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PROGRESSEZ À VOTRE RYTHME, RYTHME, VIVEZ VOTRE VOTRE PASSION PASSION !
www.pianiste.fr / Bimestriel juillet-août 2015 n°93
À L’AFFICHE L’AFFICHE Nima Sarkechik DOSSIER L’art de la mazurka TESTS Trois petits quarts-de-queue
AN N N E EC Y C Y C LAS S SI I C F E C ES T S TI I V A V L
G A G G N NE Z E Z un s é é j o ou r r m m
us i ic c a l l e e nt r re e l ac e t m t mo nt agne s s P A GE 13
32 PAG AGES ES DE PARTITIONS
TOUS TOU S NIVEAUX NIVE AUX
BERTRAND
CHAMAYOU Un prince au clavier Belg, Lux. Ital. Grèce. Port. cont. :8,60 e . Suisse : 15,10 CHF. Can. : 12,50 $ can. Dom-T Dom-Tom om : 8,25 e .
BACH
FANTAISIE CHROMATIQUE FANTAISIE C HROMATIQUE ET FUGUE BWV 903
Lemoine Chopin Rimski-Korsakov
Avec les conseils d’Alexandre Sorel
JAZZ BLUE BOSSA
(1re part.)
Avec Antoine Hervé
’
M 03611 - 93 - F: 8,90 E - RD
"
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Le Festival de radio france montpellier languedoc roussillon
.
RÉCITALS
SYMPHONIQUES
MONTPELLIER / LE CORUM, OPÉRA BERLIOZ
LE CORUM, OPÉRA BERLIOZ
VENDREDI 10/07
LUNDI 20/07
12:30
FAZIL SAY .MOZART .CHOPIN .SAY
MARDI 14/07
20:00
20:00
ANDERSZEWSKI EWSKI PIOTR ANDERSZ .BEETHOVEN .SZYMANOWSKI
.BACH
DIMANCHE 19/07 20:00
LOVE STORY
CRÉATION ORCH. NAT N AT.. DE FRANCE A.VEDERNIKOV B.BEREZOVSKY
KATIA & MARIELLE LABÈQUE AVEC DANSEURS HIP-HOP BERNSTEIN.CHALMIN
DEBUSSY.KOERING WAGNER.LISZT
Fazil Say et le Festival, c’est
jamais démentie. Parions que l’enfant terrible du piano turc fascinera, encore une fois par l’aisance insolente de son jeu comme par l’urgence de ses visions musicales.
Le grand Piotr Anderszewski en récital, dans un programme profond et virtuose. ---
DE 8 À 36€
Deux relectures du mythe shakespearien de Romeo
2015, avec danseurs hip-hop (choregraphie Yaman Okur).
Des partitions envoûtantes par l’Orchestre National de France et une création mondiale, le Concerto pour piano et orchestre «Sprachglitter Ephrem» de René Koering, avec l’immense Boris Berezovsky.
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et Juliette West Side Story de Bernstein et Star Cross’d Lovers de Chalmin, créé en
DE 8 À 36€
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DE 8 À 36€
DE 8 À 36€
109 PRÉLUDES, 84 FUGUES
JEUDI 23/07
LE CORUM, SALLE PASTEUR
SAMEDI 25/07
20:00
17:00
SAMEDI 11/07, DE 9H30 À 21H00
Cinq grands pianistes nous font vivre une incroyable journée, tout en Preludes et Fugues, de Bach à Chostakovitch. Cinq générations et nationalités différentes couvrant 230 ans de répertoire... une sorte de massif himalayen pianistique et intellectuel comme cela n’a jamais été fait auparavant. auparavant. --DE 12 À 15€ PAR CONCERT
CÉDRIC PESCIA
RUBACKYTÉ
CHOSTAKOVITCH
BEETHOVEN, L’INTÉGRALE DES CONCERTOS CONCERTOS POUR PIANO SINFONIA VARSOVIA FRANÇOIS FRÉDÉRIC GUY
Le Clavier bien tempéré, Livre I
ANDREI KOBOBEINIKOV
NELSON GOERNER
HINDEMITH
C’est un événement à ne pas manquer ! L’intégrale des Concertos pour piano de Beethoven par François-Frédéric Guy, qui, depuis son clavier, dirige le l égendaire orchestre orchestre Sinfonia Varsovia. Un parcours exaltant, entre profondeur et virtuosité et, à coup sûr, une expérience unique en terme d’interprétation.
Ludus Tonalis
---
BACH
CHOPIN 24 Préludes op.28
DEBUSSY 12 Préludes, Livre I
24 Préludes et Fugues op.87
DOMINIQUE MERLET
DE 8 À 36€
BACH Le Clavier bien tempéré, Livre II
EN DIRECT SUR FRANCE MUSIQUE
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JUILLET-AOÛT -AOÛT 2015 SOMMAIRE N O 93 JUILLET
LE MAGAZINE 5 6 22 30 38 58 64 30
66 82
ÉDITORIAL Par Stéphane Friédérich ACTUALITÉS Événements, festivals, partitions, livres… À L’AFFICHE Nima Sarkechik EN COUVERTURE Bertrand Chamayou DOSSIER L’art de la mazurka PIANOS À LA LOUPE 3 petits quarts-de-queue pour amateurs exigeants et 2 claviers de salon pour petits budgets. HI-FI Enceintes sans fil, casque et convertisseur par Philippe Venturini CHRONIQUES DISQUES ET DVD Classique et jazz L’INVITÉ DE PIANISTE Léonor de Récondo, violoniste et romancière
LIVRET DE PARTITIONS 32 pages de partitions annotées en cahier central
PÉDAGOGIE 26
6
43 BACH EN TOUTE LOGIQUE Par Alexandre Sorel 44 TOUTES LES PIÈCES COMMENTÉE COMMENTÉESS
L U R B U D E I L I M É T O N I G C R A M S S I E W E N I D L A R E G O T A R E / E V E R G G R O B O C R A M
56 LA LEÇON DE JAZZ d’Antoine Hervé : BLUE BOSSA (1 re part.) no 93
À no noss le lect cteu eurs rs
PIANO Alexandre Sorel
NikolaïRims ki-Korsakov Romanceop .15n°2 • FrédéricChopi n •Mazrukasop.67n°4etop.63n°3 •HenryLemoineÉtudeop.37n°26 •JohannSebastianBach FantaisiechromatiqueetFugue LA LEÇON DE Véra Tsybakov
•Bach Fantaisiechromatique Écoutezetjouez
lespartitionsdu magazine
LA LEÇON DE JAZZ D’ Antoine Hervé
«BlueBossa»(1 (1 partie) •«BlueBossa» re
L’offre Pianiste en kiosque change! Retrouvez une offre unique: votre magazine avec le CD Pianiste. Si vous souhaitez le DVD, vous pouvez le commander à l’unité sur notre boutique www.pianiste.fr/boutique/dvd pour 7 euros seulement seulement (p.79) ou par abonnement à prix préférentiel (p.42). NIVEAUX
débutant/moyen/ supérieur
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juillet- août 2015
PIANISTE n°93 3
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24 - 30 août 2015 annecyclassicfestival.com +33 (0)4 50 51 67 67
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ÉDITORIAL N O 93 JUILLET-AOÛT 2015
PIANISTE EST UNE PUBLICATION BIMESTRIELLE SOCIÉTÉ ÉDITRICE : Groupe Express-Roularta SA au capital de 47 150 040 euros SIÈGE SOCIAL : 29 rue de Châteaudun 75308 Paris Cedex 09 Tél. : 01 75 55 10 00 - Fax : 01 75 55 41 11 RCS 552 018 681 Paris PRINCIPAL ACTIONNAIRE : ALTICE MEDIA GROUP FRANCE PRÉSIDENT DIRECTEUR GÉNÉRAL : Marc Laufer DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Christophe Barbier ABONNEMENTS Pianiste - Service Abonnements 4 route de Mouchy, 60438 Noailles cedex Tél. : 01 70 37 31 53 - Fax : 01 55 56 70 91 Depuis l’étranger : (+33) 1 70 37 31 53 E-mail:
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[email protected]) SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Michelle Benaïm Tél. : 01 75 55 41 53 (
[email protected]) ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : Camille Arcache (stagiaire) Sylvia Avrand-Margot, Claire Barrois, Jacques Bonnaure, Roxanne Bouhier (stagiaire), Jérôme Chatin (photo), Jean-Noël Coucoureux, Bernard Désormières,Michel Fleury, Elsa Fottorino, AénorGillet de Thorey (stagiaire), Jean-Paul Guillotteau (photo), Antoine Hervé (pédagogie), Jean-Pierre Jackson, Michel Le Naour, Pi erre Massé, Antoine Mignon, Aurélie Moreau, Michelle Muller, Luc Nevers, Alexandre Sorel, Véra Tsybakov (pédago.), André Tubeuf, Philippe Venturini, Marc Vignal. DIRECTRICE ARTISTIQUE : Isabelle Gelbwachs RÉDACTEUR-GRAPHISTE : Sarah Allien (
[email protected]) PHOTO DE COUVERTURE : Marco Borggreve/Erato. MANAGEMENT DIRECTEUR PÔLE CULTURE: Eric Matton DIRECTEUR DÉLÉGUÉ PÔLE CULTURE : Tristan Thomas Tél. : 01 75 55 40 73 (
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Directeurs : Christophe Barbier, Eric Matton GROUPE EXPRESS-ROULARTA Secrétaire général : Richard Karacian Directrice régie : Valérie Salomon Directrice des ventes au numéro: Sophie Guerouazel Directeur des abonnements : Bertrand de Saint Germain Directeur des ressources humaines : Richard Karacian Directrice financière : Sophie de Beaudéan Directeur comptabilité : Gilles Hervo Directrice des éditions électroniques : Sophie Gohier Directeur achats et services généraux : Thierry Pallu IMPRIMERIE Roularta Printing. Imprimé en Belgique • Distribution : Presstalis• Diffusion en Belgique : AMP, Rue de la Petite Ile 1 B-1070 Bruxelles Tél : + 32 (0) 252514 11 - E-mail :
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Le principe d’incertitude*
I
l est grand temps de se décider. Mais lequel choisir? Je veux parler du festival proche de votre lieu de vacances, lequel n’est pas encore certain car tant de paramètres imposent de différer votre choix – ce qui est compréhensible car notre vie si remplie de choses indispensables qui occupent toutes nos pensées – et repoussent sans cesse la solitude à laquelle nous aspirons, mais que nous craignons parfois, alors que l’intranquillité prouve bien que nous existons, n’est-ce pas, et quand bien même nous nous déciderions au dernier moment, Internet réalisera la sélection idéale entre la réservation des billets pour aller entendre cet artiste, ce pianiste – quel est son nom déjà? – et votre hébergement non loin de ce village où vous êtes passé, il y a tant d’années, et que vous avez promis de faire découvrir à votre famille. Respirez ici! Ne croyez-vous pas qu’il est temps de reprendre votre souffle? Rassurez-vous, la rédaction de Pianiste , qui connaît parfois les mêmes doutes, vous aide. Cherchez tout d’abord un endroit calme, au bureau, par exemple, pour découvrir les pages d’actualités de votre magazine. Complétez ensuite votre information, retournez devant votre ordinateur et découvrez les nombreuses manifestations mises en ligne sur Pianiste.fr. Enfin, rendez-vous sur la page Facebook de Pianiste nouvellement créée. Parmi les quelque 600 festivals recensés en France, il y en aura bien un qui tordra le coup à cette insupportable incertitude. Stéphane Friédérich Rédacteur en chef
* Sans lien aucun avec le principe d’incertitude de Werner Karl Heisenberg (1901-1976)…
Nous y sommes!
Désormais, retrouvez Pianiste sur Facebook En direct des concours, des festivals,
des concerts… Pianiste vous informe en continu de l’actualité du piano. Dialoguez, échangez, participez avec Pianiste et sa communauté.
juillet -août 2015
PIANISTE n°93 5
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ACTUALITÉ S ÉVÉNEMENTS Plus d’infos sur www.pianiste.fr
Muza Rubackyté
Benjamin Alard Fazil Say I T T E L O C I N O T R E B M U N N A
FESTIVAL RADIO FRANCE-MONTPELLIER
T O N I G C R A M
M U E N E
Dominique Merlet
TRENTE ANS D’AMOUR POUR LE PIANO
Les sœurs Labèque
Cédric Pescia
Voici trois décennies déjà que le festival Radio France à Montpellier ravit nos oreilles. Cette année, le public assistera à plus de 170 manifestations (dont une proportion notable dans diverses communes de la région). Une majorité des concerts sera, comme les années passées, à entrée libre. Corinne Delafons, adjointe au directeur de la programmation artistique répond à nos questions.
T
rente ans, pour un festival, c’est bien au-delà de l’âge de la raison…
dont Boris Berezovsky et l’Orchestre National de France créeront le Concerto pour piano sous la baguette d’Alexander Vedernikov . Nous accueillerons également Piotr Anderszewsk i (le 20) dans Schumann, Szymanowsk i, Bach et Beethoven. Autre temps fort pour les pianistes: l’intégrale des concertos de Beetho ven sous les doigts de François-Frédéric Guy, avec le Sinfonia Varso v ie (23 et 25 juillet). Là encore, un clin d’œil à une précédente intégrale, il y a quelques années avec Alfred Brendel.
Raisonnable… pas si sûr ! La journée du 11 juillet, par exemple, sera dédiée aux préludes et fugues ! Un voyage partant du Clavier bien tempéré de Bach (avec Dominique Merlet et Cédric Pescia) aux Préludes et Fugues de Chostako v itch (Muza Rubackyté) en passant par les Préludes de Chopin et ceux de Debussy (Nelson Goerner) a insi que le Ludus Tonalis d’Hindemith (Andrei Korobeinikov). Le 19 juil- Parlez-nous des autres artistes let, nous ferons un cl in d’œil au invités… et des surprises! créateur du festi val, René Koering, Nous recevrons, entre autres, Faz il 6 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
festi val. Il représente un attrait supplémentaire pour les radios étrangères car les concerts sont enreg istrés. Autre surprise : le 20 juillet, nous présenterons la journée « Génération 85 », qui réunira des artistes nés l’année de la fondat ion du festi val : Ben jamin Alard, Dav id Kadouch, Michael Erstzscheid, pour Say qui s ’illustrera dans sa propre ce qui concerne les clav iers, seront musique mais aussi dans des pièces sur scène. Ce ne sera pas le seul évéde Janácek, Mozart, Chop in (le 10 nement puisque nous collaborerons juillet). Katia et Marielle Labèque aussi avec les conservato ires de mu joueront avec l ’électronique et des sique dont les élèves se produ iront percussions dans un programme or i- dans di vers lieux de la v ille. ginal associant Ravel, Bernstein et Vous parliez d’enregistrements… Dav id Chalmin (le 14) . N ikolay De nouveaux disques en Khozyainov (les 21 et 22), puis Da- perspective ? v id B ismuth (le 15), avec Camille Nous enreg istrons avant tout des Thomas au v ioloncelle, offriront un opéras . Ce sera le cas cet été avec récital consacré à cinq compositeurs La Jacquerie d’Edouard Lalo, en de la région Languedoc-Rouss illon. coproduction avec le Palazzetto Alexandre Paley (le 17) a cho isi des Bru Zane. raretés (Glazounov, Medtner, BaPropos recueillis lak irev et Scr iab ine) . Ce type de par Stéphane Friédérich programme s ’inscr it parfaitement Du 9 au 25 juillet, dans la mission de serv ice public du festivalradiofrancemontpellier.com
W U E V E R G G R O B O C R A M T E H C E S S I O Ç N A R F P D S S E I V A D . H N I B O R
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ANNECY CLASSIC FESTIVAL
Denis Matsuev.
FESTIVAL DE MENTON
La belle entente franco-russe
L
a nouvelle édition du festival de Menton (la soixante-sixième!) propose du 31 juillet au 13 août, de superbes récitals et concerts de musique de chambre. On se réjouit d’entendre Yevgen Sudbin (le 2) à l’occasion de l’inauguration du piano « Jean-Cocteau » réalisé par Bösendorfer. Le 6 août, Kotaro Fukuma jouera Mozart, Beethoven et Schubert. Autre récital solo, celui de Khatia Buniatishvili (le 10) qui jouera Gaspard de la nuit de Ravel, une série de pièces virtuoses de Liszt avant de terminer sa prestation par Petrouchka de Stravinsky. Beatrice Rana (le 11) a choisi Bach, Chopin et Debussy. Notons également la présence de Kathryn Stott avec la violoniste Janine Jansen (le 2), David Bismuth et le clarinettiste Pierre Génisson (le 7), Ismaël Margain et la violoniste Alexandra Soumm (le 9), Juliana Steinbach au sein de son Trio Talweg (le 10), Fazil Say avec le Quatuor Minetti (le 11)… Le concert de clôture réunira Nikolaï Lugansky, avec le Sinfonia Varsovia dirigé par Alexandre Vedernikov, dans les deux concertos pour piano de Chopin (le 13). festival-musique-menton.fr Beatrice Rana.
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réconfortant équilibre artistique, message subliminal, qui sait, aux aléas des déséquilibres de la diplomatie du temps présent… Récital d’orgue, musique de chambre et religieuse ( Missa Solemnis de Beetho ven)… du 24 au 30août, il y en a pour tous les goûts. L’Orchestre philharmonique de Saint-Pétersbourg, dirigé par Yuri Temirkanov, formation de luxe s’il en est et à domicile, accompagnera tout d’abord le duo Christina et Michelle Naughton, solistes du Concerto pour deux pianos de Poulenc (le 24 août). Denis Matsuev fera une première apparition avec l’Annecy Campus Orchestra de Fayçal Karou i (formation composée d ’étudiants venus V O H K U Y T V E Y N E G V E
M
anifestation de prest ige codirigée par Pascal Escande et Denis Matsuev, l’Annecy Classic Festi val est devenu, en cinq ans, un événement international franco-russe. Le cho ix des inv ités et des répertoires apporte un juste et
FESTIVAL CHOPIN À PARIS
Préludes aux chandelles
du monde entier et encadrés par les pup itres du Philharmon ique de Saint-Pétersbourg), dans la Rhapsodie sur un thème de Paganini de Rachmaninov (le 26). On le retrouvera le 30 août dans le Concerto n°3 de Prokof iev avec le Ph ilharmonique de Saint-Pétersbourg . Entre-temps, le 25 août, Bertrand Chamayou aura donné le Concerto pour piano n° 2 de Saint-Saëns avec ce même orchestre sous la direction de Domingo Hindoyan. Le 27, Alexandre Tharaud assoc iera Mozart, Mahler (l ’Adagietto de la Symphonie n° 5 dont il a réalisé une remarquable transcr iption), Chopin et Beethoven. Le 29, Alexander Malofeev, lauréat du Concours d ’Astana 2013, et Il ia Lomtatidze, lauréat de l’édition 2015 se produiront en récital. Annecyclassicfestival.com
Khatia Buniatishvili.
L
a 32e édition du festi val Cho- tera Jean-Claude Pennetier dans un pin, qui se tient à l’Orangerie consistant programme Chop in, du parc de Bagatelle, a pour Haydn et Schubert (le 7) et, deux thème le «prélude». Huit concerts jours plus tard, Alexandre Paley aux chandelles, des réc itals en (photo). Le pianiste moldave a choisi après-m idi, une conférence et de Rameau (dont il enregistre l’inténombreux inv ités pour illustrer la grale de l ’œuvre) avec Chop in, belle formule d ’André Gide: « Un Schubert et Franck . En avant-prem ière, deux cand idats du futurs prélude à quoi?». Débuté le 20 juin, la manifestation Concours Chopin de Varsov ie (ocse poursu it le 1er juillet avec l’inv i- tobre 2015) donneront un réc ital. tat ion d ’Ak iko Ebi qu i asSouhaitons que Chopin, Paderewsk i soc iera les Préludes de et Moszkowsk i portent chance à er Chopin au 1 Li vre de Krzysztof Ksiazek et Andrze j ceux de Debussy . Le 5 W iercinsk i (le 11). On retrouvera Kotaro Fukuma dans un pro juillet, les pianistes Lidija gramme très var ié (le 12), et San ja Biz jak alterneront en solo et à quaalors qu’Aimi Kobayashi tre mains, dans des n’a sélectionné que des pièces de Chopin, pièces de Chopin (le 13). Debussy, Hummel Du 20 juin au 14 juillet, et Liszt. On écoufrederic-chopin.com N O D I L O D N E I T S A B É S
E S A A H R E H T S E
AU CHÂTEAU DE LA MOUTTE Le château XVIIIe siècle dans la presqu’île de Saint-Tropez accueille un festival aux programmes variés. Notons la venue des pianistes Khatia Buniatishvili (le 7 août), Katia et Marielle Labèque (le 9) ainsi qu’un concert jazz avec Jim Watson entouré des percussions de Manu Katché, du saxophoniste Tore Brunborg et du trompettiste Luca Aquino. Du 4 juillet au 13 août lesnuitsduchateaudelamoutte.com juillet- août 2015
PIANISTE n°93 7
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ACTUALITÉ S ÉVÉNEMENTS Plus d’infos sur www.pianiste.fr
Jean-Yves Thibaudet, en résidence à Gstaad.
. O T O H P N A T A C N A / R E N N A T A J N A
P D S
GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY
BEAUCOUP DE TALENTS ET UN SOUPÇON D’IRONIE
a en effet les « stars » internationales comme Andras Sch iff et Jean-Yves Th ibaudet, notre art iste en rés idence. Il assurera non seulement le concert d’ouverture, mais aussi deux réc itals de musique de chambre . Quant au pianiste hongrois, il donnera un programme Haydn, Mozart, Beethoven et Schubert . Au sein de la jeune génération, les pianistes sont part iculièrement représentés. Je pense au p ianofortiste Krystian Bezuidenhout, que l ’on entendra en réc ital et en musique de chambre. Un artiste qui me passionne car il associe l’œuvre à l’instrument qui lui correspond. Je pense aussi au génial Daniil Trifonov, qui se produira en solo et avec orchestre dans le Quatrième Concerto pour piano de Rachmaninov . L’Orchestre du festi val de Budapest, d irigé par Ivan F ischer, l’accompagnera. Nous accueillerons ces deux pianistes pour la première fois. Il y aura b ien d’autres jeunes musiciens lors des « Matinées des jeunes étoiles » : les pianistes Bobby Mitchell, Yuval Gilad, les v iolonistes Chad Hoopes, U i Youn Hong, Ju Eun Anna Lee, la v ioloncelliste Miriam Prandi, le clarinettiste Pablo Barragan, etc . La plupart d’entre eux sont lauréats de grands concours internationaux.
Comment concilier un festival L’été, Gstaad, dans le canton de Berne en Suisse, et plusieurs académies, des réunit un festival et des Académies destinées aux musiciens professionnels et une artistes vocaux, aux instrumentistes et aux futurs chefs demande accrue de musiciens amateurs ? d’orchestre. Ouvert aux amateurs, il a de quoi attirer Tout d’abord, les jeunes musiciens bien des mélomanes! Son directeur, Christoph Müller, qui débutent leur carrière travaillent nous décrit les grandes lignes de l’édition 2015. avec de grands maîtres dans leur d is-
cipline. C’est le passage des traditions, le compagnonnage qu i se concrétise e thème choisi pour cette entendra aussi bien des sonates de sur scène. Les musiciens amateurs de édition est « Ironie et mu- Beethoven qui « ironisent » sur des tous âges qui font partie de notre pusique» ! C’est un peu dérou- mélodies populaires, que le savou- blic auront, eux, le choi x de l’une des reux poème symphonique Till Eu- deux sessions en orchestre. So ixantetant pour un festival, non? La musique regorge d’œuvres qui se lenspiegel de R ichard Strauss. di x participants, pour chacune des nourrissent d’ironie. Ironie et sar- L’une des particularités de votre deux semaines d’académie, se sont casme, caricature et humour… Pre- festival est d’associer les artistes lancé le déf i de nous re joindre. Ils senez les exemples de Prokof iev et de de renommée mondiale et ront immergés dans un bain de musique. Ils assisteront aussi aux répéChostakov itch dans la Russie sov ié- les musiciens au début de leur tique : l’ironie leur a été une inépui- carrière… titions, aux classes de maître, à des sable source d’inspiration. Nous C’est l’esprit qui an imait Yehudi rencontres avec les plus grands art istes. avons donc proposé ce thème, sans Menuhin lorsqu’il créa le fest i val et Propos recueillis par S F. contrainte bien sûr, aux artistes in- l’académie. Il portait une attention Du 16 juillet au 5 septembre v ités de l’édition 2015. Le public extrême à ses jeunes confrères . Il y gstaadmenuhinfestival.ch
L
8 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
EN BREF David Bismuth se produira,
le 3 juillet, au festival de Durtal (49). Au programme de son récital : « Bach, tel père, tels fils », en lien avec son disque paru chez Ame Son («Maestro» de Pianiste ). festivalmusicaldurtal.fr Hélène Tysman choisit Ravel.
Le 14 juillet, la pianiste jouera pour le concert de clôture du Festival Chopin, au parc de Bagatelle (Paris). À 17 h, on pourra l’écouter interpréter Chopin, Debussy et surtout Gaspard de la Nuit de Ravel. De ce compositeur, la pianiste enregistrera Des Antiques aux démons , le 15 août, à Berlin pour la Deutschlandradio Kultur, augurant la sortie prochaine d’un disque prometteur. frederic-chopin.com Alexandre Sorel, notre
collaborateur, donnera un récital le 22 août à 18 h, au Château de Verteuil (Charente). Il s’illustrera dans des œuvres de Mozart, Liszt, Chopin et Ernesto Nazareth. Rés.: 0545 31 15 74 Martha Argerich et Nicholas Angelich seront les solistes du
concert de clôture des Chorégies d’Orange, le 10 juillet. Ils joueront le Concerto pour deux pianos de Poulenc avec l’Orchestre philharmonique de Radio France dirigé par Myung Whun Chung. choregies.fr Martha Argerich.
R E N R E W A J N O S
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E V E R G G R O B O C R A M
Nareh Arghamanyan.
LISZT EN PROVENCE
La romantic touch
L
iszt en Provence – le «fest i val Schubert et de Liszt (le 9). R ichard romantique» – se déroule au Bonynge, Rosemary Tuck accomcœur des v ignes, dans le cadre pagneront la soprano Vérène Anenchanteur du Château Saint-Es- dronikov dans un concert en homtève d’Uchaux (84). Sur un piano mage à W illiam V incent Wallace. Faz ioli, les artistes inv ités donneront Des morceaux de Czerny et Liszt sept concerts. Le fest ival s’ouvrira compléteront cet hommage (le 12). avec la venue de Jean-Baptiste Fon- Roger Muraro a cho isi Schumann, lupt. Schubert, Schumann, Chopin Wagner/Liszt et surtout la Symphonie et Wagner/Liszt sont au pro- fantastique de Berlioz transcrite par gramme de son réc ital (26 juillet). Liszt dont il a laissé un enregistrement Nicolas Celoro et le coméd ien remarquable (le 16). Francesco Libetta Michael Lonsdale retraceront dans associera Beethoven, Liszt, Chopin leur spectacle l’œuvre de Liszt, et Massenet dans des pièces largement «musicien tz igane et franciscain» (le influencées par l’opéra (le 21) . Enf in, 2août). Pianiste saluée dans ces co- le 20 septembre, la v ioloniste Tatiana lonnes, notamment pour son disque Samouil et la pianiste Irina Lankova Khatchatourian et Prokof iev, Nareh joueront des œuvres de Beethoven, Arghamanyan jouera des transcrip- Sarasate, Liszt et Grieg. tions, de Bach, de Busoni et aussi Du 26 juillet au 20 septembre, d’elle-même, ainsi que des pièces de liszt-en-provence.com
CONCOURS DE PIANO DE DUBLIN
Un Premier Prix français Le 26 mai dernier, Nathalia Milstein remportait la X e édition du Concours international de piano de Dublin. Après avoir démarré le piano avec son père, Serge i Milstein, Nathalia a poursui v i ses études auprès de Nelson Goerner, à Genève . Après 11 jours de compét ition, elle a cho isi de présenter, en f inale, le périlleux Deuxième Concerto de Prokof iev . Pourtant, la jeune artiste ne « s’attendait pas à arriver jusqu’en finale » de l’épreuve, conf it-elle. Pour la cand idate, « le plus important était d’apprendre et de travailler un programme de cette envergure. Chaque préparation à un concours, quel qu’en soit le résultat, est un défi personnel et une étape de plus à franchir dans l’expérience d’un musicien ». Première femme de l ’histoire à remporter ce concours, Nathalia Milstein se dit « honorée et fière de ce nouveau rôle ». À tout juste 19 ans, la p ianiste croule dé jà sous les engagements . Aurélie Moreau Plus d’informations sur dipc.ie juillet- août 2015
PIANISTE n°93 9
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LES SOLISTES À BAGATELLE
LA CRÉATION CONTEMPORAINE SE MET AU VERT Douze concerts célébreront le 15e anniversaire du festival qui s’est employé, depuis ses origines, à promouvoir les jeunes talents. Des concerts d’une heure comprenant une pièce de musique contemporaine.
D
ans les jardins de Bagatelle, à Paris, le public assistera à deux créat ions mondiales, de Marc Monnet (29 août) et FranckChristoph Yeznik ian (12 septembre). Rémi Geniet ouvrira la manifestation avec des pièces de Bach, Chopin et Michel Petrossian (le 29). Outre l’œuvre de Marc Monnet, Gu illaume Coppola jouera Ravel et des Valses Schubert, pièces qu’il a récemment enregistrées. Le 30, Jonas
Y B E R E I R A M E N N A
V itaud associera Liszt avec la musique de Bertrand Ducol . Le 5 septembre, le public appréciera sans doute deux réc itals de duos liés à la sort ie de disques. En effet, Marie-Josèphe Jude et Michel Béroff joueront Liszt et John Adams, à l’occas ion de la parution de leur album chez Lyrinx. François-Frédéric Guy avec Jean-Efflam Bavouzet joueront Debussy et Strav insky, en écho à leur d isque sorti chez Chandos (voir article page 74), ainsi que Bruno Manto-
ÉCHOS DE CONCERT
Thomas Enhco au Châtelet
L
e 7 mai, Thomas Enhco, petit-f ils du chef d ’orchestre Jean-Claude Casadesus, présentait son nouvel album, «Feathers», au Théâtre du Châtelet, à Paris. Sur la scène, arrangée comme celle d’un piano-bar, Thomas Enhco a fait une entrée décontractée. Le pianiste de 26 ans interprète des morceaux de sa composition et improv ise dans un élan jazz inspiré par la var iété. 10 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
Nous entendons ensuite un extrait de Porgy and Bess de Gershw in. Concentré malgré le publ ic qui a continué à s’installer alors que le concert était bien entamé, il li vre une première partie de concert assez lisse et rondement menée . « Le théâtre du Châtelet est un lieu dont j’ai rêvé durant mon enfance et que j’ai fantasmé », a conf ié le jeune pianiste, v isiblement rav i. Dans une seconde part ie, Thomas
vani. Le 6 septembre, Anne-Céline Barrère et Nicolaï Maslenko ont choisi un réperto ire slave (Borodine, Scriabine et Rachmaninov) avec une pièce d’Oscar Strasnoy . De leur côté, Cla ire Désert et Florent Boffard présenteront à deux pianos, Brahms et Peter Eötvös . Le 12 septembre, Varduhi Yeritsyan rendra hommage à l ’œuvre de Scriabine et créera la p ièce de Yeznik ian. Quant à Geoffroy Couteau, il a choisi Brahms et Scriabine avec une part ition de
Rodolphe Bruneau-Boulmier, à l’occasion de la sortie du CD édité par Odradek . Le dernier jour du festi val, le 13 septembre, sera consacré à une « carte blanche » à Shani Diluka. La musique de Jörg W idman fera écho à la dern ière Sonate de Schubert. On retrouvera la pianiste en compagnie du v ioloncelliste Valentin Erben dans des pièces de Beethoven et Johana Doderer . Du 29 août au 13 septembre www.ars-mobilis.com
quette avec lequel il a interprété le premier mouvement de la Première Sonate de Brahms. Mais la partie la plus remarquable de la so irée fut, de loin, l’interprétation des Danses roumaines de Bartók . Les deux musiciens ont joué en totale osmose, surprenant le publ ic grâce à des nuances très marquées . La soirée a f ini par un trio arrangé à partir de l’une des premières compositions d’Enhco, Sand Creek Song . Une sorte de passerelle entre les muEnhco a partagé son pla isir d ’être siques classique et jazz, entre les sur scène avec d ’autres musiciens, musiciens et avec le publ ic. Mission dont le v ioloncelliste Henri Demar- réussie. Claire Barrois P D S
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LA ROQUE-D’ANTHÉRON ET LE PIANO, PAR RENÉ MARTIN Le fameux festival provençal fête ses 35 ans. L’occasion pour son directeur de présenter sa programmation et de donner sa vision du monde du piano.
32 Festival Chopin e
à Paris
Orangerie du Parc de Bagatelle
P D S
À
la « grand-messe » du piano, on notera un accent tout particulier mis sur les ensembles de musique de chambre en résidence : une sorte de festival dans le festival. Depuis presque vingt-cinq ans, nous rassemblons les jeunes artistes qui seront l’élite de demain. Nicholas Angelich, Adam Laloum, Bertrand Chamayou, ces pianistes qui, aujourd’hui, font une si belle carrière, sont ainsi venus très tôt à La Roque. C’est un vivier, une réserve, un complément indispensable aux études académiques, qui permet à tous ces musiciens de mettre le pied à l’étrier. Nous touchons presque 10 000 personnes, qui peuvent entendre les futures stars du piano français, une école si riche aujourd’hui. Moi qui voyage pour les Folles Journées dans de nombreux de pays à travers le monde, je vois toutes ces jeunes générations : l’école de piano russe est toujours aussi fantastique, la Chine est à part, mais en Europe occidentale la France est numéro un. Ailleurs on a des épiphénomènes, alors qu’en France, chaque année, apparaissent plusieurs personnalités. Nous devons être fiers de cela, car notre système de formation est excellent, et nous avons des maîtres qui permettent à la tradition de se perpétuer. Je pense, par exemple, que c’est un cadeau du ciel pour un jeune pianiste de rencontrer Jean Claude Pennetier (le 5 août). Certains de nos jeunes, comme Adam Laloum ou Rémi Geniet, sont plus médiatisés que ces maîtres, et pourtant ils ont besoin d’aller les voir, de retourner à la source des partitions. C’est ce qui fait la richesse de l’école française : il existe comme un « réseau spirituel » entre les pianistes. À La Roque, cette année, il y aura aussi des révélations. Par exemple le jeune pianiste russe Alexander Malofeyev (le 20 août). Il a 13 ans et c’est un protégé de Valery Gergiev. Le même soir, Arcadi Volodos, un pianiste extraordinaire, se produira. L’amateur de piano aura donc un double choc le même jour ! Je voudrais encore parler de la jeune Japonaise Aimi Kobayashi (le 31 juillet) révélée à 13 ans elle aussi, et qui, quelques années plus tard, révèle une personnalité étonnante. Elle passera bientôt le concours Chopin de Varsovie, mais fait déjà l’histoire de La Roque-d’Anthéron ».
Autour du prélude 20 juin - 14 juillet 2015
Propos recueillis par Bertrand Dermoncourt et Stéphane Friédérich
24 juillet au 21 août - festival-piano.com juillet- août 2015
PIANISTE n°93 11
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Yoshida Asako (Prix Pianiste ).
EN BREF FESTIVAL DU VIGAN
E U O N I A K I M
CONCOURS LÉOPOLD-BELLAN
UN BEL ÉLAN Nul doute que, deux ans après sa renaissance, le concours Bellan tient ses promesses. Neuf jours de compétition, 300 candidats, 62 récompensés. Sur la scène de la salle Cortot dimanche 17 mai, 13 Prix d’Honneur et Prix Spéciaux donnèrent un concert de gala de haut vol.
C
ôté piano jazz, on put apprécier Dexter Goldberg dans une de ses compos itions, récompensé pour la format ion en trio. Côté classique, Yoshida Asako (Pri x Pianiste ), remarquable précédemment dans Debussy et Granados, donna ce soir-là une Sonate de Haydn perlée, délicatement colorée, an imée d’un sens de la dramaturgie mesuré. En revanche, l ’Étude op. 39 n°1 de Rachmaninov manquait de corps dans les graves . Mais les concours sont a insi faits qu’il est demandé aux artistes d’être parfaits dans tous les styles, tous les domaines et sur commande. Qui le pourra it ? Yoshida Asako a étud ié au Japon. D’abord au cours Yamaha, puis au Conservatoire de 12 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
Sapporo et enf in au département musical de l’uni versité Sapporo Otani. En 2011, elle v ient en France où elle su it l ’enseignement de Billy Eidi au Conservatoire à Rayonnement Régional de Paris. Actuellement, elle poursuit ses études au CRR de Rue il-Malmaison auprès de Chantal R iou. Nous recueillons ses impressions juste à l’issue du concert: « J’ai choisi des œuvres que j’aime beaucoup, en privilégiant l’aspect expressif. Je n’ai pas voulu faire une démonstration technique. » Lorsque nous lu i demandons quel a été son me illeur souvenir de ce concours, elle répond franchement: «Quand les résultats ont été proclamés! C’était une sensation incroyable. Un moins bon souvenir, ma prestation lors du
concert de gala de ce soir, dont je suis moins contente. Mais cette récom pense m’a procuré un grand bonheur… à en pleurer! Ce prix me conforte dans l’idée que je suis sur la bonne voie.» Revenons maintenant vers d’autres lauréats. Elena Dmytriieva joue les Sarcasmes de Prokof iev avec une rage à toute épreuve, de la maîtr ise, un son ample. Un sans-faute. Certainement boosté par l ’événement, le jeune espo ir Francesco GruppoMaurel f ila comme l’éclair une Étude op. 25 n° 2 de Chopin. Il devra apprendre à moduler ses énormes moyens techniques. Une magnif ique découverte, le Tr io Hélios, réellement enthousiasmant dans le fougueux f inale du Trio de Smetana. À l’applaudimètre, le grand gagnant est le v ioloncell iste Ben jamin Kruithov, couronné Pr i x du publ ic ce soir-là. En parfaite complicité avec son pianiste accompagnateur Yun Yang Lee, il est la magnif ique incarnation du bonheur de jouer, d’être sur scène, de partager . Un charisme dé jà indéniable. Les jeunes artistes doi vent doréna vant penser le concours Bellan comme un maillon important dans leur parcours, c’est certain. Sylvia Avrand-Margot
concoursinternationalleopoldbellan.fr
La quarantième édition du festival du Vigan, dans le Gard, se tiendra du 16 juillet au 22 août. Elle fera la part belle aux pianistes. Maurizio Baglini jouera Beethoven, Scriabine et Schumann le 16 juillet, et Miroslav Kultyshev (vainqueur du Concours Tchaïkovski et du Monte-Carlo Piano Masters en 2012) donnera un concert le 7 août pour jouer Chopin et Ravel. Adam Laloum interprétera Borodine, Debussy et Poulenc en duo avec le clarinettiste Raphaël Sévère le 22 août. festivalduvigan.fr
LES NUITS D’ÉTÉ DE MÂCON Dirigé par Jean-Pascal Meyer et Xavier Le Roux, la treizième édition du festival propose, du 27 au 31 juillet, cinq spectacles place Saint-Pierre et au musée des Ursulines de Mâcon. Les amateurs de piano entendront le Trio Karénine, tout d’abord, dans des pièces de Haydn, Dvorák et Philippe Hersant (27 juillet), puis le pianiste Xavier le Roux accompagnant la violoniste Liana Gourdjia dans Mozart, Fauré et Brahms (le 29). Enfin, le Trio composé de Liza Kerob (violon), Dominique Vidal (clarinette) et Jean-Pascal Meyer au piano joueront des pièces de Stravinsky et Debussy, entre autres. artenliberte.fr Adam Laloum.
