LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES
Les déterminants du comportement de financement des PME américaines et choix entre dette bancaire - dette fournisseur
Meriem Dairi Docteur en Sciences de Gestion (Finance), Membre du Laboratoire LSMRC, FFBC université de Lille Nord de France.
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L’objet de l’article est d’analyser, à partir de la base de données américaine NSSBF 2003 1, le comportement de financement des PME. Ces dernières, du fait de leurs moyens financiers limités et de l’opacité de leur structure informationnelle, sont souvent tributaires de la dette bancaire et de la dette fournisseur dans leur financement. Ainsi, nous cherchons à étudier les facteurs déterminants de l’utilisation du crédit bancaire et du crédit fournisseur et le lien existant entre ces deux modalités de financement : substituables ou complémentaires. Nos résultats sont pour la plupart compatibles avec la théorie d’ordre de financement hiérarchique et soulignent l’avantage de financement des fournisseurs dans le cas des firmes de faible qualité. Nous notons une complémentarité entre la dette bancaire et la dette fournisseur dans la structure financière des PME. Par ailleurs, l’étude indique la présence d’une discrimination dans le financement des PME selon l’appartenance du propriétaire principal à une communauté (afro-américaine, asiatique, hispanique) et à un genre (femme / homme). Mots-clefs : PME- asymétries d’information- rationnement de crédit- crédit bancaire- crédit fournisseur- discrimination.
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La base de données NSSBF 2003 (National Survey of Small Business Finances) constitue la plus récente enquête menée par le département d’Etat des PME (Small Business administration) et les instances financières américaines (Board of Governors of the Federal Reserve System) sur le financement des PME. Les quatre versions concernant les années 1987, 1993, 1998 et 2003 ont l’avantage d’être librement disponibles. La base NSSBF a souvent été exploitée par des auteurs ayant fortement contribué à la littérature sur le financement des PME (Petersen, Rajan, Cole, Wolken, Berger, Udell,…). 35
LA REVUE DU FINANCIER In this paper we use data from NSSBF 2003 to analyze the determinants of SME financing behavior. Information opacity of SMEs and limited self-financing capacities makes them rely more heavily on bank lending and trade credit. We analyze factors that determine their use of trade credit and of bank credit, and whether these two types of credit are substitutes or complements. In general, our results are consistent with the pecking order theory and highlight the financing- advantage theory of trade credit particularly when firms are worse credit quality. We find that bank credit and trade credit are complements. The study show the presence of credit discrimination depending on owner characteristics included the race, ethnicity (Black, Asian, Hispanic) and gender (female / male). Key words: SME - information asymmetries- credit rationing- bank credit- trade creditdiscrimination. Les difficultés d’accès au financement restent l’un des principaux obstacles à la création, à la survie et à la croissance des PME. La crise financière qui a éclaté à l’automne 2008 et dont les prémices remontent à la crise des subprimes en août 2007 aux USA ne fait que renforcer ce phénomène. Plusieurs études soulignent que les firmes sous-endettées ou non-endettées par la contrainte de liquidité à laquelle elles sont soumises se développent plus lentement, emploient moins et réalisent moins d’investissements productifs que les autres firmes (King et Levine, 1993a, 1993b; Rajan et Zingales, 1998). La question de l’accès au financement des PME ne peut préoccuper uniquement les PME, mais doit toucher la majorité des acteurs économiques et politiques. Selon les données de l’enquête américaine NSSBF 2003, 19 % des PME indiquent ne pas recourir au financement externe (dette bancaire et/ou dette fournisseur), 18,5 % utilisent uniquement la dette commerciale, 18 % utilisent uniquement la dette bancaire et 44,5 % utilisent simultanément les deux modalités de financement (cf. tableau 2). Aussi, il nous a paru important de déterminer les facteurs explicatifs de ces comportements de financement et du lien existant entre la dette bancaire et la dette fournisseur. L’étude est organisée de la manière suivante. Nous présentons dans une première section une rapide synthèse de la littérature sur le financement des PME par dette bancaire et par dette fournisseur. Nous exposons, dans la deuxième section, les données et la méthodologie utilisée. La troisième section présente les hypothèses. La quatrième section traite des différents résultats obtenus. La dernière section résume les principales conclusions.
