DOSSIER
Pôles de compétitivité au Maroc Où et comment ?
Ces pôles de compétitivité désignent des groupements d’acteurs pour créer des synergies sur l’ensemble de la chaîne de valeur des activités économiques. Ils intègrent, notamment, des entreprises, des structures de recherche et de formation En moins de deux ans après le lancement de la stratégie pour l’offshoring, deux zones dédiées sont déjà opérationnelles : Casanearshore et Technopolis Le gouvernement a retenu l’idée d’un pôle de compétitivité dédié aux industries automobiles, qui sera implanté à proximité du port Tanger Med Deux agropoles sont en cours de développement à Fès et à Berkane Dossier réalisé par Anthioumane Tandia
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Pôles de compétitivité au Maroc, où et comment ?
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Plateformes industrielles intégrées, le nouveau chantier du ministère de l’Industrie, du commerce et des nouvelles technologies 27 Entretien avec Mohamed Lasry, DG de Casanearshore
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Formation, le maillon faible
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Ce qui se fait ailleurs, cas de la France
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Industrie compétitive, reconquête des marchés, take-off (décollage économique)… Telles étaient déjà les ambitions du Maroc qui venait de tourner le dos à un long Programme d’Ajustement Structurel (PAS). Nous étions en 1995 et la Banque mondiale recommandait alors aux autorités marocaines la mise en place d’un Comité de suivi du développement du secteur privé dont la principale mission est de définir une stratégie pour doter le pays d’une industrie moderne et compétitive. Les choses vont aller très vite car un an plus tard, le comité trace la voie. Sa stratégie baptisée «Le Maroc compétitif» est bâtie autour de secteurs censés jouer le rôle de locomotive en tirant la croissance vers le haut. Avec cette vision, l’économie s’est beaucoup améliorée en une décennie grâce au secteur des télécommunications, aux grands projets d’infrastructures mais aussi et surtout les nombreuses entreprises qui se sont installées dans la foulée des secteurs à forte composante technologique comme l’aéronautique, les composants électroniques, l’offshoring…
La maquette de la deuxième phase de Casanearshore devant accueillir en 2009 un autre groupe d’entreprises.
Dix ans après la déclinaison de la stratégie «Le Maroc compétitif», l’économie se porte beaucoup mieux et dépend moins de l’agriculture avec à la clé l’explosion du secteur des services. En dépit d’un taux de croissance de + 5% par an, celle-ci apparaît insuffisante pour résorber le chômage urbain dont le taux avoisinait les 20 %. Et pour ne pas arranger les choses, les exportations sont à la traîne. Résultat : le déficit commercial se creuse malgré la
bonne santé des transferts d’argent des Marocains résidents à l’étranger (MRE) et le secteur du tourisme. Depuis un nouveau programme a été lancé comme solution. Nom de code : plan Emergence. Il s’articule autour de deux axes : créer de la richesse, donc de l’emploi et de la croissance et développer des activités exportatrices à haute valeur ajoutée. L’idée est de positionner le Maroc sur des métiers mondiaux pérennes, et dans lesquels il pourra Conjoncture N° 900 - Janvier 2009 - 21
DOSSIER faire valoir ses atouts : proximité, maind’œuvre qualifiée, accès aux marchés. C’est de l’étude confiée en septembre 2004 au Cabinet McKinsey que découle le programme Emergence avec une stratégie industrielle pour chacun des sept métiers mondiaux du Maroc : offshoring, automobile, aéronautique, électronique de spécialité, agroalimentaire, produits de la mer et textile. McKinsey remet sa copie en avril 2005 et cinq mois plus tard le gouvernement boucle son plan Emergence qui est actuellement en marche dans certaines des sept filières arrêtées. Mais si ce programme fixe les principaux leviers de développement du pays, il donne également beaucoup d’importance aux moyens à mettre en œuvre pour attirer les investissements dans ces nouveaux métiers mondiaux du Maroc aussi variés les uns que les Source: ministère de l’Industrie, du commerce et des nouvelles technologies autres. En clair, il s’agit pour le Royaume d’apporter des sites clés en main. lancé à Casablanca à travers l’offre offs- tional de formation agressif, focalisé sur Alliant l’acte à la parole, le Maroc s’est horing du Maroc. Son objectif est clair : les métiers de l’offshoring pour 12 filièdepuis lors engagé dans une politique attirer les activités d’externalisation res clés (techniques et administratives : active d’aménagement des pôles de (traitement d’informations financières, 22.000 lauréats sur la période 2006compétence pour en favoriser la com- comptables…). «L’offre marocaine préco- 2009) et un dispositif d’aide à la formapétitivité. Aux yeux des responsables du nisée pour le développement de ce sec- tion pour toutes les entreprises du secministère de l’Industrie, du commerce teur a été formalisée par la circulaire de teur pouvant atteindre 65 000 dhs pour et des nouvelles technologies, maîtres Monsieur le Premier Ministre n°9/2007 certains profils. Quid du bilan d’étape d’œuvre du plan Emergence, ces pôles qui est entrée en vigueur le 1er janvier de cette filière pionnière ? «En moins de de compétitivité désignent des grou- 2007, est constituée d’un package ali- deux ans après le lancement de la stratépements d’acteurs pour gnant tous les facteurs gie pour le secteur de l’offshoring, deux créer des synergies sur Les premiers bureaux de compétitivité, s’arti- zones dédiées sont déjà opérationnelles : l’ensemble de la chaîne de Casanearshore de la culant autour de 3 vo- Casanearshore et Technopolis à Rabat. de valeur des activités lets essentiels», rappelle Elles prévoient de mettre à la disposition économiques. Ils intè- première phase, d’une Bousselham Hilia, Secré- des entreprises des bureaux avec des grent, notamment, des superficie de 53.000 m2, taire général du ministè- superficies respectivement de 30.000 entreprises, des strucre de l’industrie, du com- et 25.000 m2 générant 55.000 emplois ont été livrés en fi n détures de recherche et merce et des nouvelles à l’horizon 2015», souligne Bousselham de formation... En effet, cembre 2007. La livrai- technologies. Selon lui, Hilia. ces zones d’activité sont le premier volet concer- En détails, Casanearshore, devra acappelées à jouer un rôle son de la deuxième ne les infrastructures et cueillir, sur une superficie d’environ 53ha fondamental dans le tranche, dont la superfi- services «world class» à avec 250.000 m2 de bureaux, plusieurs processus de rechertravers la mise en place dizaines d’entreprises dans ce secteur. 