Acide citrique par fermentation
par Enrico MORETTI Directeur du Département de biotechnologie Pressindustria SpA - Biassono (MI) Italie et Fabio FELIPPONE Chef du laboratoire Recherche et Développement Pressindustria SpA - Biassono (MI) Italie
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3 3 3 4 4
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4.1 4.2 4.3 4.3 4 .4 4.5 4.6
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’acide citrique (acide 2-hydroxy-1,2,3-propanetricarboxylique) 2-hydroxy-1,2,3-propanetricarboxylique) est très diffus dans la nature. Il intervient dans le métabolisme de nombreux animaux et plantes ; il a été isolé sous forme cristalline à partir du jus de citron, en 1784, par K.G. Sheele et sa structure a été établie par Liebig en 1838. La synthèse chimique de l’acide citrique, à partir de glycérine, remonte à 1880. En 1893, Wettmer découvrit quelques micromycètes capables de produire l’acide citrique par fermentation de substrats contenant du sucre. Les premiers équipements industriels remontent au début du siècle. Ils pro- duisaient l’acide citrique par extraction à partir de citrons (qui en contiennent de 7 à 9 %) ; jusqu’à 1920, plus de 90 % de la production mondiale d’acide citrique citrique était réalisée en Italie. À cette époque le procédé industriel par fermentation, en utilisant Aspergillus niger comme comme micro-organisme producteur et le sucre comme matière première commença à se développer en Europe et aux États-Unis. Au début des années 30, 80 % de la production mondiale d’acide citrique était réalisée par fermentation. De nos jours, l’acide citrique est produit par des techniques de fermentation « en surface » et « submergée » et il est utilisé, avec ses sels, essentiellement dans l’agro-alimentaire, l’industrie pharmaceutique et dans les détergents.
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1. Biosynthèse de l’acide citrique L’acide citrique est un intermédiaire du cycle de Krebs (ou cycle des acides tricarboxyliques) (figure 1), qui illustre la partie principale du système métabolique oxydant des substances organiques nutritives par des micro-organismes. Ce cycle, qui représente la partie terminale de la dégradation oxydante des substances nutritives en CO2 et H2O, fournit l’énergie nécessaire aux processus vitaux et reproductifs des cellules de micro-organismes, ainsi que les substances intermédiaires nécessaires à la synthèse des amino-acides et des lipides. Dans les conditions normales, les cellules du micro-organisme produisent les intermédiaires du cycle de Krebs en quantité suffisante pour ses exigences vitales. Il est possible d’obtenir la surpro-
duction et l’accumulation d’un ou plusieurs intermédiaires (comme l’acide citrique) par altération des mécanismes de régulation des principales voies métaboliques avec des modifications génétiques (qui peuvent se produire naturellement ou être induites artificiellement) et/ou par la culture de micro-organismes dans un milieu de composition très déséquilibrée, c’est-à-dire avec une carence ou un excès en substances particulières. La production industrielle d’acide citrique par fermentation a été développée en utilisant des micro-organismes génétiquement sélectionnés de plus en plus productifs et en cherchant les meilleures conditions de culture pour obtenir les rendements maximaux avec différents substrats. Les micro-organismes les plus étudiés ont été les champignons du genre Aspergillus et les levures du genre Candida. Ci-dessous sont illustrés les principaux procédés de fermentation qui utilisent Aspergillus niger et levures du genre Candida comme micro-organismes producteurs.
Figure 1 – Cycle de Krebs
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2. Procédés de production avec l’Aspergillus niger Aspergillus niger est le principal micro-organisme utilisé de nos jours pour la production industrielle de l’acide citrique, qui est effectuée, en conditions aérobies, par les techniques de fermentation en surface, submergée ou en phase solide, suivies par des procédés d’extraction et de purification.
À la fin du cycle, le moût de fermentation est déchargé du fond des cuves ; après séparation de la couche superficielle de mycélium, il est envoyé dans les réservoirs de stockage pour extraction de l’acide. Le mycélium est enlevé des cuves, lavé puis séché. Il peut être valorisé en alimentation animale. La fermentation superficielle, par ses caractéristiques particulières, ne peut pas être automatisée et, pour cette raison, elle exige une importante main-d’œuvre ; l’usage de cette technologie pour des installations industrielles de grande capacité est donc très difficile.
