal rempli leur obligation d'éducation et de surveillance) ; Responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis : l'artisan est responsable des dommages causés par son apprenti, quel que soit son âge, pendant le temps qu'il est sous sa surveillance.( l'artisan est présumé responsable, la faute de l'apprenti est supposée avoir été rendue possible par un défaut de surveillance de l'artisan ; Responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves : L'instituteur est responsable du dommage causé par l'élève pendant le temps qu'il est sous sa surveillance. Contrairement aux deux cas précédents, l'instituteur n'est pas présumé responsable, sa faute doit être prouvée ; Responsabilité du commettant du fait de leurs préposés : Le commettant est celui qui peut donner des ordres à une autre personne appelée préposé. Le préposé recevant ainsi des instructions, des consignes qu'il doit exécuter, se trouve sous la dépendance totale du commettant pour l'exécution de son travail. Le commettant est très souvent l'employeur, le préposé étant le salarié. Mais le lien de préposition peut exister dans d'autres cas ; (Etat/Fonctionnaires....). Le commettant est responsable des fautes commises par son préposé dans l'exercice de ses fonctions. La responsabilité du commettant existe tant qu'il a autorité sur le préposé, donc tant qu'il y a lien de
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préposition, et à condition que le préposé demeure dans le cadre des ordres qu'il a reçus. Ainsi le commettant n'est pas responsable des fautes de son préposé lorsqu'elles résultent d'un manquement aux ordres reçus. L'employeur d'un gardien de nuit qui met le feu par malveillance aux bâtiments qu'il avait pour mission de surveiller n'est pas responsable des dommages causés par son salarié, par exemple. Pour obtenir réparation du commettant, la victime doit prouver: son dommage ; la faute du préposé ; le lien de causalité entre la faute du préposé et le dommage ; que l'acte dommageable a été commis dans l'exercice des fonctions du préposé. La responsabilité du commettant est alors présumée.
Responsabilité du fait des choses
La loi précise " on est responsable non seulement du dommage que l'on a causé de son propre fait mais encore par le fait (...) des choses que l'on a sous sa garde". Quelles sont les choses susceptibles d'entraîner la responsabilité de leur gardien ? Toutes les choses, quelles soient meubles ou immeubles, peuvent entraîner la responsabilité de leur gardien. Qui est gardien de la chose ? A la "garde" de la chose celui qui en a l'usage, la direction et le contrôle, donc celui qui a pouvoir de commandement sur la chose. Le propriétaire est présumé gardien Quand la chose peuttelle entraîner la responsabilité du gardien ? Pour que la responsabilité du gardien soit engagée, il faut que la chose ait un rôle "actif" dans la réalisation du dommage et non un rôle purement passif. Par "actif" on n'entend pas que la chose soit en mouvement mais qu'elle ait provoqué le dommage: ainsi les outils qui traînent et sur lesquels quelqu'un trébuche et se blesse n'étaient pas en mouvement mais ont cependant eu un rôle actif dans le dommage. La chose peut entraîner la responsabilité de son gardien même lorsqu'elle a échappé à son contrôle, qu'il ne la maîtrise plus. Ainsi l'automobiliste doit "rester maître de son véhicule". La victime, pour obtenir réparation, doit donc prouver : le dommage ; l'intervention active de la chose dans le dommage. La responsabilité du gardien est alors présumée.
2. La réparation Qui doit réparer ? L'auteur du dommage a l'obligation de réparer. Lorsque le dommage a été provoqué par plusieurs personnes, le partage de la responsabilité entraîne le partage entre les auteurs en
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fonction de la gravité de leurs fautes respectives. Si la force majeure a été une des causes du dommage, celuici ne sera pas indemnisé pour la part de la responsabilité qu'elle a prise dans le dommage.
Comment réparer ?
Réparer, c'est remettre la victime dans la situation où elle aurait été si le fait dommageable n'avait pas existé. La remise en état des choses (réparation en nature) est donc la manière logique de réparer. Elle n'est pas toujours possible. C'est pourquoi la réparation est souvent pratiquée. La réparation en nature consiste à remettre les choses dans l'état où elles auraient été si le fait dommageable ne s'était pas produit ; La réparation en équivalent consiste à verser à la victime une somme équivalente au dommage qu'elle a subi. (dommages et intérêts compensatoires).
III. La responsabilité pénale La responsabilité pénale existe lorsqu'une personne a commis une faute pénale. La conséquence de la faute pénale, pour son auteur, est une sanction (alors que la sanction de la faute civile est la réparation du dommage causé).
1. La faute pénale La faute pénale est un acte que le législateur considère comme mettant en péril l'ordre public. Certaines fautes sont reconnues comme troublant l'ordre public en tous lieux : crime de sang du vol, de l'escroquerie..
2. La faute pénale suppose la conscience de son auteur Le très jeune enfant, le dément ne peuvent être responsable pénalement. 3. Les fautes pénales sont énumérées par la loi En effet, le principe de liberté veut que toute restriction à cette liberté fasse l'objet d'une loi. L'acte considéré comme faute pénale étant interdit, il doit être prévu par la loi. Nul n'étant censé ignorer la loi, tout citoyen doit savoir quels sont les actes pénalement réprimés, afin de ne pas les commettre. Inversement, un citoyen ne peut être sanctionné pour un acte qu'il a commis alors qu'il n'était pas légalement considéré comme « faute pénale». Cela implique que les lois pénales ne sont jamais rétroactives.
4. La sanction pénale De même que les fautes pénales sont légalement sont légalement énumérées, les sanctions pénales sont prévues par la loi, avec un minimum et un maximum qui laissent aux juges une
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marge d'appréciation suivant les circonstances particulières à chaque cas, circonstances qui peuvent tenir à la responsabilité de l'auteur de la faute, aux conditions dans lesquelles elle a été commise...La sévérité du juge dépend donc de la gravité de la faute, alors qu'en matière civile, la réparation est indépendante de cette gravité, mais uniquement fonction de l'importance du préjudice subi. La loi prévoit deux types de sanction : les sanctions pécuniaires (les amendes) et la privation de liberté (peines d'emprisonnement ou de réclusion). Les amendes sanctionnent les fautes pénales les moins graves dites"contraventions", les peines d'emprisonnement de durée variable suivant la gravité de la faute sanctionnent les délits et les crimes.
5. Les relations entre responsabilité civile et responsabilité pénale La victime d'une faute pénale peut avoir subi personnellement un dommage civil. La faute étant pénale, c'est une juridiction pénale qui sera compétente. Si cette juridiction pénale retient la responsabilité pénale de l'auteur de la faute, la victime pourra demander une indemnisation de son dommage civil. Dans le cas contraire, elle ne le pourra pas.
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