R E G R U B . F
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JOUEZ ET GAGNEZ
un séjour pour 2 personnes et des places de concert Le duo Yaara Tal et Andreas Groethuysen.
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1er prix : Séjour pour 2 personnes à Annecy
FESTIVAL DE LUCERNE, SUISSE
L’humour en plus
A
près l’ironie au fest ival de Gstaad (voir p.8), voici l ’humour, thème du festi val de Lucerne . Et quel meilleur ambassadeur de l’humour qu’Alfred Brendel, attendu dans la présentation du concert dirigé par Bernard Haitink (le 14 août) ! Pour sa part, Olli Mustonen a choisi, aux côtés des sol istes de l’Orchestre du fest ival, des pièces de Hindemith, Beethoven, Poulenc et Dvorák (le 16). Le 18, le duo Yaara Tal et Andreas Groethuysen offrira notamment Le Carnaval des animaux de Saint-Saëns en dialecte suisse ! Bernard Haitink, mais avec l’Orchestre de chambre d’Europe, accompagnera Mar ia João Pires dans le Concerto n°23 de Mozart (le
S I E L
L E A H C I M
22). Le Royal Concertgebouw d’Amsterdam (dir. Daniel Harding) dialoguera avec le p ianofortiste Kristian Bezuidenhout dans le Concerto n°18 de Mozart. Yuri Temirkanov et l’Orchestre de SaintPétersbourg donneront avec N ikolaï Lugansky, le Concerto n°2 de Rachmaninov (le 3). Igor Lev it proposera un récital Bach, Beethoven, Hindemith (le 8). Le même jour, Yef im Bronfman sera le soliste du Concerto n°3 de Beethoven avec la Staatskapelle de Dresde (dir. Christian Thielemann) . Yu ja Wang jouera le 2e Concerto de Bartók avec le Symphonique de San Francisco, (dir. Michael Tilson-Thomas) (le 11). Du 14 août au 13 sept. - lucernefestival.ch
1 aller-retour en train 2e classe pour 2 personnes en
France métropolitaine. 2 nuits, petit déjeuner compris, à l’Hôtel Bonlieu 3* pour 2 personnes du 24 au 26 août 2015 1 invitation pour 2 personnes aux concerts du 24 et 25 août 1 programme offert
Ne sont pas compris, les dépenses personnelles, les autres repas, les assurances.
24 août 2015 - 21h
25 août 2015 - 21h
Poulenc | Fauré | Tchaïkovski
Saint-Saëns | Tchaïkovski | Schumann
Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg Domingo Hindoyan – direction C. & M. Naughton – pianos
Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg Domingo Hindoyan – direction Bertrand Chamayou – piano
Du 2e au 6e prix
1 invitation pour 2 personnes au concert Evening Piano Eliane Richepin le 28 août 2015 à 18h (soit 5 invitations pour 2 personnes)
Plus de détails sur les concerts sur www.annecyclassicfestival.com
Pour participer envoyez vos réponses aux 3 questions suivantes :
PIANO À RIOM
Patchwork musical
D
ébuté le 9 juin, Piano à R iom se poursuit jusqu’au 10 juillet. Le festi val auvergnat multiplie les opportunités de rencontres avec des artistes aux esthétiques les plus di verses. Originalité garantie ! Le 30 juin, on entendra a insi François-René Duchâble et le coméd ien Alain Carré illustrer en musique «Les grands discours politiques de Jésus à Mandela ». Philippe Cassard prendra le relai le lendemain avec un récital au thème évocateur: « Histoires d’eau». Nadine Sadarnac a
imaginé un spectacle jazzy « Bolling et moi ! » (le 2 juillet). Slawomir Zubrzysk i a recréé le p iano de Léonard de V inci! Le génie avait en effet rêvé d’un instrument, la Viola Organista, mélangeant les sonorités du v ioloncelle et du clavec in (à découvrir le 7). Ol iv ier Besnard offrira
un programme « Feu sacré » avec les 12 Études d’exécution transcendante de Liszt (le 9). Le jazzman Franck Av itabile a pensé son réc ital à partir du thème de son disque « Short Stories ». http://piano-a-riom.com
1) À quelle date pourra-t-on entendre Aleksander Malofeev et Ilia Lomtatidze à Annecy Classic Festival cet été ? 2) Quel est le compositeur dont on fête cette année le 175e anniversaire de sa naissance ? 3) Qui dirigera la Missa Solemnis ? Les personnes ayant répondu correctement aux 3 questions participeront La société GROUPE EXPRESS ROULARTA (RCS Paris n°552 018 681), organise, du 26 juin 2015 au 27 juillet 2015, un jeu concours gratuit et sans obligation d’achat intitulé «Jouez et Gagnez» pour sa publication Pianiste en partenariat avec la société Annecy Classic Festival (association loi 1901). Ce jeu est ouvert à toute personne majeure résidant en France métropolitaine. Pour participer, de répondre correctement aux trois questions qui �gurent sur le visuel du jeu à paraître dans le n°93 de Pianiste du 26/06/2015 et d’envoyer ses réponses par m ail à l’adresse
[email protected]. Un tirage au sort, effectué le 28 juillet 2015 déterminera les 6 gagnants. La totalité des lots est valorisé 2025 euros TTC. Règlement complet disponible sur demande écrite à GROUPE EXPRESS ROULARTA, Jeu « Jouez et Gagnez », 29 rue juillet- août 2015 PIANISTE n°93 13 de Châteaudun, 75009 Paris.
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FrançoisFrédéric Guy.
EN BREF DES PIANISTES À CHAMBORD
FESTIVAL BERLIOZ
SUR LES PAS DE NAPOLÉON
R M A
Certes, on image difficilement ce que le compositeur de la Symphonie fantastique a pu composer pour le piano (Berlioz était un bon guitariste). Pourtant, la célèbre manifestation de La Côte-Saint-André, qui a choisi cette année de partir « Sur les routes de Napoléon », nous entraîne dans un vertigineux périple historique dans lequel on croise… bien des pianos.
L
e 21 août, dé jà, Christina et Michelle Naughton, à quatre mains, associeront Bach/ Kurtág avec Schubert, Mendelssohn et Strav insky . Avec leur récital « Sur les routes de l’Allemagne romantique », le v ioloncelliste Edgar Moreau et le p ianiste Pierre-Yves Hodique donneront des p ièces de Schumann, Brahms et Mendelssohn (le 22). « Sur les routes de la Pologne » réunira le pianiste Denis Pascal, le v ioloniste Alexandre Pascal et le v ioloncelliste Aurélien Pascal. Cheminement familial au-
tour de Chopin, W ieniawsk i et Lipinsk i (le 23). Autre programme de musique de chambre, avec l’altiste Pierre Lenert et la pianiste Ariane Jacob: Pagan ini et la transcription de Harold en Italie de Berlioz par Liszt (le 27). Varduhi Yeritsyan joeura en deux parties l’intégrale des sonates pour piano de Scriabine (les 24 et 25 août). Le lendemain, comment év iter le Concerto «L’Égyptien» de Saint-Saëns sous les do igts de Nicholas Angelich et la direction de Nicolas Chalv in à la tête de l’Orchestre des Pays de Savo ie ?
Le 28 août, Jean-Franço is Heisser nous emmènera « Sur les routes de l’Espagne », dont les œuvres d’Albéniz, Granados, Mompou et de Falla feront oublier la tragédie de la guerre franco-espagnole . L’un des événements les plus spectaculaires se déroulera le même jour, à partir de 19 heures: du piano, François-Frédéric Guy dirigera l’Orchestre de chambre de Par is dans l’intégrale des c inq concertos pour piano de Beethoven. Un beau voyage en perspect i ve ! Du 20 au 30 août, festivalberlioz.com
Les Nuits de l’Orangerie de Sceaux À quelques encablures de la cap itale, l’Orangerie de Sceaux offre un havre de pa i x pour le fest ival de musique de chambre qui se déroulera du 15 août au 20 septembre . De jeunes artistes nous enchantent, tel Rémi Geniet, lauréat à 20 ans du Concours Beethoven, qu i jouera Chopin, Fauré et Ravel dans le thème des «Nu its à Paris» (22-23 août). Hervé Billaut se produit en trio avec le v ioloncelliste Raphaël Pidoux et le clarinettiste Patrick Messina pour jouer Beethoven dans le thème des «Nu its à V ienne» (le 30 août) . Le soliste Jean-Louis Steuermann interprétera seul Chopin et Bach le 5 septembre . Dans les «Nuits à Saint-Pétersbourg», Georges Pludermacher joue Scriabine et Prokof iev avec la mezzo-soprano Isabelle Druet (12 sept .). festival-orangerie.fr 14 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
Lors du festival de Chambord (3-18 juillet), cinq dates sont à retenir pour le piano. Le 4 juillet, Marie-Josèphe Jude interprétera les Nocturnes de Chopin. Le 10, le jazzman et compositeur Édouard Ferlet jouera son Métamorphoses Bach. Le 14 juillet se déroulera un spectacle jeune public: Les Fables de La Fontaine, avec Aline Piboule au piano. Le 16 juillet, la directrice artistique du festival, Vanessa Wagner offrira une Schubertiade avec le chœur d’hommes Accentus. Enfin, le 18 juillet, FrançoisFrédéric Guy dirigera du piano l’Orchestre Symphonique Région Centre-Tours dans le Concerto «L’Empereur» de Beethoven. chambord.org
ARS TERRA: AIMEZ-VOUS BACH ? Aimez-vous Bach? Tel est le thème du festival Ars Terra, dans la Somme (19 au 24 juillet). Au cas où les mélomanes auraient encore un doute, deux jeunes pianistes enchanteront leurs oreilles en interprétant sa musique, le 24 juillet, à l’église de Villierssur-Authie. À 18 h, Pierre Couvion jouera la Toccata en mi mineur et à 20h30, Romain Descharmes offrira le Concerto italien. www.arsterra.fr
LES MUSICALES DU LUBÉRON Le 24 juillet, les «Schubertiades» du Chœur Accentus de Laurence Equilbey recevront Vanessa Wagner qui accompagnera des lieder de Schubert. Le 3 août, Janis Vakarelis rejoindra le Quartetto della Scala dans Brahms et Dvorák. musicalesluberon.com
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Répertoire classé
GRADE BY GRADE sélectionné et édité par Iain Farrington
Al ex e i V ol o d i n .
PIANO À SAINT-URSANNE
E V E R G G R O B O C R A M
P D S
Voyage autour de la variation
L
ancé en 2004, le fest i val international de piano fait cette année encore la part belle aux jeunes pianistes. Ils se produisent dans le cadre enchanteur du cloître de la Collégiale de Saint-Ursanne et des boucles du Doubs, en Su isse. Rémi Geniet inaugurera l’événement avec un ambitieux programme – Beethoven, Bartók et Debussy (le 2 août). Le lendemain, Mikhail Sporov sera tout aussi « sportif », joignant aux Variations Corelli de Rachmaninov, des pièces de Scriabine, Chopin et La Valse de Ravel ! Alexei Volodin (le 4) associera dans un étonnant patch work, Scarlatti à Beethoven, Medtner et Tchaïkovsk i. La pianiste croate Martina F il jak (le 5) a cho isi un voyage entre deux uni vers: classique (Haydn) et romantique (Bach/Liszt et Schumann). Philippe Cassard a préféré l ’art (« sérieux ») de la variation: Variations sur un Menuet de Duport de Mozart, Variations sur un thème original de Beethoven et … Variations sérieuses de Mendelssohn. En duo, Jessica Marquis et Dominique Schw immer (le 7) multiplient les curiositésavec des partitions peu jouées à quatre mains: Albéniz, Weber, Elmas, Glinka, Moszkowsk i.
On saluera une « carte blanche» proposée à Simonetta Sommaruga, présidente de la Confédérat ion suisse. Quelle leçon ! Pu is, aux côtés du Quatuor Van K juik, les pian istes Christiane Baume-Sanglard et Dana Ciocarlie joueront à deux repr ises (les 8 et 9), notamment des p ièces rares comme les Danses suédoises pour piano à quatre mains de Bruch (le 8). Hugues Leclère et la coméd ienne Marie-Christine Barrault donneront un spectacle intitulé « Une Femme en guerre » qui marie textes et musiques d’auteures et compos itrices (le8). Nelson Goerner est annoncé comme « inv ité spécial du festi val » (le 9). Haendel, Schumann, Scr iabine, Schumann et Chop in seront au programme. Le 11 août, quatre jeunes art istes bénéf icieront d’une tribune: Corentin Le Goff, Lou ise Ak ili, Pierre Girard et Sélim Mazari. Le même jour, Michel Dalberto donnera des pièces de Fauré, Debussy et Brahms. Enf in, le dernier soir (le 12) sera « La Nuit du concerto » . L’Orchestre international de Genève dirigé par Alexei Ogrintchouk donnera entre autres le Concerto n° 11 de Mozart avec Dana C iocarlie en soliste et le Concerto n°1 de Chopin avec Igor Tchetuev . Du 2 au 12 août, www.crescendo-jura.ch
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juillet- août 2015
PIANISTE n°93 15
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ACTUALITÉ S ÉVÉNEMENTS Plus d’infos sur www.pianiste.fr Ismaël Margain.
ÉCHOS DE CONCERT
EN BREF
FESTIVAL TEMPO DU CROISIC
CONCOURS BRIN D’HERBE: LES LAURÉATS
Pour la 7e édition du festival Tempo Piano Classique du Croisic, lors du weekend de l’Ascension, le public, fidèle, était au rendez-vous.
L
es heureux festi valiers ont eu la chance d’entendre Adam Laloum, Ismaël Margain, Marion Lebègue, Romain Dav id, Vannina Santoni ou encore le Quatuor Giardini, ainsi que Laure Mézan de Radio Classique qui introduisait certains concerts, prodiguant au public des informations précieuses sur les œuvres. Romain Dav id, organisateur du festi val nous a conf ié accueillir près de 2000 spectateurs ! Il faut dire que la formule est alléchante, puisque pour 62 euros il est possible d’assister à tous les concerts du jeudi au dimanche qui se déroulent dans l’Ancienne Criée du Croisic, bâtiment d’époque dont l’acoustique est excellente. Romain Dav id a voulu un festi val dynam ique et atypique pour ce qui est de la forme. Les spectateurs ont pu entendre un « Texto concert » où l’artiste échange avec Laure Mézan sur une œuvre qu ’il interprète ensuite, ainsi qu’un « Concert Brunch » le dernier jour.
P D S
Si l’année précédente la vedette éta it Bertrand Chamayou, cette année, c’était Adam Laloum. Il a li vré une interprétation magnif ique de la Sonate en ré mineur K576 de Mozart, des Im promptus D 935 de Schubert ainsi que des Davidsbündlertänze op 6 de Schumann. Standing ovation méritée. Le «Texto concert » était, lui aussi, d’une très grande qualité, grâce au jeune et brillant Ismaël Margain, nommé cette année aux V ictoires de la Musique Classique. Accompagné de Laure Mézan, il a présenté la Sonate D 960
de Schubert. Lors du « Concert Brunch », il a interprété les Klavierstücke puis, en compagnie d’Adam Laloum, les deux pianistes ont joué la Fantaisie en fa mineur . Une performance d’une grande sensibilité. Pour clore le concert, Ismaël Marga in, Adam Laloum et Romain Dav id ont joué à s ix mains des transcriptions de Ständchen de Schubert et du Scherzo de la Deuxième Symphonie de Beethoven. Après le concert, le publ ic a pu discuter avec les artistes autour du buffet offert. Aénor Gillet de Thorey
CENTRE CHOSTAKOVITCH DE PARIS
«Jazz Suite» : une Valse inédite
D
imanche 3 mai se concrét isait le fruit d’un travail initié un an plus tôt, la transcr iption pour piano à quatre mains de la fameuse Valse, tirée de la Jazz Suite de Chostakov itch. L’auteur de cette version inédite, Alexander Raskatov, est un ancien disciple du maître. Après de longues tractat ions pour obtenir l’accord des ayants 16 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
droit, les pianistes Cyril Guillotin et Luc Benoit la f irent découvrir au public du Centre international Chostakov itch de Paris. Alexander Raskatov expliqua son désir de conserver l ’unité de l’œuvre. Pour cela il était essentiel, dit-il, de se replacer l’atmosphère de l’URSS des années 30 : exprimer le côté naïf, la mélancolie et en même temps la
terreur sous laquelle v i vaient les So v iétiques. Sous les doigts des pianistes, ce « tube » qui résonne dans toutes les mémoires prenait une allure nou velle. Par le jeu des sonorités, des touchers, des élans, la nouvelle identité pianistique s’approchait des riches couleurs de l’original. La publication de la partition est dé jà annoncée. Sylvia Avrand-Margot
Le Concours Brin d’herbe, dédié à la musique contemporaine, met en compétition de jeunes pianistes âgés de 8 à 18 ans et venus d’horizons différents. Il s’est achevé le 26 avril dernier à la salle de l’Institut, à Orléans. Les lauréats sont notamment Gabriel Gomez, Jasmin An chen Zhang, Elena Belhassen, Oliver Clarke et Mariam Schmid. Le public pourra les écouter en concert le 14 mars 2016, au Théâtre des Bouffes du Nord, dans le cadre du 12 e Concours de piano d’Orléans. oci-piano.com
CONCOURS TCHAÏKOVSKI: C’EST PARTI! L’un des plus prestigieux concours internationaux a clos ses inscriptions: 120 musiciens parmi près de 700 candidats ont été présélectionnés. Les épreuves se dérouleront, pour les pianistes, du 15 juin au 3 juillet, à Moscou. La chaîne Medici.tv retransmettra en direct et gratuitement l’événement. Pianiste sera présent et suivra au quotidien les ultimes sélections. Retrouvez toutes les informations sur le site de Pianiste et Facebook! Pour mémoire, le dernier vainqueur du Concours, il y a quatre ans, fut l’extraordinaire pianiste Daniil Trifonov. Ce dernier sera à l’honneur dans le prochain numéro de Pianiste. http://tchaikovsky competition.com
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D R A D O R B S A L O C I N
FESTIVAL DE VERBIER, SUISSE
Cap à l’Est !
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e festi val (17 juillet-2 août) met à l’honneur les artistes des pays de l’Est. Denis Matsuev et Daniil Tr ifonov seront re joints, au piano, par… Valery Gergiev ! Le chef part icipera en effet au Triple Concerto de Mozart (23 juillet). Autre musicien russe (lui aussi chef d’orchestre), Mikhaïl Pletnev sera le sol iste du Concerto 0pour piano de Scriabine (dir. Manfred Honeck) (le 26). Khatia Buniatishv ili jouera le Concerto pour piano n°2 de Liszt sous la baguette de Charles Dutoit (le 2 août). On retrouvera la pianiste d’origine géorgienne le 28 juillet dans des œuvres de L iszt, Ravel et Strav insky . Denis Matsuev donnera un récital Tchaïkovsk i, Schu-
mann et Strav insky (le 19 j uillet). Une belle opportun ité de comparer leurs interprétations respecti ves de Petrouchka ! Pour son récital, Daniil Trifonov a cho isi, aux côtés de son professeur, Serge i Babayan, les Suites pour deux pianos de Rachmaninov et les 12 Etudes d’exécution transcendante de Liszt (le 25 juillet). Andras Schiff se produira dans Haydn, Mozart, Beethoven et Schubert (le 21). Du côté réc itals de musique de chambre, notons les présences de Menahem Pressler avec le baryton Matthias Goerne (le 30), James Baillieu avec la basse Mark Padmore (le 20), mais aussi Jan Lisieck i avec le v ioloncell iste Truls Mork (le 28). verbierfestival.com
APRÈS-COUP
Miroslav Kultyshev, un poète au piano
G
râce à la persp icacité de Pascal Escande, (directeur du festi val d’Au vers-sur-Oise et du concours Piano Campus), nous eûmes eu la chance d’entendre, ce 19 mars, un jeune pianiste russe qui est à la fois un interprète sidérante de même que sa profonde exceptionnel et un vrai poète du musicalité, enthousiasmèrent le pupiano : Miroslav Kultyshev . Jeune blic de la Salle Cortot . Il interpréta homme distingué, aux allures cho- à la suite les quatre Ballades de pinesques, il se dirigea vers l’instru- Chopin puis, en seconde part ie, ment. Mais bientôt, une autre une pièce de Thierry Escaich et Les image se substitua à celle de son ap- Miroirs de Ravel, sui v i de Gaspard parente fragilité : la maîtrise qui se de la Nuit. Miroslav Kultyshev : une dégageait de son jeu, sa puissance révélation. Alexandre Sorel P D S
juillet- août 2015
PIANISTE n°93 17
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L’ART DE JOUER SELON…
PHILIPPE CASSARD
Ne jamais finir d’apprendre, tel est le credo de ce passeur de savoirs, qui s’apprête à rendre le micro après dix années de «Notes du traducteur» enchanteresses sur France Musique.
J
e n’enseigne pas régulièrement. Mes émissions sur France Musique remplissent un rôle pédagog ique modeste, et je les destine au plus grand nombre, pas aux profess ionnels en particulier, même s’il arri ve que ces derniers les écoutent et me témoignent leur attachement à l’émission «Notes du traducteur». Cependant, je suis inv ité trois fois l’an à donner des masterclasses au Royal Northern College of Music de Manchester et je réunis chaque été depuis huit ans quelques jeunes pianistes à l’Académie Tibor Varga, à Sion, dans le Vala is suisse. Je suis frappé par les heures acharnées que ces jeunes pianistes consacrent à peauf iner leur technique instrumentale – ce qui, en soi, n’est pas répréhensible – alors que d’un autre côté, ils négligent pour la plupart 18 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
T O L L I M E T S I T P A B N A E J
d’entre eux ce qui construit un jeu de piano, ce qui nourrit l’imaginaire, ce qui ouvre l’esprit et aiguise l’intelligence. Un jeu que je pourrais volontiers qualif ier d’inculte (et j’ai bien conscience du côté méprisant de l’épithète !), cela s’entend immédiatement, c’est terrible à dire, mais c’est ainsi. Au toucher, à la man ière de jouer des accords, d’utiliser sa main gauche, d’égrener les notes d’une cantilène, de respirer (ou pas) . Car un jeu de piano ne se résume certainement pas à la technique au sens de l’agilité, de la pure v irtuosité. Dé valer des octaves à la manière de glissandi comme l’a fait récemment certaine pianiste formatée par le marketing dans la Sonate de Liszt, à seule f in de nous en mettre ple in la vue, n’apporte rien à l’œuvre. Bien au contraire, elle réussit l’exploit de la rapetisser, de la ridiculiser. Car jamais
ces octaves ne sonnent comme elles le devraient : orchestrales, dosées, phrasées, organiques, mues par la v ision goethéenne de L iszt dont cette pianiste n’a cure. Manque flagrant de culture, non de talent. Au même âge, Daniil Trifonov ne joue pas les octaves de cette Sonate moins v ite, mais lui les emplit d’une densité sonore et d’un caractère dramatique stupéf iants. Il a juste eu les bons professeurs, qu ’au demeurant je connais bien.
Écouter Mozart, Haydn, Salieri et… le bon Neefe On ne décide pas, un beau mat in, parce qu’on a fêté ses 25 ans la ve ille, qu’il est temps de se cult iver, à présent que la « technique » est acquise ! La lente infusion, en nous, des conna issances autres que « mécaniques », suppose que nos professeurs nous incitent à les acquérir et à les multiplier
dès notre plus jeune âge, à ouvr ir les yeux et les oreilles. Pour prendre un exemple s imple : à partir d’un certain âge (mais pas d’un âge certain !), jouer les Sonates de Beethoven sans connaître à fond ses Quatuors et ses Symphon ies relève plus de la faute morale que d’une simple lacune. Mais plus encore : questionner soi-même le texte de cet édif ice incontournable de notre répertoire nécessite aussi d ’écouter Mozart, Haydn, Salieri, le bon Neefe (le maître du jeune Ludw ig à Bonn), Hummel et quelques autres. On fréquentera régulièrement les témoignages légués par les grands anc iens aux prises avec le massif des 32 Sonates (Lamont, Schnabel, Backhaus, Kempff, Nat, R ichter, Gilels, Brendel, liste non exhausti ve !), et ceux laissés par les interprètes contemporains (mon carré d’as à mo i : Pollini, Goode, Barenboim, Schiff). Et au moins un pianofortiste ! Pour ma part et sans hésiter : Ronald Brautigam, qui a magistralement dépoussiéré ces textes encrassés par des trad itions, un conform isme et des règles éd ictées par des professeurs qu i ont rigidif ié et aseptisé, pour leur propre confort, cette musique constamment révolutionnaire. Par son geste dynam ique, sa remise en question radicale des tempi habituellement pratiqués, la v italité de son discours, l’attention à une multitude de détails de l’écriture que l’on n’entend presque jamais sous
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d’autres doigts, l’élan irrésistible qu’il impr ime aux prem ières Sonates (écrites, rappelons-le, par un v irtuose avant sa trentaine qui voulait en découdre avec l’académisme ambiant), Brautigam nous surprend et donne un coup de v ieux à bien des intégrales récentes qui reproduisent paresseusement les schémas du passé. Certains de nos commentateurs professionnels, eux aussi dérangés dans leurs pet ites hab itudes, font une moue déda igneuse. Tant pis pour eux !
ration des œuvres, n’est pas un pensum ! Elle se doit au contraire d’être boulimique, jouissi ve et joyeuse. Elle stimulera l’imagination, mais ne signif iera pas que l’on devrait jouer de manière didactique ou pédante. Une chose est certaine: l’instinct et l’intuition, pour géniaux qu’ils puissent être (et qui constituent une part décis ive de la signature et du charisme de l’interprète), ne suff isent pas pour que le feu brûle longtemps et soit beau à regarder. Ne plus avoir soif d’apprendre, c’est dé jà reculer. Ou, pour Enrichir la « bibliothèque de Babel reprendre la formule inversée de W ilde son imaginaire» helm Kempff : « Tant que je pourrai Il n ’y a pas que le piano dans la v ie : apprendre quelque chose de nouveau, comprendre comment W ilhelm j’aurai une chance de progresser encore.» Furtwängler fait sonner les cordes Voilà pourquoi, ce 4 juillet, je referberlinoises dans les symphon ies de merai avec une grande appréhens ion Beethoven et dessine les paysages des le li vre de di x saisons de «Notes du longs développements de l ’Héroïque traducteur» à France Musique. 432 avec un art inégalé du rubato, de la émissions, 260 œuvres de 50 comporespiration et des transitions, m’ap- siteurs différents auront été proposées . paraît comme une étape obl igée. Une cinquantaine de musiciens inv ités, Passer sans transition à l ’antidote dont trente pianistes, confrères et Harnoncourt, Gardiner ou Savall amis, ont également contribué au sucdans cette même Héroïque, qui consti- cès de l’émission. Pourquoi « avec une tue un formidable apport d’informa- grande appréhens ion » ? Parce que tions sur le rythme, l’énergie et l’ac- cette émission a profondément et ducentuation, sans même parler de la rablement modif ié la perception que sonorité propre aux instruments je pouvais avoir d’une partition. Parce d’époque, qui nous oblige, nous autres qu’elle m’a permis de lire des dizaines pianistes, à repenser à la nôtre sur nos de li vres – et pas seulement de mubons v ieux Steinway . S’imposer une sique–, de découvrir des compositeurs bonne dose de l’intégrale des Quatuors méconnus ou b ien des œuvres peu par les Berg et de mus ique de chambre connues de compos iteurs célébrés, d iverse, parties intégrantes de notre d’approfondir l’histoire et les mouveimmersion. Enf in la lecture de la poé- ments artistiques de certaines époques, sie, de la littérature, de déchiffrer des du théâtre, de la «NE PLUS AVOIR SOIF quantités de partiphilosophie de D’APPRENDRE, C’EST tions. Ces di x ans cette Allemagne ont régénéré mon DÉJÀ RECULER.» romantique nais« moteur » intésante et de cette V ienne bientôt cor- rieur pour quelques années, ma is je setée par Metternich, enrichira la bi- dois dès à présent lutter contre la sabliothèque de Babel de notre tisfaction un rien narcissique du « deimaginaire. Certains lecteurs de ces voir accompli » ! J’ai arrêté cette émislignes me trouveront bien sentencieux, sion pour ne pas céder à la rout ine, quand je ne fais qu’exposer des pré- que j’abhorre. Puisse l’avenir me préceptes de base qu i ne sont que trop senter de nouveaux déf is à relever, et rarement sui v is ! c’est à mon tour ce que je souhaite à L’acquisition de connaissances, pa- la jeune génération : ne jamais perdre rallèle à l’apprent issage et à la matu- l’appétit féroce d’apprendre !
Des lignes séduisantes, une silhouette élancée, des baguettes chromées, les sonorités et le confort de jeu signés Bechstein : une véritable œuvre d’art.
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BÄRENREITER - BREITKOPF
SUK ET SIBELIUS : LE ROMANTISME AU CRÉPUSCULE Deux recueils de pièces pour piano à destination des pianistes de niveaux moyen à supérieur.
C
ompositeur et v ioloniste tchèque, gendre d’Antonin Dvorák, Joseph Suk (1874-1935) est surtout connu pour sa mus ique symphonique et sa musique de chambre. Bärenreiter publie un cycle rare de d i x pièces pour piano, «Choses vécues et rêvées». Billets d’humeur, mélodies nostalgiques, les morceaux forment comme les épisodes d’un journal musical. Le cycle a été écrit en 1909, soit c inq années après les douloureuses pertes de son professeur et beau-père Dvorák (1873–1904) et de sa jeune femme, Otilie Dvorák, un an après . Le mélange entre l ’inspiration pui-
sée dans les humeurs quot idiennes et les rêves se révèle ici remarquable: changements de nuances et de tempos fréquents, notes p iquées, accents, variations rythmiques… Mais certains passages, surchargés, sont à peine déchiffrables, malgré une mise en page cla ire et des indications qui sont celles de la vers ion originale («Mystérieux et très aéré», « Avec calme et joie insouciante »). Pour ni veau très avancé. Avec l'antholog ie Jean Sibel ius : «Piano Pieces», le compositeur f inlandais entre lui aussi dans le rang des compositeurs de piano. Pour ce quatrième volume, les éditions Breitkopf ont sélectionné 18 p ièces com-
posées entre 1887 et 1920, qu i offrent un aperçu de la d i versité de son écr iture. Pour quelqu’un qui disait ne pas aimer le piano, le nombre de ses compos itions pour l ’instrument s’élève à cent cinquante ! La partition critique est très b ien annotée, les commenta ires sont extra its du «Complete Works of S ibelius» des
éditions Breitkopf et Härtel, qui regroupe en plus ieurs volumes l’intégrale de ses compos itions instrumentales et de ses arrangements . Voilà une partie du répertoire pianistique qui mérite d’être découvert. Camille Arcache
www.baerenreiter.com, www.breitkopf.com
BÄRENREITER
Beethoven : Sonates quasi una fantasia op.27
L
es deux Sonates op.27 de Beethoven paraissent aux éditions Bärenreiter. Sous-titrées «Sonata quasi una fantasia», on connaît surtout la deuxième, dite «Clair de lune» et son fameux adagio, pièce incontournable du réperto ire pianistique. Le commentaire critique compilé de Jonathan Del Mar, spécialiste de la musique du Maître de Bonn, en dit long sur le casse-tête que représente une part ition aussi mythique. Les annotations du compositeur ont été reprises dans la mesure du possible et modernisées, pour une bonne orientation de l’interprétation, car toutes les phrases possèdent une valeur express ive. « Que peut-on écrire après Beethoven? » se demandait Schubert. Sa Sonate en do mineur , publiée chez le même éd iteur, reprend la tonalité emblématique d’ut mineur, celle-là même de la 5 e Symphonie de Beethoven. Pratique, des pages dépliantes permettent d’avoir un grand confort de lecture sur le pupitre en facilitant « la tourne » . C. A. 20 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
BEUSCHER
GAINSBARRE « […] j’aimerais détruire la plupart de mes chansons, mais ce qui m’emmerde c’est qu’elles sont gravées.» Ce ton provocateur, c’est celui de Serge Gainsbourg. Comment réagiraitil s’il savait que les éditions Beuscher publient un nouveau volume de la collection «Best of 50» consacré « l’homme à tête de chou »? Une sélection de 55 titres (dont 5 titres bonus), avec l’intégralité des paroles, de nombreuses photos, des documents personnels de l’artiste (dont les manuscrits de ses chansons), des anecdotes, des extraits de coupures de presse ainsi que la genèse
de chaque chanson, retracent la carrière du musicien. De quoi ravir les inconditionnels. Pour les pianistes et guitaristes (des diagrammes guitare accompagnent les partitions), le niveau est intermédiaire. Mais la taille des portées et la typographie ne sont pas adaptées pour jouer et chanter en groupe… C.A.
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ESSAI AIMEZ-VOUS BEETHOVEN ?
B TOUS NIVEAUX
Pédagogie et techniques pianistiques
L
a pédagogie n’est pas étrangère aux grands maîtres . Schott Music publie deux recueils de « pièces faciles pour piano », l’un consacré aux part itions de Bach, l’autre à celles de Mozart. En plus d ’être destinée à l’apprentissage du piano, cette compilation de morceaux, ordonnés par n i veaux de diff icultés, permet de découvrir la technique et le style de ces grands compos iteurs. Dans « My First Bach » , les danses et les chorales précèdent quelques Inventions et le Premier Prélude du Clavier bien tempéré. Dans « My First Mozart », la ma jorité des morceaux est extra ite du «London Sketchbook», écr it par le compositeur alors qu’il n’avait que 8 ans. Contenu riche et varié, mise en page cla ire, nombreux conseils techniques (trilles, tempos, doigtés), les pianistes débutants pourront aisément aborder ces partitions et ceux d’un ni veau intermédiaire, adapter leur jeu au gré de leurs env ies. Chez Boosey and Hawkes, « Grade by Grade » propose un ensemble de cinq recueils de partitions pour un apprent issage progress if du piano jusqu’à un ni veau avancé. Présentée de façon s imple, chaque vers ion contient des conseils d’interprétation, des exercices de déchiffrages et d’improv isations, des entraînements aux gammes et aux arpèges, a insi qu’un disque contenant toutes les p ièces
en enregistrement et en play-back . Les bases de la techn ique pianistique sont néanmoins nécessaires pour approcher cette série. Pour aborder la technique, Gib mir («Donne-m’en 5»), paru chez Schott Music, se consacre spéc if iquement à l’articulation et au pos itionnement des mains. Pendant la durée d’un exercice, les do igtés ne changent pas, de façon à acquér ir une sol idité . Le recue il regroupe 34morceaux sur 5 n i veaux de diff iculté croissante, allant du menuet jusqu’à des ballades pop ou rock . Une fois cette base maîtrisée, Fantasy Piano, Enchanting Easy Piano Pieces offre des morceaux fac iles à déchiffrer, sans grands changements de doigtés ni de rythmes, parfaits pour des adultes ou enfants d ’un ni veau débutant . Les mélodies sont entraînantes et les titres sont suff isamment évocateurs (Valse des Sirènes, Le Chevaucheur de Dragon…). Les pianistes d’un ni veau intermédiaire ou avancé seront intéressés par le troisième volume de l’Anthologie classique du piano parue chez Schott, un échant illon des styles musicaux des années 1780 à 1820. Même si un nombre trop important de portées sur la page réduit la l isibilité, on appréc ie les notes biographiques et techniques détaillées pour chaque morceau . Une collection idéale pour les professeurs cherchant à renouveler leur répertoire pédagog ique. C.A.
runo Ory-Lavollée nous livre un essai dont l’ambition est de redonner sa valeur à la musique classique. Il est écrit par un mélomane, pour des mélomanes. Le texte, agréable à lire, est agrémenté d’éléments de biologie, d’architecture ou encore de gastronomie! Le style fleuri rend la lecture d’autant plus passionnante. Le texte fourmille d’anecdotes historiques ou vécues par l’auteur. Ce livre sur la musique classique est aussi un essai de philosophie, de sociologie et d’histoire de l’art. Pourquoi l’auteur a-t-il ressenti le besoin de prendre la défense de la musique classique ? Les salles de concert se vident et les jeunes semblent la fuir, dit-on… Mais surtout, Bruno Ory-Lavollée souligne le divorce entre la musique classique et la musique po-
pulaire, divorce qui débute après la Seconde Guerre mondiale. L’auteur reprend et développe alors l’idée de l’ancien ministre de la Culture, André Malraux: démocratiser la musique en établissant un contact direct entre les individus et la musique, dès l’enfance, à l’école primaire. Mais le style riche de cet ouvrage, qui fait une partie de sa force, constitue aussi sa faiblesse: toutes ces anecdotes et références ne résonneront que dans l’oreille des connaisseurs. La référence à tel concerto ou compositeur ne parlera qu’à ceux qui l’ont déjà joué ou du moins écouté. Si ce livre a pour but de remettre la musique classique au goût du jour, il y a grand risque qu’il ne fasse que prêcher des convertis. Roxane Bouhier
Éditions Le Passeur, 18,50 euros.
SCHOTT MUSIC
Roméo et Juliette Composée en 1869 par Tchaïkovsk i, l’ouverturefantaisie Roméo et Juliette connut un succès immédiat. Schott Music publie la transcription pour piano réalisée par Vyachelslav Gryaznov . En plus d’exiger une parfaite maîtrise technique, cette œuvre requiert un sens subtil de la dramaturgie, essentiel pour en restituer l’évolution des caractères. Chez le même éditeur, et d’un ni veau tout aussi exigeant, paraissent les arrangements pour p iano solo d’œuvres de Gl inka, Borodin, Rachmaninov, Mahler et Debussy par Gryaznov . Un voyage dans le C.A. répertoire du début du XVIIIe au début du XIX e siècle.
