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PROGRESSEZ À VOTRE RYTHME, VIVEZ VOTRE VOTRE PASSION PASSION !
www.pianiste. www .pianiste.fr fr / Bimestriel mai-jui mai-juin n 2016 n°98
Hélène
J O OU E U EZ E T Z T
G A G GN E N Z E Z une m i ni c ch aî ne e t d t d e eu x e nc e ei in t e es s ans f i s il l Y amaha P A GE 65
Une nature rebelle
32 PAGES DE PARTITIONS
TOUS TOU S NIVEAUX NIVE AUX
MOZART SONATE K.310
NOS TESTS Trois quarts-de-queue à petits prix À L’AFFICHE L’AFFICHE Lucas Debargue DOSSIER Les œuvres méconnues des grands génies
(2e ET 3e MOUVEMENTS) Bertini l Scheidt Marcailhou d’Aymeric l Scarlatti l l
Avec les conseils d’Alexandre Sorel
JAZZ ST.. JAMES INFIRMARY ST IN FIRMARY
Avec Antoine Hervé
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L‘excellence acoustique associée L‘excellence à la perfection numérique www.grand-hybrid.com
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SOMMAIRE N O 98 z MAI-JUIN 2016 LE MAGAZINE 5
ÉDITORIAL Par Stéphane Friédérich
6
ACTUALITÉS Événements, festivals, partitions, livres…
20 À L’AFFICHE Lucas Debargue 26 DOSSIER Œuvres méconnues du grand répertoire 30 EN COUVERTURE Hélène Grimaud
G D / K E N N E H T A M
30
60 PIANOS À LA LOUPE Trois petits quarts quarts-de-queue -de-queue pour budgets réduits et deux claviers portables à prix accessibles 66 CHRONIQUES DISQUES Classique et jazz 82 L’INVITÉE DE PIANISTE Jeannie Longo
LIVRET DE PARTITIONS 32 pages de partitions annotées N M C / / R E I L C E B M O L O C
6
C I S U M Y N O S / E D E O R B X I L E F
20
LA PÉDAGOGIE 43 « VOULEZ-VOUS UNE FORMULE MAGIQUE POUR LA TECHNIQUE TECHNIQUE?? » Par Alexandre Sorel 44 TOUTES LES PIÈCES COMMENTÉES 58 LA LEÇON DE JAZZ d’Antoine Hervé : St. James Infirmary JOUEZ ET GAGNEZ 2 séjours pour deux personnes au Gstaad Menuhin Festival VOIR PAGE 39
D N A L O R
E T S I N
60
26
A I P
mai-juin 2016 n PIANISTE n°98 n 3
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la dolce volta
les liens secrets entre un artiste et une œuvre ont leur label
ROGER MURARO // LISZT
Sonate en si mineur 22/04 27/05 04/06 10/06 05/06 15/07 19/07 30/07
Penboc’h en Arradon Annecy Sully-sur-Loire Berne Vevey Chambord Mauzauges Salon-de-Provence
GEOFFROY COUTEAU // BRAHMS
Intégrale de l’œuvre pour piano seul 23/04 29/04 19/05 19/06 02/07 11/07 19/07 30/07 06/08
Château de Maintenon Théâtre de Dreux Paris - Salle Gaveau Festival Chopin à Nohant Festival Eygalières Festival de Saintes Festival de Radio France et Montpellier Festival Messiaen au Pays de la Meije Menton
PASCAL AMOYEL // CHOPIN
Les grandes Polonaises 30/04 14/05 21/05 05/06 01/07 06/07 08/07 11/07 13/07 22/07 07/08 15/08 19 > 22/08
Le Havre Festival de Fontmorigny Clayes-sous-Bois Paris, Théâtre des Bouffes-du-Nord Saint-Etienne-le-Molard Vermenton Bruxelles Bordeaux Paris, Festival Chopin à Bagatelle Festival de Pontlevoy Uchaux, Festival Liszt en Provence Paris, Festival de l’Orangerie de Sceaux Festival de la Chaise-Dieu (avec l’Orchestre National d’Île-de-France)
estore.ladolcevolta.com
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ÉDITORIAL N O 98 z MAI-JUIN 2016
PIANISTE EST UNE PUBLICATION BIMESTRIELLE SOCIÉTÉ ÉDITRICE : Groupe Altice Media SA au capital de 47 150 040 euros SIÈGE SOCIAL : 29, rue de Châteaudun, 75308 Paris Cedex 09 Tél.: 01 75 55 10 00 - Fax: 01 75 55 41 11 RCS 552 018 681 Paris
PRINCIPAL ACTIONNAIRE : ALTICE MEDIA GROUP FRANCE
PRÉSIDENT DIRECTEUR GÉNÉRAL : Marc Laufer DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : ChristopheBarbier ABONNEMENTS Pianiste - Service Abonnements 4, route de Mouchy, 60438 Noailles Cedex Tél. : 01 70 37 31 53 - Fax: 01 55 56 70 91 Depuis l’étranger : (+33) 1 70 37 31 53
E-mail:
[email protected] www.pianiste.fr/abonnements Tarifs abonnements France Métropolitaine 39 euros - 1 an (soit 6 nos + 6 CD); 69 euros - 1 an (soit 6 n os + 6 CD + 6 DVD)
RÉDACTION DIRECTEUR DE LA RÉDACTION : BertrandDermoncourt Tél. : 01 75 55 43 33 (
[email protected]) RÉDACTEUR EN CHEF : StéphaneFriédérich Tél. : 01 75 55 41 51 (
[email protected])
SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Valérie Jacobs Tél. : 01 75 55 41 53 (
[email protected]) ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : CamilleArcache (stagiaire),SylviaAvrand-Margot,JérémieBigorie, Jacques Bonnaure, Jérôme Chatin (photo), Bernard Désormières, Michel Fleury, Elsa Fottorino, Antoine Hervé(pédagogie),Jean-PierreJackson,Michel Le Naour, Alexandre Sorel, Véra Tsybakov (pédagogie), Philippe Venturini. DIRECTRICE ARTISTIQUE : Isabelle Gelbwachs RÉDACTEUR-GRAPHISTE : Sarah Allien (
[email protected]), PHOTO DE COUVERTURE : Mat Hennek/DG
MANAGEMENT DIRECTEUR GÉNÉRAL DÉLÉGUÉ: François Dieulesaint
DIRECTEUR DÉLÉGUÉ PÔLE CULTURE : Tristan Thomas Tél. : 01 75 55 40 73 (
[email protected])
PUBLICITÉ: Hind Benbirahim (Directrice de clientèle) Tél. : 01 75 55 42 77 ou 06 26 95 86 46 Fax : 01 75 55 16 06 (
[email protected])
N
on, vous ne vous êtes pas trompé(e), votre magazine n’a pas échangé ses rubriques musicales contre des cours de physique et de mathématiques ! Cela étant, le phénomène sonore peut s’expliquer scientifiquement. « Pourquoi un tel préambule ? » me direz-vous. Regardons en détail le parcours professionnel des cinq lauréats du 27e Concours des Grands Amateurs, qui s’est déroulé à l’université Paris-II Assas, le 10 avril dernier. Olivier Korber a remporté les trois prix, ceux du jury des musiciens, de la presse et du public. Il est, dans la vie « normale » (je veux dire, quand il ne fait pas le saltimbanque sur scène pour jouer magnifiquement les 12 Études opus 25 de Chopin, œuvres qui ne servent rigoureusement à rien dans la «vraie » vie), stratégiste des marchés financiers à la Société Générale. Les deux 2e Prix ex æquo imposent tout autant le respect : Julien Cohen convainc dans une superbe Partita n°1 de
Bach. Lui étudie les mathématiques à Cambridge. Étonnant dans l’explosive Suggestion diabolique de Prokofiev, Olivier Dupont est ingénieur financier à la HSBC (dans le secteur de la valorisation des produits dérivés). À ma grande honte, je n’ai pas osé lui demander de quoi il s’agissait… Iskander Bursakov vient de Kazan, capitale de la République du Tatarstan. Son métier de conseiller juridique ne rend pas justice à ses Rachmaninov et LisztHorowitz, pourtant très personnels. Enfin, le dernier lauréat, Emil Simeonov, dirige le département de mathématiques appliquées à l’université de Vienne, en Autriche. Entre Schubert, Scarlatti, Brahms et Liszt, il n’aura pas eu le temps d’exposer ses travaux de recherche, ce qui, curieusement, n’a pas frustré le millier de personnes enthousiastes, qui ont passé un réjouissant après-midi. Sacrés amateurs ! Stéphane Friédérich Rédacteur en chef
VENTE AU NUMÉRO RÉSERVÉE AUX DÉPOSITAIRES DE PRESSE Tél.: 0800 42 32 22
ANCIENS NUMÉROS-VPC: http://boutique.lexpress.fr FABRICATION: Pascal Delépine ( Directeurtechnique) , Marie-Christine Pulejo, Pascale Supernant PRÉPRESSE: Groupe Altice Media
PÔLE GRAND PUBLIC L’Express, L’Expansion, Classica, Lire, StudioCinélive, Pianiste Directeur: Christophe Barbier
GROUPE EXPRESS-ROULARTA Secrétaire général : Richard Karacian Directrice régie : Valérie Salomon Abonnements : Géraldine Leger Directeur des ressources humaines : Richard Karacian
Directrice financière : Sophie de Beaudéan Directeur comptabilité : Gilles Hervo Directrice des éditions électroniques : Sophie Gohier
Directeur achats et services généraux : Thierry Pallu
PIANISTE ET LA SALLE GAVEAU PRÉSENTENT
Au cœur d’une œuvre
Les chefs-d’œuvre du piano racontés et interprétés par Claire-Marie Le Guay DERNIÈRE DATE DE LA SAISON 2016
8 juin 2016 à 20 h 30 SCHUBERT Impromptus opus 90
IMPRIMERIE Roularta Printing. Imprimé en Belgique • Distribution: Presstalis • Diffusion en Belgique: AMP,Rue de la Petite Ile 1 B-1070 Bruxelles Tél: + 32 (0) 252 514 11 - E-mail:
[email protected] N° de commission paritaire : 0917 K 80147 N° ISSN : 1627-0452 • Dépôt légal: 2e trim. 2016 Les indications de marques et adresses qui figurent dans les pages rédactionnelles sont fournies à titre informatif, sans aucun but publicitaire. Toute reproduction de textes, photos, logos, musiques publiés dans ce numéro est rigoureusement inter- dite sans l’accord express de l’éditeur. Ce numéro comporte un CD jeté sur l’ensemble de la diffusion et un encart abonnement sur la totalité de la diffusion kiosque France,
RENSEIGNEMENTS ET RÉSERVATIONS : Salle Gaveau, 45-47, rue La Boétie, 75008 Paris - Tél. : 0149 5305 07. À partir de 18 euros. www.sallegaveau.com
E T S I N A I P R U O P N I T A H C E M Ô R É J
Club
Retrouvez les playlists de sur le
www.clubdeutschegrammophon.com
mai-juin 2016 n PIANISTE n°98 n 5
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CONCOURS PIANO CAMPUS
VIVA ITALIA !
Nicolas Giovanelli, le vainqueur de la compétition.
E I M I O S Y N O H T N A
En février dernier, Nicolas Giovanelli remportait le Campus d’Or. Une médaille décernée à l’unanimité par le jury présidé par Michel Dalberto. Séduit par le talent du jeune Italien de 17 ans, Pianiste lui attribue également son Prix. Entretien.
Q
d’Imola, auprès de Leonid Margarius. J’aimerais aussi J’ai eu un peu de mal à me faire à l’idée que participer à de nombreuses classes de maître, car il est je l’avais remporté. Pour moi, c’était incroya- essentiel de recueillir les enseignements les plus divers. ble ! Piano Campus est le premier concours Quel est votre répertoire? important que j’ai passé. En Italie, les com- Les dernières œuvres que j’ai apprises sont la Sonate « Waldstein » de Beethoven, Après une lecture du Dante pétitions ne sont pas de ce niveau. Comme en aviez-vous entendu parler ? et la Sonate en si mineur de Liszt, des Préludes et Fugues, J’avais tenté le concours d’Astana, au Kazakhstan, où extraits du Clavier bien tempéré de Bach, le Scherzo n°2 Pascal Escande, qui dirige Piano Campus, était membre de Chopin, la Sonate n°2 de Scriabine et divers concertos : du jury. Il m’a invité à y participer. le Premier de Liszt, le Troisième de Beethoven. En ce Pour l’épreuve avec orchestre, les candidats ont moment, je travaille le Concerto n°1 de Tchaïkovski. ue représente, à vos yeux, le Campus d’Or?
er
joué le 1 mouvement du Concerto n°1 pour piano de Mendelssohn et créé une pièce de Lina Tonia. Quelle partition vous a semblé la plus difficile?
Allez-vous tenter d’autres concours ?
Cela me semble nécessaire, déjà pour me faire connaître dans d’autres pays. On ne peut pas faire carrière simplement en Italie, les opportunités de jouer sont trop peu nombreuses.
Elles étaient toutes deux délicates, mais dans un genre différent. C’est la première fois que je jouais une telle œuvre contemporaine, qui était difficile à comprendre. Une réponse immédiate : quel est votre pianiste Heureusement, je m’étais déjà produit avec un orchestre, préféré? même si ce n’était pas dans ce type de répertoire. Pour- Arturo Benedetti Michelangeli. Sa manière de penser tant, j’ai éprouvé beaucoup de plaisir. Je me demande la musique et de jouer répond exactement à ma définition même si je ne préfère pas cela au récital solo ! de la perfection. Parlez-nous de vos études…
J’étudie au conservatoire de Bologne et à l’Académie 6 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
Propos recueillis par Stéphane Friédérich
piano-campus.com
Piano Campus d’Or
Nicolas Giovanelli (Italie) Piano Campus d’Argent George Todica (Roumanie ) Piano Campus de Bronze (Ukraine)
À É CO U T E
R S ur l e C D, p l a g e s 9 e t 10 , N ic o la j ou e l a S on s G io v a n e l l i a B ee t h o v e n , te n °2 7 d e e nr l or s d u c on eg i s t r é e co u r s
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de Vue du châ teau e t t on ser où y, l’église de Talc s. tal i réc ns tai cer donnés
MANIFESTATION
La Clé des Portes
Le château accueillera le public avant les concerts.
oli nom pour ce festival imaginé par Ludmila Berlinskaïa et Arthur Ancelle et installé sur les bords de Loire, entre Talcy et Blois. Si vous aimez les répertoires rares pour piano, sa 4e édition vous comblera alors une semaine durant. Les deux musiciens proposeront en effet Francesca da Rimini de Tchaïkovski à deux pianos, mais aussi des pièces de Liszt, d’Arenski et de Saint-Saëns (26 juillet). Le New Russian Quartet, la jeune harpiste Anaëlle Tourret et le comédien Philippe Chevallier donneront des œuvres de Schubert, de Chostakovitch et de Caplet (27).
J
N M C / R E I L C E B M O L O C E R T Î A M E L L A C S A P
Le 28, les pianistes Nikolaï Majara, Dimitri Malignan, Maria Matalaev et Nozomi Okabe, accompagnés par des lauréats du diplôme de concertiste de l’École normale de musique de Paris, joueront Mascarade d’Aram Khatchaturian. Le 29, un récital sur le thème des « carnavals des animaux » sera organisé avec de nombreux interprètes dans des partitions de Tchaïkovski, de Schubert, de Prokofiev, de Milhaud… et de Saint-Saëns ! Enfin, le 30, c’est l’ensemble baroque Doulce Mémoire qui se produira sur scène. du 26au30 juillet, lacledesportes-festival.com
Les Flâneries musicales de Reims irigée d’une main de maître par Jean-Philippe Collard, la célèbre manifestation créée en 1990 accueillera quelque 1000 artistes pour plus de 50 concerts dans près de 40 lieux différents : la musique classique sera en fête dans un patrimoine exceptionnel. Parmi les musiciens invités : les pianistes Hélène Mercier et Louis Lortie le 24 juin, le pianiste Nelson Freire le 28, le pianiste Édouard Ferlet et la claveciniste Violaine Cochard le 1er juillet, les pianistes Marcela Roggeri et Jean-Philippe Collard le 3, la violoncelliste Camille Thomas avec le pianiste Julien Libeer le 4, le pianiste Seong-Jin Cho le 5, ainsi qu’Emmanuelle Moriat et Jean-Philipe Collard le 11… Bref, une affiche prestigieuse pour un programme grisant !
D
du 23 juin au 23 juillet, flaneriesreims.com
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être accroché par une telle finesse d’interprétation… Taku ya O taki.
Philippe Hattat.
sée à Philippe Hersant, Le Carillon d’Orléans . Cette fois, c’est l’Arménienne Marianna Abrahamyan (2e Prix) qui a donné l’interprétation la plus proche de ce que le compositeur imaginait : « J’ai appré-
Les trois finalis tes.
cié la construction et la dynamique qu’elle a apportée» , a-t-il
Les membr es du jur y.
REPORTAGE
Marianna Abrahamy an.
AU CŒUR DU CONCOURS INTERNATIONAL D’ORLÉANS La 12e édition du prestigieux concours de piano contemporain s’est déroulée du 18 au 28 février dernier. Pianiste avait fait le déplacement.
C
ela fait vingt-deux ans qu’Orléans vit au rythme de ce concours de piano contemporain créé par Françoise Thinat. Aujourd’hui, celui-ci fait partie intégrante du patrimoine de la ville et rayonne dans le monde entier, si l’on en juge par les nationalités des 31 candidats qui ont fait le déplacement depuis Taïwan, la Corée, le Canada… Accueillis par des familles orléanaises le temps des épreuves, ils sont venus donner le meilleur d’eux-mêmes dans un répertoire dédié aux œuvres des XX e et XXIe siècles. Mais que cherchent-ils dans cette compétition, l’une des seules au monde de ce type? Pour comprendre leurs moti vations, retour sur les premiers jours. Côté public, curiosité puis fascination. Une candidate monte sur la scène de l’Institut, lieu des épreuves de sélection, se dirige vers l’un des deux pianos, place toutes sortes de percussions de part et d’autre de l’instrument. Pendant huit minutes, elle passe du clavier aux cloches et lames, se saisit de baguettes, s’empare du clavier… Un ballet autant visuel qu’auditif. D’autres pianistes optent pour un 8 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
support électronique ou dévoilent d’infinies ressources sonores du meuble ou des cordes par des effleurements, des tapotements, des grattements, des coups violents, sans compter d’improbables jeux de pédales. Certains jettent la partition à terre après avoir joué. Pas nouveau, mais toujours amusant comme jeu de scène. Cette première épreuve avait notamment pour contrainte la création d’une pièce récente écrite pour eux ou par eux. Cet aspect unique est recherché par plusieurs interprètes, également compositeurs, comme l’Ukrainien Vitaliy Kiyaytsia. Sortir des sentiers battusi
Durant trois jours, ces passionnés ont fait découvrir leurs mondes avec la plus grande liberté. « Le défi est important. Pour les autres concours, on peut roder son programme pendant des années. Pour se présenter à Orléans, il faut monter un programme de trois heures d’œuvres qu’on ne joue nulle part ailleurs, alors, passionné, oui, il faut l’être », explique Orlando Bass, un
candidat français. Mais comment le devient-on ? Cette musique, il l’a découverte seul, pas grâce à un
professeur, ni même pendant ses études. Poussé par sa curiosité, il s’est formé… sur Internet ! « J’ai écouté, cherché des partitions à l’autre bout de la Terre, découvert par moi-même… »
S’inscrire ici est un vrai choix, impossible de tricher. Les quelques candidats qui avaient hésité à s’éloigner des sentiers battus ont été recalés. À Orléans, il faut jouer le jeu. Au terme de trois épreuves, trois finalistes restaient en compétition face au jury présidé par Jean-François Heisser. Au Théâtre d’Orléans, ils ont été départagés à l’issue d’un récital. Premier morceau imposé, le Concerto pour neuf instrument s o pus 24 de Webern. Le Japonais Takuya Otaki (1er Prix) a déployé une palette de sonorités magnifiques, en connivence avec l’ensemble Court Circuit dirigé par Jean Deroyer. Comment ne pas
commenté. Le troisième finaliste, le Français Philippe Hattat (3e Prix), qui a davantage brillé dans les épreuves précé-
prix mis en jeu par les partenaires. « Difficile d’être au top jusqu’au bout » , constatait un candidat. « Il a tout donné dans les trois tours d’avant. »
Bien sûr, il ne faut pas s’attendre, en écoutant de la musique contemporaine, à des grandes phrases lyriques ou des épanchement romantiques. Mais on ne doit pas craindre de s’aventurer dans un monde différent où tout est à découvrir. Se lancer vers de nouveaux horizons peut se révéler passionnant. Isabella Vasilotta, récemment nommée à la direction du Concours d’Orléans, revient sur Brin d’herbe, une compétition destinée aux plus jeunes: « Ils adorent ça et s’amusent beaucoup avec le piano. Ils jouent, dans tous les sens du terme, tout en montrant un degré d’exigence musicale et technique. »
L’émotion était grande lors de la cérémonie de clôture. Un hommage chaleureux a été rendu à Françoise Thinat, qui a passé le flambeau à Isabella Vasilotta : « Elle saura assurer la continuité en s’appuyant sur le passé, tout en l’inscrivant dans le futur. » De nouvelles
orientations ont déjà été prises, qui élargiront davantage le champ d’action du concours. Sylvia Avrand-Margot La salle de l’Institut d’Orléans. E M U A G E N N E I T É : S O T O H P
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Fazil Say.
P D S
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Lille piano(s) festival lassique, jazz, ciné-concert et manifestations dédiées au jeune public… Un concentré de pianos en trois jours ! Et un fil conducteur pour cette 13e édition : Bach et Mozart. Une quarantaine d’artistes et des lauréats de concours internationaux joueront de tous les claviers au cours de 30 concerts répartis dans toute la ville, et parfois accompagnés par l’Orchestre national de Lille. Quelques artistes : Fazil Say dans sa musique et le Concerto n°23 de Mozart, Alexandre Tharaud et les Variations Goldberg, un
C
« marathon Satie » d’étudiants en conservatoire, Wilhem Latchoumia, Cédric Tiberghien, Marie Vermeulin et Vanessa Wagner dans les Concertos pour pianos de Bach et le Concerto « Jeunehomme » de Mozart des sœurs Bizjak, d’Anne Queffélec et de Julian Trevelyan, sans oublier les récitals de Boris Giltburg, de Dmitry Masleev, des duos Jatekok et Édouard Ferlet avec Violaine Cochard, de Claire-Marie Le Guay… du 17 au 19 juin, lillepianosfestival.fr
Les Musicales de Bagatelle our sa 9e édition, la manifestation réunit de nombreux artistes et, parmi eux, des pianistes dont certains sont les parrains des concerts. Ils présentent ainsi de jeunes confrères. C’est ainsi que l’on entendra Charlotte Coulaud dans un concerto de Bach (20 mai) et Nima Sarkechik dans des œuvres de Brahms (21). Le même jour, Vincent Balse participera à un concert thématique « Un petit cabaret… », avec notamment la pianiste Stéphanie Fontanarosa. Et, le 22, Yannaël Quenel jouera dans la « Fantaisie pour petites et grandes oreilles ».
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du 20 au 22 mai, lesmusicalesdebagatelle.com
MUSIQUE & VIN AU CLOS VOUGEOT Le programme de ce festival prestigieux au cœur du grand vignoble de Bourgogne attire de nombreux solistes internationaux. Parmi les pianistes, notons la venue de Michel Dalberto accompagnant le violoniste Renaud Capuçon et le violoncelliste Charles Hervet (19 juin, au château du Clos Vougeot). Le claveciniste Patrick Ayrton participera à un concert dédié à l’œuvre de Bach (24 juin, au château de Meursault). du 18 au 26 juin
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Paris – Tél. 01 43 58 05 45 Boulogne – Tél. 01 46 10 44 77
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EN BREF Kit Armstrong jouera le 16 juil-
let, dans le cadre du festival de la Vézère, à Brive-la-Gaillarde, la Sonate en si mineur de Liszt et les Variations Goldberg de Bach. T U O R G S A L O C I N
COMPTE-RENDU
UN PROJET DE MAÎTRE Fin mars, le pianiste Benjamin Grosvenor donnait une masterclass et un récital dans les salons de la Fondation Dosne-Thiers, à Paris. Un événement imaginé par Casio pour promouvoir son clavier numérique GP-500 conçu avec Bechstein.
L
a firme de claviers numériques Casio a développé, en collaboration avec le prestigieux facteur de pianos acoustiques Bechtein, une série d’instruments haut de gamme que Pianiste a présenté dans son n°94. Pour la faire connaître au grand public, elle a mis sur pied un événement pédagogique, avec comme porteflambeau Benjamin Grosvenor. Qui mieux que lui, en effet, aurait pu adhérer à un tel projet ? Le pianiste anglais de 26 ans explique que, durant ses années d’études, il a souvent dû travailler sur un cla vier numérique. À l’époque, il a été obligé de transformer son jeu
pour tirer le maximum de l’instru- dans le 9e arrondissement de Paris, ment. Aujourd’hui, il constate qu’il se prêtait bien à l’événement, mais… peut conserver son toucher : « Alors nous ne pouvons que rapporter les que je ne change rien à ma technique, propos de l’intéressé, les journa je retrouve quasiment la même sensa- listes étant restés derrière la porte. tion que sur un piano acoustique . » « D’abord, j’étais impressionné, mais Un échange enrichissant
Pour débuter cette journée, Benjamin Grosvenor s’est prêté au jeu de la classe de maître et a fait ainsi ses premiers pas en tant que pédagogue. Face à lui, cinq élèves en cycle de perfectionnement dans les CRR de Lyon, de Montpellier, d’Avignon, de Lille et de Nantes. Le cadre intimiste des salons de la Fondation Dosne-Thiers, nichée Benjamin Grosvenor (à gauche) avec un élève.
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10 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
cela s’est vite transformé. J’ai vraiment aimé échanger avec ces jeunes, leur donner des conseils, même si c’était très court », commente Benjamin
Grosvenor. Lui-même se souvient d’avoir bénéficié de ceux de Stephen Hough ou de Leif Ove Andsnes dans les mêmes conditions. Quel bénéfice peut-on tirer d’une si brève rencontre ? « En peu de temps, on
pénètre dans l’univers d’un pianiste, un peu comme si celui-ci ouvrait une fenêtre. C’est enrichissant autant pour l’élève que pour le maître . »
À la suite de cet après-midi pédagogique, l’un des cinq étudiants a donné un récital. Puis ce fut au tour de Benjamin Grosvenor de jouer : d’abord, la Sonat e n°2 de Chopin sur un Bechstein, puis deux œuvres de Liszt et de Grainger/Gershwin sur un GP-500 de Casio. Oups : problème de réglage resté sur Listener 3 au lieu de Player. Après un petit ajustement, le pianiste anglais a pu mettre en valeur les multiples facettes du clavier numérique. De quoi être conquis. Sylvia Avrand-Margot
festival-vezere.com
Le 20 juin, à la Philharmonie de Paris, Boris Berezovsky se produira sous la direction de JeanClaude Casadesus, à la tête de l’Orchestre national de Lille. Il y donnera le Concerto n°2 de Chopin. Seront également proposés l’ouverture de La Force du destin de Verdi, les Métaboles de Dutilleux et le Boléro de Ravel. philharmoniedeparis.fr
Les 10 et 11 juin à Maastricht, aux Pays-Bas, Didier Castell-Jacomin a imaginé un petit festival de deux jours. Trois concerts : « Ombres et Lumières » avec le Quatuor Marsyas (Clara et Robert Schumann, Brahms); « Heure exquise » avec les pianistes Joël Capbert et Melaine Dalibert (Milhaud, Lutoslawski…), la violoniste Elena Lavrenova et le pianiste Ashot Khachatourian (Lekeu) ; et, enfin, « Les Lumières en musique » avec la soprano Laurence Malherbe et la pianiste Michèle Pondepeyre (Scarlatti, Rameau, Mozart…). www.theateraanhetvrijthof.nl Geoffroy Couteau interprétera la Sonate n°13 de Beethoven et
des pièces de Brahms, le 19 mai à la salle Gaveau. Ce récital s’inscrit dans la saison des concerts Philippe Maillard. sallegaveau.com Didier Castell-Jacomin.
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Ë O N A L E D E N I T S I R H C
MUZA RUBACKYTÉ
Le piano noble En mars, à Gaveau, la pianiste lituanienne a offert un magnifique récital, avec des œuvres de Schumann, Ciurlionis et Prokofiev, qu’elle a transfigurées.
L
a noblesse du jeu de Muza Rubackyté est saisissante. L’ Arabesque opus 18 de Schumann, avec laquelle elle a ouvert le concert, a captivé le public par la grandeur et la grâce singulière du son. Avec les 18 miniatures du Carnaval des animaux , la pianiste lituanienne a dévoilé une autre facette de son jeu. Elle a insufflé à chaque phrase un
tempérament, une allure, de sorte que son discours musical ne nous a pas échappé. Elle a fasciné d’autant plus le public qu’elle a construit, à partir de ces fragments, un accelerando gigantesque, maintenant une tension constante. Pierre angulaire de son récital (et grande découverte pour la plupart), les Pièces pour piano de Mikalojus
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FESTIVAL DE LA VÉZÈRE
Konstantinas Ciurlionis (1875-1911) occupaient le cœur de son programme. Muza Rubackyté, en tant qu’ambassadrice de sa musique, œuvre pour mieux faire connaître le répertoire de son compatriote. Les Nocturnes et Préludes ont donné un aperçu de l’évolution du compositeur lituanien, d’un style romantique à des pièces aux rythmes et aux modalités plus contrastés. Le jeu viscéral de la pianiste, puisant dans les nuances et accentuant les contrastes, ne pouvait qu’aiguiser notre curiosité pour la musique de son pays. Pour clore son concert, Muza Rubackyté a fait écho à l’inventivité et au tourment des œuvres de Schumann avec la modernité et la fulgurance de la Sonate n°6 de Prokofiev. Ce qui s’impose à nous, au regard de ce panel musical offert par la pianiste, c’est sa manière de s’approprier avec justesse les œuvres. Un très beau moment. Camille Arcache
EN BREF Katia et Marielle Labèque se produiront le 22 juin au Théâtre du Châtelet. Leur spectacle, intitulé « Love Stories », est bâti autour du mythe de Roméo et Juliette. Elles joueront West Side Story dans la version que Leonard Bernstein a fait arranger pour elles, puis Star Cross’d Lovers de David Chalmin dans une chorégraphie pour sept danseurs de Yaman Okur. chatelet-theatre.com Le 1er juin, Lars Vogt donnera un récital à l’Auditorium du Louvre. Il jouera les Variations Goldberg de Bach et la Sonate opus 111 de Beethoven. louvre.fr/musiques
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PIANO À SAINT-URSANNE
EN BREF
PIETRO DE MARIA LA TOUCHE ITALIENNE
Adam Laloum interprétera des
œuvres de Mozart, de Chopin et de Schumann, salle Rameau, dans la saison Piano à Lyon, le 10 juin.
Le pianiste est l’« invité spécial » de la 13e édition de ce festival international qui se déroule dans le Jura suisse. Encore peu connu en France, celui-ci a gravé l’intégrale Chopin et le Clavier bien tempéré de Bach pour Decca. Rencontre.
Q
ue signifie « Invité spécial »?
Justement, je croyais que vous alliez me donner la réponse ! En vérité, je me produis en récital, en ouverture du festival, puis en concerto, à sa clôture. Scarlatti, Clémenti et Chopin : n’est-ce pas un choix étrange pour un récital?
Oui, en effet, il n’y a pas de relation entre Scarlatti et le reste du programme. En fallait-il une ? En tant qu’Italien, cela m’amuse toujours de présenter des œuvres de compositeurs de mon pays quand je joue à l’étranger. On connaît peu Clémenti, musicien très sous-estimé, auteur de plus de 50 sonates dont une quinzaine sont des chefs-d’œuvre. D’ailleurs, selon Schindler, le secrétaire de Beethoven, ce dernier préférait celles de Clémenti à celles de Mozart. Je crois même que Mozart était assez jaloux de lui, car il gagnait beaucoup plus d’argent que lui ! Vous avez choisi la Sonate en si mineur opus 40 n°2 de Clémenti…
C’est son « Appassionata » ! Imaginez le concentré d’écritures dans cette musique, car Clémenti est né deux ans après la mort de Bach et a disparu quatre ans après celle de Schubert. Sa musique passe de la fin du baroque au romantisme ! Et Scarlatti : comment sélectionner six sonates parmi 555?
pianoalyon.com Irina Lankova se produira à la
I R R E F O D R A N O E L
L’interprétation est sujette aux modes. Aujourd’hui, beaucoup de pianistes se croient obligés de faire quelque chose d’original à chaque fois que se présente une note longue dans un concerto de Mozart. Est-ce réellement utile ? À l’inverse, il ne faut pas exagérer la sobriété du jeu et doser avec justesse l’ornementation.
Trouver des sonates qui soient Au concert de clôture du festival, moins belles que les autres n’est pas vous donnerez le Concerto n°2 évident. Il faut aussi qu’elles soient de Chopin. De plus en plus contrastées. J’ai par ailleurs envie de d’interprètes tentent l’expérience jouer des pièces que l’on entend peu. d’un piano ancien dans ce type J’en ai découvert quelques-unes avec de répertoire. Pas vous? mon professeur, Maria Tipo, grande J’habite non loin de Florence où se interprète de Scarlatti. trouve l’Accademia delle fortepiano, Vous enseignez aussi. Qu’apportent une institution qui possède une imles sonates de Scarlatti sur le plan pressionnante collection de pianos pédagogique? anciens originaux et restaurés. Il faut Les sonates améliorent la légèreté jouer sur ces instruments pour comet la vitesse de jeu ainsi que la clarté prendre le son de l’époque de Chopin. d’un toucher non legato. Qui plus Mais ils sont très différents des claviers est, on travaille en détail les plus modernes, au niveau de l’enfoncement petites nuances. du toucher, de la rapidité, de la dynaQuelle est la part de liberté mique. Ils nécessitent de développer dans l’interprétation des œuvres une technique particulière qui n’est classiques? pas la mienne. Je m’en tiens donc au piano moderne.
LE PROGRAMME DU 2 AU 12 AOÛT Les invités: Pietro De Maria (2 août), François Chaplin (3), Varvara (4), Marc Laforêt et l’écrivain Jean-Yves Clément (5), le violoncelliste Henri Demarquette et le pianiste Vassilis Varvaresos (6), le duo Elena Bobrovskikh et Valentine Butard (7), Jean-Marc Luisada, le même jour, puis à nouveau Vassilis Varvaresos et le philosophe Michel Onfray (9), Giovanni Bellucci (10), la violoniste Priscille Reynaud et le pianiste Thierry Ravassard (11), Pietro De Maria et Varvara accompagnés par l’Orchestre international de Genève dirigé par Alexei Ogrintchouk (12).
Quels sont vos projets discographiques?
Jouer, voire enregistrer, les Variations Goldberg de Bach, graver les sonates pour violoncelle et piano de Beethoven avec Enrico Dindo, réaliser un projet avec le compositeur italien Ruggero Laganà… J’ai du pain sur la planche, comme on dit ! Propos recueillis par Stéphane Friédérich
crescendo-jura.ch 12 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
salle Gaveau, le 10 mai. L’Orchestre de chambre Nouvelle Europe (dir. Nicolas Krauze) l’accompagnera dans le Concerto en mi mineur de Chopin. sallegaveau.com
Le 6 mai, Dominique Merlet sera au Château de Pibarnon, illustrant en musique le PiBar Éphémère au cœur des vignes de Bandol. Au programme, la Sonate « Appassionata » de Beethoven. Renseignements : 0494 901273 Jean Muller offrira un récital à
la Philharmonie du Luxembourg, le 9mai. Au programme, les Varia- tions Goldberg de Bach, la Bar- carolle n°3 d’Iván Boumans, des Études de Ligeti et la Sonate pour piano n°1 de Brahms. philharmonie.lu Grigory Sokolov donnera un
concert à la Halle aux Grains, à Toulouse, le 3 mai, avec des œuvres de Schumann et de Chopin. grandsinterpretes.com Alexandre Tharaud jouera Scar-
latti, Beethoven, Rachmaninov et Chopin, le 11mai, salle Rameau, dans le cadre de Piano à Lyon. pianoalyon.com Irina Lankova.
N O M A H N I A L A
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Nicholas Angelich.
FESTIVAL DE NOHANT
50ans de romantisme
C
haque année, le Nohant Festival Chopin accueille quelque 6000 spectateurs venus du monde entier. Pour son demisiècle d’existence, la manifestation, au cœur de la propriété de George Sand, lance plusieurs événements. Le 3 juin, à la gare d’Austerlitz, une animation exceptionnelle sera proposée autour de Chopin. Seront aussi mis à disposition des mélomanes les enregistrements remastérisés des deux premiers volumes des archives musicales du festival. La liste des artistes invités est impressionnante : Arcadi Volodos, Edgar Moreau, Nicholas Angelich, Nelson Freire, le Quatuor Debussy,
D R A D O R B S A L O C I N
Rémi Geniet, Seong-Jin Cho, Christian Zacharias, Christina et Michelle Naughton, Vassilis Varvaresos, Maxence Pilchen, François Chaplin, Yves Henry, François-René Duchâble, Dang Thai Son, Charles RichardHamelin, Eric Lu, Julien Brocal et Janusz Olejniczak. Sans oublier de jeunes pianistes tels que Florian Noack, Ismaël Margain, Guillaume Bellom, Geoffroy Couteau, le Duo Jatekok et le Prix Cortot 2016. Enfin, des spectacles littéraires et musicaux, des classes de maître animées par Yves Henry, des causeries-rencontres et des conférences seront organisés.
