Encyclopédie Médico-Chirurgicale 50-470-C-10
50-470-C-10
Phlébologie esthétique Télangiectasies des membres inférieurs AA Ramelet
Résumé. – Très mal vécues par les patientes, les télangiectasies peuvent être le signe avant-coureur d’une insuffisance veineuse plus importante. Une évaluation phlébologique est donc essentielle avant toute décision thérapeutique. Les veines nourricières doivent être traitées prioritairement, soit par sclérose, soit par phlébectomie. La sclérose fine permet d’effacer en quelques séances la majorité des télangiectasies. Dans certains cas, on peut la compléter par le curetage des varicosités au crochet à phlébectomie. Les indications de la photothermolyse au laser ou de l’électrocoagulation sont limitées, tout comme les possibilités de prévention. © 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : télangiectasies, sclérothérapie, phlébectomie, laser, électrocoagulation.
Introduction Très fréquentes, les télangiectasies des membres inférieurs (MI) sont mal acceptées par les femmes, vu leur caractère disgracieux. La demande thérapeutique est importante et l’information des malades par les journaux féminins navrante. Les hommes les tolèrent mieux, car elles sont masquées par la pilosité et les habitudes vestimentaires. Certains sportifs pourtant (en particulier les cyclistes qui rasent leur jambes) en souhaitent également le traitement. Les télangiectasies ne posent pas qu’un problème esthétique. Elles trahissent souvent une atteinte encore méconnue du réseau veineux superficiel ou profond [19]. Leur traitement doit souvent comprendre la correction d’un reflux veineux sous-jacent. Les télangiectasies des MI doivent ainsi s’intégrer dans une vision plus large de la maladie veineuse, de sa prévention et de son traitement.
Définition Les télangiectasies sont des varicosités mineures, très superficielles, intradermiques ou sous-dermiques, dont le diamètre interne varie de 0,1 à 1 mm. Elles peuvent occasionnellement être symptomatiques, en particulier lorsqu’elles sont alimentées par un reflux veineux sous-jacent. On peut distinguer plusieurs types de télangiectasies des MI : – nappes télangiectasiques alimentées par une veine, une veinule ou une perforante insuffisante, de diamètre variable, souvent palpables. Ces varicosités sont fréquemment disposées en éventail, à la face externe des cuisses et des jambes, nourries par des varices réticulaires, centrées sur la face externe du genou (aspect de « pin maritime »). Elles sont reliées au réseau profond par de nombreuses petites perforantes, aussi bien à la face externe du genou que tout au long de leur trajet [15] ;
Albert-Adrien Ramelet : Spécialiste FMH en dermatologie et en angiologie, 2, place Benjamin-Constant, 1003 Lausanne, Suisse.
– varicosités télangiectasiques apparemment isolées, mais souvent alimentées par une veinule perpendiculaire au plan cutané ; – télangiectasies écarlates (essentielles), fin chevelu capillaire rougevif siégeant sous un épiderme lisse, sans vaisseau nourricier détectable, signant une fragilité veinulaire, particulièrement réfractaires au traitement. Forme extrême et rare, survenant chez la femme d’âge moyen, les télangiectasies essentielles progressives [15] débutent aux MI avant de s’étendre aux membres supérieurs et au reste du tégument ; – télangiectasies secondaires (néotélangiectasies, matting), petites nappes angiomateuses violacées, circonscrites, congestives, s’effaçant à la vitropression, survenant après un traitement (sclérose de varices, phlébectomie, chirurgie) ou un traumatisme extérieur (contusion).
Bilan Les télangiectasies des MI accompagnent souvent une insuffisance veineuse, dont elles peuvent n’être que le seul signe, ou sont nourries par une veine insuffisante. Un examen clinique méticuleux, complété au moins par un examen doppler des saphènes et du réseau profond, est donc indispensable (cf fascicule 50-470-A-10 de l’Encyclopédie Médico-Chirurgicale). La topographie des télangiectasies fournit déjà des indications précieuses sur leur origine [4, 15]. Les varicosités de la face interne des genoux ou des jambes doivent faire rechercher une insuffisance de la grande saphène, une atteinte du mollet, un reflux de la petite saphène, trop souvent méconnus... Les télangiectasies de la face externe des cuisses et des jambes sont le plus souvent alimentées par des varices réticulaires. Paradoxalement, celles-ci ne sont parfois visibles que lors de l’examen du patient couché.