MES PREMIÈRES NOTES… Les éditions Coup de pouce publient le premier volume de leur méthode de piano pour enfants. Réalisée par des professeurs, elle enseigne de manière ludique les bases de l’instrument. Les exercices et les morceaux des 22 leçons sont enregistrés sur CD et les explications sont accompagnées d’illustrations en couleurs, précieuses pour le placement des mains. Un petit apprentissage du solfège en fin de volume est un choix judicieux. Idéale pour un éveil au piano. Un cahier épais, dont on r egrette qu’il ne soit pas en spirales. C.A. www.editions-coupdepouce.com juillet- août 2015
PIANISTE n°93 21
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ACTUALITÉ S INSTRUMENTS Plus d’infos sur www.pianiste.fr
SPÉCIAL SALON DE FRANCFORT 2015
L’INSTRUMENT ROI DANS TOUS SES ÉTATS Quand bien même le salon européen apparaît un peu moins représentatif face aux salons de Los Angeles (le Namm, en janvier), de Shangai (Music China, en octobre) et de Moscou (Namm Musikmesse Russia, en septembre), le Musikmesse de Francfort-sur-le-Main, en Allemagne, qui s’est tenu du 15 au 18 avril, témoigne de l’évolution du marché mondial de la musique, et du piano en particulier. Et malgré l’absence de nombreux facteurs européens de pianos, de multiples nouveautés ont été découvertes. D’emblée, nous avons constaté un effort important réalisé sur le design et la personnalisation des instruments acoustiques. Revue de détail. 22 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
t n e s o i u q s e u q i t s u o c a s o n a i p s e D
Le modèle Sphinx, de C. Bechstein.
C. BECHSTEIN
Grand luxe et design
L
a f irme allemande a réal isé pour un cl ient fortuné un piano baptisé Sphinx. Il a été construit sur la base du demi-queue C. Bechstein B 212. Le piano de style Empire, avec ses formes très trava illées, a été fabr iqué d’après des croqu is d’un modèle créé en 1866 . Il comprend de nombreuses pièces sculptées en bronze puis dorées à l ’or f in, dont
deux candélabres latéraux . Le cadre métallique est également re vêtu de feuilles d’or. On remarque si x pieds dont la base est une patte de lion ! Plus de 1 250 heures de travail ont été nécessa ires uniquement pour la réal isation de la décoration du meuble (avec tabouret assort i) ! Cet instrument unique a été vendu à 930 000 euros… Le nom du client n’a pas été révélé .
Autre p iano des ign très haut de gamme, l ’élégant C. Bechstein B 212 Sterling , modèle unique, réalisé en coopérat ion entre la f irme C. Bechstein et Robbe & Berk ing, la célèbre orfèvrer ie allemande de Flensburg fondée en 1874 . Selon ses concepteurs, le p iano serait «l’ex pression suprême de deux grandes traditions artisanales ». Ce superbe demi-queue noir comporte de nombreux éléments en argent mass if : liseré au bas de la ce inture et sur tout le pourtour de l’instrument, sur la partie inférieure du pup itre, au-
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Une série limitée à douze exemplaires.
BÖSENDORFER
Jean Cocteau Limited Edition
U C. Bechstein B 212 Sterling.
dessus de la lyre et près des trois roulettes. La moyenne béquille et le logo des deux f irmes sont également en argent, comme le diapason et la serrure du cylindre présentés dans un très bel écrin. Plus de 6kg de ce noble matériau ont été utilisés ! Le cadre métallique et même la table d’harmonie sont revêtus de pe inture argentée. Ce piano, qui n’est pas à vendre actuellement, voyagera jusqu’à la f in de l’année à travers l’Allemagne. Pour le grand publ ic, un nouveau petit p iano droit allemand design
Bechstein 112 Chrome Art, noir ou blanc br illant, dont la ligne est i nsp i rée du style Art déco, est désormais au catalogue . Orné de f ines baguettes chromées hor izontales et verticales ainsi que de discrets chanfreins facilitant l’ouverture du couvercle supér ieur, ce joli instrument comporte des pat ins à la place de roulettes . Dimensions : 112 x 149 x 57 cm, 233 kg. Le pri x est de 13 890 euros (supplément de 2 990 euros avec le système silencieux Vario).
n nouveau piano à queue en sér ie limitée (douze pièces seulement) Jean Cocteau Limited Edition est le résultat d ’une étroite collaboration entre Bösendorfer, le Fest i val de mus ique et le Musée Jean-Cocteau de Menton . Proposé en no ir ou en blanc, sur la base dimensionnelle du 200 cm et du 214 cm (voire du 185 cm), ce piano est orné sur la face intérieure de son couvercle du célèbre dessin Orphée de Jean Cocteau (1889-1963), apposé selon la techn ique de sérigraphie. La signature du poète f igure également sur le bloc gauche du clav ier. L’accastillage est chromé. On attend par a illeurs un nouveau grand queue de concert Bösendorfer de 280 cm . Nous avons eu le pr i v ilège d’essayer le plus récent prototype du nouveau grand queue de concert Bösendorfer de 280 cm. Ce p iano devra it remplacer, dès l ’automne procha in, le modèle actuel mesurant également 280 cm . Nous avons été impressionné par la pro ject ion sonore de l ’i nstrument, les importants écarts de dynam ique possibles, le confort de jeu et la couleur sonore très riche qui préserve l ’identité typée Bösendorfer .
HOFFMANN VERSION PRO
Bechstein 112 Chrome Art.
Un nouveau piano droit W. Hoffmann Professional 114 est proposé au prix de 10 250 euros. Cette récente série Hoffmann Professional créée en 2014 est produite dans l’usine Bechstein Europe, en République tchèque à Hradec Králové. Elle comprend donc désormais trois modèles de pianos droits (114, 120 et 126 cm) et trois dimensions de pianos à queue (162, 188 et 206 cm). La marque Hoffmann comprend aussi deux autres séries, plus économiques : Vision et Tradition.
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PIANISTE n°93 23
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ACTUALITÉS INSTRUMENTS Plus d’infos sur www.pianiste.fr
WILH. STEINBERG
TEL EST SON NOMOS L’appellation de la série intermédiaire Motif est supprimée et devient Nomos. Trois modèles droits Nomos (118, 123 et 128cm) sont au nouveau catalogue. Les trois séries qualitatives de pianos acoustiques Wilh. Steinberg sont donc désormais: Signature (fabrication 100 % allemande), Nomos (production asiatique avec sous-ensembles européens) et Eisenberg(production asiatique). La finition ultime de chacun de ces instruments est réalisée en Allemagne.
BLÜTHNER
L’originalité en plus
U
n modèle transparent de piano à queue série Blüthner Crystal Edition avait été présenté en 2014 à Francfort. Dans la même série, élargie depuis l’année dernière, le facteur allemand de Leipzig propose un nombre élevé de finitions originales (Élégance, Panoramic, Idyl-
PIANOFORCE SYSTEMS Du côté des hybrides, la marque PianoForce propose des systèmes silencieux et des systèmes de reproduction de musique sur piano acoustique, comme les anciens pianos mécaniques (produits apparentés aux systèmes Disklavier de Yamaha, QRS, Quiet Time). www.pianoforce.eu
Blüthner Crystal Edition.
lic, Hive Xtravaganza ou Sport). Chaque modèle peut être personnalisé à loisir. Rappelons par ailleurs que Blüthner dispose à son catalogue des surprenants pianos PHPianette et PHGrandPiano, répliques des modèles dessinés dès 1931 par le Danois Paul Henningsen.
Clavier Kawai CA-17 (ex-CA-15).
Des claviers numériques toujours plus performants KAWAI
La série Concert Artist se renouvelle
Kawai EX (278 cm), les sonorités du grand queue de concert Shigeru Kawai SK-EX (278 cm) et du demi-queue Shigeru Kawai SK-5 a marque japonaise renou- liorations des deux autres modèles (200 cm), les fleurons de la marque. velle ses trois modèles haut CA-67 et CA-97 sont significa- L’échantillonnage fait appel à la de gamme de claviers numé- tives. Le CA-97 est plus puissant et nouvelle technologie New Harmoriques de salon CA. Les dispose, comme l’ancien CA-95, nic Imaging XL. trois nouveaux claviers CA-17, CA- d’une véritable table d’harmonie. Le La mécanique en bois Grand FeelII 67 et CA-97 (série Concert Artist) positionnement et le choix des est également inédite, intégrant des remplacent respectivement, depuis haut-parleurs ont été optimisés, en masselottes précisément positionnées, avril, les modèles CA-15, CA-65 et particulier sur le CA-67, qui en ainsi que des contrepoids gradués seCA-95 qui étaient apparus fin comporte 6. À l’instar de Yamaha lon la tessiture, pour une sensation 2012. Par rapport à l’ancien CA-15, qui avait intégré la sonorité du Bö- plus proche de celle des vrais pianos. le CA-17 dispose désormais de 19 sendorfer Impérial en plus du Ya- Les touches noires, plus larges, sons au lieu de 8, d’une prise USB to maha CFX dans sa série CLP appa- comme sur les pianos à queue acousHost, de 88 morceaux Concert Ma- rue en 2014, Kawai a échantillonné tiques, sont d’une texture, d’une cougic et de fonctions de réglage ac- pour la première fois, en complé- leur et d’un éclat très proches de ceux crues Virtual Technician. Les amé- ment du grand piano de concert de l’ébène. Le nombre des paramètres
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de réglage par modélisation des résonances a été augmenté et permet quelques effets assez subtils. Une nou velle fonction Smart Mode facilite les réglages, dont certains peuvent se faire note à note. Par ailleurs, l’écoute au casque a été particulièrement étudiée, pour moins de fatigue auditive et pour une meilleure spatialisation, le type de casque utilisé (ouvert, fermé) pouvant même être pris en compte ! Le design, similaire sur les trois modèles, a légèrement évolué, avec des joues de cla vier profilées. Proposés en noir, blanc ou en palissandre, ces nouveaux cla viers sont aux prix de 1 790 euros (CA-17), 2 333 euros (CA-67) et 3 222 euros (CA-97).
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CASIO CHAMPAGNE !
YAMAHA
Clavier Yamaha P-115 (ex-P-105)
De plus en plus polyphonique
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eux best-sellers au sein de la gamme de claviers portables de premier prix Yamaha : le P-35 et le P-105 ont été remplacés par le P-45 et le P-115. Le P-45 dispose désormais d’une prise USB to Host, mais les prises Midi sont supprimées. La polyphonie est passée de 32 à 64 notes et les effets ont été accrus (4 réverbs, Chorus). Les 10 sons échantillonnés ont bénéficié de quelques améliorations. Le clavier reste le GHS (Graded Hammer Standard), mais avec des touches noires en finition mate. Son prix est inférieur à 500 euros ! Le nouveau P-115 voit également sa polyphonie augmentée (de 128 à 192notes) et les 14 timbres échantillonnés ont été améliorés. Il est possible désormais de télécharger une ap-
plication pour iPhone ou iPad afin de contrôler la plupart des fonctions du clavier. Les dimensions, le poids, le clavier GHS et l’amplification n’ont pas changé par rapport au P-105. Le prix est inférieur à 700 euros ! Un nouveau petit compact Yamaha Arius YDP S 52 complète la gamme Arius de claviers compacts, qui comprenait déjà les modèles YDP 142 et YDP 162. Doté du fameux clavier GH (Graded Hammer), le même que sur le P-255 avec des touches en ivoire synthétique, le YDP S 52 offre 192 notes de polyphonie, 10 sons, 4 réverbs et une prise USB to Host. Une application téléchargeable permet de piloter ce clavier à partir d’un iPhone ou d’un iPad. Pesant 37,8 kg, ce compact est proposé en noir ou en blanc.
Ce fabricant de claviers numériques aux prix accessibles a présenté un nouveau portable Privia PX-160, remplaçant le Privia PX-150. Si les caractéristiques du récent modèle utilisant toujours la technologie AiR sont très proches de celles du précédent, le système d’amplification et de diffusion sonore (2 x 8 W et haut-parleurs de diamètre 12 cm) a été amélioré. Notons l’apparition d’une sortie ligne (Line Out) en gros Jack de 6,35 mm. Les timbres des pianos électriques, cordes et orgues ont été retravaillés pour une meilleure crédibilité acoustique. Une jolie finition champagne doré PX-160GD est proposée en plus du noir habituel PX-160 BK. Prix: environ 700 euros.
BLÜTHNER UNE GAMME ENRICHIE Ce facteur de pianos acoustiques complète sa gamme de claviers numériques de salon avec le modèle Homeline, designed by Knut Blüthner et produit à Leipzig, en Allemagne. Conçu autour de la base technique du e-Klavier Pro 88 (2014) avec une amplification de 2 x 40 W, il est doté d’une interface Bluetooth Audio. Le générateur sonore utilisé est le Blüthner APS Technology (Authentic Piano Simulation). Tous ses composants sont européens. Finitions: noir satiné, bois plaqué satiné, bois massif. Prix: de 2400 à 2600 euros.
www.pianoshop.fr
KORG
Poids plume et toucher lourd
K
org présente un nouveau Joystick, il produit également des soclavier numérique portable norités échantillonnées de piano arrangeur Havian 30. Si ce acoustique assez réalistes et un tounouvel instrument est surtout inté- cher lourd crédible (le poids des ressant pour ses fonctions d’arran- touches varie, en effet, selon la tessigeur, avec ses 950 timbres, ses ture, plus lourd dans le grave que 64 kits de batterie, ses dans l’aigu). La puissante amplifica420 styles et son mini- tion de 2 x 25 W, alimentant deux haut-parleurs de 10 cm à cône, Bass Reflex, est surprenante pour un instrument qui ne pèse que 15,1 kg. Un large écran tactile TFT Touch View facilite l’accès à toutes les fonctions et permet également d’afficher les partitions et les paroles des chansons chargées. La connectique est assez complète : casque audio en 6,35mm, Midi, USB (To Host et To Device, etc.). Prix : 1 550 euros.
Le réseau du Piano juillet- août 2015
PIANISTE n°93 25
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NIMA SARKECHIK
Brahms conjugué au présent En résidence au Triton, une salle de la banlieue parisienne dédiée aux musiques actuelles, le pianiste Nima Sarkechik s’est lancé un défi : l’enregistrement de l’œuvre de Brahms en six concerts et dans des conditions fort différentes des standards habituels du classique. Rencontre avec un musicien bien dans son temps.
C
gistrant des œuvres de Brahms en concert, c’était jouer cette musique dans un lieu populaire, avec tout ce L’idée du pro jet a été de faire v i vre que cela implique. la musique classique dans un l ieu En termes de choix d’instrument, populaire, le Triton. Ce club de jazz d’acoustique, de prise de son… qu i se trouve aux Lilas, en très Év idemment. J’aurais très bien pu proche banlieue de Par is, propose louer un piano de concert, demanplus de deux cents man ifestations der à un accordeur de le régler en annuelles. Les deux salles au carac- conséquence, pu is suggérer des tère intimiste sont, a priori, éloignées aménagements acoust iques pour de l’uni vers du classique. Le lieu et que la pr ise de son corresponde au les publics ne semblent pas corres- « standard » habituel du classique. pondre aux schémas trad itionnels… Mais de quel « standard » parle-tQui plus est, le piano sur place est on ? Autant aller dans un studio et un quart-de-queue sur lequel il ne le pro jet aurait tourné court. Or, le paraît pas év ident d’enregistrer du Triton, et le p iano qui fa it partie Brahms… Le son de l ’instrument des murs si je puis dire, révèlent un et de l’acoustique est étrange, plus grain sonore particulier. C’est donc adapté au jazz et aux musiques al- à l ’interprète de s ’adapter. J ’ai eu ternati ves. Pourtant, en jouant sur env ie de tenter l’expérience, de cherce piano, je me suis dit la première cher à jouer avec l’atmosphère, l’amfois que cela n ’aurait pas effrayé le biance, l’énergie de ce «tout ». C’est compos iteur : après tout, Brahms a une remise en question pour un piaconnu, dans son enfance, des « l ieux niste classique dont les habitudes de perdition » et joué sur tous les sonores sont « paramétrées » depuis i nstruments i mag i nables de son ses études au conservato ire. temps. Loin de moi l’env ie de res- Quelles contraintes techniques tituer une quelconque authent icité avez-vous rencontrées lors du qui n’aurait correspondu à r ien. Au premier récital ? Triton, mon propos n ’est pas de cet Je ne m’attendais pas à ce que le p iano ordre. Ce que je voulais, en enre- sonne aussi bien. L’instrument n’avait Comment vous est venue cette idée d’une intégrale Brahms* au Triton ?
NIMA SARKECHIK EN QUELQUES DATES 1983 Naissance le 25 février
à Saint-Martin-d’Hères (38) 1996 Conservatoire à rayonnement régional de Grenoble 2001 à 2008 Conservatoire de Paris dans les classes de Georges Pludermacher et François-Frédéric Guy 2003 Lauréat de la Fondation de France 2004 1er Prix Concours international de Piano de Rabat 2005-2006 Lauréat de la Fondations du Groupe Banque Populaire et de la Fondation Meyer 2008 1er CD consacré à Chopin et Hugues Dufourt (Zig-Zag Territoires) 2009 Finaliste du Concours international Clara-Haskil. Lauréat de la Fondation Cziffra 2012 Production d’une série d’émissions sur France Musique consacrées à la musique iranienne 2015 Sortie du 1er CD de l’intégrale Brahms (éd. Le Triton)
pas été préparé dans les déta ils – comment aurait-il pu l’être car il est joué presque tous les jours ? – et j’ai donc adapté mon jeu. Je savais qu’il ne fallait pas que je joue trop fort parce que le piano est petit et que sa dynamique est restreinte comparat ivement à un grand queue de concert . Durant la répétition, j’ai tout contrôlé et, év idemment, lors du concert … j’ai tout lâché ! J’ai décidé de faire entièrement conf iance à l’ingénieur du son, Philippe Petit, qui a fait un tra vail remarquable. Il y a eu quelques inév itables raccords du fa i t d ’une seule prise de son, mais on peut vraiment parler d’un live total. Le choix de Brahms étonne. Chopin n’aurait-il pas été plus accessible à un public visiblement peu habitué au répertoire classique ?
La notion de complexité en regard d’un répertoire me paraît toute relat ive. Au Triton, la programmation des musiques dites actuelles et contemporaines est souvent part iculièrement ardue. On peut même parler dans certains cas d’expérimentation sonore. Il suff it de regarder le nom des art istes de jazz inv ités qui produisent des musiques extrêmement élaborées. Lequel des deux uni vers vous paraît le plus élitiste ? Je ne suis pas certain que ce soit celui du classique. Le public habitué aux musiques cons idérées comme populaires possède lui aussi des codes qui ne sont pas nécessa irement intelligibles par les mélomanes « classiques ». Ce pro jet est aussi une découverte réciproque. En clair, je fais la démarche de jouer Brahms [ juillet- août 2015
PIANISTE n°93 27
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À L’AFFICHE NIMA SARKECHIK
« Je veux donner un sens à ma vie d’interprète en inventant mon propre univers artistique. » dans les conditions qui me sont Troisième Sonate . Deux œuvres qui données et, en échange, un publ ic ne sont pas réputées « faciles »… Quels sont vos liens avec l’œuvre nouveau écoute cette musique.
À NE PAS MANQUER
Comment avez-vous ressenti le contact avec le public lors des premiers concerts ?
en Trièves, La Grange du Percy (Isère) > 23 juillet, festival Radio France Montpellier LanguedocRoussillon (Hérault) > 24 juillet, festival Les Rencontres Brel, Saint-Pierre-deChartreuse (Isère) > 18 et 19 septembre (session 3) et 15 et 16 janvier 2016 (session4), prochains enregistrements Brahms au Triton, Les Lilas (Seine-Saint-Denis)
[
J’ai ressent i une relat ion sincère, pu issante et surprenante . C’est comme si l ’œuvre de Brahms résonnait avec une intensité particulière aux oreilles d’un public très di vers, à la fois curieux et intrigué que l’on joue cette musique, « chez lui ». Les gens ont donc entendu en premier, les Variations Paganini et la 28 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
de Brahms ?
J’ai découvert l’œuvre de Brahms au Conservatoire de Paris. J’avoue que le premier contact n ’a pas été très concluant. Je trouvais sa mus ique compliquée, je n ’en d iscernais pas les contours . En 2007, le Musée d’Orsay a programmé des cycles consacrés à Brahms et Fauré . On m’a alors demandé d’interpréter les Variations Paganini ains i que les Valses de Brahms. J’ai eu une véritable
> Du 3 et 7 juillet, festival Piano
révélation pour cette musique que je n’avais que très peu jouée. On m’a suggéré par la su ite d ’en préparer l’intégrale. L’idée un peu farfelue a fait son chemin. Et, f inalement, l’esprit d’une intégrale correspond assez bien à la mental ité de Brahms. Son
œuvre est conçue comme une succession de blocs qui composent un parcours monumental qu i traverse une grande part ie du XIX e siècle . Dans un premier temps, j’ai proposé au Triton d’enregistrer un disque sous leur label. Le directeur du lieu, Jean-P ierre V i vante, m ’a répondu qu’une intégrale serait une bien meilleure idée… Comment voyez-vous la suite de l’intégrale, lorsque vous aborderez, par exemple, les dernières pièces de Brahms ?
Je tiens à préciser que cette intégrale
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n’est pas réal isée dans l ’ordre chronologique. Les pièces sont regroupées selon une cohérence mus icale expressi ve. Mais, puisque vous abordez la question des dern iers opus, si intimistes, je pourrais vous répondre qu’il est plus indiqué de les jouer devant deux cents personnes que dans une salle de 2000 places. Le caractère spécif ique de ces partitions fait que l’on peut oser des p ianissimos extraordinaires. Ma is, ce que je ne vous ai pas encore d it, c’est que chaque album comporte une p ièce de musique contempora ine. S’agit-il de commandes spécifiques?
S S I E W E N I D L A R E G
En effet, j’ai demandé à d ivers compositeurs d’écrire une pièce d’env iron cinq minutes qui soit un hommage, dans leur propre langage mus ical, à l’œuvre de Brahms. Jean-Rémy Guédon est ainsi au programme du premier disque et Andy Emler, du second. Dans le morceau du premier, Africa Brahms , je tape sur le piano, je tape du pied, je produis des sons avec ma vo i x. La pièce est d’une grande complexité rythmique et m’a demandé plus de temps de trava il que les Variations Paganini ! Matthieu Stefanelli et Arnaud Desv ignes sont programmés pour les d isques sui vants, pu is ce sera au tour d ’un compos iteur de musique iranienne, Payam Afkhâmi, qu i a retranscr it pour le piano une partition destinée au santur [instrument de musique iranien de la famille des cithares sur table, ndlr]. Il y aura auss i une œuvre de musique Klezmer par Yom Klezmer . De quelle manière la musique iranienne a influencé votre parcours d’interprète du répertoire classique occidental ?
Avec le recul, je prends consc ience de l’influence de la mus ique de mes origines – mon père jouait de la musique iranienne traditionnelle – dans mon parcours. L’agogique des phrasés, la manière d’ornementer, de percevoir le premier temps d’une mesure, tout cela prov ient de ma culture fam iliale . J ’interprète au jourd’hui comme si je devais aussi improv iser et, par conséquent, maîtr iser tous les aspects de l ’écriture et du chant pour me libérer.
Ce projet Brahms s’inscrit dans une démarche pédagogique avec la Philharmonie de Paris. Quels sont les liens pédagogiques que vous imaginez ?
Les liens sont multiples. De quelle man ière la mus ique de Brahms peut-elle s’ouvrir à d’autres expressions artistiques, comme les arts urbains ? Comment peut-on générer de nouveaux pro jets dans des lieux atypiques qui n ’appartiennent pas à l’un ivers du classique ? J’ai un pro jet de travail avec un danseur hip-hop, et j’ai dé jà collaboré avec un graffeur, un photographe. Comment aborder auss i l ’i mprov isat ion dans le domaine du classique ? Qui n’a jamais craint d’improv iser ? Et pourtant… Liszt et Rachmaninov étaient, diton, des improv isateurs de génie. Les pro jets entre le Tr iton et la Philharmonie sont une promesse d’échanges et de l iens avec les institutions les plus variées, qu’il s’agisse d’associations, d’écoles de musique, de classes à hora ire aménagé, de zones d’éducation prioritaire, etc.
www.centre-chopin.com
Quels sont vos projets personnels ?
A l’occasion de la sort ie de l’intégrale Brahms en coffret, nous organ iserons une « Nuit blanche », le 1er octobre 2016 au cours de laquelle je jouerai toute l’œuvre pour piano à la Ph ilharmon ie. Sept heures de musique d’aff ilée ! Quelques mois plus tard, je repartirai pour un an et dem i en Argentine, sur les traces de Manuel de Falla qui y a vécu les sept dernières années de sa v ie. Là-bas, j’ai trouvé une chaleur humaine surprenante . Jouer sur le piano du compos iteur pour les habitants du v illage d’Alta Gracia est, je vous l’assure, une expérience inoubliable. C’est une manière pour moi de me débarrasser aussi des apparats du class ique, des formatages de mon éducat ion musicale. Je ne renie pourtant rien de l’image de la mus ique classique. Je veux simplement donner un sens à ma v ie d’interprète en inventant mon propre uni vers artistique. Propos recueillis par Stéphane Friédérich
Le plus grand choix de pianos acoustiques & numériques en exposition permanente et en essai libre
* Lire notre chron ique page 67.
Paris – Tél. 01 43 58 05 45 Boulogne – Tél. 01 46 10 44 77
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EN COUVERTURE
30 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
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BERTRAND CHAMAYOU
UN PRINCE AU CLAVIER À 34 ans, le pianiste toulousain entre dans une période de maturité artistique et confirme, album après album, sa place parmi les grands interprètes, sans se laisser enfermer dans un répertoire ou une esthétique. Le voilà à présent lancé dans l’enregistrement de l’intégrale exhaustive de l’œuvre pour piano de Ravel. Une voie royale à même de révéler les multiples facettes de son talent.
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Vous revenez du Japon où vous vous êtes produit avec l’Orchestre de la NHK de Tokyo. Quelle impression en gardez-vous ?
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Une impression formidable et curieuse en même temps. Je suis d’un naturel très communicatif avec les autres musiciens mais on se rend bien compte que, malgré l’idée de la mondialisation, les différences culturelles pers istent. Les relations avec les gens sont d ifférentes selon le pays où l ’on se trouve, il faut à chaque fois s’adapter. Au Japon, le poids de la hiérarchie demeure ancré dans les mental ités : le soliste reste… le soliste ! Nous avons joué le Concerto de Schumann. Avec les orchestres de tradition occidentale, il est fréquent que, dans cette œuvre , on pondère la pu issance de l’accompagnement af in que le piano ne soit
pas couvert . Cette fois-ci c’était presque l’inverse : les pupitres étaient plus réservés, faisant très (trop ?) attention à ce que le p iano puisse dominer le Concerto. Il est vrai aussi que le public japonais n’est pas très expansif . Il est discipliné à un point que l’on n’imagine pas. L’enthousiasme dans la salle est, d isons, « poli », alors qu’en coulisse c’est un vrai délire, avec un culte de l’ob jet, une sorte de tendance fétichiste : signatures, ventes de CD, photos en double, en triple… Il m’est arr ivé là-bas de signer chacune des pages du l i vret d’un de mes disques par exemple, ce qu i pourrait paraître étonnant ici ! Comment percevez-vous la société japonaise ?
J’ai quelques très bons am is japonais et c ’est une chance de pouvo ir [ juillet- août 2015
PIANISTE n°93 31
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EN COUVERTURE BERTRAND CHAMAYOU v isiter le pays en dehors des c ircuits habituels. J’adore cette culture et je regrette la barrière de la langue . L’idée d’apprendre le japonais me tente d’ailleurs… Ma is, il y a tant de choses que j’aimera is apprendre… En tout cas, ce voyage m ’a beaucoup inspiré pour mon procha in enregistrement qui sera consacré à Ravel. Même si le compositeur n’est jamais allé au Japon, il était attiré par ce pays . D ’ailleurs, chez lui, à Montfort-l’Amaury, il avait recréé un salon japona is. Et quand on observe la compos ition géométrique et le raff inement des jardins du Japon, des liens se tissent avec la sensibilité classique française.
L’intégrale Ravel que j’enregistre est en quelque sorte un retour à mes premières amours, à un un i vers musical qui m’est proche. À vrai dire, je pense avo ir parti ellement (très partiellement, car je suis plutôt un hédoniste !) ce côté un peu man iaque que révèle sa personnal ité. En tout cas je le ressens quand je suis au tra vail. J’ai l’impression de pouvo ir me représenter assez b ien quel homme devait être Ravel. Avec Schubert, pour parler de mon dern ier pro jet discograph ique, c’était très différent. Sa musique, que j’adore, ne m’était pas aussi familière. À part la Wanderer-Fantaisie que je conna issa is bien (certainement parce qu’elle possède une dimension lisztienne), j’ai Quelle est la place de l’œuvre de Ravel dans votre répertoire ? Car découvert tard ivement les autres œuon vous connaît aujourd’hui avant vres du disque, les Klavierstücke notamment. C’est le pro jet discogratout pour vos enregistrements ph ique le plus diff icile que j’ aie de Liszt et de Schubert… Partons dé jà de Liszt. Mon plus loin- entrepris. tain souvenir de son œuvre est un À ce point ? disque des Études d’exécution trans- Au départ, je croyais que l’uni vers cendante par le pianiste cubain Jorge de Schubert m ’éta it « naturelleBolet, disque qui appartenait à mon ment » accessible. En le travaillant père. Ce n’est sans doute pas un ha- et en l’enregistrant, je me suis aperçu sard si j’ai choisi ce cycle pour mon que je ne le conna issa is pas auss i premier enregistrement, gravé il y a bien que cela. Je me suis attaché à une dizaine d’années. J’aime le carac- créer un imaginaire autour des schutère démiurgique de l’œuvre lisztienne bertiades. Un uni vers factice et fanet l’idée d’aborder des grands cycles . tasmé car on sa it que les schuberC’est une démarche qui m’a tou jours tiades étaient en partie basées sur attiré. Ce fut le cas avant, avec les 32 l’improv isation, ce qui était év idemSonates de Beethoven dont je n’ai ja- ment exclu dans ma démarche . mais joué la totalité en concert mais J’étais donc en train d’emprunter un dont je garde la part ition bien usée « chemin de traverse », éloigné de depuis l’enfance ! Puis il y a eu les mon répertoire originel, de mon sa Années de pèlerinage de Liszt, les Vingt voir du moment, de ma personnaRegards sur l’Enfant Jésus de Messiaen. lité. Cela m’a beaucoup appr is. Sans tomber dans une analyse ador- Peut-on faire « semblant » dans nienne1, je pense que je suis passé de Liszt, chose impossible chez Beethoven et Liszt à la musique mo- Schubert ? derne et contemporaine avec une cer- Oui et non. Liszt est un compositeur taine idée progressiste de l’écriture, qui, à mon sens, a été souvent méà l’image d’un grand voyage qui devait diocrement joué . Peut-être parce s’orienter nécessairement vers le futur. que, jusqu’à un certain point, la v irRavel n’a certes jamais été un avant- tuosité peut faire illusion. Et puis gardiste, à l’instar de Debussy par certaines de ses partitions, Après une exemple, mais il fa isait partie des lecture du Dante ou Funérailles par compositeurs qui me fascinaient, exemple (partitions que pourtant comme d’ailleurs me fascinait toute j’adore !), sont probablement moins cette époque où Par is a vu passer à « absolues » que les derniers opus de un moment ou un autre Strav insky, Schubert ou de Beethoven . De ce de Falla, Prokof iev etc., en somme, fait, l’écoute sera peut-être plus inla période des ballets russes. dulgente avec Liszt qu’avec les deux [
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BERTRAND CHAMAYOU EN 10 DATES 1981 Naissance à Toulouse 1994 Remarqué par Jean-François
Heisser 1997 Entrée au Conservatoire de Paris – premier concert au festival Piano aux Jacobins de Toulouse 2001 Prix du Conservatoire de Paris – Lauréat du concours Long-Thibaud 2006 « Révélation » aux Victoires de la musique. 1er disque : Études d’exécution transcendante de Liszt (Sony) 2008 CD Mendelssohn (Naïve). Début au Théâtre des ChampsÉlysées 2010 CD Franck (Naïve). Débuts avec l’Orchestre de Paris, le London Philharmonic Orchestra… 2011 « Soliste instrumental de l’année » aux Victoires de la musique. Débuts à New York au Avery Fisher Hall, au festival de Lucerne… CD Liszt : Les Années de pèlerinage (Naïve) 2012 3e Victoire de la musique pour le « meilleur enregistrement de l’année » 2014 Contrat d’exclusivité avec Erato. CD Schubert
compositeurs que je vous cite. Mais si entendre Schubert mal interprété est certes une expérience désagréable, on peut tou jours percevo ir le chefd’œuvre. Il en va de même, et de façon encore plus év idente, avec des compos iteurs comme Mozart, Brahms ou Ravel. Ça n’est pas forcément le cas de certa ins compositeurs, qui nécess itent un peu d’« aide » de la part de l’interprète pour exprimer toute la substance de leur œuvre, je pense par exemple à Janácek, Sibelius ou même Moussorgsk i. Liszt est un peu dans ce cas . Certaines de ses œuvres possèdent des gestes fantastiques, mais ne sont pas aussi « organisées » que d’autres, et l’interprète a alors un rôle vér itablement théâtral. Il doit être en empathie totale avec les idées du musicien, savo ir l ire entre les l ignes d’une certaine façon. Mais, à la f in, cela rev ient plus ou moins au même: on ne fait pas « semblant ». Nous en venons par conséquent à la nécessité de la maturation des grandes œuvres…
Il faut les faire siennes, en effet, et cela ne concerne pas seulement les grandes œuvres. Nikolaus Harnon-
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court suggère même de s ’efforcer à « devenir un homme du XVIII e siècle » lorsque l’on joue les classiques. C’est illusoire, mais rien n’empêche de se culti ver, de la isser infuser nos conna issances af in d ’appréhender la musique « de l’intérieur », et non de se contenter d’une approche qu i serait plus superf icielle. Avec Ravel,
piano. Tout est détaillé et précis, on est en quelque sorte dans le « toutécrit ». Pour autant, je me sens assez libre quand je l ’interprète, un peu comme s’il s’agissait d’improv isations de jazz . On sait d’ailleurs que Ravel fréquentait beaucoup les clubs de jazz et cela s’entend dans sa musique. Je vois donc dans ce p ianisme ravé-
« J’AIME AVANT TOUT LA CRÉATION ET LA CRÉATIVITÉ, QUELLES QUE SOIENT LES ESTHÉTIQUES. » je su is donc assez à l ’aise car je le pratique depuis mon enfance, et j’ai beaucoup lu à son su jet. Et je passe d’ailleurs beaucoup de mon temps libre à Saint-Jean-de-Luz, à deux pas de sa ma ison natale !
lien un mélange de Liszt, de Chabrier (compositeur qu’il adorait), de Rameau et de Couper in, le tout empreint de folklore (notamment h ispanique) et de jazz . Cur ieux mélange ! Ma is toutes ces influences conf inent à une grande clarté d ’écriParlez-nous de l’intégrale proprement dite… ture, à une sorte de matière transCe sera une intégrale exhausti ve, en parente. À la même époque, le p iano trois disques. Elle comprendra tout de Prokof iev ou celu i de Rachmale piano solo, y compr is des œuvres ninov, par exemple, usent de textures comme le bref Menuet en ut dièse mi- beaucoup plus mass i ves. neur, la Parade, la Sérénade gro- Vous avez évoqué l’inspiration tesque… ainsi que les vers ions pour orchestrale de Ravel. Comment se piano de Daphnis et Chloé et La Valse. traduit-elle ? En regardant toutes les partitions D’abord par le fa it que, en f in orétalées devant vous, quelle chestrateur, il cherche à évoquer les di vers pup itres au piano. Ça n ’est impression émerge ? C’est d’abord une œuvre d’inspira- pas un hasard s ’il a orchestré plution lisztienne, une écr iture pianis- sieurs de ses p ièces, comme la Patique v irtuose et orchestrale, surtout vane pour une infante défunte, deux pour ce qu i concerne les p ièces de extraits des Miroirs, quatre morceaux nature impressionniste comme Gas- du Tombeau de Couperin, ou encore pard de la nuit , Miroirs ou Jeux d’eau. les Valses nobles et sentimentales. Sur ce point, la technique de Ravel Par a illeurs sa mus ique recèle n’apporte rien de vraiment nouveau, presque une dimension « spectrale » même si l ’harmonie est d’une très avant l’heure, avec une approche grande originalité. Sa musique té- sens ible du timbre et de la résomoigne aussi d’une écriture rigou- nance. Si l’on pense au Gibet de Gasreuse, d’essence classique (Sonatine , pard de la nuit , notamment, où aux Le Tombeau de Couperin ). Ravel autres pièces usant de sonor ités de épure les lignes de façon à les rendre cloche (La Vallée des cloches ou la limpides même lorsque la polypho- partie centrale des Noctuelles, toutes nie est complexe . Les timbres sont deux issues des Miroirs) , il repose parfaitement déf inis, on entend ici son écriture sur des sonorités « cenun hautbois, là un cor . Le pianiste trales » autour desquelles se construiVlado Perlemuter, qu i a travaillé sent des constellat ions sonores, auprès du maître, raconte comment comme des harmoniques. On trouve Ravel lui indiquait systématique- cela aussi dans les pièces aquatiques ment les instruments imag inaires comme les Jeux d’eau, Une barque qu’il entendait dans ses pièces pour sur l’océan des Miroirs, ou encore [
L e s S o l i s t e s
à Bagatelle
2 0 1 5
29 août au 13 septembre Orangerie du Parc de Bagatelle Grille de Sèvres Route de Sèvres à Neuilly – 75016 Paris
Prix des places : 20 € (TP) • 15€ (TR) (hors frais de location) Accès au jardin gratuit sur présentation du billet d’entrée au concert
Renseignements : 01 46 32 02 26 www.ars-mobilis.fr
juillet- août 2015
PIANISTE n°93 33
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EN COUVERTURE BERTRAND CHAMAYOU Ondine de Gaspard de la nuit, où des myriades de notes volent autour des lignes mélodiques.
sur un motif (ascendant ou descendant) de trois notes, doté d’un inter valle court (une seconde) et d’un intervalle large (en général une quarte ou une quinte). C’est une sorte de matrice. Dans son ouvrage consacré à Ravel, Manuel Rosenthal 2 écrit à quel point son maître admirait chez Mozart sa capac ité à composer de très longues l ignes mélodiques, ce dont Ravel ne s’estimait pas capable, bien qu’i l ait réussi à prouver le contraire (non sans efforts selon ses
[
Utilisez-vous la pédale tonale afin de dissocier les timbres ?