JOHANNES BRAHMS
Concerto pour piano no1 Ballades op.10 Paul Lewis Swedish Radio Symphony Orchestra
Daniel Harding
i d n u m a i n o m r a h r o f a n i l o M p e s o J
du 4 juin au 27 juillet, festivalnohant.com
©
Colmar lance sa 28e édition
P
lacée sous la direction de Vladimir Spivakov, la manifestation rendra hommage au violoniste Jascha Heifetz. Bien qu’elle réserve une place importante aux cordes, les pianos n’en seront pas absents. En témoigne la venue de David Bismuth, d’Andrew Tyson, de Sofia Gulbadamova et de Lilit Grigoryan en musique de chambre (6, 7, 11 et 12 juillet). Du côté des récitals, on suivra évidemment Grigory Sokolov, interprète de Schumann et de Chopin (l7). Dédié à la musique classique et romantique, le festival de Colmar a invité l’Orchestre du Capitole de Toulouse (dir. Tugan Sokhiev) ainsi que l’Orchestre philharmonique de Russie (dir. Vladimir Spivakov). du 5 au 14 juillet, festival-colmar.com
FESTIVAL DE PIANO EN TRIÈVES Imaginé par Karine Grosso, ce festival niché dans le village de Percy, en Rhône-Alpes, rapproche magnifiquement habitants, mélomanes de passage et artistes. Récitals et classes de maître se mélangent avec bonheur. On notera la présence d’un invité exceptionnel, Ivry Gitlis, un hommage à Oscar Peterson, une carte blanche au pianiste Nima Sarkechik, une classe d’impro d’Antoine Galvani… sans compter les concerts de jazz d’Ahn Tuan, de l’Argentine Karin Lechner et de Karine Grosso. du 1er au 6 juillet, piano-en-trieves.com
1 9 1 2 0 9 C M H D C
Un renouveau des formes
Trop novateur pour son temps, le Concerto n°1 pour piano de Brahms, créé à Hanovre en 1859, eut besoin de quelques années pour s’imposer. Les normes du genre y sont redéfinies. L’affrontement traditionnel entre un soliste virtuose et l’orchestre est dépassé au profit d’un traitement équilibré et d’une approche plus “symphonique”. Les Ballades op. 10, sont, elles aussi, issues de cet élan vers un renouveau des formes qui caractérise la production du jeune Brahms.
harmoniamundi.com mai-juin 2016 n PIANISTE n°98
n 13
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FESTIVAL DE LOFOTEN
ENTRE MUSIQUE DE CHAMBRE ET PIANO Knut Kirkesæther.
P
arlez-nous de la création du festival…
P D S
Knut Kirkesæther, le directeur de la manifestation, dont la prochaine édition sera dédiée au piano, évoque son histoire et son principe. Un véritable festival « alterné » est né. En effet, une année, il est dédié à la musique de chambre, et l’année suivante, au piano. Arvid Engegård est le directeur artistique de la première manifestation, et Jean-Efflam Bavouzet, de la seconde.
le Lofoten Festival Strings, un ensemble composé de musiciens pour la plupart solistes au sein de grandes formations européennes.
Le violoniste Arvid Engegård et moi l’avons créé en 2004. Nous proposions plusieurs Quel sont vos publics et les lieux concerts de musique de chambre de concerts ? dans une église. Pour la première En 2015, nous avons accueilli plus édition, nous avions reçu le soutien Quand avez-vous fait venir de 4 000 spectateurs. Certains sont de Leif Ove Andsnes. Pendant quel- Jean-Efflam Bavouzet ? venus de Chine et d’Australie ! C’est ques années, nous avons fait venir Je l’ai entendu en 2008 et je lui ai un tourisme de mélomanes. Les un Steinway de concert, puis en demandé de prendre la direction concerts ont lieu dans des églises en 2007, nous avons acheté notre pro- artistique du festival. Il a réfléchi… bois d’une acoustique remarquable, pre piano, ce qui était plus pratique. deux secondes environ. Il invite des voire exceptionnelle. Propos recueillis D’autres paroisses nous ont imités artistes prestigieux, et nous regardons par Stéphane Friédérich et, aujourd’hui, il y a cinq ou six pia- ensemble les propositions de pronos de concert dans tout l’archipel. grammes. Nous avons à disposition du 11 au 17 juillet, lofotenfestival.com
LES INVITÉS
Les îles Lofoten sont situées au nord de la Norvège.
Les pianistes: Jean-Efflam Bavouzet, Joachim Carr, Bertrand Chamayou, Ingrid Fliter, Nelson Freire, Marc-André Hamelin et Georgy Tchaidze. Les autres musiciens : l’Engegård Quartet, Lofoten Festival Strings et la mezzo-soprano Marianne Beate Kielland.
N E S S E N N A H O J E N R A N H O J
ont choisi des pièces de Chopin, de Ravel, Sogny, Prokofiev, etc. (24). Les sœurs Labèque donneront des œuvres diverses, allant de Schumann à Stravinsky, en passant par Tchaïe a 36 édition du festival s’ouvre kovski, Strauss et Satie (30). Fanny par un prélude à l’Opus (12 mai, Azzuro, quant à elle, accompagnera Fanny à Puteaux) : un récital d’Anna le Quatuor à cordes Van Kuijk Azzuro. Fedorova accompagnant la violondans des morceaux de Haydn, Mencelliste Anastasia Kobekina. Khatia lors d’une carte blanche (17). Le pia- delssohn, Schumann et la création et Gvantsa Buniatishvili proposeront niste Bruno Fontaine jouera avec mondiale du Quintette pour piano des partitions de Brahms, Liszt, Ravel, trois sopranos, les Jérome Sisters (18). d’Anthony Girard (5 juillet). Gershwin et d’Anthony Girard Les jeunes prodiges géorgiens, Ilia du 11 juin au 8 juillet, festival-auvers.com (15 juin). Denis Matsuev se produira Lomtatidze et Sandro Nebieridze,
FESTIVAL D’AUVERS-SUR-OISE
Opus 36
L 14 n
PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
T O L L I M E T S I T P A B N A E J
EN BREF Jonas Vitaud. Z E N I T R A M D R A N R E B
FESTIVAL DE SAINT-DENIS Au sein de la vaste programmation du festival, on notera la venue de Nicholas Angelich en trio avec la mezzo-soprano Karine Deshayes et le violoniste (et altiste!) Renaud Capuçon dans des œuvres de Brahms (29 mai). Jonas Vitaud accompagnera l’ensemble vocal Sequenza 9.3 dans des pièces de Fauré, Vaughan Williams, Poulenc, etc. (4 juin). Adam Laloum et l’Orchestre de chambre de Lausanne (dir. Joshua Weilerstein) joueront le Concerto pour piano n°23 de Mozart (18). du 26 mai au 24 juin, festival-saint-denis.com
À L’ABBAYE DE L’EPAU Le festival sarthois accueille, dans la magnifique abbaye édifiée au XIIIe siècle par Bérangère de Navarre, une programmation pour l’essentiel vocale. Toutefois, il ne faudra pas manquer, le 31mai, la journée « Pianos à tous les étages » : « Qui va piano va alto » avec l’altiste Adrien Boisseau accompagné par le pianiste Gaspard Dehaene. Puis un récital de transcriptions réunira Vanessa Wagner, Wilhem Latchoumia, Cédric Tiberghien et Marie Vermeulin dans des œuvres de Debussy, Stravinsky, Ravel et Varèse. Enfin, on retrouvera Vanessa Wagner avec le musicien électro Murcof dans un étonnant spectacle « classicélectro ». du 25 mai au 1er juin epau.sarthe.com
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N A C A Y A K E M U A L L I U G
ENTRETIEN AVEC… JULIEN BEURMS
Double casquette Le jeune pianiste belge et directeur du Brussels Chamber Music Festival sort son premier disque avec le label Azur. Un beau début de carrière. que les violonistes Tatiana Samouil, Alissa Margulis et la pianiste Éliane Je suis passionné par la musi- Reyes avec l’altiste Dimitri Murrath. que de chambre, et pour cette 3 e édi- On retrouve ce goût des mélanges tion, nous avons choisi le « cœur » dans votre disque qui réunit du romantisme germanique : Brahms, des pièces de Villa-Lobos, Schumann… Il y aura aussi quel- de Ginastera, de Haydn… ques incursions dans le classicisme Pas de thématique, ni de concept ! avec Mozart, Haydn et Beethoven, Mais un seul fil conducteur: les pièces voire des digressions avec Vieux- qui me tiennent à cœur entre deux temps, Tchaïkovski, Rota et Piaz- continents. J’ai découvert la musique zolla. Pour ce dernier, nous accueil- sud-américaine au cours de mes lerons l’Ensemble Astoria à l’occa- études. Les Danses de Ginastera possion de la sortie de son nouvel album sèdent une énergie folle, des dissoconsacré aux œuvres du compositeur nances étonnantes et flirtent parfois argentin. Une partie des concerts avec le piano-bar. Un ami brésilien sera dédiée au répertoire «habituel », m’a fait découvrir l’œuvre de Villaet une autre sortira des sentiers bat- Lobos. C’est un univers radicalement tus. L’Ensemble Kheops, lui, nous différent entre ces deux compositeurs, fera voyager dans un « Prélude à malgré leur proximité géographique. l’Orient-Express », de Beethoven à Propos recueillis par Stéphane Friédérich Rota, en passant par Mozart, Bruch et Dürrüoglu. Enfin, des artistes bien Du 30 septembre au 2 octobre, brusselschambermusicfestival.be connus en France se produiront, tels
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arlez-nous de la 3e édition de votre festival…
Académie internationale de musique de Flaine ette année, l’institution invitera plusieurs enseignants : Françoise Buffet-Arsenijevic, Cécile Edel-Latos, Yoshiko komori et Igor Lazkov. À noter, une classe d’accompagnement au piano de Laetitia Bougnol. Divers concerts seront proposés. Comme tous les ans, l’Académie décernera quatre grands prix dont un dédié au piano.
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du 30 juillet au 13 août, aimdeflaine.fr
mai-juin 2016 n PIANISTE n°98
n 15
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ACTUALITÉS INSTRUMENTS Plus d’infos sur www.pianiste.fr
KAWAI
UNE NOUVELLE SÉRIE ÉCONOMIQUE utre la récente gamme GX et l’offre de prestige Shigeru Kawai, la nouvelle série GL, présentée lors du dernier salon Musicora, propose cinq modèles dimensionnels, du tout petit au grand quart-de-queue : GL-10 (153 cm) testé page 61, GL-20 (157 cm), GL-30 (166 cm), GL-40 (180 cm) et GL-50 (188 cm). Du coup, les pianos GM-10, GE-20 et GE-30 disparaissent du catalogue du fabricant japonais. Si les quatre plus grands GL (de 17000 euros à 25100 euros) sont produits au Japon, le tout petit GL-10 (12000 euros), lui, est fabriqué dans une usine Kawai, en Indonésie. Sa mécanique, la fameuse Millenium III en ABS Carbon, reste toutefois japonaise. La conception et la philosophie de facture de ces instruments sont similaires à celles des pianos GX, plus haut de gamme (touches allongées, limitation des pertes d’énergie, etc.). En revanche, la qualité de certains de leurs composants, comme les têtes de marteaux, apparaît plus ordinaire. La finition du meuble, moins travaillée, est aussi plus économique (pieds non évasés, absence de chanfreins sur le couvercle). Dans des dimensions comparables (166 cm, 180 cm et 188 cm), les prix des nouveaux GL sont 12 à 13 % inférieurs à ceux des pianos GX. Des plus abordables pour des instruments d’une bonne fiabilité et d’un excellent toucher, qui séduiront nombre de pianistes. Nous les testerons prochainement. B. D.
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FAZIOLI
LE F228 ARIA : QUEL PIED ! En février dernier, le facteur italien a présenté le F228 Aria, un magnifique piano à queue monopode. L’instrument subjugue par ses qualités musicales exceptionnelles et son design aérien. Époustouflant !
V
ous souvenez-vous du piano à queue M. Liminal qui avait créé l’événement au salon Musicora en 2006 ? Ce modèle au design futuriste évoquait « un oiseau dont l’aile gauche commence à se déployer et dont l’aile droite est encore collée au corps ». Imaginé par le designer
Philippe Gendre au sein de la société française NYT Line, l’instrument avait été réalisé par le prestigieux facteur italien Fazioli à partir d’un quart-de-queue F183. Dix exemplaires avaient été produits et vendus dans le monde entier. La même année, la conception d’un deuxième modèle assez similaire, mais fabriqué avec la base instrumentale d’un trois-quarts-de-queue Fazioli F228, avait été envisagée. Mais ce n’est qu’en janvier 2015 que le projet s’est concrétisé. Achevé un an plus tard, ce piano d’exception, baptisé Aria, a été présenté en février dernier à l’Institut culturel italien de Paris, en présence du facteur Paolo Fazioli et de Philippe Gendre, dans le cadre d’un concert. 16 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
L’excellent pianiste d’origine maltaise, Stefan Cassar, a mis en valeur les qualités musicales spécifiques de l’instrument, liées à sa construction très particulière. En effet, le fait qu’il soit monopode – au lieu des trois pieds habituels – a induit l’installation d’une coque en carbone sous le piano, qui permet une transmission particulière du son et, notamment, un accroissement des basses, pourtant déjà importantes sur le F228 de série. Quant à la partie haute de la ceinture arrière, d’une forme incur vée, elle agit comme un pavillon de gramophone et augmente les harmoniques et les aigus. Côté esthétique, l’élégance et la légèreté ont été accentuées par l’emploi d’un cuir bleu sombre. Ainsi, l’aluminium brillant du pied et de la coque se détache mieux. Le cadre est de couleur aluminium doux satiné, le cuir de la banquette dédiée est fauve, comme la table d’harmonie. Si l’ensemble mécanique-clavier est quasiment identique à celui du F228, la tringlerie des trois pédales
a été modifiée. Des solutions hydrauliques ont été mises en œuvre, afin d’adapter la forme très particulière du pied central. Son démontage pour le transport s’avère simple, sécurisé et rapide (moins d’un quart d’heure), grâce à un outillage spécifique bien pensé – un berceau en deux quarts de cercle. À l’instar du M. Liminal, l’Aria a la double vocation d’agrémenter des lieux majestueux, tels un yacht, un hôtel particulier, un loft ou un palace, et aussi des salles de concert prestigieuses. Le prix de l’instrument d’exception, produit pour l’instant en un seul exemplaire, n’a pas encore été communiqué. Bernard Désormières M. Liminal.
www.kawaifr.com
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YAMAHA
SALON DE LA MUSIQUE DE FRANCFORT
Compact mais complet !
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emplaçant le DGX-650, le tout nouveau clavier numérique portable DGX-660 de la firme japonaise, d’un poids d’environ 30 kg, est proposé dans deux finitions (noire ou blanche). Il est doté d’une fonction d’accompagnement dans 200 styles de musique et d’un clavier un peu léger de 88 touches GHS (Graded Hammer Standard), qui équipe les modèles P-45 et P-115, premiers prix de la marque. Le DGX-660 accueille également une intéressante entrée micro dédiée aux effets DSP intégrés. Il est donc possible de chanter et de s’enregistrer grâce à l’enregistreur USB. Les échantillons sonores Pure CF Sampling sont toujours d’une confortable
polyphonie de 192 notes, et les effets de réverbération et de résonance ont été améliorés et étendus. Une section Piano Room offre un large choix de sonorités de pianos avec leur environnement virtuel modifiable. Enfin, grâce à l’acquisition du connecteur optionnel BlueTooth UB-BT01, on dispose d’une connexion sans fil
entre l’instrument et un iPod Touch, un iPhone, un iPad ou encore un ordinateur Mac. Un instrument à prix accessible et au goût du jour pour se divertir ! B. D. Disponible au prix de 860 euros. Option connecteur Bluetooth UD-BT01 à 54 euros fr. yamaha.com
La «Muzikmesse» s’est déroulée du 7 au 10 avril. Avant même son ouverture, nous avions obtenu en avant-première quelques infos significatives, parmi lesquelles la production interne de têtes de marteaux C. Bechstein, la présentation d’un piano demi-queue de salon en érable moucheté de C. Bechstein aussi, un prototype audacieux de piano droit innovant de Feurich et un nouveau modèle de clavier numérique de Casio. Pianiste était présent sur le salon. Nous ferons un bilan complet des nouveautés dans le domaine des pianos acoustiques et des claviers numériques dans notre prochain numéro.
PIANO NUMÉRIQUE
Pour le plaisir de jouer
Tout savoir sur le piano numérique B1 : Korgfr.net
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En lisant vos partitions, on constate qu’il s’agit d’une écriture souvent épurée, qui va à l’essentiel…
Ma culture initiale me portait vers une affectivité plus exposée. L’apport de la culture française a affiné mon style. Donner davantage de valeur à chaque note, c’est préserver l’essentiel. Quelles sont les esthétiques du XXe siècle qui vous attirent ?
ENTRETIEN
DES PARTITIONS DE BONNE COMPOSITION ! Abdel Rahman El Bacha est non seulement l’un des grands interprètes d’aujourd’hui mais, on le sait moins, un compositeur dont les œuvres sont publiées aux éditions Delatour France.
D
’où vous vient le goût pour la composition ?
On ne trouve nulle trace d’études de composition dans votre parcours. Pourtant, votre langage est clairement défini, partant du romantisme pour aller vers des harmonies plus ancrées dans le XXe siècle…
Je ne me considère pas comme un compositeur « professionnel ». Je ressens l’écriture comme un moment de liberté. Un instant caché aussi, que je livre au public lorsqu’il décou- J’ai pratiqué la composition avant vre l’une de mes pièces en « bis », l’étude du piano. Je n’ai pas suivi à l’issue d’un récital. D’ailleurs, il de cours de composition mais des m’est arrivé de jouer ma musique par classes d’écriture, notamment celle paresse parce que je n’avais pas eu le que Jacques Castérède consacrait temps de préparer un morceau vir- aux œuvres du XX e siècle. Au Consertuose, propre à épater l’assistance ! vatoire de Paris, Pierre Sancan et Donc vous improvisiez… Claude Pascal m’ont encouragé à Non ! Je n’oserais pas le faire en public. poursuivre dans cette voie. Il paraît Tout ce que je joue est écrit. essentiel de maîtriser l’écriture pour Comment sont nées vos œuvres ? ne pas écrire trop de banalités. La Au départ, il s’agit d’une improvisa- mienne s’est nourrie du répertoire tion dont je trouve la matière inté- romantique, mais je n’ai jamais imaressante. Je l’écris pour m’en rappeler. giné composer des pastiches de Beaucoup de partitions sont nées dans Mendelssohn ou de Schumann. les années 1980. Mes proches m’inci- Je ne cherche pas non plus la noutaient à les publier, mais mon activité vea uté pour la nouveauté et j’ai d’interprète ne m’en laissait guère pourtant l’impression de porter une le temps. Puis j’ai franchi le pas. écriture personnelle. 18 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
Nous avons l’embarras du choix, et les éclatements de styles sont bien venus. Dans le passé, j’ai joué des œu vres d’Alain Louvier, l’opus 11 de Schoenberg et créé aussi le Concerto pour piano de Bechara El-Khoury. Trois immenses compositeu rs du XX e siècle me parlent au cœur : Ravel, Prokofiev et Rachmaninov. Ils sont de grands repères auxquels j’ajouterais Stravinsky, des musiciens sudaméricains et espagnols comme VillaLobos, Mompou, Rodrigo, Granados ou encore De Falla. Avez-vous songé à composer pour les plus jeunes ?
EN BREF DELATOUR FRANCE
TROIS REGARDS… Le petit recueil de Stéphane Michot est une belle découverte. Ce musicien autodidacte étudie le piano vers l’âge de 20 ans. Pianiste et musicologue, il enseigne aussi. Prélude, Klavierstück et Le poète parle sont les trois partitions qu’il propose ici. Ces pièces jouent sur les harmoniques. Embuées mais bien équilibrées, elles ouvrent sur de beaux espaces lyriques préservés dans une tonalité personnelle, même si les titres suggèrent de lointaines réminiscences romantiques. www.editions-delatour.com
Une œuvre pédagogique sera d’autant plus réussie que l’on connaît la personne à laquelle elle est destinée. J’ai écrit des œuvres « occasionnelles » pour mes enfants. Je songe à composer des partitions pour débutants, ce qui est difficile, car elles doivent être belles et faire éprouver du plaisir. Quelles seront les prochaines parutions ?
Des Préludes et chants, un ensemble de partitions avec des styles imprégnés de culture espagnole, de couleurs orientales et de chansons libanaises que j’ai entendues enfant. Celles-ci sont marquées par des modes particuliers. Un autre recueil réunira trois pièces orientales plus longues et plus virtuoses : une danse rituelle, un Bacchus au rythme asymétrique et des variations sur un air égyptien. Propos recueillis par Stéphane Friédérich
Partitions à découvrir aux éditions Delatour France Dix pièces romantiques Le Monde des enfants, six pièces pour piano F. Chopin – Valse posthume en la mineur (ou mazurka), version conçue par A. R. El Bacha
PIANO KALÉIDOSCOPE Ving-deux pièces sont réunies, de Bach à Schulhoff, puisant dans des éditions déjà parues. Un choix intéressant, car nombre de chefsd’œuvre y sont présentés, mais aussi des partitions que l’on trouve rarement dans les recueils de ce type : l’Allegretto D.915 de Schubert, la Sonatine HWV581 de Haendel, un extrait de la Sonate opus 53 n°3 de Kozeluch, etc. Des morceaux « Urtext » qui ne sont pas doigtés. www.baerenreiter.de
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ENCYCLOPÉDIE
LE SON DU SILENCE
Les lauréats du Concours Chopin de Varsovie
M
oi qui n’ai jamais été enfant, j’entre dans la salle immense du Royal Albert Hall à Londres. » À la première
L
e livre de Stanislaw Dybowski (« The Laureates of the Chopin Competitions in Varsaw ») a certes été rédigé en anglais, mais il est des plus instructifs. En effet, pour la première fois, il retrace, de 1927, l’année de la première édition, jusqu’en 2005, presque quatre-vingts ans d’histoire de l’un des plus célèbres concours de piano. Cent dixsept lauréats sont répertoriés (biographies, œuvres interprétées durant les épreuves, comptes-rendus de la presse, interviews de l’époque, etc.) dans l’ouvrage. S’y ajoutent près
plaisir, notamment des pianistes français, tels Bernard Ringeissen, Marc Laforêt, Jean-Marc Luisada, Caroline Sageman, Érik Berchot ou encore Philippe Giusiano. Le musicologue a entrepris un long et magnifique travail d’archiviste qui
amoureux du piano. L’éditeur Selene publie aussi de nombreux enregistrements consacrés à la musiS. F. que polonaise. Éditions Selene, 642 p., ouvrage disponible uniquement sur Internet
PORTRAIT
Glenn Gould ou le piano de l’esprit
É
crivain, éditeur et organisateur de festivals, Jean-Yves Clément a publié plusieurs ouvrages consacrés aux musiciens du romantisme. Comment faire carrière sans Chopin, Liszt et Rachmaninov ? Gould répondit en partie à la question. De la synthèse d’une immense documentation se dresse un portrait des plus originaux, qui inspire une règle de vie, au sens religieux du
BIOGRAPHIE
Erik Satie
C
ritique littéraire et musical, Romaric Gergorin nous présente l’un des musiciens les plus insaisissables de l’Histoire. Attachant et déroutant, Erik Satie jon-
terme, avec tout ce que cela comporte d’originalité et de fanatisme artistique. Jean-Yves Clément décortique le « culte Gould », offrant une réflexion approfondie à partir de l’éducation de l’artiste. D’autres pages sont tout aussi intéressantes comme celles dédiées à l’évolution paradoxale des goûts et à l’obsession de l’enregistrement audio et vidéo du pianiste. Ce livre érudit intéressera l’autodidacte qui forgea moins son style en absorbant celui des autres qu’en les refusant méthodiquement. Occultisme, socialisme, passion pour le Moyen Âge, détestation du romantisme, tout est passé en revue ! Malheureux en amour et sans véritable reconnaissance sociale – il reçoit les
religieux. L’auteur décrit parfaite- civil et revendique le statut d’anarment les années d’apprentissage de chiste libertaire –, le compositeur,
avant tout ceux qui connaissent déjà le répertoire, le jeu et le personnage Gould. Il est, à lui seul, une et rythmé se révèle passionnante. Actes Sud/Classica, 176 p., 16 euros
phrase de sa biographie, la jeune pianiste sud-coréenne H.J. Lim pose déjà le cadre de son histoire. À 12 ans, elle quitte son pays pour venir étudier en France. Le souffle du récit est court, les phrases sont simples et directes. Trop rapides, trop dévoreuses de sons et de silences. Le récit est au pronom personnel « je », un « je » de découverte, d’émerveillement, d’incompréhensions aussi. Le soutien de la spiritualité, un travail immense portent une vie en musique, rythmée d’une écriture fraîche. On lit pêle-mêle les échecs et la rencontre des maîtres tel Henri Barda, l’étude du piano dans un garage, les concours, la Chapelle musicale Reine Elisabeth en Belgique… Ce livre est comme tendu vers l’intégrale des sonates de Beethoven, que H.J. Lim a gravée à 24 ans et qui fit débat (Warner Classics). Il y a des défis moins heureux… Albin Michel, 192 p., 18 euros
provocateur et solitaire, poursuit sa géniale entreprise de mystification sonore. Cette biographie dense va au cœur des angoisses de l’artiste et étudie implacablement son impossibilité à résoudre les dilemmes de ses rapports humains alors que la galerie de personnages qu’il côtoie, issus de tous les milieux, nous sidère. Il veut, comme le dit avec justesse Romaric Gergorin, « sortir de l’histoire de la musique » . Un pari chèrement gagné. Actes Sud/Classica, 176p., 18 euros mai-juin 2016 n PIANISTE n°98
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LUCAS DEBARGUE
La révélation Il n’a décroché « que » le 4e Prix du Concours Tchaïkovski, et pourtant il a éclipsé le nom des trois premiers lauréats. En juillet dernier, le cœur du public russe a chaviré au rythme des éblouissantes interprétations du jeune prodige de 25 ans, inconnu jusque-là des professionnels et des mélomanes. Depuis, sous les feux des projecteurs, il est invité par les plus prestigieux festivals, enchaîne récitals et interviews, et sort son premier disque consacré à Scarlatti, Liszt, Chopin et Ravel. Rencontre.
V
Voici les deux derniers numéros de Pianiste avec, en couverture, Vladimir Horowitz et Radu Lupu. Que vous inspirent-ils ?
Je me souviens de comment Radu Lupu avait interprété le Concerto de Schumann. Dès l’entrée des accords, on entend « tout » : tous les sons et toutes les lignes. C’est aussi surprenant que rare. D’habitude, on perçoit des accords plaqués à l’épaisseur indistincte. Rien que cela est unique. Quant à Vladimir Horowitz, il est mon maître à penser. C’est un magicien, un fantaisiste, un prestidigitateur, un menteur, un artiste, bien davantage qu’un pianiste. Bref, une figure complexe, tournoyante et, à lui seul, une école de civilisation.
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je l’ai découverte, elle ne me parlait absolument pas. Je ne l’ai aimée que progressivement. Alors, pourquoi l’avoir programmée ?
Elle m’intéressait, primo, parce qu’elle contient des centaines de choses passionnantes, deuzio, parce que je suis têtu, et tertio, parce qu’il faut outrepasser son goût. La musique dépasse tout cela. Aimer ou ne pas aimer Rachmaninov ou Mozart, tout le monde s’en fiche ! Je ne crois pas qu’il existe « un » son Mozart, Schubert ou Ravel. Il y a ce qui est bon et ce qui est mauvais, ce qui est ennuyeux et ce qui est captivant. Le péché ultime en musique, c’est précisément d’être ennuyeux. À la preDeux pianistes aussi mière lecture, je lis une partition passionnés par le son belle et qui débute par le silence. que vous-même… L’interpréter, c’est assumer de ne S’agit-il vraiment de son ? Question pas ennuyer son auditoire. difficile. Quand je travaille une œuvre, Comment le captiver ? je me coule littéralement en elle. Mon Certainement pas en faisant des goût ou ma subjectivité en matière mimiques ! Je vous réponds cela parce de son passent au second plan. qu’il paraît que je bouge beaucoup. Oui, mais a priori, vous choisissez Certains trouvent ma manière d’être des œuvres qui correspondent au piano insupportable. On ne peut à votre goût… captiver qu’en montrant la vie de Disons que j’apprends à aimer la musique, le son qui précède et certains morceaux. Parfois, ils sont celui qui suit la note que vous jouez. ingrats comme la sonate de Beethoven Il s’agit de se concentrer, de faire que j’ai présentée au Concours abstraction du trac, d’abord … Tchaï kov ski [Sonate n°7 en ré Le trac n’est pas que le propre majeur opus 10 n°3, ndlr ]. Lorsque du musicien…
Se retrouver tout nu sur scène, c’est gênant, vous ne trouvez pas ? Il y a comme une forme d’exhibitionnisme et, en même temps, une certaine jouissance à l’être. La concentration, c’est la mémoire. Tous les jours, je fais un exercice de mémorisation. Je possède une excellente mémoire et je peux me rappeler les détails de n’importe quelle journée heure par heure. Rena Shereshevskaya, avec qui vous travaillez, affirme que vous avez restitué la Sonate n°3 de Prokofiev de tête, sans l’avoir apprise…
En quoi est-ce exceptionnel ? On écrit aussi que j’ai eu un parcours atypique. En quoi l’est-il ? On me dit qu’il est « normal » pour un pianiste d’être assis dès l’âge de 3 ans devant le clavier, puis de travailler à l’adolescence les Études de Chopin dix heures par jour. C’est stupide ! Vous imaginez Glenn Gould ainsi ? Les petits singes, qui jouent du piano depuis leur enfance, ont été sélectionnés pour porter le nœud papillon. Cela me donne envie de fuir. Céder au conformisme de passer un concours, en l’occurrence celui de Tchaïkovski, n’est-ce pas un peu contradictoire avec vos propos ?
LUCAS DEBARGUE EN QUELQUES DATES Naissance à Paris le 23 octobre 2001 Début du piano au conservatoire de Compiègne, dans la classe de Mme Muenier 2007 Arrêt du piano. Faculté de lettres modernes 2010-2011 Reprise du piano. Études avec Philippe Tamborini 2011 Études au Conservatoire de Paris, avec Jean-François Heisser, études avec Rena Shereshevskaya, à l’École normale de musique de Paris e 2015 4 Prix du Concours Tchaïkovski de Moscou er 2016 1 disque chez Sony Classical 1990
Nullement ! Le principe du concours est intéressant parce qu’il représente une échéance. Nulle échappatoire. Il permet également de se produire sur scène et, pour un pianiste, il n’est pas facile de trouver des engagements. L’épreuve offre des conditions exceptionnelles de jeu. J’étais heureux de jouer dans l’acoustique extraordinaire de la Grande Salle du Conservatoire de Moscou. Précisément, qu’avez-vous éprouvé quand vous êtes monté sur scène ?
Dès que je me suis mis à jouer, j’ai ressenti une sorte d’intimité musicale bien supérieure à celle que je connais dans des petites salles d’une centaine de spectateurs. C’était une sensation déroutante dans un lieu aussi vaste et impressionnant. Quel piano aviez-vous choisi ?
Quatre modèles étaient à la disposition des candidats. J’ai opté pour le CFX de Yamaha, qui était le plus [ mai-juin 2016
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À L’AFFICHE LUCAS DEBARGUE confortable et le meilleur pour les œuvres que je voulais interpréter. Il était très bien réglé, et j’ai retrouvé ma balance sonore.
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Durant le concours, votre rapport avec le public moscovite a été extraordinaire. Certains l’ont expliqué par votre ascendance russe…
Cela n’est pas avéré à 100 % et, de toute façon, si je me sens une attache avec la Russie, c’est moins pour des raisons héréditaires que spirituelles. J’ai découvert la musique et la littérature de ce pays lorsque j’étais adolescent et elles m’ont bouleversé. Il est vrai aussi qu’en Russie, les études musicales sont intimement liées à un cursus artistique plus global…
Comment peut-on imaginer qu’il n’en soit pas ainsi ? En France, la spécialisation à outrance de l’enseignement musical professionnel est absurde et mène souvent à l’impasse, tout simplement parce que la musique « dévore » autre chose qu’ellemême. C’est un monstre qui se nourrit de tous les autres arts. Certains jours, je travaille mieux mon piano en passant des heures dans une bibliothèque. C’est dans ces moments-là que je clarifie ma pensée. C’est autrement plus profitable que de répéter comme un fou un ornement dans une pièce de Chopin – lui, le génial improvisateur – alors qu’il l’aurait peut-être écrit bien différemment le lendemain. Qui sait ? Venons-en à votre formation. On vous dit autodidacte…
C’est faux ! Le malentendu vient du fait que la plus grosse partie du travail se fait seul avec la partition. Je n’ai jamais appris à lire la musique, mais enfant, j’avais un besoin vital d’acquérir cet alphabet. Déchiffrer et jouer, c’était devenu boulimique, addictif. Je lisais et je mettais un maximum de notes à côté avec les moyens techniques dont je disposais, c’est-à-dire pas grand-chose. Harmoniquement, je ne comprenais rien à ce que je faisais. Mes connaissances en théorie musicale étaient minimales. En revanche, j’étais très bon en dictée. Je me suis intéressé à l’harmonie il y a deux ans environ, à la 22 n
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« Certains jours, je travaille mieux mon piano dans une bibliothèque où je clarifie ma pensée. C’est autrement plus profitable que de répéter comme un fou. » même époque où je me suis initié du coup, je n’ai pas rencontré les au jazz. Auparavant, j’improvisais personnalités qui m’auraient aidé. au flair, alors que, paradoxalement, J’ai très mal vécu mon passage dans c’est le style musical qui demande ce cours. C’était la concurrence le plus de bases techniques. totale, la jalousie, l’espionnage entre Vous vous mettez au piano assez pianistes. Tout cela m’était insuptardivement, vers l’âge de 11 ans. portable, et les méthodes de traVous passez par le Conservatoire vail ne m’ont pas convaincu. Je n’ai de Paris. Vous n’en parlez jamais… jamais eu l ’occasi on de présenter Il y a des gens formidables dans cette un programme de récital en entier. institution. J’ai fait l’erreur de ne Vous travaillez avec Rena m’inscrire qu’en classe de piano et, Shereshevskaya. Ne vous a-t-elle
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jamais dit que vous aviez de sérieux problèmes, notamment techniques ?
Jamais! À chaque fois que j’ai abordé un problème technique, elle a ren versé la question en me prouvant que j’écoutais « mal ». Avoir une conscience précise de chaque note jouée est essentiel. Ce n’est donc pas une question de doigts ni de répertoire. Je suis par nature un anarchique de la musique. Elle a libéré en quelque sorte mon écoute et m’a appris à apprendre rapidement et « bien». En effet, lorsqu’on est obsédé par des questions techniques, on ne peut pas se consacrer à l’œuvre que l’on veut interpréter. Progressivement, j’ai assimilé le programme du Concours Tchaïkovski – quatre heures de musique tout de même –, qu’elle m’a proposé de tenter dès notre deuxième cours. Comment déterminez-vous votre répertoire ?
Je fonctionne avec des chocs qui pro viennent de sources diverses comme l’écoute d’un interprète. J’ai envie de partir de ce qu’il a proposé et de reprendre l’histoire pour la poursuivre à ma façon. Je déroule une narration jusque dans les sonates de Scarlatti. On m’a d’ailleurs reproché de les jouer de manière romantique… N’est-ce pas le cas ?
Pourquoi inventer une dichotomie entre les styles ? Arbitrairement, tout ce qui précède la Révolution française serait baroque. On joue donc au tempo tout ce qui appartient à l’Ancien Régime. Tout ce qui succède à cette période serait romantique, marqué par la « naissance» de l’individu. Il est toutefois étrange que le métronome n’ait pas existé à l’époque baroque et que les partitions aient eu si peu d’indications de tempos ou de nuances. On supposait donc que les musiciens allaient comprendre par eux-mêmes. « Jouer droit » est donc absurde dans les répertoires baroque et classique. On ne chante jamais « droit » parce qu’on interprète. Et interpréter suppose de connaître parfaitement le texte pour s’en affranchir. Votre répertoire comporte, comme on l’a entendu lors du Concours Tchaïkovski,
des pièces rarement jouées, notamment de Medtner. D’où vous vient cette passion pour ce compositeur russe ?
Elle est née chez Arioso, célèbre magasin de musique de la rue de Rome, à Paris. Publicité gratuite ! J’allais y dépenser mon argent de poche et j’ai découvert l’œuvre de Medtner à l’âge de 14 ans. J’ai plongé dedans et n’en suis pas ressorti. Sa Sonate n°1 fait explicitement référence au Prélude n°1 du clavier bien tempéré de Bach, et son dernier thème est emprunté à la Sym phonie « Pathétique » de Tchaïkovski. Cette pièce est germanique et russe, avec une construction beethovénienne.
DU 13 AU 21 AOÛT 2016
Parlez-nous de la Ballade n°4 de Chopin, qui figure sur le disque que vous avez enregistré…
La spiritualité de l’œuvre doit surgir dès le début. Les premières mesures sont les plus délicates de la partition. Il me semble qu’il faut travailler la main gauche seule. Chopin a commencé avec cette « sérénade » dont il est nécessaire de retrouver le chant et d’éviter à tout prix une lecture académique. Les accords, presque arpégés, sont ceux d’une guitare ou d’une contrebasse dont la mélodie, au-dessus, serait tenue par une flûte fantomatique. Ces divers instruments se croisent avec des intonations dissemblables. Il faut gérer ces antinomies tout en restant lucide, car les déplacements à la main gauche sont techniquement difficiles. Voilà donc une ballade qui est à la fois une forme sonate et une pièce liée à la variation et à la rhapsodie. Pensez-vous que les pianos modernes soient les plus adaptés pour restituer l’extrême finesse de cette polyphonie ?