2 che-développement et cie est de 80.000 m , est de zones dédiées aux Les premiers bureaux de la première de commercialisation prévue courant 2009. activités de l’offshoring phase, d’une superficie de 53.000 m2, rapide des innovations. avec une offre de ser- ont été livrés en fin décembre 2007. La En contribuant à accroître la capacité vices et d’infrastructures calée sur les livraison de la deuxième tranche, dont la d’innovation d’une région, les clusters meilleurs standards de qualité et de coût superficie est de 80.000 m2, est prévue en augmentent la productivité. Rappe- avec un guichet unique sur place. courant 2009. lons qu’au Maroc, la nouvelle politique Le deuxième axe, dit-il, est relatif au Quant à Technopolis, ce pôle de compéde décentralisation permet aux régions, cadre sectoriel incitatif. Ce dernier com- tence constitue en lui-même un vaste villes et collectivités, d’être de véritables porte notamment la réduction de la complexe dédié aux nouvelles technoacteurs de développement et de mobili- charge fiscale au titre de l’Impôt sur le logies. En plus du développement d’une sation des compétences et des capitaux. revenu (IR) de telle sorte qu’elle n’excède zone d’offshoring, Technopolis prévoit pas 20% du montant des revenus bruts également la création d’un centre de déCasanearshore et Technopolis comme imposables par individu, pour les entre- veloppement de logiciels et un centre de pionniers prises installées dans les zones dédiées. design, la création d’un Media Park sur 22 décembre 2005. Casanearshore, pre- Le troisième volet concerne la formation. les métiers de l’audiovisuel. La première mier site clé en main est officiellement Il est axé sur le lancement d’un Plan na- tranche de cette phase, d’une superficie Conjoncture N° 900 - Janvier 2009 - 22
DOSSIER de 45.000 m2, sera livrée à partir du 2ème Mc Kinsey, le BPO était l’un des vecteurs «Aujourd’hui, Casablanca s’est positionsemestre de l’année 2008. La livraison de la vision stratégique. C’est là où l’on née clairement comme une plateforme des tranches suivantes se fera à raison peut créer le maximum d’emplois. De- de compétitivité pour les équipemende 40.000 m2 par an à partir de 2010. puis lors, les choses se sont inversées tiers et les sous-traitants d’Airbus et de «En 2009, plus de 35 enen faveur des ITO. «Cela Boeing en particulier. Il faut savoir aussi treprises seront instal- «Dans l’offshoring, la s’explique par la nature que nous avons eu beaucoup de nouvellées à Casanearshore et des projets d’externalisa- les entreprises, essentiellement françaiplus de 10 à Technopolis. compétitivité est clai- tion de process métiers ses, mais aussi maroco-marocaines et Des entreprises de re- rement établie. On a de qui sont beaucoup plus européennes dans différents métiers insnommée internationale, complexes et dont la tallées dans ce secteur. L’aéronautique exerçant dans des acti- plus en plus de deman- durée de réalisation est est un monde «assez général» où l’on vités ITO (Information des, de plus en plus beaucoup plus longue trouve des entreprises de mécanique de technologic outsourcing) parce que ce sont des précision, de traitement de surface… Elet BPO (Business process d’intérêt de la part d’en- process internes qu’il va les ont un dénominateur commun, c’est outsourcing), telles que treprises mondialement falloir externaliser. En d’avoir des clients dans le secteur de Cap Gemini, BNP Paribas, plus, cela demande la l’aéronautique, de l’automobile ou dans GFI, Atos Origin, Nestlé, reconnues». capacité de réactivité d’autres secteurs d’activité», affirme le Axa, Dell… Une tendance des acteurs impliqués directeur du CRI de Casablanca. Rappequi permettra de consacrer la destina- dans ces projets. Il s’est avéré aussi que lons que dans cette filière, le Maroc n’est tion Maroc en tant que pays compétitif les premiers contacts qu’on a eus avec pas parti de rien puisque près d’une trendans le secteur de l’offshoring», précise les investisseurs émanaient de l’ITO, taine d’entreprises, et non des moindres, Bousselham Hilia. En effet, 17 des 50 domaine où SSII françaises et indiennes étaient déjà installées avant même le premières SSII (Société de services en étaient en concurrence», justifie Hamid lancement du programme, comme Saingénierie informatique) opérant en Ben Elafdil. Cette course entre Indiens et fran, Souriau, Sefcam, EADS, etc. France se sont installées au Maroc et le Français a amené ces derniers à acheter Depuis, le lancement de l’offre aéroRoyaume a été retenu pour la première plus rapidement l’offre de Casanears- nautique du Maroc, celle-ci ne cesse de fois dans le classement 2007 AT Kearney hore Park avant les ens’améliorer. «Nous som«global services locations index». «Parmi treprises de la banque, «Nous sommes en train mes en train de faire l’exles métiers mondiaux du Maroc, l’offsho- de l’assurance ou de la tension de la technopole ring est aujourd’hui une réalité, ce n’est finance en général dans de faire l’extension de de Nouaceur qui ne suffit plus un projet. Un millier de personnes le BPO. «Dans