2.2 Fermentation submergée 2.1 Fermentation en surface Cette technique a été la première utilisée. Elle consiste à cultiver Aspergillus niger sur la surface d’un milieu nutritif liquide contenu dans des cuves en aluminium ou en acier inoxydable approprié (anticorrosion) empilées l’une sur l’autre, espacées de 30 à 40 cm, dans des râteliers placés dans des salles stériles de fermentation équipées d’un système d’aération très efficace. Les petites cuves, les râteliers et les chambres de fermentation sont soigneusement lavés et stérilisés avant chaque opération de fermentation. Le milieu nutritif, ou moût de fermentation , est préparé en diluant la matière première, généralement une mélasse de betterave, de façon à obtenir une concentration en sucre, le substrat principal, comprise entre 15 et 20 %. D’autres substances, nécessaires à la croissance du micro-organisme et au bon déroulement de la fermentation, sont ajoutées à ce milieu. Celles-ci sont principalement des sources d’azote et de phosphore (ammoniaque, sels d’ammonium, phosphates, etc.), des traces de métaux (sels de Fe, Mn, Mg, Zn, etc.), différents facteurs de croissance (vitamines, extraits de levure, etc.). Après dilution la mélasse est généralement traitée avec de l’hexacyanoferrate de potassium pour complexer et précipiter la quantité en excès d’ions de fer et d’autres métaux lourds qui ont une influence négative sur la production d’acide citrique. Le moût de fermentation est pasteurisé ou stérilisé, puis refroidi à la température de fermentation, à une valeur de pH entre 6 et 7. Ensuite, il est placé dans des cuves, chacune contenant de 400 à 2 000 L sur une hauteur de 8 à 20 cm. On procède à l’inoculation des spores d’Aspergillus niger qui sont dispersées à la surface du moût de fermentation en quantité variant de 70 à 150 mg/m 2. Le procédé comporte deux phases : une première phase, d’une durée d’environ 2 jours, de germination et de croissance du micro-organisme avec la formation d’une couche consistante de mycélium enchevêtré en surface ; cette phase est suivie par celle de production de l’acide citrique. La fermentation est conduite à une température de 28 à 32 oC, le pH ayant une valeur initiale de 6 à 7 descend jusqu’à une valeur d’environ 3 suite à la formation d’acide citrique. Un flux d’air stérile balaye la surface du milieu en fournissant la quantité d’oxygène nécessaire aux diverses étapes du procédé. Il élimine par évaporation d’eau les calories produites pendant la fermentation. Le balayage maximal d’air correspond à un débit de 2 à 4 volumes d’air par volume de milieu par minute ( vvm). La consommation maximale est obtenue lorsque la production d’acide citrique est la plus intense. 30 à 40 % de l’eau initiale est évaporée pendant l’opération. La durée totale du cycle de fermentation est de 6 à 12 jours, avec une production de 60 à 75 g d’acide citrique par 100 g de saccharose et une concentration finale d’environ 200 g/L. En même temps, on obtient la formation d’une quantité appréciable de sous-produits , principalement les acides oxalique et gluconique.