Vous touchez du doigt un problème crucial. Aujourd’hui, convaincre un label d’enregistrer un disque sur un piano ancien, ce n’est pas facile. Idem pour les organisateurs de concerts! C’est même aller contre les intérêts de tout le monde, car on construit des instruments de plus en plus puissants, pour que les pianistes et les orchestres jouent encore plus fort. Je préfère évidemment la longueur de son d’un vieux Erard, [ Pleyel ou Bechstein.
ORCHESTRE SYMPHONIQUE ODENSE DU DANEMARK CHEF ALEXANDRE VEDERNIKOV OPÉRA «LA TRAVIATA» Boris Berezovsky David Kadouch Mikhaïl Rudy Anna Vinnitskaya Muye Wu Claire Desert Andreï Korobeinikov Alexandre Kniazev Guillaume Coppola Evelyne Berezovsky
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À L’AFFICHE LUCAS DEBARGUE
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« Travailler son langage fait émerger un style, donc une respiration dans le flot de nos pensées. » Vous jouez également du jazz. Prenons l’exemple du croisement Cela vous donne-t-il davantage des arts dans votre interprétation de liberté dans votre interprétation de Gaspard de la nuit de Ravel… du répertoire classique ? Je suis assez distr ait de nature et La vraie liberté n’est ni politique j’absorbe par conséquent tout ce qui ni spirituelle : elle s’obtient par le passe à ma portée. J’ai trouvé beaulangage, qu’il s’agisse de littérature coup d’idées visuelles et sonores pour – la discipline la plus difficile –, de Ravel dans la peinture tardive de danse, de peinture, de musique, etc. Goya. Je pense à sa toile Le Sabbat Travailler son langage fait émerger des sorcières. Cela étant, je n’ai pas un style, donc une respiration dans d’affinités particulières avec Ravel. le flot de nos pensées. Un artiste Comment cela ? doit en principe discerner ce qui Ce compositeur est adulé, mais est important de ce qui ne l’est pas. d’autres musiciens le mériteraient Il est un trafiquant de ses souvenirs, tout autant, comme Medtner ou en quête de l’émotion juste. Haydn. Ravel est « grand» dans trois [
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œuvres qui font écho à quelque chose d’intime dans sa vie. Gaspard de la nuit correspond à la disparition de son père, le Trio, juste avant son engagement pendant la Première Guerre mondiale, et, enfin, Daphnis et Chloé , qui associe amour chaste et musique sensuelle. Dans chacune de ces pièces, il y a un secret qui m’intéresse beaucoup plus que ceux du Tombeau de Couperin ou des Miroirs. Quand je joue Gaspard de la nuit, j’oublie Ravel. Comment décririez-vous cette partition ? Cette pièce intemporelle s’ouvre sur l’infini. Elle n’a pas de contrepoint, mais la plus grande cohérence harmonique sur la durée la plus longue. Ravel n’a pas composé une autre partition plus riche avec un matériau thématique aussi réduit. Les trois premières notes de Scarbo sont les trois premières notes d’Ondine renversées. Gaspard de la nuit est une œuvre totalement «immobile ». Nous ressentons un tournoiement, et pourtant il faut qu’il ne se soit rien passé. La fin de Scarbo, c’est presque du « rien ». Évoquons vos projets… Je joue la Sonate en si mineur de Liszt. Elle m’a pris du temps pas seulement sur le plan technique, mais également en raison de sa construction monstrueuse, à part dans la production du compositeur. On ne peut pas compter sur l’adrénaline comme pour les Rhapsodies ou les Étudesd’exécution transcendante, car c’est une œuvre métaphysique. Je dois aussi donner beaucoup de concerts en Russie et en Corée avec le Concerto n°2 de Beethoven, le Trio de Tchaïkovski en compagnie d’autres lauréats du Concours Tchaïkovski, les Barcarolles de Fauré, les Fantaisiestücke opus 12 de Schumann et la Sonate n°2 de Szymanowski. Cette pièce est mon projet le plus ambitieux. C’est une partition gigantesque et peu jouée depuis Rubinstein, son créateur, et Richter. Elle est difficile à apprendre, mais elle est puissante et intense émotionnellement parlant. Il faut entrer dans chaque note et accomplir un véritable travail d’esclave du son ! Propos recueillis par Stéphane Friédérich
Lire la chronique du CD page 75.
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DOSSIER
ŒUVRES MÉCONNUES DU GRAND RÉPERTOIRE
MERVEILLES OUBLIÉES C’est un cri de détresse lancé à tous les pianistes et les mélomanes ! Alors que le répertoire est immense, on doit bien admettre que l’on interprète toujours les mêmes « chefs-d’œuvre », les autres compositions restant sur la touche. Pourquoi cette injustice qui fait que de Schumann, on a bien plus de chances d’entendre les Études symphoniques et Kreiseriana que les Chants de l’aube ou les Feuillets d’album ? Que les Sonates n°8, n°14 et n°23 de Beethoven sont nettement plus à la page au concert et au disque que les n°9, n°15 et n°24 ? Éléments de réponse.
L Extrait de la partition de la Sonate D.575 de Schubert. Reproduction avec l’aimable autorisation des éditions Bärenreiter.
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La première raison, assez peu probante, c’est la routine. Le grand répertoire pianistique s’est mis en place il y a bien longtemps, et depuis, des habitudes se sont créées. Un exemple : les éditeurs de Beethoven ont cru bon, pour doper leurs ventes, de donner des titres à quelques sonates. Des bons musicographes ont même pris l’initiative d’associer quelques histoires délicieusement romantiques à certaines musiques. La Sonate en ut mineur opus 13 fut publiée sous le titre de « Grande Sonate pathétique ». En fait, elle n’était pas plus développée qu’une autre, ni plus pathétique que la Sonate en ut mi neur opus 10 n°1, peu connue. Mais le titre associé à l’énergie du 1er mou vement et à la tendresse cantabile du 2e fit la réputation de cette œuvre au demeurant très réussie. Le 1er mou vement de la Sonata « Quasi una
fantasia » en do dièse mineur, avec toujours. Une musique trop abstraite le charmant balancement de ses trio- ne « parle » pas nécessairement. Les lets, évoquait une rêverie amoureuse jeux du son ne suffisent pas à intéau clair de lune. On a pu raconter resser le gros des amateurs. Le succès que Beethoven l’avait écrit en se pro- de la Symphonie n°5 de Beethoven menant avec sa bien-aimée (immor- – outre les célèbres « pompompomtelle) dans le parc d’un château, pom » et la prodigieuse modulation à la brune. Et voilà comment une en ut majeur du dernier mouvesonate à la forme atypique devient ment – tient à ce qu’elle a été consila Sonate « Au clair de lune » – e t dérée comme la « Symphonie du destin». tant pis si les deux autres mouve- De même, chez Haydn, les symphoments n’ont rien de lunaire ! nies à titre ont plus de succès que Concernant la Sonate « Appassionata », d’autres. Dans le 1er mouvement c’est aussi l’éditeur qui la nomma de « La Poule » – Symphonie n°83 –, ainsi, mais le ton fougueux des deux on peut entendre une sorte de « cotmouvements extrêmes suggérait si cot » au hautbois ! bien on ne sait quelle passion brutale que la fortune de la sonate était faite À juste titre ? auprès des amateurs voulant éprou- Ainsi donc, on ne compterait plus les ver de fortes émotions. Car une par- morceaux ou les œuvres dont le succès tie des troupes mélomanes adore se fut assuré par leur titre. Brève énuméraconter des histoires. C’était vrai ration non exhaustive. Chez Mozart, au début du XIX e siècle, ça l’est la « Marche turque » – en fait, un « Rondo alla turca » qui n’est en rien une marche ! – a fait la popularité de la Sonate en la majeur K.331, à cause de ses effets percussifs qui prétendent imiter les musiques des janissaires. Chez Beethoven, la dédicace d’une « bagatelle» vraisemblablement destinée à Therese von Brunswick a été mal déchiffrée. Au lieu de « Für Therese », on a cru lire « Für Elise ». Comme on ne connaissait personne de ce nom dans la vie du musicien,
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on a supposé qu’il lui adressait ainsi une « lettre ». Et vive la trop connue «Lettre à l’Élise inconnue»,qui rejette dans l’ombre d’autres pièces largement aussi intéressantes. Chez Chopin, la Marche funèbre de la Sonate n°2, manifestement inspirée par celle de Beethoven (Sonate n°12), a « contaminé» toute l’œuvre, devenue Sonate « funèbre », et qui a surpassé en renom la Sonate n°3. Quant à l’ Étude en mi majeur opus 10 n°3, son mélancolique cantabile est certes prenant, mais il n’aurait pas suffi à lui assurer son succès, si son adaptation en chanson qu’ont interprétée des chanteurs de charme, dont Tino Rossi, n’avait été baptisée « Tristesse » par un éditeur. Au cours du XIX e siècle, les compositeurs facilitèrent la tâche au public en donnant eux-mêmes des noms à leurs pièces de genre. De la Rêverie de Schumann au Clair de lune de Debussy, en passant par les Rêves d’amour de Liszt, La Fileuse et la Chanson de printemps de Mendelssohn, aux titres pittoresques des Pièces lyriques de Grieg (Papillon, Jour de noces à Troldhaugen, Mal du pays…) ou des Saisons de Tchaïkovski (Chant de l’alouette pour mars, La Moisson pour août, Troïka pour novembre), on comptepar milliers les pages aux titres suggestifs qui en éclipsent d’autres, sans titre ou au titre moins bien trouvé. Satie s’est moqué de ce procédé en le parodiant dans Fête donnée par des chevaliers normands en l’honneur d’une jeune demoiselle. Dommage bien innocent, sauf dans le cas où un morceau rejette dans une ombre relative tout un ensemble – on rappellera ainsi que la Rêverie fait partie des Scènes d’enfants de Schumann, que son Oiseau prophète appartient
Plusieurs mesures des Chants de l’aube de Schumann.
Reproduction avec l’aimable autorisation des éditions G. Henle Verlag.
aux Scènes de la forêt , et que le Clair de lune de Debussy est le mouvement lent de la Suite bergamasque, qui évoque tout un univers à la Watteau, dont les péripéties de Pierrot et de la lune. Des chiffres et des lettres
Le titre (ou plutôt son absence) n’est pas seul responsable de la négligence où l’on tient certaines œuvres. Après tout, les trois dernières sonates de Beethoven se passent de titre – il est vrai que pour les happy few pianophiles, on les désigne par leur numéro d’opus (109, 110 et 111), et cette classificationen dit assez aux connaisseurs.
Idem pour l’opus 106 ou les D.958, D.959 et D.960 de Schubert. C’est d’ailleurs beaucoup plus chic de dire « j’adore la D.960 », sans préciser l’auteur – ça va de soi –, plutôt que de confesser que l’on pleure en écoutant « Tristesse » de Chopin. Évidemment, cette manie des titres fait que l’on passe à côté de merveilles qui n’ont pas eu la chance d’être titrées. En vrac, les Sonates n°4 en mi bémol et n°11 en si bémol majeur de Beethoven, les Polonaises en ut mineur opus 40 n°2 et en fa dièse mineur opus 44 de Chopin, qui ne sont ni « militaires » ni « héroïques », les Sonates en mi bémol majeur D.568 et si majeur D.575 de Schubert où le jeune compositeur devient enfin lui-même, les Nachstücke opus 23 ou les Chants de l’aube de Schumann, où se révèle si bien son univers spirituel, les Variations sur un thème de Schumann opus 9 de Brahms, moins brillantes que les Variations sur un thème de Paganini ou de Haendel, mais qui se situent au confluent de l’influence schumanienne et de la singularité brahmsienne. Impact émotif
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Un autre problème se pose, celui du rapport entre la difficulté technique et l’émotion. Entre 100 autres, prenons l’exemple des Études d’exécution transcendante de Liszt. Certes, leur difficulté est redoutable, mais payante pour l’interprète (en plus, la plupart ont des titres !). On peut parler en quelque sorte d’un retour sur investissement. Un concertiste qui arrive à maîtriser Mazeppa ou Chasse-Neige se taillera un beau succès. D’autres pages sont également difficiles mais moins inspirées. Sviatoslav Richter fut l’un des rares pianistes de premier plan à jouer en concert Scherzo et Marche de Liszt, une pièce de vaste dimension, extraordinairement compliquée, dont la complexité est certes perceptible, mais dont le contenu touche moins que celui des Années de pèlerinage, des Rhapsodies hongroises ou des Études d’exécution transcendante. C’est peut-être une cause semblable qui a nui à Charles-Valentin Alkan, surnommé le « Berlioz du piano » par certains. Sa musique est [ mai-juin 2016
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DOSSIER ŒUVRES MÉCONNUES DU GRAND RÉPERTOIRE
parfois monstrueusement ardue, comme son Concerto pour piano seul ou sa Symphonie pour piano, deux œuvres imposantes, respectivement de cinquante et trente minutes, mais dont l’impact émotif est moindre que celui de la Sonate en si mineur de Liszt, finalement plus facile et gratifiante. Ce n’est pas la seule raison de la relative méconnaissance de la musique d’Alkan – de son temps, le compositeur n’a rien fait pour défendre son œuvre et vivait presque reclus –, mais elle doit compter pour quelque chose. On pourrait chercher des cas analogues chez des pianistes compositeurs, Rachmaninov notamment. Son «tube» fut longtemps le Prélude en do dièse mineur, assez spectaculaire mais au contenu plutôt simple. Son succès exaspérait l’artiste quand on le lui demandait à la fin d’un concert. De fait, ce morceau de jeunesse avait nui aux 23 autres préludes dont certains n’ont rien d’évident pour l’interprète, cela va de soi, mais même pour l’auditeur qui les découvrirait, en raison de leur texture très dense, de leur polyphonie serrée et de leur « survoltage » affectif. Alors que le Prélude en sol mineur opus 23 n°5 , fondé sur une base rythmique facile à mémoriser, a conquis tous les publics. Et certains interprètes ont dû se demander à quoi bon jouer les Sonates n°8 et n°9 de Prokofiev, alors que la n°7, avec son irrésistible finale, ne manque jamais de soulever le délire des foules. Il se peut aussi d’ailleurs que certaines œuvres, mais c’est difficile à prouver objectivement et scientifiquement, soient tout simplement
Davidsbündlertänze opus 6 ou le Carnaval, mais on ne s’explique
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pas que les artistes dédaignent les
Intermezzi o pus 4 ou les Feuillets d’album opus 124. La persistance des clichés
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plus réussies que d’autres. Les Concertos n°2 et n°3 de Rachmaninov sont plus aboutis que les n°1 et n°4. Chez Prokofiev, le Concerto n°3 passe sans problème, alors que c’est moins évident pour les autres. Le Concerto n°2 de Saint-Saëns a écrasé les n°1 et n°3. Le Concerto n°1 de Tchaïkovski a quasiment éclipsé le n°2, qui ne manque pas de qualités, mais ne possède pas le grandiose portique initial de son aîné. C’est également vrai pour les œuvres solistes. En dépit de leurs mérites, les Impromptus opus 5 de Schumann semblent moins achevés que les
Quelques notes de General Lavi ne – Eccentric de Debussy. Reproduction avec l’aimable autorisation des éditions G. Henle Verlag.
La grande quantité d’œuvres d’un même genre produites par tel ou tel compositeur peut évidemment nuire à certaines. Peu de pianistes peu vent se vanter de jouer les 62 sonates de Haydn, les 140 sonates de Carl Philipp Emanuel Bach, les 555 sonates de Scarlatti, ou même d’en interpréter la majorité. Devant cette pléthore de partitions, il faut choisir et, bien souvent, on sélectionne ce qui l’a déjà été et que le public connaît. Horowitz donnait souvent la célèbre Sonate en mi majeur K.380 de Scarlatti, qui est fort réussie. Mais rien ne dit que les Sonates K.379 ou K.381 n’auraient pas suscité le même intérêt si on les avait entendues auparavant. À travers les générations, les pièces connues se sont sédimentées et ont formé chez l’auditeur une image type du compositeur. Beethoven, c’est l’« Appassionata », Chopin, la Marche funèbre ou la Polonaise « Héroïque », Schubert, l’ Impromptu en sol bémol, Schumann, la Rêverie, Liszt, la Rhapsodie hongroise n°2… L’interprète et l’auditeur vont donc rechercher, dans toutes les œuvres d’un compositeur, l’image que leur ont proposée ces pages archiconnues. Au détriment de tout ce qui, chez le musicien, ne ressemble pas au cliché, quelle que soit par ailleurs la réussite de ces morceaux différents. Beethoven a composé dans sa jeunesse une vingtaine de suites de Variations qui ne sont cependant pas très beethovéniennes, selon l’usage de l’époque. Elles ont complètement été négligées, tout comme les Polonaises du jeune Chopin (et même sa première Marche funèbre quasi inconnue). Tout cela est jugé trop peu chopinien, et c’est regrettable, car la connaissance de ces morceaux permettrait de comprendre comment s’est développé le « vrai » Chopin, qui n’est pas né en un jour. Pour beaucoup, Debussy est le musicien impressionniste par
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REPÈRES DISCOGRAPHIQUES À DÉCOUVRIR Mozart : si les Sonates K.331 et, à moindre degré, K.330 sont bien connues, les deux suivantes et contemporaines, K.332 en fa et K.333 en si bémol, le sont moins, par Alfred Brendel (Decca). Beethoven : avec les Sonates opus 10 n°5, n°6 et n°7 , le compositeur atteint l’apogée du style classique préromantique, par Mari Kodama (Pentatone). Schubert : le musicien trouve pleinement sa voie en 1817 avec les Sonates D.568 et D.575, par András Schiff (Decca pour la D.568 ) et Sviatoslav Richter (Decca) pour la D.575 et la peu jouée Sonate en fa mineur D.625 inachevée. Schumann : Chants de l’aube, son dernier chef-d’œuvre, avec Kreisleriana et l’Allegro opus 8 , par Maurizio Pollini (DG), Intermezzi opus 4, par Jean Martin (Arion), et Feuillets d’album opus 124, par Cyprien Katsaris (Piano 21). Brahms : Variations sur un thème de Schumann opus 9, avec les Bunte Blätter opus 99 de Schumann, par Claire Désert (Mirare).
12.07 festival 23.06 concert pique-nique 23.07 ÍÍÍ
TROP DIFFICILES? Liszt : Scherzo et Marche, par Sviatoslav Richter (RCA). Alkan : Concerto pour piano seul, par Marc-André Hamelin (Hyperion). Prokofiev : Sonate n°9, avec les n°6 à n°8, par Sviatoslav Richter (Decca, RCA, DG, Melodiya).
PRODUCTIONS PLÉTHORIQUES Sonates de Haydn : une intégrale par Rudolf Buchbinder (10 CD, Warner). Sonates de Scarlatti : une intégrale par Pieter-Jan Belder (Brilliant) et celle en cours depuis longtemps (Naxos) par divers pianistes. On se repliera sur l’anthologie de Christian Zacharias (4 CD, EMI) ou sur les nombreux CD séparés. Sonates de Carl Philipp Emanuel Bach : une unique intégrale de l’œuvre pour clavier (dont 140 sonates), par Ana-Marija Markovina (26 CD, Hænssler Classics).
6 8 9 4 4 1 3 e c n e c i L 9 1 5 0 8 0 1 2 e c n e c i L
PAS ASSEZ CARACTÉRISTIQUES ? Variations de Beethoven : les nombreuses Variations de jeunesse n’ont jamais fait l’objet d’un enregistrement d’ensemble. Cédric Tiberghien a cependant réuni, outre les Variations « Eroica » opus 34 et 35 et « Ruines d’Athènes » opus 76 assez connues, des pièces de jeunesse qui le sont beaucoup moins, WoO 77, 78, 79, 80 (Harmonia Mundi). Œuvres de jeunesse de Chopin : Abdel Rahman El Bacha a réalisé une intégrale chronologique de l’œuvre de Chopin (12 CD séparés ou en coffret Forlane). Les deux premiers volumes (1817-1829) réunissent plus de 30 pages de jeunesse pour la plupart méconnues, dont la Sonate n°1. J. B.
flâneries musicales Les
excellence (La Fille aux cheveux de lin, La Cathédrale engloutie, Reflets dans l‘eau…). Mais alors que faire de General Lavine - Eccentric, d’Hommage à Sir Pickwick ou d’ Esq qui sonnent peu «impressionnistes » ? Le romantisme extraverti du Carnaval de Schumann a probablement nui à l’introversion des Chants de l’aube, où s’exprime, de façon pourtant plus profonde, l’âme du compositeur. Ce qui est vrai des pièces rarement jouées d’un compositeur célèbre l’est aussi des productions entières des musiciens peu connus. Pourquoi
n’interprète-t-on pas davantage les excellentes pages de Wœlfl, le rival de Beethoven, de Dussek ou de Vorisek, qui vécurent à la même époque ? Pourquoi la gloire de Debussy et de Ravel a-t-elle à ce point fait du tort aux œuvres de leurs contemporains Mariotte, Roussel, Samazeuilh, Schmitt, Kœchlin, Séverac ou Aubert – pour ne parler que des Français, et dont on ne peut pas dire que leurs noms encombrent les affiches de concert ? Cette question pourrait faire l’objet d’un autre dossier.
d e R ei m s
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Jacques Bonnaure
mai-juin 2016
n PIANISTE n°98 n 29
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HÉLÈNE GRIMAUD
Figure singulière dans le monde musical, la pianiste n’a jamais craint de bousculer les cadres traditionnels du classique, au risque parfois de dérouter. Avec « Water », elle nous propose de plonger à la source de la vie et de l’inspiration, de Debussy à Berio. Au-delà d’un simple programme narratif ou naturaliste, ce disque est une invitation artistique à une prise de conscience écologique et une évocation poétique de la beauté de l’eau. Un projet novateur, engagé et intense… à l’image de son interprète. Entretien.
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n PIANISTE n°98 n 31
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EN COUVERTURE HÉLÈNE GRIMAUD des visions musicales imaginatives des divers aspects de l’élément aquatique, depuis les océans et les grands lacs jusqu’aux gouttes de pluie et aux flocons de neige. Il invite l’auditeur à prendre conscience de la menace grandissante qui pèse sur cette ressource essentielle, notamment sur la sécurité de son approvisionnement. Pour le CD, l’idée a été de sélectionner un grand nombre de compositeurs et de relier les morceaux choisis avec des intermèdes sonores du DJ et compositeur Nithin Sawhney. De fait, « Water » a véritablement été conçu pour le disque. Vous l’avez enregistré pendant un concert à New York…
G D / K E N N E H T A M
HÉLÈNE GRIMAUD EN QUELQUES DATES Naissance le 5 novembre à Aix-en-Provence 1978 Débute l’étude du piano au conservatoire d’Aix-en-Provence 1982 Entrée au Conservatoire de Paris 1985 1er Prix au CNSMDP. 1er enregistrement (Rachmaninov) pour Denon 1987 1er récital à Paris 1991 Déménage aux États-Unis 1995 Débuts avec le Philharmonique de Berlin dirigé par Claudio Abbado 1996 Parution des Klavierstücke de Brahms (Erato) 1999 Fondation du Wolf Conservation Center à South Salem 2003 Parution du disque « Credo » (DG) et du livre Variations sauvages (Laffont). Création de Lamentate d’Arvo Pärt 2005 Parution du livre Leçons particulières (Laffont) 2006 S’installe à Berlin 1969
2007
Concerto « L’Empereur »
de Beethoven avec Vladimir Jurowski (DG) 2011
Concertos n°19 et n°23
de Mozart (DG). 2013 Roman Retour à Salem (Albin Michel) 2016 CD « Water » (DG)
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V
Vos disques répondent de plus en plus à des concepts. Comment les imaginez-vous ?
En effet, ce sont des programmes bien éloignés de ceux des albums dédiés à un seul compositeur, que je qualifierais de « monochromatiques ». Comme vous le savez, j’en ai consacré un certain nombre à la musique de Rachmaninov, Brahms, Bach et Mozart. Mais, aujourd’hui, je me tourne vers des projets « à concept ». C’est cela qui m’intéresse. Dans le passé, j’ai réalisé le disque « Credo », qui mêlait des œuvres de Beethoven et celles des contemporains Corigliano et Pärt, puis « Résonances », avec Mozart, Berg, Liszt et Bartók. C’était mon hommage personnel à Vienne et à la civilisation du Danube. Malheureusement, je ne suis pas certaine qu’il ait été bien compris ni perçu !
Le compositeur et DJ Nitin Sawhney a écrit les transitions sonores de «Water ».
L’idée à l’origine de ce disque, la fascination exercée par l’eau sur tant de compositeurs des XIX e et XX e siècles, a en effet débouché sur un pro jet avec l’artiste écossais Douglas Gordon, lauréat du Prix Turner : un concert-installation intitulé «Tears Become… Streams Become…» (« Les larmes deviennent… les flots deviennent… »). Nous l’avons donné en décembre 2014 et conçu expressément pour la salle d’exercice d’un ancien bâtiment militaire de New York, la Park Avenue Armory. Ce spectacle inhabituel pour le public comme pour moi mêlait art visuel, musique et architecture, avec en son centre mon programme « aquatique ». Avant que je commence à jouer, la salle était progressivement inondée pour donner l’impression d’un immense « champ aquatique »,
Pourquoi ?
Dans ce genre de projet discographique, le choix des pièces est difficile. Pour « Water », j’ai commencé à réfléchir il y a au moins trois ans. Le processus fut d’autant plus laborieux que les musiques inspirées par ce thème de l’eau sont riches et magnifiques. Le concept renferme
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« Chaque pièce de « Water » s’inscrit dans un « flot » acoustique soigneusement structuré par son mélange de pages classiques et contemporaines, mais en même temps expérimental par son esthétique générale. » selon les termes de Douglas Gordon. L’eau finissait par encercler complètement le piano. Une expérience assez étonnante, je dois avouer, mais évidemment impossible à reproduire ailleurs. Comment a été construit « Water » ?
Finalement, huit compositeurs sont représentés sur l’album qui s’ouvre sur Wasserklavier (« Piano aquatique ») de Luciano Berio. Suivent Rain Tree Sketch II (« Arbre de pluie – 2e ébauche ») de Toru Takemitsu, la Cinquième barcarolle de Fauré, Jeux d’eau de Ravel, Almería d’Iberia d’Albéniz, Les Jeux d’eau à la Villa d’Este de Liszt, l’ Andante de Dans les brumes de Janácek et La Cathédrale engloutie de Debussy. Ces pages où l’eau se présente sous ses innombrables aspects ont donc été enregistrées en direct pendant le concertinstallation de New York, puis reliées entre elles par sept Transitions écrites et enregistrées par Nitin Sawhney. Celles-ci offrent des perspectives poétiques et philosophiques contrastantes en un écosystème musical unique et convaincant. Ainsi, chaque pièce du disque s’inscrit dans un « flot » acoustique soigneusement structuré par son mélange de pages classiques et contemporaines, mais en même temps expérimental par son esthétique générale. Comment choisir parmi des dizaines de pièces écrites sur le thème de l’eau ? Certains abandons ont dû être douloureux…
En effet ! Impossible, par exemple, d’inclure Saint François de Paule marchant sur les flots de Liszt pour une question de durée. J’aurais dû renoncer à deux autres pièces afin
de l’inclure. En outre, sa dimension mystique aurait pu enfermer le récital et rompre avec la diversité souhaitée. Elle aurait fait de l’ombre au reste du programme et altéré l’esprit du projet. Pourtant, que cette œuvre est agréable à jouer ! J’ai préféré intégrer un autre morceau de Liszt, les Jeux d’ eau à la Villa d’Este , dont le feu d’artifice sonore s’achève avec le recueillement et la rédemption par l’eau. En s’intéressant à ce thème, on découvre énormément de textures sonores différentes. Quelle sorte de sonorité recherchiez-vous ?
Je recherchais une forme de limpidité, avec une sonorité métallique, mais qui ne soit pas froide. Nous avons beaucoup travaillé l’enregistrement pour obtenir ce que vous entendez sur le disque. Le thème de votre nouveau disque « Water » n’est-il pas également l’expression d’un besoin de quiétude ?
Oui, vous avez tout à fait raison. Le répertoire choisi porte en luimême l’idée de quiétude. C’est l’état qu’il faut atteindre. Auparavant, il convient de développer une forme d’équilibre, d’immobilité, et toutes ces œuvres nous y aident. Auriez-vous joué différemment ces pièces si elles avaient été insérées dans un récital lié plus particulièrement à un compositeur ?
Oui, absolument. On joue différemment une œuvre en fonction de celle qui l’a précédé et de celle qui va suivre. Il m’est arrivé de proposer en « bis » un morceau que j’avais interprété en début de récital. Je pense notamment à Wasserklavier de [
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Berio, qui ouvre le disque et qui a été pour moi une très jolie décou verte. L’éclairage devient alors autre. C’est la même chose qu’une reprise que l’on ne joue jamais à l’identique. Il faut également tenir compte du fait que certaines des œuvres retenues dans « Water » font partie à l’origine d’un cycle : si je devais interpréter les quatre pièces de Dans les brumes de Janácek à la suite, et pas seulement l’ Andante initial, je ne jouerais pas de la même façon. Parlez-nous de l’évolution de votre répertoire… J’acquiers lentement les œuvres nou velles. Il me faudrait plusieurs vies pour étudier tout ce qui m’attire. J’ai donc toujours beaucoup de mal à choisir, c’est-à-dire à supprimer. Je ne fais pas de différence entre les répertoires. J’interprète une pièce contemporaine si je la ressens aussi nécessaire qu’une sonate de Beethoven. Je m’y consacre alors pleinement. Cela dit, je joue la musique d’aujourd’huide manière « homéopathique ». Je ne me considère pas comme une spécialiste de celle-ci, même si j’ai passé commande à la compositrice bulgare Dobrinka Tobakova dont j’adore les œuvres. Quels sont les compositeurs que vous ne jouez pas ? Je n’en exclu s aucun. Je travaille actuellement Schubert, mais je ne le donne pas en récital. Je pense manquer de la subtilité nécessaire. Les demi-teintes ne font pas partie de mon univers : je suis trop impulsive ! Vous jouez pourtant avec les subtilités et les demi-teintes de l’œuvre de Mozart… Merci. C’est sans doute parce que la musique de Mozart offre des contrastes plus radicaux que celle de Schubert. Elle exprime une instabilité qui révèle des émotions extrêmes. Je m’y sens chez moi. Chez Schubert, les demi-teintes que j’évoque sont celle des larmes et du sourire mêlés, une image qui peut paraître un « cliché », mais qui correspond à celle que je me fais du compositeur. J’en suis moins proche. Pourquoi avoir dirigé vous-même depuis le piano des concertos de Mozart ? [
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« COMMENT BRAHMS M’A RÉVÉLÉE »
J
ohannes Brahms m’est plus intime que n’importe quel autre compositeur, et je ne pourrais pas vivre sans sa musique. Non seulement il m’a aidée à me révéler moi-même, mais je me sens très proche de sa dualité. Même si on ne peut pas dissocier ses œuvres les unes des autres, je dirais que la Symphonie n°3 est ma pièce préférée – notamment dans l’interprétation de Karajan. Parmi celles pour piano, les derniers cycles des opus 116 à 119 ont sans doute ma préférence. Si la musique pour piano de Brahms pose un problème d’équilibre sonore – un dilemme entre les voix supérieures et inférieures –, elle offre un très bel équilibre entre la verticalité et l’horizontalité, et l’ultime difficulté d’exécution me semble plutôt le discours que la technique à proprement parler. Pour moi, il n’y a pas vraiment de « techniques » qui lui soient spécifiques, mais une technique générale qui va bien au-delà de ce qu’on perçoit de mécanique : plus que l’articulation, c’est aussi le son, la manière d’utiliser les pédales, la construction d’une phrase, l’architecture de l’œuvre… Pour l’expression, le plus caractéristique chez ce musicien, c’est ce regard en arrière au moment où tout a changé, le moment de la prise de conscience : l’émotion brahmsienne tient tout entière dans le déchirement de cet instant. Je suis venue assez tard à Brahms, il n’était pas dans mon paysage musical jusqu’à l’âge de 14 ou 15 ans. Le choc s’est produit au moment de la parution du Concerto n°1 avec Arrau et Giulini. J’ai été anéantie, mais dans le bon sens du terme : l’impression d’une ouverture sans fin. Cette expérience était B. D. et S. F. intimement liée à la découverte simultanée de la signification du mot grec « alèthéia » (vérité).
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J’ai en effet tenté cette expérience avec l’Orchestre de chambre de la radio de Bavière [un disque existe avec les Concertos n°19 et n°23 ] . Mais je ne dirais pas que je « dirige » l’orchestre. Le concerto n’est jamais que de la musique de chambre « à grande échelle ». On répète davantage, on approfondit parce que le nombre des répétitions est plus important. Avec un chef et une phalange traditionnelle, on dispose
orchestres merveilleux, le Philharmonique de Vienne et celui de la radio de Bavière. J’ai été émerveillée par ce jeune musicien dès notre première rencontre. Il dirige sans aucun artifice, avec un sens musical d’une pureté extraordinaire. Vous collaborez régulièrement avec Valery Gergiev…
Ah oui ! La saison dernière, nous avons notamment donné le Concerto n°4 de Beethoven quatre fois de suite
« Il me faudrait plusieurs vies pour étudier tout ce qui m’attire. J’ai donc toujours beaucoup de mal à choisir, c’est-à-dire à supprimer. Je ne fais pas de différence entre les répertoires. » généralement d’une seule répétition et de la générale. On ne peut pas entamer une véritable collaboration artistique. On travaille ce qui est le plus important, et chacun fait confiance au professionnalisme de l’autre pour le concert. Ce n’est pas toujours très satisfaisant. Vous évoquez les chefs d’orchestre. Vous avez travaillé avec diverses générations de maestros. Pouvez-vous nous en parler ? De Pierre Boulez, par exemple, qui nous a quittés il y a quelques mois…
Voici un exemple flagrant de collaboration réussie. Loin des a priori colportés à son sujet à propos de sa sécheresse et de son intransigeance, j’ai découvert un véritable jeune homme d’une douceur, d’une intelligence incroyable et d’une très grande ouverture d’esprit. Boulez était curieux de tout. J’ai eu la chance de travailler tôt avec lui et de poursuivre cet échange tout au long de ma carrière. Il m’a donné des conseils qui me restent encore en mémoire.
à Berlin, avec le Philharmonique. Ce n’était jamais pareil : le côté imprévisible de l’interprétation était stupéfiant. Je pourrais aussi vous citer Yannick Nézet-Seguin, Lionel Bringuier, Antonio Pappano… Autant de beaux dialogues. Je n’ai pas encore travaillé avec Teodor Currentzis et son orchestre, qui m’intriguent. Ce sera chose faite en 2017. Le programme n’est pas encore déterminé. Vous jouez avec les plus grandes formations internationales. Ont-elles des personnalités sonores identifiables ?
Certainement. D’ailleurs, celles-ci influencent notre manière de jouer. En tournée, je remarque également la capacité d’adaptation des musiciens aux nouvelles salles. Pourtant, ils préservent leur identité sonore. Le Philharmonique de Vienne révèle ainsi un supplément d’âme, une incandescence dans les timbres. Sa sonorité est à la fois puissante, raffinée, et exprime une profonde culture. Cette formation obtient peut-être le juste milieu, le En 2013, vous avez publié parfait équilibre que l’on attend l’intégrale des Concertos d’un orchestre « idéal ». À Berlin, de Brahms sous la direction la culture du son est tout aussi ford’Andris Nelsons. Pourquoi lui ? midable. Mais je reste persuadée Concertos Oui, j’ai joué avec lui les qu’une grande partie de tout cela de Brahms, accompagnée par deux provient de celui qui dirige. [
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Un bon chef d’orchestre vous porte et vous fait devenir meilleur que vous ne l’êtes ! Vous aviez projeté d’enregistrer des concertos de Rachmaninov et de Prokofiev avec Vladimir Jurowski. Qu’en est-il ? Cela a été repoussé. Je cherche des œuvres en ré mineur complémentaires au Concerto n°3 pour piano de Rachmaninov . On verra bien. En revanche, il est prévu que j’enregistre rapidement les Sonates n°6, n°7 et n°8, celles dites « de guerre» de Prokofiev. J’envisage également de réaliser un nouvel album en solo sur le thème du souvenir, puis un autre avec des variations de Brahms et de Beetho ven… mais je ne vais pas tout vous dévoiler. Là comme dans la vie, le temps fait son œuvre, et je ne souhaite pas annoncer des projets qui ne se concrétiseront pas. D’autant que l’on a toujours la surprise de voir s’ajouter des disques non programmés, comme [
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mon « Duo » avec la violoncelliste Sol Gabetta, décidé très rapidement après un concert commun au Gstaad Menuhin Festival, en Suisse, en 2011. Êtes-vous intéressée par l’enseignement ? Il m’est arrivé de donner des classes de maître, mais je ne pense pas être
faite pour cela. Je préfère une relation directe. J’éprouve toujours un certain malaise pour l’élève lorsque le public est présent, car l’échange devient du spectacle, et la pression extérieure fait obstacle au dialogue. Or, l’étudiant – plus il est jeune, et plus cela est vrai – a besoin de se « lâcher », de perdre ses repères. Devant des auditeurs, c’est très délicat. Bref, la classe de maître n’est pas un format propice à l’apprentissage. Avez-vous éprouvé le besoin d’être conseillée par vos aînés ? Quand j’étais plus jeune, il m’est arrivé de jouer pour d’autres pianistes comme Nelson Freire. Mais je dois avouer que je n’en attendais rien de particulier. Pensez-vous que les « écoles » de piano existent encore ? Ont-elles encore une signification aujourd’hui ? Pas sûr. Mais n’étaitce pas aussi le cas dans le passé ? Pensez à la fameuse « école [
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QUESTIONNAIRE de Proust Le bonheur parfait, selon vous ? L’harmonie. Le trait de caractère dont vous êtes le moins fière ? L’entêtement. La qualité que vous préférez chez un homme ? La sensibilité. Et chez une femme ? Le côté direct. Le personnage historique auquel vous auriez aimé ressembler ? Aucun. Vos héros dans la vie ? Nelson Mandela, Martin Luther King et Padre Pio. Vos auteurs favoris ? Fiodor Dostoïevski, Luigi Pirandello et Hermann Hesse. Votre poète préféré ? Arthur Rimbaud. L’air que vous sifflez sous votre douche ? Ça change sans arrêt. Un air de Radiohead… Vos peintres préférés ? Van Gogh surtout, Cézanne, Dalí, Beckmann… Je trouve chez Van Gogh ce qui manque souvent à d’autres peintres ou dans la peinture en général : le rythme de la t exture. Les fleurs que vous aimez ? Vous allez rire : la gueule-de-loup. Mais aussi l’orchidée, le lys… Votre couleur favorite ? Le bleu ardoise, le bleu gris. Vos films cultes ? L’homme qui aimait les femmes et Barry Lyndon. Votre occupation préférée ? Jouer, et pas seulement du piano. Le talent que vous auriez désiré avoir ? Celui de changer le cours des choses. Votre boisson préférée ? Le thé vert. Qu’avez-vous réussi de mieux dans votre vie ? Avoir donné vie à un projet au départ improbable. Si vous deviez changer une chose dans votre apparence physique, quelle serait-elle ? Rien de spécial. La faute pour laquelle vous avez le plus d’indulgence ? La maladresse par impulsivité. Votre plus grand regret ? De ne jamais pouvoir donner autant qu’on me demande. Votre plus grande peur ? Perdre quelqu’un que j’aime. Que détestez-vous par-dessus tout ? La lâcheté. Votre devise ? Rester soi-même quoi qu’il advienne. Dans quel état d’esprit êtes-vous ? Contemplatif. Comment aimeriez-vous mourir ? Sur scène. Si vous êtes croyante, qu’aimerez-vous que Dieu vous dise quand vous arrivez au ciel ? « Viens retrouver les tiens. » B. D. et S. F.