l’offsho- la technopole de Noua- plus pour satisfaire les travaillent sur son site et d’autres mil- ring, la compétitivité est besoins des investisseurs liers sont en cours de recrutement et de clairement établie. On ceur qui ne suffit plus que nous avons déjà, ce transfert. Nous sommes passés de l’idée a de plus en plus de de- pour satisfaire les be- qui nous amène forcéde l’offshoring à une offre territoriale mandes, de plus en plus ment à améliorer notre concrète qui est Casanearshore Park (…). d’intérêt de la part d’en- soins des investisseurs offre en termes d’immoAujourd’hui, on peut dire que l’offsho- treprises mondialement que nous avons déjà, ce biliers d’entreprises. Les ring enregistre au Maroc un succès phé- reconnues. Sur les quinze petites entreprises qui noménal, notamment dans l’ITO. En re- SSII les plus importantes qui nous amène forcé- s’installent autour de vanche, dans le BPO, ce n’est pas encore au monde, plus de la moi- ment à améliorer notre l’aéronautique ne peule succès escompté», affirme Hamid Ben tié ont acheté chez nous. vent pas se permettre Elafdil, Directeur du Centre régional d’in- Cette confiance doit nous offre en termes d’immo- d’acheter un terrain et vestissement (CRI) de Casablanca. exhorter à veiller davan- biliers d’entreprises». ensuite de le construire. Pourtant, au début du lancement du plan tage à ce que notre offre Ils veulent avoir des plaEmergence, les BPO étaient la première soit de façon permanente compétitive. teformes industrielles intégrées (P2I) cible. D’ailleurs, selon l’étude réalisée par A Casaneashore, c’est un package de prêtes à l’emploi», affirme Hamid Ben compétitivités que nous offrons aux Elafdil. entreprises pour pouvoir améliorer leur Dans le domaine de la formation, la compétitivité globale», martèle Hamid même approche appliquée dans la déBen Elafdil. clinaison offshore, la trilogie de l’offre Quoi qu’il en soit, moins de deux après le (sites, incentive et formation), a été égalancement de l’offre offshoring du Ma- lement faite dans le secteur de l’aéroroc, un troisième site dédié au secteur, nautique. Fès shore est en cours de lancement. La trilogie consiste d’abord en la concrétisation d’une technopole et de son Technopole de Nouaceur : le grand en- extension. Ensuite, l’incentive avec le gouement Fonds Hassan II est un mécanisme puisTout comme l’offshoring, l’industrie aé- sant pour les entreprises dans le secteur ronautique, autre pilier du programme de l’aéronautique. Enfin, la formation Emergence, a son pôle de compétitivité, des ressources humaines a conduit à Hamid Ben Elafdil, Directeur du CRI de Casablanca au sein de la technopole de Nouaceur. la création de l’institut des métiers de Conjoncture N° 900 - Janvier 2009 - 24
DOSSIER l’aéronautique en partenariat avec les professionnels et piloté par le Groupe des industries marocaines de l’aéronautique et du Spatial (GIMAS) en collaboration avec l’OFPPT et tous les opérateurs qui interviennent dans ce domaine. Tanger sur la carte automobile mondiale Troisième secteur : l’automobile pour lequel il s’agit de se positionner sur la fabrication de composants, un secteur porteur déjà développé au Maroc. «Des avancés considérables ont été réalisées dans la mise en œuvre de cette stratégie qui a commencé à donner ses premiers résultats : l’investissement de Renault Nissan à Tanger qui place le Maroc sur la carte automobile mondiale des équipementiers qui se sont installés ou en cours d’installation au Maroc», constate Bousselham Hilia, Secrétaire général du ministère de l’Industrie, du commerce et des nouvelles technologies. Déjà, c’est naturellement donc que le gouvernement a retenu l’idée d’un pôle de compétitivité dédié aux industries automobiles, qui sera implanté dans le Nord à proximité du port Tanger Méditerranée et de Tanger Free Zone (TFZ). Là aussi,
concepts clés en main. A noter que sur tif sont là: une culture automobile, un les 3000 pièces qui constituent une voi- tissu d’équipementiers et sous-traitants ture, le Maroc peut raisonnablement se orienté à 90% export, une main-d’œupositionner sur 300 d’entre elles, à four- vre spécialisée, des coûts compétitifs, le nir aux 28 sites d’assemblage répertoriés projet de l’Alliance Renault-Nissan et un en Espagne, au Portugal et en France, centre de formation à Tanger dédié aux soit à trois jours de navigation du Maroc. équipementiers, à Somaca et à la future C’est justement ce qui fait usine. Autres avantages la force de l’offre marocai- Sur les 3000 pièces qui et non des moindres: la ne dans un marché où les valeur ajoutée et l’atout donneurs d’ordre de rang constituent une voiture, logistique. Aujourd’hui, il mondial comptent aussi le Maroc peut raisonna- ne suffit plus d’avoir des optimiser leurs achats bas coûts en main-d’œudans un contexte inter- blement se positionner vre pour être compétitif. national de renchérisse- sur 300 d’entre elles, à Il faut aussi déployer le ment des coûts de mainmeilleur en matière de d’œuvre et de matières fournir aux 28 sites d’as- logistique. Ce qui est dépremières. L’enjeu pour semblage répertoriés sormais possible au Male Royaume est de se poroc avec le port de Tansitionner en tant que site en Espagne, au Portugal ger. Un élément majeur compétitif. «L’intérêt est et en France, soit à trois dans l’amélioration de la de capter les opportunités compétitivité. qui s’offrent aujourd’hui jours de navigation du L’atout logistique perau Maroc en tant que site Maroc. met au Maroc une forte compétitif LCC (Low cost proximité avec la cliencountry). L’ambition à terme pour le Ma- tèle européenne. «Que huit kilomètres roc est de passer à un rang supérieur de à parcourir dans le détroit de Gibraltar MCC (Most competitive country)», souli- et moins de deux jours pour livrer les gne un équipementier. constructeurs français et espagnols», Tous les ingrédients d’un site compéti- précise un autre équipementier.