La fermentation submergée est réalisée dans des fermenteurs où les micro-organismes sont cultivés d’une façon homogène dans toute la masse du milieu nutritif liquide et maintenus aux conditions optimales d’oxygénation, de température et de pH. Généralement, les fermenteurs sont des bacs cylindriques en acier inoxydable de qualité définie, de volume compris entre 50 et 500 m 3, ils sont construits pour supporter la pression de stérilisation. Ils possèdent aussi des systèmes pour la dispersion de l’air stérile et de refroidissement du liquide de fermentation et ils peuvent être munis ou non d’une agitation mécanique. En l’absence d’agitation mécanique, le brassage du milieu est assuré par le passage de l’air, ou le mélange de gaz au travers du réacteur. Température, pH, niveau de la mousse, oxygène dissous, débit d’air stérile et addition de matières premières sont contrôlés automatiquement par des ordinateurs : les phases de lavage et de stérilisation, après chaque cycle de fermentation, sont complètement automatisées. Dans la production industrielle de l’acide citrique, cette technique est en train de remplacer la fermentation de surface puisqu’elle présente beaucoup d’avantages : — temps de fermentation plus courts ; — productivité plus grande et quantités inférieures de produits secondaires ; — meilleur contrôle des paramètres ; — plus grande garantie d’asepsie ; — économies d’espace et de personnel. Les matières premières principalement utilisées sont des mélasses de betterave ou de canne et des sirops de glucose nettement plus purs que les mélasses. Celles-ci contiennent une quantité plus ou moins grande d’impuretés et doivent être purifiées préalablement avant fermentation en utilisant le traitement, déjà décrit plus haut, à l’hexacyanoferrate de potassium ou en utilisant d’autres techniques telles que filtration, floculation ou passage sur résines échangeuses d’ions. Le moût de fermentation est préparé dans le fermenteur principal en diluant la matière première prétraitée à la concentration en sucre désirée (en général de 10 à 20 %), après addition des sources d’azote et de phosphore, des sels minéraux et des facteurs de croissance nécessaires puis il est stérilisé. Après avoir ajusté de pH (6 à 7) et la température (28 à 30 oC), on ajoute l’inoculum préparé avec la quantité nécessaire de s pores dans de petits fermenteurs à partir de souches pures de laboratoire. D’une manière analogue la fermentation submergée se déroule en deux phases successives, une de croissance des micro-organismes et une d’intense production d’acide citrique. La fermentation dure 5 à 9 jours ; pendant cette période l’air stérile est fourni, avec un débit de 0,5 à 1 vvm nécessaire pour la croissance des micro-organismes et pour la production d’acide citrique. La température est maintenue rigoureusement à la valeur fixée comprise entre 25 et 32 oC ; le pH est en général descendu jusqu’à 2 ou 2,5. La concentration finale de l’acide citrique est de 100 à 130 g/L, avec une production de 65 à 80 g par 100 g de saccharose (ou de glucose) contenu dans la matière première. Le principal sous-produit est l’acide oxalique.
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À la fin de la fermentation, le liquide est séparé du mycélium en utilisant des filtres à bandes ou rotatifs sous vide, et envoyé aux réservoirs de stockage pour récupération ultérieure de l’acide citrique. Le mycélium est généralement lavé et séché (de 150 à 200 kg par tonne d’acide citrique produit).
2.3 Fermentation en phase solide La fermentation en phase solide est la fermentation des sucres contenus dans les pulpes sucrées de déchets, marcs, etc., ainsi que des substances amylacées qui viennent des procédés de production de l’amidon. La teneur en eau des pulpes est variable. La fermentation, dont la durée est de 5 à 10 jours, est conduite dans des cuves placées dans des chambres stériles aérées et maintenues à une température de 30 à 32 oC, où la matière première, après avoir été humidifiée et stérilisée, est inoculée avec des spores d’Aspergillus niger. Les rendements sont plutôt modestes puisque les matières premières ne subissent aucun traitement de purification et les conditions de fermentation sont loin d’être optimales et restent peu contrôlables. Ces limitations, avec les besoins de surface importante, empêchent l’application de cette technique dans des installations de moyenne ou grande capacité. Pour sa simplicité, cette technique peut être utilisée pour de petites productions en situations locales particulières. De nos jours, la fermentation en phase solide est appliquée presque exclusivement au Japon pour une production inférieure à 2 000 t/an.