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n PIANISTE n°98 n 37
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russe » : quels liens y a-t-il entre les techniques et les types de jeu de Gilels, de Richter et de Horowitz ? Je n’en vois pas beaucoup. [
Vous accompagnez régulièrement de grandes voix internationales. Avez-vous quelques projets en la matière ?
Il y eu en effet Thomas Quasthoff, Christine Schäffer, Rolando Villazón… Aujourd’hui, j’ai des projets autour de mélodies de Schubert et de Schumann avec Matthias Goerne. Puisque nous parlons de la voix, évoquons aussi la place de la littérature dans votre vie…
Si vous voulez, mais sachez que l’écriture littéraire reste sporadique dans mon existence. Je ne sais pas si je poursuivrai cette aventure. Mon dernier roman, Retour à Salem, est de l’autofiction. Ce n’est pas une œuvre littéraire, car ce n’est pas complètement imaginaire. À ce jour, l’essai et, surtout, les nou velles sont les formes qui m’intéressent davantage. Concevez-vous la littérature comme un besoin d’expression autre que la musique ? N’y a-t-il pas chez vous une tendance à l’introspection, d’une part, et un irrésistible besoin de communiquer, d’autre part ?
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« Un bon chef d’orchestre vous porte et vous fait devenir meilleur que vous ne l’êtes ! »
« MES PIANISTES DU PASSÉ… J’en choisis trois : Emil Gilels, Rudolf Serkin et Glenn Gould. Comme leurs interprétations sont habitées! Elles brillent d’une flamme intérieure irrésistible. Je retiens Emil Gilels pour son art de pétrir une pâte musicale
B. D. et S. F.
38 n PIANISTE n°98 n
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Parlez-vous parfois au public ?
Présenter des œuvres est un exercice difficile dans lequel je suis de plus en plus mal à l’aise. Cela devient même une hantise, et je cherche la moindre excuse pour ne pas le faire. C’est très juste. Cette dualité, ce Je trouve cela superflu. Il ne faut pas dilemme, qui était l’un des sujets « dire », mais « faire ». de Retour à Salem, est difficile à vivre. Quelle pièce jouez-vous lorsque vous vous mettez De plus en plus. Puisque nous évoquons la communication, comment ressentez-vous la présence du public pendant les concerts ?
au piano ?
Déjà, je ne joue pas quotidiennement. Mes heures favorites sont en matinée ou bien le soir, après Je suis avant tout sur scène pour lui les concerts. Je travaille régulièreet c’est, à chaque fois, une nouvelle ment les 51 exercices de Brahms. Ils aventure qui se présente à moi. Au sont parfaits pour aborder la sonorité, piano, je cherche à me concentrer. et leur virtuosité est très sensuelle. Idéalement, il faut faire le vide en Quelle perception avez-vous soi et l’abstraction de tout ce qui de votre métier ? n’est pas musique. Il est indispen- C’est bien davantage qu’un métier ! sable de se sentir bien. Le public À vrai dire, je ne peux pas m’empêm’a gênée une seule fois : un jour cher de le faire. Maintenant, sur d’hiver, au Théâtre des Champs- le plan purement « professionnel », Élysées, à Paris. Je n’étais pas en ce métier évolue. Il est difficile. grande forme, les gens toussaient Mais le public répond toujours prébeaucoup, et l’acoustique de la salle sent. Alors… Propos recueillis par Bertrand est très sèche. Pas évident de bien Dermoncourt et Stéphane Friédérich jouer dans ces conditions.
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JOUEZ&GAGNEZ 2 SÉJOURS POUR DEUX PERSONNES AU GSTAAD MENUHIN FESTIVAL avec hébergement à l’hôtel Ermitage Wellness & spa d’une valeur totale de 4 270 € chacun*
1ER PRIX :
2 nuits en chambre double à l’hôtel Ermitage
Wellness & spa de Schörid en demi-pension du 2 au 4 septembre 2016 3 invitations de 2 personnes pour les concerts : *2/09/2016 : Beethoven-Remix No. 9 *2/09/2016 : Beethoven4all, 9e Symphonie *03/09/2016 : Happy Happy Birthday Yehudi Accès à l’espace lounge Ermitage dans la tente du festival avec apéritifs offerts Transport aller/retour de l’hôtel Ermitage au festival après inscription à la réception de l’hôtel N’est pas compris, le transport A/R pour se rendre à Gstaad
ERMITAGE, Wellness & Spa Hotel Dorfstrasse 46 3778 Schönried ob Gstaad www.ermtiage.ch
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POUR PLUS D’INFORMATION : sur le festival :
www.gstaadmenuhinfestival.ch/site/fr/accueil.html
2ÈME PRIX :
2 nuits en chambre double à l’hôtel Ermitage
Wellness & spa de Schörid en demi-pension du 23 au 25 juillet 2016 2 invitations de 2 personnes pour les concerts : *23/07/2016 : Hommage de Schiff à Yehudi Menuhin *24/07/2016 : Hommage de Daniel Hope à Yehudi Menuhin & Australian Chamber Orchestra Accès à l’espace lounge Ermitage dans la tente du festival avec apéritifs offerts Transport aller/retour de l’hôtel Ermitage au festival après inscription à la réception de l’hôtel
sur l’hôtel :
www.ermitage.ch/fr/content/paquet-wellness-de-base
POUR PARTICIPER : www.pianiste.fr
N’est pas compris, le transport A/R pour se rendre à Gstaad
Jeu-concours du 22/04/2016 au 23/06/2016 inclus Concours par tirage au sort *1 séjour pour deux personnes par gagnant
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LES PARTITIONS n°98 Henri Bertini Prélude en fa majeur ............................................................................................................................................................................ I Samuel Scheidt Prélude en ré mineur SSWV 576 ................................................................................................................................................ II Gatien Marcailhou d’Aymeric Les Feuilles d’automne ..................................................................................................................................... V Domenico Scarlatti Sonate en mi majeur K.531 ................................................................................................................................................... X Wolfgang Amadeus Mozart Andante cantabile (2e mouvement) et Presto (3e mouvement) de la Sonate en la mineur K.310 ........... XV Avec l’aimable participation des éditions Henry Lemoine.
Henri Bertini
Prélude en fa majeur
DÉBUTANT
SUR LE CD PLAGE
mai-juin 2016
1
� PIANISTE n°98 � I
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Samuel Scheidt
Prélude en ré mineur SSW 576
II � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
DÉBUTANT-MOYEN
SUR LE CD PLAGE
2
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Samuel Scheidt
Prélude en ré mineur SSW 576
DÉBUTANT-MOYEN
SUR LE CD PLAGE
mai-juin 2016
2
� PIANISTE n°98 � III
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Samuel Scheidt
Prélude en ré mineur SSW 576
IV � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
DÉBUTANT-MOYEN
SUR LE CD PLAGE
2
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Gatien Marcailhou d’Aymeric
Les Feuilles d’automne
DÉBUTANT-MOYEN
SUR LE CD PLAGE
mai-juin 2016
3
� PIANISTE n°98 � V
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Gatien Marcailhou d’Aymeric
VI � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Les Feuilles d’automne
DÉBUTANT-MOYEN
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3
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Gatien Marcailhou d’Aymeric
Les Feuilles d’automne
DÉBUTANT-MOYEN
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mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � VII
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Gatien Marcailhou d’Aymeric
VIII � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Les Feuilles d’automne
DÉBUTANT-MOYEN
SUR LE CD PLAGE
3
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Gatien Marcailhou d’Aymeric
Les Feuilles d’automne
DÉBUTANT-MOYEN
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mai-juin 2016
3
� PIANISTE n°98 � IX
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Domenico Scarlatti
X � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Sonate en mi majeur K.531
MOYEN-SUPÉRIEUR
SUR LE CD PLAGE
4
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Domenico Scarlatti
Sonate en mi majeur K.531
MOYEN-SUPÉRIEUR
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mai-juin 2016
4
� PIANISTE n°98 � XI
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Domenico Scarlatti
XII � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Sonate en mi majeur K.531
MOYEN-SUPÉRIEUR
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4
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Domenico Scarlatti
Sonate en mi majeur K.531
MOYEN-SUPÉRIEUR
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� PIANISTE n°98 � XIII
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Domenico Scarlatti
XIV � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Sonate en mi majeur K.531
MOYEN-SUPÉRIEUR
SUR LE CD PLAGE
4
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Wolfgang Amadeus Mozart And Andant ante e cant cantabi abile le de la Son Sonate ate en la min mineur eur K.3 K.310 10 SUPÉRIEUR
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mai-juin 2016
5
� PIANISTE n°98 � XV
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Wolfgang Amadeus Mozart And Andant ante e cant cantabi abile le de la Son Sonate ate en la min mineur eur K.3 K.310 10 SUPÉRIEUR
XVI � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
SUR LE CD PLAGE
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Wolfgang Amadeus Mozart And Andant ante e cant cantabi abile le de la Son Sonate ate en la min mineur eur K.3 K.310 10 SUPÉRIEUR
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mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � XVII
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Wolfgang Amadeus Mozart Andante cantabile de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR
XVIII � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
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Wolfgang Amadeus Mozart Andante cantabile de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR
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mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � XIX
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Wolfgang Amadeus Mozart Andante cantabile de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR
XX � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
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Wolfgang Amadeus Mozart And Andant ante e cant cantabi abile le de la Son Sonate ate en la min mineur eur K.3 K.310 10 SUPÉRIEUR
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mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � XXI
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Wolfgang Amadeus Mozart And Andant ante e cant cantabi abile le de la Son Sonate ate en la min mineur eur K.3 K.310 10 SUPÉRIEUR
XXII � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
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Wolfgang Amadeus Mozart And Andant ante e cant cantabi abile le de la Son Sonate ate en la min mineur eur K.3 K.310 10 SUPÉRIEUR
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mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � XXIII
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Wolfgang Amadeus Mozart
XXIV � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
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Wolfgang Amadeus Mozart
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
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mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � XXV
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Wolfgang Amadeus Mozart
XXVI � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE
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Wolfgang Amadeus Mozart
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
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mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � XXVII
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Wolfgang Amadeus Mozart
XXVIII � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE
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Wolfgang Amadeus Mozart
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE
mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � XXIX
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Wolfgang Amadeus Mozart
XXX � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE
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Wolfgang Amadeus Mozart
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE
mai-juin 2016
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� PIANISTE n°98 � XXXI
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Wolfgang Amadeus Mozart
XXXII � PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
Presto de la Sonate en la mineur K.310 SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE
6
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PÉDAGOGIE
Voulez-vous une formule magique pour la technique ? ujourd’hui, nous vous proposons d’étudier une célèbre sonate de Scarlatti et de découvrir un musicien inconnu, contemporain de Chopin: Gatien Marcailhou d’Aymeric. De grands esprits louèrent son talent : Gabriel Fauré, Igor Stravinsky, Paul Valéry, Marcel Proust, Maurice Ravel. « Marcailhou est le vrai créateur de la valse romantique française », écri vit ce dernier. Quant à Camille Claudel, elle sculpta son œuvre intitulée La Valse en s’inspirant d’une valse de Marcailhou, Indiana . N’est-ce pas étonnant ? Nous étudions ensuite la Sonate en la mineur K.310 de Mozart, abordée dans Pianiste n°96. Mozart est l’émanation du siècle des Lumières. Il incarne le raffinement du XVIIIe siècle, de même que les tableaux de Watteau et de Chardin. C’est dans cet esprit de grande précision et d’élégance qu’il faut aborder l’interprétation de ses œuvres. En jouant du Mozart, nous ne sommes jamais trop précis, trop clairs, trop détaillés. En même temps – et c’est bien là la difficulté ! –, il faut développer une vision d’ensemble du morceau. Soigner le détail et embrasser la vision générale, en somme. Tout d’abord, il faut examiner avec le plus grand soin le rythme de l’œuvre. Dans le 2e mouvement, la multiplication des triples croches requiert beaucoup d’attention. Respecter un rythme précis n’est pas si facile, notamment dans un tempo lent ! C’est pourtant notre premier devoir d’interprète. Il faut beaucoup compter, réfléchir, être sûr du bon
A 1
rythme avant de « l’automatiser » dans notre oreille et dans nos doigts. Par ailleurs, les indications de phrasés et d’articulations prônées par Mozart sont de première importance pour jouersa musique : petites liaisons, détachés, appoggiatures évoquent ces subtils coups de crayon qui composent les dessins de Fragonard. Ils nous indiquent comment toucher le clavier, le palper amoroso, et celaconditionne notre mémoire physique au piano. Par exemple, dans le 3e mouvement,Mozart, qui vient de perdre sa mère, multiplie les petites césures, suggérant le sanglot d’un fils meurtri. Il faut couper très vite. La technique consiste à se repousser vivement du doigt en prenant appui dans le fond des touches. Par ailleurs, tout pianiste doit se soucier du bon équilibre des plans sonores avec ses voix d’intensités différentes. Dans le Presto, le chant de la main droite est soutenu en doubles notes. La partie aiguë doit surplomber. Hélas, nos doigts sont de longueur différente! Pour faire sonner en priorité ces notes aiguës, il faut tendre notre petit doigt et replier un peu nos doigts longs (4e, 3e, 2e) en les relaxant à la jointure de la main. Exécuter les deux en même temps, c’est bien cela qui est difficile ! Voulez-vous une formule magique pour la technique ? La voici : « Relaxez vos doigts longs et internes (2e, 3e, 4e), afin d’atténuer les parties d’alto à la main droite. À la main gauche, versez le poids vers le pouce et allégez la basse, évitez à la main de pencher vers le 5e doigt. Partagez votre main en deux et
Henri Bertini (1798-1879) : Prélude en fa majeur � Samuel Scheidt (1587-1654) : Prélude en ré mineur SSWV 576 � Gatien Marcailhou d’Aymeric (1807-1855) : Les Feuilles d’automne � Domenico Scarlatti (1685-1757) : Sonate en mi majeur K.531 (L.430) � Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Andante cantabile (2e mouvement) de la Sonate en la mineur K.310 e � Wolfgang Amadeus Mozart : Presto (3 mouvement) de la Sonate en la mineur K.310 �
N I T A H C E M Ô R É J
faites chanter le pianopar vos plans sonores! » De même, dans la sonate de Scarlatti, notre petit doigt tendu apportera la «lumière». Nous atténuerons les parties internes en relaxant le 2e doigt et le pouce. Cependant, s’il faut soigner chaque son, il importe aussi de saisir l’ensemble d’une composition. Plus vous étudiez une partition depuis longtemps, plus vous devez oublier le détail et évoluer vers une pensée qui embrasse l’ensemble de l’œuvre. On dit qu’à la question « comment composezvous ? », Mozart répondit qu’au moment où prenait naissance dans son esprit une nouvelle symphonie, il l’entendait en entier, du début à la fin, d’un seul coup. Elle avait la même réalité qu’une pomme dans sa main ! Et d’ajouter qu’il « rendait grâce au Créateur pour ces instants les plus heureux de son existence » . Tentez d’approcher ce bonheur qu’éprouvait Mozart. Après avoir travaillé chaque note, survolez l’ensemble des thèmes, des tonalités et des nuances de votre morceau. Construire votre toucher, tendre ou relaxer vos doigts selon les plans sonores, la courbe de la phrase et même l’ensemble de la composition, voilà qui est essentiel pour la technique. Souvenez-vous qu’il n’est nul progrès sans l’amour de la musique et la passion de la rendre la plus belle possible, pour chaque note comme pour l’ensemble. 2
Alexandre Sorel
1. Indiana est également le titre d’un roman de George Sand. Les œuvres de Marcailhou sont disponibles en CD (éditions Solstice). 2. Rapporté par Henrich Neuhaus dans L’Art du piano, éditions Van de Velde, 1971, p. 588.
Les morceaux enregistrés sur le CD de notre magazine ont été interprétés sur le nouveau piano Stephen Paulello d’une longueur de 3 m, muni de cordes parallèles et d’un clavier de 102 notes. Nous invitons nos lecteurs à apprécier la sonorité de cet instrument tout à fait exceptionnel.
mai-juin 2016
� PIANISTE n°98 � 43
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PÉDAGOGIE
DÉBUTANT
SUR LE CD PLAGE
Henri Bertini
1
(1798-1879) Prélude en fa majeur
1-8
Pédale. Écoutez-vous afin de changer la pédale
‘ Ce prélude est un petit morceau agréable, qui « sonne bien ». Tout en nous faisant plaisir en le jouant, apprenons de bons principes de technique et de musique. MES 1-8
Le « voyage musical». Cette pièce est composée
dans la tonalité paisible de fa majeur. Pourquoi penser à cela ? Parce que, dans ce morceau, fa est un peu comme notre « maison ». Partir est une 44 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
belle aventure, mais le retour apporte le r epos. Il faut le sentir, aussi en musique. Posez bien votre premier fa à la basse avec votre main gauche. Relaxez votre bras depuis l’épaule. Puis… partez ! Mesures n°2 à n°8, chantez votre ligne de basse. La gamme descend du fa. Alors, durant ce voyage musical, ne posez plus votre jeu. Suspendez votre bras depuis l’épaule. Ne jouez pas ces basses lourdement, sinon vous serez malhabile pour jouer la main gauche par-dessus la droite.
comme indiqué. Relevez le pied en jouant la basse et redescendez-le alors que votre doigt est encore dans la touc he. Si vous ôtez le doigt trop tôt, vous n’attraperez pas le son dans la pédale et ce sera tout sec. On joue du piano avec les mains, mais aussi avec l’oreille et les pieds. On s’écoute ! Cadence. La cadence, en musique, c’est essentiel. Elle est comme le voyage de retour à la maison. Ici, nous sommes en fa majeur. Mesure n°4, si bémol est donc la sous-dominante. Imaginez qu’elle est le portail du jardin : on l’ouvre d’abord, mais nous ne sommes pas chez nous ! Mesures n°5 et n°7, do est la dominante. Vous ouvrez en quelque sorte la porte principale. Par conséquent, ne laissez pas encore tomber le bras. Ce n’est que mesure n°9 que vous êtes revenu(e) sur la tonique. Alors, détendez à fond votre bras, relâchez-vous dans le piano comme dans un fauteuil. Faites sentir à votre auditeur votre soulagement d’être rentré(e) bien au chaud dans la tonalité de fa majeur.
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DÉBUTANT-MOYEN Samuel Scheidt
SUR LE CD PLAGE
2
(1587-1654) Prélude en ré mineur SSWV 576
1-9
À SAVOIR
� Sa musique reflète le maniement de l’orgue, instrument prédominant à son époque. Il est facile de faire entendre les sons prolongés à l’orgue puisque, tant que le doigt reste dans la touche, l’air continue de souffler dans les tuyaux. Au piano, ce n’est pas le cas, le son diminue aussitôt émis, et tout pianiste doit en tenir compte dans son jeu. MES 1-9
Tempo. Commencez par fixer le bon tempo à
deux blanches par mesure. Comptez « une-etdeux-et… ». Pourquoi faut-il compter ? 1. Pour ne pas se « perdre » et toujours savoir où nous en sommes de la mesure. On doit compter comme un petit enfant apprend à lire en posant un doigt mouillé sur son livre, afin de suivre les mots. Nous, nous suivons les temps ! 2. Pour faire entendre à votre auditeur la différence entre les temps forts et les temps faibles, la musique doit être balancée et nous bercer. Il y a cependant beaucoup d’exceptions à cette règle des temps forts.
Afin de fixer la vitesse adéquate pour ce début, commencez par jouer les passages plus rapides qui surviennent plus loin, mesure n°24 (doubles croches) ou mesure n°34 (croches). Ce sont eux qui nous donneront le bon tempo. Notes longues. Nous avons ici quatre voix comme dans un quatuor vocal : basse, ténor, alto, soprano. À la main droite, les queues de notes ,dirigées vers le bas, indiquent la partie d’alto. À la main gauche, dirigées vers le haut, elles indiquent la ligne de ténor. Sachez les chanter. Souvent, la 2e blanche de la mesure doit être tenue, car elle est surmontée d’une liaison qui s’étend jusqu’à la mesure suivante. Ce sont des syncopes. 1. Appuyez ces syncopes. Lancez le son, puis suivez-le à l’oreille comme si vous suiviez des yeux une étoile filante dans un beau ciel d’été. 2. Atténuez en dessous. N’étouffez pas le sillage sonore de la note prolongée avec les autres notes. 3. Écoutez les rencontres verticales ainsi formées. Elles sont parfois dissonantes. Habituez votre oreille à ces frottements. 4. Sentez les espaces ainsi créés entre vos doigts. Ce sont des empreintes. Mémorisez-les dans votre main. [ 1
L’organiste Samuel Scheidt vécut à Halle et à Amsterdam, où il suivit l’enseignement de Sweelinck. Précurseur de Heinrich Schütz et de Jean Sébastien Bach, il fut connu comme un maître de l’orgue en Allemagne, instrument pour lequel il composa de nombreux chorals. Dans sa musique, la conduite des voix est toujours très élaborée, et son influence à cet égard s’est transmise jusqu’à Bach. Dès le XVIe siècle, l’orgue s’imposait de plus en plus dans les contrées germaniques. Mais survint la guerre de Trente Ans. Au plus fort de ce conflit qui fit rage en Saxe, Scheidt se vit dépouillé de tous ses biens et exilé à Halle pendant douze ans. Le Prélude en ré mineur est extrait d’un corpus intitulé Tabulature nova. Les pièces de ce recueil étaient destinées à être exécutées sur tous les claviers de l’époque – l’orgue, le clavecin et le virginal –, même si les chorals étaient écrits pour l’orgue. C’est le cas de cette œuvre dans laquelle les tenues de notes prolongées tiennent une grande place. Ce prélude est très instructif pour apprendre à jouer les notes longues au piano. mai-juin 2016
�
PIANISTE n°98 � 45
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PÉDAGOGIE
19-23
[ MES 19-23
Scheidt écrit ici des doubles croches. Comptez « une-et-deux-et… », afin de sentir à quelle vitesse vous devez jouer ce rythme. L’essentiel est de bien respecter les rapports de durée entre les doubles croches et tout ce qui précède. « Solfiez» avant de jouer ! D’abord, pensez et chantez, puis jouez. 2. « Phrasez » ce passage. La phrase commence sur la 2 e noire de la mesure, avec les doubles 1.
DÉBUTANT-MOYEN
SUR LE CD PLAGE
3
Gatien Marcailhou d’Aymeric (1807-1855) Les Feuilles d’automne ‘ Gatien Marcailhou d’Aymeric est un compositeur oublié. Il fut pourtant très admiré par les plus grands musiciens tels que Ravel, Stravinsky et Fauré. Certes, sa musique est un peu surannée. Elle n’en reflète pas moins toute une époque avec charme. MES 1-8
Ce thème est moelleux, fluide, il exprime la tendresse. Le chant doit surplomber l’ensemble. Comment jouer cantabile ? Legato. Tenez les notes de la main droite comme indiqué, afin de jouer le plus legato possible. Pour Chopin, un beau legato était le B.A.-BA du jeu de piano. Détaillons un instant ce mot « legato». Pour l’obtenir, il faut maintenir chaque touche abaissée jusqu’à la suivante, afin d’éviter que l’étouffoir ne retombe sur les cordes entre les notes. Cela aurait pour effet d’interrompre le son. Le père de Mozart nommait cette continuité « Il filo ». Il est inutile d’appuyer très fort dans la touche, seul compte le poids qu’il faut pour la maintenir abaissée. 46 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
Le legatoprocède aussi et surtout d’une cause psychique et musicale. En effet, il faut suivre un son jusqu’à l’autre par la pensée et dessiner la nuance, la courbe de la phrase. Tenez le ré de la mesure n°1 jusqu’au sol, puis le sol de la mesure n°2 jusqu’au fa #, etc. Par votre toucher, soyez vraiment amoureux(se) du clavier d’une note à l’autre. Synchronisation et plans sonores. 1. Jouez les trois notes de chaque petit accord rigoureusement en même temps. Cela demande une minuscule attaque verticale de haut en bas (invisible à l’œil nu). Ne laissez jamais s’installer la moindre désynchronisation des notes doubles, c’est très important pour votre technique. 2. Faites entendre deux plans sonores dans votre main droite, grâce à la tension ou à la relaxation de vos doigts. Faites sonner la partie la plus aiguë. Tendez celui de vos doigts qui exécute le chant : d’abord, le 2 e doigt (ré), puis le 5 e doigt (sol), le 5e doigt encore et, enfin, le 4e doigt (fa #). Simultanément, relaxez les doigts qui jouent la partie
croches. Prononcez bien la première note ré-miré, do-ré-do, etc. Diminuez la terminaison, même si celle-ci intervient sur le temps fort de la mesure (le 1er temps). Beaucoup de compositeurs écrivent leurs fins de phrases sur le temps fort (Mozart, Chopin…). Allégez votre poids sous le doigt, relaxez votre poignet, laissez votre main remonter. Sentez et, surtout, écoutez-vous ! 1. On nomme les queues de notes les «hampes » des notes.
du milieu, à savoir le pouce et le 2 e doigt. C’est là l’une des grandes difficultés du piano. Il faut partager notre main en deux et tendre des doigts pour faire sonner les notes, tout en relaxant d’autres doigts. En clair, jouer avec les plans sonores ! Carrures. Apprenez à ressentir le rythme, non seulement pour la mesure, mais aussi par groupes de mesures. Ici, Marcailhou a construit sa composition par huit mesures (4 + 4 mesures = 8). Après avoir compté les temps, exercez-vous à compter les mesures et différenciez les poids de chaque 1er temps, selon sa place dans la carrure : le 1er temps de la 1re mesure sera un peu plus lourd, chaque 1er temps des mesures n° 2, n°3 et n°4, plus léger. La 5e mesure «repart », etc. Respirez, coupez entre les groupes. Ces ponctuations du langage musical sont essentielles pour produire de la belle musique. MES 17-24
Ce deuxième motif contraste avec le premier, grâce à sa basse tenue et ses triolets au milieu. Il doit être bercé avec douceur. Faites sentir ce balancement à votre auditeur. Ne jouez pas le 2 e temps aussi pesamment que le 1er. Sentez le poids que vous mettez sous chaque doigt, à la fois pour les plans du son et le balancement du rythme. La pulpe de vos doigts est une « balance électronique ». Elle doit toucher le piano selon la volonté précise de vos oreilles (et même de votre âme !).
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1-8
17-24
À SAVOIR Gatien Marcailhou d’Aymeric composa des valses et des pièces légères, dont le charme et la grâce firent de lui l’un des compositeurs préférés de l’impératrice Eugénie et un musicien officiel de l’Empire. Celui-ci fut admiré par les plus grands esprits de la littérature et de la musique du début du XX e siècle. Dans le genre que Marcailhou avait adopté, sa musique touchait à l’excellence, écrivit Gabriel Fauré, qui fut son élève. Son œuvre reflète toute une époque disparue, mais elle résonne aussi avec la douceur et la nostalgie du passé.
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PIANISTE n°98 n 4 7
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PÉDAGOGIE
MOYEN-SUPÉRIEUR
SUR LE CD PLAGE
Domenico Scarlatti
4
(1685-1757) Sonate en mi majeur K.531 (L.430)
1-9
‘ La musique de Scarlatti représente toujours, dit-on, un excellent exercice pour les doigts. Soit, mais qu’entend-on au juste par là ? « La vélocité de leurs doigts met en fuite leur intelligence… » disait Mozart de certains de ses collègues. La rapidité des doigts n’est donc pas une affaire de muscles. Elle procède surtout de la représentation rapide des notes dans notre tête et de la façon dont nous désirons les jouer et en doser le poids et, par conséquent, toucher le piano. MES 1-9
Visi on des note s. Commencez par déve-
lopper votre représentation des notes, que ce soit par l’ouïe, la pensée ou la vision sur le clavier. Votre objectif : être capable d’anticiper la musique. Voyez les piliers harmoniques de la cadence parfaite. Ils sont plutôt simples : tonique (= mi majeur), suivie de sa sous-dominante (accord de la majeur : IV), puis accord de dominante = 48 n PIANISTE
n°98 n mai-juin 2016
si-ré-fa-la. Apprenez bien par cœur cette cadence et regardez-la sur le clavier. Les « éclats » d’aigus et les sensations dans la main. La musique de Scarlatti est fine,
ciselée, raffinée. Or, quels sont en musique les sons que l’on pourrait décrire comme les plus « fins » ? Les aigus ! C’est pourquoi il faut apporter un soin particulier à ces sons et toujours veiller à ne pas les laisser étouffer par les graves. Arpèges. La note la plus sonore de ce premier arpège qui descend est un si, joué avec le 5 e doigt. Aucune note en dessous de ce si ne doit être plus forte que lui. Faites sonner votre petit doigt. Tendez-le, fixez sa jointure avec le métacarpe, là où il s’attache à la main. Votre petit doigt fait alors un angle droit avec votre main. Attention ! Efforcez-vous de ne pas crisper le pouce pour autant. Apprendre à tendre un doigt sans crisper les autres est très important dans la technique du piano. Pour diminuer les notes qui suivent,
relaxez vos doigts longs. Détendez-les au fur et à mesure que vous descendez vers le grave. Plus vous relâchez le doigt, plus cela diminue. Au contraire, plus vous « bloquez » le doigt, plus vous avez du son. Cette détente des doigts du milieu de la main permet de ne pas pencher la main vers le 5 e doigt. Or, une main parallèle au clavier libère le jeu, car les doigts tombent naturellement dans les touches de haut en bas et trouvent leur poids sans qu’il soit besoin de forcer. Syncope. Mesure n°2, appuyez le la, joué par votre 5e doigt (2e temps). Il s’agit d’une syncope. Tendez bien votre 5 e doigt. Projetez le son vers l’avant. Contrôlez les temps faibles. Le pianiste Dinu Lipatti accordait beaucoup d’importance aux temps faibles de la mesure. On lui demanda un jour : « Quelle est la base de départ du travail d’un interprète ? » « Elle consiste en quelques lois fondamentales : 1. Le solfège [...]. 2. L’appui sur les temps faibles. 3. Les ressources immenses que
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À SAVOIR
10-13
peut apporter l’indépendance dans la même main entre différentes attaques et touchers, donc entre différents timbres » , répondit-il . 2
Appliquons ces recommandations à notre sonate de Scarlatti. Il est fondamental de savoir réciter un morceau en contrôlant parfaitement son déroulement à chaque instant. Or, cela dépend beaucoup de la maîtrise des temps faibles, qui ont tendance à nous échapper. Ici, nous sommes à 6/8. Le temps faible tombe sur la 2e noire pointée, le si, joué avec le pouce de la main droite. 1. Écoutez ce son. 2. Apprenez le nom de cette note (si). 3. Retenez son doigté (pouce). Tout au long du morceau, vérifiez que les 2 e temps ne vous échappent jamais. Contrôlez l’influx nerveux dans vos doigts. Cela implique que nous sommes capables de maîtriser notre propre angoisse, notre nervosité. MES 10-13
Indépendance des phrasés. Ici, Scarlatti fait
rentrer ses voix « en canon ». Observez : la dernière note de chaque phrase doit être liée à la mesure suivante mais, en même temps, il faut couper à l’autre main avant chaque nouveau phrasé. Là encore, les deux mains ne coupent donc pas au même endroit. Exercez cette indépendance et faites-la passer dans votre mémoire physique. Répartition du poids dans la main. Citons de nouveau Dinu Lipatti : « L’indépendance dans la même main entre différentes attaques et touchers,
donc entre différents timbres. » Voyons comment
appliquer cette remarque. Scarlatti écrit ici deux voix dans chaque main. À la partie aiguë, nous avons d’abord une croche isolée « Pom » (mi), puis deux croches successives « Po-Pom » (fa #-sol #). Ce qui donne : « Pom…, Po-pom… Po-Pom… » À la partie grave, il n’y a qu’une seule note, un si. Différenciez ces deux voix au sein d’une même main par le poids et la tension des doigts ou, au contraire, leur relaxation. Atténuez la partie inférieure et faites ressortir la plus aiguë. Comment ? Tendez un peu vos doigts des aigus et relaxez vos doigts jouant la partie inférieure. Bref, partagez votre main en deux. Attention, remarquez que [
14-17
Domenico Scarlatti naquit en 1685, la même année que Jean Sébastien Bach. Il mourut en 1757 à Madrid, où il passa une grande partie de sa vie. Il ne faut pas le confondre avec son père, Alessandro Scarlatti, compositeur également d’une grande prolixité musicale, né à Palerme en 1660. Ce dernier avait été découvert et lancé à Rome, dès son plus jeune âge, par la reine Christine de Suède, qu’il avait servie en tant que maestro di capella. Alessandro n’arriva à Naples que quelques mois avant la naissance de son fils Domenico, celui qui nous occupe aujourd’hui. Mais l’ombre du père plana longtemps sur ce dernier. Ainsi que l’a affirmé le grand claveciniste Ralph Kirkpatrick, « on serait tenté d’interpréter les mystères que cachent la vie de Domenico et la domination qu’exerçait de toute évidence son père, à la fois sur le plan musical et personnel, en fonction d’une psychologie moderne. […] Le 15 mai 1728, trois ans après la mort de son père, Domenico épousait Maria Catalina Gentili. Domenico avait près de 43 ans, et son épouse, 16 ». Domenico commença sa carrière comme organiste et compositeur d’opéras et de cantates, et se lia d’amitié avec Haendel. Si l’on peut regretter que son œuvre vocale, lyrique et religieuse soit aujourd’hui un peu tombée dans l’oubli, il est célèbre dans le monde des pianistes pour les quelque 550 sonates pour clavecin qu’il a composées. Elles témoignent d’un génie créatif extraordinaire et raffiné. La Sonate en mi majeur que nous étudions porte le n°531 du catalogue établi par Ralph Kirkpatrick et le n°430 de celui réalisé par Longo. Cette pièce fut écrite à Venise en 1757. Certains voient en Scarlatti le père de la technique moderne pour le piano. mai-juin 2016
n
PIANISTE n°98 n 49
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PÉDAGOGIE
cette partie grave (devant être atténuée) n’est pas jouée aux deux mains par les mêmes doigts ! En effet, nos mains sont « en miroir » sur le clavier (les pouces vont vers le centre, et les petits doigts, vers l’extérieur). C’est pourquoi le respect de ces plans sonores représente une difficulté de coordination. Il n’y a pas de miracle, on ne peut la résoudre que par le dosage du poids, donc par la volonté, l’écoute et la concentration. Sentez, réfléchissez, écoutez. Nuancez. Mesures n°11, n°12 et n°13, Scarlatti a indiqué diverses nuances et soufflets d’intensité. Ces soufflets doivent être joués dans leur contexte musical, c’est-à-dire pas trop fort ! Mesure n°14, aboutissez à un mezzo forte, mais pas plus. Mesure n°17, jouez un seul forte, et surtout pas ff ! Ne sortez jamais du contexte musical. Plus un pianiste est expérimenté, plus il a une vision relative des nuances entre elles, ce qui le conduit à prévoir, construire, maîtriser son toucher. Percevez toutes les dissonances. Apprenez à entendre dans les moindres détails. Ici, tandis qu’une main tient la noire pointée, l’autre main joue des croches. Or, cela crée des rencontres entre la note prolongée et les notes jouées au-dessus, parfois d’âpres frottements, des dissonances. Par exemple, mesures n°12 et n°13, percevez la rencontre du si (blanche à la main gauche) avec le do # à la main droite, ou encore à la main droite, le fa # et le mi bécarre, ce qui produit un frottement de 7e majeure. Si vous voulez que vos doigts aillent vite, il faut d’abord que votre oreille n’ait aucun doute sur ce qu’elle doit entendre ! [
17-27
MES 14-17
Encore deux plans sonores par la relaxation des doigts. Ne penchez pas vers le 5e doigt. Mesu-
res n°14, n°15 et suivantes, et même si cela n’apparaît pas de prime abord, Scarlatti écr it deux voix dans la seule main droite. Le fa # aigu exécuté par votre petit doigt doit surplomber le reste. Il pourrait être joué par une flûte. Tendez votre 5e doigt, afin que sa note brille comme un « éclat d’aigu ». Une autre voix, inférieure, la-sol-la-sol…, est jouée avec le pouce et le 2 e doigt. Elle doit être jouée un peu moins forte. Atténuez en relaxant ces deux doigts depuis le métacarpe. Surveillez particulièrement votre 2e doigt. Souvent, il est trop crispé et il fait alors basculer la main vers le 5 e. C’est fatal pour le son, car cela étouffe les notes aiguës et les empêche de sonner convenablement. Elles n’ont plus de hauteur. Ne penchez pas vers l’extérieur de la main. Relaxez vos doigts du centre de la main. MES 17-27
Cadence rompue. Scarlatti écrit ici une cadence
qu’il va employer souvent dans ce morceau : la « cadence rompue ». Celle-ci va du Ve degré d’un 50 � PIANISTE n°98 �
mai-juin 2016
ton vers le VIe. Qu’exprime-t-elle musicalement ? Elle diffère provisoirement la résolution normale de la dominante vers la tonique et apparaît comme un « détour » dans le discours musical. Ici, après avoir joué si ( f, mesure n°17), nous devrions aboutir sur un mi. Mais il n’en est rien. Scarlatti avance plus
loin vers le do (VI e degré de mi majeur). Ressentez cette cadence physiquement, évitez d’asseoir votre jeu. Repérez-la partout où elle apparaît. 2. Dinu Lipatti, Lettre à un jeune pianiste sud-africain rapportée par Grigore Bargauanu, dans « La Correspondance entre Dinu Lipatti et Nadia Boulanger », Muzica n°4, octobre-décembre 2000.