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DOSSIER Ceci étant, mais l’argument qui fait mouche en faveur du Maroc réside justement dans la future montée en puissance en termes de capacité de production: 100.000 à 120.000 voitures pour Somaca, 200.000 unités vers 2011 pour démarrer chez Renault-Nissan. Le site de l’Alliance Renault-Nissan passera à partir de 2012 à 400.000 voitures (avec la déclinaison de 4 modèles). En tout et pour tout, le Maroc offrira un potentiel de 500.000 véhicules par an dès 2014. Ce qui se traduira par 30.000 emplois chez les équipementiers et plus de 60.000 indirects dans la région de Tanger. Sans oublier les transferts de technologies et les synergies à déployer. Pourtant, il y a à peine quelques années, personne ne croyait en l’implantation d’un constructeur au Maroc, y compris les bureaux d’études internationaux (McKinsey notamment). Le Maroc était surtout perçu comme un vendeur de minutes de travail, sans plus.
de délocalisation vers l’Asie semble aujourd’hui difficilement réversible. Mais cela ne semble outre décourager le Maroc qui veut se positionner sur les composants plus sophistiqués, notamment ceux servant aux appareillages embarqués pour l’aviation et l’automobile, et l’électronique à usage médical, ou encore celle destinée à la défense.
stratégie Maroc Vert lancée par le département de l’Agriculture». Deux autres pôles (dans le Gharb et le Souss Massa Draâ) devront compléter ensuite l’ossature, à en croire une source proche de la Fédération des industries de la conserve et des produits alimentaires (Ficopam). En effet, cette association professionnelle planche sur un projet de mise en place d’un «pôle compétitivité» pour la Agroalimentaire : deux agropoles dans filière des conserves végétales à Marle pipe rakech. Une initiative a été lancée dans Au-delà de ces quatre métiers monce sens. Mais ce pôle de compétitivité diaux, le programme mise également n’a pas pris son envol. On attend des sisur les métiers classiques du Maroc, gnaux du côté du ministère de l’Agriculmais qui sont appelés à se dévelopture qui chapeaute aujourd’hui le pôle per fortement dans les de compétitivité qu’est années à venir. Il s’agit «Concernant le secteur le secteur de l’agro-indu textile-habillement affirme Hassan agro-alimentaire, deux dustrie», et de l’agroalimentaire Debbarh, Président de la qui figure aux premiers agropoles sont en cours Ficopam. rangs des secteurs exautre pôle est égade développement à Fès Un portateurs de l’éconolement prévu pour la mie marocaine. «Le sec- et à Berkane et la stra- conserve de poisson à teur du textile est le preIl réunira tous tégie vise le dévelop- Agadir. Electronique : forte concurrence asiatimier à avoir signé son les acteurs concernés que programme Emergence pement de l’agro-indus- par cette activité (proLe secteur de l’électronique n’est pas en avec l’Etat. Un programexportateurs, trie, en cohérence avec ducteurs, reste. A l’instar des autres secteurs pour me qui s’articule autour transporteurs, banquiers lesquels des offres ont été mises en de quatre axes stratégi- la stratégie Maroc Vert et pépiniéristes) qui traplace par le gouvernement, cette filière ques, notamment l’inde concert lancée par le départe- vailleront propose également aux investisseurs tégration ciblée, la réacpour trouver les solutions un package, qui comporte l’ensemble tivité et service, la com- ment de l’Agriculture». adéquates pouvant gades facteurs de compétitivité dont nopétitivité et adaptation rantir une compétitivité tamment un mécanisme de promotion de l’offre ainsi que la promotion ciblée à ces deux filières. de l’investissement et une aide à la foret diversification des marchés. La mise Ceci dit, de l’avis de plusieurs opérateurs mation des ressources humaines mais en œuvre de ce programme se poursuit économiques, les pôles agricoles restent aussi un pôle de compétence. Un site conformément aux objectifs et aux les parents pauvres de toute cette stradédié, qui sera localisé du côté de Tanéchéances prévues», précise le secrétégie de relance économique. En effet, ger Free Zone. Dans dix ans, pas moins taire général du ministère de l’Indussi des filières ont été identifiées, rien n’a de 5 milliards de dhs de chiffre d’affaitrie et du commerce. Et de poursuivre, été fait encore et le récent plan Vert du res additionnel et la création de 11.000 «Concernant le secteur agro-alimenMaroc est encore à l’état de projet. La emplois sont attendus. Plus facile à dire taire, deux agropoles sont en cours de spécificité du secteur de l’agro-indusqu’à réaliser. Car, par exemple, pour développement à Fès et à Berkane et trie, c’est de se trouver sous la tutelle du l’électronique de masse (télévisions, téla stratégie vise le développement de ministère de l’Agriculture. Alors que le léphones cellulaires...), le mouvement l’agro-industrie, en cohérence avec la plan Emergence est porté par le ministère de l’Industrie, du commerce et des nouvelles technologies. «Les vrais problèmes de l’agro-industrie se trouvent à l’amont du secteur, à savoir l’agriculture. C’est pour cela que le plan Maroc Vert a été lancé. Maroc Vert est l’une des solutions du secteur de l’agroindustrie que le Maroc a choisi comme l’un de ses métiers mondiaux. Il faut au moins cinq années pour profiter des résultats du Maroc Vert. Ceci à condition que l’exécution de ce projet démarre dès à présent. Or, au jour d’aujourd’hui, rien n’a été entrepris dans ce sens», Tel que l’olivier, certaines cultures commerciales sont promues à un bel avenir dans le plan «Maroc Vert». lance Hassan Debbarh. Conjoncture N° 900 - Janvier 2009 - 26