I - Synthèse de la littérature Le financement bancaire des PME Compte tenu de la pauvreté et de l’opacité de la structure informationnelle des PME, les banques ne peuvent cerner avec précision leurs caractéristiques de risques et sont susceptibles de rationner la quantité de crédit qu’elles accordent. Ceci a pour effet d’empêcher les PME de mener à bien leur stratégie d’investissement et de croissance. Plusieurs auteurs ont manifesté un vif intérêt pour la question du financement bancaire des PME. La base de données NSSBF a fréquemment été exploitée dans ce sens. Un ensemble d’études se sont intéressées à l’impact de la mise en place d’une relation de clientèle de long terme sur l’amélioration des conditions de financement des PME (disponibilité, coût, garanties) par la réduction des problèmes d’asymétries d’information et le développement d’un capital de confiance entre banque et entreprise. Petersen et Rajan (1994), à partir de la base NSSBF 1987, montrent qu’il n’existe pas de lien significatif entre la durée de la relation et le coût du crédit. Cependant, les firmes deviennent moins dépendantes du crédit fournisseur lorsqu’elles établissent une relation de long terme avec leurs banques. En utilisant 36
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES la même base, mais en s’intéressant uniquement aux lignes de crédit, Berger et Udell (1995) relèvent que les taux d’intérêt sur les lignes de crédit diminuent lorsque la relation banqueentreprise est établie sur le long terme. Les auteurs notent également une corrélation négative entre la durée de la relation et les exigences de garanties. Ils expliquent la différence de leurs résultats avec ceux de Petersen et Rajan par la nature de leur échantillon. Petersen et Rajan (1994) se sont intéressés à l’ensemble des crédits accordés aux firmes (transactionnels et relationnels), alors que Berger et Udell (1995) ont limité leur analyse aux seules lignes de crédit qui constituent des financements relationnels. Toutefois, les deux études concordent lorsque l’on considère non plus la durée de la relation mais sa profondeur (multiplicité des services offerts, concentration de l’endettement bancaire). Cette dernière réduit le taux d’intérêt appliqué. En utilisant la NSSBF 1993, Chakraborty et Hu (2006) confirment l’effet de la relation de clientèle sur l’exigence de garanties dans le cadre des lignes de crédit (financement relationnel), mais ne relèvent pas d’effet sur les autres types de financement. Sur la base de la même enquête, Cole (1998) focalise son analyse sur la décision du prêteur d’accorder ou de refuser le financement, et souligne que c’est l’existence même d’une relation entre une banque et un emprunteur, plus que la durée, qui affecte la décision du prêteur. Selon l’auteur, les relations préexistantes génèrent des informations privées et facilitent l’octroi de crédits. D’autres études se sont intéressées à l’impact de la taille des banques sur la disponibilité du financement aux PME. C’est notamment le cas de Cole et al. (2004) et Berger et al. (2005) à partir de la NSSBF 1993. Les auteurs soulignent que les banques de petite taille ont un avantage comparatif sur les banques de grande taille dans le financement des PME. Les petites banques sont plus disposées à collecter de l’information subjective et à l’utiliser dans leur décision d’accorder un financement de type relationnel. Les grandes banques utilisent des critères informationnels quantitatifs et sont donc moins disposées à assurer le financement des PME opaques. À partir des bases NSSBF (1987, 1993, 1998, 2003), Cole (2008) teste les deux principales théories sur la structure du capital des PME : la théorie du compromis et la théorie du financement hiérarchique. L’auteur confirme dans l’ensemble les hypothèses de la théorie d’ordre de financement hiérarchique, dans le sens où il trouve une relation négative entre l’endettement de l’entreprise et les variables taille, âge, profitabilité et qualité du crédit, et une relation positive entre l’endettement de l’entreprise, et la proportion des actifs corporels dans le bilan et la responsabilité limitée des dirigeants. À partir des trois dernières versions de la base NSSBF, Cole (2009) s’intéresse aux caractéristiques des firmes qui choisissent de recourir ou non à la dette. L’auteur souligne, tout comme Han et al. (2009) qui exploitent la NSSBF 1993, que les emprunteurs qui s’abstiennent de présenter une demande de financement par crainte de refus (les emprunteurs découragés) affichent un plus grand risque que les entreprises cherchant à obtenir un financement. L’auteur montre également que les emprunteurs ayant vu leur demande de financement