2.4 Procédés d’extraction L’acide citrique est généralement séparé du liquide de fermentation par précipitation ou par extraction par solvant, car la cristallisation directe n’est pas possible à cause de la présence d’impuretés dues aux matières premières. La figure 2 reproduit le schéma d’un procédé d’extraction par précipitation après une production d’acide citrique par fermentation submergée. Ce procédé, qui est le plus utilisé, met à profit la précipitation de l’acide citrique sous forme de citrate de calcium par l’ajout d’hydroxyde de calcium au liquide de fermentation jusqu’à obtenir un pH d’environ 8. Au début de l’addition de l’hydroxyde, le pH est d’environ 3, l’oxalate de calcium précipite et il est séparé. Le citrate de calcium en suspension dans l’eau, est traité à environ 50 oC par un léger excès d’acide sulfurique pour obtenir l’acide citrique libre en solution et du sulfate de calcium insoluble. Puis la solution d’acide citrique est traitée sur des résines échangeuses d’ions, pour fixer les ions inorganiques résiduels, enfin elle est décolorée avec du charbon actif. Cette solution est concentrée dans des évaporateurs à multiples effets puis envoyée dans les cristallisoirs. L’acide citrique est obtenu sous forme de monohydrate quand la cristallisation est effectuée à une température inférieure à 36,5 oC, ou sous forme anhydre à une température supérieure. Après la cristallisation, on réalise le séchage et le conditionnement. Les sous-produits de ce procédé d’extraction et de purification (calculés en substance sèche) représentent environ 2,5 t par tonne d’acide citrique obtenue. Ce sont principalement : le mycélium (15 à 20 % du total), le sulfate de calcium (environ 60 %) et d’autres produits contenus dans le moût de fermentation. La quantité élevée de sous-produits à écouler et les traitements nécessaires pour
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Figure 2 – Schéma simplifié du procédé de production d’acide citrique
pouvoir en utiliser une partie, entraînent une augmentation importante des coûts de production de l’acide citrique. Les procédés de récupération par extraction par solvant opèrent par extraction sélective de l’acide citrique du liquide de fermentation avec un solvant organique non miscible à l’eau et réextraction ultérieure de l’acide par de l’eau. Ces systèmes, qui ont été introduits pour éliminer la formation du sulfate de calcium, sont difficilement applicables à des procédés qui utilisent des matières premières très impures, comme les mélasses. Généralement, l’extraction est réalisée à contre-courant, à température ambiante, avec des extracteurs multi-étages. Pour favoriser l’extraction par la phase organique, on peut utiliser un mélange d’amines secondaires ou tertiaires insolubles dans l’eau. La réextraction par l’eau est réalisée en utilisant le même système, mais à une température plus élevée. La solution aqueuse est traitée avec du charbon actif puis concentrée jusqu’à la cristallisation de l’acide citrique. Les connaissances sur les procédés industriels de récupération par extraction par solvant sont très limitées ; pour cette raison, il est difficile d’évaluer les avantages, d’un point de vue pratique, en comparaison avec la méthode traditionnelle par précipitation.
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3. Procédés de production avec des levures du type Candida Bien que les procédés de production d’acide citrique par culture submergée, décrits plus haut, sont désormais bien connus, l’industrie du secteur est toujours à la recherche de techniques alternatives pour utiliser des matières premières nouvelles, pour simplifier les procédés de fermentation, en sélectionnant de nouveaux micro-organismes faciles à utiliser et ayant une haute capacité productive et pour minimiser les problèmes de traitement des effluents et des résidus solides. Au début des années 70, des procédés de fermentation par la technique submergée, avec des levures du type Candida utilisant des n -paraffines (alcanes linéaires) comme matière première ont été développés. La fermentation se faisait à un pH de 4 à 6 et à une température de 26 à 30 oC. Elle donnait, en 3 à 4 jours, des rendements de conversion de 130 à 140 %. Le principal produit secondaire était l’acide isocitrique. Les liquides de fermentation, qui sont très purs, permettaient l’utilisation de procédés d’extraction plus simples que ceux partant de matières premières traditionnelles avec une importante réduction des sous-produits à éliminer. Cette technologie fut utilisée industriellement par la société Liquichimica qui réalisa en Italie une installation avec une capacité de 100 000 t/an pour la production d’acide citrique et de citrate trisodique. L’installation fonctionna peu de temps à cause de l’augmentation du coût des n -paraffines et à l’impossibilité d’utiliser le produit obtenu dans les industries alimentaires et pharmaceutiques du fait de la matière première employée. Par la suite, d’autres levures du type Candida ont été sélectionnées pour utiliser le glucose, directement ou sous forme hydrolysée en amidon, comme matière première. L’application industrielle de cette technologie continue à être étudiée avec beaucoup d’intérêt. Ces derniers temps [1] a été développé un procédé utilisant un alcool éthylique de coût très bas comme matière première et une souche mutante de Yarrowia lipolytica (Candida lipolytica ) comme micro-organisme producteur. La durée de la fermentation est de 5 à 6 jours, avec une concentration finale d’acide citrique de 110 à 130 g/L et un rendement de conversion atteignant 90 à 100 %. Le pH est maintenu par addition de NaOH entre 4 et 7 et la température entre 26 et 30 oC. Dans ce cas, les liquides de fermentation sont très purs et, pour cette raison, après séparation des levures, il est possible d’utiliser des systèmes d’extraction par cristallisation directe de l’acide citrique qui se trouve dans le moût de fermentation, après l’élimination du sodium (qui vient de la soude ajoutée comme correcteur de pH) grâce à des résines échangeuses d’ions ou par électrodialyse. Les résidus de ce procédé sont réduits à environ 200 kg de substance sèche par tonne d’acide citrique produit.