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Plateformes industrielles intégrées (P2I) Le nouveau chantier du ministère de l’Industrie, du commerce et des nouvelles technologies
Le développement des sept métiers mondiaux du Maroc se fera grâce à la création des plateformes industrielles intégrées (P2I), une des nouveautés apportées par le ministre de l’Industrie et du commerce au plan Emergence Approfondir les stratégies sectorielles et accélérer l’opérationnalisation des différentes actions qui ont été retenues en 2005 dans le cadre du plan Emergence, tel est l’objectif de l’étude lancée par le ministère de l’Industrie, du commerce et des nouvelles technologies qui est dans sa phase finale. L’axe principal de cette nouvelle vision industrielle s’inscrit dans le prolongement direct du plan Emergence visant le développement des sept métiers mondiaux du Maroc tels qu’ils ont été définis, en l’occurrence l’offshoring, l’aéronautique, l’automobile, l’électronique, le textile, l’agroalimentaire et l’industrie de transformation des produits de la pêche.
Source : Centre régional d’investissement (CRI) Casablanca
Le développement des plateformes industrielles intégrées permettra aux entreprises de pouvoir partager, entre autres, les coûts de production.
aux investisseurs s’articule autour de 5 dimensions : une offre immobilière, une offre de services sur zone, un gui500 millions de dhs pour des zones de chet unique administratif, une offre formation et une offre logistique adap200 à 400 ha Leur développement se fera grâce à la tée. Tout cela en garantissant un cercréation des plateformes industrielles tain cadre de ville et une intégration à intégrées (P2I), une des nouveautés la ville. Un large réseau de P2I sera mis apportées par le ministre de tutelle Ah- en place progressivement pour coumed Réda Chami, au poste depuis un vrir les besoins des différents secteurs peu moins de deux ans. Ce projet sera identifiés», souligne Bousselham Hilia, financé par le Fonds Hassan II qui lui a Secrétaire général du ministère de l’Inaccordé une enveloppe de 500 millions dustrie, du commerce et des nouvelles de dirhams. Il s’agit de zones entre 200 technologies. et 400 Ha dans certaines régions du La première plateforme industrielle intégrée sera implantée Royaume. Pour concrétiser ces plateformes, les La première plateforme à Kenitra où un terrain a déjà été acquis. Le mipouvoirs publics procéintégrée nistère fera appel à un deront à l’acquisition du industrielle foncier compétitif et à sera implantée à Keni- aménageur et la gestion sera donnée en concesleur aménagement grâce au soutien financier tra où un terrain a déjà sion. Les autres P2I sedu Fonds Hassan II. été acquis. Le ministère ront situées à Nouaceur, Had Soualem, Tanger et Le ministère de l’Industrie, du commerce et des fera appel à un aména- enfin Fès dans le quartier nouvelles technologies geur et la gestion sera industriel de Bensouda. L’intégration de ces plas’est engagé à réaliser ce projet dans un délai de donnée en concession. teformes se fera au niveau des services pour 18 mois après la signature d’un contrat programme global entre garantir aux investisseurs tous les l’Etat et le patronat marocain en début facteurs de compétitivité et l’écosys2009. «Parmi les principaux axes de dé- tème administratif, logistique et téléveloppement de la stratégie industrielle coms. Pour le ministère de l’Industrie figure le développement des Platefor- et du commerce, ces P2I doivent être au mes industrielles intégrées (P2I). La pro- même niveau que la New Songdo City position de la valeur de ces plateformes en Corée du Sud ou encore le Pôle d’Ex-
cellence Européen de Roissy en France. Le développement industriel se fera aussi par le biais de la modernisation du tissu industriel existant. Cette mise à niveau sera rebaptisée «modernisation compétitive». Selon le constat du ministère de l’Industrie et du Commerce, il y a des défis qui étouffent le tissu industriel marocain : un environnement d’affaires peu attractif et la formation qui ne répond pas nécessairement aux exigences de l’entreprise. Pour cela, trois axes transversaux seront au menu. Ils concernent la modernisation des PME à travers l’arsenal sur tout le cycle de vie de cette catégorie d’entreprises. C’est dans ce cadre d’ailleurs que peut s’inscrire le contrat programme signé il y a quelques mois avec l’ANPME et sur la base de laquelle 600 millions de dhs iront aux PME marocaines en mal d’expansion et de modernisation. Le deuxième axe porte sur l’amélioration du climat des affaires. Le classement du Maroc par les différentes agences de notation est une remise en cause de l’environnement social, économique et légal des affaires. D’où l’impérative refonte complète de l’administration. Au niveau de la justice commerciale, les centres de médiation auront au moins le mérite de réduire les délais de règlement des différents commerciaux ou en rapport avec les investissements. Conjoncture N° 900 - Janvier 2009 - 27
DOSSIER Entretien