Je me pose la quest ion pour l’Épilogue des Valses nobles et sentimentales , mais je pense que, f inalement, je ne vais pas en faire l’usage. Je n’ai jamais été vraiment convaincu par l ’utilisation de la pédale tonale en dehors des œuvres qui ont été écr ites spécialement pour elle, comme par exemple, la Sequenza de Berio. Hormis ce champ de compétences, son utilisation me paraît anecdot ique. J’aime surtout travailler avec la pédale forte, faire des demi-pédales, des quarts de pédale … J ’y attache une très grande importance et j’insistais beaucoup sur cette maîtr ise ainsi que sur l’utilisation de la una corda (la pédale sourde) quand j’enseignais au Conservatoire de Paris. On « dessine », on« sculpte » la musique et les phrases mus icales d’abord avec les mains. Les pédales sont des coups de pinceau pour a jouter des touches de couleur .
« CE QUI EST FRAPPANT AVEC RAVEL, C’EST QU’IL N’A COMPOSÉ PRATIQUEMENT QUE DES CHEFS-D’ŒUVRE ! » dires) avec le subl ime mouvement lent du Concerto en sol, sans parler de l’extraordinaire thème du Boléro ! Il était un excellent mélodiste mais, à part ces exceptions notables, travaillait généralement sur de pet its motifs. Évoquons à présent votre activité d’interprète. Il semble qu’elle soit multiple…
Y a-t-il des œuvres de Ravel qui vous émeuvent plus particulièrement ?
Ce qui est frappant avec Ravel, c ’est qu’il n’a composé pratiquement que des chefs-d’œuvre ! Il y a év idemment Gaspard de la nuit, notamment Le Gibet … et puis j’ai une tendresse toute particulière pour les très raff inées Valses nobles et sentimentales . Mais, en déf initi ve, je préfère ne pas choisir ! Ce qui est fascinant, ce sont les liens discrets qui existent entre toutes ces pièces. Comment cela ?
Il y a des thèmes récurrents entre les pièces. Elles possèdent toutes des doubles : Alborada del gracioso est une sorte de deux ième Sérénade grotesque par exemple. Le glas de la partie centrale des Noctuelles, ou celui des Oiseaux tristes dans les Miroirs résonne à nouveau dans Le Gibet. Il y a toute la sér ie des menuets, les pièces d’inspiration aquatique, etc. On s’aperçoit qu’il y a quelque chose d’assez obsessionnel chez Ravel . Autre chose de tout aussi remarquable : la plupart des œuvres sont basées 34 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
À ÉCOUTER À paraître début 2016. > Intégrale de l’œuvre pour piano seul de Maurice Ravel. 3 CD (Erato).
En effet. En dehors de mon act i v ité principale de pianiste soliste, je joue aussi beaucoup de mus ique de chambre. J ’aborde plus ou mo ins toutes les époques, et me sens très concerné par la mus ique d’au jourd’hui. Je souhaite, dans un futur proche, passer des commandes à des compositeurs. Pour le style class ique, il m ’arri ve de travailler avec de petits ensembles, avec ou sans chef et sur p ianoforte. Cette année, j’ai fa it une tournée avec la Chambre philharmon ie et Emmanuel Kri v ine . Nous avons donné le Concerto « L’Empereur » de Beethoven avec pianoforte. Je réitère l’année procha ine avec l ’Orchestre des Champs-Élysées et Ph ilippe Herreweghe. Ce qui m ’i ntéresse dans cette démarche, c ’est de tra vailler sur le t imbre spécif ique de l’i nstrument et, par conséquent, d’être amené à repenser l ’interprétation. Ce travail peut être très fructueux et peut avoir des répercussions sur mon act i v ité d ’instrumentiste « moderne ». J’ai récemment donné
le Premier Concerto de Mendelssohn avec l’Orchestre de Paris et Thomas Hengelbrock et nous nous sommes très bien entendus de ce po int de vue. Il faisait des essais pour changer la d isposition de l ’orchestre, allait dans la salle écouter le résultat . Ce genre d’approche « en mouvement» me correspond tout à fa it. En 2011, j’avais enregistré avec le Cercle de l’Harmonie dirigé par Jérémie Rhorer, le Premier Concerto de Liszt sur un p iano Erard de 1837, b ien que je le joue la ma jorité du temps sur un Steinway moderne, comme je le ferai à la Philharmonie de Paris en octobre prochain. Je n’aime pas les idées f igées. Avez-vous été formé à ce type d’interprétation ?
Hélas, non. Enfant, quand je jouais Mozart au Conservatoire, la conception était souvent très académique. Avec Mozart, on joua it avec des « gants blancs » en oubliant la v iolence ou le caractère humor istique parfois de l’écr iture. Adapter son jeu à des œuvres qu i ont deux siècles d’existence nécessite une très grande remise en question. Je me dis que certains de mes collègues p ianistes « modernes » sont parfois plus passéistes dans leur façon d ’interpréter que les musiciens « baroques », qui eux-mêmes sont souvent des vra is produits de la modernité ! C’est assez paradoxal quand on y pense . Quoi qu’il en soit, je pense que l’expér ience des instruments anciens est salutaire. On se rend compte du cadre dans lequel les compos iteurs travaillaient, de l’imagination que déployaient certains pour surpasser les contraintes de l’organologie de l’époque. Cela étant, il est risqué d’aff irmer que Mozart ou Beethoven auraient préféré le piano moderne s’ils l’avaient entendu. Je pense qu’ils auraient probablement été choqués par un son auss i pu issant. Avant eux, Bach ne fut pas un inconditionnel du pianoforte qu’il connut à la f in de sa v ie. Toutefois, il n’avait sans doute pas encore eu entre les mains un modèle très conva incant. Là où le piano moderne a gagné des choses par rapport à son ancêtre le pianoforte, il en a aussi perdu. Au-
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tant prof iter de la richesse que nous offre la d i versité des instruments et des approches au jourd’hui. Comment constituez-vous vos programmes de récitals ?
J’essaie d ’établir des programmes personnels. Il est important que le public évolue dans un un ivers sonore cohérent, qu’il sui ve le f il d’une histoire. Certains compositeurs se prêtent plus aisément aux comb inaisons. La mus ique de L iszt, notamment, peut être assoc iée à presque tout, tant il y a, dans son œuvre, de liens avec le passé, son époque, et surtout avec l ’avenir. Certains compositeurs sont en revanche diff iciles à marier. J’aime bien aussi les monographies, car on peut s ’immerger ple inement dans l ’uni vers d’un compositeur. J’attends du concert ce que j’attends d’une pièce de théâtre ou d ’une exposition: je veux voyager, être dans une ambiance et ne pas en sort ir. Je n’aime pas trop les programmes de récital qui « picorent » dans le répertoire : une sonate classique parci, une pièce romant ique brillante par là… Après, év idemment, tout dépend de l ’interprète ! Nous revenons à la musique française… Jouez-vous Fauré, Saint-Saëns ?
Je joue beaucoup la mus ique de Saint-Saëns, à tel point que je songe à l’éventualité d’un enregistrement de ses œuvres après l ’album Ravel. J’aime beaucoup l’uni vers de Fauré,
« J’ATTENDS DU CONCERT CE QUE J’ATTENDS D’UNE PIÈCE DE THÉÂTRE OU D’UNE EXPOSITION: JE VEUX VOYAGER… » mais il est diff icile à bien restituer. Il y a assez peu de vers ions de ses pièces que je trouve conva incantes. J’ai récemment entendu le Septième Nocturne , magnif ique sous les doigts de Michel Dalberto. La grande ligne de Fauré se situe à l’opposé des motifs concis de Ravel. Chez Fauré, la phrase musicale se déroule cont inuellement, comme si elle était inf inie. À l’inverse de la musique ger-
manique, l’écriture du compositeur français ne donne pas trop l ’impression qu’il y a des temps forts et des temps faibles, par exemple. On ressent plutôt la construct ion d ’une horizontalité, d’une forme de suspens ion, d’immobilisme, voire de décompos ition dans ses dern ières œuvres. Une décomposition l iée à la complexité de plus en plus grande des harmonies, qui, f inalement, ne se résolvent plus tou jours.
Qu’est-ce qui vous empêche de jouer sur un clavecin ?
J’ai joué un peu de clavec in pour moi, ma is pas en concert . Je rêve d’apprendre à en jouer correctement mais là aussi, il faut du temps. Le clavecin, tout comme l ’orgue, c’est un tout autre uni vers, c’est un langage à apprendre . Je laisse Bach à des musiciens comme Pierre Hantaï qui font cela magnif iquement bien. En revanche, un p ian iste peut Y a-t-il des compositeurs que vous s’adapter plus fac ilement, s’il en a ne jouez pas en public ? l’env ie, au pianoforte, car le patr i Je ne joue du Bach que pour mo i moine génétique de l’instrument est car je n’ai pas résolu la quest ion de très voisin de ce qu’il connaît. l’instrument liée à son œuvre. Même Permettez-nous d’insister : aucun chose pour les autres compos iteurs Bach en concert ? baroques (Rameau, Couper in, Scar- L’année procha ine, je fa is une exlatti…). Alors que je n’ai aucun pro- cept ion. En fait, je me su is la issé blème à tout jouer au piano, lorsque convaincre de jouer un concerto je joue Bach, j’ ai le sent iment de pour clav ier de Bach. Je fais cela par produire quelque chose qui ressem- am it ié, ma is je regrette un peu blerait à une sorte de synthétiseur. d’avoir accepté. Contrairement aux Je rêve alors du clavecin et de son Partitas , ou aux Préludes et fugues où je pourrais trouver une solut ion [ tempérament inégal ! juillet- août 2015
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EN COUVERTURE BERTRAND CHAMAYOU dans une certaine abstraction intellectuelle, ici, dans le Concerto, la combinaison des cordes en ac ier et du piano moderne me gêne . Je ferai avec, mais je ne pense pas renouveler l’expérience. Qui sait, peut-être un jour changera i- je d’av is ! [
Le répertoire contemporain tient une place importante dans votre vie musicale…
Enfant, je voulais être compositeur et je n ’imaginais pas vraiment une carrière de pianiste. À cette époque, au Conservatoire de Toulouse, je ne connaissais de contempora in que la mus ique de Mess iaen et de ses élèves : Boulez, Stockhausen et Xenak is, entre autres, compos iteurs que j’ai tout de su ite aimés et que j’aime tou jours autant. Je n’ai découvert les courants américains que vers 16-17 ans, tout comme le fa it qu’il existât des compositeurs de musique dite « tonale », ce qui m’avait d’ailleurs un peu déçu à l ’époque ! Je dis ça d’un air amusé car au jourd’hui j’apprécie Steve Reich et bien d’autres, tout comme les œuvres de jeunesse de John Cage, celles pour p iano préparé en particulier. En vérité, j’aime avant tout la création et la créati v ité, qu’elles que soient les esthétiques. Cette attirance pour la mus ique contemporaine n’a rien d’une posture intellectuelle. Elle est simplement la continuité d’une attirance née dès mon enfance. Et le jazz et l’improvisation ?
Là encore, à « usage domestique » même si j’ai dé jà improv isé sur scène à quatre mains avec le pianiste de jazz israélien Yaron Herman ! Il y a tout un état d ’esprit qu’on ne peut pas prétendre connaître du jour au lendemain. Ce sont des années de pratique qui peuvent fa ire un bon jazzman, tout comme un grand musicien pop. Bien que je n’aie pas participé à la classe d ’improv isation au Conservatoire de Paris, je me suis tou jours amusé à improv iser depuis mon enfance . L ’improv isation est quelque chose de lud ique . Dans mon cas, je n’avais pas l’impression de travailler. Je bricolais, je cherchais des combinaisons de sons, d’accords. Je déchiffrais beaucoup auss i, tout ce qui passait à portée de mes doigts, 36 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
et tout particul ièrement les morceaux très diff iciles. J’aimais la complexité, pas forcément l ’extrême v irtuosité, mais les part it ions très chargées comme les dern ières sonates de Beethoven. À leur contact, je suis passé rapidement à la musique du XX e siècle pour étancher ma so if de complexité : Ravel, Strav insky, Iberia d’Albéniz, la musique de Bartók … Par la suite, je suis allé directement vers Messiaen et le réperto ire contempora in. Durant toute une période, j’ai un peu occulté la musique romantique. Vous êtes-vous remis à la composition ?
Non. Je garde cela dans un co in de ma tête. Comment disposer du temps nécessaire à la compos ition quand on joue un concerto différent chaque semaine ? Ce n’est pas entre deux récitals que l’on peut remettre le mécan isme de la créat ion en route ! Composer s ignif ie pouvoir faire des brouillons, développer des idées. Peut-être un jour… Parlez-nous des grands pianistes du passé ou d’aujourd’hui qui vous ont marqué…
Parmi les pianistes du passé je peux citer Horow itz et Cortot, qui sont des p ian istes dont j’ ai scruté les mo indres déta ils de jeu, les inflexions, les rubatos… Au jourd’hui je pourrais vous dire Krystian Z imerman, dont j’ai entendu de très grands concerts . Il y a deux ans, je l’ai écouté dans le Concerto pour piano de Lutoslawsk i et ce fut à nouveau éblouissant. J ’ai rarement entendu un instrument sonner ainsi. Radu Lupu, aussi. Avec lui, il se produit tou jours au moins un moment de grâce. Inexplicable. Très peu d’artistes parv iennent à cela. Et Pogorelich, qui divise tant le monde musical, aujourd’hui ?
La prem ière fo is que je suis allé l’écouter, c’était au milieu des années90 . Il se produ isait à Toulouse dans un programme Chop in. Je sa vais que c’était un excentrique, mais rien de plus. Je ne conna issais pas ses disques. Le sent iment que j’ai éprouvé éta it surprenant . Ma conscience me disait que je ne devais pas aimer cela, et pourtant, je n ’ai
À NE PAS MANQUER > 9 juillet, Eygalières (13) > 10 et 11 juillet, Rencontres
Musicales d’Evian (74), à La Grange au Lac et au Théâtre du Casino, deux concerts de musique de chambre avec Baiba Skride (violon), Sol Gabetta (violoncelle), Jean-Frédéric Neuburger (piano), Emmanuel Curt et Daniel Ciampolini (percussions) > 22 août, Abbaye de Fontmorigny (18) > 25 août, Annecy Classic Festival (74) > 6 septembre, Montreux (Suisse) avec l’Orchestre National de France, dir. Emmanuel Krivine : Concerto n°2 de Saint-Saëns > Du 22 au 27 septembre,
Chambéry (73), directeur artistique du Bel-Air Claviers Festival (avec Katia et Marielle Labèque, Jean-Frédéric Neuburger, Yaron Herman, Olivier Latry, Jean Rondeau…) > 7 et 8 octobre, Philharmonie de Paris, Orchestre de Paris, dir. James Gaffigan : Concerto n° 1 de Liszt.
pensé qu’à ce récital durant tout le mois qui a sui v i ! Et je garde encore en mémoire ce concert . C’est intrigant de s’interroger sur ce que l ’on doit faire ou pas. F inalement, c’est ce qu’on devrait espérer de tout événement musical. J’adore les disques d’Ivo Pogorel ich, ses Scherzos de Chop in, sa Deuxième Sonate de Scriabine… Même si je dois avouer que j’ ai été un peu déçu par les choses récentes que j’ai entendues, ce pianiste m’a beaucoup influencé . Gould vous fait-il le même effet que le pianiste croate ?
Ah, Gould, c’est très différent ! J’ai été un « fan » du pianiste canadien. J’achetais tous ses disques, même les trucs « inécoutables» comme sa Burlesque de Strauss, sa Troisième Sonate de Chopin… J’étais « fan » par décret, lisant tous ses textes, regardant toutes les émissions qu’il avait faites avec Bruno Monsaingeon et buvant chacune de ses paroles . Et puis il y a eu l’overdose et un re jet assez v iolent, même si au jourd’hui cette période est passée . Certaines de ses interprétations me capt i vent encore, comme son dernier enregistrement des Variations Goldberg 3. Mais dire cela n’a rien d’original, tant ce disque
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a marqué son temps. Pourtant, le côté obsessionnel, inhumain presque de Gould, me met relati vement mal à l’aise. Cependant on peut d ire que lui a vraiment trouvé une solution pour jouer Bach au piano ! Gould a fini par ne plus se produire en public. Et vous, quel est votre rapport à la scène et au public ?
J’ai tellement d’idées qui se télescopent entre elles quand j’arr i ve sur scène, que pendant longtemps, cela a été vraiment une gêne. L’une des solutions que j’ai trouvées pour résoudre en partie le trac, c’est de faire le v ide dans mon espr it ! J’ai décou vert cela en fa isant du yoga et en pratiquant la méditation. Au dernier moment, j’essaie de ne plus rien pré voir et de faire conf iance au travail effectué auparavant . Après tout, il ne peut pas en être autrement, ma is c’est très diff icile de s’en convaincre et de lâcher prise. La scène me fa it tou jours un peu peur, ma is c’est une peur plutôt sa ine. Venons-en maintenant aux chefs d’orchestre…
Le chef Thomas Hengelbrock fa it partie des belles rencontres récentes, je pense qu’il y aura d’autres collaborations. J’ai une belle compl icité aussi avec Semyon Bychkov, Emmanuel Kri v ine, sans oubl ier Stéphane Denève et Tugan Sokh iev . J’avais vécu un grand moment avec Pierre Boulez en 2011, un rêve de gamin devenu réalité. Après plus de d i x ans de travail avec différents chefs et orchestres, je noue des rapports plus forts et régul iers. Au f il du temps, des aff inités se créent et on apprend à m ieux se connaître, à mieux comprendre avec qu i on est « compatible » musicalement.
de celles-ci. Mais il est très diff icile de faire des comparaisons. Les pays germaniques ont une culture de l’orchestre peut-être plus ancrée, qu i a permis à certains orchestres comme le Philharmonique de Berlin d’atteindre un degré d’excellence inouï. Même chose pour les pays anglosaxons. Mais des différences notoires persistent. Les orchestres frança is possèdent des sonor ités spécif iques dont on ne trouve l ’équi valent nulle part ailleurs. Il en va de même pour le son v iennois : comparer le Philharmonique de V ienne et celui de Berlin est impossible tant les esthétiques culti vées sont d ifférentes, si ce n’est opposées. Et c’est tant mieux. D’ailleurs, jouer la musique française n’est pas tou jours év ident en dehors de notre pays. Par exemple, pour certains orchestres allemands, cela demande beaucoup d’efforts, car il faut changer d’état d’esprit. Le répertoire germanique est davantage basé sur une concept ion de la pulsat ion sans équ ivoque, quand la musique français perçoit le rythme de manière peutêtre plus horizontale et plus irrationnelle – en valeurs brèves et longues. C’est une différence subtile. Cela me paraît naturel ma is, pour moi, c’est l’inverse et jouer le répertoire allemand me demande un très gros travail d’adaptation. Sans tomber dans le cl iché, un musicien joue la langue qu’il parle – la langue maternelle, j’entends. Et derrière les notes se trouvent bien souvent les mots. Ce que l’on déf init parfois en termes de styles musicaux, ce ne sont peut-être en vérité que des éléments de langage. Propos recueillis par Camille Arcache et Stéphane Friédérich
Au début de notre entretien, nous 1. Sociologue, philosophe, musicologue et compositeur allemand, Theodor parlions des orchestres japonais. T .W . Adorno (1903-1969) fut l ’un des Percevez-vous des différences concepteurs de la Théor ie critique au entre les orchestres de différentes sein de l’École de Francfort . Il a exercé une grande influence sur la ph ilosophie nationalités ?
Contra irement aux idées reçues, le n iveau technique des orchestres français n’a rien à env ier à celui de beaucoup d’autres orchestres. Le nombre de formations est beaucoup plus élevé en Allemagne, par exemple, et favorise une plus grande m ise en valeur
et l’esthétique musicales, appliquant les doctrines de Karl Marx et les techn iques de Freud à l’analyse du fait musical. 2. Ravel, Souvenirs de Manuel Rosenthal, par Manuel Rosenthal, éd . Fernand Hazan, 1995. 3. Bach, Variations Goldberg, par Glenn Gould. 1 CD Sony Class ical, 1981 .
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COMPRENDRE
LES GRANDES FORMES MUSICALES
L’art de la mazurka Au Concours Chopin de Varsovie, le prix attribué au meilleur interprète de la mazurka est l’un des plus prestigieux. Que représente cette danse dans l’histoire de la musique ?
U
Une bonne part ie de la mus ique classique possède de sol ides racines populaires. À la f in du Moyen Âge et à la Rena issance, de très austères messes polyphoniques se fondaient sur des chansons popula ires, au XVII e siècle dé jà, la su ite frança ise alignait ses allemandes, courantes, gavottes et menuets. Pu is v int le temps des aff irmations nationales qui passaient forcément par la danse populaire, que des mus iciens de mieux en mieux renseignés collectaient jusque dans les rég ions les plus reculées et dont les compos iteurs faisaient ensuite leur prof it. C’est, grosso modo, l’histoire de la mazurka, comme de la polona ise et de bien d’autres danses. Comme son nom ne l’indique pas, la mazurka ne v ient pas de Mazurie, cette région située au nord-est de la Pologne, aux conf ins de la Lituanie et de la Biélorussie, mais des plaines proches de Varsov ie d’où était originaire le peuple mazur, et que l ’on désigne sous le nom de Mazov ie. Ce type de danse apparut au XVIe siècle et il en existe plusieurs formes, la mazur ou mazurek, de tempo modéré, l’oberek, plus rapide, la ku ja w iak, plus lente. La mazurka est à trois temps. Dans ses formes populaires, la ligne mélodique se structure 38 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
À droite, frontispice pour la Mazurka composée par Valentine Dobrowolski (non daté).
ÉCOUTEZ
ET JOUEZ!
Les Mazurkas op. 67 n°4 et op.63 n°3 de Chopin. > Sur le CD plages 3 et 4 ; Cahier de
partitions pages V et IX, avec les conseils d’Alexandre Sorel page 46.
en sections de quatre mesures correspondant à une f igure chorégraphique. Elle débute souvent par une anacrouse et le second temps est accentué. Le tempo est relat i vement rapide. Traditionnellement, une mazurka est précédée d ’une sorte de marche introducti ve qui évoluera séparément pour donner la polona ise. La mazurka est tou jours populaire en Pologne dont l ’hymne national est une mazurek ( Mazurek Dabrowskiego, Mazurek de Dabrowsk i) datant de la f in du XVIIIe siècle.
Un, deux et peut-être trois temps C’est d’ailleurs à cette époque qu ’avec le développement de l ’industrie et de la pratique du piano, la mazurka s’est introduite dans les salons, en Pologne pu is dans toute l’Europe, et c ’est dans ce contexte qu ’il faut situer et comprendre les mazurkas de Chopin. Herbert von Kara jan disait plaisamment que pour b ien interpréter une valse v iennoise, il fallait compter, un, deux … et peut-être trois. C’est un peu la même chose avec la mazurka. Toutes sont à trois temps mais avec un imperceptible flottement. Qu i voudrait les jouer avec une rigueur métronomique s’exposera it à en trahir l’esprit. Chopin ne fut pas le prem ier compositeur à écrire des mazurkas. Il avait été notamment précédé par M ichal Oginsk i (1765-1833), homme pol itique et musicien fort célèbre en son temps, qui avait dé jà utilisé le répertoire national. Il était l’auteur d’un opéra, Bonaparte au Caire , à la gloire de Napoléon, ce qu i suppose une sympathie pour les idées françaises sur la liberté des peuples, qu i nourriront le nationalisme polonais. Mais, malgré les Mazurkas d’Oginsk i et d’autres compositeurs moins connus, comme Maria Agata Szymanowska (1789-1831), celles de Chopin, composées tout au long de sa carr ière constituent un corpus cap ital qui jouera, comme ses Polona ises, un rôle central dans la const itution de l’identité musicale de la Pologne et influencera tous ses successeurs . S’il conserve év idemment le rythme ternaire, il prend toutes les libertés possibles avec la forme traditionnelle, de sorte que
de même qu’avec les Valses ou les Polonaises, on peut dire que Chopin a écrit des poèmes pianistiques sur ou d’après les mazurkas. Les contemporains de Chopin ont év idemment été émerveillés par son art de l’interprétation de ces pièces. Berlioz écr ivait à ce propos : « Il y a des détails incroyables dans ses Mazurkas ; encore a-t-il trouvé le moyen de les rendre doublement intéressantes en les exécutant avec le dernier degré de douceur, au superlatif du piano, les marteaux effleurant les cordes tellement qu’on est tenté de s’approcher de l’instrument et de prêter l’oreille comme on ferait à un concert de sylphes ou de feux follets.» Ces mots sont d’ailleurs, pour le pianiste moderne, une belle introduction à l’esprit des mazurkas.
Le folklore imaginaire de Chopin Combien Chopin a-t-il composé de Mazurkas ? Pendant longtemps, les éd itions d iscograph iques s’en sont tenues à c inquante et une. Puis on a intégré sept autres numéros « posthumes », ce qui porte leur nombre à cinquante-hu it ma is on est ime qu’une bonne d iza ine au mo ins a été perdue . La prem ière Mazurka connue de Chop in date de 1824, l’année de ses quatorze ans . L’année 1825 est marquée par deux nouvelles Mazurkas brèves qu i traduisent une compréhension intuit ive de la musique populaire slave. Alors que la plupart des Mazurkas de l’époque affad issaient l’élément populaire, ce qui leur donna it un ton dél icatement salonnard, Chop in comprend ici, en quelques mesures, tout le parti harmonique, mélodique et rythmique que l’on peut t irer du folklore. Cela dit, comme il le reconnaissait lui-même dans une lettre à sa famille, dès 1830, à propos des Mazurkas op. 7, « ces Mazurkas ne sont toujours pas faites pour être dansées». De même que les Barcarolles de Fauré ne retiennent qu’une forme assez vague et ne sont pas conçues pour être chantées sur les canaux vénitiens, elles offrent au compos iteur un concept formel relat i vement imprécis, dans lequel vont s’investir son imagination créatrice, ses rêves patriotiques et toute sa sens ibilité. On peut considérer les Mazurkas [
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COMPRENDRE LA MAZURKA [ de Chopin de d i vers po ints de vue. Du point de vue de l’imaginaire romantique, elles représentent pour les salons ar istocratiques parisiens que fréquentait une aristocrat ie polonaise en exil, une image idéalisée de la Pologne telle qu ’on pouvait se la f igurer dans ces milieux favorables à la cause polona ise. S i, inversant cette perspecti ve, on les regarde du point de vue de Chop in, elles représenta ient pour lui, comme les Polonaises, un moyen d’expression et de communication d’une identité polonaise d ’autant plus fantasmée qu’il avait perdu le contact réel et d irect avec son pays natal . Si l’on considère maintenant le contenu musical, on remarquera que Chop in ne cite jamais textuellement de thème folklorique. Si l’on excepte leur rythme ternaire, les Mazurkas sont tellement di verses que l’on ne saurait y distinguer un schéma mélod ique, harmonique ou formel bien précis. Alors, où réside l ’unité du genre ? Outre le rythme, dans trois éléments. L’expressi v ité d’abord. Souvent mélancol ique, portée par le cho i x fréquent de tonalités mineures, qui lui donnent un sentiment élégiaque sou vent associé à l’âme slave, et spéc ialement au zal polona is, cette forme locale du spleen. Mais pas tou jours. Il existe en effet de nombreuses ma-
mol ma jeur à mi ma jeur dans la Mazurka op. 17/3, l’évolution du si ma jeur initial à mi bémol ma jeur, au début de la Mazurka op. 56/1… L’i nvent ion formelle, qu i lu i fa it cho isi r selon les cas des formes monothématiques ou polythématiques (et dans ces cas, les d i vers thèmes, comme dans une formesonate, se complètent ou s ’opposent). L’invention rythmique enf in. Dans le respect de la contra inte du rythme ternaire, Chopin parv ient à varier les tournures rythmiques à l’inf ini, jusqu’à suggérer (op. 63/1) une pulsation b inaire à l ’intérieur des trois temps. La s imple lecture des indicat ions de tempo portées en tête des part itions suff it à montrer la très grande di versité de caractères associés aux Mazurkas. Cela va du Lento (op. 63/2) au Vivace (fréquent) en passant par d i verses indications psychologiques ou agogiques (Mesto, Semplice, Moderato, Animato, Allegretto…). B ien év idemment, ces procédés d’écriture sont au serv ice d’une expression narrati ve et descripti ve, capitale à l’époque romantique et notamment dans les pays slaves . Pas de musique sans des images associées – cette tendance, bien étrangère à nos concept ions modernes, s’est poursui v ie tard dans le XX e siècle et
Conçue pour les salons, la mazurka devait se trouver à l’aise dans les résidences de l’élite parisienne. zurkas en jouées, dansantes, animées d’une sève popula ire. L ’invention harmonique ensuite. C ’est là, plus encore peut-être que dans tout autre genre chop inien, l’élément le plus innovant, mais qui éloigne les mazurkas de leur or igine populaire. On pourrait c iter par d izaines ces traits caractéristiques si or iginaux qui font de Chopin le grand mag icien harmonique de sa générat ion : la modulation soudaine en la ma jeur dans la Mazurka en la bémol op. 7/4, le passage enharmon ique de la bé40 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
Alfred Cortot se répand it souvent en commentaires imaginatifs. Ainsi voyait-il, par exemple, « une évocation à peine stylisée de ces danses de fête dont les villages mazoviens ont conservé la populaire tradition » (op. 6/3), tandis que le musicologue W ilhelm von Lenz interprétait l’op. 33/3 comme « l’épitaphe des Mazurkas », lui trouvant un caractère lugubre et douloureux. Chopin aurait, quant à lui, approuvé le t itre du « V illage endeuillé », appliqué par ses élèves à l ’op. 17/4 .
SÉLECTION DISCOGRAPHIQUE
CHOPIN Les Mazurkas de Chopin sont très enregistrées. Parmi les éditions les plus courantes et disponibles, on plébiscitera Arthur Rubinstein (RCA), Samson François (EMI), Vladimir Ashkenazy (Decca), et plus récemment Jean-Marc Luisada (DG). Hors des sentiers battus, et parmi de nombreuses versions, on recherchera l’excellente version d’ Eugen Indjic (Calliope).
M.-A. SZYMANOWSKA. Elle a précédé Chopin. Ses Mazurkas ont été redécouvertes par Carole Carniel (Ligia Digital).
SZYMANOWSKI Intégrales par Martin Roscoe (Naxos), Marc-André Hamelin (Hyperion).
TANSMAN Remarquable version de Diane Andersen (Talent). Ou encore Elzbieta Tyszecka (Acte préalable) et Margaret Fingerhut pour le premier recueil (Chandos).
BALAKIREV Un enregistrement essentiel des sept Mazurkas, couplées avec les Scherzos, par Joseph Banowetz (Marco Polo).
SCRIABINE Vladimir Sofronitski, le gendre du compositeur a enregistré un certain nombre de Mazurkas, mais pas l’intégrale qu’a excellemment réalisée François Chaplin (Evidence). Cyprien Katsaris les a incluses dans son intégrale des danses scriabiniennes (Piano 21). Intégrale assez récente par la Taïwanaise Beatrice Long (Naxos).
SAINT-SAËNS Setrak les a enregistrées dans un récital consacré au compositeur (Solstice). On les trouve évidemment dans l’intégrale de Marylène Dosse (Vox Turnabout).
FAURÉ Excellentes versions de sa Mazurka par Jean-Philippe Collard (EMI), Kathryn Stott (Conifer), Paul Crossley (CRD) ou Pierre-Alain Volondat (Naxos).
DEBUSSY La Mazurka a été souvent enregistrée avec les pièces publiées en 1890. Notons enfin une anthologie de la Mazurka avec des œuvres de Chopin, Szymanowski et Maciejewski par Lech Napierala (Dux).
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Hormis les premières, inédites de son v i vant, sans numéro d’opus et cataloguées sous la référence K . K . (Krystyna Kobylanska), Chopin a publ ié onze recue ils comprenant chacun de trois à cinq Mazurkas : op. 6 (1832), op. 7 (1832), op. 17 (1833), op. 24 (1836), op. 30 (1837), op. 33 (1838), op. 41 (1839), op. 50 (1842), op. 56 (1844), op. 59 (1845), op. 63 (1847). Les op. 67 et 68 sont posthumes (1855) et réunissent des pièces de di verses époques (1830 à 1849). Les Mazurkas op. 67/2 et 68/4 sont les dernières compositions de Chopin. Il est év ident que son écriture a évolué en un quart de s iècle, d’un style sinon popula ire du moins élégant et marqué par une singulière qualité mélodique, à un style de plus en plus soph istiqué, notamment du point de vue polyphonique et harmonique. Pour autant, jusque dans les dern ières dominent le naturel dans l ’expression et le charme du cantab ile. Si le massif chopinien domine de haut le pays de la mazurka, il n’est pas le seul à en avo ir composé, mais il semble év ident que ses successeurs en ce domaine se sont tou jours plus moins référés à lu i.
moins recherchée que l ’ob jecti v ité, bien dans le goût de l ’après-guerre . D’une certaine manière, les deux recue ils de mazurkas d ’Alexandre Tansman (1897-1896) ont joué dans sa v ie un rôle un peu analogue à ceux de Chopin. Juif de Lodz, Tansman a été contra int par l’histoire (avec une grande hache) à passer sa v ie loin de la Pologne . Les mazurkas, comme d’autres pages inspirées par son pays natal, manifestent son attachement à ses origines. Le premier recueil (1918-1928) comprend d i x pièces et fut créé par le compos iteur à New York en 1929 . Le second (neuf pièces) est à pe ine postérieur. Tansman en donna la première audition à Palma de Ma jorque en 1932. Comme dans de nombreuses pages de Tansman, on peut parler ici de néoclass icisme mais on notera que le compositeur semble posséder une meilleure connaissance ethno-musicologique que ses prédécesseurs . Le grand pianiste Ignaz Friedman (1882-1948) a la issé un recueil de Six Mazurkas, op. 85. Le dernier Polonais à avoir composé des mazurkas de quelque renom, dans le sillage de Szymanowsk i, fut Roman Macie jewsk i (1910-1998), qu i en écr iv it so ixante. Plus encore que Chopin, ce Polonais né à Berlin et mort La mazurka après Chopin Son compatr iote Stan islaw Mo- à Göteborg a passé sa v ie hors de Poniuszko (1819-1872) a composé logne où il n’a jamais vraiment résidé. deux mazurkas pour le p iano, qui Ceci explique peut-être cela… n’égalent pas en popular ité celle de Halka , l’opéra national polonais par La mazurka sans la Pologne excellence. Bien plus prolif ique, Ka- La mazurka ne fut pas seulement rol Szymanowsk i (1882-1937) in- polona ise. Les Russes s ’y sont égatégrera la mazurka à son évolut ion lement intéressés. M ily Balak irev personnelle, assez lo in de l’expres- (1837-1910), l’animateur du Groupe sion romantique. Ses Mazurkas op. des Cinq en a composé sept, entre 50, au nombre de v ingt (1924-1925) 1884 et 1906 – la c inquième fut inl’ont peut-être aidé à dépasser les troduite comme deuxième mouveinfluences impress ionnistes venues ment de sa Sonate . On est parfois de France, à évoluer vers une expres- relati vement près de Chopin, mais sion moins complexe et byzant ine avec de plus amples développements . que dans la période précédente (mar- À la génération sui vante, Alexandre quée au p iano par les deux cycles Scriabine (1872-1915) fut, au début Masques et Métopes ). Dans ses ma- de sa carrière, très marqué par Chozurkas, Szymanowsk i retrouve le pin, dont les Dix Mazurkas op. 3 goût d’une pulsation marquée, d’une (1888-90), les Neuf Mazurkas op. 25 modalité proche des musiques po- (1898-99) portent souvent la pulaires avec une certaine incisi v ité marque. Il délaissera le genre après de l’écriture fondée sur des passages les Deux Mazurkas op.40 (1903), polytonaux. L’expressi v ité y est contemporaines de la Sonate n°4 qui
R D
Portrait de Chopin par Maria Wodzinska (1836).
marque l’inflexion de son esthétique hors des cadres du post-romant isme. Conçue pour les salons, la mazurka classique devait se trouver à l ’aise dans les rés idences de l’élite parisienne. Cam ille Saint-Saëns y sacrif ia à trois reprises (op. 21 en 1862, op. 24 en 1871, op. 66 en 1883, la plus aboutie), ainsi que son ami Gabriel Fauré (mazurke de 1865 publiée en 1883 sous le t itre Mazurka ) et même le jeune Claude Debussy (avant 1890), qu i fut bien mécontent, lors qu’un éditeur réédita cette œuvre en 1905, de se vo ir rappeler ses romantiques péchés de jeunesse. Des pièces pleines de charme et bien écrites pour le p iano, qui n’a joutent pas grand-chose à la glo ire de leurs auteurs. Elles rappellent tout de même que l ’ombre de Chop in a longtemps dominé le monde p ianist ique, jusque dans les soc iétés les plus huppées de la r i ve dro ite parisienne… Jacques Bonnaure
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PÉDAGOGIE
BACH en toute logique
N
ous allons étudier au jourd’hui un chef-d’œuvre de Bach : la Fantaisie chromatique et Fugue en ré mineur BWV 903. On dit que la musique de Bach est éminemment formatrice pour un p ianiste. Chopin et Schumann déclaraient que la fréquentation du Clavier bien tempéré est la meilleure école pour deven ir bon musicien. De fait, l’œuvre de Bach est aussi pédagogique pour l’esprit du pianiste que pour ses doigts. Pourquoi est-ce le cas ? D’abord, dans la Fantaisie , nos doigts doi vent « galoper » très v ite sur le clav ier. Pour y parvenir, il importe de savoir ce qu’est réellement « l’égalité des doigts » tant vantée par les professeurs de p iano. Il faut faire très attention à cette notion. L’égalité pour le temps dans un trait, une gamme, ne veut pas du tout dire : égalité pour le son. Au contraire ! Si, avec vos doigts, vous ne « chantez » pas tous ces traits rapides de la Fantaisie chromatique, si vous n’en dessinez pas les « vagues » sonores en modelant le rythme et la nuance, vos doigts seront raides et maladroits, et vous n’arri verez à rien de bon ! « Demandez » donc quelque chose de précis à vous doigts, ils vous obéiront. Si vous ne leur demandez rien, que pourriez vous obtenir de vos doigts ? Par ailleurs, apprendre cette Fugue requiert un grand effort de concentrat ion mentale. Il faut commencer par identif ier chaque élément : le Su jet, le Contre-Su jet, les D ivertissements1, puis les chanter.