Traitement Le traitement des télangiectasies des MI repose principalement sur la sclérose. Les veines nourricières doivent être traitées simultanément, soit par sclérose, soit par phlébectomie.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Ramelet AA. Phlébologie esthétique. Télangiectasies des membres inférieurs. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Cosmétologie et Dermatologie esthétique, 50-470-C-10, 2000, 5 p.
Phlébologie esthétique. Télangiectasies des membres inférieurs
50-470-C-10
La phlébectomie permet de cureter certains types de télangiectasies. Les indications d’autres traitements (électrocoagulation, lasers...) sont limitées. SCLÉROTHÉRAPIE
La sclérose fine est le traitement de choix des télangiectasies des MI [4, 15] ; c’est également le plus économique. La technique ne diffère pas fondamentalement de celle qui est décrite dans le fascicule 50-470-B-10.
¶ Matériel Les sclérosants utilisés sont principalement : – le polidocanol, de 0,2 à 1 % ; – la mousse de polidocanol (cf fascicule 50-470-B-10) ; – la glycérine chromée, pure ou diluée jusqu’au quart dans de l’eau distillée ou de la lidocaïne, adrénalinée ou non ; – le sérum glucosé hypertonique à 66 % ; – l’association de sclérosants, permettant théoriquement d’additionner leurs effets. La dilution du polidocanol avec du glucose hypertonique freine la progression intravasculaire de la préparation et améliore son efficacité [20]. Les seringues en verre reviennent à la mode, car elles seules permettent la confection de mousse de polidocanol [6, 10]. Il faut éviter les seringues à tuberculine : la pression exercée est excessive, vu la faible section de la seringue, faisant courir un risque de rupture vasculaire et d’injection paravasale trop élevé. L’aiguille très fine (calibre 30 G 1/2) est légèrement angulée à sa base, facilitant la ponction du capillaire. Certains préconisent l’emploi d’une loupe ou de lunettes grossissantes pour mieux repérer les veinules.
¶ Technique
– les nécroses cutanées, qui surviennent le plus souvent lors de l’injection d’un sclérosant inadapté, trop concentré ou en trop grande quantité, lors d’une injection trop rapide (entraînant une rupture pariétale ou une diffusion rétrograde dans une artériole), ou dans des zones « à risque » telles que la crête tibiale ou les chevilles. La survenue d’une nécrose ne signifie pas nécessairement qu’une faute technique ait été commise ; – la survenue de télangiectasies secondaires (matting), qui est imprévisible. Certains recommandent de supprimer la prise d’œstrogènes tout au long du traitement de télangiectasies (facteur favorisant de néotélangiectasies ?). Selon notre expérience, cette complication inesthétique survient tout aussi souvent en l’absence de prise hormonale. Le traitement des télangiectasies secondaires est difficile et décevant (sclérose fine, phlébectomie d’une veine nourricière négligée, laser ?). Parfois ces nappes angiomateuses s’atténuent spontanément après quelques mois.
¶ Plan de traitement Le traitement des télangiectasies est le plus souvent long et fastidieux. Les séances sont répétées toutes les 2 à 4 semaines : les télangiectasies ne disparaissent en effet pas immédiatement après la sclérose, et cet intervalle permet de mieux évaluer le résultat, en évitant des consultations inutiles. Certains cas résistent au traitement, même s’il est bien conduit. Il faut alors savoir renoncer à le poursuivre.
¶ Variantes Plusieurs variantes techniques ont été proposées : – technique « air-bloc », faisant précéder l’injection du sclérosant par une petite quantité d’air ; – dilution extrême du sclérosant ; – micro-incisions tout le long des télangiectasies immédiatement après la sclérose fine, pour prévenir la pigmentation [8] ; – association de la sclérose et du laser [1].