4. Fiche produit L’acide citrique (acide 2-hydroxy-1,2,3-propanetricarboxylique) est l’acide organique le plus important obtenu industriellement par fermentation. Il est vendu anhydre (M = 192,13 g/mol) ou monohydrate (M = 210,14 g/mol). Il se présente en cristaux incolores ou en poudre cristalline blanche, inodore, de saveur acide caractéristique. La forme monohydrate est légèrement efflorescente à l’air sec.
Sa formule chimique est la suivante :
Numéro CAS (*) :
77-92-9 5949-29-1 Numéro EINECS (**) : 2010691
pour la forme anhydre, pour le monohydrate, pour les deux formes.
(*) Chemical Abstract Service (**) European Inventory of Existing Commercial Substances
4.1 Propriétés physico-chimiques L’acide citrique est un acide organique relativement fort avec une constante de première dissociation de 8,2 × 10–4 ; la deuxième et la troisième constantes de dissociation sont respectivement 1,77 × 10–5 et 3,9 × 10–7. L’acide citrique anhydre fond à 153 oC alors que le monohydrate perd son eau de cristallisation entre 70 et 75 oC et fond entre 135 et 153 oC. Il est très soluble dans l’eau (735 g/L à 20 oC), soluble dans les alcools. Il est insoluble dans des autres solvants organiques comme le toluène, le benzène et le chloroforme. En solution aqueuse, le groupe hydroxylique et les groupes carboxyliques se conduisent comme des chélates en formant des complexes chélatés avec des ions métalliques.
4.2 Spécifications commerciales Dans le tableau 1 sont mentionnées les spécifications commerciales pour les utilisations pharmaceutiques [2] et alimentaires [3]. (0)
4.3 Toxicité L’acide citrique est considéré comme un additif alimentaire non toxique. Il peut être utilisé dans les aliments sans limitation, comme l’a décidé le comité conjoint FAO/WHO sur les additifs alimentaires. L’acide citrique étant un irritant de la peau et des yeux, pendant sa manipulation, il faut utiliser des moyens appropriés pour la protection corporelle. Il est biodégradable et ne présente pas de risque pour l’environnement.
4.4 Stockage L’acide citrique, soit anhydre, soit monohydraté, est stocké sans difficulté ; pour prévenir une possible agglomération il faut éviter des conditions de température et d’humidité élevées. Les solutions d’acide citrique sont corrosives pour le ciment, l’aluminium, le fer, le cuivre et ses alliages. Elles ne doivent pas être utilisées avec les polycarbonates, les polyamides, les polyimides et les polyacrylates.
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Tableau 1 – Spécifications commerciales de l’acide citrique (1) Usage pharmaceutique [2]
Pureté (sur matière sèche)........................................................... > 99,5 % Limpidité et couleur de la solution............................................. passe le test (2) Teneur en eau : — forme anhydre..................................................................... < 0,5 % — monohydrate ....................................................................... de 7,5 à 9 % Baryum.......................................................................................... passe le test (2) Teneur en calcium........................................................................ < 200 ppm Teneur en métaux lourds (Pb)..................................................... < 10 ppm Teneur en arsenic......................................................................... ............................................................. Teneur en plomb.......................................................................... ............................................................. Teneur en fer................................................................................ < 50 ppm Teneur en chlorures..................................................................... < 50 ppm Teneur en sulfates........................................................................ < 150 ppm Teneur en acide oxalique ............................................................ < 350 ppm Substances facilement carbonisables ........................................ passe le test (2) Taux de cendres ........................................................................... < 0,1 % Teneur en tridodécylamine ......................................................... ............................................................. Absorption UV.............................................................................. .............................................................