Par bonheur, l’œuvre de Bach est profondément logique. Elle représente une v ictoire de l’organisation sur le chaos. N ’y a-t-il pas une jouissance extrême dans cet effort pour apprendre une partition ? Si la musique de Bach exige autant du musicien, c’est aussi qu’elle possède cette particularité tout à fait unique dans l’histoire de la musique. Chaque fragment est aussi riche pour la beauté des courbes mélodiques (des notes jouées l’une après l’autre), que du po int de vue des notes jouées ensemble, c’est-à-dire des harmonies. Il faut nuancer toutes ces lignes musicales et en même temps, à travers une synchronisation parfaite, doser la rencontre verticale de toutes ces vo ix. Une fugue de Bach est comme une terre découpée en couches géologiques, en strates, et cela conditionne notre façon de toucher le p iano comme de la glaise. Cela nous indique aussi comment répartir le poids dans les touches. Dans un pet it li vre qu’il a publié récemment, L’Abécédaire d’un pianiste (Christian Bourgois), à l’article « Bach », Alfred Brendel souligne avec son espièglerie habituelle : « Si les accords et les harmonies restent indifférenciés, si l’on abandonne l’équilibrage des voix au piano, on sème l’insuffisance et l’on récolte le dégoût.» Voici une image pour décrire comment travailler harmonie et mélodie. Imaginez un f ilm en DVD. Il se déroule dans le temps, mais vous pouvez aussi appuyer sur «pause» af in de vous arrêter sur une image
particulière. Il en est ainsi du contrepoint et de l’harmonie. Le f ilm qui avance serait votre façon de nuancer les notes, leur succession dans le temps et l ’harmonie, une sorte d’« arrêt sur image». Jouez cette fugue. Chantez d’abord les vo ix. Puis appuyez sur «pause » et écoutez l’ensemble. La musique doit présenter des plans sonores, tout comme le fameux tableau Le Déjeuner sur l’herbe de Manet nous montre des personnages au prem ier plan, d’autres au second. Faites la différence dans vos doigts. Bref, dans l’œuvre de Bach, il faut contrôler le « f ilm » musical horizontalement et verticalement et c’est bien cela qui est diff icile ! André Gide écri vait dans Les Nourritures terrestres : « Nathanaël, je t’enseignerai la ferveur. » Il faut bien de la ferveur en effet pour jouer la Fantaisie chromatique , une conv iction analogue à celle de Glenn Gould levant la main brusquement, coupant les silences avec une préc ision maniaque, comme s’il s’agissait d’une question de v ie ou de mort. L’interprète doit se montrer à la hauteur du génie créateur. Qui oserait dire que cela est facile ? Beethoven, parlant de Bach, s’exclama qu’il n’aurait pas dû s’appeler «Bach» (le «ruisseau») mais plutôt « Das Meer » (« la mer »). Larguons donc les amarres à notre tour, mais en bordant solidement notre voile… Alexandre Sorel
1. Voir l’analyse de la Fugue dans le cahier de partitions pageXXI.
N I T A H C E M Ô R É J
Henry Lemoine (1786-1854) : Étude op. 37 n°26 Nikolaï Rimski-Korsakov (1844-1908) : Romance op. 15 n°2 Frédéric Chopin (1810-1849) : Mazurka op. 67 n°4 en la m ineur Frédéric Chopin : Mazurka op. 63 n°3 en ut d ièse mineur Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Fantaisie Chromatique et Fugue BWV 903
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PIANISTE n°93 43
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PÉDAGOGIE
DÉBUTANT
SUR LE CD PLAGE 1
Henry Lemoine (1786-1854) Étude op. 37 n° 26 1-8
Chacun connaît aujourd’hui les éditions Musicales Lemoine, mais plus rares sont ceux qui connaissent l’œuvre du compositeur Henry Lemoine. Nous proposons aujourd’hui une pièce agréable et bien écrite par cet auteur, qui fut un élève d’Anton Reicha, lui-même contemporain de Beethoven. MES. 1-8
Le « balancement» du rythme est écrit en tête de morceau: mouvement de valse. Nous sommes donc à trois temps. Connaître le solfège ne suffit pas. En jouant vous-même, vous devez surtout faire sentir à votre auditeur ce balancement musical à trois temps. La vraie musique est comme la vie. Elle bouge, elle respire. Or, ce qui fait balancer la musique dans une valse, c’est d’abord la différence entre le temps fort (le premier) et les autres temps, qui doivent être un peu plus légers. Bien sûr, il y a mille exceptions à cette règle et les grands compositeurs comme Mozart, Chopin et même Johann Strauss s’amusent à la contourner. Elle est tout de même une base de départ. Commencez par compter : « Une, deux, trois ». Savoir compter ne sert à rien si l’on n’en fait rien ! En revanche, cela est utile pour sentir où vous en 44 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
êtes de la mesure, pour ne pas vous perdre et éprouver où vous devez jouer le temps fort. Pour peser dans le premier temps, tombez avec le poids de votre main. Auparavant, sentez votre main suspendue et allégée car le premier sol est une anacrouse (ce n’est qu’un élan). Cherchez à dessiner une vague sonore en usant du geste de votre poignet. Main gauche. Dans tous les morceaux que vous jouez, faites sentir le balancement musical non seulement avec votre main droite, mais aussi avec votre main gauche. Cela est très important. Ici l’auteur a écrit une note longue sur le premier temps (noire pointée tenue). Projetez le son de cette tierce car les notes doivent durer pendant que vous jouez les autres en dessous. Mesure 7, sur le f, faites sonner la partie du milieu dans la main gauche (ré-do-si). N’écrasez pas cet accord de sol car on le nomme la dominante. Il indique une étape de l’histoire musicale. MES. 16-20
Ici encore, la main gauche détient le «pouls » rythmique de votre jeu. Pesez dans la noire pointée, puis allégez le poids des 2 e et 3e temps. Gestes de la main droite. Pour que votre musique soit belle et balancée, maintenez votre poignet très souple.
À SAVOIR La maison d’édition Henry Lemoine fut fondée en 1772 par Antoine-Marcel Lemoine, qui la nomma tout d’abord « À l’Espérance ». Elle proposait, moyennant un abonne-ment, la possibilité de consulter et d’emprunter « toutes les partitions tant anciennes que nouvelles, qui paroissent sur différents théâtres, ainsi que de la musique vocale et instrumentale ». Antoine-Marcel
Lemoine mourut en 1816, mais l’un de ses f ils, François Lemoine, avait déjà repris la maison d’édition. Puis ce fut le tour de son frère : Jean-Henry-Antoine Lemoine, dit plus simplement Henry Lemoine, celui qui nous occupe aujourd’hui. Nous vous proposons donc une pièce qui fut donc composée par cet auteur. Ses œuvres f igurent bien souvent dans les recueils de piano.
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1. Tombez de la main dans le ré du premier temps. 2. Laissez votre main s’alléger sur les 2 e et 3e temps. 3. De nouveau, descendez sur le fa # au 1er temps
16-20
de la mesure 18. Attention, cela n’est pas évident ! Pourquoi ? Parce que ce fa # est une touche noire du piano, « en hauteur » par rapport aux touches blanches. Ce n’est pas facile de redescendre sur une touche « haute » ! Sentez-le. Pour y arriver, relevez bien la main sur les notes qui précèdent. Les dernières notes sont détachées par un point (do aigu et mi ). Allégez et laissez votre main remonter toute seule, poignet « débloqué ». C’est le désir de jouer une belle musique qui nous indique les bons gestes et c’est cela qui donne une bonne technique et rend le jeu facile.
DÉBUTANT-MOYEN SUR LE CD PLAGE 2
Nikolaï Rimski-Korsakov (1844-1908) Romance op. 15 n° 2 1-6
Le compositeur Rimski-Korsakov a peu écrit pour le piano. On connaît surtout ses symphonies, ses opéras et le fameux Vol du bourdon, écrit pour son opéra Le Conte du tsar Saltan. Heureusement pour nous, cette petite pièce n’est pas aussi difficile que le Vol du bourdon ! MES. 1-6
Poids et plans sonores. En ce début, le thème en la bémol chante tout seul. Cela est dû au registre de l’instrument. Appliquez le poids de votre main sur le pouce de la main droite, la partie d’alto. En effet, ce morceau est écrit comme pour un
quatuor à cordes. Souvent, Beethoven ou Schubert écrivirent ainsi avec quatre voix distinctes, comme si chaque ligne était exécutée par un musicien à part. Apprenez à les chanter. Différenciez les plans sonores. Exercez-vous à répartir le poids dans votre main afin de peser dans la voix prédominante. Écoutez-vous jouer, comme si vous étiez une autre personne. So yez aussi à l’écoute de vos sensations. À partir de la mesure 4, appliquez le poids sur la partie aiguë car désormais le thème lui est confié. La basse. La ligne de basse a une importance particulière. Ne manquez jamais de savoir la chanter,
d’en connaître les notes par cœur a insi que les degrés de la gamme qu’elle représente. Faites vivre son balancement rythmique. La basse est la fondation de notre « maison » musicale. Ici, le la bémol du début est « assis » car il est la tonique. Ensuite, le fa de la 2e mesure s’élance, il part en voyage musical car il nous éloigne de la tonique. Plus loin, le mi bémol de basse et le si bémol du chant de la 3 e mesure nous suspendent. De plus, ils surviennent sur la fin de phrase musicale. Par conséquent, atténuez-les, et ne posez pas vos mains même si ces notes se trouvent placées [ sur le temps fort ! juillet- août 2015
PIANISTE n°93 45
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PÉDAGOGIE 7-14
À SAVOIR
Harmonie. Faites sentir à votre auditeur les notes importantes, par exemple le mi bécarre qui nous attire vers le paysage plus triste de fa mineur . Éprouvez-le par l’oreille et par le cœur. Ce n’est pas du solfège abstrait, c’est de l’émotion qui passe dans vos doigts ! [
MES. 7-14
Phraser est un aspect primordial du jeu. Il est tout aussi important de faire sentir le balancement, du rythme. Hélas, parfois, les deux se chamaillent. C’est ce qui se passe ici. À la main gauche, c’est la note blanche (la bémol , puis sol, fa, mi bémol ), qui assure le balancement sur le temps fort. Les queues des notes dirigées vers le bas indiquent qu’il s’agit d’une voix autonome. Il faut descendre un peu la main. Or, à la main droite, Rimski-Korsakov contredit ce balancement de la mesure par le phrasé. Regardez bien. À la mélodie, il a noté des accents (des : >) sur le deuxième temps. Il faut donc jouer
DÉBUTANT-MOYEN
chaque petite cellule musicale si-do-ré … si bécarre-sol-la en pesant de haut en bas dans la première note, puis en laissant remonter votre main sur la terminaison. Les deux mains doivent faire des choses très différentes musicalement et donc user de gestes différents. Sentez cette différence. Exercez-la.
SUR LE CD PLAGE 3
Frédéric Chopin
(1810-1849) Mazurka op. 67 n° 4 en la mineur
Le pianiste polonais Andrzej Jasiñski, pédagogue et jury du Concours Chopin à Varsovie, explique que les Mazurkas sont sans doute ce qu’il y a de plus délicat à jouer dans l’œuvre de son compatriote. Voici ce qu’il déclare : « Elles requièrent une maîtrise absolue du son et, si elles sont bien jouées, ce sont elles qui expr i- ment au mieux l’âme de Chopin. Dans l’histoire du Concours Chopin à Varsovie, le prix pour la meilleure interprétation d’une mazurka ne fut pas toujours décerné. Bien entendu, les inter- 46 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
prétations étaient par ailleurs brillantes dans le sens de la technique, du son et de l’imagina- tion, mais il leur manquait quelque chose qui est impossible à verbaliser et qui demande plutôt à être senti. Elles manquaient d’une cer- taine cordialité typique de l’esprit polonais, ou de manière plus générale de ce que l’on appelle l’esprit slave. » 1 Interpréter une Mazurka de Chopin n’est donc pas aussi facile que pourrait le laisser penser le peu de notes que contiennent ces joyaux de
Nikolaï Rimsk i-Korsakov est né à Tikhvine, le 6 mars 1844, et mort à Lioubensk le 8 juin 1908. Il f it des études à l’École Navale de SaintPétersbourg, puis, en 1861, devint membre du fameux Groupe des Cinq qui comprenait Mili Balak irev, César Cui, Alexandre Borodine, Modeste Moussorgsk i. Il a mis le meilleur de lui-même dans ses œuvres symphoniques libres et ses opéras. Quant au piano, il n’a composé que des pièces assez mineures, dit-on. On chuchote même qu’il était fort médiocre pianiste. Pourtant, la Romance que nous vous proposons n’en est pas moins très agréable et, à notre avis, d’un beau cantabile.
musique. « Il n’y a qu’un âne pour penser que ce soit facile », disait Franz Liszt à Wilhem von Lenz 2. La subtilité de ces Mazurkas exige que l’on sache exactement quels en sont le phrasé, les plans sonores, le rythme et l’accentuation. Cependant, même l’instinct musical ne suffit pas toujours pour bien les jouer, il faut aussi savoir quels gestes utiliser pour obtenir le son désiré. Or, ces gestes peuvent être contradictoires aux deux mains. Les mouvements du pied peuvent aussi être en opposition avec les gestes des mains. Observons tout cela de plus près. La Mazurka en la mineur exprime la nostalgie indéfinissable qui caractérise souvent la musique de Chopin et que l’on décrit souvent comme étant la note bleue. Georges Sand, dans ses Souvenirs la dépeint ainsi : « Nos yeux se remplissent peu à peu des teintes douces qui cor-
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1-8
respondent aux suaves modulations saisies par le sens auditif. Et puis la note bleue résonne, et nous voilà dans l’azur de la nuit transparente. »3 MES. 1-8
Mélodie, main droite. La première phrase débute en anacrouse sur un mi et se poursuit en un long souffle jusqu’à la mesure 8, où elle expire enfin sur le la. D’abord, n’asseyez pas ce mi, ne le posez pas avec le geste car il est la quinte de l’accord de la mineur . Or, la quinte possède un caractère plus interrogatif que la C’est exactement ce qui se passe ici. « Expirez » note fondamentale. Percevez cela. Prenez ce et « baissez la voix » sur le la final de la huitième mi en évitant de tomber de la main. Imaginez mesure, qui achève le premier fragment. Mais une prière, une question, n’asseyez pas cette ne laissez pas votre main tomber, ne la posez pas note. Votre toucher doit refléter votre pensée sur cette fin, au contraire : allégez. musicale. Puis, Kleczyñski, précise : « Les divisions secon- Au début, l’appui de la mélodie est clairement daires de cette phrase de huit mesures, revenant marqué sur le premier temps et non pas à toutes les deux ou quatre mesures, demandent chaque mesure, mais toutes les deux mesures. un arrêt plus court de la voix, en un mot des vir- Dans les mesures 2 et 4, le 1 er temps doit être gules ou des points-virgules. » moins lourd que dans les mesures 1 et 3. RemarCela correspond encore parfaitement à ce que quez d’ailleurs que Chopin a noté un silence à la nous avons ici. En effet, les premiers fragments main gauche, ce qui permet justement d’alléger de la phrase demandent à être séparés d’ une ces mesures impaires. petite virgule, par une toute petite respiration Si les deux premiers éléments de cette longue du poignet. phrase musicale durent chacun deux mesures, Kleczyñski termine enfin : « De ces règles géné- en revanche, le troisième (qui commence sur le rales, Chopin passait à la conclusion suivante, à la de la mesure 5) est plus long : il se déploie laquelle il attachait beaucoup d’importance : ne jusqu’à la mesure 8 où il « expire » enfin sur le la. Ne découpez pas cette troisième phrase, soutenez-la jusqu’au bout. 21-24 Jan Kleczyñski, qui recueillit la tradition de Chopin, indique que le Maître demandait toujours à ses élèves de ne pas couper par trop petites phrases4 : « Si une phrase musicale se compose toujours à peu près de huit mesures, la fin de la hui- tième marquera en général la termi- naison de la pensée, ce qu’en langage parlé ou écrit, nous indiquerions par un point, on doit s’y arrêter quelque peu et baisser la voix.»
pas jouer par trop petites phrases, c’est-à-dire ne pas suspendre le mouvement et la voix, sur de trop petits membres de la pensée (...) ce qui fatigue l’attention de l’auditeur qui en suit le développement. » Donc, soutenez votre pensée et votre toucher legato jusqu’à la fin de la phrase. Harmonie. Soignez votre « habillage » harmonique par la main gauche. Chantez chaque ligne horizontale que vous pouvez déceler dans l’enchaînement de ces accords. Ne vous contentez pas de plaquer verticalement des harmonies sans ressentir ce qui les fait passer de l’une à l’autre. Par exemple, écoutez la, sol # , la dans la main gauche (mes. 1 à 3). Rejouez bien également les deux mi, notes semblables qui sont répétées à chaque accord. Elles sont importantes pour la texture sonore et pour « l’empreinte » [ dans votre main.
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PIANISTE n°93 47
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PÉDAGOGIE 28-32
[
MES. 21-24
La souplesse absolue du poignet à sa jointure est essentielle pour le phrasé. Elle est tout aussi indispensable pour obtenir un beau jeu legato . Dans ce passage, nous avons des notes semblables à répéter au chant : sol-sol (mes. 21) et mi- mi , puis si-si (mes. 22). Exercez-vous à les répéter le plus legato possible. Voici comment faire : tenez la première des deux notes avec votre doigt, tout en relâchant complètement votre poignet et en allégeant votre poids. Alors,
SUPÉRIEUR
coupez à la dernière seconde, mais sans sécheresse. Écoutez-vous et sentez votre main. MES. 28-32
en hauteur par rapport aux touches blanches et ce n’est pas facile de descendre sur une note qui est déjà en hauteur ! Sentez combien le relief du clavier nous gène pour exécuter la pulsation.
Dans ce passage, apprenez par l’oreille les sons qui tombent sur les notes des temps. Pour faire entendre le balancement, exécutez une minuscule « vague » par le poignet en descendant un peu sur chaque pulsation. La difficulté est que ces « notes des temps » tombent souvent sur une touche noire du clavier. Or, une touche noire se trouve
1. Meetings with the Professor Jasiñski: Chopin. Master-class à l’Académie de musique de Katowice. DVD Dux, 2009. 2. Wilhem von Lenz, Die Grossen Pianoforte virtuosen… Liszt, Chopin, Tausig. Neue Berliner Muzikzeitung, Berlin, 1868. 3. George Sand, Impressions et Souvenirs. Librairie Michel Levy Frères, 1878, p. 86. Réédité par les éditions Petites Capitales. 4. Jan Kleczyñski, Chopin - De l’interprétation de ses œuvres. Éditions Mackar, 1880.
SUR LE CD PLAGE 4
Frédéric Chopin
(1810-1849) Mazurka op. 63 n° 3 en ut dièse mineur
MES. 1-9 Chaque petit phrasé de Chopin, chaque arc de cercle au-dessus des notes doivent s’exprimer par un geste du poignet. Nous ne cessons de rappeler à travers ces lignes la phrase de Chopin qui est si importante : « Le poignet [est] la respiration dans voix. » Mettons-la en pratique. Comme chacun sait, le pianisme de Chopin s’inspirait du bel canto et de l’art des grandes chanteuses de son époque, telles La Pasta ou La Malibran dans les œuvres de Bellini. Or, le poignet est pour Chopin l’outil par excellence qui permet de « déclamer » la musique, de la respirer et de la ponctuer, comme le faisaient ces grandes cantatrices avec leur voix. Dans cette Mazurka, commencez donc par examiner les arcs des phrasés et les appuis. Pour bien exécuter chaque arc, « tombez » un peu dans la première note. Cela implique en toute logique que, sur les notes qui précèdent, 48 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
vous devez vous trouver allégé, poids soulevé et poignet en l’air. Ces gestes sont une sorte de chorégraphie des mains dans le morceau, une danse agréable à regarder, mais qui correspond surtout à la musique et aux justes appuis. Examinons encore le phrasé de Chopin. La note syncopée à laquelle est confié ce discret appui au début de l’arc, est le do # (mes. 1) puis le ré # (mes. 3). Or, elle ne se trouve pas sur le premier temps, mais sur le deuxième. C’est ce qui fait la spécificité de cette danse, à savoir le déplacement de l’accent tonique sur un temps faible : ici le deuxième. Exécutez cet appui en tombant sur cette note grâce à la liberté du poignet et en le préparant à l’avance, par le geste. Temps forts-temps faibles. Continuons la phrase. Il faut distinguer les temps forts et faibles, même si Mozart et Chopin contournent souvent ce bercement monotone en plaçant une termi-
naison de phrase – qui doit donc être diminuée – sur le temps fort. En voici un bon exemple. Dans la deuxième partie de la phrase (mes. 2 et 4), le 1er et le 2e temps doivent se trouver allégés car ils portent la terminaison de la phrase. Pour exécuter cela correctement, ôtez progressivement votre poids dans la touche et débloquez votre poignet. Votre main va alors remonter toute seule. Attention : ne pensez surtout pas qu’il s’agit un geste « actif » du poignet ! Le mouvement visible du poignet n’est qu’une conséquence. Les causes sont votre vouloir musical, votre poignet qui se libère et le poids de la main qui s’allège.
Gestes antinomiques entre la main gauche et la main droite. Mais voici encore une subtilité. Le geste de la main droite et celui de la main gauche sont antinomiques. En effet, la gauche donne le battement de cœur à trois temps : une basse, suivie de deux accords. Il faut donc plutôt descendre sur le premier temps. Or à notre main droite, l’appui est sur le deuxième. Descendre la main ne se fait donc pas à la main droite au même endroit qu’à la main gauche. Entraînezvous à sentir ces mouvements différents aux deux mains. Votre mémoire physique commence à travailler. Elle fait coïncider le geste et la sensation avec le contenu musical.
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1-9
La pédale. Encore plus subtil ! Le mouvement de descendre la pédale avec le pied ne se fait pas en même temps que le geste du poignet à la main droite, lui qui permet de phraser le chant. Les mouvements du pied sont plutôt solidaires de l’appui sur le premier temps à la basse, donc de la main gauche. Étudiez bien tout cela. Et souvenez-vous : même si vous désirez jouer avec le juste phrasé, si votre geste est inadéquat, vous phraserez à l’envers ! Économie de gestes au sein de la phrase. S’il est donc essentiel de « tomber du poignet » dans une première note de phrase, puis de laisser remonter le poignet vers sa terminaison, à l’inverse, une fois que l’impulsion initiale a été donnée, il est dès lors nuisible de multiplier les gestes inutiles au sein d’une même phrase. Donnez l’impulsion à chaque phrase par un élan de geste, comme un coup d’archet, mais ensuite visez l’immobilité de la main. Ce calme et cette économie des gestes reflètent une sorte d’éthique musicale. Il faut supprimer tout ce qui est inutile à la beauté, tout ce qui est superflu, excessif. Telle était la règle de Chopin, qui avait ho rreur de la
vulgarité et cherchait la simplicité comme le « dernier sceau de l’art ». MES. 33-36
Ce passage central sotto voce, en majeur est d’un caractère plus doux et feutré que le thème principal. Il est écrit en ré bémol majeur , alors que le thème principal était en ut # mineur . Il s’agit des mêmes sons, écrits différemment par le phénomène de l’enharmonie. La couleur change, de même que le mode qui devient majeur, plus lumineux par opposition au mineur qui précède. Portez le plus grand soin à tenir les notes prolongées, telle qu’elles sont voulues par Chopin. Ici encore, nous pouvons dégager quatre voix, comme dans un quatuor à cordes. Apprenez à les chanter, tour à tour et linéairement. Pour bien tenir les notes comme il faut, écoutez la musique sous l’angle des lignes, mais aussi des rencontres sonores verticales, les deux à la fois. Faites sonner les notes longues, en projetant le son loin devant vous. Leur son se meurt petit à petit de lui-même et pourtant il ne doit pas être étouffé par les notes jouées au-dessus ou [
À SAVOIR Chopin a écrit des mazurkas tout au long de sa vie. Wilhem von Lenz rapporte à ce propos : « Les mazurkas de Chopin sont le carnet de voyage de son âme à travers les territoires socio-politiques d’un monde de rêves sarmates. Là son exécution était chez elle. C’est là que résidait l’originalité de Chopin pianiste. Il représentait la Pologne, sa patrie telle qu’il la rêvait… Chopin a été l’unique pianiste politique. Il incarnait la Pologne, il mettait en musique la Pologne. » Nous étudions la Mazurka en la mineur op. 67 n° 4, qui date de 1846, dont il existe trois versions, et la Mazurka n° 63 n° 3 en ut mineur, que maints
commentateurs de Chopin ont rapproché de l’atmosphère d’un véritable Nocturne. Lire aussi notre dossier page 38. juillet- août 2015
PIANISTE n°93 49
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PÉDAGOGIE [ en dessous. En somme : écoutez les rencontres. C’est seulement si vous suivez la prolongation du son, sa retombée progressive sans la perdre d’oreille, que votre doigt pourra tenir la note et que votre main assimilera l’empreinte. Si votre oreille perd le son, votre doigt lâchera inéluctablement la touche. Pourquoi la tiendrait-il ?
33-36
MES. 65-72
Thème en canon. Cette partie présente le thème en canon à la main droite. Elle est difficile à cause du vaste espace que nous avons à parcourir pour arpéger la main droite. À propos de ce passage précis de cette Mazurka, voici ce que dit Charles Rosen dans son ouvrage La Génération romantique : «En notant des arpèges à la main droite aux mesures 67, 69 et 71, Chopin indique que c’est cette main qui doit jouer les deux voix (la plupart des éditeurs, cependant, cherchant à tourner la difficulté en suggérant un doigté plus facile qui utilise la main
65-72
50 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
gauche). Cette façon de jouir d’un effort physique pour rendre le plaisir d’une difficulté intellec- tuelle est révélatrice de l’aspect purement pia- nistique du contrepoint de Chopin.» 1 Voilà qui est original ! L’effort que nous demande l’exécution, très inconfortable de ce passage, est en soi un moyen d’expression artistique. Pour vaincre la difficulté, cherchez d’abord à imaginer la façon dont vous voulez que la musique sonne. Appuyez et lancez le son de la syncope sur le deuxième temps. Dosez les plans sonores en fai-
sant émerger le chant, notamment la première note, lorsqu’il démarre en canon. Enfin, diminuez la fin de la phrase en ô tant votre poids. Diminuer une phrase implique que l’on détende les doigts et donc que l’on relaxe la main, le bras, le corps, l’appui. Une grande partie des problèmes techniques trouvent leurs solutions dans la diminution des notes, dans leur allégement et donc dans la détente physique. 1. Charles Rosen La Génération romantique , Gallimard, 2002.
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SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE 5
Johann Sebastian Bach
(1685-1750) Fantaisie chromatique BWV 903
1-6
La Fantaisie chromatique BWV 903 préfigure ce que seront la liberté des formes à venir et l’usage du chromatisme, qui donneront naissance à l’œuvre de Wagner, par exemple. Il faut déclamer cette Fantaisie avec une certaine liberté de tempo et il est rare dans l’œuvre de Bach que nous puissions nous permettre cette licence. Cette œuvre présente une grande difficulté d’égalité pour les doigts, mais nous verrons ce que veut dire exactement ce mot. Quant à la partie centrale, elle requiert un grand art de la déclamation musicale. MES. 1-2
Gamme mélodique. Dans ce tout premier élément, Bach utilise une tournure typique de son langage. Il emploie deux formes de la gamme mineure : la gamme mineure mélodique ascen- dante 1 et la gamme mineure descendante 2. Il écrit ici un si bécarre et un do # en montant et, aussitôt, do bécarre et un si bémol en descendant.
À chaque fois que vous aurez un passage de doigts rapide – et avant même d’aborder le travail physique des doigts – demandez-vous quelle est la gamme que Bach utilise. La représentation auditive et mentale des notes que nous avons à jouer est essentielle.
L’agilité des doigts vient de la courbe sonore. Avoir des doigts qui vont vite, cela ne veut rien dire. Ce qui est important est de doser le poids sous chaque doigt, afin de faire entendre à l’auditeur une courbe sonore harmonieuse et parfaitement dosée pour chaque note de la phrase. C’est cela que l’on appelle la maîtrise technique d’une pièce comme celle-ci. Dans ce premier petit motif, répétez autant de fois que nécessaire la montée, afin de doser l’accroissement du son, en commençant par le ré le plus grave (joué par la main gauche) jusqu’au ré le plus aigu, joué par le 5e doigt de la main droite. Soupesez le poids que vous mettez dans chaque note, sous
chaque doigt. Imaginez comment vous voulez que sonne la courbe de phrase, puis tentez de réaliser ce que votre oreille a conçu. Le passage d’une main à l’autre ne doit absolument pas s’entendre. Portez une attention particulière à vos deux pouces. Les pouces, du fait de leur position spéciale dans la main (ils jouent sur le côté du doigt et non pas sur la pulpe, comme les autres doigts) ont souvent tendance à avoir trop de son (à générer des chocs) ou au contraire à créer des « trous » dans le son, des creux ou des bosses. Contrôlez le son de vos pouces, et vous ferez des progrès d’agilité. MES. 3-6
Élan sonore. De manière générale, lorsque la musique s’élance vers l’aigu, jouez un peu plus fort : « chauffez » le son. Au contraire, lorsque vous descendez vers le grave, diminuez en relâchant votre tension et le poids. Cela s’obtient par la relaxation du doigt au niveau du métacarpe. [ juillet- août 2015
PIANISTE n°93 51
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PÉDAGOGIE 7-12 Ne négligez pas pour autant les notes des parties internes de la musique, celles qui sont jouées par les pouces. Écoutez séparément vos parties d’alto et de ténor. Sentez chaque touche sous le doigt. Si un défaut apparaît dans l’écoute des parties internes, le contrôle du toucher nous échappe. MES. 7-12
Diminuez vers le registre grave. Jouez ce passage en pensant à un vaste diminuendo progressif jusqu’au point le plus piano , sur le sol de basse, mes. 12. Lorsque l’on descend vers le registre grave du clavier, il faut plutôt diminuer. En effet, l’oreille devient moins sélective vers les graves et se trouve plus vite saturée que dans les aigus. Identifiez le point le plus grave de cette descente et amenez-le en diminuant progressivement. Toute interprétation demande à être construite. L’interprète doit savoir à l’avance les nuances qu’il désire, d’où il vient et où il se dirige. L’intensité du son ne doit jamais être abandonnée au hasard.
Une main ramassée. Pour obtenir des doigts agiles, souples et rapides, veillez tout du long de cette Fantaisie à ne jamais « coller » les notes jouées par les doigts externes de la main, à savoir les notes les plus graves et les plus aiguës de la musique. En effet, une main écartée se fatigue vite. Pour jouer vite, ramassez votre main. Donc, ôtez rapidement les notes extrêmes. Pensez un point de détaché sur chaque 2e double croche du groupe de deux à la main droite ( fa, sol, la, si…).
[
17-20
52 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
MES. 17-20
Demandez à vos doigts! Si vous désirez développer l’habileté de vos doigts pour jouer des passages très rapides comme celui-ci, réfléchissez toujours à la manière dont vous voulez les nuancer. C’est en « demandant » des choses précises à vos doigts, notamment en imaginant le dessin de la courbe sonore avec ses méandres, ses montagnes et ses vallées, que votre cerveau pourra leur envoyer l’impulsion nerveuse nécessaire. Souvenez-vous qu’il n’y a pas d’agilité de doigts sans amour de la courbe musicale ! Comment nuancer ici ? Chaque petit phrasé redémarre sur la 2e double croche. Groupez par trois notes montantes : (« ré-mi-fa », puis «si bécarre-do-ré » puis ; 6 notes depuis le sol# ! C’est le changement du nombre de notes dans chaque phrase qui est déroutant… Puis diminuez ces petites vagues en allant jusqu’à la note la plus grave, le la de la mesure 18. Pour diminuer, il faut alléger le poids et relaxer les doigts. Seule une véritable relaxation des doigts, dénuée de toute entrave musculaire et de crispation inutile, leur permet d’être agiles et rapides.
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21-22
Conclusion : en diminuant vers le grave, vous récupérez de la souplesse et vous rendez possible l’agilité de vos doigts.
Détachez rapidement les notes les plus aiguës! Ici encore, évitez de coller les notes extrêmes. Détachez aussi vite que possible le si (5e doigt) puis le fa (3e doigt), le ré, etc. (mes. 17). Ôtez ces notes sans tarder. Si vous les gardez trop longtemps, votre main demeure écartée et cela risque de vous crisper. MES. 21-22
Gammes très rapides en triples croches. Pour exécuter ce feu d’artifice sonore : 1. Commencez piano. Dans le cas contraire, étant
donné que vous devrez augmenter, vous risquez d’aboutir à la crispation. Économisez votre énergie ! 2. Faites entendre les notes les plus aiguës comme des éclats de lumière. Atténuez les notes en dessous, ne jouez plus fort ni avant elles ni après elles. 3. Dessinez ces ondulations sonores, mais diminuez l’ensemble en descendant vers le registre grave. Cherchez à faire entendre deux sortes de nuances. Des petites (des « vaguelettes sonores ») et un grand mouvement d’ensemble qui diminue. 4. Ne « collez pas » les notes aiguës. Ôtez le doigt rapidement et laissez votre main se ramasser.
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE 6
Johann Sebastian Bach (1685-1750 Fugue BWV 903
Le grand pianiste Wilhem Kempff avait une
2. Ensuite il faut jouer les parties ensemble. Une
manie, dit-on : lorsqu’un élève devait lui jouer une fugue, et avant même que celui-ci n’entonne la première note, il lui demandait combien cette fugue comprenait d’expositions du Sujet, et dans quels tons. On dit que si le malheureux ne savait pas répondre, il n’était même pas autorisé à jouer et se trouvait renvoyé à ses pénates. Il ne fait aucun doute que la maîtrise mentale, auditive et intellectuelle d’une fugue doit être préalable à l’exécution, plus que pour toute autre musique peut être. Nous avons tenté de vous aider en vous proposant l’analyse de cette fugue dans le cahier de partitions. Reportez-vous à nos explications. Voici par ailleurs les grandes lignes de travail : 1. Apprenez d’abord à chanter avec votre voix : le Sujet, le Contre-Sujet, les Divertissements, etc. Ce chant « à la table », bout par bout et avant tout contact des doigts avec l’instrument, est essentiel. Il vous indiquera comment le nuancer, comment en élaborer la courbe sonore. Cela, c’est l’aspect horizontal du jeu.
chose vous aidera à vous concentrer : écoutez non seulement l’ensemble parfait des deux mains, mais aussi la synchronisation absolue de toutes les notes jouées ensemble par une même main . Cela est une aide puissante pour parvenir à tout entendre en même temps. Il faut s’arrêter sur chaque accord afin de sentir cette minuscule attaque verticale des notes, qui assure leur synchronisation parfaite. 3. Efforcez-vous de doser les plans sonores, comme autant de couches géologiques superposées les unes aux autres. Chaque strate de musique doit avoir une intensité sonore différente de celle qui se trouve au-dessus ou au-dessous. MES. 1-8
Oreille musicale et tonalité. Une chose est essentielle pour apprendre cette fugue : le Sujet est très long, il s’étire sur huit mesures. Apprenez à ressentir la tonalité à long terme. Sentez vers quelle note elle se dirige, sur quel son elle va aboutir, [ s’apaiser et trouver sa conclusion.
RÉCITATIF. Il est malaisé de décrire par des
mots comment interpréter ce récitatif de la Fan- taisie . Chantez en vous-même chaque phrase, puis avec vos doigts. Cherchez à faire sentir à l’auditeur le pouvoir de chaque dissonance, la force des frottements et des tensions entre les notes, qui sont comme autant d’expression d’une tension ou d’une douleur. Écoutez les grands interprètes comme Alfred Brendel, Edwin Fischer ou, plus récemment, Claire-Marie Le Guay. Ensuite, trouvez votre propre chemin, tout en respectant le texte de Bach.
À SAVOIR La Fantaisie Chromatique de Bach tient une place toute particulière dans l’œuvre du compositeur, sans doute du fait de la forme très libre de la fantaisie. Elle revêt en outre un caractère virtuose et brillant, à travers lequel les pianistes peuvent exprimer leur habileté et briller par leurs doigts. Comme le rapporte le grand musicologue et connaisseur de Bach, Gilles Cantagrel dans son ouvrage Le Moulin et la Rivière (Fayard) , elle est l’une des pages les plus audacieuses du Cantor, au point que parfois certains l’attribuèrent à l’un de ses f ils, Wilhem Friedemann Bach. En tout état de cause, c’est à ce dernier que fut conf ié le manuscrit de son père. Le f ils le conserva et, plus tard, en f it don au premier biographe de Bach, Forkel. Ce dernier écrivit à propos de l’œuvre : « Cette Fantaisie est unique dans son espèce et je n’ai jamais eu sa pareille. » (Vie de Johann Sebastian Bach, Flammarion). juillet- août 2015
PIANISTE n°93 53
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PÉDAGOGIE Que constatez-vous ? Les deux poignets n’exécutent pas du tout les mêmes mouvements, la même «danse» sur le clavier, car les appuis ne se trouvent pas au même endroit. Si vous jouez le Sujet à la main gauche en effectuant les mêmes gestes qu’à la main droite, vous obtiendrez un résultat d’ensemble désastreux. En effet, vos voix ne seront pas indépendantes et l’auditeur entendra un magma sonore informe, au lieu d’une polyphonie produite par deux bons musiciens qui jouent chacun leur partie avec talent. Or, vous ne devez pas être un seul musicien en jouant Bach, mais plusieurs musiciens à la fois !
1-16
MES. 17-28
Trois voix. Ici, mesure 19, Bach
[ Bach expose plusieurs fois son Sujet au t on principalpuis à celui de la quinte, selon le schéma d’une fugue traditionnelle. Or, si à chaque fois ce Sujet aboutit dans un ton bien déterminé d’avance, le « voyage » pour y parvenir n’est pas toujours le même. Il n’est pas habillé à chaque fois par les mêmes harmonies et fait bien des détours. Notre oreille musicale en est déstabilisée et risque de perdre sa boussole tonale. C’est là l’une des raisons pour lesquelles cette fugue est si difficile à apprendre. Elle comporte d’abord et surtout une difficulté d’oreille musicale. Chantez votre Sujet jusqu’au bout (d’abord sans son Contre-Sujet). Sentez sur quelle note il va aboutir et gardez ce son en mémoire. Tout ce qui précède ne doit en aucun cas être « assis », ni musicalement ni physiquement. L’oreille musicale a une immense importance pour le toucher au piano, car le chemin harmonique conditionne le toucher et le poids dans les touches.