Le patient doit être étendu et parfaitement immobile. Les télangiectasies sont injectées de proche en proche, en commençant par leur vaisseau nourricier, en faisant « blanchir » des zones de quelques centimètres carrés. Il ne faut pas craindre de multiplier les injections, sans jamais « forcer » ni surtout chercher à injecter une trop grande quantité de sclérosant. La mousse est très agréable à injecter, vu son « élasticité », qui prévient le risque de rupture vasculaire, et sa persistance dans le vaisseau, vu son inertie et sa résistance au flux sanguin. L’intérêt de la contention élastique (3 jours à 3 semaines) est controversé. Elle est préconisée par de nombreux auteurs [8, 17]. Il est utile de comprimer (ou de faire comprimer par le patient) la veinule sclérosée pendant quelques minutes. Expérimentalement, un contact de 20 secondes avec 0,5 % de polidocanol suffit à altérer la paroi d’une veine de 0,5 mm de diamètre. Le patient devrait rester étendu pendant quelques minutes après la séance, en particulier si l’on injecte de la mousse de polidocanol, vu le risque théorique d’amaurose transitoire. Les éventuels thrombi endovariqueux doivent être évacués par scarification à la pointe d’une aiguille ou d’une lame de bistouri les jours suivant la sclérose, pour limiter les pigmentations résiduelles.
¶ Complications Elles sont objectivement rares, mais pas inexistantes . Des cas de thrombose veineuse profonde après sclérose de télangiectasies ont été décrits, mais cette complication majeure est exceptionnelle. Les complications locales sont principalement : [15]
– les ecchymoses, qui disparaissent rapidement ; – la pigmentation résiduelle, qui s’atténue le plus souvent en quelques semaines mais peut persister plusieurs mois, survient dans 5 à 30 % des cas [8]. Elle est partiellement prévenue par l’incision des caillots ; 2
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¶ Résultats La majorité des télangiectasies s’atténuent ou s’effacent de manière satisfaisante lors d’une sclérothérapie bien conduite, pour autant que l’on ait supprimé tous les « points de fuite » qui les nourrissaient. Le patient doit être prévenu du caractère évolutif de la maladie variqueuse et savoir que le traitement des télangiectasies doit être régulièrement répété. Le plus souvent, ce sont de nouvelles télangiectasies qui se développent, plutôt que des récidives de varicosités déjà traitées [9]. PHLÉBECTOMIE SELON MULLER
La phlébectomie ambulatoire est une technique simple, permettant d’extraire une veine par des incisions cutanées minimales, à l’aide d’un crochet, sans risques ni cicatrices [11, 13, 15].
¶ Indications et technique Principalement indiquée lors du traitement de varices tronculaires et réticulaires, la phlébectomie a quatre indications lors du traitement des télangiectasies [14] : – phlébectomie de varices tronculaires : élimination d’une saphène (sans incompétence ostiale) ou d’une saphène accessoire nourrissant une nappe de télangiectasies, en particulier à la face interne du genou ; – phlébectomie de varices réticulaires, même de très fin calibre, siégeant principalement au creux poplité, à la face externe des jambes et des cuisses « pin maritime », plus rarement à la face interne des cuisses ou des genoux, ou encore aux malléoles. Les télangiectasies sont sclérosées au cours de l’opération destinée à éliminer leur reflux nourricier ;
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Phlébologie esthétique. Télangiectasies des membres inférieurs 1
Curetage de télangiectasies à l’aide du crochet à phlébectomie. La pointe acérée du crochet bleu de Ramelet permet de cureter, de déchirer et d’extérioriser une partie des télangiectasies, complétant utilement la sclérose.