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SUPÉRIEUR
SUR LE CD PLAGE
Wolfgang Amadeus
5
Mozart
(1756-1791) Andante cantabile de la Sonate en la mineur K.310
1-7
� La musique de Mozart est toujours, de p rès ou de loin, une musique de théâtre et d’opéra, au sein de laquelle le chant tient une place prépondérante. Léopold Mozart, le père de Wolfgang, affirma dans sa Violinschule (Méthode de violon) : « Et qui ne sait que le chant a toujours été le modèle de tout instrumentiste ? Le musicien doit se rapprocher de la nature le plus étroitement possible. » Et Mozart lui-même écrivit à son père : « Dans ma dernière lettre, j’ai oublié de mentionner le plus grand mérite de Melle Weber, qui est son superbe chant cantabile » . L’année même où il composa cette sonate, Mozart déclara encore : « La voix humaine vibre déjà par elle-même […]. On l’imite avec les instruments à vent, les instruments à cordes, et mê me avec le piano. » Cependant, Mozart dirigeait aussi ses propres opéras. Il faut donc n on seulement déclamer le chant, mais également être le chef 3
4
5
d’orchestre de votre propre jeu, c’est-à-dire doser toutes les parties de musique les unes par rapport aux autres. C’est indispensable pour jouer Mozart. MES 1-7
Nuancez vos parties accompagnantes.
Nous chantons spontanément le chant. Malheureusement, notre déclamation naturelle est souvent entravée par une méconnaissance des parties secondaires, alto et ténor. Mozart écrivit à son père en 1777 : « Il y a trois jours que j’ai commencé à l’enseigner [cette sonate] à Melle Rose […]. C’est l’ Andante qui nous don- nera le plus de peine, car il est plein de sentiment et doit être joué avec les nuances de forte et piano , exactement comme c’est indiqué . » Mozart accordait donc beaucoup d’importance au respect des nuances. Or, pour que ce chant soit beau et nuancé, il ne faut pas se limiter à chanter 6
la mélodie (ce qui est facile), mais aussi veiller à soutenir ses intentions musicales avec les parties secondaires. Mesure n°1, par exemple, nous avons un fp sous le la, au 1er temps. Soutenez-le par un petit fp avec la basse fa. Un peu plus loin (mesure n°3), Mozart écrit un crescendo. Ne vous contentez pas de jouer le chant crescendo, jouez crescendo [ mai-juin 2016 � PIANISTE n°98 � 51
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PÉDAGOGIE
aucune désynchronisation. Exécutez toutes ces notes doubles à l’aide d’une petite attaque verticale de haut en bas, perpendiculaire au clavier. Ce mouvement n’est pas visible à l’œil nu, il doit être senti. Votre main prendra ainsi l’habitude de se placer au-dessus des notes avant de les jouer.
15-18
MES 43-53
Passage dramatique. Marche harmonique.
Mozart développe ici son motif sous forme de marche harmonique. Il ajoute également de nombreux retards, qui créent d’âpres frottements sonores et sont ici l’expression de sa souffrance. Car celui-ci vient de perdre sa mère à Paris. Pour Alfred Einstein : « La mineur, c’est pour Mozart le ton de la désola- tion. On ne retrouve plus rien en cette sonate de l’esprit de salon. Elle est l’expression du senti- ment le plus personnel. » 8 Guidez votre pensée par
également avec les basses en octave (sol, si bémol). Retenez ce principe : un cantabile sera d’autant plus beau que vous soutiendrez vos intentions musicales avec les parties accompagnantes. [
Jouez en mesure par la main gauche.
Dans une lettre à son père, Mozart critiqua ainsi certains de ses collègues : « Ce qui les émerveille, c’est que dans un adagio joué tempo rubato, ma main gauche continue à jouer strictement en mesure. Chez eux, la ma in gauche emboîte le pas. » 7 Retenez cette phrase de Mozart. Non seu-
lement vous devez nuancer votre main gauche, mais aussi la jouer sans presser ni ralentir inconsidérément. Votre chant de main droite se déploiera de façon d’autant plus belle et naturelle. MES 15-18
Deuxième thème. Mozart suit le schéma tradi-
tionnel de la forme sonate et expose ici son deuxième thème (B) en do majeur (quinte du ton principal), comme cela est habituel (mesure n°15). Pour votre mémoire, vous devez connaître ce plan musical : exposition, développement, réexposition. 52 � PIANISTE n°98 �
mai-juin 2016
Technique. Détachez les notes marquées d’un
point. La difficulté survient lorsque ce thème apparaît ensuite en écho à la main gauche, mesures n°17 et n°18. Il est alors beaucoup moins facile à exécuter. Le but est de faire entendre deux voix complètement autonomes dans la même main. Travaillez beaucoup cette main gauche à part. Mettez les doigtés. Respectez-les sans vous tromper. La « clé technique » pour jouer ce passage réside dans l’élaboration des plans sonores. Concentrezvous en premier sur la partie à atténuer. Pour la diminuer, exercez-vous à la détente absolue des doigts qui doivent jouer cette partie la moins sonore. Veillez notamment à ne pas laisser votre main gauche pencher vers le petit doigt ni se crisper. En particulier, veillez à la détente du 2 e doigt et du pouce. Si vous les raidissez, la main penche vers le 5 e et finit par se crisper. Dessinez enfin chaque courbe sonore de la phrase avec son début et sa fin. Synchronisation, verticalité. Jouez les deux voix de cette main gauche strictement ensemble, c’est important pour la technique. Ne vous permettez
les notes fondamentalesde chaque accord. Mesure n°43, l’accord de la majeur s’étend sur deux temps, puis ré mineur (seulement pendant un temps, le 3e). Commencez par apprendre tout ainsi. Puis éprouvez la dureté des retards harmoniques. Mesure n°44, Mozart écrit l’accord de sol mineur. Le la, joué par le pouce de la main droite, est donc un retard de la fondamentale. Il s’ensuit une terrible dissonance avec le sol de basse. 1. Écoutez ce retard. Ressentez le pouvoir affectif de ce frottement, son caractère poignant et dramatique. 2. Sentez-le physiquement sous votre doigt. Jouez votre pouce sur la tranche de votre doigt avec le maximum de contact avec le clavier. Visez à l’avance du regard la note la plus aiguë, celle qui doit être jouée avec le petit doigt. Elles est bien lointaine sur le clavier, et la fausse note est vite arrivée ! Afin de ne pas «tomber à côté », ne laissez pas votre main pencher du côté de votre petit doigt. Allez chercher la note aiguë non seulement avec votre main, mais aussi avec un mouvement de l’ensemble du bras. Portez-le tout entier audessus de la bonne note. Comment vous y aider ? Ne tendez que le 5 e doigt. Supprimez le « creux » sous votre 2e doigt et votre pouce, ne les crispez pas. Relaxez pouce et 2 e doigt à la jointure du métacarpe. La main se penche alors un peu vers l’intérieur et le déplacement du bras est facilité. Rythme. L’une des difficultés est ici le rythme. Mesures n°44, n°46, etc., Mozart écrit huit triples croches à la main gauche (binaire), contre six doubles croches (ternaires) à la main droite. La terminaison du trille et les deux triples croches de la main gauche doivent commencer entre les deux dernières doubles croches de la main droite. Ce rythme est très subtil, il faut se concentrer pour le placer correctement. Mais c’est aussi à travers lui que s’exprime le caractère fatal et dramatique de ce passage. Exécutez avec rigueur. L’œuvre de Mozart ne supporte pas l’approximation ! [
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43-50…
mai-juin 2016
n PIANISTE n°98 n 53
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PÉDAGOGIE
… 51-53
68-71
À SAVOIR Mozart composa la Sonate en la mineur K.310 lors du voyage qu’il fit à Paris avec sa mère, en 1778. Il s’agit de sa première sonate réalisée dans une tonalité mineure. L’atmosphère y est profondément dramatique , car sa mère mourut durant ce séjour, le 3 juillet 1778. On imagine le chagrin du jeune homme de 22 ans, dont la musique ne fut pas bien comprise à Paris, la mode étant alors à une forme de virtuosité superficielle. L’ Andante cantabile con espressione de cette pièce est une élégie que l’on peut concevoir comme un hommage attendri à la mère disparue. En même temps, dans la partie centrale de ce 2e mouvement, certaines dissonances dues aux retards harmoniques sont volontairement agressives, brutales. Elles dépeignent la révolte et la peine de Mozart. Le 3 juillet 1778, il écrivit à l’abbé Bullinger, à Salzbourg : « Pleurez avec moi, mon ami ! Ce jour a été le plus triste de ma vie ! […] Il faut bien que je vous dise, ma mère chérie n’est plus. »9 Cela s’entend, ô combien ! 54 �
PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
[ MES 68-71
Mesure n°68 et suivantes, le thème (B) de la forme sonate réapparaît. Cette fois, il est exposé en fa majeur, au lieu de do majeur. Cependant, il ne demeure pas dans le ton (comme cela était le cas, mesure n°17), mais s’expose désormais en si bémol. Cela permet à Mozart de ramener le ton principal de son morceau. Intégrez bien cet « aiguillage musical » dans votre tête. Comparez les mesures n°17 et n°18, puis n°69, n°70, n°71, etc. Visez toujours le plus grand effort de l’intelligence et de la réflexion. Au lieu d’accumuler des heures
d’études inutiles au piano, vous gagnerez du temps et vous jouerez beaucoup mieux. 3. Léopold Mozart, Versuch einer gründlichen Violinschule, Augsbourg, 1756, chap. 14, p. 107. 4. Lettre de Mozart à son père, 7 février 1778. 5. Lettre de Mozart à son père, 12 juin 1778, tirée des Lettres de Mozart, traduites par Henri de Curzon, 1re édition, Hachette, 1888 ; publication contemporaine, Hachette Livre-BNF, p. 208. 6. Lettre de Mozart à son père, 14-16 novembre 1777, op. cité ci-dessus, p. 130. 7. Lettre de Mozart à son père, Augsbourg, 23-24 octobre 1777. 8. Alfred Einstein, Mozart, l’homme et l’œuvre , éditions Desclée de Brouwer, 1954. 9. Lettre de Mozart à l’abbé Bullinger à Salzbourg, Paris, 3 juillet 1778.
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SUPÉRIEUR-EXCELLENCE
SUR LE CD PLAGE 6
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1792) Presto de la Sonate en la mineur K.310
1-4
� Le Presto poursuit le caractère d’ensemble de l’œuvre. Il demeure très poignant, malgré sa vivacité et sa forme rondo. Cette badinerie pleine de nuages ne sera apaisée que par un bref intermède en la majeur en son milieu. MES 1-4
Césures. Mozart a indiqué de multiples petits
phrasés dans ce thème. Chacun est d’une durée très brève, puisqu’il ne se déploie que sur une seule mesure. Il est pourtant essentiel de bien exécuter les mini-césures entre les phrases, car ce sont elles qui confèrent un caractère si haletant et angoissant à ce morceau. On peut penser à un enfant qui pleure et peine à trouver son souffle. Reprendre de la hauteur par impulsion. Nous n’avons que très peu de temps pour effectuer ces minuscules césures. Notre bras est lourd devant nous et il faut le soulever rapidement. La solution consiste à nous aider des doigts pour soulever notre bras. En jouant les dernières notes qui précèdent chaque césure, prenez appui avec la pulpe des doigts dans le fond du clavier et, grâce à une vive impulsion du poignet, propulsez-vous vers le haut. Imaginez un chat qui saute sur un toit. Il prend appui sur les coussinets de ses pattes avant de bondir. Le pianiste Paul Roes publia en 1937 un ouvrage intitulé L’Élément fondamental de la technique du jeu chez Liszt et Chopin. Il y explique que « [pour les deux compositeurs], la table du jeu, le fond des touches, donc une base fixe, était le point de départ de toute action ». Ici, les notes détachées à la fin
de chaque phrase serviront de point d’appui. Elles permettront de propulser la main très rapidement vers le haut grâce à l’impulsion du poignet. Plans sonores. Dosage. Le premier devoir d’un pianiste est d’équilibrer les plans sonores. Faites ressortir le chant à la partie la plus aiguë de la main droite. À la main gauche, il existe aussi deux plans sonores, du moins au début (à cause de la noire tenue). Le tout doit être joué dans un piano contrôlé. Main droite. La première tierce la-do est jouée avec les 5e et 3e doigts. Faites sortir en priorité le chant à l’aigu avec le petit doigt. Or, notre 3 e doigt est beaucoup plus long que notre 5 e, c’est pourquoi il a tendance à jouer plus fort. Le moyen technique est de replier un peu votre 3e doigt, afin d’atténuer la voix d’alto, comme si vous vouliez le raccourcir, le mettre à la même taille que le petit. Relaxez bien ce 3e doigt. Laissez-le se replier naturellement. Au contraire, tendez au maximum votre 5e, en lui appliquant du poids. C’est d’exécuter les deux à la fois qui demande une bonne maîtrise de la main, car il faut « partager » votre main en deux. Évaluez les divers degrés de tension de vos doigts. Écoutezvous et sentez ce qui se passe dans votre main. Synchronisation parfaite des doubles notes.
Efforcez-vous, dès le début, de jouer toutes les notes ensemble au sein d’une même main. C’est essentiel pour développer une bonne technique. Tout en travaillant votre dosage des plans sonores, répétez plusieurs fois chaque groupe de doubles notes, en les attaquant par un petit mouvement vertical de la main, perpendiculaire aux touches.
Main gauche : deux plans sonores aussi.
À la main gauche, faites entendre deux plans sonores lorsqu’il y a des noires. Votre oreille doit pouvoir les suivre tandis que vous jouez les croches au-dessus. Tendez ou relaxez les doigts. Importance des parties intermédiaires. De manière générale, nous percevons moins bien les parties du milieu, car elles sont noyées dans la masse sonore. Mais, chez Mozart, les parties intermédiaires sont particulièrement importantes, car il pensait orchestre. Alors, comment gagner en maîtrise et en clarté ? 1. Chantez vos parties intermédiaires. 2. Apprenez leur nom de note. 3. Regardez-les sur le clavier. 4. Développez le contact de vos doigts internes. Jouez le pouce sur la plus grande surface possible et détendez la jointure principale de votre 2e doigt. MES 5-8
Mouvements des voix : « parallèles » ou « contraires » ? Pour développer vos réflexes
rapides, repérez les directions des voix. Elles vont soit dans le même sens (« mouvement parallèle »), soit dans le sens contraire. Dans ce dernier cas, elles s’écartent l’une de l’autre ou se rapprochent. Il est d’autant plus important de réfléchir aux directions des voix que nos mains sont « en miroir» sur le clavier. C’est pourquoi le mouvement parallèle est plus difficile à assimiler que le mouvement contraire. Mesures n°5 à n°6, les parties extrêmes s’écartent par « mouvement contraire ». Mesures n°6 à n°7, les extrêmes vont dans le même [ mai-juin 2016 � PIANISTE n°98 � 55
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PÉDAGOGIE
5-8
sens. Analysez, sentez, réfléchissez, vous apprendrez beaucoup plus vite et mieux. Faites sentir les carrures de mesures. La musique de Mozart est ponctuée par carrures musicales. Faites-les sentir à votre auditeur. Ne jouez pas le 1er temps de chaque mesure avec le même poids ! Donnez une impulsion sur le 1er temps de la 1 re mesure, puis jouez un peu moins fort le 1er temps des mesures suivantes, n°2, n°3 et n°4. Sur le 1er temps de la mesure n°5, repartez comme après une virgule. Respirez entre les groupes. [
MES 15-22
Cadence rompue, cadence parfaite. Mesures
n°15 à n°16, Mozart diffère la résolution sur la tonique finale de la mineur, en écrivant une cadence rompue (mi = dominante - > fa = VIe degré de la mineur). Sur ce fa, avancez, prenez votre basse en remontant le poignet, plutôt qu’en le posant à terre. Avec votre petit doigt, ne posez pas davantage les basses suivantes, ré, si. N’expirez qu’à l’issue de la cadence, mesure n°20. Alors, seulement, expirez brièvement sur la tonique. Nous n’avons que peu de temps, car il faut aussitôt repartir. Mais sans cette brève relaxation sur la tonique, notre corps ne respirerait pas avec les fonctions harmoniques, et nous serions crispés pour l’ensemble du morceau. MES 37-44
Il est impossible de jouer techniquement cette descente et tous les passages analogues dans ce mouvement, si vous ne les concevez pas musicalement. Voici sept conseils pour interpréter tous ces passages difficiles. 1. Nuance : Mozart a écrit un forte, un seul ! N’écrasez pas. 2. Doubles notes synchronisées. La main droite joue des quartes. Jouez-les strictement ensemble au moyen d’une minuscule attaque verticale. C’est à force de vous entraîner à jouer parfaitement ensemble les 56 �
PIANISTE n°98 � mai-juin 2016
doubles notes dans une même main, que vous prendrez l’habitude de vous placer au-dessus des notes avant de les jouer. Vous entraînerez ainsi les déplacements latéraux de votre bras. 3. Relaxez vos doigts internes. Ce passage comporte des sauts redoutables. Pour les réussir, ne laissez pas vos mains pencher vers le 5e doigt. En effet, dans ce cas, votre plateau de main n’est plus parallèle au clavier et votre bras ne peut pas évaluer la distance à parcourir. Résultat, vous tomberez à côté ! Main gauche : tendez un peu votre 5e doigt, lui qui joue la basse. En même temps, relaxez vos doigts internes (2e doigt, pouce, 3e doigt), auxquels sont confiées les notes du milieu (mi, sol, ré, mesure n°37, do, mi, si, mesure n°38). Si vous crispez les doigts du milieu, cela fait pencher la main vers l’extérieur. Main droite : relaxez également les doigts qui jouent la partie interne (2 e doigt, pouce…). En revanche, tendez votre petit doigt, auquel est confiée la note la plus aiguë. 4. Pensez les degrés de la tonalité sur lesquels vous jouez. C’est le conseil le plus important. Nous sommes en domajeur.Les notes fondamentales des harmonies sont successivement do, si, la, sol, fa, mi, ré, etc. Mais la tonalité qui conclut, apaise, demeure do. Si vous alourdissez les autres degrés (VIIe, VIe, Ve, IVe, etc.), ni votre corps, ni votre pensée ne pourront aller de l’avant. N’alourdissez pas les degrés faibles, sinon vous serez crispé(e), mal à l’aise et vous tomberez à côté. Vous pouvez être sûr(e) que vous raterez les basses ! 5. Diminuez au fur et à mesure que vous allez vers le grave. Ce dosage vous détend mentalement et
évite la saturation de vos muscles et de votre oreille. 6. Non legato. Du temps de Mozart, l’absence de signe voulait dire en général non legato. Paul Badura-Skoda, dans son ouvrage L’Art de jouer Mozart au piano, précise : « C’est là une connaissance essentielle pour tout interprète de Mozart. Une erreur très répandue veut que,
chez Mozart, les traits en particulier exigent un legato continu. Or, Mozart exige souvent le legato dans ses passages mélodiques, c’est exact, mais il demande presque toujours que les traits de virtuosité soient joués non legato, sur quelque instrument que ce soit. » 7. N’avalez pas la dernière note avant un saut. Tout déplacement s’effectue entre deux notes : la note de départ et celle d’arrivée. Ne négligez pas la dernière note avant le saut. Prenez le temps de la jouer, faute de quoi votre bras ne peut évaluer la distance entre les deux notes. Vision d’ensemble. Une fois que vous avez fait tout ce travail de détail, apprenez à penser ce mouvement de Mozart dans son ensemble, à la fois pour les thèmes et pour les tonalités. Henrich Neuhaus, qui enseigna à Sviatoslav Richter, écrivit ceci : « On pourrait dire que plus un pianiste est intelligent, et mieux il vient à bout des œuvres importantes, et inversement. Dans le premier cas, une longue réflexion se développe horizontalement, dans le deuxième, une pensée se développe verticalement. Voilà pourquoi j’admire tellement le rythme dans l’exécution de Sviatoslav Richter : j’ai l’impression que toute œuvre qu’il interprète, aussi gigantesque soit-elle, s’étale sous ses yeux comme un immense paysage, à la fois dans son ensemble et dans tous ses détails ; perçu par un regard d’aigle d’une hauteur extraordinaire avec une netteté prodigieuse. » Si vous parvenez à embrasser d’une seule pensée globale ce mouvement de sonate (thèmes, tonalités, nuances, rythmes), vous connaîtrez peut-être vous-même un peu de cette félicité suprême dont parlait Mozart et dont il rendait grâce au Créateur comme étant le plus grand bonheur de sa vie.
À SAVOIR Le Presto, qui succède à l’ Andante cantabile, est aussi un chef-d’œuvre d’inspiration. Ce mouvement, bien que très virtuose, se trouve aux antipodes de l’état d’esprit de virtuosité superficielle qui était en vogue à Paris, lorsque Mozart s’y rendit. Si cette pièce est incontestablement difficile, les déferlements de doubles croches apparaissent au contraire comme des cris d’angoisse. Ici, Mozart ne cherche nullement à plaire. Dans son ensemble, cette Sonate en la mineur K.310, dont nous achevons aujourd’hui l’étude, compte parmi les grandes œuvres pour clavier du compositeur.
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mai-juin 2016
n PIANISTE n°98 n 57
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PÉDAGOGIE
JAZZ
LA LEÇON D’ANTOINE HERVÉ
T L U A R A G C I R E
ST. JAMES INFIRMARY
oici un standard américain très joué depuis l’époque de la Nouvelle-Orléans. Sur un tempo ternaire de marche lente, imaginez que vous recréez au piano une fanfare défilant dans la rue pour un enterrement dans le style de la période. La main gauche doit rester à peu près la même pendant l’improvisation, la main droite, sur le mode pentatonique indiqué, avec sa « blues note ». En marquant tous les temps en accord, la main gauche impose le pas et doit être la plus régulière possible. De temps à autre, un « shuffle » (la petite croche « en l’air », mesures n°2 et n°6) vient renforcer l’évocation d’une marche. Jouez « ternaire » les rythmes de croches. Inventez vous-même des formules mélodiques à la main droite.
V 58 n PIANISTE n°98 n
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AU SERVICE DES MUSICIENS
depuis 1850
PIANOS ACOUSTIQUES PIANOS NUMÉRIQUES PARTITIONS
17/27 bd Beaumarchais - 75004 PARIS
www.beuscher.com
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PIANOS À LA LOUPE
Acoustiques
Trois petits quarts-de-queue pour budgets réduits
par Bernard Désormières
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ZIMMERMANN HZ 160 ondée en 1884, la firme allemande Zimmermann a proposé pendant cent trente ans des pianos de qualités de facture inégales. Aujourd’hui, le groupe Bechstein, qui en est le propriétaire, positionne les pianos droits et à queue Zimmermann dans son entrée de gamme, en dessous des marques Hoffmann, Bechstein et C. Bechstein. À présent, les Zimmermann sont produits en Chine, à Hailun, selon des spécifications allemandes et sous le contrôle de techniciens de Bechstein. Deux dimensions de pianos droits et trois autres de pianos à queue (160 cm, 175 cm et 185 cm) constituent l’offre actuelle du label. Intéressons-nous au plus petit modèle, le HZ 160, le moins cher des pianos à queue de tout le groupe Bechstein
F
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Descriptif
Le meuble, assez ramassé, est élégant, avec sa lyre travaillée et ses pieds plus épais à leur base. Il paraît sobre par l’absence de chanfreins sur le couvercle et son abattant. On apprécie la présence d’un ralentisseur de cylindre, de grosses roulettes doubles et d’un large pupitre, n’ayant 60 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
malheureusement pas de position peu inclinée. Si l’origine chinoise de ce piano est clairement mentionnée, l’empreinte sécurisante de Bechstein apparaît sur une plaque en laiton apposée sur le bloc gauche de clavier, avec un numéro de contrôle propre à chaque instrument. S’y ajoute la mention « Designed by Bechstein » visible à l’intérieur du cylindre. Le montage en cordes est bien pensé (échelle Duplex, agrafes, etc.), le sommier de chevilles, épais de 32 mm, est en multiplis de hêtre et d’érable. La table d’harmonie, quant à elle, est en épicéa massif. L’usinage du cadre métallique, du barrage et de nombreuses pièces du meuble a été effectué sur des machines à commande numérique, gage de précision et d’homogénéité dans la fabrication. La petite porte comme le cylindre sont renforcés par des profilés métalliques, pour éviter les déformations et les pannes. L’ensemble mécaniqueclavier en bois est chinois, les feutres des têtes de marteaux étant d’origine européenne. Un examen attentif des détails permet de déceler les limites dans la qualité de la finition : débordement de peinture dorée du cadre sur les tourillons en bois des chevilles, petits éclats de la laque vers le pupitre, léger décollement du feutre de pupitre et mauvaise portée du châssis de clavier sur son plateau. De plus, le piano testé a nécessité, pour sa préparation chez le distributeur, un nombre d’heures de travail anormalement élevé, la finition chinoise ayant atteint ses limites malgré les contrôles allemands.
Toucher et rendu sonore
L’ergonomie est très bonne, le toucher, agréable et précis, et la sonorité, très ouverte; bref, les sensations sont excellentes au premier contact avec le HZ 160. Le contrôle du jeu en pianissimo, test pourtant redoutable, est satisfaisant. Les nuances peuvent être contrastées, car la puissance sonore est au rendez-vous si l’on sollicite le piano dans les nuances fortissimo. La couleur sonore et le timbre d’ensemble manquent un peu de rondeur, mais ne révèlent pas de dureté. Ce modèle est assez bien équilibré entre les différents registres, en dépit de ses dimensions réduites. Si l’on compare l’état d’arrivée en magasin de l’instrument, le technicien a réalisé un petit miracle. L’accord est stable, et les unissons sont restés intacts, malgré notre jeu volontairement « musclé ». Conclusion
Clavier, confort de jeu : bonne ergonomie, clavier précis et d’une bonne fermeté, répétitions aisées Réponse en pp : bonne Puissance : correcte pour un 160 cm Amplitude dynamique : importante Couleur sonore : ouverte, non clinquante, bonne longueur de son, assez homogène Aigus : clairs Médiums : peuvent chanter, peu « feutrés » Graves : extrêmes graves assez bien définis, restant toutefois un peu courts Pédales : 3 (forte, una corda, sostenuto), un peu basses (5 cm), manquant un peu de fermeté, mais silencieuses Dimensions : 160 cm (P) x 150 cm (L) Poids : 320 kg Spécificités : ralentisseur de cylindre Ébénisterie : noir brillant Pronostic de durabilité : moyen Usage : amateurs, étudiants peu fortunés, particuliers limités en place Origine : Chine (Hailun), conception et contrôle allemands (groupe Bechstein) Prix : 13130 euros Importé par Saico Euroclaviers Remerciements à L’Atelier du Pianiste (Paris)
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KAWAI
GL-10
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n février dernier, le facteur japonais Kawai a présenté sa dernière série GL de petits pianos à queue au salon Musicora de Paris. Celle-ci remplace les trois premiers prix des gammes GM et GE, avec cinq modèles économiques, de 12 000 euros à 25 100 euros : GL-10 (153 cm), GL-20 (157 cm), GL-30 (166 cm), GL-40 (180 cm) et GL-50 (188 cm). Examinons ici le petit GL-10.
Descriptif Ce piano remplace l’ancien GM-10, avec une profondeur supérieure de 3 cm, en raison de touches plus longues, pour un meilleur confort du pianiste. La fabrication reste indonésienne, dans une usine Kawai, mais la conception est toujours japonaise. Le meuble classique est d’une forme dépouillée, malgré une lyre très tra vaillée (mais pas de chanfreins autour du couvercle et de son abattant, pieds non évasés au-dessus des roulettes). S’il n’y a pas de serrure, on apprécie la présence d’un ralentisseur de cylindre et, surtout, d’un large pupitre avec cinq positions d’inclinaison, dont une très basse, comme sur tous les pianos à queue Kawai. La béquille
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de couvercle est double avec détrompeur, pour un positionnement correct. Sous le piano, les poutres du barrage en bois ne se rejoignent pas entre elles, ce qui n’est le cas (système Core) que sur certains modèles plus grands de la marque. Le cadre métallique, moulé selon le procédé V Pro, est d’un bel aspect. Le montage en cordes avec agrafes dans les basses et le médium, puis sillet contre sillet dans l’aigu, ne contient pas hélas d’échelle Duplex. Le sommier des chevilles est en multiplis (11 plis d’érable contre-croisé). La table d’harmonie, effilée sur les bords, est en épicéa massif à veines droites. Les chevalets sont en bois dur (érable massif ou hêtre). La nouvelle mécanique japonaise Millenium III est en grande partie en carbone ABS, les manches de marteaux restant en bois. Les rails de mécanique sont en aluminium extrudé, pour une bonne rigidité. Les feutres des marteaux comportent une sous-garniture rouge. Les touches allongées et les longues capsules (9,5 cm) en bois très dur qui les rigidifient permettent un enfoncement important vers la barre de dièse et limitent les pertes d’énergie. Le plateau de clavier est solidifié par un large profilé métallique, et la petite porte, renforcée, tout cela offrant un bon maintien des réglages et une réduction des risques de pannes par frottement.
Toucher et rendu sonore L’ergonomie est excellente, et le confort de jeu, très satisfaisant. Le revêtement des touches en acrylic/ phénol est agréable sous les doigts. Grande précision dans le contrôle
musclée est nécessaire pour obtenir une puissance élevée. Il reste néanmoins assez plaisant à l’usage si l’on se cantonne dans des nuances douces ne dépassant pas le mezzo forte. Si le croisement est acceptable, plusieurs notes zinguent anormalement dans le médium grave. Malgré notre essai « musclé », nous n’avons ressenti aucune altération des unissons.
Conclusion Ce petit piano à bas prix, bien pensé, d’une finition honnête, offre un excellent confort de jeu, mais ses performances musicales et ses capacités expressives sont limitées, malgré la présence d’un impeccable ensemble clavier-mécanique. Le GL-10 est destiné aux pianistes de tous niveaux, disposant d’un budget limité et de très peu de place à domicile, mais désirant un instrument procurant le confort de jeu d’un piano à queue. Un des modèles crédibles les moins chers du marché.
Durabilité de l’instrument. Les contacts que nous
BANC D’ESSAI
mode d’emploi
Clavier, confort de jeu : excellente
R D
Lieux des tests. Ils sont effectués dans les magasins,
chez les fabricants, agents distributeurs ou importateurs. Dans certains cas, nous testons des pianos sans les dernières mises au point avant la livraison de l’instrument au client. Nous tenons compte de tous ces paramètres dans notre appréciation finale.
entretenons régulièrement avec les professionnels du piano (facteurs, techniciens, accordeurs, régleurs ou responsables de l’entretien) nous permettent d’avoir une idée assez précise de la qualité intrinsèque de l’instrument, et notamment de sa capacité à durer dans le temps. Rapport qualité-prix. Les pianos de très haut de gamme restent très chers, mais leur prix est toujours justifié. Le niveau de qualité a énormément
ergonomie, bon confort de jeu, bonne précision dans le contrôle du son. Excellente répétition Réponse en pp : excellente Puissance : limitée Amplitude dynamique : moyenne, instrument semblant un peu bridé, manquant d’ouverture Couleur sonore : sans originalité Aigus : assez bonne définition, peu aériens Médiums : manque d’ouverture Graves : sonorité trop courte dans les extrêmes graves Pédales : 3 (forte, una corda, sostenuto), à bonne hauteur, précises et silencieuses Dimensions : 153 cm (P) x 150 cm (L) x 102 cm (H) Poids : 282 kg Spécificités : mécanique japonaise Millenium III, touches longues pour un mini-quart-de-queue Ébénisterie : noir brillant Pronostic de durabilité : moyen, ensemble clavier-mécanique fiable Usage : tous pianistes, à budget et place réduits, bon piano de travail Origine : Indonésie, mécanique et conception japonaises Prix : 12000 euros Importé par Hohner France Remerciements à Hohner France
progressé dans les instruments d’entrée de gamme, notamment d’origine chinoise ou indonésienne. On peut acquérir de bons pianos à des prix parfois agréablement surprenants. Méfions-nous des a priori négatifs tout en restant vigilant. Pianos numériques. Nous les testons avec les mêmes casques stéréo dynamiques, de type fermé. Les caractéristiques et descriptifs techniques des claviers sont ceux annoncés par les fabricants. Enfin, tous les prix sont donnés à titre indicatif.
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Toucher et rendu sonore Ce petit piano est assez séduisant au premier contact par la bonne fermeté et la précision de son toucher autorisant une répétition sans problème et un jeu aisé dans les pianissimos. Dans les nuances douces et mezzo forte, la sonorité d’ensemble dans le grave et le médium est plutôt ronde et feutrée, non percussive ni agressive, l’aigu étant plus clair, mais peu aérien. Les extrêmes graves trouvent vite leurs limites dans leur définition et leur lisibilité, mais restent acceptables pour un piano de cette petite taille. Le son se dénature sensiblement dans le forte et le fortissimo, surtout dans le grave, où l’on perçoit alors une sensation de bridage et une certaine saturation. Si le croisement est correct, quelques inégalités de timbre et d’intensité, avec zingages ponctuels, sont assez gênantes. Deux étouffoirs étaient peu efficaces dans le grave, mais ce défaut de préparation a pu être corrigé facilement et rapidement par le technicien de Hanlet, lors de notre essai. de jeu, bonne ergonomie Réponse en pp : très bonne Puissance : moyenne Amplitude dynamique : limitée, sensation de bridage dans le fortiss imo Couleur sonore : plutôt ronde et feutrée dans l’ensemble des registres Aigus : clairs mais non célestes Médiums : assez chantants et ronds Graves : peu agressifs, définition moyenne dans la dernière octave Pédales : 3 (forte, una corda, sostenuto), bonne hauteur, silencieuses, précises, bonne fermeté Dimensions : 159 cm (P) x 150,6 cm (L) x 103 cm (H) Poids : 280 kg Spécificités : ralentisseur, grosses roulettes, table d’harmonie en épicéa massif Ébénisterie : noir brillant ou blanc brillant Pronostic de durabilité : moyen Usage : amateur ou pianiste confirmé désirant le confort d’un piano à queue et un beau meuble à prix « doux » Origine : Indonésie et Corée (usines Samick), plan de cordes allemand, quelques composants allemands (cordes acier, marteaux FFW) Prix : 12933 euros (noir), 13633 euros (blanc) Importé par Pianos Hanlet Remerciements à Pianos Hanlet
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angulation, et la présence d’échelles Duplex doubles dans le médium et SEILER l’aigu, appréciable. Le sommier de ’excellente entreprise alle- chevilles est en multiplis (11 plis). mande Seiler a été rachetée, Le solide barrage est constitué de il y a quelques années, par poutres en bois convergeant vers le Coréen Samick. Aujourd’hui, un seul point. Quant à la table outre les pianos Seiler, toujours 100% d’harmonie, elle est réalisée en épiallemands (usine de Kitzingen), céa massif. Le cadre métallique deux marques plus économiques élar- offre une belle peau lisse et brillante. gissent le catalogue de la « famille L’ensemble clavier-mécanique, tout Seiler » : Eduard Seiler (production en bois, sans aucune matière plascoréenne avec de nombreux compo- tique, semble bien rigide, avec une sants allemands) et Johannes Seiler, barre de centre en profilé d’alliage en entrée de gamme (fabrication léger et cinq dômes de réglage du indonésienne et coréenne, avec quel- châssis. Le revêtement des touches ques composants allemands). Deux de clavier est ordinaire, mais agréapianos droits et trois petits pia- ble au toucher. nos à queue (160 cm, 175 cm et 186 cm) constituent l’offre Johannes Seiler. Nous présentons ici le plus petit d’entre eux, le GS 160.
GS 160
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Descriptif Le modèle testé, blanc brillant, est d’une belle finition apparente, avec un joli chanfrein entourant le cou vercle et son abattant et une lyre
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Conclusion Ce petit piano à queue, bien conçu grâce à l’expérience ancestrale de Seiler, a été réalisé de façon économique en Asie. Il apparaît comme un instrument crédible, surtout pour un jeu ne comportant pas de nuances forte extrêmes. Sa belle esthétique, sa finition correcte et le sérieux de sa fabrication sous le contrôle de Samick laissent espérer une durabilité correcte. Il conviendra à des pianistes, amateurs et étudiants au budget limité, disposant de peu de place chez eux, mais souhaitant profiter du confort d’un vrai piano à queue. Un choix rationnel sans risque.