MES. 8-16
Réponse et accompagnement par le ContreSujet: les bons gestes. Le Sujet est maintenant exposé au ton de la quinte et présenté à une autre voix, comme cela est traditionnel dans une exposition de fugue. Il se dirige désormais vers la note 54 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
la, où il aboutit enfin, mes. 16. Chantez et sentez ce parcours. Pensez-le. Remarquez que cette nouvelle présentation possède une note en plus, un ré (alors qu’elle devrait commencer sur le mi ). Ce nouveau Sujet est désormais accompagné d’une voix en contrepoint, le Contre-Sujet. Celuici commence mesure 8 et il comprend une nouvelle petite cellule rythmique, très caractéristique et dansante : deux doubles croches, suivies d’une croche (ré, mi, fa… fa, sol, la… la, si bécarre, do) . Remarquez que, dans ce Contre-Sujet (comme la plupart du temps chez Bach), le motif ne commence pas sur la pulsation, mais tout de suite après elle, sur la deuxième valeur. Ce phrasé détermine le geste que vous devez employer et la sensation que vous devez ressentir dans votre main et dans votre poignet. « Tombez» un peu dans la première double croche et ensuite, sur la fin, allégez la terminaison sur la croche en laissant remonter votre main, poignet complètement libéré. Ce geste doit être très petit, à peine visible. Coupez une fraction de seconde avant de jouer la note répétée, c’est-à-dire entre les deux ré, entre les deux fa, les deux la, etc. Automatisez cette sensation dans votre main et cette image sonore dans votre oreille. Ensemble: gestes différents. Maintenant, jouez ensemble le Sujet et son Contre-Sujet.
expose pour la troisième fois son Sujet et de nouveau au ton principal de ré mineur , cette fois à la voix la plus grave (la-si, si-do, do-si-do, etc.) Un autre petit dessin l’accompagne à la voix du haut et une note très longue qui se trouve tenue à la voix du milieu. Écoutez maintenant votre musique en considérant la superposition des sons, comme par un « arrêt sur image » de votre lecteur de DVD, ainsi que nous l’indiquions en introduction. Prenez deux mesures, par exemple les mesures 19 et 20. 1. Faites émerger le Sujet de la masse sonore, en jouant un peu plus fort (en lui appliquant plus de poids de la main). 2. « Dessinez » la courbe sonore du Contre-Sujet, qui monte et qui descend (cela demande indépendance d’écoute et de sensations). 3. Jouez fort le fa tenu, à la partie d’alto (exécuté par le pouce de la main gauche) afin que l’auditeur puisse le suivre à l’oreille. MES. 36-38
Les divertissements. Entre les « expositions » du Sujet, Bach écrit des Divertissements, c’est-à-dire des passages qui ont une moindre importance relativement à la structure d’ensemble de l’œuvre. Ne les jouez pas aussi sonor es que les diverses présentations du Sujet. En effet, si vous jouez plus piano les Divertissements, il vous sera beaucoup plus facile de faire émerger les diverses apparitions du Sujet. Si au contraire vous les jouez trop fort, l’oreille de l’auditeur et vos doigts seront « saturés » et nous ne comprendrons rien à la géniale organisation de Bach.
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17-28
36-38
Dans ce passage, soignez la conduite indépendante des trois voix. Jouez assez fort les notes longues afin que leur sonorité qui diminue d’ellemême ne soit pas dévorée par les autres notes. Projetez le son du fa au soprano et, dans une moindre mesure, le la noire pointée à la partie centrale (2e temps mes. 36). Atténuez les doubles croches afin de ne pas étouffer le sillage de vos « étoiles filantes sonores ». Enfin mesure 37, coupez avec une grande préci-
sion vos silences, à la demi-seconde près. Pensez à Glenn Gould, qui, dans son jeu si parfait techniquement, levait le bras très haut et coupait le son comme si cela était une question de vie ou de mort. Détachez les croches de la basse, car ainsi elles sonneront moins fort et ne risqueront pas d’étouffer le reste. Tout ce travail procède évidemment d’un dosage savant, qui implique une profonde réflexion. Jouer une fugue de Bach est sans doute l’une des
choses les plus complexes que nous ayons à réaliser dans l’art du piano, à la fois pour la mémoire et pour le dosage des sons, c’est-à-dire pour la technique. Cela représente un grand effort, mais seul cet effort nous permet d’accéder à la beauté de cette musique. 1. Gamme mineure mélodique ascendante: avec le VIe degré Majeur et une note sensible. 2. Gamme mineure mélodique descendante: sans la note sensible, mais avec le VIe degré Mineur.
juillet- août 2015
PIANISTE n°93 55
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PÉDAGOGIE
JAZZ T L U A R A G C I R E
N
ous allons travailler en deux parties la célèbre composition Blue Bossa, que l’on doit à Kenny Dorham. La première consiste à étudier l’accompagnement au piano, avec des accords de jazz à trois et quatre sons et une basse qui suivent la grille, le tout sur un rythme typique de bossa-nova. La figure rythmique constante proposée ici est basique. Elle permet des variations nombreuses une fois celle-ci bien maîtrisée. Pour ce faire, il faut la jouer en boucle un certain nombre de fois. Il faut porter l’attention sur le calme, la quiétude et le fait de jouer bien au fond du temps. Au métronome bien sûr ! Nous aborderons, dans la seconde partie, le rapport polyrythmique entre le thème et la basse, ce qui permettra d’ouvrir l’oreille sur l’improvisation. Je vous recommande toutefois de commencer dès maintenant par jouer « à l’oreille » le thème de Blue Bossa, unisson aux deux mains plusieurs fois avant d’aborder la grille et l’accompagnement, ce qui en rendra plus aisée la mémorisation. 56 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
LA LEÇON D’ANTOINE HERVÉ BLUE BOSSA : L’ACCOMPAGNEMENT AU PIANO (1re partie)
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PIANOS À LA LOUPE
Acoustiques
Petits quarts-de-queue pour amateurs exigeants
par Bernard Désormières
HOFFMANN TRADITION WH 161 T
L
es pianos W. Hoffmann sont fabriqués en République tchèque, dans l’usine moderne de Bechstein Europe, à Hradec-Králové. Trois séries qualitatives de pianos droits ou à queue sont proposées : Vision, Tradition et la toute récente série Professionnal. La série intermédiaire, Tradition, positionnée en milieu de gamme dans le groupe C. Bechstein, pour ses prix attractifs, comprend deux dimensions de pianos droits (122 et 128 cm) et trois dimensions de pianos à queue (161, 177 et 186 186 cm). Voici le petit quart-de-queue Hoffmann Tradition WH 161 T.
Descriptif
De forme très classique, ce piano donne immédiatement la sensation visuelle d’un instrument i nstrument bien fini. fi ni. La mention « Made by Bechstein Europe » , à la droite du cylindre est assez sécurisante, tout comme l’omnipré-
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sence de feutres de couleur verte, spécifique à Bechstein. La béquille du couvercle comporte deux positions. Économie oblige, le meuble est de formes sobres, le couvercle et l’abattant ne comportant pas de chanfrein décoratif sur leur pourtour. Le large pupitre permet trois positions d’inclinaison presque verticales plus l’à-plat et ses deux tablettes latérales ont une jolie découpe arrondie. Ce piano comporte une serrure et un ralentisseur de cylindre. Les trois roulettes sont larges et permettent un déplacement aisé de l’instrument. Comme pour les autres modèles de la gamme Tradition, les poutres du barrage, sous le piano, sont en résineux de dureté intermédiaire. La table d’harmonie est en épicéa massif, issu des Alpes (arbres ayant poussé vers 1 000 mètres d’altitude, ce qui permet une densité correcte des fibres du bois). Les chevalets sont en hêtre, le cadre métallique, d’un bel aspect moulé au sable de haute densité. Les agrafes sont utilisées pour les cordes graves et médium, et une double échelle Duplex permet le développement d’harmoniques dans l’aigu. Les cordes acier sont allemandes, comme les têtes de marteaux Abel, à sous-garniture verte, harmonisées à la main. L’ensemble clavier-mécanique est réalisé par différents sous-traitants sévèrement sélectionnés, selon les normes exigeantes C. Bechstein. La barre de centre de la mécanique est en multiplis de bois et non en alliage léger. Le sommier
Détail du bloc de clavier. D . .
D . B
.
B
des chevilles est en multiplis de hêtre, solution classique efficace.
Toucher et rendu sonore
L’excellente ergonomie, combinée à un ensemble clavier-mécanique très réussi, offre un excellent confort de jeu. La puissance et la clarté sonore sont au rendez-vous pour ce petit piano à queue conçu pour être un instrument à prix doux. Si la couleur sonore manque de richesse en timbre et de rondeur, la réactivité et la précision de la mécanique permettent à un pianiste averti et un peu obstiné d’en tirer finalement des sonorités plaisantes. Le bon équilibre de cet instrument facilite l’homogénéité du jeu. Les basses extrêmes sont crédibles dans leur définition, mais manquent un peu de longueur de son. Le fonctionnement des pédales est irréprochable.
Conclusion
Pour un prix très raisonnable, le petit WH 161 T, bien conçu, bien fini et solide, séduira les pianistes de tous niveaux pour leur travail quotidien. Adapté aux répertoires assez brillants, il sera plus difficile à utiliser dans des répertoiress intimistes ou en musique répertoire de chambre, sauf s’il est harmonisé en profondeur dans l’espoir de lui donner plus de rondeur. La caution de la grande firme C. Bechstein pour cet instrument européen produit en République tchèque garantit le sérieux de sa facture. Plus tard, les pia-
Clavier, Clavie r, confort confort de jeu : bonne ergonomie ensemble claviermécanique très réussi Réponse en en pp : très bonne Puissance : très correcte pour un petit quart-de-queue Amplitude dynamique : conséquente Couleur sonore : brilla nt, r ichesse en timbres moyenne, mais bon équilibre entre les registres Aigus : clairs et t rès ouverts Médiums: assez chantants, mais manquant de richesse en timbre et de rondeur Graves: assurent une assise harmonique correcte. Plutôt cuivrés, les extrêmes graves manquent un peu de lisibilité Pédales : 3 (forte, douce, sostenuto), sans problème de fonctionnement Dimensions: 161 cm (P) x 151 cm (L) Poids: 29 2922 kg Spécificités : conception C. Bechstein, production tchèque Ébéni béniste sterie rie : noir, blanc, noyer ou aca jou brillant Pronostic de durabilité: bon Usage Us age : pianistes de tous niveaux, instrument de t ravail, écoles de musique Instrument brilla nt, peu adapté aux répertoires intimistes Origine: République tchèque, conception allemande par C. Bechstei n
Prix : 22590euros. Supplément : 5 190 euros avec option silencieux Vario m po ur ocla v ie I m po r r té té pa r r Saico E ur ocla v ie r rs. s . m e m e n u Ce nt n. Re m e r r cie cie m en ts ts a u Ce n t r r e Chopi n
nistes plus exigeants pourront se tourner vers des modèles de plus grande taille, dans les marques Bechstein ou la prestigieuse C. Bechstein, mais avec un budget très supérieur.
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Descriptif
BOSTON GP 156 PE
C
e quart-de-queue quart-de-queue «Designed by Steinway & Sons» est le plus petit piano à queue de la gamme Boston, créée en 1992 . L Laa série actuelle PE (Performance Edition) a bénéf icié en 2010 de nombreuses améliorations de facture par rapport aux modèles initiaux. Cinq pianos dimensionnels sont au catalogue Boston: les quarts-de-queue de 156 156 cm, 163 163 cm (Maes (Maestro tro,, Pia92),, 178 178 cm, 193 193cm cm (Maes (Maes-niste n° 92) tro, Pianiste n° 85) et et le dem demi-queue de 215 cm (Maestro, (Maestro, Pianiste n° 86 86)). Les pianos Boston se pos itionnent entre ceux de la marque Essex (entrée de gamme) et les prestigieux Steinway & Sons. C’est la f irme Kawai au Japon qui le less fabrique en sous-traitance, selon les plans et spécif ications des facteurs de la maison Steinway et sous le contrôle des techniciens Steinway . Voici le Boston Boston GP 156 156 PE.
Les pianos à queue Boston ont une esthét ique et une conception de facture quas i identique, à l’exclusion de la profondeur et de quelques détails de f inition. Ainsi le modèle modèle de 156 156 cm ne comporte pas de serrure. L Les es meubles de tous les p ianos à queue Boston sont reconnaissables à leurs oreilles dont la découpe est à angle v if et à leur cadre métallique, coulé sous v ide, d’une couleur spécif ique dorée, légèrement orangée, qui comporte des ouïes, non pas circulaires, mais losangées. On apprécie le solide et large pupitre à 5 positions, dont une très à plat, les troois roulettes doubles, mais la béquillllee tr du couvercle ne permet que deux positions d’inclinaison. Le cylindre est pourvu d’un ralentisseur. L’arrière du piano est plus large que la plupart de celui des pianos à queue de même dimension, ce qui permet une surface max imale de la table d’harmonie, elle-même en épicéa massif de S itka et eff ilée sur ses contours selon un brevet Ste inway de 1936 ! Les semelles des chevalets sont en érable mass if, le chevalet lui-même étant en bo is dur lamellé collé, pour une longueur de son optimale. Les cordes sont montées avec des agrafes, sauf pour le haut médium et l’aigu. On retrouve les fameuses doubles échelles Duplex, chères à Steinway . Le sommier bre vetéé « Oct vet Octagr agr ip », co cons nstt itué de 11couches d’érable collées en cro i x x à 60°, reçoit les chev illes tourillonnées. La mécanique, dont les pièces mobiles sont entièrement en bois, comporte des barres de centre f i xes xes
BANC D’ESSAI
mode d’emploi
en prof ilé d’alliage léger. Les têtes de marteaux sont en forme de po ire, comme sur les vra is Steinway et les âmes de ces têtes sont en aca jou. Le revêtement des touches est en i vo voire et ébène synthétiques.
Toucher et rendu sonore
On sent sent la «patte « patte»» de Ste Steinway dans le dimensionnement des bras de le v iers de la mécan ique de ce piano, qui permet un toucher d ’une très grande précision. Les ornements et les répétitions les plus rap ides peu vent être réalisés ici sans peine. L’ergonomie est excellente et le contact avec le revêtement des touches du clav ier d’aspect satiné est agréable. Les pédales, à bonne hauteur et d ’une fermeté correcte, s’avèrent précises et silencieuses. La puissance sonore est toutefo is limitée, et la déf inition des notes les plus graves est assez méd iocre. Néanmoins, sur l’instrument testé dont l’harmonisation avait été très soignée, la couleur sonore d ’ensemble n ’est jama is cl c linquante, ma is plutôt ronde et dev ient légèrement cui vrée, vrée, une qual qualité réelle quand on joue avec des nuances ff . Les a igus, comme pour le modèle de 163 cm, sont clairs et aériens.
Conclusion
R D
Lieux des tests. Ils sont effectués dans les magasins, chez les fabricants, agents distributeurs ou importateurs. Dans certains cas, nous testons des pianos sans les dernières mises au point avant la livraison de l’instrument au client. Nous tenons compte de tous ces paramètres dans notre appréciation finale.
entretenons régulièrement avec les professionnels du piano (facteurs, techniciens, accordeurs, régleurs ou responsables de l’entretien) nous permettent d’avoir une idée assez précise de la qualité intrinsèque de l’instrument, et notamment de sa capacité à durer dans le temps. Rapport qualité-prix. Les pianos de très haut de gamme restent très chers, mais leur prix est tou jours justifié. Le niveau de qualité a énormément pro-
Clav ier confort de j de jeu eu : toucher plutôt léger, permettant un contrôle très précis. Excellente ergonomie Réponse en pp : pp : excellente Puiissance Pu ssance : : correcte pour un tout petit quart-de-queue Ampliitude dynami Ampl dynamique : correcte, permettant un bon contrôle de la polyphonie Couleur sonore: sonore : chaude et colorée du pp à m f f, pouvant cuivrer dans les ff. Longueur de son et définitio n limitées pour les extrêmes graves A igus : clairs et aériens, bien définis Médiums : assez chantants et modulables Graves : puissants pour un petit quart-de-queue, mais les les extrêmes graves manquent de défi nition Pédales : 3 (forte, douce, sostenuto), précises et silencieuses Dimens mensiions : 156 cm (P) x 151 cm (L) x 102 cm (H) Poiids : 311 kg Po Spéécificités : conception Steinway Sp & Sons, ralentisseur de cyli ndre Ébéénister Éb steriie : noir brillant verni, noir satiné Pronostiic de durabi Pronost durabilité : très bon Usage : amateurs exigeants, professionnels limités en place Oriigine : Japon (usine Kawai) Or
Prix : 23 130 euros
Ce p iano, bien conçu et fabr iqué, assez bien f ini, d’une esthétique un peu originale, sécurise son propriéta ire par sa parenté avec les vra is Steinway . Si les faiblesses des notes de l’extrême grave limitent vraiment ses possibilités musicales, la qual ité de son confort de jeu et la richesse de sa sonor ité dans le méd ium et l’ai gu en font un instrument
Durabilité de l’instrument. Les contacts que nous
d’expression, qui sat isfera les étudiants avancés et les profess ionnels ne d isposant que de peu de place . Un instrument destiné à des répertoires variés, à l’exclusion des pièces trop «orchestrales» .
m po nos nlet. I m po r r té té pa r r Pia n o s Ha n l et. m e m e n n os nlet. Re m e r rcie c ie m en ts t s à Pia Pia n os Ha n l et.
. D . B
gressé dans les instruments d’entrée de gamme, notamment d’origine chino ise ou indonés ienne . On peut acquérir de bons pianos à des prix parfois agréablement surprenants. Mé fions-nous des a priori négatifs tout en restant vigilant. Pianos numériques. Nous les testons avec les mêmes casques stéréo dynamiques, de type fermé. Les caractéristiques et descriptifs techniques des claviers sont ceux annoncés par les fabricants. Enfin, tous les prix sont donnés à titre indicatif.
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PIANISTE n°93 59
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PIANOS À LA LOUPE
PETROF P 159 BORA
L
es pianos tchèques Petrof existent depuis plus de cent cinquante ans. Cette f irme de haute tradition familiale est actuellement dirigée par Suzanna Petrova, appartenant à la c inquième génération de ces facteurs d ’instruments. La gamme des pianos à queue a été ent ièrement renouvelée depuis 2008. Cinq modèles de pianos droits et sept de pianos à queue (P159 Bora, P173 Breeze, P 194 Storm, P210 Pasat, P237 Monsoon, 275 Anton Petrof, P284 Mistral) sont au catalogue, proposés dans une grande var iété de f initions. Le plus pet it des pianos à queue Petrof, le quart-dequeue P159 Bora a remplacé le modèle PV de même profondeur .
monie maximale, est élégant et bien f ini. Le nom de Petrof apparaît sur l’intérieur du cyl indre et, comme une signature très simple, stylisée, sur le dessus de la table d ’harmonie, à la place des hab ituelles décalcomanies à l’ancienne. Le laquage du meuble est réal isé sur place par Petrof, dans des atel iers spécif iques. La béquille du couvercle est à deux pos itions, mais ce piano ne comporte ni serrure ni ralentisseur de cyl indre . Les tro is roulettes sont larges et d’aspect robuste. Un macaron métallique de style moderne précisant le nom Bora du modèle et la traditionnelle rosace A/P sont apposés sur le cadre métallique d’une belle peau et joliment verni en couleur dorée. On remarque sur un bloc de clav ier une pet ite pastille holographique . C ’est le cachet EEX Descriptif Ce petit quart-de-queue de style « European Excellence » témoignant classique et aux formes assez ramas- de l’origine européenne de l ’instrusées pour une surface de table d ’har- ment et de son haut n i veau de qua-
lité. Le montage en cordes fa it appel à des agrafes pour le grave et le médium. Des doubles échelles Duplex sont présentes dans l ’aigu pour une grande richesse harmonique. Aucune mauvaise angulation des cordes aux agrafes. Le sommier et en multiplis de type Del ignit. La table d’harmonie est entièrement réalisée dans les us ines Petrof, comme le clav ier. Rares sont les facteurs européens qui produisent euxmêmes ces deux sous-ensembles essentiels . La mécan ique tchèque baptisée Petrof Original est produite par Detoa Albrecht ice s .r.o. selon les spécif ications de Petrof . Les marteaux sont fourn is par l’Allemand Renner et préalablement harmonisés spécif iquement avant montage sur les mécaniques. Le f ilage de chacune des cordes graves est réal isé par Petrof, avec les me illeures qual ités de cu i vre . La technique de fabrication de la ceinture extérieure est spécif ique au modèle Bora. Les opérations d’assemblage, de réglage et de f inition sont quasi artisanales. Ce piano est largement stabilisé en usine, notamment par un passage sur une redoutable machine à jouer, après lequel tous les réglages sont repr is.
Toucher et rendu sonore
Le modèle présenté, testé au showroom de l’usine Petrof était très bien préparé . Nous avons pr is un réel plaisir musical à jouer cet instrument très chantant et fac ile à maîtriser même dans les ornementations les plus véloces. Le couple clav ier-mécanique est particulièrement réussi. Si la puissance globale est rédu ite, dimension oblige, elle reste très satisfaisante pour un pet it quart-dequeue. L ’harmonisat ion poussée permet ici une excellente homogénéité dans tous les reg istres, sans
discontinuité au croisement. La couleur sonore or iginale, assez typée Petrof, est part iculièrement chantante, notamment dans le bas et le haut médium. La polyphonie demeure aisée à contrôler . Les basses extrêmes restent crédibles et assez bien déf inies, ce qu i est rare dans cette dimension de pianos.
Conclusion
Ce beau, bon et solide petit quartde-queue devrait satisfaire les pianistes de tous n i veaux, par son excellent confort de jeu et surtout par sa musicalité remarquable. Il possède une couleur sonore typée, très « européenne » permettant une belle expressi v ité. Il conv iendra à des petits salons. Le sér ieux de sa fabr ication laisse espérer une grande durab ili té et un ma int i en de ses qualités musicales intrinsèques. Un très bon choi x pour un instrument européen ! Clav ier confort de jeu : excellent, bonne ergonomie Réponse en pp : excellent Puissance : limitée, mais très correcte pour un petit quart-dequeue Amplitude dynamique : bonne réactivité dans les nuances ff et pp aisés à contrôler Couleur sonore : très chantante et ronde, sans agressivité, belle longueur de son globale A igus : clairs et précis Médiums : très expressifs, belle richesse en timbre, très chantants Graves : très bons pour un tout petit quart-de-queue. Extrêmes graves assez bien définis Pédales : 3 (forte, una corda, sostenuto) bien placées, précises et silencieuses Dimensions : 159 cm (P) x 152,5 cm (L) x 102,5 cm (H) Poids : 295 kg Spécificités : clavier et table d’harmonie Petrof, cordes filées par Petrof Ébénisterie : noir brillant plus 10 autres finitions. Existe en version demi-Chippendale Pronostic de durabilité : trèsbon Usage : pianistes de tous niveaux, écoles de musique Origine : République tchèque
Prix : 26490euros . D . B
60 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
. D . B
. D . B
I m po r té pa r Les Maît r es d u Pia n o. Re m er cie m e nt s à Pet r of (H r adec- K r álo vé ) et a u x Maît r es d u Pia no .
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A N T O I N E H E RVÉ C O M P L È T E M E N T S T O N E S En trio avec : François Moutin - contrebasse / Philippe «Pipon» Garcia - batterie
Excellent accueil presse pour un album de haut vol !
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PIANOS À LA LOUPE
Numériques
Deux claviers de salon pour petits budgets
par Bernard Désormières
temps. 207 morceaux de démonstration sont intégrés à la mémoire interne. L’alimentation électrique nécessite hélas l’utilisation d’un adaptateur AC/DC, source de fragilité.
Toucher et rendu sonore
ROLAND HP 504
très inférieure à celle des deux modèles plus haut de gamme dans la même série HP. Deux haut-parleurs de diaa série « Classique » de cla- mètre 12 cm assurent la diffusion so viers numériques de salon HP nore. Néanmoins, le HP 504 bénéficie, (Home Piano) de Roland comme ses grands frères, d’une grande comprend quatre modèles : HP504, banque de 250 sons ainsi que de la HP 506 et HP 508. Ils sont apparus nouvelle technologie Roland de géen 2014 et ont apporté de nom- nération sonore SuperNatural Piano, breuses améliorations par rapport très aboutie. Roland soigne les effets aux précédents claviers. Voici le sonores, comme la nouvelle fonction Dynamic Harmonic, qui modifie et HP 504, le plus abordable. enrichit le timbre lorsque l’on joue plus Descriptif fort. De même, pour l’écoute au La forme du meuble comportant deux casque, le Headphone 3D Ambience consoles est classique, présentée dans est censé offrir un certain effet d’espace. seulement deux finitions, noir et bois La réponse en dynamique comporte de rose. Les commandes, très convi- 5 niveaux plus un fixe. Le mécanisme viales, sont réparties latéralement sur des pédales a été amélioré, la pédale presque toute la largeur du clavier, avec forte, à détection continue pour des un petit afficheur central de 8 carac- effets de demi-pédale, offrant une létères. Un couvre-clavier coulissant as- gère résistance à la première pression. sure la protection des touches quand La connectique ne comporte pas de l’instrument n’est pas utilisé. Ce mo- prise Midi, mais la présence de prises dèle doté, comme le HP 506 du nou- USB et d’entrée et sortie ligne est ap veau clavier PH4 Premium, avec sen- préciée. Il est possible de lire une clé sation d’échappement (PH4 Concert USB dont le contenu peut être diffusé pour les HP 508), dispose d’une am- par les haut-parleurs de l’instrument, plification de seulement de 2 x 12 W, le pianiste pouvant jouer en même
L
62 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
L’ergonomie est satisfaisante, mais le pupitre manque de hauteur pour les partitions souples. L’afficheur, heureusement présent, est trop petit pour naviguer aisément dans les très nombreux et subtils réglages de l’instrument. Le clavier PH4 Premium se révèle effectivement plus silencieux que le précédent. La perception du bruit, perçue de l’extérieur lorsque l’on jouait au casque, était vraiment très gênante auparavant. D’une fermeté acceptable, ce clavier permet une très bonne répétition. Le réglage de la réponse en dynamique, de 5 ni veaux seulement, ne permet pas autant de possibilités que les 100 niveaux offerts sur le HP 508. Le revêtement des touches Ivory Feel est agréable. Le rendu au casque est excellent, mais le système d’amplification et de diffusion sonore trouve trop vite ses limites en puissance et définition. Les modèles HP 506 et surtout HP 508 apporteront un rendu sonore, en mode amplifié, plus crédible.
Conclusion
Cet assez élégant clavier de salon, en réel progrès par rapport au précédent HP 503, nous fait entrer, à coût limité, dans le monde et l’univers sonore subtil
et avancé de Roland, surtout en écoute avec un très bon casque. Il nous semble un bon choix pour les claviéristes et les apprentis pianistes à budget réduit qui recherchent un clavier au goût du jour, très complet, d’un toucher crédible, enrichi de nombreuses sonorités et permettant des enregistrements aisés. Son amplification limitée sera néanmoins insuffisante pour un cla vier de salon. Clavier-mécanique: PH4 Premium avec échappement, Ivory Feel Pédales : forte et douce (à détection continue), sostenuto Générateur sonore: SuperNatural Piano Polyphonie : 128 notes Sensibilité au toucher : 5 types+ fixe Amplification: 2 x 12 W, 2 HP 12 cm Sons internes : 14 pianos à queue, 5 droits, 10 électriques plus 321 sons dont 8 drums sets Démo : 207 morceaux internes Modes clavier : Normal, Dual, Split, Twin Effets et fonctions : Dynamic Harmonic, Headphone 3D Piano A mbience et une grande partie des possibilités de SuperNatural Piano (Piano Designer pour les sons de pianos, Reverbs, Chorus…) et Individual Note Voicing Afficheur : Led 16 x 4 segments, 8 caractères, rétroéclairé Enregistrement: en interne Standard Midi Files, 30 000 notes, mémoire interne maxi 99 morceaux. En externe sans limite en A udio par clé USB Métronome : oui Connectique: casque, Line In, Line Out, USB type A et B , Alimentation : avec adaptateur AC/DC Spécificités : applications téléchargeables Air Performer et Piano Partner sur les terminaux iOS d’Apple Finitions : noir (CB), bois de rose (RW) Dimensions: 138,7 cm (L) x 42,9 cm (P) x 86 cm (H); 104 cm (H) pupitre relevé Poids : 51,5 kg
Prix : 1 855 euros . D . B
I m po r té pa r Rola nd E ur ope. Re m er cie m e nt s à Pa u l Be us che r.
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YAMAHA CLP 535
L
a série CLP-500 de clav iers numériques de salon de Yamaha a été créée au pr intemps 2014 et a remplacé la sér ie CLP-400. Elle co comp mpre rend nd 5 mo mo-dèles en forme de piano droit, de 1400 à 4180 euro euros, s, Rap Rappelo pelons ns le CLP-525 (testé dans Pianiste n°90), les CLP-535, CLP-545 (Maestro dans Pianiste n° 88) 88),, le CLP 575 575 et le CLP 585 (Maestro dans Pianiste n°89) et un clav ier en forme de mini-crapaud, le CLP-565GP (env . 4 200euros) dont les caractéristiques techniques sont identiques, sauf l’amplif ication, à celles du du CLP-535 que nous présentons.
touches du clav ier sont protégées par un couvre-clav ier coulissant encastrable. Un boîtier de commande très fonctionnel (20 boutons) et et un confortable aff icheur sont placés sur le bloc gauche du clav ier. Yamaha a part icul ièrement soigné les sons échantillonnés note par note, en inDescriptif cluant, en plus du son du grand p iano Ce clav ier numérique à consoles de à queue CFX de la marque, celu i du 58kg est d’une esthétique sobre. L Les es Bösendorfer Impérial ! La polyphonie très confortable (256 notes) combinée à un accroissement signif icatif de la mémoire d ’échantillonnage, permet une restitution sonore plus crédible. Par ailleurs, le nombre de sons internes a été accru, ma is reste limité à 34 t imbres. Pour permettre un meilleur contrôle du toucher, des mécaniques de différents types sont montées sur chacun des modèles de la série CLP-500. Sur le CLP-535, c’est une mécanique intermédiaire, GH3X, à toucher lourd, avec des touches revêtues d’i vo voire de synthèse qui a été retenue . Un échappement augmente le taux de répét ition des notes. L’amplif ication raisonnable (2 x 30 30 W) actionne deux haut-parleurs de 16 16 cm de diamètre (des solutions plus pu issantes et soph istiquées sont proposées pour les modèles supér ieurs de la même gamme CLP-500). Les jeunes élèves appréc ieront les 300 exer exerccices intégrés et auss i le séquenceur 16 p istes pour enreg istrer presque sans l imites . Grâce aux connexions USB, il est possible d’enregistrer directement en format Audio. La connect ique du clav ier est assez complète et intègre aussi le
Midi (In, Out, Thru). De très nombreux effets, comme les réverbs, la brillance, les chorus, sont facilement access ibles, et la fonct ion IAC (Intelligent Acoustic Control) égalise les différentes tessitures dans un jeu pianissimo, un peu comme un Loudness sur les amplis hi-f i.i. Les fonctions usuelles sont toutes présentes (métronome, accord f in, type de gammes, etc.)
Toucher et rendu sonore
La position du pianiste est confortable. Les pédales se contrôlent bien et sont d’une bonne fermeté, ma is leur léger jeu latéral laisse une sensation désagréable de frag ilité sous les pieds. Le pupitre manque un peu de hauteur pour un bon ma intien des partitions souples. Le clav ier est assez léger, avec un revêtement de touches agréable . Les réglages de réponse en dynam ique permettent, en position « Hard», de se rapprocher rapprocher un peu de ce que l ’on ressent sur un vrai piano acoustique. Les répétitions sont très trèsaaisées et les ornements véloces faciles à réaliser. Si l’écoute avec un casque de qualité est très crédible et permet d’apprécier pleinement les différents effets intégrés et également de comparer les sons de deux p ianos de concert échant illonnés, l’écoute directe avec l’amplif ication intégrée, pourtant de 2x30 W, reste un peu frustrante, comme sur la plupart des clav iers numériques.
Clav ier Mé Mécan caniique : GH3X (Graded Hammer 3X), touches en ivoire synthétique, échappement Pédales : 3 (forte avec effet demipédale, soft, sostenuto) Générateur sonore : sonore : échantillonnage note par note Polyphoniie : 256 notes Polyphon Sensiibilité au toucher : 5 niveaux Sens + fixe Ampliificat Ampl catiion : 2 x 30 30 W, 2 HP 16 cm Sons internes nternes : : 34, dont le CFX et le Böse ndorfer Impérial Démo mo : : 18 morceaux pour timbres variés, 50 de pia nos, 303 pour leçons Modes clav ier er : : Normal, Dual, Split Effets et foncti fonctions ons : : 6 réverbs, 3 Chorus, 7 brilla nces, IAC, Résonance cordes et éto uffoirs, relâchement en douceur, Accord, 7 types de gammes Affiicheur Aff cheur:: LCD 126 x 64 points, à contraste réglable Enregiistrement Enreg strement : : 250 morceaux, 16 pistes Métronome tronome : : oui, complet Connectiique Connect que : : 2 casques, Midi (I n, Out, Thru), A ux In, A ux Out, USB To Device, USB To Host Aliimentat Al mentatiion on : : secteur Spéécificités : couvre-clavier Sp coulissant Finitions ons : : noyer noir (B), bois de rose (R), blanc mat (WH), frêne clair (WA), aca jou (M), laqué noir (PE) Dimens mensiions ons : : 146,1 cm (L) x 45,9 cm (P) x 92 ,7 cm (H (H)) ; 146,6 x 45 45,9 x 93 93 cm (modèle PE) Poiids Po ds : : 58 kg (61,5 kg pour le PE)
Prix : 1 779 euros m po m aha usic ur ope. I m po r r té té pa r r Ya Ya m aha M u s ic E ur ope. m e m e n m aha usic Re m e r r cie cie m en ts ts à Ya m aha M u s ic ur ope E ur ope .
Yamaha est Yamaha est un bon petit clav ier numérique de salon, très complet, au toucher créd ible, au goût du jour pour ce qu i est de la technolog ie pointue de Yamaha . Il satisfera les apprentis pianistes ou les p ianistes désirant un second instrument de complément. Les clav iéristes attendant une multitude de sonor ités seront un peu frustrés par les seules 34 sonorités intégrées. La connect ique très complète permettra néanmoins une ut ilisation di vers vers if iée de cet instrument. S ’il est relié à une amplif ication externe de haute qual ité, grâce à la sort ie Conclus ion Line Out, ce clav ier pourra révéler Ce modèle, quasi entrée de gamme son potentiel musical. Un bon cho x ix dans la sér ie avancée CLP-500 de à pri x x access ible ! juillet- août 2015
PIANISTE n°93 63
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
HIFI LE CHOIX DE LA RÉDA RÉDACTION CTION RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE
Enceintes sans fils, casque et convertisseur pour une écoute sans contrainte
par Philippe Venturini
DENON ENVAYA MINI
C
e corps quasi cylindrique, gainé de métal a jouré, dispose les commandes et les connexions sur ces deux extrém ités. D’un côté se trouvent en effet la mise sous tension, le réglage du volume (+ et -) et une touche lecturepause. D Dee l’autre une touche permet de connaître le n veau iveau de charge charge de de la batterie (di x x heures d’autonomie annoncées) tandis qu’un cache en caoutchouc (l’enceinte est censée résister à l’humidité) dissimule une entrée par mini-prise Jack et un port USB pour recharger . Un m icrophone intégré destine cette enceinte à une utilisation main libre
du téléphone. L’Envaya Mini enferme deux haut-parleurs à large bande de quatre cent imètres de diamètre que soutient un radiateur passif destiné aux basses. La liaison sans f il est assurée par le Bluetooth apt-X et l’appairage s’effectue par la technologie NFC. Il n’est certes pas rare qu ’un appareil se distingue de ses concurrents dans un comparatif mais rarement un mo-
Prix : 299 euros Dimens mensiions (H x D) : D) : 22,40 x 8,6 cm Poiids Po ds : : 877 g Oriigine Or ne : : Etats-Unis Distr striibut butiion on : : Ulti mate Ears Contact : : ultimateears.com /fr-fr Contact
dèle a creusé un tel écart . La Denon restitue un son beaucoup plus détaillé, riche et aéré que la moyenne et elle le diffuse avec une étonnante généros ité. Elle ne déf igure jamais les timbres et ne durcit jamais le son. Bien sûr, l’extrême-grave de l’orgue ou les accords plaqués du p iano manquent un peu d’ampleur mais l’aisance avec laquelle la mus ique se déplo ie dans l ’espace impressionne.
MERIDIAN EXPLORER 2
C
e bâtonnet métallique de 10centimètres se glisse entre un ordinateur, Mac ou i i tre que la qual té de cette ence nte PC, et un casque ou une chaîne h i-f i.i. portable étonne. Équipée de deux Le Meridian Explorer 2 permet haut-parleurs de cinq centimètres de ainsi de neutraliser la carte-son du diamètre et de deux radiateurs pas- premier pour véhiculer un signal de sifs, réservés au grave, elle se montre qualité supérieure vers les seconds. ltimate Ears avait dé jà pré- loin du tapage et des basses art if i- Le branchement s’effectue par une senté l’excellente enceinte ciellement tonitruantes que son f iche USB A depuis l ’ordinateur et sans f il Boom (199 euros) . nom peut laisser craindre. Le dosage par une mini-f iche USB B. À l’intéIl est possible de lui associer ou tonal est, lui, très juste, soutenu par rieur de ce cylindre aplati en alumid’écouter séparément la Megaboom . un registre grave solide et fort bien nium agit un double circuit XMOS Certes, ses couleurs brillantes, sa articulé. La transmission du signal DSP qui permet de gérer le son en forme originale et son nom ont tout s’effectue sans f il par Bluetooth ou haute déf inition et en technologie pour attirer un public jeune en mal avec f il. L’autonomie annoncée est MQA mise au point par Meridian. de sensations fortes et faciles. Cela de 20heures. Un produit que le mé- Un jeu de trois diodes lumineuses dit, il faut bien à nouveau reconnaî- lomane peut aussi écouter. permet de connaître le n i veau veau de ré-
ULTIMATE ULTIMA TE EARS MEG ABOOM
U
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Un grave présent, jamais boursouflé, apporte une base harmon ique solide sur laquelle peuvent s’échafauder de complexes polyphon ies : on peine à croire que cette sonor ité d’orchestre très réaliste sourd d’un si pe pettit ob ob jet. Si l’Envaya Mini ressemble à un bâton, c’est à un bâton de dynamite. Prix : 149 euros Dimens mensiions (L x H x P) : P) : 21 x 5,4 x 5,1 cm Poiids Po ds : : 500 g Finitions ons : : noire et bleue ou blanche et orange Oriigine Or ne : : Japon Distr striibut butiion on : : Denon France Téél.l. : : 01 41 383240 T
solution du signal. À l’écoute, le Meridian se montre à la hauteur de la réputat ion d’un fabricant de haut de gamme. Les timbres restent tou jours d’une parfaite justesse. Aussi le volume de chaque instrument est-il exactement respecté. La restitution dans l’espace appelle des commentaires similaires : les plans sonores sonores s’organisent très précisément mais jamais au détriment de la plénitude du son ou de la di vers versité de la palette des couleurs. Un des meilleurs modèles du genre. Prix : 299 euros Dimens mensiions (L x H x P) : P) : 10,2 x 3,2 Poiids ds : : 50 g x 1,8 cm Po Finition on : : grise Oriigine Or ne : : Royaume-Uni Distr striibut butiion : A udio Marketing Services Téél.l. : : 01 55095550 T
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
AUDIO-TECHNICA ATH-MSR7 A TH-MSR7
L
e grand spécialiste du casque signe une réalisation luxueuse, disponible en trois f initions, et relati vement vement abor abordable dable. Sur un arceau recouvert de matér iau amortissant se f xent ixent deux écou écouteurs teurs destinés à envelopper l ’oreille. À l’intérieur de chacune de ses deux coques logent des transducteurs appelés True Mot Motion de 45 mm de diamètre en alliage d’aluminium et de magnésium. Ce modèle dispose de pas moins de trois câbles, dont un équipé d’une télécommande et d’un micro pour se brancher sur un smartphone, Android et Apple. Certes l’ATH-MSR7 n’isole pas très eff f icacement des bruits extérieurs, mais ef ce n’est sans doute pas son ob jectif prioritaire. Comme la plupart des modèles du constructeur japonais, le présent se distingue par une justesse des timbres, un naturel des ambiances et une lisibilité exemplaires. Aéré, il l’est par sa manière de laisser de l’espace entre les pupitres, de les disposer clairement sur les trois dimensions. Un Unee
Prix : 239 euros Impéédance : 30 Ohms Imp Poiids (sans câble): Po câble) : 29 2900 g Longueur du câble: câble : 2 x 1,20 m et 3 m Connexiion : mini-fiche Jack et Connex adaptateur 6,35 mm Finitions ons : : noire, grise et marron ou rouge et or Oriigine : Japon Or Distr striibut butiion on : : A udio-Technica SAS Téél. : 01 43728282 T
clarté qui n nee s’obtient jamais au détriment de la densité des sons sons : le squesquelette se dev ine mais il n’est pas à nu . Le piano et les cordes font ainsi montre d’une belle richesse dans les fréquences médianes. Des basses à la fois puissantes mais disciplinées assurent un soutien harmonique infaillible.