– phlébectomie de minuscules perforantes, siégeant sous une nappe télangiectasique, parfois stellaire, ou expliquant une macule de matting. La perforante nourricière est repérée à la vitropression, puis extirpée à l’aide d’un crochet à phlébectomie ; – phlébectomie par curetage de nappes télangiectasiques bleutées ou violacées, saillantes, ou de varicosités filiformes bleutées. Après repérage et anesthésie locale, les télangiectasies sont sclérosées (polidocanol, mousse de polidocanol), puis incisées avec une aiguille 18 G. Un crochet à phlébectomie dont l’ardillon doit être très pointu (crochet bleu de Ramelet) [12, 15] est introduit successivement dans les incisions ; la peau est sous-minée, puis « curetée » à l’aide de la pointe acérée du crochet, orientée vers l’épiderme (fig 1). Le crochet permet ainsi d’arracher des fragments de varicosités, parfois longs de plusieurs centimètres, les segments restant en place étant altérés par la sclérose préopératoire. On procède, pour la suite, comme lors d’une phlébectomie selon Muller (cf fascicule 50-470-B-10).
¶ Complications Ce sont celles de toute phlébectomie et sclérothérapie [15]. Elles sont exceptionnelles. La diffusion intradermique de faibles quantités de polidocanol dilué est bien tolérée (ce produit avait été conçu à l’origine comme anesthésique local, destiné à l’infiltration souscutanée). Les rares nécroses punctiformes témoignent usuellement d’un traumatisme opératoire excessif.
¶ Résultats Les suites sont simples et les résultats satisfaisants, les nappes congestives et profuses s’atténuant massivement en une seule séance de phlébectomie, complétée par de la sclérose (fig 2). Il n’y a pas ou peu de pigmentation résiduelle. Le traitement peut être complété ultérieurement par une ou deux séances de sclérose fine. LASERS ET LAMPES « FLASH »
Même si les traitements aux lasers sont très à la mode et présentés de manière flatteuse dans les journaux féminins, leur indication en phlébologie reste restreinte. Ils ne sont nullement en concurrence avec la sclérothérapie, beaucoup plus efficace et moins coûteuse que
la photothermolyse et la photocoagulation. Les défenseurs les plus acharnés du laser dans le traitement des varicosités sont le plus souvent dépourvus d’une formation en phlébologie..., alors que dermatoangiologues et angiologues font preuve de beaucoup de retenue face à des méthodes qui n’ont pas fait leurs preuves.
¶ Aspect technique De nombreux lasers et lampes « flash de haute énergie » ont été développés ces dernières années. Leurs propriétés et leurs indications diffèrent selon leur longueur d’onde. Les lasers « vasculaires » visent un chromophore principal, l’hémoglobine, mais ne parviennent pas à éviter un chromophore « parasite », la mélanine. Plusieurs paramètres doivent être pris en considération. – Chaque substance a sa courbe d’absorption. Idéalement, un laser devrait avoir une longueur d’onde qui lui permette de détruire sélectivement un chromophore, sans endommager les tissus voisins. Pratiquement, les courbes d’absorption se chevauchent : la mélanine et l’hémoglobine ont des courbes d’absorption très proches, ce qui limite fondamentalement l’engagement des lasers dans le traitement des télangiectasies chez les sujets pigmentés (types III et plus) ou bronzés. – Temps de relaxation (temps nécessaire pour réduire de moitié l’élévation de température induite par l’énergie délivrée sur le tissucible par le laser). Le temps de relaxation thermique augmente parallèlement à la taille de la cible. – Largeur du faisceau (spot). Elle devrait être au moins du double du diamètre du vaisseau visé. La pénétration en profondeur d’un faisceau large est plus importante, vu la réflexion du rayonnement dans les tissus (scattering) et une augmentation de l’effet thermique. En contrepartie, le risque de croûtes, de cicatrices et de troubles pigmentaires est plus important avec un faisceau large (4 mm), qu’avec un faisceau étroit (inférieur à 1 mm). – Énergie émise (J/cm2). Elle doit être suffisante pour détruire la cible. – Durée de l’impulsion laser. Elle détermine l’efficacité de l’impact sur la cible. L’énergie des lasers vasculaires peut être délivrée en : – un temps court (0,45-1,5 ms), provoquant une photodestruction par « explosion » des vaisseaux et survenue d’un purpura ; – un temps moyen à long (5-50 ms), induisant une photocoagulation partielle ou totale de la paroi vasculaire et la formation d’un thrombus endovasculaire. La peau doit être refroidie avant et pendant l’émission du laser (application de glaçons ou de spray cryogénique, tir laser à travers une cellule réfrigérante posée sur la zone à traiter), pour limiter l’atteinte épidermique et le risque de cicatrices. – Fréquence des impulsions. Elle influe sur les cycles d’échauffement et de refroidissement des tissus-cibles. – Pénétration tissulaire du rayonnement laser. Il est souvent trop faible pour atteindre correctement sa cible (0,75 mm pour un KTP par exemple).