Mohamed Lasry, Directeur général de Casanearshore «Le Maroc est dans le top 40 des meilleures destinations offshore dans le monde» destination Conjoncture : Selon une étude interne tièrement loués : plus de 40 clients Maroc se réalisée par une banque française, ont fait le choix de s’installer dans le confirme avant l’officialisation de l’offre offshopremier pôle nearshore du Maroc. La de jour en ring, Casanearshore figurait déjà au commercialisation des 87.000 m2 de jour, surtop 5 des destinations préférées par la deuxième tranche, quant à elle, est tout après les opérateurs francophones. Gardezun franc succès : les réservations ferl’inauguvous encore ce rang ? Si oui quels sont mes ont dépassé 100% de la surface ration de ses atouts ? totale à louer. Ils seront livrés à partir CasanearsLe Maroc dispose déjà d’atouts indéde mars 2009. hore et de niables, à savoir sa poParmi les signatuTechnopulation jeune et moti- «Le Maroc garantit un res d’entreprises inpolis, qui vée, une libéralisation ternationales, nous constitue la matérialisation de l’offre soutenue, de bonnes très haut niveau de qua- pouvons citer : Cap offshoring Maroc. infrastructures, en plus lité de prestations et de Gemini, Atos Origin, d’une proximité géograAccenture, le groupe compétences de ses Tata Consulting servi- Où se situe le potentiel de l’offshoring phique avec l’Europe. marocain : les services informatiques, A ces éléments «natu- ressources humaines. Il ces, BNP Paribas, GFI les services bancaires, le télétraiterels», l’offre offshore Informatique, Dell, ment de données ou encore l’assisMaroc intègre d’autres a donc toutes les chan- Ubisoft, Logica CMG, tance à distance (call center) ? aspects essentiels dans ces de garder son rang, SQLI, Bull... Le Maroc se positionne dans le marla chaîne de valeur, noIl est intéressant de ché du nearshore francophone, puis tamment un plan de voire de l’améliorer». noter que les ratios hispanophone dans un deuxième formation pointu et cide superficie par entemps. Les principaux critères de ciblé aux métiers/filières adressés, un treprise sont passés d’environ 1000 blage ayant servi au choix des filièplan d’incitation fiscale et d’aide à la m2, soit une centaine de positions par res sont l’importance de la langue, le formation assez agressif ainsi que des entreprise pour la première tranche, niveau de complexité des processus, infrastructures aux normes internaà 3 500 m2 environ pour la deuxième l’abondance des ressources humaitionales et aux standards requis par tranche. Ceci démontre clairement la nes qualifiées et la proximité géoce genre d’industrie. Je pense princicrédibilité et la pertinence de nos ingraphique. Partant de ce choix, trois palement au concept de nos parcs infrastructures et de l’offre pays. filières présentent pour nous un potégrés et dédiés (locaux prêts à l’emtentiel intéressant. La ploi, services annexes) ainsi qu’aux La crise financière ininfrastructures télécoms de dernière ternationale et la ré- «Pour l’instant, nous filière «banque et assurance», avec notamgénération. cession qui sévit dans Le Maroc ouvre donc des perspectiles pays développés ne restons confiants dans ment la gestion des ves économiques intéressantes aux vont-elles pas fausser le sens où cette crise moyens de paiement, la gestion des contrats entreprises en quête de croissance. Le les prévisions de l’offre pourrait être une oppor- et celle des sinistres ; pays garantit un très haut niveau de offshoring du Maroc ? qualité de prestations et de compéLa crise sévit actuelle- tunité pour le secteur la filière «administrative» qui vise le traitetences de ses ressources humaines. Il a ment dans les granment délocalisé de la donc toutes les chances de garder son des places financières de l’offshoring. rang, voire de l’améliorer. En témoimondiales. Nous la sui- Ce qui est certain, c’est comptabilité-finance, les services clientèle, gne l’entrée du Maroc dans le top 40 vons sans pour autant des meilleures destinations offshores prétendre en anticiper que nos clients main- bien au-delà du call dans le monde et tout dernièrement l’impact sur notre acti- tiennent leurs program- center, ou encore les prestations de GRH, son intégration du top 30 offshoring vité. comme la gestion de hot spots (classement international Pour l’instant, nous res- mes d’installation». la paie et l’adminispublié par le cabinet Gartner). tons confiants dans le tration du personnel. Bien entendu, sens où cette crise pourrait être une à ces deux filières, il faut en ajouter À quand la deuxième tranche de Caopportunité pour le secteur de l’offsune troisième, très importante, liée sanearshore ? Quelles sont les grosses horing. à l’informatique. Elle englobe la gessignatures qui ont déjà manifesté leur Ce qui est certain, c’est que nos tion d’applications ou d’infrastructuintérêt pour cette deuxième étape ? clients maintiennent leurs programres ainsi que le développement mainA ce jour, les 57.000 m2 disponibles mes d’installation. L’engouement tenance informatique. de la première tranche ont été endes opérateurs européens pour la Conjoncture N° 900 - Janvier 2009 - 28
DOSSIER
Formation Le maillon faible