BOWERS & WILKINS T7
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aire prof iter son smartphone, sa tablette ou son ord inateur de la qualité de son Bowers i & W lk ins : vo voilà l’ob jet de l’enceinte sans f il transportable T7. Malgré son encombrement rédu it (20 centimètres de long), elle bénéf icie de quelques innovations technologiques de pointe. Elle se présente ainsi dans une structure en nid d’abeilles appelée Micro Matri x x qui a pour but de r igidif ier l’ob jet sans l’alourdir. À l’intérieur, agissent deux haut-parleurs de 5 cent imètres de diamètre à membrane en f ibre de verre, renforcés par deux radiateurs affectés au reg istre grave. La transmission du signal s’effectue
Prix : 350 euros Puiissance : 2 x 12 W Pu Dimens mensiions (L x H x P) : P) : Poiids ds : : 94 21 x 11,4 x 5,4 cm Po 9400 g Finition on : : noire Oriigine Or ne : : Royaume-Uni Distr striibut butiion : B&W Group France Téél.l. : : 043746 15 00 T
par le Bluetooth apt-X . Cette enceinte offre une rest itution sonore très équilibrée et f inement détaillée. Elle ne dénature pas les t imbres des instruments et peut même donner une très bonne impression d’espace. Du sans-f il sans risque. juillet- août 2015
PIANISTE n°93 65
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CHRONIQUES DISQUES, DVD RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE
Classique et jazz Cette rubrique présente une sélection des disques et DVD récemment parus. Les « maestros » de Pianiste distinguent tout particulièrement ceux qui, selon nous, ont marqué ou marqueront la discographie. CHARLES VALENTIN
ALKAN
(1813-1888)
Trois Petites Fantaisies op.41. Minuetto alla tedesca op.46. Marche Funèbre op.26. Marche triomphale op. 27. Petit Prélude en plain-chant. Capriccio alla soldatesca op.50. Le Tambour bat aux champs op. 50 bis. Chanson de la folle au bord de la mer (Prélude op.31 n°8) Laus Deo (Esquisse op.63 n°49) Vincenzo Maltempo (piano Erard 1899) Piano Classics PCL0083. 2014. 58’
Un programme axé sur le fantasque poussé jusqu’au fantastique, dont Alkan s’était fait une spécialité et qui lui a inspiré le meilleur de sa production. Les scansions martelées de ces marches faussement martiales (Capriccio alla soldatesca) renvoient aux silhouettes inqu iétantes, à des scènes militaires du Pro phète de Meyerbeer. D’autres pièces évoquent telle Novelette ou telle Marche de Schumann réécrite avec l’humour décapant de Prokof iev . Ailleurs parv iennent les échos de la v ie de garn ison:
sonneries et tambours stylisés en inquiétants pastiches, prémonitoires des plus sinistres Militaria de Mahler . La Chanson de la folle au bord de la mer est le clou du programme: son obsédante mélopée part en lambeaux dans la rumeur des flots et du vent avec un réal isme anticipant sur l’impress ionnisme. Le caractère évocateur de ces pièces est remarquablement mis en valeur par l’usage d’un Erard dont les profondes basses (la « grosse ca isse » du Tambour aux champs ) et les brumeuses ré verbérations épaississent les fumées fuligineuses de ces partitions. L’étincelante v irtuosité de V incenzo Maltempo lu i permet de se concentrer sur l ’expression et de travailler le timbre.
Sebastian Bach. Au serv ice de Frédéric II de Prusse, il laissa un immense catalogue, notamment pour le clav ier. Son écr iture prend ses sources dans l’œuvre de son père, mais aussi dans le sou venir du classicisme français et du Sturm und Drang allemand. Avec Carl Philipp Emanuel Bach, l’écr iture quitte le clavec in pour explorer les ressources prod igieuses du pianoforte . Mais plus encore, le mus icien y importe l’art du chant, du drame lyrique, grâce à un clav ier des plus express ifs. L’auditeur y perçoit dé jà le prélude au romantisme. Après plusieurs enregistrements consacrés notamment au répertoire slave (Tchaïkovsk i) et nordique (Grieg), Elena F ilanova offre c inq Michel Fleury très belles sonates. Elles ont, à l ’év idence, transcr it l ’art CARL PHILIPP EMANUEL de l’opéra qui surgit sous les do igts de la p ianiste franBACH ça ise d ’or igine russe . Elle colore avec beaucoup de (1714-1788) tempérament les atmosphères et les dialogues dans la célèbre Sonate en fa dièse mineur. Tout ici t ient lieu de conversation, chaque vo ix imposant son propre style . Tout comme chez Mozart, les complaintes et les colères, les joies et la méditation (les silences sont essent iels) se Sonates Wq 65/7, 65/31, mêlent avec bonheur . Elena F ilanova restitue à la 62/19, 52/4, 65/32 Elena Filonova (piano) fo is cette int imité de perArdens Records ARD 2014-01. sonnages imaginaires, mais 2014. 1 h 12’ aussi une élégance concertante, comme dans le mou Telemann fut le parra in de Carl Ph ilipp Emanuel, vement lent de la Sonate en cinquième enfant de Johann sol majeur. Elle emprunte le
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phrasé si reconnaissable des concertos de Johann Sebastian Bach. Ce disque qui ne délaisse ni passion ni v irtuosité est une excellente introduct ion à l ’œuvre de Carl Philipp Emanuel Bach . Les puristes de l’interprétation baroque n ’y trouveront peut-être pas leur compte . Mais les pianistes en quête de réperto ire et les mélomanes seront en revanche séduits. En bonus du disque, une v idéo instructi ve du mak ing-off de l’enregistrement. Stéphane Friédérich
JOHANN SEBASTIAN
BACH
(1685-1750)
L’Art de la fugue Konstantin Lifschitz (piano) Orfeo 2CS C802102A. 2009. 1h36’
Dans l’excellent li vret de présentation du CD, Konstantin Lifschitz évoque, en préambule, la datation et les différentes versions de l’Art de la fugue. Une démarche intéressante que l’on suit pas à pas et qu’il illustre de manière savante et sens ible . L’arch itecture de chaque contrepoint est ainsi mise en lumière, non pas de man ière purement analytique, mais
en s’interrogeant sur le cheminement de la pensée de Bach. Ainsi, dans le Contre point n°13, l’interprète a enreg istré la fugue redécou verte récemment avec la technique du re-recording. Un quatre mains, de fait. L’écoute bénéf icie d’un éclairage d’autant plus agréable que la pr ise de son est remarquable, tout comme le choi x de l’instrument, un Carl Bechstein. Ce piano réputé pour le velouté et le caractère doré du son est ut ilisé dans toute la palette de ses couleurs. Le jeu intellectuel se double par conséquent d’une express iv ité particulièrement chaleureuse . Le toucher magnif iquement déf ini nous condu it ains i dans une sorte de voyage méditatif, porté par une tension qui ne cesse de croître, jusqu ’au f i nale la i ssé i nachevé en ple ine mesure de la Fuga a 3 Soggetti. Konstantin L ifschitz offre en guise de conclusion le Choral Wenn wir in höchsten Nöten sein BWV 668a. Après l’enregistrement de l’Offrande musicale (Lifschitz avait enregistré, dès 1994, les Variations Goldberg en gu ise de d iplôme de f in d’études…) et à la suite de ses gravures du Concerto pour piano de von Einem et du Second Concerto de Brahms, le pianiste russe montre une nouvelle fo is l’étendue et l’exigence de son réperto ire. Vo ici un enreg istrement marquant, qui complétera les approches au clavec in et à l’orgue. S.F.
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LUDWIG VAN
BEETHOVEN (1770-1827)
indubitablement un sens de l’agogique et du théâtre. Légèrement en retra it dans les deux Sonates op. 49 bien art iculées mais manquant quelque peu de resp iration, la soliste convainc par son espr i t de l iberté dans cet uni vers dépaysant et roborat if pour nos ore i lles du XXIe siècle . Michel Le Naour
JOHANNES « Variations ». 32 Variations sur un thème original en ut mineur WoO 80. Sonates pour piano nos 19 et 20 op. 49 nos 1 et 2. Fantaisie op. 77. Variations « Prométhée » en mi bémol majeur op.35 Olga Pashchenko (pianoforte)
BRAHMS (1833-1897)
Alpha ALPHA201. 2014. 1 h 02’
Sur un p ianoforte de Christopher Clarke conçu d’après un instrument v iennois Fritz de 1818, la jeune clav iériste russe Olga Pashchenko disciple à Moscou d’Alexei Lubimov, propose un bouquet de p ièces de Beethoven autour du thème de la variation. Maître en la matière, le T itan de Bonn s’est ingénié tout au long de sa v ie à malaxer un certa in nombre de thèmes, d’airs et de valses transcendés par son génie. L’interprète démontre i c i toute sa maîtr i se et sa musicalité tout au long de ce récital marqué par un jeu fougueux, v irtuose et naturel où la f inesse du trait le dispute à une profondeur terrienne proche de l ’esprit belliqueux du compositeur. La sonorité aux résonances franches, le grain chaleureux de l’instrument (au demeurant bien capté) permettent d’opposer les contrastes avec des teintes v if-argent savoureuses (fugue des Variations « Eroïca » sur un thème de Prométhée ). Batailleuse dans la Fantaisie op. 77 conduite avec un art des trans itions et une intelligence du d iscours, imaginati ve dans les 32 Variations en ut mineur, Olga Pashchenko possède
« Œuvres pour piano seul » (vol. 3) : 16 Valses op. 39. Thème et Variations. Intermezzi op. 119 n° 1 et n° 3, op. 116 n° 5. Sonate n° 2 op. 2 Barry Douglas (piano) Chandos CHAN10833. 2014. 1h07’
Le pianiste irlandais Barry Douglas poursu it son approche du clav ier de Brahms. Il y manifeste constamment une maîtrise technique et une agilité d igitale. Volontiers sanguin, robuste et puissant, il sait aussi dégager des instants de détente. Avec panache, il propose une v ision juvénile et architecturée prise à bras-le-corps de la Sonate n°2 en fa dièse mineur op.2 du compositeur allemand. Les grandes envolées proches de Schumann, d’un lyrisme à fleur de peau, la var iété des coloris et des plans sonores, le contraste des écarts dynamiques, l’engagement et le souffle puissant survolent avec une autorité impressionnante cette œuvre redoutable et granitique. Dans les 16 Valses op.39, le soliste sait rentrer momentanément ses griffes, se montrer rêveur, voire fantasque (Intermezzi op. 119 nos 1 et 3) et tout au long de
Thème et Variations fa ire preuve de cohérence ainsi que de plénitude apollinienne. Un Brahms de haute volée à marquer d’une pierre blanche.
tellement « direct » dans l’idée d’un échange personnal isé entre le pianiste et l’auditeur. En effet, ce Brahms qui s’adresse interpelle, stimule, exalte et oppresse (Scherzo de la Sonate ). Des versions des deux œuvres de Brahms, voilà certainement les plus v isuelles, sculpturales qui avec une construction imparable, une netteté dense comme au début du Second Li vre des Variations Paganini. Africabrahms, de Guédon « pulse » les échos d’une savane ironiquement décalés. Un disque hors norme réussi. Donc passionnant. Pierre Massé
père du musicien ; l’imitation du schofar, la bitonalité et les rythmes motoristes suscitent les extases d’une danse mystique. Piedigrotta évoque un quartier troglodyte de Naples, M. L. N. cadre d’un célèbre fest ival annuel de chanson : cette JOHANNES « rhapsod ie napol itaine » BRAHMS prend les motifs populaires comme prétexte d ’expéri(1833-1897) mentations où plain-chant et bel canto interfèrent avec des souvenirs de Ravel et de Stra v insky . Les Stagioni savent enclore en leur concision l’essence même des saisons. L’approche de Claudio Curti Gialdino, très analytique, met en relief la solide charpente de ces pièces fortement strucMARIO et fait ressortir l’ironie Sonate n°3 op. 5. Variations CASTELNUOVO- turées sous- jacente aux stylisations sur un thème de Paganini de Naples, V ienne ou de la op. 35 + Jean-Rémy TEDESCO (1895-1968) tradition judaïque. Cela ne Guédon : Africabrahms Nima Sarkechik (piano) l’empêche pas de chanter avec Le Triton Live TRI-15523. 2015. lyrisme la nuit napolitaine ou 1h04’ le bal costumé v iennois, mais avec le sour ire amusé d’un Jouer sans réserve, comme si sa v ie en dépenda it. Voilà pince-sans-rire. Aldo Ciccoun sentiment que l’on lini était plus direct et plus éprouve rarement à l ’écoute sensuel (intégrale chez Phoed’un disque en «l ive», surtout ni x). L’ambiguïté de la murécent. Il est vra i que le sique ne permet pas de les contexte est essent iel pour départager. On aimerait encomprendre la ph ilosophie Choix d’œuvres pour piano : tendre maintenant le nouveau de l’album, la démarche de Alghe op. 12, Le stagioni venu dans les beaux poèmes l’artiste (lire notre entretien op. 33, Alt Wien (Rhapsodie de la nature (Cipressi, Tre page 26) guère éloignée d’un viennoise) op. 30, Poemi campestri, Tre Preludi Sv iatoslav R ichter (comparez I naviganti op. 13, Le danze alpestri). M.F. avec ses Variations captées del Re David op. 37, en 1988). On prend trop l’ha- Piedigrotta (Rhapsodie ALOŸS bitude du confort sonore – napolitaine) op. 32 CLAUSSMANN ce n’est certes pas un mal en Claudio Curti Gialdino (piano soi – alors que tout respire ici d’époque A. Pleyel 1865) (1850-1926) l’intranquillité. Nima Sarke- Brilliant Classics 94811. 2013. 1h11’ chik se bat avec et contre le Castelnuovo-Tedesco a piano, jouant d’un dyna- laissé un immense corpus de misme plus adapté à l ’orches- pièces souvent évocatr ices, tre qu’à la structure d ’un dont l’écriture fluide et piaquart-de-queue Yamaha (S4) nistique met le piano remarpoussé dans ses l imites, mais quablement en valeur et dont qui tient admirablement. l’harmonie personnelle se siVoilà un combat vaillant et tue dans une mouvance post jusqu’auboutiste, d’une cer- impressionn iste fauv iste . taine grandeur parce Alghe et I naviganti sont des Sonate op. 45. Chant du qu’abouti techniquement et marines impressionn istes renouveau op. 48. Nocturne mentalement. On a le souffle dont l’opulence se double op. 55. 8e Nocturne coupé devant ces phrases l iées d’un lyrisme évoquant plus op. 80/1. Chant du soir op. avec si peu de pédale, des a i- Schmitt que Debussy . Les 60/3. Tarentelle op. 60/4. gus cinglants sous les assauts, Danses du roi David s’inspi- Barcarolle n° 3 op. 71/5. des graves granuleux . Et rent d’un recueil liturgique Capriccio op. 78/3. [ pourtant, tout paraît juste, juif harmonisé par le grand- Capriccietto op. 71/9 juillet- août 2015
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CHRONIQUES DISQUES, DVD RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE
ENTRETIEN AVEC… HERVÉ BILLAUT
DUKAS OU LA MUSIQUE EN MOUVEMENT NOUS CÉLÉBRONS CETTE ANNÉE LE 150e ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DE PAUL DUKAS. HERVÉ BILLAUT A ENREGISTRÉ POUR MIRARE LES ŒUVRES DU COMPOSITEUR FRANÇAIS. UN MAGNIFIQUE VOYAGE DANS UN UNIVERS SONORE MÉCONNU.
F
ace à Debussy et Ravel, diriez-vous qu’aujourd’hui, Dukas est un « célèbre inconnu » ? Tout à fait ! Dukas est en partie responsable de cela. Si sévère avec luimême, le compositeur a pratiqué, à grande échelle, l’autodafé de ses propres œuvres. Une telle exigence a eu pour conséquence un catalogue restreint. Enfin, le succès considérable de L’Apprenti sorcier – remercions Walt Disney ! – a déposé un paravent devant toute sa musique. Précisément, pourquoi ne pas avoir enregistré l’une des transcriptions pour piano de L’Apprenti sorcier ? Je souhaitais m’en tenir à des œuvres écrites spécifiquement pour le piano. Et, à vrai dire, l’orchestre de Dukas est si riche que l’on peut préférer – tout comme pour La Valse de Ravel, par exemple – la version à deux pianos. Quand avez-vous découvert cette musique ? Très tôt, à l’âge de 16 ans. Je me suis pris de passion pour cette œuvre et j’ai présenté le dernier mouvement de la Sonate comme pièce libre, lors des éliminatoires du Concours LongThibaud. En 1989, dans le cadre des célébrations du bicentenaire de la Révolution française, j’ai abordé d’autres partitions, notamment les Varia- tions, Interlude et Finale sur un thème de Rameau, à la demande de JeanMichel Nectoux, alors conservateur au Musée d’Orsay.
Quelles impressions dominent après avoir joué la musique pour piano de Dukas ? Le plus évident, pour moi, est d’être confronté à une puissance expressive
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prodigieuse. Cette impression est permanente, y compris dans les pièces de moindre envergure que sont La Plainte, au loin, du faune et le Prélude élégiaque. L’interprète entre d’emblée, dans un univers envoûtant, une dimension qui le dépasse. Il est au pied d’une montagne d’autant plus haute que l’écriture est compacte. Pourtant, ce piano sonne admirablement bien. Diriez-vous qu’il s’agit d’une musique descriptive ? Je dirais davantage qu’il s’agit d’une musique en mouvement, au sens cinématographique du terme. Je ne parlerais pas de forme descriptive, mais d’une esthétique en noir et blanc dont la richesse se révèle grâce à la palette infinie des gris. Rattacheriez-vous cette œuvre à une ou plusieurs esthétiques ? Les indications sont encore romantiques, plus franckistes que debussystes, certainement. Mais, l’univers de Dukas est si personnel… Dans le passage central du troisième mouvement, le Scherzo de la Sonate, on pourrait évoquer aussi Schoenberg. Il y a une forme d’abstraction que l’on trouve déjà chez Fauré, celui du Sixième Nocturne. Non, finalement, on ne peut pas décrire la Sonate par analogie. Elle transgresse le langage de son époque, jouant avec la tonalité en usant de combinaisons harmoniques tout à fait étonnantes. C’est une partition conçue de manière organique. C’est stupéfiant pour un musicien alors âgé de 35 ans. Pourtant, Dukas ne montre jamais sa nature profonde, son affect. Il ne se confie pas.
M I K O H N I J
Quelle est ici la « place » de l’interprète ? En ce qui me concerne, j’ai voulu éviter la surcharge émotionnelle. La pièce se suffit à elle-même. Sa grande complexité et sa virtuosité la destinent évidemment à des pianistes professionnels. Quels sont vos projets ? Pour les enregistrements, je n’ai pas encore d’idée précise. Rester dans le
même univers, aller vers des compositeurs de la fin du romantisme ? Pour l’instant, je me consacre aux différents festivals de cet été où je suis invité ainsi qu’aux Rendez-vous de Rochebonne, à Theizé-en-Beaujolais (69), un festival qui a lieu en septembre près de Lyon et dont je suis le directeur artistique. Propos recueillis par S.F. Lire chronique page 71.
À ne pas manquer
> 1er juillet, Festival L’Estival de la Bâtie d’Urfé, à l’Opéra Théâtre de Saint-
Etienne. Concert avec l’Orchestre Symphonique Saint-Etienne-Loire, dir. David Reiland : Mozart. > 16 juillet, Cloître des Jacobins, Festival Toulouse d’Eté. Récital Dukas, Debussy, Chausson et Ravel. > 18 juillet, Festival Musique et Or au Cheylard : Musique de chambre avec le violoncelliste Raphaël Perraud. > 25, 26 et 29 juillet, Festival des Arcs. Musique de chambre > 30 juillet, Temple de Lourmarin, Festival de piano de La Roque-d’Anthéron. Récital Dukas. > 30 août, Festival de l’Orangerie de Sceaux. Musique de chambre avec Patrick Messina (clarinette) et Raphaël Pidoux (violoncelle).
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Claudine Simon (piano) Ligia 010329215. 2015. 1h05’
Claussmann fait partie de ces compositeurs qui ont préféré une carr ière prov inciale à l’agitation culturelle parisienne. D’origine alsacienne, il f it ses études à l’École Niedermeyer, où il fut l’élève d’Eugène Gigout, quelques années après Fauré . Tout jeune encore, il s ’installa à Clermont-Ferrand dont il fonda le Conservatoire et y passa le restant de ses jours, laissant une œuvre très abondante. Sa musique pour piano témoigne de la pers istance, au début du XX e siècle d’une esthétique marquée par le romantisme, aussi éloignée des facilités salonnardes que des raff inements de l’« impressionnisme » musical ou des complexes architectures de l’école franck iste. Plusieurs œuvres du programme sont ainsi de charmantes pièces de caractère, d’un style soutenu (Cappriccio et Capricietto, Tarentelle, Chant du soir). Pourtant, Claussmann a su évoluer. Après la guerre, il sait encore évoquer des cl imats proches de Fauré, du moins de ce que composa it Fauré trente ans auparavant (8 e Nocturne, 1923). Le morceau le plus conséquent, la Sonate (1907) est un incontestable chef-d’œuvre. Le style en est constamment marqué par un souci de clarté architecturale. Le vaste Allegro non troppo in itial, l ’Andante sostenuto central, en forme de choral varié, le bouillonnant f inale composent un rare témo ignage d’un style post-romantique français. Claudine Simon a dé jà prouvé son inclination pour les aspects les moins connus de la musique française avec un CD consacré aux œuvres à quatre mains de Mel Bonis, avec Laurent Martin. Ici, elle se montre très convaincante, mettant tour à tour en exergue la subtilité de cette musique, sa solide construction et son profond lyr isme.
Jacques Bonnaure
Depuis 1795
CARL
CZERNY (1791-1857)
«Bel Canto Concertante». Variations virtuoses pour piano et orchestre op. 281, 232, 160 et 234 Rosemary Tuck (piano), Orchestre de chambre anglais, dir. Richard Bonynge Naxos 8573254. 2013. 1 h 10’
Pianiste, pédagogue et compositeur v iennois, élève de son père pu is de Beethoven (1800-1803), Carl Czerny jouait du piano à trois ans, composait à 7 ans et était capable à 10 ans d ’interpréter le répertoire le plus valable et le plus important. À quinze ans, il donnait lui-même des leçons, et il compta parmi ses élèves le jeune Liszt (1822). Son catalogue de compos iteur cont ient plus de mille ou vrages dont certains sont ressuscités à l’occasion, alors que sa production pédagog ique reste au jourd’hui encore à la base de tout ense ignement du piano. Ses Mémoires (1842) fournissent de précieux renseignements sur Beethoven. Il réalisa d ’innombrables arrangements et alla souvent prendre son b ien chez autrui, en particulier pour ses pages en forme de variations. Quoi de plus normal, vers 1830, que de puiser chez les auteurs d’opéras à la mode ? Voici donc, en première discographique mondiale, quatre œuvres pour piano et orchestre «de style brillant» ou «de bravoure», fondées respect i vement sur un «thème favori » de Norma de Bellini, sur «deux motifs» de Fra Diavolo d’Auber, sur la « cavatine favoritechantée par M. Rubini» d ’Il Pirata [
Du haut de ses 123 cm, le modèle Ritmüller R2 expose avec �erté son esthétique signée L. Thomma, le célèbre designer allemand. Sous son couvercle à ouverture « papillon », il possède des caractéristiques sonores qui ne laissent aucun pianiste indifférent. Chaleur et profondeur des graves, précision des médiums et clarté des aigus en font un piano destiné à des musiciens exigeants.
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69
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CHRONIQUES DISQUES, DVD RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE
Le coin des enfants
par Michelle Muller
LE PIANO D’ARGENT
PIERRE ET LE LOUP
N
R
1 Livre, 1 CD. Harmonia Mundi, coll. « Le Petit Tourneur de pages », 40 pages, 76’46 (21’11 et 55’35), 22 euros. Existe en version CD + livret complet, 18 euros.
ouvellement créé par Harmonia Mundi, le label Little Village propose aux enfants de partir à la découverte des instruments de musique et des répertoires, en mêlant différents univers artistiques et en associant de multiples talents. La série « le Petit Tourneur de pages » ouvre le bal avec Le Piano d’argent, un conte musical inédit de Claude Clément, magistralement illustré par la talentueuse Xavière Devos. Un jeune châtelain ténébreux et solitaire n’a de cesse de travailler les mêmes partitions sur ses vieux claviers : un piano à queue « au son généreux, évoquant pour lui le ton affectueux de son père » et un pianoforte « dont le timbre délicat lui rappelait la voix de son grand- papa ». Nostalgie, quand tu nous tiens ! C’est sans compter l’arrivée fortuite d’un jeune garçon déluré, tombé en panne de voiture alors qu’il est attendu pour animer la fête du village avec son clavier électronique. La rencontre du classique et du moderne ! Satie (Le Piège de la méduse, Descriptions automatiques , par Alexandre Tharaud), Mozart (Adagio de la Sonate K. 282, par Kristian Bezuidenhout), Mompou ( Música callada par Javier Perianes) ou encore Gershwin ( Un Américain à Paris, par Franck Braley) viennent ici nourrir l’imaginaire du lecteur en même temps qu’ils offrent à entendre la diversité sonore de l’instrument roi. Récitant de choix, l’acteur Charles Berling entraîne son petit monde dans l’aventure qui finit dans un « gai potin », avant de laisser toute la place à la musique et rien que la musique avec l’écoute des œuvres jouées dans leur intégralité. Alliant le plaisir à l’agréable, Le Piano d’argent ne devrait pas laisser insensibles les minots. Une réussite.
1 livre, 1 CD. Didier Jeunesse, 50’, 23,80 euros.
aconté par Michel Galabru et interprété par l’Orchestre de chambre de Genève, sous la baguette de Thierry Fischer (v. 1995), le fameux conte musical de Prokofiev fait peau neuve dans cette publication augmentée de Didier Jeunesse. L’illustrateur Eric Battut, qui porte un intérêt particulier aux récits classiques, propose une version graphique dépouillée, délicate et poétique qui apporte une touche de modernité à l’histoire si souvent racontée. Six morceaux accompagnés d’un petit texte de présentation, parmi les œuvres du grand répertoire, suivent le conte, tous extraits des livres-disques publiés chez Didier Jeunesse. Le Carnaval des animaux, La Petite Sirène, Monsieur Satie…, Monsieur Chopin… Que du bon ! Irréprochable dans la réalisation, cet album mérite le détour.
MES PLUS BELLES BERCEUSES JAZZ… ET AUTRES MUSIQUES DOUCES POUR LES PETITS 1 Livre, 1CD. Gallimard Jeunesse, 52’, 16,90 euros.
A
ucun doute, les tout-petits mordront à pleines gencives dans cette compil’ jazzy parue chez Gallimard Jeunesse. Au total, dixsept standards proprement irrésistibles, qui ont fait danser joyeusement les pinceaux des illustratrices Elsa Fouquier, Alexandra Huard, Clotilde Perrin et Charlotte Roederer. Les voix enjôleuses de Dean Martin ( Goodnight Sweetheart), de Franck Sinatra (Sleep Warm) et de Bing Crosby (Hush-a-bye) ; celles, suaves et swing à souhait de Sarah Vaughan, Billie Holiday et autres Ella Fitzgerald favoriseront de merveilleux petits moments de grâce musicale. Mise en garde: l’arrivée en plage 7, de Louis Armstrong, alias Satchmo, dans Summertime, risque de laisser des traces indélébiles dans les cerveaux en formation et de créer une addiction; Nuages, de Django Reinhardt, porte le danger de faire de l’auditeur un guitariste en puissance ; Little Girl Blue, chanté par Nina Simone, peut transmettre le virus du piano (pas de vaccin !)… La liste des effets secondaires n’est pas exhaustive. Bienvenue sur la fréquence du bien-être.
MES PREMIÈRES NOTES DE MUSIQUE
1 livre sonore. Gallimard Jeunesse Musique, 10,10 euros.
Illustré par Marion Billet, cet imagier sonore devrait faire mouche auprès des petits curieux. Sur le principe d’une note, une image, un son, le tout jeune enfant, dès 1 an, découvre les notes de la gamme. Une petite pression sur la puce et l’enchantement se produit. Simple et efficace.
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de Bellini et sur la «marche favorite » de Gli Arabi nelle Gallie de Pacini. Que l’orchestre soit dirigé par R ichard Bonynge ne saura it surprendre, étant donné sa connaissance de ce réperto ire opératique, et Rosemary Tuck fait tout pour obtenir le juste milieu entre v irtuosité et jeu élégamment perlé dans l’aigu. Ces musiques ne sont pas immortelles et retiennent plus ou moins l’attention, mais réussissent à recréer l’atmosphère d’un salon ou d’un théâtre (plutôt parisien que v iennois) au temps de «la bataille d’Hernani». Marc Vignal
HENRI
COLLET (1885-1951)
El Escorial, op. 22. Clavelitos, op. 87. Chants de Castille, op. 42-46. Album d’Espagne, op. 246-253. Alma española (extraits) Pascal Gallet (piano)
lui, la recherche de l ’authenticité musicale ne relève en rien de l’espagnolade ni de la carte postale. Il a longtemps vécu en Espagne, a connu toutes les régions, mené un travail d’ethnomusicologue, et si bien compris le musique populaire locale qu’il est par venu dans ses propres œuvres à créer un folklore imaginaire. El Escorial est la réduction pour piano d’un poème symphonique qui n’a jamais été orchestré, une évocat ion du célèbre monastère. Clavelitos est la version pianistique d’un ballet andalou comprenant sept danses gitanes. Les trois autres recueils relèvent du folklore réel ou imaginaire mais se fondent sur d’authentiques musiques des di verses Espagnes. Pascal Gallet a enreg istré ce programme en concert et l’on ressent cette belle spontanéité du direct. Il sait trouver le ton sec, in venter les rythmes et des couleurs et nous fa ire ressentir à quel point toute l’Espagne s’était infusée dans l ’imagination musicale de ce compositeur trop méconnu. J.B.
PAUL
DUKAS (1865-1935)
Maguelone MAG111198. 2014. 59’
Toutes les h istoires de la musique vous le diront, Henri Collet, c’est le musicologue qui publia en 1920 deux articles sur « les Cinq Russes, les Si x Français et Erik Satie », baptisant ainsi le Groupe des Si x. Il avait été l’élève de Déodat de Séverac, et, cas unique en un temps où les compositeurs espagnols venaient se former à Par is, il se forma lui-même auprès de compositeurs espagnols comme Felipe Pedrell et Manuel de Falla. L’Espagne était son domaine de prédilection, mieux son obsession. Il n’était certes pas le premier compositeur français à s’être intéressé au monde ibérique, mais chez
Sonate en mi bémol mineur. Variations, Interlude et Finale sur un thème de Rameau. La plainte, au loin, du faune. Prélude élégiaque. Hervé Billaut (piano) Mirare MIR 242. 2013. 1 h 11’
Dukas semble avoir adapté son œuvre pour piano au CD. L’intégrale compte env iron 70minutes et comprend deux grands chefs-d ’œuvre, la Sonate et les Variations, et
deux pièces brèves d ’une grande beauté qui résument bien l ’esthétique exigeante de l ’auteur . La Plainte, au loin, du faune est en quelque sorte le « tombeau » de Debussy ; le prélude élégiaque un hommage à Haydn. En dépit de sa diff iculté et de son intimidante longueur, la Sonate a dé jà connu une dizaine d’enregistrements, certains quasiment historiques ! Hervé Billaut en met en év idence l’aspect post-beetho vénien, par la r igueur de la construction, par la dynamique et la ferme condu ite des développements . Trois des quatre mouvements sont en effet d’immenses arches dans lesquelles l’interprète ne doit pas s’égarer ni perdre l’auditeur. Or, ces parcours sont ici tout à fait clairs et cohérents, mais le romant isme foncier de l’œuvre n’est pas négligé. Ces qualités valent aussi dans les Variations, Interlude et Finale sur un thème de Rameau, le plus souvent couplées avec la Sonate, et dont la grande Yvonne Lefébure fut la première interprète au disque. Ici, Dukas exalte la musique française en utilisant la technique de la grande variation… à l ’allemande ! Comme dans la Sonate, Hervé Billaut agit en architecte mais un architecte sensible aux changements de lumière (lire encadré page 68). Une belle réalisation qui marquera le cent-cinquantième ann iversaire d’un compositeur secret et somme toute méconnu. J.B.
MARIE
JAËLL (1846-1925)
Sonate. Feuillet d’album. Six Petits morceaux. Six Esquisses romantiques. Valses mélancoliques. Valses mignonnes Cora Irsen (piano)
cieuse. Marie Jaëll n’écr ivaitelle pas : « Je me sens comme un volcan en éruption et c’est seulement ainsi que je peux grandir » ? J. B.
Querstand VKJK1508. 2014. 1h16’
EDWARD
À 9 ans, la pet ite Marie Trautmann étonna it Moscheles, lors de son prem ier concert. Elle travailla ensuite si bien en pr i vé avec Herz, qu’après son adm ission au Conservatoire de Par is, elle obtint son Premier Pri x en un an, en 1862 . Elle épousa le pianiste autrichien Alfred Jaëll et tout en menant sa propre carr ière, développa une méthode pédagog ique originale, fondée à la fois sur une étude physiologique de la main et sur un trava il des facultés mentales . Ses ou vrages théor iques ont été jusqu ’à nos jours tenus en grande estime par de nombreux pianistes, mais elle fut également reconnue comme compos itrice et admise à la Société des compositeurs de mus ique de Paris, sous le double patronage de Sa intSaëns et Fauré. Liszt la prit en amitié, reconnaissant sa valeur. L’essentiel de sa production fut composé entre 1870 et 1895, après quo i elle se consacra essent iellement à la pédagog ie du piano. Alexandre Sorel (Solst ice) nous avait dé jà révélé certains aspects de son importante product ion, dont la Sonate que l’on retrouve dans le programme de Cora Irsen, une œuvre dense et de qualité incontestablement marquée par Schumann (le Menuet cite, volontairement ou non la deuxième des Kinderszenen). Le reste du programme comprend des pièces brèves écrites sans complaisance et d’un romantisme souriant ou austère. Cora Irsen expose b ien les di vers aspects de cette musique, délicatesse des pièces de genre d’une part, ton plus altier de la Sonate que l’on aurait cependant pu imaginer plus frémissante et auda
GRIEG
(1843-1907)
Concerto pour piano op.16. 12 Pièces Lyriques Javier Perianes (piano), Orchestre symphonique de la BBC, dir. Sakari Oramo Harmonia Mundi HMC902205. 2014. 1h 10’
Le pianiste espagnol poursuit un parcours d iscographique sans faute, impressionnant de justesse quand il passe d’un uni vers sonore à l’autre. En effet, il construit un répertoire dont chaque jalon (albums Beethoven, Falla, Mompou, Mendelssohn, Chopin et Debussy, etc.) enrichit sa personnalité musicale. Pour cet enreg istrement, il aurait été logique qu ’il associe Gr ieg avec le Concerto de Schumann : tonalité identique (la mineur), style et introductions assez proches … Pourtant, au f il de l’écoute, on perço it nettement certaines particularités de l’œuvre de Grieg. En effet, si Perianes n’en renie pas les influences allemandes, il allège et clar if ie son toucher. On songe davantage à Mendelssohn qu ’à Schumann. Il s’intéresse aussi aux sources populaires de la musique. En effet, Grieg réalisa un véritable travail ethnomusicologique qui imprégna toute sa musique . Et le Concerto pour piano, pièce de venue emblématique du romantisme « international », n’échappa nullement aux [
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PIANISTE n°93 71
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CHRONIQUES DISQUES, DVD RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE
LES LEÇONS DU PASSÉ
UN LEGS MAGISTRAL Arturo Benedetti Michelangeli, «The Complete Warner Recordings» Warner Classics. 14CD
Q
uelle bénédiction que l’édition de l’intégrale des enregistrements pour Warner d’Arturo Benedetti Michelangeli ! Après le coffret Deutsche Grammophon, voici un legs magistral allant de 1939 à 1975. Il débute au cours de la guerre avec les Debussy et Chopin suivis des concertos avec les orchestres de Rome et de Turin (Beethoven, Haydn, Schumann, Liszt). Valeureuses formations qui tiennent tant bien que mal le choc ! Malgré la précarité des prises de son même tardives (1963) par la Rai, à Turin et Trévise, les Chopin méritent d’être entendus. Pages superbes voire miraculeuses aussi comme l’Andante du Concerto n°23 de Mozart ! Chaque note, chaque respiration a été tellement pensée, que l’on a l’impression de redécouvrir la partition. Sans oublier le Carnaval (à Londres en 1957 et en Suisse en 1975) et d’autres pièces de Schumann, bien captées sauf, hélas, à la salle Wagram. Mais là, il s’agit de « rushes » non publiés. Ce coffret exhaustif avec les EMI légendaires (Ravel et Rachmaninov avec le Philharmonia de Londres, Schumann et Liszt avec la Scala de Milan en 1961), mais aussi quelques «live » ainsi que des raretés comme ces pièces de Tomeoni et Marescotti, enchante. Quel pianiste, dans les années 70 enregistrait les concertos pour piano de Haydn ? D’autres prises en disent long, comme cette demi-heure de répétition, avant un récital, à Londres. Michelangeli joue Debussy et demande très énergiquement de ne pas voir le public. S.F.