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* A
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Curetage de télangiectasies au crochet à phlébectomie. A. Cliché avant phlébectomie de fines varices réticulaires et curetage au crochet. Sclérothérapie peropératoire. Une séance de sclérothérapie complémentaire 1 mois plus tard. B. Résultat tardif, 6 mois après l’intervention.
* B 3
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Phlébologie esthétique. Télangiectasies des membres inférieurs
Le traitement au laser de la couperose ou des angiomes plans est remarquablement efficace et contribue à la fascination qu’exercent ces technologies. Il n’en va pas de même aux MI, probablement suite aux facteurs suivants : – présence d’un reflux veineux, dont seule la suppression peut permettre d’obtenir des résultats à long terme ;
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¶ Complications, limites et précautions La photothermolyse des télangiectasies ne doit pas être pratiquée chez des patients bronzés ou naturellement pigmentés (phototype supérieur à II), les courbes d’absorption de la mélanine et de l’hémoglobine étant très proches.
– pression hydrostatique élevée dans les MI ;
La suppression des reflux sous-jacents est impérative avant tout traitement.
– profondeur intratissulaire et épaisseur de la paroi des télangiectasies, le vaisseau dilaté n’étant pas assez altéré par le rayonnement ou sa portion inférieure insuffisamment détruite ;
Une protection oculaire adéquate est indispensable, tant pour l’opérateur, le patient, que le personnel paramédical.
– irrégularité du trajet des varicosités, serpentant dans le derme à des profondeurs variables, à l’inverse des télangiectasies du visage, beaucoup plus « linéaires » ; – cicatrisation moins favorable aux MI qu’au visage ; – extrême variabilité de la réponse individuelle des patients, non prédictible, rendant illusoire l’établissement de paramètres sûrs et reproductibles... Les enjeux financiers liés à la commercialisation des lasers et des lampes « flash » sont lourds. Les publications consacrées aux résultats que l’on peut obtenir avec ces techniques sont contradictoires, l’appréciation d’une lampe « flash » à haute énergie pouvant, par exemple, être exceptionnellement positive [2] ou très négative [3], en utilisant pratiquement les mêmes paramètres, avec le même appareillage... Le doute hante l’esprit du lecteur critique. Les lasers non spécifiques pour le chromophore hémoglobine (CO2) ne se prêtent pas au traitement des télangiectasies des MI, vu les cicatrices punctiformes très disgracieuses qu’ils occasionnent. Les appareils présentant un intérêt sont [18] : – les lasers à colorants pulsés, avec un temps d’impulsion de 0,45 ou 1,5 ms, une longueur d’onde de 585, 590, 595 et 600 nm, des spots de plusieurs millimètres, délivrant une énergie allant jusqu’à 20 J/cm2 [7, 18]. Ces appareils sont très coûteux à l’achat et à l’emploi, et causent un purpura transitoire inesthétique ; – les KTP (Nd-YAG à fréquence doublée), d’une longueur d’onde de 532 nm, avec des temps d’impulsion de 0,2 à 0,5 ms, des spots de 1 à 10 mm et une énergie maximale de 20 J/cm2. Il n’y a pas de purpura post-thérapeutique, mais les dégâts épidermiques peuvent être plus importants, car la « compétition » entre les chromophores hémoglobine et mélanine est plus forte pour cette longueur d’onde. Le refroidissement cutané est indispensable ;
Le patient doit être dûment prévenu du prix nécessairement élevé du traitement, vu le coût des appareils, et des nombreux effets secondaires, totalement occultés dans les journaux grand public : – douleur lors de la photothermolyse ; – bulles, croûtes, principalement en cas de refroidissement insuffisant de la peau ou d’une pigmentation trop marquée ; – hyperpigmentations durables (plusieurs mois), souvent très mal vécues ; – hypopigmentations, le plus souvent transitoires ; – cicatrices ; – récidives. Les traitements lasers feront encore certainement beaucoup parler d’eux, demandant aux médecins un sens critique aigu pour évaluer l’éventuel intérêt de nouvelles technologies. ÉLECTROCOAGULATION