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Numériques
Deux claviers portables à prix accessibles
ROLAND
FP-30 ne large gamme de claviers numériques de salon, mais aussi des modèles de scène professionnels et portables, tel est le catalogue que propose Roland, le fabricant japonais. En premier prix, son nouveau petit clavier numérique portable FP-30 ne pèse que 14,1 kg. Regardons-le en détail.
U
Descriptif
Proposé en noir et blanc, ce petit cla vier est assez stylé. Il doit être placé sur un stand ou, éventuellement, sur un piétement optionnel KSC-70, qui limitera ses capacités de mobilité, démontage oblige. Treize boutons dédiés, à la gauche du clavier, facilitent la mise en œuvre des principales fonctions de l’instrument. On regrette l’absence d’afficheur. Néanmoins, de nombreuses indications apparaissent à la droite des touches, permettant d’accéder à des réglages spécifiques, parfois très fins et subtils. La mécanique, similaire à celle des claviers de salon, est la nouvelle PHA-4, Ivory Feel, avec sensation d’échappement. Le générateur sonore est le fameux SuperNatural, avec une polyphonie de 128 notes. Trente-cinq sons internes, dont quatre pianos
acoustiques sont disponibles, comme de très nombreuses démos. L’amplification de 2 x 11 W alimente deux haut-parleurs d’un diamètre de 12 cm. La réponse en dynamique est réglable sur cinq niveaux plus un fixe. Les effets sonores sont très variés et largement réglables. L’aspect ludique est soigné avec la présence de kits batterie pour des accompagnements dans différents styles. Ce cla vier moderne est doté d’une connectique USB (A et B), de deux prises casque en face avant (mini et gros jack stéréo) et d’une entrée seconde pédale, mais pas d’entrée ligne ou de véritable sortie ligne, ni de prises Midi. Au goût du jour, il est équipé d’une interface Bluetooth, permettant la connexion à des applis musicales et le transfert de données. Toucher et rendu sonore
Le clavier s’avère d’un bon confort de jeu, le revêtement des touches est agréable sous les doigts, et les répétitions sont faciles. La réponse en dynamique, aisément réglable, est assez correcte, sans atteindre les finesses de réglage (jusqu’à 100 niveaux) de certains claviers de salon Roland. On souhaiterait toutefois un peu plus de fermeté des touches pour le travail régulier des pianistes avancés. La pédale Sustain, de forme carrée, trop légère et petite, n’est pas confortable. On fera donc l’acquisition d’une autre,
mieux dimensionnée. Si l’écoute amplifiée n’est pas comparable à celle des modèles de salon, elle est suffisante en puissance et en définition sonore pour un jeu assez intime chez soi. L’écoute avec un très bon casque est de qualité, bien équilibrée, les subtilités de réglage de certains effets étant perceptibles. La présence d’harmoniques riches, surtout en activant fortement la fonction String Resonance, est indéniable et appréciable. Le claviériste, qui suivra attentivement la notice, pourra personnaliser la sonorité qu’il souhaite. Les différents modes de clavier permettent le Split et la superposition des sons. Conclusion
Le FP-30 est un instrument moderne et complet, qui peut se connecter pour l’enregistrement audio et le transfert de données. Équipé de fonctions ludiques et de sonorités de qualité, diverses et bien choisies, il offre plus qu’un simple clavier pour travailler son piano en vacances ou la nuit. Il profite de l’expérience technologique de Roland dans ses séries de salon et de scène hautde gamme. Il en reprend certaines caractéristiques, parfois à plus petite échelle, parfois à l’identique. On peut donc accéder au monde du constructeur avec ce petit clavier, pour un prix abordable. Un très bon choix pour des pianistes de tous niveaux. Un modèle qui devrait devenir un best-seller.
par Bernard Désormières
Clavier-mécanique : 88 notes. Mécanique standard PHA-4, Ivory Feel, avec sensation d’échappement Pédale : Sustain, filaire, carrée, peu stable, peu pratique, trop légère Genérateur sonore : SuperNatural Polyphonie : 128 notes Sensibilité au toucher : oui, 5 niveaux + fixe Amplification : 2 x 11 W. HP: 2 x 12 cm Sons internes : 35 (4 pianos acoustiques, 2 clavecins, 7 électriques + 22 autres) Démo : oui (Tone Demo, 30 morceaux internes) Modes clavier : Whole (Normal), Dual (superpositions de deux sons), Twin, Split Effets et fonctions : ambiance ou réverb (5 pas), brillance (3 pas), chorus, 8 kits batterie. Accords, saut d’octave. String Resonance, Key Off, Sourdine Resonance, auto Off Afficheur : non, mais repères graphiques pour réglages de base au droit des touches concernées Enregistrement : interne Midi (30 000 notes), externe par les 2 USB Métronome : oui, complet, mais sans afficheur Connectique : USB (A et B), 2 casques (mini et gros jack en face avant), entrée 2 e pédale KDC-70 Alimentation : par adaptateur PSB-7U (DC In) Spécificités : Bluetooth pour connexion aux applis musicales et transfert de données. Conception japonaise, construction en Indonésie Finitions : noir (BK) ou blanc (WH) Dimensions : 130 cm (L) x 28,4 cm (P) x 15 cm (H). Avec stand KS-70 : 130cm x 32,4 cm x 92,5 cm Poids : 14,1 kg (23 kg avec stand KS-70 et pupitre en place) Prix : 699 euros. Options avec stand dédié KSC-70, autres stands KS-12 ou KS-18Z, pédalier KPD-70 pour tourne-pages avec applis Importé par Roland Remerciements à Paul Beuscher
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PIANOS À LA LOUPE
KORG B1 a firme japonaise Korg, créée il y a plus de 50 ans, a dévoilé début 2016 son nouveau cla vier portable B1 en entrée de gamme, disponible en noir ou en blanc, qui remplace l’ancien SP-170 S commercialisé en 2011 (voir Pianiste n°79). Observons-le de plus près.
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Descriptif
Le nouveau design est réussi pour ce petit clavier de 11,8 kg seulement, grâce à ses formes arrondies sur les côtés et son piétement optionnel dédié (STB 1). Le pupitre amovible est doté de pattes facilitant le maintien des partitions légères. La jolie forme de la pédale filaire Sustain apporte une touche de sérieux à l’instrument. Toutefois, elle est trop légère pour être stable sous le pied du claviériste. Le clavier de 88 notes est toujours le NH, légèrement plus lourd dans le grave que dans l’aigu. Côté son, l’amplification reste très modeste (2 x 9 W), mais la nouvelle technologie MFB (Motional Feed Back) et la présence
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de deux haut-parleurs ovales (10 cm x 5cm), à large basse fréquence, placés latéralement, permet, d’après le constructeur, l’optimisation des huit timbres instrumentaux échantillonnés (PCM Stéréo sur quatre niveaux, avec une polyphonie de 120 notes). Une démo est d’ailleurs proposée. Pas d’afficheur, malheureusement, pour le contrôle des différents réglages ! Il faut avoir recours à la notice (très succincte) pour savoir quelle touche du clavier il faut actionner en même temps que les deux touches d’accès aux fonctions. Les quelques indications, même en relief, pour faciliter cette recherche sont quasiment illisibles. La réponse en dynamique est réglable sur trois niveaux (léger, normal et lourd), mais pas de fixe. Les effets de réverbération et de brillance sont très sommaires (tout ou rien !). Un mode Partner permet de répartir le clavier en deux parties de tessitures similaires pour le jeu avec un professeur, par exemple. À la gauche du clavier, on trouve cinq boutons seulement pour l’ensemble des réglages : On, Volume, Piano Play, Sound et Metronome. La connectique est minimaliste avec une seule prise casque en mini-jack (ser vant en théorie de sortie ligne), une entrée pour la pédale Sustain et une autre pour le bloc pédale optionnel PU-2. L’alimentation nécessite
l’emploi d’un adaptateur 12 V (fourni). Hélas, rien n’est prévu pour l’enregistrement, tant en interne qu’en externe, car il n’y a pas de prises USB ni Midi. Toucher et rendu sonore
Le clavier GH, un peu trop léger pour former solidement la main d’un pianiste, autorise la répétition aisée. Toutefois, il laisse une impression très caoutchouteuse en fond de touche, une sensation de fragilité, les touches se déformant et fléchissant sensiblement vers le fronton en jeu appuyé. Les trois niveaux de réglage de la réponse en dynamique n’offrent pas un bon contrôle des nuances et des contrastes. On aimerait une position beaucoup plus « hard », qui ne libérerait les fortissimo qu’avec un jeu fortissimo, et non dès le mezzo forte. L’écoute amplifiée est acceptable pour un si petit niveau d’amplification (2 x 9 W), et celle avec un bon casque, satisfaisante. On apprécie particulièrement les sons de pianos acoustiques. Korg est en progrès dans ce domaine. Les effets intégrés (réverb, brillance) sont trop limités et sans dosage fin possible. Dommage qu’il n’y ait pas de seconde sortie casque, car la fonction Partner semble alors difficile à utiliser, sauf en mode amplifié.
Clavier-mécanique : 88 notes. Clavier NH Pédale : Sustain, bien dimensionnée, mais trop légère Genérateur sonore : échantillonnage PCM stéréo note à note sur 4 niveaux Polyphonie : 120 notes Sensibilité au toucher : oui, 3 niveaux (pas de fixe !) Amplification : 2 x 9W, technologie MFB (Motional Feed back) pour les 2 HP ovales (10 cm x 5 cm) à large basse fréquence Sons internes : 8 (3 pianos acoustiques, 2 électriques, 1 clavecin, deux orgues) Démo : 8 (1 par timbre) Modes clavier : Normal et Partner (clavier coupé en deux parties, de la 2 à mib 6 et de mi 2 à do 6, qui permet à deux personnes de jouer la même chose en même temps). La pédale triple optionnelle PU-2 permet alors l’effet Sustain pour chaque zone du clavier Effets et fonctions : reverb (1 pas), Chorus (1 pas), transposition, accord fin Afficheur : non ! Quelques repères pour réglages en relief (trop discrets) Enregistrement : non Métronome : oui, mais sans afficheur Connectique : une seule sortie casque en mini-jack de 3,5 mm, entrée pédale Sustain, mais rien d’autre Alimentation : Par adaptateur AC/DC 12 V Spécificités : belle esthétique avec le piétement dédié, pupitre avec agrafe de page. Conception japonaise Finitions : noir ou blanc Dimensions : 131,2 cm (L) x 33,6 cm (P) x 11,7 cm (H) sans le pupitre. Poids : 11,8 kg sans piétement Prix : 599 euros. Options avec piétement dédié STB 1 (100 euros), pédalier PU-2 (pour fonction Partner) (prix NC) Importé par Algam Remerciements à Paul Beuscher
Conclusion
Ce clavier numérique a des prétentions limitées. Il sera utile à des apprentis pianistes qui souhaitent un clavier de complément, très léger, doté de sonorités de pianos crédibles. Sa connectique spartiate limite son utilisation et interdit sa connexion avec un ordinateur, voire un iPad. Les capacités ludiques de l’instrument (pas d’enregistrement, de rythmes, etc.) sont réduites. Sa simplicité de mise en œu vre séduira ceux qui cherchent un cla vier d’une grande facilité d’utilisation, mobile et d’un prix modéré.
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CHRONIQUES DISQUES, DVD RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE
Classique et jazz Cette rubrique présente une sélection des disques et DVD récemment parus. Les « maestros » de Pianiste distinguent tout particulièrement ceux qui, selon nous, ont marqué ou marqueront la discographie.
JEAN SÉBASTIEN BACH (1685-1750)
Partitas n°1, n°2 et n°6
Edna Stern (piano) Orchid Classics ORC 1000050. 2014. 1h 10’
un mouvement continu de doubles croches, mais par vient, grâce à une gradation très subtile des nuances et du jeu de la pédale, à en distinguer les pleins de déliés. La pianiste réussit avec une insolente aisance à articuler son discours sans devoir grimacer, à illuminer la partition sans éclairage artificiel. Les oppositions entre triolets et rythmes pointés ( Courante de la Partita n°1 et Gavotte de la Partita n°6) se perçoivent sans briser un élan impérieux. Le lyrisme et le tempo naturellement lent des sarabandes n’immobilisent pas les doigts, et le ballet aérien des mains dans les gigues ne se réduit pas à une simple démonstration technique. La prise de son restitue sans artifice le timbre et le volume du piano, et l’installe dans une acoustique naturelle. Celle-ci valorise ce travail d’orfèvre, de coloriste hors pair et de médiateur musical zélé, qui place d’emblée Edna Stern sur les plus hautes marches de la discographie.
Derrière cet étrange titre, « ME-SU-BACH », où se mêlent l’anglais et l’italien, Edna Stern reconnaît l’autorité de Bach tout en usant de l’hébreu, qui signifie « compliqué ». Si le jeu de mots peut faire sourire, il ne donne pas la moindre indication sur l’orientation de ce disque. Pas un instant, la pianiste ne semble en effet se soumettre, ni chercher sa voie. Et rarement la musique de Bach aura semblé aussi accessible. L’explication se Philippe Venturini trouve sans doute dans la direction interprétative dévoilée dans le texte de présentation, qui choisit la voix comme modèle, la vigueur rythmique et la rigueur structurelle comme guides. Edna Stern tourne ainsi en douceur les pages du recueil en prenant soin de les caractériser. Elle commence par le Prélude de la Partita n°1 où la fluidité naturelle du Inventions et Sinfonias geste ne contredit jamais la Zhu Xiao-Mei (piano) netteté des lignes. De même, Accentus Music ACC30350. l’ Allemande qui suit déroule 2015. 46’ n
66 n PIANISTE n°98 n
mai-juin 2016
À partir d’un recueil destiné à l’éducation de son fils Wilhelm Friedemann, Bach élabora ces Inven tions et Sinfonias. Publié en 1723, cet ensemble partage le même objet pédagogique que le premier livre du Clavier bien tempéré présenté l’année précédente. Si les pièces proposées sont plus courtes, et les tonalités, moins nombreuses (15 au lieu de 24), les principes d’écriture restent identiques : inversion, répétition, circulation des thèmes, canons, modèle fugué, etc. Aussi peut-on imaginer les interprètes inspirés du Clavier bien tem péré dominer sans peine son modèle réduit : « Qui peut le plus, peut le moins », diton souvent. Zhu Xiao-Mei semblait alors désignée pour réussir, elle dont le piano paraît formé depuis toujours à cet « art du cantabile », que réclame Bach dans sa préface. Comme attendu, son interprétation s’attache à éclairer les lignes et à faire entendre les deux et trois voix respectives des inventions et des sinfonias sans menacer l’unité de chaque page : l’immobilisme imposé par les mordants opposé au déploiement de la ligne en doubles croches (Invention n°5) ou la mise en perspective des trois thèmes superposés (Sinfonia n°9). Mais, au-delà d’un tra vail digital toujours soi gné, l’interprétation de Zhu Xiao-Mei convainc par son ton direct, souvent complice mais jamais grandiloquent, et un geste spontané : les n
répétitions du thème colorées par le dosage de la dynamique (Invention n°3), le malicieux cache-cache des deux mains (Invention n°6) et la grâce chorégraphique (Sinfonia n°11). Moins abstraite qu’Evgeni Koroliov, moins désinvolte que Glenn Gould, Zhu Xiao-Mei semble vouloir mettre Bach à la portée de tout public. La pianiste déclare avoir « pensé [aux enfants] en enregistrant ce disque ». Petits et grands
en tireront grand profit.
P. V.
Partita n°4 BWV 828. Tocata BWV 911. Suite anglaise n°3 BWV 808. Fantaisie chromatique et fugue BWV 903. Adagio du Concerto BWV 974. Ich ruf zu dir, Herr Jesu Christ BWV 639 (arr. Busoni). Komm, Gott Schöpfer, heiliger Geist BWV 667. Nun komm, der Heiden Heiland BWV 659. Prélude BWV 535 (arr. Siloti). Jésus, que ma joie demeure (arr. Hess )
Nelson Freire (piano) Decca 4788449. 2015. 1h 21’
Ce disque est une première incursion du pianiste brésilien dans Bach. C’est n
le Bach qu’il aime, celui qui se chante. On ne s’étonne donc pas de la présence des arrangements, dont les phrases sont feutrées et le toucher est obsédé par la clarté ronde des timbres, une chaleur souple qui se répète à l’infini et s’enivre de sa propre beauté. Il s’agit de la plus belle partie du récital, offrant un Bach avant tout équilibré aux timbres du XIX e siècle. On se souvient que Chopin jouait tous les matins un Préludes et Fugues de Bach. Celui de Nelson Freire transpose les rythmes de danses dans un univers qui n’est plus le leur. Le paysan de Thuringe s’est transformé en un gentleman-farmer. Un tel piano ne cherche pas non plus les envolées lyriques. Il est méticuleux et égoïste (c’est bien pour cela qu’on l’écoute de bout en bout), se fichant éperdument d’une quelconque vérité historique. Il se déploie même à contre-style dans la Fantaisie chromatique, qui perd toute la rudesse révolutionnaire de ses arpèges introductifs. En toute logique, les arrangements (Concerto d’après Marcello, transcriptions de Busoni, de Siloti et de Hess) dominent sans conteste le programme. Ils constituent une série de « bis », la Partita en ré majeur et la Suite anglaise en sol mineur passant au second plan. Cela ne devrait pas être, et c’est illogique. Peutêtre. Mais, ici, c’est moins Bach que Nelson Freire qui nous intéresse. Stéphane Friédérich
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Saint-Ursanne (Jura | Suisse) Cloître et Collégiale 2 - 12 août 2016 WILHELM FRIEDEMANN
BACH (1710-1784)
Concertos pour clavecin et cordes Fk41, Fk43 et Fk45. Allegro e forte Fk65. Sinfonia Fk67 Il Convito, Maude Gratton (clavecin et dir.) Mirare MIR 162. 2012. 1h 14’
de sourds entre soliste et ensemble, l’Andante con moto du Concerto n°4 de Beetho ven. Maude Gratton séduit par sa clarté digitale et ses échappées enjouées qu’avive la spontanéité de son jeu. L’ensemble Il Convito pourrait user d’une intonation plus séduisante, mais sans doute a-t-il préféré tirer cette musique vers le Sturm und Drang, quitte à en gommer les (rares) inflexions galantes. Jérémie Bigorie
LUDWIG VAN
BEETHOVEN (1770-1827)
� Le fils aîné de Jean Sebastien
Bach ne se laisse pas aisément enfermer dans une case, tant sa position entre deux âges semble avoir entraîné une juxtaposition des styles, au lieu de la synthèse réalisée par son frère Carl Philipp Emanuel. Aussi laSinfonia Fk67 oscillet-elle entre la suite héritée d’un Haendel ou d’un Telemann (le Menuetto final) et la symphonie (le Vivace initial) dont Sammartini modèle le genre à la même époque. Symphonique, cette interprétation n’en revêt guère l’aspect, servie par un ensemble réduit de six musiciens (deux violons, un alto, un violoncelle, une contrebasse et un clavecin) : on mise ici davantage sur la clarté des textures et le relais serré des motifs entre les instruments. Le morcellement du discours (Andante) leur permet de jouer sur les vides et les pleins en compensant par une intonation volontairement tourmentée des chromatismes, ce qu’un véritable tutti aurait produit de lui-même. Le climat chambriste pré vaut aussi dans les concertos dont la charge expressive, y compris dans le Fk41, réclamerait pourtant davantage d’épaisseur du son : par exemple, l’ Adagio très dramatique du Concerto Fk43 annonce, dans le dialogue
11 bagatelles opus 119. Fantaisie opus 77. Andante favori WoO57. 32 variations WoO80. 6 bagatelles opus 126 Jean-Claude Henriot (piano) Dux 1231. 2015. 1h 11’ � L’interprétation des Varia-
tions Diabelli par Jean-Claude Henriot (Pianiste « Maestro») nous avait enthousiasmés. On retrouve ici les mêmes qualités dans ce programme consacré à des œuvres peu jouées de Beethoven (à l’exception des 32 variations ). Nous ressentons tout d’abord la clarté d’un son racé et d’un jeu décontracté. Nul dilettantisme toutefois, car si chaque respiration paraît d’un naturel évident, tout a été éminemment pensé (on songe à l’approche d’un Brendel). Jean-Claude Henriot prend un risque certain, notamment avec les Bagatelles opus 119, pages épurées qui peuvent rapidement devenir monotones. Il offre une variété étonnante de touchers, une indépendance parfaite des [
13 édition
Giovanni Bellucci Svyatoslav Belonogov Elena Bobrovskikh Valentine Buttard François Chaplin Jean-Yves Clément Charlotte Coulaud Pietro De Maria Henri Demarquette Marc Laforêt Jean-Marc Luisada Jessica Marquis Thierry Ravassard Priscille Reynaud Polina Ushakova Varvara Vassilis Varvaresos Orchestre international de Genève Alexei Ogrintchouk, direction Carte blanche à Michel Onfray Création de Richard Dubugnon Balade culturelle 12 concerts
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voix, tout comme dans la très mozartienne Fantaisie en sol mineur. Il sait également faire preuve d’humour (l’effet « boîte à musique »), qualité peu répandue chez Beethoven, qui emprunte ici à Haydn. Les Bagatelles opus 126 bénéficient d’un jeu fluide, faussement badin, qui accentue, paradoxalement, le sentiment de solitude et de regret. Cette conception passionne alors qu’elle est complètement à l’opposé des lectures de Gulda, de Richter et de Kovacevich. Jean-Claude Henriot montre une fois encore qu’il est un architecte remarquable de l’univers beethovénien. Ses Variations en ut mineur marquent. Gilels, Horowitz les concevaient comme une aventure survoltée à la dimension symphonique. Plus attaché au lyrisme et à la beauté du galbe mélodique qu’à une expression grandiose, le présent interprète nous rappelle davantage les approches d’Arrau, de Lupu et de Perahia. Il creuse le son avec un plaisir évident et nous interpelle, au lieu d’imposer un monologue austère. Un très grand Beethoven d’un pianiste hélas S. F. bien méconnu. [
COFFRETS EUGENE ISTOMIN (1925-2003) « The Concerto and Solo Recordings » Sony Classical 88875026172, 12 CD. 1945 à 1969. 11 h 27’
isciple entre autres de Serkin et de son assistant, Horszowski, le pianiste américain Eugene Istomin débuta sa carrière aux États-Unis, en partie grâce à sa collaboration avec Adolf Busch. Ses relations avec Pablo Casals et ses multiples rencontres ultérieures (le Trio qu’il forma avec EMIL GILELS Leonard Rose et Isaac Stern) ont ouvert son (1916-1985) « The Complete Recordings répertoire dont le disque ne donne qu’une pâle idée (Beethoven, Brahms, Debussy, on Deutsche Grammophon » Chopin, Stravinsky, Rachmaninov, Bach, etc.). Deutsche Grammophon 4794651, 24 CD. Dans l’après-guerre, Istomin bénéficia de 1935 à 1985. 26 h 11’ e piano de Gilels est d’abord celui l’évolution très rapide des techniques d’enrede la clarté. Il livre tout d’un jet, gistrement liées à la stéréophonie. Il « servit » qu’il s’agisse d’une sonate de Beetho- aussi de faire-valoir des maisons de disques ven ou d’une Pièce lyrique de Grieg. Il en concurrence (Columbia face à RCA, etc.), donne l’impression d’avoir tout dit avec gravant ainsi des « tubes» comme les Concer- un souci de la perfection aux antipodes tos de Rachmaninov (n°2) , de Tchaïkovski d’un Richter, par exemple. Rigueur absolue (n°1) , de Brahms (n°2) , de Chopin (n°2) , de dans la réalisation, concentration totale Beethoven (n°4, n°5…), avec Philadelphie et dans la dimension classique (quasi-inté- Ormandy. Il y avait alors pléthore de chefs, grale des sonates de Beethoven) ou roman- ancienne et nouvelle générations (Ormandy, tique (Chopin, Schubert et Brahms). Il fait Walter, Bernstein, etc.), mais aussi les «monu jaillir la violence des architectures, n’impro- ments » du piano de l’époque : Janis, Horovise jamais dans l’instant. witz, Richter, Gilels, Rubinstein, Van Cliburn… Lyrisme décanté, équilibre, sens de la dra- Le legs d’Istomin se situe moins dans les maturgie : les deux Concertos de Brahms concertos que dans les récitals, sa personavec Jochum et Berlin sont des incunables! nalité plutôt intériorisée lui ayant barré les On écoute les Ballades de Brahms, lumi- portes d’une notoriété internationale comneuses, les marmoréennes Polonaises et parable aux noms cités. Cela étant, Istomin Sonate n°3 de Chopin – tenue comme chez fut un musicien admiré de ses confrères. Ses personne d’autre – et le sommet, inacces- Nocturnes de Chopin au toucher délicatement sible aujourd’hui encore, les Pièces lyriques perlé, ses Intermezzi de Brahms chaleude Grieg. Ajoutons le Quintette « La Truite » reux et comme « cuivrés », sa Sonate en ré – avec les Amadeus –, les trios – en mono – majeur de Schubert magnifique… À ces beaux de Haydn et de Beethoven, avec Kogan et témoignages, on ajoutera quelques docuRostropovitch, mais aussi les Troisièmes ments tels que les concertos de Bach et de concertos de Prokofiev et de Kabalevski, Mozart, sous la direction de Casals (prises avec Kondrachine et Kabalevski : l’art de de son de 1950 et 1951 assez « raides »), et réunir l’expression la plus rigoureuse avec un disque d’archives non publiées la fantaisie des deux chefs! (Beethoven et Chopin). S. F. Des oubliés de la discographie méritent le détour : le Quintette d’Aliabev, avec Kogan et Shapiro, le Quatuor n°1 de Fauré, avec Kogan, Barshaï, Rostropovitch, le Concerto « L’Empereur » de Beethoven, avec Sanderling, à Leningrad en 1957 – quel souffle! –, et, enfin, les premiers témoignages des années 1930 : des pièces brèves et savoureuses de Loeillet, de Rameau, de Mendelssohn, de Schumann et une Ballade n°1 de Chopin « incendiaire », etc. À thésauriser. S. F.
D
L
68 n PIANISTE n°98 n
mai-juin 2016
JOHANNES
BRAHMS (1833-1897)
avait principalement consacré ses enregistrements au répertoire russe. Après un détour chez Maurice Ravel, elle offre un large florilège pianistique des partitions majeures de Brahms. Cette invitation au voyage s’ouvre par la transcription pour la main gauche de la célèbre Chaconne en ré mineur d’après Bach, qui atteint, dans cette version austère, une pureté de ligne et une qualité de phrasé souveraines. Impétueuse et sensible dans les Klavierstücke opus 76, fougueuse mais sans brutalité dans les Rhapsodies opus 79, la soliste se montre tour à tour rêveuse et emportée dans les Fantaisies opus 116, prises à un tempo relativement rapide, qui leur enlève une part de mystère et de clair-obscur. Son exécution stylistiquement exemplaire, servie par le timbre coloré du piano, retrouve avec bonheur le parfum ambré de l’écriture du dernier Brahms, sans atteindre la luminosité rayonnante de Kempff dans l’opus 76 (Deutsche Grammophon), la puissance véhémente de Katchen ou la vocalité de Lupu (tous deux chez Decca), l’énergie de Kovacevich (Philips), la fulgurance d’Argerich (Deutsche Grammophon) pour les deux Rhapsodies et, surtout, la profondeur de Gilels dans l’opus 116 (Praga). Cela dit, ce disque, réalisé par une musicienne accomplie, mérite de figurer en bonne place dans la discographie. Michel Le Naour
Chaconne pour la main gauche d’après Bach. 9 Klavierstücke opus 76. Rhapsodies opus 79. 7 fantaisies opus 116 Anna Vinnitskaya (piano) Alpha 231. 2015. 1h 12’
Depuis sa victoire au Concours Reine Elisabeth en 2007, Anna Vinnitskaya n
Concerto pour piano n°1 opus 15. Ballades opus 10
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Du 5 au 14
À 2h30 de Paris en TGV Paul Lewis (piano), Orchestre symphonique de la Radio suédoise, dir. Daniel Harding Harmonia Mundi HMC902191. 2014. 1h 12’
Après ses grands cycles Beethoven et Schubert, le pianiste anglais se lance dans l’aventure Brahms. Le début du Premier concerto déroute. La sonorité pesante et comme écrasée de l’orchestre, son peu de projection n’offrent guère d’écho à l’expression dramatique de la partition. La tension retombe rapidement, tout comme la tenue rythmique. Le piano entre et se tient à l’écart de tout pathos. L’interprétation est objective, presque distante. Au fil du mouvement, l’engagement se fait plus étroit, soliste et orchestre entament un beau dialogue. L’Adagio est plus réussi avec un côté altier, une plénitude sombre. L’homogénéité des pupitres et du soliste s’accomplitdans un lyrisme décanté et un tempo mesuré. On va ici à l’essentiel, et l’auditeur regrette que ni la plastique sonore du clavier, ni celle de l’orchestre n’imposent un tempérament plus fort. Chacun s’en tient à la clarté du chant, sans effervescence. Les dynamiques sont habilement creusées sans pathos, et la narration se déploie, un peu froide tout de même. Le finale est le plus réussi des trois mou vements. Son énergie contrôléeet sa lucidité impressionnent, à défaut de séduire. Les quatre Ballades ont la même froideur apparente que le concerto. Vision automnale portée par une éloquence lapidaire, qui correspond aux climats schumanniens et à la volonté dramatique du compositeur. Paul Lewis joue parfaitement avec le grain rugueux du piano et de la prise de son. Sa version à la fois pudique et chargée d’émotions est intéressante. La meilleure partie du disque, S. F. certainement.
juillet 2016
FRÉDÉRIC
18 concerts
CHOPIN (1810-1849)
n
28e
Ballades n°1 à n°4. + Henri Dutilleux : Sonate. 3 préludes
. s m a i l l i W l e i n a D : n o i t a r t s u l l I r f . a g r u y . w w w : e u q i h p a r g n o i t p e c n o C
FESTIVAL INTERNATIONAL DE COLMAR
Arthur Ancelle (piano) Melodiya MELCD 1002399. 2015. 1h 12’
Comment apporter sa pierre à l’édifice gigantesque que sont les quatre Ballades, parmi les pièces les plus jouées et enregistrées du répertoire romantique? À moins de leur infliger des expressions qui n’appartiennent pas à leur univers, elles sont le plus souvent interprétées avec l’angoisse de ne pas respecter la méticulosité du « texte sacré ». Arthur Ancelle fait partie de ces artistes qui regardent au-delà des notes. Non point par souci de l’originalité pour l’originalité, mais parce qu’il s’intéresse avant tout à la dimension littéraire et picturale de l’œuvre. C’est ainsi que la Ballade n°1 construit un paysage avec un trait puissant. La n°2 installe un refrain comme improvisé, puis s’ouvre sur une tempête qui donne le sentiment d’inachèvement. Des éléments de chorégraphie étonnent dans la n°3 , gorgée de mouvements, de figures obsessionnelles, dont l’intranquillité nous poursuit. La Ballade n°4, aux effluves schubertiens tout d’abord, sans fard, resserre les émotions, se déploie par chapitres, commente et tisse des dialogues de plus en plus complexes. Celle-ci prend le temps du récit dont l’éclatement brusque dérange et nous interroge. Le charme angoissé se poursuit avec la Sonate de [ n
Direction artistique : Vladimir SPIVAKOV Avec notamment :
Orchestre National du Capitole de Toulouse, Orchestre National Philharmonique de Russie, Trio Atanassov, David Bismuth, Gautier Capuçon, Renaud Capuçon, Mihhail Gerts, Vadim Gluzman, Quatuor Hermès, Solenne Païdassi, Philippe Quint, Tugan Sokhiev, Grigory Sokolov, Vladimir Spivakov, Camille Thomas, Andrew Tyson... Renseignements : 03 89 20 68 97
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Le réseau du Piano mai-juin 2016
n PIANISTE n°98 n 69
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ENTRETIEN AVEC… PASCAL AMOYEL
T O L L I M E T S I T P A B N A E J
« LES CHEVAUCHÉES HÉROÏQUES D’UNE NATION EN ARMES » CONCERTISTE, ENSEIGNANT, COMPOSITEUR ET ACTEUR AUSSI, L’ARTISTE SORT « POLONIA », UN NOUVEAU DISQUE CONSACRÉ AUX POLONAISES DE CHOPIN, CHEZ LA DOLCE VOLTA. RENCONTRE AVEC UN TOUCHE-À-TOUT.
Q
ue représentent pour vous jusq ue dans un chant de dépl oles Polonaises de Chopin? ration et de mort dans la Polonaise Sur un plan personnel, je me opus 40 n°2. souviens de les avoir décou- Vous interprétez ces pages vertes grâce à mon grand-père polonais dans des tempi mesurés exilé en France. Les Polonaises expri- qui en soulignent la dimension ment la nostalgie d’un pays et l’expres- théâtrale… sion dramatique d’un peuple qui a Je ne perçois pas les fanfares miliconnu de multiples souffrances. taires comme vindicatives. Ces poloQuelle est la dimension populaire naises ne sont pas victorieuses. En de ces pages? fait, elles révèlent à la fois une Les marches qui portent les polonai- forme d’impuissance, de sidération ses remontent très loin dans le temps, devant les événements historiques, et même si Chopin en transcende et jusqu’à une jubilation dans la la forme, elles puisent leur éner- Polonaise-Fantaisie. gie dans leurs racines, la terre de Quelle sorte de sonorité, et donc Pologne. Si les mazurkas relèvent d’instrument, avez-vous recherché de la métaphore, les polonaises pour votre disque? sont en prise directe avec la matière Le son est une question centrale. vivante. Le compositeur et l’homme Contrairement à mon précédent s’y rejoignent. Chopin s’y confie disque consacré aux nocturnes, je ne de la manière la plus touchante, voulais pas que cela sonne « beau »,
70 n PIANISTE n°98 n
mai-juin 2016
au sens convenu du terme. La polonaise laisse une très grande liberté de choix, d’autant plus qu’elle traduisait alors une urgence [l’occupation de Varsovie par l’armée russe, ndlr] , et que Chopin jouait
sur les pianos qu’il trouvait. Qui plus est, l’esprit de la polonaise a évolué au fil du temps. D’un climat de révolte, elle a rejoint parfois l’esprit du nocturne. Plus qu’ailleurs, Chopin modèle la forme à sa convenance. J’ai joué sur des pianos anciens, ceux de l’époque du compositeur, des Pleyel des années 1830. C’est passionnant, mais pour moi, ces instruments ne sont pas achevés. Il y a beaucoup de choses que l’on apprend d’eux, et d’autres que l’on ne peut réaliser que sur un piano moderne. Jouer avec le vibrato,
utiliser des quarts de pédale, par exemple. Chopin est tellement précis dans ses partitions! Quels sont les dangers et les difficultés dans l’exécution des Polonaises ? Il faut, certes, respecter le texte, mais surtout la source d’inspiration du compositeur. Les indications de Chopin ne sont pas des ordres ! Elles sont écrites pour que l’on ne fasse pas ce qu’il n’indique pas. Cela, je le perçois aussi en tant que compositeur. Il faut ensuite faire preuve d’endurance physique et mentale (maîtriser et varier des cellules rythmiques répétées, une polyphonie et une harmonie, voire un contrepoint, complexes), surtout dans l’opus 44 et la Polonaise- Fantaisie, deux œuvres visionnaires. Dans cette dernière, on s’interrogera sur la combinaison en apparence contradictoire de la polonaise et de la Fantaisie. Pour tout cela, la règle est simple : ne jamais séparer le travail technique de la pensée musicale. Toutefois, la principale difficulté, ténue pourtant, est ailleurs. Il s’agit de penser l’œuvre autrement qu’elle a toujours été jouée. J’ai déteste l’originalité pour l’originalité, mais il est essentiel de trouver en soi une fraîcheur d’inspiration. Tansman, Scriabine et quelques autres compositeurs se sont essayés à la polonaise. Elle semble pourtant avoir disparu… La polonaise de Chopin n’a pas eu de descendance. Elle disparaît après lui, car l’œuvre est ancrée dans une épo-que précise. Le cri de désespoir est universel, et pourtant il demeure, ici, singulier. Propos recueillis par Stéphane Friédérich
SES PROCHAINS CONCERTS
14 mai Festival de Fontmorigny (18) : récital 15 mai Festival de Fontmorigny (18) : récital avec la violoncelliste Emmanuelle Bertrand 21 mai Clayes-sous-Bois (78) : récital 27 mai Le Blanc-Mesnil (93) : « Le Pianiste aux 50 doigts » 5 juin Paris : récital aux Bouffes du Nord, dans le cadre du festival du Palazzetto Bru Zane (Alkan, Chopin, Godard et Liszt) 1er juillet Saint-Étienne-le-Molard (42) : récital 6 juillet Vermenton (89) : récital 13 juillet Festival Chopin à Bagatelle : récital (programme du disque)
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Dutilleux. Le pianiste rappelle, dans le livret, le caractère révolté du compositeur et de son œuvre. Celle-ci apparaît en effet plus proche de Chopin que de Ravel, moins « fabriquée » qu’on ne le croit, malgréla précision fanatique de l’écriture. Voilà une version qui passe d’un piano aux couleurs mordorées (superbe Yamaha CFX !), de l’impressionnisme annoncé par Chopin, déjà, aux éclats d’un ballet imaginaire et mystique déconnecté de toute avant-garde (1948). Étonnante et passionnante conception, qui s’achève par de gouleyants Préludes, condensé symbolique d’un siècle et demi d’histoire du piano. Un récital magnifique. [
S. F.
Polonaises opus 26 n°1 et n°2, opus 40 n°1 et n°2, opus 44 et opus 53. Polonaise-Fantaisie opus 61 Pascal Amoyel (piano) La Dolce Volta LDV25. 2015. 1h03’
ainsil’épaisseur polyphonique, le chant essentiel et, une fois n’est pas coutume chez Chopin, à la main gauche. Le superbe Steinway respire, sans pour autant sombrer dans la nostalgie « touristique ». Délicat jeu d’équilibriste dans lequel doit prévaloir l’expression de la solitude. Comme Chopin n’est le porteflambeau de personne, l’interprèteen propose une dimension littéraire et une vérité charnelle passionnantes. L’esprit de la danse réapparaît dans ce piano si chargé de paroles et qui s’affranchit parfois de l’apesanteur de la table d’harmonie. L’opus 53 n’est plus compris – et c’est heureux – comme une étude de Liszt. Il s’impose comme un acte d’opéra, genre que Chopin affectionnait et qu’il ne se sentit jamais la force d’affronter. Ces polonaises ne sont décidément pas héroïques, mais d’une noblesse bien plus grande, car les combats y sont achevés. C’est l’heure d’un douloureux bilan, porté avec l’espoir d’un avenir meilleur dans la Polonaise-Fantaisie . S. F. CLAUDE
DEBUSSY (1862-1918)
Nouveauté, stéréo §§§§
Il ne s’agit pas ici d’une intégrale, mais d’une sélection des grandes polonaises marquées par l’exil. Exil physique et intérieur. C’est précisément de ce dernier dont il s’agit, et l’interprétation diffère profondément de la plupart de celles que nous connaissons. En gage d’authenticité supposée, bien des pianistes s’en tiennent fermement au rythme de la marche. Une marche transfigurée par la révolte, la virtuosité en uniforme. L’allure de ces pages est pourtant clairement modérée. C’est cette lenteur, pesanteur parfois même justifiée, que maîtrise à merveille Pascal Amoyel. Il souligne n
Pour le piano. Estampes. 12 études Marie Vermeulin (piano) Printemps des Arts de Monte-Carlo PRI018. 2015. 1h 17’
La pianiste Marie Vermeulin s’est fait une spécialité dans le répertoire contemporain : en 2007, elle a obtenu le 2 e Prix du Concours Olivier-Messiaen de la Ville de Paris et reçu les conseils de Roger Muraro. À présent, n
elle s’attaque au clavier ondoyant et divers de Claude Debussy au travers de deux triptyques (Pour le Piano et Estampes) et de la cathédrale sonore des Études. Sa lecture claire et précise révèle une musicienne qui sait doser les sonorités et éclairer en profondeur la matière brute de ces partitions qui oscillent entre étrangeté et abstraction. Sans doute plus proche de Mondrian que de l’impressionnisme ou du symbolisme, Marie Vermeulin réussit avec habileté à varier les contrastes et à enchaîner les séquences avec une maîtrise technique et une agilité digitale jamais prises en défaut. Au fil de ce voyage sonore s’affirme une vraie personnalité qui raconte une histoire (Toccata, Jardins sous la pluie) et crée intelligemment une progression dans les Études, même si la dernière d’entre elles, Pour les accords, manque d’attaque et se réfugie plutôt dans une recherche de timbres. Le piano, capté avec beaucoup de présence, ne cache rien des intentions de la pianiste dont le jeu est passé au scalpel. D’un réel intérêt, ce CD ne remet cependant pas en cause la primauté de Jean-Efflam Bavouzet (l’intégrale chez Chandos), de Samson François (Emi), de Claudio Arrau (Philips) dans les Estampes ou Pour le piano ; et Maurizio Pollini (DG), voire Mitsuko Uchida (Philips), restent les interprètes inégalés des Études. M. L. N. ENRIQUE
GRANADOS (1867-1916)
Goyescas. Escenas Poéticas. Intermezzo de l’opéra Goyescas. El Pelele Joop Celis (piano)
Ciccolini, de Nikita Magaloff, de Jean-Marc Luisada et de Luis Fernando Pérez. S. F.