De l’avis de plusieurs opérateurs, si la concrétisation du plan Emergence avance sur certains chapitres, la stratégie semble trébucher au niveau de la formation Réputé en avance par rapport au reste de la stratégie Emergence, le pôle offshoring connaît des difficultés sur ce volet. En principe le programme national focalisé sur les métiers de l’offshoring a été mis sur pied pour 12 filières clés. En plus de l’aide à la formation post-embauche (avec une prise en charge pouvant atteindre 50.000 dhs par employé à hauteur de 100% la première année et de 75% pour les deux autres), qui sera mise en place en début d’exploitation des sociétés de l’offshoring, un calendrier annuel de formation a été prévu. Mais les chiffres annoncés inquiètent les opérateurs du secteur. Si l’université s’en sort bien sur ce dossier, l’Agence nationale de la promotion de l’emploi et des compétences (Anapec) et l’Office de la formation professionnelle et de la promotion du travail (OFPPT) peuvent mieux faire aussi. Les réalisations dépassent les 120% pour l’université, qui a formé 1.249 lauréats au lieu de 1.211 prévus. Les données émanant de l’OFPPT n’ont pas encore atteint le niveau de l’université. «L’Office a formé 533 lauréats au lieu des 1.550 fixés comme objectif. Du côté de l’Anapec, on attend la réalisation du programme de reconversion qui s’était fixé un objectif de 1.950 personnes», confie un opérateur du secteur. Du côté de l’aéronautique, les choses ne paraissent pas aussi aisées non plus. Et pour cause ? Au niveau du technopole de Nouaceur, seule zone de compétitivité dédiée à ce secteur, la demande en ressources humaines est telle que les professionnels regroupés au sein du Groupement des industriels marocains aéronautique et spatial (GIMAS) ont décidé de prendre le taureau par les cornes. Ce groupement et l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) viennent de signer une convention de partenariat pour la création d’un institut des métiers de l’aéronautique (IMA) à Casablanca. C’était à Paris, à l’occasion d’une rencontre sur les perspectives de développement de l’aéronautique ayant rassemblé une centaine d’entreprises françaises et marocaines. Le montant d’investissement est estimé à près de 6 millions d’euros. En attendant, un nouvel institut
spécialisé aux métiers de l’aéronautique ouvrira ses portes lors de la rentrée scolaire 2009-2010. Le coût de réalisation de cet établissement s’élève à près de 70 millions de dirhams. C’est l’OFPPT qui se charge de sa mise en place. Ce nouvel établissement, qui accueillera plus de 400 stagiaires par an, est destiné aussi à être une plate-forme de formation continue et de perfectionnement des sa-
lariés du secteur aéronautique. Pour l’automobile, l’Etat a bien pris les devants. En octobre dernier, le gouvernement signait avec Renault-Nissan la convention relative à la concession de la réalisation et de la gestion du centre de formation aux métiers de l’automobile de Tanger Med Le coût de ce centre est estimé à 7,5 millions d’euros à la charge de l’Etat.
Trois questions à :
Driss Bouami, DG de l’Ecole Mohammédia des ingénieurs (EMI) «L’EMI offre la palette la plus riche de formation continue non délocalisée du Maroc» Conjoncture : La réalisation des objectifs du plan «10.000 ingénieurs» autour duquel sont mobilisées les écoles d’ingénieurs et l’université, pourrait connaître des difficultés. En cause, l’inadéquation entre les objectifs assignés aux établissements et les moyens financiers. Qu’en est-il pour l’EMI ? Driss Bouami : L’initiative 10.000 ingénieurs exige une augmentation considérable des effectifs des élèves intégrant les écoles afin de contribuer à améliorer l’attractivité du Maroc en terme de ressources humaines qualifiées pour attirer le plus grand nombre possible d’investisseurs internationaux. L’EMI s’est engagée résolument dans cette opération et a consenti jusqu’à aujourd’hui un accroissement d’effectifs de près de 140 élèves par année passant d’une taille de promotion de 280 étudiants en 2005 à 420 en 2008. Cela exige, bien entendu, des mesures d’accompagnement, en postes budgétaires et en dotations financières, à la hauteur des ambitions affichées. Avez-vous développé des relations avec les pôles de compétitivité du plan Emergence comme Casanearshore ou les entreprises installées sur cette plateforme ? L’EMI développe des relations de coopé-
ration avec toutes les entreprises et organismes intéressés par ses lauréats et par les activités de formation continue et de recherche qu’elle développe. Elle s’attache particulièrement à nouer des relations de partenariat avec toutes les institutions économiques marocaines et internationales parmi lesquelles celles dont les activités s’inscrivent dans le cadre des moteurs de croissance mis en exergue dans le Plan «Emergence». L’EMI a-t-elle mis en place des programmes de formation continue et des modules à la carte aux profits des entreprises ? L’EMI offre aujourd’hui la palette la plus riche de formation continue non délocalisée du Maroc. Elle dispose d’une carte de 11 mastères différents (management de la maintenance, gestion du risque en finance, Informatique de décision, Production et Logistique…) qui répondent à des besoins identifiés du milieu socioéconomique. Ces mastères sont des cycles de spécialisation s’étalant sur une année. Outre ces cycles standard, l’EMI offre un très large spectre de domaines de formation à la carte selon les besoins exprimés par les entreprises ou autres institutions telles que les entreprises de service ou les administrations. Conjoncture N° 900 - Janvier 2009 - 29
DOSSIER
Ce qui se fait ailleurs, cas de la France Les délicats équilibres des compétences