L’électrocoagulation à l’aiguille fine ne présente guère d’intérêt. Elle entraîne de fines cicatrices punctiformes et disgracieuses. Elle ne permet d’effacer que de très discrets chevelus capillaires. L’utilisation d’aiguilles fines isolées au Téflont permet, dans certains cas, de coaguler électivement le capillaire dilaté sans altérer l’épiderme. L’électrocoagulation selon Wilmen (Varext) permet d’obtenir des résultats appréciables. Un fin courant électrique circule entre les deux branches d’une électrode double, en « fourchette », appliquée le long de la télangiectasie. Le traitement est malheureusement assez douloureux. Les fines croûtes qui se développent en regard des électrodes disparaissent en quelques semaines.
– les lasers alexandrite, d’une longueur d’onde de 755 nm, combinés à un refroidissement cutané, qui seraient surtout efficaces en combinant leur engagement avec la sclérose ; – les diodes (800 nm), aisément transportables vu leur faible volume ; – les Nd-YAG à 1 064 nm, qui ont une moindre affinité pour la mélanine et une bonne pénétration tissulaire. Des pulses variant de 1 à 50 ms, associés à un système de refroidissement cutané (par contact ou spray cryogénique), permettraient de traiter des vaisseaux d’un diamètre allant jusqu’à 3 mm ; – les lampes « flash » émettant des éclairs lumineux non cohérents, filtrées à moins de 1 000 nm, avec un spot de 8 x 35 mm [2, 3, 16, 18].
¶ Indications La limite de l’engagement de ces lasers est étroite. Ce traitement est moins efficace que la sclérothérapie, tout en étant infiniment plus coûteux. Les indications sont peu nombreuses et relatives : – télangiectasies d’un diamètre inférieur à 1 mm, voire à 0,5 mm, résistant à la sclérose ; – fines néotélangiectasies (matting) ; – télangiectasies malléolaires (risques de nécrose lors de la sclérothérapie) ; – télangiectasies essentielles progressives. 4
CAMOUFLAGE
Trop souvent omis lors de l’entretien avec le malade, le camouflage des télangiectasies est une alternative ou un complément au traitement intéressant : – application de crèmes autobronzantes, inoffensives pour autant que l’on n’imagine pas être alors protégé du soleil ; – bronzage obtenu prudemment en solarium, utraviolets A (dont les risques à long terme sont souvent sous-évalués), ou lors d’une exposition progressive au soleil, sans échauffement de la peau ; – application de cosmétiques couvrants et résistant à l’eau.
Prévention Les possibilités de prévention sont restreintes. Certains facteurs peuvent favoriser la survenue de télangiectasies et devraient être contrôlés : obésité, sédentarisme, chaleur locale (épilation à la cire trop chaude, bains de boue (fangos), bains de soleil prolongés où la peau devient brûlante sous l’ardeur des rayons. Le rôle éventuellement aggravant des hormones est mal établi, mais régulièrement évoqué.
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Phlébologie esthétique. Télangiectasies des membres inférieurs
Conclusion L’éradication des veines nourricières et la sclérose fine restent les traitements de choix des télangiectasies, tout en étant les plus économiques. La phlébectomie est un complément thérapeutique utile.
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Les indications du laser sont encore limitées, ce traitement étant de surcroît coûteux. Aucun de ces traitements ne dispense le praticien de pratiquer un bilan phlébologique soigneux avant toute décision thérapeutique, ni de supprimer préalablement tous les reflux nourriciers des varicosités.
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