Bis 2122. 2014. 1h 17’
LISZT
Peu de pièces semblent plus proches du jeu à la fois intimiste et éclatant de la guitare que les Goyescas dédiées au piano. L’œuvre phare de Granados révèle, jusqu’à la saturation de l’espace sonore, sa science de coloriste. Les couleurs empruntent aux toiles de Goya et mêlent à la fois l’amour et la tragédie, illustrant la vie espagnole dans un style à la fois sensuel et brutal. Les interprètes ibériques seraient a priori les plus qualifiés pour déceler la part cachée d’improvisation de cette musique et en exalter tous les parfums. Et c’est pourtant un pianiste hollandais qui nous offre ce somptueux récital ! Rien, dans son parcours et son répertoire, n’indique qu’il se soit imprégné à ce point de cette musique. Dès la première pièce des Goyescas, Joop Celis « orchestre » son piano avec une ferveur dans le grand geste romantique, mais aussi avec une précision superbe, que la remarquable prise de son libère. Sa variété de toucher équilibre parfaitement les éclairages d’une musique jouée avec autant de verdeur rythmique que d’absence de sentimentalisme. Il voit loin et touche juste, soulignant ce qu’il est nécessaire du caractère pittoresque ( Esc enas Romanticas ), le tout enrobé dans une virtuosité qui ne retient pas ses effets. Les nuances ne sont jamais sur jouées, mais personnalisées dans une œuvre qui ne laisse pourtant pas un instant de répit, tant les contrastes de toutes sortes jaillissent comme un torrent. Ce récital à marquer d’une pierre blanche rejoint au sommet de la discographie les témoignages d’Alicia de Larrocha, d’Aldo n
FRANZ (1811-1886)
Harmonies poétiques et religieuses Michael Korstick (piano) CPO 777951-2. 2 CD. 2013. 1h 25’
On escomptait beaucoup du nouveau recueil lisztien de Michael Korstick dont les Années de pèlerinage, la troisième surtout avec des Cyprès de la Villa d’Este d’une noirceur plombée, atteignaient des cimes d’inspiration… que l’intégrale signée Bertrand Chamayou (Naïve), parue peu de temps après, éclipsa. On n’est pas déçu, même si l’univers des Harmonies se caractérise par davantage d’intimité et de moments d’infinie tendresse. Aldo Ciccolini (Emi) a su en capter les résonances, appareillant son jeu à la lyre, que le compositeur n’avait eu de cesse de changer d’épaule au gré des poèmes de Lamartine. Incontestablement, Korstick possède la technique et l’endurance nécessaires aux grandes pages où souffle le romantisme le plus grisant, de la Bénédiction aux Funérailles, en passant par Pensée des morts. Comme il est très attaché à étager les sonorités comme à faire chanter l’instrument dans tous les registres, son toucher a souvent tendance à s’emballer, tributaire de tempos erratiques, à l’opposé de la version sagement décantée d’un FrançoisFrédéric Guy (Zig-Zag). Il y a quelque chose de schumannien dans les sautes [ mai-juin 2016
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CHRONIQUES DISQUES, DVD RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC LE MAGAZINE
LES LEÇONS DU PASSÉ VLADIMIR SOFRONITSKY Chopin : Nocturnes opus 15 n°1 et n°2. Scherzos n°1 et n°2 Chostakovitch : Préludes et fugues opus 87 Debussy : Serenade for the Doll Liadov : Valse opus 32 Liszt : Après une lecture du Dante Mozart : Fantaisies K.475 et K.396 Prokofiev : Sarcasmes opus 17 n°5, Sonate n°7 Rachmaninov : Moments musicaux opus 16 n°2 et n°5 Schubert : Impromptus opus 90 n°3 et n°4 Schumann : Carnaval opus 9, Fantaisie opus 17. Études symphoniques opus 13. Sonate n°1 Scriabine : Sonates n°4, n°5, n°8, n°9 et n°10. Poème opus 34. Valse opus 38. Études opus 8 n°11 et n°12. Préludes opus 11 n°4, opus 13 n°6, opus 9 n°1, opus 11 n°10, n°17, n°19, n°20 et n°23 et opus 16 n°5. Le Masque opus 63 n°1. Poèmes opus 43 e t opus 69. Mazurka opus 40 n°2 + DVD Les Génies : Vladimir Sofronitsky, un film d’Andreï Konchalovski 6h 20’ +DVD 44’
out a déjà été dit sur Sofronitsky, le « Cortot russe », un artiste qui possédait une aversion des studios et qui fut le seul pianiste devant lequel Neuhaus, Gilels, Yudina, Richter, entre autres, se prosternaient. On rêve d’avoir assisté à l’un de ses récitals. Chaque intervention était un sacrifice mystique, et la scène lui servait d’autel, disait-on. En quelques secondes, nos oreilles s’habituent à une sonorité incomparable. Du toucher de Sofronitsky, il émane une vibration, une énergie vitale, une saturation des couleurs, qui sont une signature unique, aussi reconnaissable que chez Cortot, Horowitz, Cziffra ou Richter. On est subjugué par la Fantaisie de Schumann, les scherzi de Chopin, qui font dresser les cheveux sur la tête. Ce n’est pas tant la prouesse technique qui fascine, mais cette curieuse sensation d’improvisation, comme si l’œuvre jaillissait de l’encre encore humide de son manuscrit. Scriabine, évidemment irremplaçable, mais aussi le Carnaval de Schumann dont les évocations poétiques nous emmènent à la limite de la folie, dans un silence parfois insupportable après une levée des mains. Avec Mozart, il n’est plus question de « style », mais d’une tragédie. Le Moment musical opus 16 n°2 de Rachmaninov apparaît comme le prolongement du finale de la Sonate « Funèbre » de Chopin. Même la Sonate n°7 de Prokofiev, captée dans des conditions acoustiques « limites » avec un piano qui détimbre, nous laisse sans voix. « Un mystère, une incompréhension » , comme le souligne le documentaire remarquable d’Andreï Konchalovsky (sous-titré en anglais). Ce magnifique coffret ne fait pas doublon avec les innombrables éditions, car Melodiya S. F. est parti des sources originales.
T
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d’humeur et cette liberté capricieuse qui fait fi de la barre de mesures. On pourra trouver en contrepartie que le pianiste allemand ne ménage pas assez ces effets, atteignant trop vite l’acmé expressive (Invocation, Funérailles) ou ne donnant pas à saisir la grande arche de Bénédiction, en dépit, là aussi, de très beaux moments (les inflexions mahlériennes du passage en si bémol). Les morceaux religieux à l’écriture dépouillée (Ave Maria, Pater Noster) restent plus équilibrés. Si elle n’égale pas celle d’Aldo Ciccolini, l’interprétation de Michael Korstick trace son sillon d’une manière singulière. Elle possède un ton auquel on a envie de revenir. J. B.
digitale (fluidité inouïe des arpèges, notamment) et mentale… Il maîtrise tous les paramètres en termes de dynamique, de couleurs et, plus encore, d’architecture. Sa conception est entièrement organique, offrant un voyage sonore sans baisse de tension. L’échelle de gradation du toucher et de la dynamique est immense. Tout est sous contrôle, et c’est peut-être dommage. Car on attendait que l’interprète s’expose à son tour, au lieu de contenir le drame, de refuser de s’engager. C’est ce qu’ont accompli de manière très différente Zimmerman et Pogorelich. Liszt dédia sa Sonate à Schumann. Si celle-ci est un tout organique – au même titre que la musique de Brahms qu’Angelich joue tant –, l’univers de Schumann et les Kreisleriana sont à l’opposé de cet esprit. Le pianiste donne le sentiment de se battre contre l’œuvre, de vouloir lui extirper des ressorts logiques qui n’existent pas. Il analyse sans cesse la partition, raidissant le jeu Sonate en si mineur. (Äussert bewegt) ou le libérant + Schumann : (Intermezzo I), comme s’il Kreisleriana opus 16. souhaitait faire entrer la pièce + Chopin : Études dans sa propre logique. C’est opus 10 n°10 et n°12 une lutte fantastique, mais Nicholas Angelich (piano) perdue d’avance. Enfin, les Erato (Warner Classics) deux Études de Chopin sont 0190295990671. 2015. 1 h 18’ un régal d’élégance et d’intelS. F. ligence musicale. n Nicholas Angelich a beaucoup joué Liszt dont il a gravé les Années de pèlerinage WOLFGANG AMADEUS (Mirare). La Sonate en si mineur attendait. Un voyage MOZART exigeant techniquement (bien (1756-1791) que l’on se demande quelle œuvre pourrait craindre un tel pianiste ?), mais surtout parce qu’il faut s’y dévoiler : rappelons que Liszt a systématiquement refusé de faire travailler cette partition à ses élèves, car il la jugeait bien trop personnelle. Angelich impressionne tout d’abord par le sentiment de Musique pour clavier, sécurité, de domination de vol. 8 et 9 la partition qu’il impose à Kristian Bezuidenhout l’auditeur. Transcendance (pianoforte) [
Harmonia Mundi HMU 907532.33. 2 CD. 2013-2014. 2h 33’
Khristian Bezuidenhout achève ainsi son intégrale de la musique pour piano de Mozart, guidé, depuis le premier volume, par un même souci de diversité. À la chronologie, l’artiste a en effet préféré le mélange des genres et des époques. Le présent double CD réunit donc les ultimes Sonates K.545 (1788) et K.576 (1789), avec des cycles de variations antérieurs ( « Dieu d’amour » K.353 de Grétry) et quelques pièces isolées, parfois fragmentaires, complétées par Robert Levin. Fidèle à son pianoforte inspiré par un Anton Walter & Sohn, Kristian Bezuidenhout rappelle quelle complicité il entretient désormais avec la musique de Mozart, qu’il semble improviser. La célèbre Sonate dite «Facile», K.545, qui ouvre le programme, en témoigne. La fluidité du phrasé, conduit par une main gauche motrice, régulière mais jamais mécanique, l’ornementation discrète des reprises, la subtile gradation des nuances, les changements de lumière font redécouvrir un Allegro initial, que l’on a entendu si souvent sans relief parce que didactique. Et, dans l’ Andante, l’artiste profite des possibilités infinies de son instrument pour mettre à jour les abîmes que dissimule si habilement Mozart derrière un style d’apparence galante, soutenu par l’iné vitable basse d’Alberti. Du style ancien, majestueux, appris chez Haendel (Suite K.399 et son ouverture à la française) à l’humour lapidaire de pages brèves (Gigue en sol K.574, Petite marche funèbre K.453a), en passant par le nécessaire arc-en-ciel des variations, Kristian Bezuidenhout évolue dans cette musique avec une rare aisance et une grâce singulière. Il parle couramment le Mozart, au point d’en révéler les n
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non-dits et les doubles sens. Son intégrale est désormais celle avec laquelle il faudra aborder cette musique. P. V.
ROBERT
SCHUMANN (1810-1856)
Variations Abegg. Papillons. Fantaisie. Chants de l’aube Alessandro Deljavan (piano) Academy Production. 2014. 1h 13’ � Alessandro
Deljavan s’est fait remarquer en se présentant deux fois au concours Van Cliburn en2009 et 2013.
Ces trois disques permettent de se familiariser avec ce pianiste italien encore méconnu en Europe. Dans le CD Schumann, la pâte sonore, le sens de la narration, l’art de ciseler amoureusement le piano révèlent une sensibilité délicate à l’expression directe (Papillons) : nulle quête du fantastique, ni d’un voyage intérieur, mais un lyrisme souverain signale la Fantaisie. On ne trouvera nulle dureté non plus, mais un piano simplement heureux de se déployer dans l’espace. On songe ici à Catherine Collard (Erato) et Wilhelm Kempff (Deutsche Grammophon). Chaque phrase est portée avec sérénité, et le finale respecte l’indication de tempo « langsam getragen » (lent et soutenu). Deljavan propose également une interprétation très
réussie des Chants de l’aube, œuvre ultime de Schumann, aux frontières du silence.
� Après Chopin et
Mozart, le pianiste canadien d’origine polonaise réussit un très beau S. F. Concerto de Schumann. Dans les deux premiers albums de l’interprète, le jeune âge – peut-être – expliquait une certaine uniformité du jeu. Aujourd’hui, Lisiecki s’épanouit davantage. La passion du beau son est dépassée, et on découvre un artiste qui fourmille d’idées. Son toucher est subtil, d’une vélocité qui sait mesurer la passion et traduire les Concerto pour piano opus 54. Introduction changements incessants d’atmosphères du concerto. et Allegro appassionato Superbe accompagnateur, opus 92. Introduction Antonio Pappano reste et Concert-Allegro opus 134. Rêverie extrêmement attentif pour opus 15 n°7 être parfaitement en phase Jan Lisiecki (piano), Orchestre avec un toucher aussi délicat de l’Académie nationale que volatile. Les solistes de Sainte-Cécile de Rome, l’orchestre se placent en dir. Antonio Pappano retrait, et chacun, d’emblée, Deutsche Grammophon 4795327. choisit d’aborder l’œuvre en 2015. 59’ chambriste. Cela procure
une homogénéité heureuse et d’autant plus difficile à traduire que les deux derniers mouvements furent composés quelques années après l’ Allegro affetuoso. On apprécie la simplicité, le naturel, la grâce même dans l’ Int ermezz o jam ais appuyé, et pourtant si expressif. Jan Lisiecki évacue toute nostalgie, tout élan romantique trop typé. Une forme de pudeur qui lui avait réussi dans les concertos de Mozart (avec Christian Zacharias). Le climat passionné de l’ Introduction et de l’ Allegro appassionato, puis celui de l’ Introduction et du Concert-Allegro sont plus contenus, comme dans un concerto de Chopin. Le geste paraît plus classique que romantique, la virtuosité se pliant à la courbe mélodique. De la nuance en toute chose… S. F. [
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RARETÉS
musique pour piano se ressent parfois de cette ascendance par son raffinement, ses moirures harmoniques et son refus BENJAMIN de tout pittoresque, elle évite GODARD tout décalque. Les œuvres pia(1849-1895) nistiques de Roger-Ducasse se concentrent entre 1906 et 1923. Certains de ses titres évoquent immanquablement Chopin (Barcarolles, Préludes, Études, Impromptus), mais on trouve aussi des Variations sur un choral, un Chant de l’aube (à moi, Schumann !), deux Arabesques (à moi, Schumann et Debussy !), une Romance, des pièces séparées (Rythmes, Œuvres pour piano vol. 1 : Sonate n°2. Sonate Sonorités), une Petite suite pour fantastique. Promenade piano à quatre mains et de en mer. Sur la mer. charmantes Études faciles. Le Au matin. Conte de fée* troisième volume de ce coffret + comprend également deux réductions pour piano d’œu vres orchestrales interprétées avec le concours d’Adrian Farmer et, entre autres, la transcription de la Passacaille en ut mineur de Bach. Le disque ne s’est jamais vraiment intéressé à RogerDucasse. Parmi la discographie accessible, on trouve Œuvres pour piano vol. 2 : seulement un CD complet du pianiste français DomiRêve vécu opus 140. Jacques Bonnaure nique Merlet (Mandala, Nocturnes n°1 à n°4. 3 morceaux opus 16. réédité par Bayard). SpéciaFantaisie opus 143. lisé en musique française, JEAN Renouveau opus 82. Martin Jones trouve ici le ROGER-DUCASSE ton juste en travaillant des Fragments poétiques (1873-1954) opus 13** sonorités sensuelles, mais Éliane Reyes (piano) en ne se limitant pas à une Grand Piano GP683* et GP684**. lecture hédoniste, car les 2014. 1h07’* et 1h03’** tensions harmoniques, les rythmes parfois acérés et la n Plusieurs raisons peuvent expliquer l’oubli dans lequel puissance de certains passont tombées les œuvres de sages sont bien rendus. J. B. Godard. D’abord, il est mort jeune en un temps où l’esthétique dominante de la musiJOSEPH-GUY que française évoluait et ROPARTZ s’éloignait du romantisme L’œuvre intégrale (1864-1955) qu’il avait défendu. Ensuite, pour piano il laisse un épais catalo- Martin Jones (piano) gue dans lequel il convient Nimbus Records NI 5927. de faire des choix. Ainsi, 2013-2014. 3h06’ ne mettra-t-on pas les char- n Comme Ravel, Kœchlin ou mants mais un peu futiles Enesco, Roger-Ducasse fré Morceaux opus 16 au même quenta la classe de composiniveau que les Nocturnes : tion de Fauré. Il était le disces derniers composés au dé- ciple chéri du maître, qui lui but des années 1880, donc confia notamment l’orchescontemporains des premiers tration de son requiem. Si sa [
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essais de Fauré, se réapproprient et revisitent le style romantique. La Sonate fantastique (1881), dont chaque mouvement porte un titre, n’a rien d’inquiétant, même si cette musique bien composée, équilibrée, aux ambiances bien définies, se révèle extrêmement agréable. La Sonate n°2 (1884), d’un style plus soutenu et romantique « à l’allemande », s’ouvre dans une atmosphère authentiquement fantastique et se referme sur un scherzo final, qui peut évoquer Mendelssohn. Éliane Reyes, professeur au Conservatoire royal de Bruxelles, défend ce programme original avec un bel engagement et l’enveloppe d’une sonorité ronde, puissante et diversifiée. Elle se montre aussi à l’aise dans les moments de haute voltige que dans les raffinements harmoniques les plus délicats. Elle fait même montre d’humour comme dans le Fragment poétique dédié à Hugo, si peu hugolien, mais joué avec une pincée d’ironie.
Dans l’ombre de la montagne. Un prélude dominical et six pièces à danser pour chaque jour de la semaine. Choral varié. La Chanson de Marguerite. First-Love
Stephanie McCallum (piano) Toccata Classics Tocc 0326. 2015. 1h 19’
La suite intitulée Dans l’ombre de la montagne domine la vaste production pianistique de Ropartz. Elle s’inspire des randonnées que le musicien effectuait dans les Vosges alors qu’il dirigeait le conservatoire de Nancy. Hautement représentative du style de l’auteur, elle n’a plus grand-chose à voir avec un héritage franckiste depuis longtemps dépassé, en dehors d’une conception cyclique. L’harmonie faisant une large place à la modalité et à des enchaînements inattendus, voire énigmatiques, et la texture polyphonique évoquent le dernier Fauré ; les accords en quintes ou en quartes et l’atmosphère statique ren voient à Kœchlin. L’impressionnisme de Ropartz est subjectif : les paysages sont davantage évoqués par les sentiments qu’ils inspirent que par des équivalents sonores objectifs. Un prélude dominical évoque une antiquité stylisée et ses dieux : pages déliées, souples et lumineuses, clin d’œil spirituel à l’atticisme du Daphnis de Ravel. La sixième des Pièces, Quand la lumière s’en est allée , est un grand nocturne de portée philosophique (le crépuscule de la vie), dont l’ampleur et l’expression soutiennent la comparaison avec le meilleur Fauré. Ces musiques drues et raffinées reflètent subtilement les paysages de l’âme éveillés par le glas lugubre des vieilles églises, le panorama des vallées ou la fête au village. Le Choral est, quant à lui, une page grave et émou vante : comme si Franckavait n
improvisé un cantique breton de sa tribune d’orgue. La boucle se referme sur deux valses d’une délicieuse naï veté, hommage passionné d’un jeune homme de 20 ans à son flirt anglais. La pianiste australienne Stéphanie McCallum excelle à faire chanter les intrications polyphoniques de ces pages, qui pourraient dérouter des interprètes moins habiles, et en révèle la poésie sou veraine par une sonorité chaleureuse. Michel Fleury
RÉCITALS « UKRAINIAN MOODS »
Œuvres de Levko Revutsky, Viktor Kosenko, Mykola Kolessa, Igor et Jurii Schamo
Violina Petrychenko (piano) Ars Produktion ARS38195. 2015. 1h 12’
On en connaît peu au sujet des cinq compositeurs d’origine ukrainienne dont nous découvrons les œuvresen première mondiale. Cette série de brefs «portraits » en musique s’étend de la naissance de Levko Revutsky (1889) à la disparition, en 2015, de Jurii Schamo. Disciple de Trofim Lyssenko et de Reinhold Glière, Revutsky fut un artiste« officiel » du régime soviétique et un remarquable pédagogue (Valentyn Silvestrov fut l’un de ses élèves). Sa musique est d’une harmonie romantique à la fois complexe et très lyrique. Violina Petrychenko dose les couleurs à la fois proches de n
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Rachmaninov et de Scriabine dans ses trois Préludes, d’une grande beauté. Les Nocturne-fantaisie, Nocturne, Klavierstücke… de Viktor Kosenko sont d’une nostalgie plus affirmée. C’est un piano qui glisse sous les doigts, aux mélodies prenantes, mais tout aussi complexes à organiser. Il serait facile de tomber dans un sentimentalisme que l’interprète évite soigneusement. Les souvenirs de Chopin et du romantisme germanique portent ces pièces profondément nostalgiques. Mykola Kolessa (1903-2006) revient au folklore ukrainien, stylisant son écriture dans une série de miniatures. La pianiste en traduit les contrastes sans aucune sécheresse, les jouant dans un esprit d’improvisation. Igor Schamo et son fils Jurii épurent leur écriture. Chez Igor Schamo, l’influence de Prokofiev, combinée au folklore, donne des rythmes d’une grande richesse. Même si nous sommes loin du génie inventif de Prokofiev et plus souvent proche d’un Aram Khatchatourian (Suite ukrainienne), nous entendons des pièces personnelles. Les extraits des 12 Préludes sont l’un des sommets du disque, avec la Fantaisie carpate de Jurii Schamo, qui pourrait être un joli « bis ». Violina Petrychenko a réussi un très bel album, car la sélection des morceaux est astucieuse, et ses interprétations sont aussi engagées que superbement S. F. restituées.
LUCAS DEBARGUE
Scarlatti : Sonates K.208, K.24, K.132 et K.141. Chopin : Ballade n°4. Liszt : Méphisto-Valse n°1. Ravel : Gaspard de la nuit. Grieg : Pièce lyrique opus 47 n°3. Schubert : Moment musical D.780 n°3 Sony Classical 8875192982. 2015. 1h 15’ n « Quand j’arrive sur scène, je ne pense pas, j’ai pensé », disait Aldo Ciccolini. Nul doute qu’il aurait apprécié le piano de Lucas Debargue, musicien qui, à l’évidence, suit le même précepte. Dans ce programme où il faut renoncer à chercher un fil conducteur, le pianiste français, 4e Prix de la dernière édition de l’illustre Concours Tchaïkovski, mais personnalité la plus affirmée de l’épreuve pour beaucoup, nous livre ses pensées. Chaque partition est d’abord une histoire, une peinture de phrases sonores, une chorégraphie imaginaire dans laquelle la fantaisie s’équilibre souvent périlleusement avec le style adéquat. Ce sont en premier les échos mauresques de la Sonate K.24 de Scarlatti, puis les Pas des ballerines de la K.132 qui transposent leur fandango et les sonneries de cor au XXIe siècle. Avec la Ballade n°4 de Chopin, pastorale déjà fauréenne, qui suffoque d’enthousiasme, Lucas Debargue respire tout aussi « juste ». Plus soucieux des silences, de maîtriser le temps, il organise son espace, refuse de se plier à toute règle, hormis celle que guide sa propre rigueur. Rigueur et rugosité s’imposent dans la Méphisto-Valse de Liszt. Peu de pédale, des traits cinglants plus proches du violon que du piano, une sensualité torturée… l’idée de la folie qui se refuse avec entêtement à la beauté fait songer à György Cziffra. Seule différence avec le pianiste hongrois, cette flamme sur laquelle l’interprète de
25 ans – avantage de l’âge – Ce concert de Richter est le n’ose trop souffler, de peur premier capté en stéréo. De de provoquer un incendie. l’interprète, il existe d’autres Il mesure ses risques. versions des Sonates n°30 à Gaspard de la nuit, si per- n°32 de Beethoven dont sonnel, n’a plus la fragilité les plus connues demeurent électrisante à couper le souf- celles, officielles, de 1991 fle des épreuves du Concours (Decca). Cela étant, on a rare Tchaïkovski, que l’on vit en ment entendu un tel invesdirect. On évolue rapide- tissement intellectuel et phyment au contact du public. sique dans ces trois pièces, Fée aquatique, carcasse d’un et Richter est au sommet de pendu, gnome démonia- sa technique. L’organisation que… les mouvements ne de l’architecture musicale, perdent pas leur concentra- la variété inouïe du jeu, la tion, mais on ressent que le manière de pousser l’inspendu domine par l’effroi, trument dans ses ultimes Scarbo libérant son âme. retranchements, de le plier Grieg et Schubert touchent à une volonté d’acier, tout par leur nostalgie moins cela est saisissant. nordique et autrichienne que Le jeu de Richter relève de slave. On ne quitte pas si aisé- la course contre le temps, ment la littérature. terrifiant de puissance dans S. F. le Prestissimo de l’opus 109, immobile dans le finale Andante. On dit parfois que « RICHTER l’on joue comme on est. IN LEIPZIG » C’est bien le cas ici ! Dans ces trois sonates, ce qui se produit dépasse l’entendement parce que le pianiste est porté par une concentration absolue. Il semble jouer sa vie, et le public présent, comme l’auditeur plus d’un demi-siècle plus tard, se trouve tétanisé devant les prises de risques. Il faut Beethoven : sonates écouter le Maesto so de la n°30 à n°32. Sonate n°32, pour connaître l’appropriation totale du Brahms : Ballade opus 118 n°3. discours, son caractère hypIntermezzi opus 118 n°6 notique et impitoyable. Et pourtant rien de fantasque et opus 119 n°3. ni d’improvisé ! L’ Arietta , Chopin : Nocturne opus 15 n°1 enfin, mène au-delà du propos musical, devenant une Sviatoslav Richter (piano) sorte de réflexion spirituelle Parnassus PACD96032. 1963. 1h 18’ hors du temps. n L’éditeur américain Par- Avec Brah ms et Chopi n, nassus présente aujourd’hui nous reprenons contact l’intégralité du concert que avec le sol. La Ballade et les le pianiste russe donna le deux Intermezzi n’ont rien 28 novembre 1963 à Leip- de rêveur. Leur puissance zig, en Allemagne. Un réci- est tour à tour percutante, tal « béni des dieux », rare- sauvage et d’une extrême ment disponible (paru une clarté, puis elle s’enfonce première fois en 1998, chez dans les ténèbres (opus 118 Music & Arts), dont la n°6). Richter passe de l’inréédition particulièrement terrogation à la musique soignée dans un son très d’atmosphère pure avec une correct mérite vraiment la sincérité passionnée. Un S. F. découverte. véritable choc !
JEAN RONDEAU
(clavecin) Vertigo : œuvres de Rameau et de Royer Erato 0825646974580. 2015. 1h 12’
ll y avait la tenue décontractée, la chevelure soigneusement ébouriffée et les bracelets. Jean Rondeau a désormais franchi une étape et suit les traces de son glorieux aîné (et modèle ?), Scott Ross, enregistrant sur le clavecin Donzelague du château d’Assas, aux environs de Montpellier. Mais, bien plus que des photos séduisantes et un « look cool », c’est la composition du programme et son interprétation qui méritent toute l’attention. Dès les premiers instants du Prélude de la Suite en la mineur de Rameau, Jean Rondeau s’impose comme un maître du temps. Tel un cinéaste, un Alfred Hitchcock auquel le titre du disque fortuitement se réfère, puisqu’il s’agit d’une page signée Royer, il sait composer avec la montre et les émotions de l’auditeur. Il laisse ainsi flotter l’indécision des premières lignes, non mesurées, avant de resserrer progressivement l’étau du métronome en un 12/8 délicieusement chaloupé, puis de lever d’un seul geste le rideau de la fière All emande de Royer, qui accueille une galerie de personnages hauts en couleur. Ce va-et-vient entre le clavecin et l’opéra, que Rameau et Royer ont sans cesse effectué, mène Jean Rondeau vers de saisissants contrastes où la mélancolie [ n
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n PIANISTE n°98 n 75
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( Les Tendres Plaintes du premier, L’Aimable du second) le dispute à l’impatience des Tambourins et au tumulte : les batteries de doubles croches répétées sonnent comme des rafales de mitraillettes dans Le Verti go, et La Marche des Scythes fait défiler des sautereaux aux becs affûtés comme des sabres. Confié à des mains aussi expertes, le clavecin n’a rien d’un boudoir pour précieuses ridicules ou comtesses alanguies, mais devient le grand écran des émotions. Jusqu’au vertige. [
P. V.
« MIROIRS »
Liszt : « Angelus! Prière aux anges gardiens. Klavierstücke. Valse oubliée n°1. Méphisto-Valse n°1. Dutilleux : Préludes n°1, n°2 et n°3. Sonate opus 1 Jonas Vitaud (piano) NoMadMusic NMM028. 2014. 1h 08’
Bien qu’intitulé « Miroirs», ce récital écarte le fameux cycle ravélien pour tenter un rapprochement qui, sur le papier, laisse plutôt dubitatif : tout n’oppose-t-il pas le prolifique et conquérant Liszt au discret et pondéré Dutilleux ? Il fallait tout l’art de Jonas Vitaud pour entreprendre semblables « correspondances ». L’association intelligente ici prodiguée entre les pièces des compositeurs français et hongrois met à jour leurs virtualités secrètes tout en renouvelant notre écoute. S’il appartient à la bravoure
de la Méphisto-Valse et de la Sonate opus 1 de clôturer le disque, on ne trouvera rien de tapageur dans le jeu racé de Jonas Vitaud – de la trempe d’un Bolet –, même si davantage de morsures, d’accents, ne dépareraient pas une MéphistoValse, certes diabolique mais dansée sur les pointes. La sonate de Dutilleux, quant à elle, enchante par son lyrisme épuré et ses textures aérées, qui ménagent des éclaircies au discours jusque dans l’appareil scolastique du Choral et variations dont le compositeur allait vite se déprendre. La première partie du programme n’est pas en reste : les trois Préludes pourraient être des études sur l’évanescence, tant l’interprétation donne son juste poids à chaque son et agrégat, sans verser dans le stéréotype « musique contemporaine pour piano ». Quand l’abbé Liszt rétrécit l’empan romantique de son inspiration, cela donne les fascinants Sous les doigts virtuoses de Jonas Vitaud, leurs jeux de timbres et de sonorités n’ont jamais paru aussi proches de la musique française.
« Both Worlds », paru en 1997, Denis Leloup remplaçant Bob Brookmeyer au trombone, qui donne à entendre un sextet explosif aux arrangements soignés. Mais la véritable révélation figure dans le second CD où Michel Petrucciani se produit en compagnie de l’Orchestre philharmonique de La Hague, puis en duo avec le batteur Steve Gadd. Les deux pièces symphoniques sont de sa composition et témoignent de l’extrême musicalité qui l’habitait, ainsi que de son talent de compositeur, dont le temps n’a pu hélas donner toute l’étendue, mais qui se laisse deviner et impressionne. Écrire pour un orchestre symphonique n’est pas à la portée de n’importe quel musicien. La délicatesse de ses interventions au piano, le lyrisme constant qui les nimbe, achèvent de donner la mesure de l’artiste magnifique qu’il fut. Le duo primesautier engagé avec la batterie, capté à Montréal, met ensuite davantage en valeur son impeccable maîtrise rythmique et l’aspect percussif de son jeu pianistique. Le bonheur est alors complet, à l’image de son approche musicale.
J. B.
Jean-Pierre Jackson
Ang elus ! P riè re aux anges gar diens et Klavierstücke.
JAZZ
KENNY BARRON
n
76 n
PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
MICHEL PETRUCCIANI
Book of Intuition Impulse 00602547701299. 1h
En compagnie du contrebassiste Kiyoshi Kitagawa PromoBMG. 2 CD. 1h31’ et du batteur Jonathan Blake, le vétéran Kenny n Cet album, qui devra être recherché, est tout d’abord Barron, au parcours presle complément « live » de tigieux, démontre que sa n
Both Worlds Live
flamme est vivante comme elle l’a toujours été. Sur les dix pièces qui composent cet album d’une belle sensibilité apollinienne, sept sont de sa composition, deux sont de Thelonious Monk (« Shuffle Boil » et « Light Blue »), et une de Charlie Haden (« Nightfall »). Sa science harmonique (voyez les accords du thème « Bud Like »), la précision et la vélocité de ses phrasés, l’énergie soutenue au long des improvisations font mer veille, lui permettant de signer avec ce nouvel opus l’un des meilleurs albums de sa carrière, l’un des plus aboutis, des plus maîtrisés, la présence de ses irréprochables compagnons musicaux n’étant à l’évidence nullement étrangère à sa perfection. J.-P. J.
(« Sleep on It »), autorisant toutes les escapades, toutes les fantaisies, mais installant également un « groove » persistant qui innerve chacune de ses interprétations. Enfin, « Beauty & Truth » en solo, avec lequel il ouvre son opus, et « Blues for Pablo » constituent d’émouvants hommages, l’un à Ornette Coleman, dont il fut le pianiste quelques années, l’autre au regretté Gil Evans. J.-P. J.