Les pôles de compétitivité sont entrés dans leur quatrième année d’existence Le premier bilan est largement positif, tout en faisant apparaître de nécessaires ajustements Le 26 juin 2008, le président de la Ré- Des PME actives… et méfiantes l’ACFCI a interrogé 170 C (R) CI sur leur publique confirmait la prolongation du «Les pôles ne sont pas trop nombreux, implication dans les pôles de compétitiprogramme «Pôles de compétitivité» et explique Michel Mabile, président du vité. 140 (82 %) ont répondu à l’enquête, de son financement pour les trois an- groupe de travail «Pôles de compétitivi- qui montre que 109 C (R) CI interviennées à venir. Une semaine auparavant, té» du Medef, mais il faut entre eux une nent dans 64 des 71 pôles labellisés. Des deux cabinets spécialisés, le Boston meilleure coordination». Selon une étu- élus consulaires président sept pôles et Consulting Group et CM International, de de l’organisation patronale, 80 % des sont présents dans la gouvernance de remettaient un rapport d’audit au Pre- pôles s’estiment en concurrence entre nombreux autres comme membre du mier ministre François Fillon. L’audit eux. Dans un avis présenté au Conseil bureau ou du conseil d’administration. jugeait le dispositif «suffisamment pro- économique et social(1), Au plan opérationnel, metteur pour être maintenu dans ses André Marcon, premier Les Chambres sont ac- l’enquête relève la forte grands principes». Le système de finan- vice-président de l’ACFCI, tives dans l’ingénierie implication des Chamcement a bien fonctionné et les crédits remarque le succès de la bres dans le repérage annoncés (1,5 milliard d’euros) ont été mise en place des pôles. financière, la concep- des entreprises, l’appui à mobilisés pour des projets d’innovation, En 2005, alors qu’on estion de projets, la mise l’innovation, le dévelopauxquels tous les contributeurs ont par- pérait une trentaine de pement international ticipé de manière «équilibrée». L’audit candidatures, 105 ont été en place de dispositifs et les réunions d’inforse félicite également de la sélectivité présentées et 71 en fin de de sécurité économi- mation. Les Chambres des financements. Il a permis de pré- compte retenues. «Notre sont également actives server une «masse critique», puisque premier constat, note que ou de veille colla- dans l’ingénierie finandix pôles concentrent environ 55 % des André Marcon, c’est que borative ou la commu- cière, la conception de crédits… Bilan utile, dont aucun des pô- le binôme entreprise -reprojets, la mise en place les n’a contesté la qualité. En revanche, cherche/territoires fonc- nication des pôles. de dispositifs de sécurité le classement final en trois catégories a tionne et que les territoiéconomique ou de veille suscité de fortes interrogations. Selon res ont su s’approprier la problématique collaborative ou la communication des le rapport d’évaluation, 39 pôles «ont des pôles de compétitivité». Deuxième pôles. Dans la majorité des cas, la place atteint les objectifs», 19 « ont atteint constat du CES : au-delà de la visibi- de la C (R) CI dans le pôle s’est renforcée partiellement les objectifs et doivent lité mondiale qui était l’objectif initial, au fil du temps. travailler à l’amélioration de certaines un puissant mouvement collaboratif L’enquête fait également apparaître les dimensions de leur action», 13 pôles s’est instauré entre les entreprises et le attentes…et les craintes des PME. Elles «pourraient tirer parti monde de la recherche souhaitent une meilleure information d’une reconfiguration en Certains pôles figurent et une vaste intelligence sur le contenu, les projets, le fonctionprofondeur». Mais peut- dans le peloton de tête collective est en cours nement, l’intégration des pôles, mais on comparer des pôles de constitution. «Enfin, expriment leur crainte de trop s’exposer de natures extrêmement alors qu’ils n’ont été la- conclut André Marcon, devant les grandes entreprises. Certaidifférentes ? Doit-on bellisés qu’à l’été 2007 ? nous soulignons la né- nes réclament seulement d’être mises dresser un bilan, trentecessité de ne pas tirer en relation avec les donneurs d’ordres : six mois seulement après D’où les inquiétudes des conclusions hâtives il s’agit d’abord pour elles d’accroître la création d’un dispositif des pôles «mal clas- et de laisser la porte leur volume d’affaires… La machine est prévu pour se déployer ouverte à la création en marche, et si elle ne fonctionne pas sur cinq ans ? Comment sés» levées par l’in- d’autres pôles. Il faut toujours à la même vitesse, ni sur les expliquer, par ailleurs, tervention de Nicolas leur ménager un temps mêmes modalités, partout sont engaque certains pôles figud’apprentissage et s’ap- gés les ajustements nécessaires. rent dans le peloton de Sarkozy leur accordant puyer sur les SPL où les tête alors qu’ils n’ont été un délai d’un an, «pour pôles d’excellence…» Ce texte est extrait de l’Interconsulaire labellisés qu’à l’été 2007 ? Pour Charles Beigbeder, n°103. octobre 2008 D’où les inquiétudes des faire leurs preuves». président de la commispôles «mal classés» lesion « Recherche et Inno- (1)« Les pôles de compétitivité : faire converger peret dynamique territoriale ». Section des vées par l’intervention de Nicolas Sarko- vation» du Medef (2) «les PME ont besoin formance Economies régionales et de l’Aménagement du terzy leur accordant un délai d’un an, «pour que l’on décode pour elles le fonction- ritoire, CES, 9 juillet 2008. faire leurs preuves»… nement du dispositif». En mars 2008, (2)Le Figaro, 9 juillet 2008. Conjoncture N° 900 - Janvier 2009 - 30