Usage alimentaire [3]
> 99,5 %
< 0,5 % < 8,8 %
< 5 ppm < 1 ppm < 0,5 ppm
passe le test (2) passe le test (2) < 0,05 % < 0,1 ppm passe le test (2)
(1) exprimés en % en masse ou bien en ppm (partie par million) soit 10 –6 en masse. (2) Se reporter à la référence bibliographique indiquée en tête de colonne.
4.5 Utilisation de l’acide citrique et de ses sels Les principales applications de l’acide citrique dans les différents secteurs industriels sont les suivantes : Boissons et aliments : il est utilisé principalement comme agent acidulant, comme correcteur de la sapidité et comme agent conservateur.
Pharmaceutique, cosmétique et hygiène du corps : il trouve des applications dans la préparation de diverses formes pharmaceutiques effervescentes en association avec une source de carbonate ou bicarbonate ; en même temps, on exploite ses propriétés antimicrobiennes. Dans l’industrie cosmétique et pour l’hygiène de corps, il est utilisé comme antioxydant et régulateur de pH.
Autres utilisations : les solutions qui contiennent de l’acide citrique sont largement employées pour l’enlèvement des oxydes métalliques de la surface des métaux ferreux et non ferreux et comme agent antitartre dans les chaudières. Il trouve beaucoup d’autres applications dans l’agriculture, dans le placage électrolytique des métaux, dans la photographie, dans la préparation de certains plastifiants et comme composant des résines alkydes. Les sels de l’acide citrique d’importance commerciale sont : — le citrate dibasique d’ammonium ; — le citrate de calcium ;
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— le citrate de fer-ammonium ; — le citrate de potassium ; — le citrate de sodium. Le citrate de sodium est le plus largement utilisé et sa consommation augmente sans cesse dans le secteur des détergents comme remplaçant efficace biodégradable des polyphosphates et des zéolithes. Il est aussi utilisé dans les secteurs alimentaires, cosmétiques et pharmaceutiques.
4.6 Principaux producteurs et prix Les principaux producteurs mondiaux sont les suivants : Miles, ADM, Cargill, Jungbunzlauer, Hoffmann-La Roche. La production mondiale de l’acide citrique et de ses sels, est située principalement en Europe et aux États-Unis ; elle était évaluée à plus de 600 000 t/an en 1995. À titre indicatif, la consommation est ainsi répartie : — 65 % dans l’industrie alimentaire et dans les boissons ; — 10 % dans l’industrie pharmaceutique et les cosmétiques ; — 20 à 25 % dans l’industrie des détergents et pour le nettoyage des métaux ; — 5 % pour des autres utilisations industrielles. Le prix de catalogue en juin 1996 était d’environ 2 $/kg pour des quantités industrielles [4].
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Références bibliographiques [1]
[2]
Pressindustria SpA, Institute of Biochemistry and Physiology of Microorganisms Russian Academy of Science. Brevet d’invention en Italie no 01256043, 21 nov. 1995. Pharmacopée européenne, II e éd., XVI fasc., Maisonneuve SA, Sainte-Ruffine, France (1992).
[3] [4]
[5]
Food Chemical Codex, 3 e éd., 3 e suppl., National Academy Press, Washington (USA) (1992). Chemical Marketing Reporter, vol. 249 , no 26, Schnell Publishing Company Inc., New York (USA), 24 juin 1996. BLAIR (G.) et STAAL (P.). – Citric Acid dans KIRK-OTHMER Encyclopedia of Chemical
[6]
Technology, 4 e éd., vol. 6 , p. 354-380, Wiley, New York (USA) (1993). RÖHR (M.), KUBICEK (C.P.) et KOMINEK (J.). – Citric Acid dans Biotechnology, vol. 3 , p. 420-454, VCH Verlagsgesellschaft, Weinheim (RFA) (1983).
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