Nouveau en 1922, le Brés il fut en quête d’une identité culturelle plus spéc if ique . C’est ainsi que des musiciens comme Ernesto Nazareth et, à sa suite Heitor V illa-Lobos, dessinèrent un art plus rythmé, s’inspirant de l ’art africain. Mais leurs précurseurs étaient eux aussi des musiciens fort attachants. Braz Velloso joue excellemment ces pièces, qu’il exhume avec beaucoup de f inesse et une belle maîtrise. Il s’en dégage une véritable émotion. Voila un pianiste attachant, dont il importe de saluer le beau travail d’interprète, de chercheur et de musicologue. Alexandre Sorel
WOLFG ANG AMADEUS
MOZART (1756-1791)
mières mesures de l ’Allegro assai du Concerto n°16, prises sur un tempo endiablé, jouant sans complexes la carte de la martialité. Une martialité dépourvue de brutalité qui laisse f iltrer les couleurs et s’épanouir les nuances, fru it de la belle conn i vence entre les musiciens de la Kölner Akademie et le pianofortiste. Son toucher subtil et précis fait jaillir des sonorités cristallines jamais agress ives de son pianoforte, écla irant les lignes mélodiques et dialoguant facétieusement avec l’orchestre. Les Andante se déploient sans affectation, plus rêveurs que mélancoliques, avec une pointe de sécheresse cohérente avec la conception lumineuse d’ensemble. Des lectures qui évoquent celles de Robert Lev in et de l’Academy of Ancient Music (Decca) et qui choqueront les contempteurs des instruments d’époque auxquels nous recommanderons Perah ia (Sony). Jean-Noël Coucoureux GUSTAVE
SAMAZEUILH influences du folklore, l ’un des thèmes de préd ilection de l’interprète. Perianes a longuement pensé les t imbres,
les couleurs, les accents rythmiques de la mus ique nordique. Avec l’orchestre, il dialogue magnif iquement, avec autant de naturel que d ’engagement. On a rarement entendu un lyrisme aussi sobrement chantant et une telle plénitude dans l’accompagnement. Cette version amoureusement c iselée, chambriste même dans le mouvement lent est une nou velle référence. La sélection de Pièces lyriques offre un panorama chronologique instructif du cycle. Épurées, pour certa ines, schumanniennes, brahmsiennes, purement ludiques et narrati ves pour d ’autres, elles enrichissent habilement notre souvenir du Concerto. Quelle réussite ! S.F.
LEOPOLD MIGUÉZ (1850-1902)
Œuvres pour piano Naxos 9.70199. 2011. 1 h 02’
+ Henrique Oswald (1852-1931)
Œuvres pour piano Naxos 9.70200. 2012. 1 h 01’ Braz Velloso (piano)
Il importe de saluer ici un musicien particulièrement f in et attachant, le pianiste brésilien Braz Velloso, qu i a gravé deux disques originaux de compositeurs brésiliens inconnus et dont il se fait l’émouvant défenseur . La
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musique de ces compos iteurs n’avait jamais été enregistrée jusqu’alors, et c ’est par une sorte de baiser à La Belle au bois dormant que cet excellent pianiste a redonné v ie à ces pages écrites par ses compatriotes. Elles sont pleines de subtilité, d’invention mélodique et de riches harmonies. L’école romant ique brésilienne est inconnue au jourd’hui. En effet, même après la proclamation de l’indépendance du Brés il en 1899 (auparavant colon isé par le Portugal) des liens culturels étroits demeuraient tissés entre l’Europe et le Brésil. Aussi, ces deux compositeurs furent-ils très influencés par la musique de Chopin, Debussy ou Fauré dont on retrouve les tournures (pour Oswald), ou celle de Schumann ou de Liszt (pour Miguéz). Cependant, à la suite de la grande semaine de l’Art
(1877-1967)
Concertos pour piano n°15 K.450 et n°16 K.451. Rondo K.382 Ronald Brautigam (pianoforte), Die Kölner Akademie, dir. Michael Alexander Willens Bis BIS2064. 2013. 54’
Composés durant l’année 1784 et annonciateurs d’une longue série, les Concertos n°15 et n°16 sont des œuvres brillantes, soutenues par une assise orchestrale enrichie au plan des effectifs avec une petite harmonie indépendante, n’hésitant pas à exposer les thèmes, reléguant parfois le piano à l’arr ière-plan. Les belles qualités dé jà révélées dans un précédent CD consacré aux Concertos n°14 et n°21 sont à nouveau présentes dans ces lectures. Le pianiste néerlandais défend une conception brillante et ludique de ces partitions, sans atermoiement. Ce que conf irment les pre
Intégrale de l’œuvre pour piano. Olivier Chauzu (piano) Grand piano GP669. 2014. 1 h 14’
Fastes et éclats rutilants d’un postimpressionnisme tirant sur le fauv isme, acrobat ies transcendantes et lisztiennes (un Liszt rev isité par Skarbo) ou eau-forte à la po inte sèched’une svelte polyphonie (Suite, Inventions): ces musiques admirablement écrites pour l’instrument sont du grand piano au plein sens du terme. Elles exigent puissance, v irtuosité, couleur et
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Abonnez-vous à subtilité de timbre ainsi qu’une précision rompue à toutes les embûches de la grande véloc ité. Oli v ier Chauzu joint à ces qualités une belle et instincti ve musicalité et un sens poét ique que l’on mesurera à l’aune de l’admirable Chant de la mer. Ce vaste triptyque est un sommet du piano frança is digne de Gaspard de la nuit. Ol iv ier Chauzu sait en effet faire chanter les réverbérations d’accords du prélude avec une largeur qu i ouvre des perspecti ves sur le grand large restées insoupçonnées de ses deux prédécesseurs Marie-Catherine Girod et Stéphane Lemel in. Dans Clair de lune au large, il resserre imperceptiblement le tempo, conférant a insi aux tristanesques effusions de ce nocturne l’indispensable cohérence mélodique sans en sacrif ier pour autant l ’opulence harmonique. Dans le f inale (Tempête et lever du jour sur les flots, considéré par Cortot comme le sommet absolu du piano français avec Skarbo), il tr iomphe du maelström sonore submergeant l’i voire de colossales montagnes écumantes, avant de laisser s’épanouir, une fois le calme revenu, l’immense hymne au soleil, resplendissant des éclats d’une étincelante v irtuosité qui laisse l’auditeur aveuglé, le cœur battant. Ainsi l’emporte-t-il sans peine sur ses deux excellents prédécesseurs, par son panache, son imperturbable sang froid au milieu des éléments déchaînés et un engagement total par instant voisin de l’héroïsme. Ces qualités magnif ient l’ardent Nocturne à la texture tout orchestrale (c’est la transcription par l’auteur du poème symphonique Nuit, qui connut son heure de gloire avant de tomber scandaleusement dans l’oubli). Ol iv ier Chauzu le clame avec force dans cette remarquable réalisation: il est urgent de réhabiliter notre belle musique française ! M.F.
FRANZ
SCHUBERT (1797-1828)
Numérique
à partir de
�
25,99
Impromptus D.899 et D.935. Litanei (arr. Liszt) François Chaplin (piano) Aparté AP101. 2014. 1 h 12’
Plus que rien d’autre dans le piano de Schubert, les deux séries d ’Impromptus demandent qu’on leur a joute le moins possible, qu’on ne les interprète pas, qu’on les laisse parler. Ils disent assez, et avec assez d’év idence. Ce n’est pas mince mérite à François Chaplin qu’il ne cherche pas à y dire du neuf . Il s’efface, Schubert parle. Ce n’est pourtant pas rien de tenir les 12’35 du 935/1 en communiquant ce sentiment tranquille du tragique sous- jacent, que rien ne montre, et qui parle tout le temps; ni de donner aux variations du 935/3, 12’ cette fois, ce déploiement de couleurs et de timbres dont aucun ne réclame la vedette, ma is qui tous concourent à un des parcours les plus cohérents et fluides, et allants, qu ’on leur connaisse. Si la première série est moins réussie, c’est pour trop d ’emphase sans doute à l’attaque du 899/1, sûrement plus de contrastes qu’il n’est nécessaire dans les remous profonds de l’illustre 899/2. Mais le flux chanteur en 3, puis l’excitation maîtrisée du 4acheminent parfaitement la suite. Beau travail de Liszt sur Litanei à la f in, bel adieu à un beau programme . À ne comparer à personne,surtout. Il y en aura tou jours qui entendront pour la première fois ces merveilles d ’Impromptus. En commençant par ceuxci, ils sont sur le vrai chemin.
André Tubeuf
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juillet- août 2015
PIANISTE n°93 73
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CHRONIQUES DISQUES, DVD RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE
ENTRETIEN AVEC… JEAN-EFFLAM BAVOUZET
« RESTER FIDÈLE À LA PARTITION, VOILÀ LA RÈGLE PREMIÈRE » « TRANSCRIPTIONS FOR TWO PIANISTS » PARAÎT CHEZ CHANDOS. CET ALBUM RÉUNIT L’ANCIEN ÉLÈVE DE PIERRE SANCAN ET FRANÇOIS-FRÉDÉRIC GUY DANS DES ŒUVRES DE DEBUSSY, STRAVINSKY ET BARTÓK. Chronique dans le prochain numéro de Pianiste.
L L E H C T I M L U A P
74 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
E
st-ce que les trois compositeurs réunis dans votre album symbolisent la modernité de l’écriture du XXe siècle? Pour ma part, je considère Franz Liszt comme le père de l’écriture moderne du piano du XXe siècle. Sans lui, quelles auraient été les écritures de Debussy, Bartók, Ravel, Schoenberg, voire même de Pierre Boulez ? Cela étant, les trois compositeurs du disque ont ouvert de nouveaux horizons à l’orchestration, aux rythmes et aux harmonies. Les liens entre Jeux de Debussy et les deux Portraits de Bartók étonnent… Absolument ! Les deux œuvres ont été créées en 1913 et, pour moi, elles sont intimement liées à Pierre Boulez, qui les a dirigées. Nous lui avons d’ailleurs dédié le disque. Vous pouvez aussi ajouter les rapprochements harmoniques saisissants entre les pièces de Debussy et Stravinsky. Vous êtes l’auteur de la transcription de Jeux de Debussy. Était-ce la première fois que vous réalisiez un tel travail ? Oui et sans doute la dernière ! Je me suis lancé ce défi – Jeux est la seule pièce pour orchestre à ne pas bénéficier d’une transcription pour deux pianos – pour parachever l’intégrale Debussy que j’ai enregistrée pour Chandos. J’ai étudié l’orchestration du compositeur, notamment auprès de Zoltán Kocsis, auteur luimême de plusieurs transcriptions (et orchestrations), notamment de Sirènes de Debussy et de La Valse de Ravel. Rester le plus fidèle à la partition originale est la règle première. Cela étant, Pierre Boulez m’a écrit qu’une fidélité extrême pouvait aussi desservir le travail. Il est vrai que si je devais refaire cette transcription, j’en allégerais probablement l’écriture. Les cordes de l’orchestre, par exemple, sont divisées jusqu’à dix parties ! Des effets de percussion sont intraduisibles au piano. J’ai dû faire des choix et, au finale, le résultat est une transcription un peu lisztienne. Comment avez-vous réparti les voix entre les deux pianos ? Dans Jeux , Debussy utilise très souvent les thèmes à deux reprises. J’ai donc passé les idées musicales d’un
piano à l’autre afin qu’aucun piano ne reste soliste ou accompagnateur. La répartition alternée renforce aussi l’illusion d’un orchestre fourni. Avez-vous été inspiré par des interprétations orchestrales spécifiques ? J’ai choisi comme écoute de travail la version de Simon Rattle avec l’Orchestre symphonique de Birmingham. C’est une interprétation aux tempos mesurés qui permettent davantage de précision. Comment caractériseriez-vous les Portraits de Bartók ? Assurément, leur orchestration est plus simple. La musique folklorique hongroise porte l’œuvre avec des rythmes si particuliers. Travailler avec des musiciens hongrois comme János Starker, Miklos Perenyi, Gabor Takács, Zoltán Kocsis, entre autres, fut une grande chance. Parlez-nous de votre collaboration avec François Frédéric Guy… Nous sommes très complémentaires. Il est peut-être plus « lyrique » et je suis peut-être plus «rythmique». Dans le deux pianos, il n’est pas nécessaire d’avoir des musiciens de tempéraments et de jeux égaux, ce qui n’est pas le cas dans le quatre mains, un « art » à part entière. Quel type de pianos recherchiezvous ? Nous avons disposé de deux excellents Yamaha CFX, magnifiquement réglés pas Kazuto Osato. Quels sont vos projets ? La fin de l’intégrale des sonates pour piano de Beethoven, puis celle des sonates de Haydn chez Chandos. Il y aura également un disque d’œuvres de Pierné afin d’achever l’anthologie du compositeur français avec le Philharmonique de la BBC et le chef Juanjo Mena. J’ai récemment enregistré des concertos pour piano de Mozart le Manchester Camerata et Gabor Takacs-Nagy. D’autres disques sont en projet, notamment de Grieg et Gershwin. Enfin, je peux vous annoncer que la prochaine édition du festival de musique des îles Lofoten, en Norvège (11 au 16 juillet 2016) dont je suis le directeur artistique accueillera, entre autres, Nelson Freire, Bertrand Chamayou et Marc-André Hamelin Propos recueillis par S.F.
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RÉCITALS ANNE-LISE
GASTALDI
,
D AVID
SAUDUBRAY
«L’Oreille de Proust». Bizet : Carmen (Pot-pourri de Rebrovic). Debussy : Pour que la nuit soit propice. Beethoven : Symphonie pastorale («L’Orage»). Schubert : Divertissement à la hongroise (Finale). Fauré/Messager : Souvenirs de Bayreuth. Fauré: Le Jardin de Dolly. S travinsky: Le Sacre du printemps (« Action des ancêtres», «Danse sacrale») Arties records Opus 4. 2014. 57’
Ici, pour une fois, le texte de présentation est aussi important que l’enregistrement. Il s’agit d’une passionnante étude de James Connelly sur l’écoute et les pratiques musicales de Proust, fondée sur une documentation très précise tirée de La Recherche ou d’autres textes, et de la correspondance, avec de jolies illustrations d’époque. À partir de ces sources, les interprètes ont sélectionné un programme adapté au piano à quatre mains, susceptible d’illustrer l’uni vers musical proustien. On peut év idemment faire toutes les ob jections possibles à ces cho i x. Wagner n’est représenté que par le joyeux quadrille parodique de Fauré et Messagerè ; Proust adorait Debussy et particulièrement Pelléas mais il est peu probable qu’il ait connu les Ép igraphes anti ques ; «L’Orage» de la Pastorale , joué isolément, ne si
gnif ie pas grand-chose (mais il est vrai que Proust l’évoque à propos d’une querelle entre Charlus et le Narrateur). Le programme prend cependant tout son sens en l ien avec l ’étude de Connelly, pleine de considérations originales et judicieuses – ou avec la lecture de Proust . On peut auss i (ma is ce sera it dommage) oublier Proust et appréc ier une série de morceaux fort bien interprétés et caractérisés par Anne-Lise Gastaldi et Dav id Saudubray, depuis le curieux « Pot pourri» de Carmen jusqu’à la « Danse sacrale» du Sacre du printemps, très précise et percuss ive, en passant par le très fluide et lyrique F inale du Divertissement à la hongroise, des pièces que l’on trouve rarement réunies. Une publication atypique mais intelligente et sensible.
« questionne » bien. Masques, à nouveau, ma is cette foisci au pluriel, de Debussy accroît la dimension tragique, voire oppressante de l ’écriture. Jiang Y i Lin traduit cela avec un son d irect, sans f ioriture, incisif et hautain dans la pulsation rythmique, là où Philippe Bianconi et Philippe Cassard choisissent une plus grande var iété de timbres, là où le gén ial Samson François semble improv iser. Les trois Klavierstücke D.946 de Schubert para issent incongrus dans cette sélect ion ! Et pourtant, la dimension crépusculaire, haletante de l’écriture se plie volontiers au commentaire poétique du « masque ». Jiang Y i Lin s’en tient à une concept ion l inéaire de l’œuvre alors qu’il faudrait céder progress i vement au cri de désespoir de cette partition testamentaire. Après une lecture du Dante apparaît d ’une eff icac ité à toute épreuve. Il manque un peu de respiration et de décontract ion toutefo is. La Lune d’automne au-dessus du lac tranquille de Lü Wencheng (dans l’arrangement de Chen Pei xun) est l ’une des pièces les plus célèbres du répertoire classique chinois. Un charme surrané aux effluves romantiques.
Scala), à Moscou (M ikhaïl Voskresensky) et à Londres (Dmitri Alexeev), soutenue par Pascal Rogé, la p ianiste i tal i enne Vanessa Benell i Mosell a cho isi, pour son premier disque chez Decca, un programme sortant des sentiers battus. L’enregistrement particulièrement soigné des Klavierstücke (elle a trava illé avec Stockhausen, disparu en 2007) est une grande réuss ite. Dans cette partition, Vanessa Benelli Mosell a parfaitement intégré le geste, la resp iration. Elle organise l’espace sonore dont elle s ’approprie les moindres fluctuations d’intensité et de tempo. Le premier enregistrement de la Suite pour piano ou clavecin (2008) de Karol Beffa contraste v iolemment avec l’œuvre précédente. Peu suspect d’attirance pour le pr incipe de la tabula rasa et en J.B. core mo ins pour la doxa postsérielle, le compositeur JIANG YI français appuie son écriture LIN sur di verses traditions. Une tradition post-ravél ienne, ma is aussi empruntant au jazz et au minimalisme sédu it d ’emblée par sa force propulsi ve et narrati ve. Mordant, suffocant, le Petrouchka de Vanessa Benell i Mosell s’inscrit dans la mode S.F. actuelle de la surenchère véloce. Faut-il que la moder« Masques». Œuvres de nité de l’œuvre se confonde VANESSA une eff icacité d igitale Szymanowski, Scriabine, BENELLI MOSELL avec maximale ? Assurément, ce Debussy, Schubert, Liszt et Lü Wencheng Petrouchka i mpressionnant Solaris Records OL14101. 2014. ri valise avec celui d’une Yu ja 1h12’ Wang. On y admire la maîtrise, les moyens techniques, Le masque peut être celu i de la d iss imulation, mais la netteté fanat ique. Pouraussi l’ob jet permettant les tant, ne s’ag issa it- il pas à jeux de lumières les plus inl’or igine de poupées matenses. Né en Allemagne, le giques d’un théâtre de marionnettes ? jeune pianiste chinois a réuni sous ce thème des pièces qu’il Dans ce disque aussi intelanime avec une heureuse dis- «(R)évolution». ligemment composé, la piacont inuité. Ses Masques de Stockhausen: Klavierstücke niste montre à quel po int la Szymanowsk i sont narratifs I à IX ; Beffa : Suite pour disponibilité intellectuelle et et répugnent aux brumes piano ou clavecin ; mus icale peut transcender i i i . Stravinsky : Trois néo- mpress onn stes des un ivers si éloignés les uns Masque op. 63 n°1 de Scria- mouvements de Petrouchka des autres. D’où la justif icabine surgit dans un debus- Decca 4811616. 2015. 58’ tion du t itre de l’album : sysme or ientalisant qui Formée en Italie (Franco «(R)évolution». S.F.
PFAFF
TRISTAN
« Piano Encores». Œuvres de Gershwin, Brahms, Sibelius, Wagner, de Falla, Albéniz, Grieg, Scriabine, Puccini… Aparté AP107. 2015. 1 h 03’
L’art du « bis » n ’est pas donné à tout le monde et le v irtuose qui se lancerait au jourd’hui dans un récital entièrement consacré à ces « friandises musicales » s’exposerait probablement à la critique. Le plaisir ne peut pas être léger car il nous faut au jourd’hui du consistant, du roboratif . En somme, ce que l’on s’inflige au concert et que l’on n’accepterait pas au restaurant … Le « pap illonnage » qui était permis il y a quelques décennies, sous les doigts d’un Horow itz, notamment, est au jourd’hu i, passé de mode. Après deux albums Liszt et Schubert remarqués (et heureusement nullement indigestes), Tristan Pfaff présente, avec un ordre subt il, une série de p ièces qui ne dépassent guère les quatre minutes. Plutôt que de nous infliger Moszkowsk i et tant d’autres étincelles véloces et parfois un peu creuses, l ’interprète a cho isi de pet its uni vers clos et quelques surpr ises . Ains i, pour une Danse rituelle du feu de Falla, on écoute en miroir les charmantes Variations sur un chant populaire russe de Kabalevsk i. Le Tango d ’España d’Albéniz, si aisément emprunté par les guitaristes fait écho à la Marche funèbre pour une marionnette de Gounod, pièce plus reconna issable que l’intriguant Foglio d’album de Puccini. Toutes [
juillet- août 2015
PIANISTE n°93 75
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CHRONIQUES DISQUES, DVD RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE ces partitions sont suff isamment typées et caractér isées par le jeu Tristan Pfaff pour insp irer y compr is les pianistes amateurs (Nocturne op. 9 n°2 de Chopin, Gymnopédie n°1 de Satie, Prélude BWV999 de Bach, Valse triste de Sibelius…). Qui plus est le soin apporté aux détails, à la var iété des respirations ( Montaigu et Ca pulets de Prokof iev, Der Dichter spricht de Schumann) est des plus convaincants. Une très belle idée qui conf irme la valeur d’un artiste à la forte personnal ité. S.F.
DVD JOHANN SEBASTIAN
BACH
Concertos pour piano BWV 1054, 1056, 1058, 1061, 1063, 1065 Martha A rgerich, Nicholas A ngelich, Frank Braley, Khatia Buniatishvili, Gvantsa Buniatishvili, Michel Dalberto, David Fray, Nelson Goerner, David Kadouch, Stephen Kovacevich, Dong-Hyek Lim, Gabriela Montero, Akane Sakai, Mauricio Vallina, Lilya Zilberstein, Orchestre de chambre de Lausanne
raisons, cette product ion est une réussite. La prem ière tient à la réalisation d’Andy Sommer. Le fait d’avoir f ilmé aussi près des clav iers, de sui vre avec autant de fluidité les gestes, tout cela donne une belle impression de naturel. Plus encore, les amateurs de piano scruteront attent i vement les positions (Kovace v ich assis très bas, par exemple), les jeux (Goerner, Argerich) avec d’autant plus de plaisir lorsque l’écran se di v ise et permet de sa isissantes comparaisons. Goerner joue tout en légèreté, effleurant le piano. Dav id Fray est comme agrippé au clav ier, Dalberto et Kadouch s ’en éloignent. Zylberstein et Argerich sont dans la pulsation. La seconde ra ison de cette réussite est la distribution variée des concertos à un, deux, trois ou quatre clav iers. Le mélange est si ré jouissant que les artistes eux-mêmes s’amusent quand, à leur tour, Goerner, Dalberto et les sœurs Buniatichv ili assurent les «tournes» de leurs confrères et consœurs. Ce jeu de chaises musicales se déroule en avantplan de l’Orchestre qui joue debout à la man ière de certains ensembles baroques . L’impulsion donnée est sa isissante, car tout fonctionne grâce aux regards . Les concertos sont rythmés d’improv isations sur Bach de Gabriela Montero. Une vraie fête du piano. S.F.
LUDWIG
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Bel Air Classiques Bach 115 - 2 DVD. 2013. 2 h 57’
En 2013, la salle Pleyel accue illit un marathon de concertos de Bach, assoc iant des «stars » de la scène internationale et quelques jeunes protégés de celle-ci. Près de trois heures de concertos qu i pouvaient laisser craindre une certaine lassitude. Pour deux
76 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
Intégrale des concertos. Ouverture de Coriolan. Orchestre de chambre de Lausanne, piano et dir. Christian Zacharias
JAZZ
LUDWIG
VAN BEETHOVEN
ANTOINE
HERVÉ
Bel Air Classiques BAC114. 2012. 4h05’
Le musicien a poussé à un tel degré l’art de la simplicité et du chant que l ’on ne s’étonne même plus que les cinq concertos de Beetho ven ne forment qu’un seul opus. Et pourtant, que de distances séparent les premiers opus mozart iens de « L’Empereur» ! D irigeant du piano, Zachar ias offre une lecture organ ique des œuvres. Elle est tout entière chambriste, tournée dans le seul dialogue . Le charme et l’élégance du toucher s idèrent. Dans les mouvements lents (Concertos nos 3, 4, 5), le soliste porte chaque note dans sa propre resp iration. L’interprétat ion est vécue comme une év idence . Le seul bémol prov ient, en vérité, de l’orchestre. L’effectif de cette format ion « Mozart » aurait mérité quelques pupitres supplémentaires à partir du Troisième Concerto. Les v iolons, notamment, en sous-effect i f, ne peuvent créer la pâte sonore que nécessitent les part itions. On se souv ient ici de l’accompagnement du Gewandhaus de Leipz ig et la Staatskapelle de Dresde lorsque Zacharias grava son intégrale audio marquante pour Em i Classics. L’Ouverture de Coriolan est, elle aussi, révélatrice de ce manque de profondeur dans les pup itres. En bis, on se régalera du Presto alla tedesca de la Sonate n°25. Enf in, n’oubliez surtout pas de regarder le documentaire de près d’une heure : il est pass ionnant ! Zachar i as s’exprime avec une s incérité, une humanité qui forcent l’adm irat ion . Il parle avec profondeur de son trava il. Une fo is encore, Andy Sommer sait aller au cœur de la musique. S.F.
«Complètement Stones» RVC 151. 59’
Après Mar ia João P ires dans le Troisième Concerto pour piano, nous retrouvons le même instrument - un piano Erard de 1849 - ainsi que Brüggen et ses musiciens, cette fois-ci accompagnant Martha Argerich qui tentait, pour la première fois, l’expérience en concert . Son jeu est instruct if . Elle cherche à faire chanter l’instrument, à exploiter toutes ses possibilités si différentes du p iano moderne . Le jeu tout en légèreté, ma is exprimant tou jours autant de force passe fort b ien . Le tempérament si puissant de la pianiste s’adapte à l’Erard, puis au dialogue avec l ’orchestre. V isiblement admirat ifs et enthous iastes, les musiciens se donnent sans réserve. L’i mpression est celle d’un Premier concerto vécu avec un tempérament héroïque, un caractère alt ier et passionné. Le jeu libre et conquérant de la pianiste argentine emporte l ’adhésion. En complément de ce trop bref programme, l ’éditeur a a jouté le même documenta ire sur l ’histo ire de l ’orchestre (The Breath of the Orchestra), que dans le DVD de Maria João P ires.
Certes, on ne présente plus Antoine Hervé, en part iculier aux lecteurs de Pianiste . Ses « Leçons de jazz » parues en DVD ré jou issent auss i tous les publics, car l’on découvre à chaque fo is des esthétiques que l’on ne croyait compréhensibles que par les seuls spécialistes. Si vous êtes fam iliers avec les albums des Roll i ng Stones, tels « Sticky F ingers», « Beggar’s Banquet», «Aftermath» ou «Out of Our Heads», vous décou vrirez une facette nouvelle de son talent p ian ist i que car c’est ce réperto ire inattendu qu’ici il met à l’honneur . Sans se départ ir de son approche basée sur la musique classique et le jazz, il prouve avec feeling que le tra itement est décisif, audelà du matériau sollicité. En compagnie de François Mout in, compagnon habituel, à la contrebasse, et de « P i pon » Garci a à la batter ie, l ’espr it de la soul mus ic et du blues se ta ille la part du l i on à travers douze emprunts au célèbre groupe de rock . La mus ical ité constante, la r igueur d’une impeccable m ise en place, l ’ év i dente l i berté chantante que déplo i ent Antoine Hervé et ses acolytes font de cette nouvelle aventure une réuss ite dont l’or iginal ité et la fraîcheur emportent l ’adhésion sans coup fér ir.
S.F.
Jean-Pierre Jackson
Concerto pour piano n°1 op. 15 Martha A rgerich (piano Erard de 1849), Orchestre du XVIIIe siècle, dir. Franz Brüggen
NIFC DVD-004. 2012. 1 h 32’
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VIJAY IYER
« Break Stuff » ECM 470 8937. 1 h 11’
lapidaires, tantôt efflorescents, d’une articulation tou jours précise, presque scintillante. Avec Stephan Crump à la contrebasse et Marcus G ilmore à la batterie, il a trouvé des compagnons prêts à emprunter avec lui les chemins silencieux où résonnent ses évanescences raff inées, sûres d’elles-mêmes quoiqu’inattendues, qui ne suscitent pas le moindre charme de cet album singulier. J.-P. J.
Ce pianiste américain ne connaît pas en nos contrées la réputation qui devrait être SHAI MAESTRO la sienne. Ce «Break Stuff» est cependant son v ingtième album. Personnalité originale né de parents d’origine indienne, il installe un climat mélodique et harmonique qui n’entretient pratiquement aucun lien avec le langage p ianistique hérité du be-bop, fait d’une grande variété de dynamiques, de phrasés tantôt « Untold Stories » CT01. 46’
Depuis le premier disque en 2012 et «The Road to Ithaca», paru f in 2013, les nombreux concerts dans le monde ent ier et la faveur constante du publ ic renda ient inév itable un troisième album du trio de Shai Maestro. La grande liberté d’interprétation, la poésie indiscutable de ses mélod ies et de ses improv isations, le sens de l’espace sonore et le goût des dynamiques variées s’imposent à nouveau ici avec une grande intelligence au cours de sessions à Paris, à Brooklyn, et d’enregistrements live , dont une version de Painting , présent sur le premier album. Le talent de compositeur de Shai Maestro reste impressionnant, le tr io se fa it entendre plus soudé, les timbres plus recherchés (la contribution du batteur Zi v Rav itz est à cet égard déterm inante), la
concentration plus sere ine, plus maitrisée sans doute. La sensibilité prend une nou velle év idence et la limpidité du toucher s’aff ine encore, ce qui aurait pu paraître impensable. La musique gracile de ce trio de classe compte désormais parmi les plus raff inées qu’i l so it permis de goûter. J.-P. J.
redoutée. Avec « Portraits», Alexandre Saada l ’affronte pour la tro isième fois après «Present» et «Continuation to the End» . S i l ’ob ject if reste sensiblement le même – jouer une musique sincère et libre, proche d ’une émot ion brute, pr ima ire – les moyens mis en œuvre se di vers if ient : cordes pincées (Portait 8 ), jansénisme des phrasés (Portaits 9 et 10 ), ALEXANDRE SAADA plus grande attent ion aux variations dynamiques. Le résultat propose une manière de voyage en tre ize étapes au cœur des ressources du clav ier, dont il est le seul à connaître l ’itinéraire, qui se bâtit en partie le moins volonta irement possible en marchant, mais que toute oreille attenti ve et soucieuse de beautés inso« Portraits » FL 913. 41’ lites indubitablement poétiques ne peut que souhaiter Seul devant un p i ano, l’épreuve est redoutable, et découvrir à sa su ite. J.-P. J.
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L’INVITÉE DE PIANISTE LÉONOR DE RÉCONDO
LA CORDE SENSIBLE La violoniste et romancière vient de faire paraître Amours (éditions Sabine Wespieser), récompensé par le Grand prix RTL-Lire et le prix des Libraires. Un voyage dans le temps au son de la Sonate au clair de lune de Beethoven.
V
Qu’il s’agisse de musique ou d’écriture, je cherche à faire jaillir les émotions que je ressens très profondément. Je ne me suis pas tournée vers Je v is de manière très fragmen- l’écriture par hasard: je travaille sur tée. Je consacre certa ines périodes à la fluidité de la phrase, le rythme, les l’écriture, d’autres à la musique. Je silences. Des aspects que l’on retrouve suis musicienne free-lance, ce qu i dans la musique. me donne cette l iberté . Depu is Le piano est-il un instrument qui quelques années, la littérature occupe vous parle? une place conséquente dans ma v ie. Dans mon roman Amours, le piano occupe une place essent ielle. Le perAvec la musique, vous possédez sonnage de V ictoire, élevé dans une déjà un mode d’expression à culture bourgeoise traditionnelle, a portée de main. Pourquoi ce appris le piano comme il se doit. Mais besoin d’écrire? Pendant mes études, je travaillais au-delà de cet aspect convent ionnel, mon v iolon huit heures par jour et le piano est le moyen par lequel V icdurant cette période, je n’avais ni le toire va pouvoir libérer ses émotions. temps, ni l’espace mental pour écr ire. Cette femme, alors hermétique à Lorsque j’écris, je su is créatrice et elle-même, va ainsi exprimer la pasnon interprète. Je suis seul maître à sion qui l’anime. bord. Mais pour rien au monde je La musique comme moyen ne me pri verais de ce sent iment de de réconciliation entre le corps partage si puissant dans la musique. et l’esprit… Ce sont pour mo i deux act i v ités La musique et plus généralement les complémentaires . Cela aurait été arts de la scène possèdent cette vertu . plus logique que je me tourne vers Le travail sur le geste, la tension menla composition, mais je n’ai aucune tale et physique sont essentiels pour insp irat ion dans ce doma ine . J ’ai chaque instrumentiste. C’est une notou jours beaucoup lu et je me suis tion qui m’intéresse tout particulièsentie appelée par la forme roma- rement: comment se libérer de ce qui nesque. La littérature s’est imposée est bloqué en nous ? à son tour et, après la prem ière pu- Vous développez une écriture blication, je me suis sentie portée que l’on pourrait parfois qualifier par ce désir d’écrire. de charnelle. Est-ce que vous ous êtes violoniste professionnelle et auteure. Comment concilier les deux activités?
L U R B U D E I L I M É
compositeur exploite pour atteindre Krystian Zimerman à la Salle Pleyel il y a au mo ins v i ngt-ci nq ans de la quintessence de son su jet. cela. Il était jeune pianiste et venait Et qu’en est-il de la Sonate de remporter le 1er pri x du Concours au clair de lune de Beethoven Chopin. Il a interprété cette œuvre présente dans Amours? C’est un hasard de la créat ion. Ce avec un sens de la resp iration, du sin’était pas du tout préméd ité. J’avais lence qui a transporté toute la salle . au départ l ’idée que V ictoire allait Cette partition, d’une simplicité bouréussir à se réconcilier avec elle-même leversante, possède quelque chose à travers le piano. Chopin était peut- de l’ordre d’un mouvement perpéêtre dé jà trop contemporain pour elle tuel. Ce n’est pas tou jours le cas dans [le roman se passe au début du XX e siè- la musique de Beethoven, parfo is cle, ndlr] et la musique de Beethoven, cérébrale et complexe . de par son class icisme, correspondait Propos recueillis par Elsa Fottorino bien au personnage . Les triolets qui Ressentez-vous une interaction retrouvez cette dimension dans composent la part ition font écho au À ÉCOUTER trio – les deux femmes et l ’enfant – particulière entre ces deux arts? certaines partitions? > Fondé par Leonor de Récondo, Le travail sur l’émotion représente Peut-être dans les œuvres avec vo i x. qui est au cœur de l ’histoire. l’Ensemble L’Yriade sortira en 2016, un élément central dans mon trava il, Le premier chœur de La Passion selon Cette sonate a-t-elle un sens dans chez Glossa, les Stances du Cid quel que soit le support . C ’est le saint Jean de Bach possède cette pu is- votre histoire personnelle? de Marc-Antoine Charpentier ainsi noyau commun de ma recherche. sance v ibratoire, corporelle que le Je garde le souvenir d’un concert de que ses Airs sérieux et à boire. 82 PIANISTE n°93 juillet- août 2015
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LES PARTITIONS n°93
I. H. Lemoine: Étude op. 37 n°26 / III. N. Rimski-Korsakov: Romance op.15 n°2 / V. F. Chopin: Mazurka op. 67 n°4 en la mineur / IX. F.Chopin: Mazurka op. 63 n°3 en ut d ièse mineur / XIII. J.S. Bach : Fantaisie chromatique / XXI. J.S. Bach : Fugue BWV 903 Avec l’aimable part icipation des éd itions Henry Lemo ine.
Henri Lemoine Étude op. 37 n° 26
DÉBUTANT SUR LE CD PLAGE
juillet -août 2015
1
PIANISTE n°93 I
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Henri Lemoine Étude op. 37 n° 26
II PIANISTE n°93 juillet- août 2015
DÉBUTANT SUR LE CD PLAGE
1
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Nikolaï Rimski-Korsakov Romance op.15 n°2
DÉBUTANT-MOYEN SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
2
PIANISTE n°93 III
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Nikolaï Rimski-Korsakov Romance op.15 n°2
IV PIANISTE n°93 juillet- août 2015
DÉBUTANT-MOYEN SUR LE CD PLAGE
2
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Frédéric Chopin Mazurka op. 67 n°4 en la mineur
MOYEN-SUPÉRIEUR SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
3
PIANISTE n°93 V
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Frédéric Chopin Mazurka op. 67 n°4 en la mineur
VI PIANISTE n°93 juillet- août 2015
MOYEN-SUPÉRIEUR SUR LE CD PLAGE
3
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Frédéric Chopin Mazurka op. 67 n°4 en la mineur
MOYEN-SUPÉRIEUR SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
3
PIANISTE n°93 VII
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Frédéric Chopin Mazurka op. 67 n°4 en la mineur
VIII PIANISTE n°93 juillet- août 2015
MOYEN-SUPÉRIEUR SUR LE CD PLAGE
3
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Frédéric Chopin Mazurka op. 63 n°3 en ut dièse mineur
SUPÉRIEUR SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
4
PIANISTE n°93 IX
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Frédéric Chopin Mazurka op. 63 n°3 en ut dièse mineur
X PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR SUR LE CD PLAGE
4
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Frédéric Chopin Mazurka op. 63 n°3 en ut dièse mineur
SUPÉRIEUR SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
4
PIANISTE n°93 XI
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Frédéric Chopin Mazurka op. 63 n°3 en ut dièse mineur
XII PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR SUR LE CD PLAGE
4
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fantaisie chromatique BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet -août 2015
5
PIANISTE n°93 XIII
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fantaisie chromatique BWV 903
XIV PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
5
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fantaisie chromatique BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
5
PIANISTE n°93 XV
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fantaisie chromatique BWV 903
XVI PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
5
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fantaisie chromatique BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet -août 2015
5
PIANISTE n°93 XVII
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fantaisie chromatique BWV 903
XVIII PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
5
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fantaisie chromatique BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet-a oût 2015
5
PIANISTE n°93 XIX
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fantaisie chromatique BWV 903
XX PIANISTE n°93 juillet-a oût 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
5
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet-a oût 2015
6
PIANISTE n°93 XXI
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
XXII PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
6
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
6
PIANISTE n°93 XXIII
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
XXIV PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
6
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
6
PIANISTE n°93 XXV
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
XXVI PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
6
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
6
PIANISTE n°93 XXVII
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
XXVIII PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
6
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
6
PIANISTE n°93 XXIX
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
XXX PIANISTE n°93 juillet- août 2015
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
6
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Johann Sebastian Bach Fugue BWV 903
SUPÉRIEUR-EXCELLENCE SUR LE CD PLAGE
juillet- août 2015
6
PIANISTE n°93 XXXI