JON BALKE
JOACHIM KÜHN Warp ECM 4766047. 53’
L’épreuve du piano solo est redoutable, spécialement pour un improvisateur. Jean Guillou affirma un jour qu’improviser, c’est jouer « sur sa vieille graisse ». C’est dire que les improvisations sont très souvent préparées. L’étonnant pianiste norvégien Jon Balke réussit pourtant à donner l’impression d’un total inattendu, d’une authentique impréparation, mêlant clavier électronique (discret) aux effusions lancinantes de son clavier où résonnent comme des parfums les échos de la musique arabo-andalouse et des inventions baroques. Naturellement, le fait que ce disque soit composé de 16 morceaux indique assez que ce n’est pas le seul hasard qui préside à son élaboration, que cette musique aux allures surprenantes est pensée, prévue, bref, élaborée. À qui souhaite entendre un album original et dénué de toute comparaison possible, il est recommandé de dres J.-P. J. ser ici l’oreille. n
Beauty & Truth ACT 9816-2. 49’
Pendant trente ans, Joachim Kühn s’est produit avec JeanFrançois Jenny-Clark et Daniel Humair, et ce trio a représenté l’une des formations essentielles du jazz en Europe. Familier des chemins libertaires, sinon libres, le pianiste a régulièrement dressé la carte des chemins possibles, des aventures imaginaires, pouvant entraîner un clavier vers des contrées jusqu’alors inexplorées. C’est un nouveau voyage que cet album symbolise : puissant, clair et intense, son jeu dégage une sorte de charme lyrique d’où est absente toute brutalité. Le disque est parsemé de mélodies parfois simples, mais assurément poétiques n
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España op.165 «Capricho catalan» 37 España op.165, «Prélude» 79 España op.165 n°2, «Prélude» 50 España op.165 n°2 «Tango en ré majeur» 35
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Granada, extrait de la Suite espagnole op.47 74
S Iberia «el puerto» M Pequeñosvalses n°2 op.25 S Rumorez de la Cale ta, Mala guena MS Tango op.165 n°2 (Espana)
40 45 87 89
ALKAN
M 1 Billet doux HS11 M Barcarolle op.65 n°6 (3e Recueil de chants) 45 er
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D Petit Livre d’Anna Magdalena Bach : Marche
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ATTWOOD
M Dance Sonatina D Sonatine en sol majeur
28 94
WILHEM FRIEDEMANN BACH
DM Allegro
85
BACH
M D S S S SE SE SE SE M M M M
Andante 77 Aria BWV 509 34 Concerto BWV 1057 (2e Mvt) 30 Concerto italien 971 (1er Mvt) 78 Concerto italien 971 (2e Mvt) 78 Fantaisie chromatique BWV 903 93 Fugue BWV 903 93 Fugue en ré mineur (analyse) 88 Fugue en ré mineur (interprétation) 88 Invention à 2 voix BWV 775 76 Invention n°8 BWV 779 10-HS11 Invention à 2 voix en la mineur BWV 784 84 Invention à 2 voix n°14 en si bémol maj. BWV 785 35 D Menuet 40 D Menuet BWV Anh. 116 26 D Menuet BWV Anh. 115 33 D Menuet en do majeur 22 D Menuet en mi bémol majeur 31 D Menuet en ut “La Pott” 92 D Musette BWV Anh. 126 25 D Musette BWV Anh. 126 75 M Petit prélude BWV924 18 18 D Petit prélude BWV939 36 M Petit prélude en ré mineur BWV926 81 D Petit prélude en ut mineur BWV 934 87 D Petit prélude en ut mineur BWV 999 87 M Petit prélude pour commençants en ré majeur BWV 936 97 DM Petite étude 91 D Prélude débutant HS11 M Prélude en do mineur 27 SE Prélude en ré mineur (livre II du clavier bien tempéré) 88 M Prélude BWV 999 38 S Prélude n°3 BWV 848 15 D Rondeau en la mineur “La Gleim” 92 M Solfeggietto 74 D Thème de la cantate d’anniversaire 19 D Allegro en sol majeur 50 S Concerto italien BWV 971 (Finale) 79 S Ich ruf zu dir, Herr Jesu Christ (cantate BWV 177) 82 M Invention à deux voix n° 4 BWV 775 58-76 M La complaisante 17 BALAKIREV M Ma zu rk a
72
BAUMFELDER
D Mélodie
32
BEETHOVEN
D D M M M M M
Air tyrolien op. 107 n° 1 Allemande WoO8 n° 1 Bagatelle op. 33 n° 2 Bagatelle op.33 n°3 Bagatelle op.119 n°1 Bagatelle op.119 n°3 Bagatelle op.119 n°9
59 45 59 45 31-76 33 50
M Bagatelle op.126 n°5
25
D Chanson popula ire russe
77
D D D D D D M M MS MS S S S S M S M M S D M M M M D M S S
45 ContredanseWoO14 n°2 Danses villageoises 38 28 É co ss ai se HS11 Écossaise en sol majeur Écossaise militaire WoO 23 45 48 Ländler WoO 11 n°2 HS4 Menuet Wo010 n°2 35 Priè re op.48 n°1 Sonate n°1 en fa mineur op.2 (1er Mvt) 90 Sonate n°1 en fa mineur op.2 (2e Mvt) 90 Sonate n°1 en fa mineur op.2 (4e Mvt) 90 80 Sonate n°5 op.10 n°1 (1er Mvt) Sonate n°5 op.10 n°1, 2e mvt 84 adagio molto 18 Sonate op.6 (rondo) 50 Sonate op.10 n°3 (2e Mvt) 45 Sonate op.13 n° 8 «Pathétique» Sonate op.49 n°2 (1er Mvt) 50 70 Sonate op.49 n°2 (1er Mvt) Sonate op.81a «Les adieux»(1er Mvt) 50 Sonatine n° 1 anh. 5 (romance) 25 21 Sonatine en fa majeur Sonatine en fa majeur Anh.5 – Allegro 85 Sonatine en fa majeur Anh.5 – Rondo 85 17 Sonatine en sol op.posthume 36 Variations sur un air Suisse WoO 6 Variations sur un air Suisse WoO64 39 71 Rondo de la Sonate op.49 n°1 Rondo pour un sou perdu op. 129 59 (2e partie)
D Chant des montagnes
37
M Je u d ’e nfants op.22 - Petite Marie, petite femme ! (4 mains) M L’Arlésienne,suite n°2 M La Poupée – Berceuse (4 mains) Moderato molto legato
38 15 33 18
BÖHM
M Allemande
83
BORODINE
M Mazurka en ré bémol majeur extraite de la Petite Suite
72
BRAHMS
Ballade op.10 n°1 Ballade op. 10 n° 2 Ballade op.118 n°3 Intermezzo op. 76 n° 3 Intermezzo op.76 n° 7 Intermezzo op.116 n°2 Intermezzo op.116 n°6 Intermezzo op.117 n°1 Intermezzo op.117 n°2 Intermezzo op.118 n°2 I nte rme zzo op.119 n°1 Intermezzo op.119 n°2 Klavierstück op. 118 n°1 Rhapsodie en sol mineur op.79 Sonate pour violon et piano n°3 op.108 en ré min. (3e Mvt) Thème et variations op.18 Vals e en la bémol majeur op 39 n°15 Va lse o p. 39 n°1 Valses op.39 nos1,2 et 3 Valse op.39 n°5 en mi majeur (4 mains) Valse op.39 n°6 en ut dièse majeur (4 mains) Valse op. 39 n° 7 (quatre mains) Valse op.39 n° 9 (quatre mains) Valse op.39 n°9 Valse op. 39 n° 15 (quatre mains) Variations et fugue sur un thème de Haendel
48 55 48 55 55 30 33 11 38 25 80 80 92 71 23 25 78 9 45 35 35 59 59 37 55 19
BURGMÜLLER
M D D D M D
34
DUSSEK DM Allegro
74
CHOSTAKOVITCH
18 21
DM Mazurka D Polka D Polka russe M Vals e de l’adieu
75
GLUCK
D Histoire gaie (Petits contes) D L’heure tranquille D Tarentelle
Arabesque Arabesque Consola tion op. 100 n° 13 La Candeur op.100 La Pastorale op. 100 n° 3 Innocence opus 100
40 77
59 45 94 96
CHABRIER
S Pièce pittoresque n°4 «Sous bois»
23
CHOPIN
S Ballade n° 3 op. 47
M Sonatine op.36 n°2 (3 Mvt) M Sonatine op.36 n°3 (2e Mvt) M Sonatine op.36 n°3 (3e Mvt) D-M Sonatine op.36 n°4 (1er Mvt) M Sonatine op. 36 n° 6
60
CORELLI D Sarabande COUPERIN D L’epineuse, Extraite du VIe Ordre
M La pastourelle M Les coucous bénévoles M Le Petit Rien
26 30 30-45 67 76 86 74 31 36 22
CUI D-M
Simple Confession op.20 n°1
72
CZERNY
M École de la vélocité : 2 études M Étude n°1 (extrait des 25 études) D Étude, extr. des Cinq Doigts op.777
29 23 71
DANDRIEU
M Gavotte en rondeau
19
DEBUSSY
M S D S S
1re Arabesque 25-HS5 Clair de lune (Suite bergamasque) 30 Danse de la poupée (La boîte à joujoux)HS5 Fantaisie pour piano et orchestre (1re partie 2e Mvt) 27 Fantaisie pour piano et orchestre (2e partie 2e Mvt) 28 Golliwogg’s Cakewalk 92 Gradus ad parnassum (Children’s Corner) 76 Jardins sous la pluie, extraits des Estampes 70 Jimbo’s Lullaby (Children’s Corner) HS5
M M E D M La cathédrale engloutie (Prélude 1 n°10) 51-HS5 S La Fille aux cheveux de lin (Préludes, Livre I, n°8) 79 M Le petit berger 82 S Le petit nègre 40 M Le petit nègre 96 D Le soldat couché (La boîte à joujoux) HS5 S Petite suite : en bâteau (4 mains) 40 S Première Arabesque 81 M Rêverie 47-HS5 S Soirée dans Grenade (estampes) HS5 M The Little Shepherd (Children’s Corner) 51-HS5 S Valse romantique 73 S Voiles n°2 (prélude) 31 DIABELLI
D Bagatelle M Sonatine en sol majeur (Allegro) M Sonatine en sol majeur (Rondo) DUNCOMBE
DVORÁK
S Humoresque op.101 n°7 S Quintette op.81 «Dumka»
28 96 96
82 19
FAURE
E 6e nocturne en ré bémol majeur opus 63 97 S Nocturne n°4 en si bémol majeur op.36 87 M Pièce brève opus 84 n°5 «Improvisation» 78 FIELD
S Nocturne n°2 S Nocturne n°5
17 19
FRANCK
D Les plaintes d’une poupée D Noël angevin (Recueil de pièces pour orgue) S Prélude (Prélude,Choral et Fugue) M Premières compositions n°3 M Sonate pour piano et violon en la maj. (3e Mvt)
67
D Chère petite sœur op.32 n°14 D Douce consolation op.47 n°11
HÜLLMANDEL
80 80
HUMMEL
73 69 72 19 24 23
GOUNOD
D Tarentelle D Vals e (extr. de Faust)
38 20
GRANADOS
S Andaluza op.37 n°5, extrait des Danses espagnoles 70 M Danse de la rose (Escenas poeticas) 85 MS Epilogo, extrait des Escenas Romanticas 97 D Rondalla Aragonesa 40 M Souvenirs de l’enfance (Contes de jeunesse) 18 85
D Mélodie op.77 n°5 D Le soir D Exubérance en sol maje ur M D D D
Allegro op.52 Dialogue taquin Écossaise op.52 Écossaise op.52 n°5
D Chanson berçante, extr. des Pièces pour enfants D Conte de fée, extr. des Pièces pour enfants D Petite Valse chantante, extr. des Pièces pour enfants D Papillons gris, extr. des Pièces pour enfants D Les petits jumeaux D Petite chanson op.27 n°1 D Solitude
58 80 45 24 56 73 83 65
HAENDEL
71 26 32 35 27 23 67 89 20
M Adagio de la sonate n°48 en ut majeur Hob.XVI.35 27 S Allegro con brio de laSonate n°48 Hob. XVI.35 86
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KABALEVSKI
D Bour rée D Menuet en do majeur D Menuet en sol maje ur
M D M D M D D D
82 82
JAËLL
MS La Danse des elfes, extr. des Pièces lyriques op. n°4 77 M Pièces lyriques op.12 n° 2, valse 59 S Pièce ly rique op.54 n°4 27 DM Arietta extraite des Pièces lyriques op.12 67 S Au temps de Holberg op.40 10 S Concerto op.16 (2e Mvt) 20 S Élégie op.38 34 M Feuillet d’album 30 M Pièce lyrique op.71 n°7, souvenirs 46 M Schmetterling op.43 n°1 (suite lyrique) 89 D Volksweise,chanson populaire op.12 n° 3 88 M Wächterlied op.12 n°3, extrait des Pièces lyriques 70 Accents nordiques op. 101 n° 4 Berceuse op.62 Feuillet d’album op.101 Histoire romantique Le Matin ensoleillé op. 101 n° 3 Novelette Petites fleurs op.205 Salutation du matin op.130 n° 1 (Petites Etudes)
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M Avalanche op.45 n°2 DM Chants d’automne
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GALUPPI
M A l egro
D Ariette S Concerto Hob. XXXI: C:17B D Danse allemande D Danse allemande Hob.IX: 22/2 M Divertimento Hob XVI 9 M Divertimento Hob XVI 11 DM Finale, extr. de la Sonate Hob.XVI : 8 D Menuet Hob.IX:8 n° 8 M Menuet Hob.IX :11 n° 12 S Sonate en Mib majeur Hob. XVI : 52 (1er mvt) M Sonatine en sol majeur (allegro) M Sonatine Hob XIV:4 M Variations en fa Hob. XVII:6 (extrait)
54 79 34
FUCHS
M Air d’Orfeo e
BOËLY
M D M M M
D Sona tine
CLEMENTI
BIZET
S S S M M S
Barcarolle en fa dièse majeur op. 60 77 Étude op.12 (Révolu tionnaire) 95 Étude en fa mineur op.25 n°2 84 Etude op.10 n°5 en sol bémol 69 Fantaisie Impromptu op.66 (Version Fontana) 66 S Impromptu n°1 en la bémol majeur op.29 89 M Mazurka op. 6 n° 1 60 M Mazurka op. 7 n° 2 60 M Mazurka op.7 n°5 39 S Mazurka op.17 n°4 29-76 M Mazurka op.67 n°2 67 MS Mazurka op.67 n°4 en la mineur 93 S Mazurka op.63 n°3 en ut dièse mineur 93 E Nocturne op.9 n°3 75 M-S Nocturne op.15 n°1 21 M Nocturne opus posthume KK IVA n°16 25 M Nocturne op.55 n° 1 60 DM Petite Polonaise en sol mineur 87 D Prélude op. 28 n° 4 60 S Prélude op. 28 n° 6 79 S Prélude op.28 n°17 36 S Prélude op.45 en ut dièse min eur 46 E Première ballade op.23 91 M Valse op.34 n°2 42 M Vals e op. Posth. 69 n° 2 60 S Vals e en ré bémol op.64 n°1 81 M Vals e sans opus KKIVBn°11 19
S E S S S
CLARK
BEYER
M S S S M S S S S S S S S E S
Classées par compositeur et par niveau ( D : débutant, M : Moyen, S : Supérieur, E:Excellence )
34 30 32
KUHLAU
D Écossaise D Praeludiu m M Variatio ns en sol majeur
45 31 36
LADOUKHIN
D Petite pièce
84
LALO
M Danse espagnole
24
LE COUPPEY
D A ir tendre D Étude op.37 n°3 D Étude op.37 n°26
18 25 93
LIADOV
M Prélude op.40 n°3
40
LISZT
D Carrousel de Madame PN 24 S Consolation N°2 75 S Les Cloches de Genève (1ère année de Pèlerinage, Suisse) 73 E La Leggierezza 85 S Nocturne n°3 “Rêve d’amour” 92 D Rhapsodie Hongroise n°2 10 S Un sospiro, Grande Etude de concert N°3 67 LISZT/CHOPIN
D Chant Polonaisop.7 4 n°2, Le printemps 46 LISZT/MOZART
D Menuet en ut majeur n°16 S Transcription de l’Ave Verum
79 19
LISZT/SCHUBERT
M Ständchen D.957 (Chant du cygne) S Transcription de Trockne Blumen
46 21
LISZT/WAGNER
S Isolde’s Liebestod (Tristan et Isolde)
46
3 3 7 0 2 G A
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Liste des partitions classiques déjà parues LULLY
PESCETTI
D Menuet en ré mineur
78
MACDOWELL 81 19 71
MAÏKAPAR D Be rceu se D P et it Co nt e D A u ja rd in D Etude D M at in ca lm e
72 72 78 78 90
MARTINI
M Plaisir d’amour
40-HS11
MASSENET
M Élégie op.10 n°5
34
MENDELSSOHN
M Andante sostenuto op. 72 n°2 M Chant du gondolier op.30 n°6 S Concerto pour pia no n°1 op.25 M Pièce pour enfants op.72 n°2 S Prélude op.35 n°4 M R om an ce MS Romance sans paroles op. 62 n° 1 S Romance sans paroles op.102 n°4 M Variations sérieuses op.54 (thème et var.14) M Variations sérieuses op.54 (var.10) S Etude n°62, extrait des Pièces romantiques
97
PRAETORIUS
D Danse allemande
32
PURCELL
D Air 20 D Old Danse Tune 15-HS11 D Suite en sol majeur Z.600 (prélude et menuet) 35 RACHMANINOV E Prélude en sol mineur op.23 n°5
72
RAMEAU
RATHGEBER
D Allegro
39
REGER 96
MOUSSORGSKI 18-HS11
MOZART
D All egro K.3 25 DM Andante de la Sonate en ut majeur K.545 86 M Andante sonate K.545 HS11 D Andante en si bémol maje ur KV15ii 89 D Ariette en fa majeur 69 D Cahier de musique pour Nannerl n°11 - menuet 23 S Concerto n°13 K.415 (andante) 22 S Concerto n°27 K.597 (2e Mvt) 15 M Fantaisie K.396 en ré mineur 28 S Fantaisie K.397 (Andante & Adagio) 40 M Fantaisie en ré mineur K.397 78 M Marche Turque (allegretto de la Sonate en la majeur K.331) 24 D Menuet extrait du petit livre pour Maria Anna 27 M Menuet K.5 en fa majeur 34 D Menuet K.6 40 D Menuet K.15C (Londoner Skizzenbuch) 61 D Menuet en do majeur 32 D Menuet en fa majeur 38 D Menuet en fa majeur (Petit Livre pour Maria Anna n° 8) 55 D Menuet en fa majeur K.2 HS11 D Menuet en fa majeur K.33B 48 D Menuet en la (Petit livre pour Maria Anna n°9) 45 D Menuet en ré majeur (Petit livre pour Anna Maria) 51 D Menuet en sol K.1 33 D Menuet en sol majeur 36 D Menuet et trio en sol majeur k.1 80 D Menuet 73 D Pièce K. 15K 40 D Pièce en fa majeur K. 15H 37 MS Première Sonatine viennoise KV 439b 95 M Rondo - 2e Sonatine viennoise K.439b 70 S Sonate K. 457 (3e Mvt) 39 S Sonate n° 15 K.545 (andante) HS11 M Sonate K 545 (1er Mvt) 20 S Sonate en la mineur K.310 (1er Mvt) 96 S Sonate en si bémol majeur K.333 (1e mvt) 82 S Sonate en si bémol majeur K.333 (3e mvt) 83 PACHELBEL 21 10
PACHULSKI
D Prélude op.8 n°1
D La Mélancolique
32 40
95
21
PONTHIEUX DE
M La boîteuse 29 D Le lardon, menuet en fa majeur 37 M 2e Gigue en rondeau (Pièces de clavecin de1724) 73 M Le sambourin HS11 e S Le rappel des oiseaux (2 recueil de pièces pour clavecin) 24 D Menuet (Pièces de clavecin de 1724) 73 M Rig audon 18 D Rondino 21
MOURET
DM La montagnarde
D Procession solennelle
92 71 10 48 50 82 86 35
MONTGEROULT (DE)
M Chacone D Fugue
77
PLEYEL
M Sung Outside a Prince’s Door M To A Wild Rose D Pour une rose sauvage
M Une larme
DM Presto
81
M Maria Wiegenlied op.76 n°52
17
REINAGLE
D Menuet D Promenade
34 40
REINECKE
D D D D D D D
Chanson op.183 Élégie Élégie op.183 n°2 G avotte Menuet en do majeur Pastorale op.183 Rondino pastorale
83 20 70 95 24 83 30
RIMSKI KORSAKOV
DM Romance op.15 n°2
93
ROSSINI
M Ouverture de «Guillaume Tell»
10
SAINT LUC
D Bourrée
91
SAINT-SAËNS
M Le cygne
32
SATIE
M Gymnopédie n°1 M Je te veux M Première Gymnopédie
71 88 88
SCARLATTI
D Folia «Folies d’Espagne» M «Folies d’Espagne» DM Gigue M Larghetto D Sonate en do majeur S Sonate en mi majeur K.380 S Sonate en mi majeur K.162 M Sonate en ré mineur «Gavotte» S Sonate en sol majeur S Sonate en sol majeur K.146
17 95 75 39 29 91 83 10 40 91
SCHUBERT
DM Cinq valses 75 M Cotillon D .976 28 D Danse allemande n°1 D.420 17-HS11 D Danse allemande n°2 D.420 35 D Danse allemande n°5 D.420 39 S Divertissement à la hongroise D.818 (andante ) 4 mains 24 D Écossaise n°8 D.299 46 S Impromptu en sol bémol majeur op 90 n°3 D.988 69 S Impromptu en la bémol majeur op.142 n°2 D.935 83 S Impromptu n° 4 op. 92 D.899 76 D Ländler D.679 23 M Marche pour enfants en sol maj. D.928 (4 mains) 36 M Menuet D.334 34 M Menuet n°1 D.41 30 M Menuet n°17 D.41 32
M S S D M M M M S M S S S S M M
Classées par compositeur et par niveau ( D :débutant, M: Moyen, S : Supérieur,E:Excellence )
Moment musical n°2 op. 94 D. 780 55 Moment musical n°4 op.94 D.780 40 Moment musical op.94 n°2 D.780 89 Premier chagrin 81 Quatre Ländler D.814 31 Scherzo en réb majeur D.593 51 Sonate n°1 HS11 Sonate L.97 en sib majeur 46 Sonate n°13 op.120 D.664 (andante) 10 Sonate n°15 op.120 D.664 (1er Mvt, allegro moderato) 94 Sonate n°15 op.120 D.664 (2e Mvt, andante) 94 Sonate n°15 op.120 D.664 (3e Mvt, allegro) 94 Sonate op.120 D.664 (1er Mvt) 45 «Trockne Blumen» 21 Valse D.844 26 Valse D.980 n°1 20
SCHUMANN
D Albumblätter op.99 n°4 39 M Album pour la jeunesse, pièce n° 26 74 D Chanson du moissonneur (Album pour la jeunesse op. 68) 84 M Chanson nordique n°17 D .41 32 S Chopin (extr. du Carnaval op.9) 87 S Étude symphonique n°2 op.13 39 S Étude symphonique n°5 op.13 8 M Étude symphonique op.13 (Var.n°4 op. posth.) 33 S Fantasiestücke op. 12 (Des Abends) 95 M Fantasiestücke op. 14 (Warum) 27 S L’enfant s’endort, Scènes d’enfants Op.15 n°12 73 S Intermezzo (Carnaval de Vienne op.26) 18 D La danse de l’ours (Album pour la jeunesse op.68) 19-HS11 D La danse de l’ ours 94 M Le cavalier sauvage (Album pour la jeunesse op.68) HS11 D Le cavalier farouche op. 68 n°8 (Album pour la jeunesse 77 M Mélodie (Album pour la jeunesse op.68) 9 M Mignon (Album pour la jeunesse op.68) 22 M Papillons (Intro et 3 premières pièces) 10 D Petite mélodie (Album pour la jeunesse) 69 D Petite pièce (Album pour la jeunesse op.68) 29 DM Phantasietanz op.124 n°5 91 S Pièces dans un ton populaire n°1 op.102 avec violoncelle 34 S Pièces dans un ton populaire op.102 avec violon 17 S Préambule du Carnaval op.9 86 D Premier chagrin (Album pour la jeunesse op.68) 24 M Ronde, extrait de l’album pour la jeunesse opus 68 n°22 97 S Scènes d’enfants op.15 n°1 40 S Scènes d’enfants op.15 n°1 (4 mains) 48 D Scènes d’enfants op.15 n°7 (4 mains) 50 S Sonate op.105 n°1 pour violon et piano (2e Mvt) 25 M Valse (Albumblätter op.124 n°4) 38 M Variation n°4 op. Posth. 33 M Valse op.124 n°4 38 M Variation Abegg op.1 (thème) 39 M Wiegenliedchen op.124 n°6 36 SCHUMANN CLARA
S Romance op.21 n°3 48 MS Soirées musicales op.6 n° 3, Mazurka 58 SCRIABINE
S S S S S S M S S
Étude op.2 n°1 Étude en ut dièse min eur op.2 n°1 Feuillet d’album op.45 n°1 Mazurka op.3 n°6 Prélude op.22 n°3 Prélude op.11 n°2 Prélude op.37 n°1 Sonate op.30 n°4 (1er Mvt) Valse en ré bémol
26 90 37 17 72 32 63 46 22
SEVERAC de
M Invocation à Schumann, pièce n°1 de la suite En vacances S La fontaine de Chopin M Vals e romantique
77 88 77
D Aria D Ga votte
DUTRONC (JACQUES) 30 33
SPINDLER
D Romance sans paroles D Chanson sans paroles
33 82
STEIBELT
D Adagio
76
D La vie d’artiste (adaptation)
17
STRESZYMANOWSKA
DM Mazurka
85
Gentleman cambrioleur EAGLES Hotel California EARL HINES Blues In Thirds ELLINGTON (DUKE) Caravan Don’t Get Around Much Anymore I’m BeginningTo See the Light Satin Doll Solitude
74
TELEMANN
I Can Give You Anything But Love 30 FREHEL La java bleue HS7 GARNER (EROLL) Misty 15 GUILBERT (YVETTE) Le fiacre HS7 HOLLIDAY(BILLIE) That Ole Devil Called Love 33
D Air et burlesque 40 HORNEZ (ANDRÉ)/BETTI (HENRI) M Choral «Valter unser im himmelreich» C’est si bon TWW31 17 JOHN (ELTON) Blue Eyes D Danse galante, extr. De la Suite Grazioso 71 Can You Feel Love Tonight M Gavotte en rondeau 33 Your Song D Menuet en sol majeur HS11 JOPLIN (SCOTT) Mapple Leaf Rag D Prélude en ré majeur 50 Palm Leaf Rag D Rigaudon 15 Peacherine Rag Fig leaf
TCHAÏKOVSKI
D Ancienne chanson française (Album pour enfants op.39) 46 D Chanson itali enne op.39 n°15 81 S Concerto n°1 op.23 (2e Mvt) 11 M Feuillet d’album op.19 n°3 80 D La nouvelle poupée (album pour enfants op.39) 84 D La poupée malade 22 M Les saisons, mars :Chant de l’alouette 50 S Les saisons, juin : Barcarolle 40 M Octobre-Chant d’automne op.37 bis n°10 86 S Novembre (Troïka) op.37 n°11, extr. des Saisons 72 D Prière du matin, , extr. de l’Album pour enfants op.39 76 M R êve ri e 69 M Trio en la mineur op.50 (thème du 2e Mvt) 36 M Valse op.39 n°8 (Album pour les enfants) 79 M Vieille Chanson française (Album pour enfants op.39) HS11 TÜRK
D Deux petites pièces D Trois petites pièces
31 28
VANHAL
D S onatine
97
VERDI
D Di provenza (La Traviata) M Marche de Aïda M Rigoletto (adaptation)
10 58 40
VON PASTERWITZ
D Petite Pièce
74 74
WALDTEUFEL
M-S Polka « Minuit »
75
WEBER
D Andante con variazione op.3 DM Scherzo
37 70
WILTON
D Petite sonate (moderato) D Petite sonate (menuet)
38 39
JAZZ - CHANSONS
KELLY (GENE) KERN LEE LEWIS (JERRY) Great Balls Of Fire Stand By Me
LITTLE RICHARD Tutti Frutti LUMIERE (JEAN) Le temps des cerises MADONNA Don’t Cry For Me Argentina MANCIN (H.) La Panthère rose MISTINGUETT Mon homme MEHLDAU BRAD Alfie MONK (THELONIUS) Misterioso Well, You Needn’t I Wanna Be Loved By You MONTAND (YVES) Les feuilles mortes
PRÉJEAN (ALBERT) Sous les ponts de Paris
PRESLEY (ELVIS) Heartbreak Hotel PRIMA (LOUIS) Just A Gigo RODGERS & HAMMERSTEIN
22 29 15 31
Climb Ev’ry Mountain King Porter Stomp ROTA (NINO) Le parrain SABLON (JEAN) J’attendrai Vous qui passez sans me voir SILVA (BERTHE) On n’a pas tous les jours vingt ans Frou-frou SINATRA (FRANK) My Way Strangers In The Night
20 32 HS7 HS7 HS7 20 25 28
STREISAND (BARBARA) 19
Hello Dolly
TRAD. IRLANDAIS LONDONDERRY
TRENET (CHARLES)
BOUDLEAUX & FELICE BRYANT 31 S7 24 44 44 34 27 26
DELYLE (LUCIENNE) HS7 26
Pour commander une partition, il vous suffit d’indiquer la référence du numéro de Pianiste de la façon suivante : Pianist e n°93 - Réf. : PI093Z1
Merci de reporter cette référence sur l e bon de commande que vous trouverez en page pré cédente. Plus simple et plus rapide, commandez sur : www.pianiste.fr/anciensnumeros
20 HS7
Cécile, ma fille 29 PIAF (EDITH) L’hymne à l’amour HS7 Mon légionnaire HS7 La vie en rose 21 PIAZZOLA (ASTOR) Libertango 28 PLATTERS (THE) Smoke Gets In Your Eyes 39 POLNAREFF (MICHEL) Lettre à France 46
23 24 30 28 31
The Girl From Ipanema
35 58 25 51 36 23
NOUGARO (CLAUDE)
Un homme et une femme BEATLES (THE) For No One Get Back BEE GEES How Deep Is Your Love BERRY (CHUCK) Johnny B. Goode
Mon amant de Saint-Jean
15 19 17 HS7
MONROE (MARYLIN)
Londonderry Air
Femmes, je vous aime COLE PORTER I’ve Got You Under My Skin COSTELLO (ELVIS) She DELERM (VINCENT) Fanny Ardant et moi
45 27
Can’t Help Lovin’dat Man LAI (FRANCIS) Love Story
22 33
BOYER (LUCIENNE) Parlez-moi d’amour CHEVALIER (MAURICE) Valentine CLERC (JULIEN) Ma préférence
19
Singing In The Rain
AZNAVOUR (CHARLES) La bohème BARBARA Vienne BAROU (PIERRE)/LAI (FRANCIS)
Wake Up Little Susie
23 38 50 26 17 36 48 59
ROLL MORTON (JELLY)
VON WEBER
E L’Invitation à la vals e op. 65
32 37 22 32 40 35 9 27
FATS WALLER
STRAUSS J.
DE MORAES (VINICIUS), JOBIM (TOM)
SOLER
S Sonate en ré n° 84 –Allegro
SPEER
29
TATUM (ART) 25
Over The Rainbow Bonsoir jolie madame Boum Chanson d’automne Douce chanson Je chante L’âme des poètes La mer Le soleil et la lune Ménilmontant Mes jeunes années Une noix Y’a d’la joie
ULMER (GEORGES) Pigalle VALLE (MARCOS) So Nice WILSON (TEDDY) / HUPFELD As TimesGoes By
HS9 HS9 HS9 HS9 HS9 HS9 HS7/9 HS9 HS7/9 HS9 HS9 HS9 HS7 34 24
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Je me rappelle le trac fou que j’ai ressenti avant de jouer La Leggierezza de Liszt. En sport, dans des conditions semblables, j’arrivais à donner le meilleur de moi-même. Mais, devant un clavier, je perdais tous mes moyens. Pourtant, je rêvais d’être concertiste, rien que ça ! Comment expliquez-vous ce mauvais trac ?
A M M A G D D J / L E I N O H T O K C I R T A P
JEANNIE LONGO
LA PETITE REINE DU PIANO La légende du cyclisme féminin pratique depuis toujours une autre discipline à haut niveau : le piano, sa première passion avant le vélo. Rencontre avec une championne qui n’a pas que la tête dans le guidon.
L
e vélo et le piano, n’est-ce pas un drôle de mélange ?
appliquée. J’étais une élève assidue et studieuse. Je prenais une à deux heures de cours par semaine et je pratiquais le piano quotidiennement. À cette époque, j’étais très occupée, car je courais aussi à ski. De 13 à 17 ans, j’ai participé à un concours international de piano destiné aux élèves de professeurs indépendants, organisé à Besançon. Cela représentait beaucoup de travail. Le programme était dense.
Dès l’enfance, j’ai baigné dans la musique classique, car ma mère était pianiste amateur. C’est elle qui m’a initiée à cet instrument. J’ai tout de suite accroché. Mais cela déplaisait à la petite fille que j’étais d’être entraînée par sa mère. J’ai donc pris des cours particuliers avec une dame qui habitait en Haute-Savoie, car le conser- Déjà la compétition… vatoire d’Annecy était trop loin. Les concours de piano m’ont trauQuel souvenir gardez-vous matisée ! J’avais toujours les mains de votre apprentissage ? froides ou moites. En plus, les épreu Très bon! Mon professeur ne m’a pas ves se déroulaient sur un piano à du tout «saoulée» avec le solfège. Elle queue, et je n’en avais pas chez moi. était plutôt une adepte de la théorie J’étais toujours extrêmement tendue. 82 n PIANISTE n°98 n
mai-juin 2016
En sport, avec la concentration, j’arri vais à canaliser mes forces physiques, même si j’avais un trac incroyable quand je m’élançais à skis sur la piste, devant l’entraîneur. Au piano, le jury me tétanisait. Je le percevais comme un censeur.
d’ailleurs être coureur cycliste ! Je m’étais beaucoup entraînée pour préparer ce duo et j’étais allée le voir à plusieurs reprises pour travailler. Le jour de l’enregistrement, c’était parfait. Mais, au moment du direct, mes doigts sont devenus liquides, on aurait dit qu’ils ne s’enfonçaient pas dans le clavier. Je courais après les mains de François-René ! La musique a-t-elle joué un rôle tout au long de votre carrière ?
Oui, et très important. J’avais acheté un baladeur aux États-Unis et j’écoutais toujours de la musique classique avant les compétitions. Cela m’aidait à me concentrer, cela Pour atteindre un tel niveau me transcendait même. En général, dans la compétition sportive, je choisissais des concertos pour vous avez dû faire preuve d’une piano de Bach ou des sonates de discipline de fer. La musique vous Beethoven. La veille de mes prea-t-elle transmis cette exigence ? miers Jeux olympiques, ces œuvres Je dirais plutôt que c’était la base de m’ont accompagnée. Je m’en rapmon éducation. Ma mère était ins- pelle encore, c’était le matin, avant titutrice. Elle transmettait beaucoup de partir sur le lieu de la course. d’affection à ses enfants, mais elle Allez-vous au concert ? possédait une grande autorité. C’était Non, je sors très peu. En revanche, une femme volontaire et disciplinée. je suis les retransmissions des concours Ainsi, quand je voulais atteindre un de piano à la télévision. objectif, je faisais preuve à mon tour C’est donc la compétition de beaucoup de volonté. qui vous intéresse ? Quels ont été vos grands chocs Cela m’intéresse, car ces concours musicaux ? révèlent des pianistes très jeunes et Lorsque j’étais adolescente, j’aimais les poussent à donner le meilleur énormément les Suites pour violoncelle d’eux-mêmes. Je suis toujours subde Bach. À l’époque, j’étais à contre- juguée. Quand je les regarde, j’ai courant, car ce compositeur était l’impression que ce sont déjà des pros ! un peu considéré comme ringard. Continuez-vous la compétition J’ai aussi joué beaucoup de partitions cycliste ? de Debussy pour faire plaisir à ma Je continue à m’entraîner. J’aime mère. Elle était née en 1924, c’était trop l’effort physique. Sans forcer. après la guerre, les femmes avaient Comme au piano. Je n’ai jamais eu obtenu le droit de vote [celles-ci ne envie de travailler mon piano huit l’ont en fait acquis qu’en 1945, ndlr] . heures par jour ! Ce serait une erreur. Gershwin ou Debussy étaient syno- On obtient plus de résultats avec nymes de liberté. Personnellement, deux ou trois heures quotidiennes j’avais des goûts plus « classiques ». efficaces. Il faut savoir s’aérer. J’adorais travailler les sonates de Quels sont vos pianistes Beethoven, tout particulièrement de prédilection ? la « Pathétique » et l’« Appassionata ». J’aime Glenn Gould couché sur son Avez-vous gardé, au fil du temps, piano. Alexis Weissenberg, Brigitte un lien avec le piano ? Engerer, David Fray ou encore Boris Il y a dix ans, j’ai joué en public à Berezovsky font également partie quatre mains avec François-René de mon palmarès. Je trouve parfois Duchâble, lors de l’émission que me la jeune génération un peu stéréoconsacrait Michel Drucker. François- typée : le jeu est souvent un poil René Duchâble est originaire de rapide et pas assez dramatique. Propos recueillis par Elsa Fottorino Haute-Savoie comme moi. Il voulait
GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
5 I F
4 P V O E
0 G
& V S P Q F
%BOT DF NPOEF Ô DPNCJFO
NBUÉSJBMJTUF MF QJBOP MJCÈSF OPUSF DSÉBUJWJUÉ QFSTPOOFMMF *M OPVT QFSNFU EF OPVT SFMBYFS FU EF OPVT SÉHÉOÉSFS BQSÈT VOF SVEF KPVSOÉF Á M`ÉDPMF PV BV USBWBJM
4ÉSJF 1SPGFTTJPOBM
%FT QJBOPT QFSTPOOBMJTÉT DPOÇVT QPVS MFT QJBOJTUFT FYJHFBOUT NBJT OÉBONPJOT E`VO QSJY BCPSEBCMF
4ÉSJF 5SBEJUJPO -B HBNNF JOUFSNÉEJBJSF GBCSJRVÉF EF 4ÉSJF 7JTJPO %FT QJBOPT Á VO
NBOJÈSF BSUJTBOBMF FU E`VO QSJY FODPSF QMVT JOUÉSFTTBOU
QSJY JNCBUUBCMF QPVS FOUSFS EBOT MF NPOEF 8 )P⒎NBOO
& V S P D M B W J F S T E U R O C L A V I E R S
C FD I TU FJ O GS F V S PD M BW JF S T GS Q J BO P! T BJ DP G S