refusée, par rapport aux emprunteurs découragés, traitent avec un plus grand nombre de banques, la relation de clientèle semble être moins solide, et la durée de la relation plus courte. Cole (2009) souligne aussi que les entreprises n’ayant pas fait de demande de financement allouent une grande part de leurs actifs à la dette plutôt qu’aux ressources internes. Ces entreprises semblent avoir atteint leur structure de capital cible, ce qui expliquerait leurs réticences à présenter de nouvelles demandes de financement. L’étude de Cole (2009) relève généralement que les nonemprunteurs présentent de grandes similitudes avec ceux ayant vu leur demande de financement acceptée, et que ces deux groupes sont très différents de ceux ayant vu leur demande de financement rejetée. D’autres études ont utilisé la base NSSBF pour analyser l’effet de la race et du genre du propriétaire principal sur la disponibilité de crédit. C’est notamment le cas de Cavalluzo et Cavalluzo (1998) à partir de la NSSBF 1987, de Cavalluzzo, Cavalluzzo et Wolken (2002), de Blanchflower, Levine et Zimmerman (2003) à partir de la NSSBF 1993, de Cavalluzo et 37
LA REVUE DU FINANCIER Wolken (2005), et de Blanchard, Zhao et Yinger (2008) à partir de la NSSBF 1998. Ces études soulignent généralement un taux de rejet et un taux d’intérêt plus importants chez les minorités raciales (Afro-Américains, Hispaniques, Asiatiques) comparativement aux propriétaires blancs, et chez les femmes comparativement aux hommes. À partir de la NSSBF 1993, Coleman (2003) révèle que les propriétaires de PME de race afro-américaine ne font pas de demandes de financement parce qu’ils pressentent un rejet.
Le financement par la dette fournisseur Le crédit fournisseur représente une source de financement à court terme, octroyée par des entreprises non financières. Il correspond au délai de paiement accordé à l’entreprise par ses fournisseurs. Il est utilisé prioritairement à des fins de financement du cycle d’exploitation. Il s’agit d’un mode de financement relativement onéreux, le taux d’intérêt implicite pour un crédit de (2/10 net 30)2 dépasse 44 %3 si l’entreprise ne tire pas profit de la remise pour paiement anticipé. Un client qui renonce à l’escompte subit une perte qui peut être considérée comme le coût d’opportunité des délais de paiement. Prédominant pour une grande majorité des entreprises, plusieurs études se sont intéressées aux motifs de son utilisation. Parmi les principales justifications avancées, nous relevons le motif de transaction, le motif financier, le motif lié à l’avantage de financement du fournisseur et le motif de discrimination par les prix. Selon le motif de transaction (Ferris, 1981 ; Elliehausen et Wolken, 1993), le crédit commercial permet à l’entreprise de mieux gérer sa trésorerie et de réduire les coûts associés à des livraisons multiples en cumulant les obligations financières dans un paiement mensuel ou trimestriel. Par la séparation temporelle entre le cycle de livraison des biens et des services parfois incertain et le cycle de paiement généralement prévisible, le crédit commercial permet à l’acheteur de cumuler les factures, d’anticiper avec certitude les besoins futurs de liquidité et d’optimiser la gestion de ses stocks par une plus grande rigueur dans les commandes. Il permet également au vendeur de mieux gérer sa trésorerie tout en ayant une meilleure prévisibilité de ses encaissements à venir. D’après le motif financier, les firmes les plus exposées au rationnement du crédit bancaire recourent de façon plus marquée aux dettes fournisseurs pour limiter cette restriction (Schwartz et Whitcomb, 1978 ; Emery, 1984). Elliehausen et Wolken (1993) notent que les PME américaines à la situation financière fragile ont une probabilité supérieure de solliciter des délais de paiement et d’user des retards de paiement, et qu’un tiers des demandes de crédit commercial est justifié par un motif financier. Danielson et Scott (2000 et 2004) observent que les firmes confrontées à des difficultés d’obtention des crédits bancaires demandent plus souvent des facilités financières à leurs fournisseurs. A contrario, les sociétés bénéficiant de financement interne important ont tendance à profiter des escomptes pour paiement rapide. Fisman et Love (2003) montrent que les entreprises recourent davantage au crédit commercial dans les pays dont les systèmes bancaires sont peu développés pour financer leur croissance. L’étude de Love et al. (2007) fait également état d’une plus grande utilisation du crédit fournisseur en période de réduction de la liquidité monétaire. En France, Delannay et Dietsch (1999) constatent de la part des PME une augmentation de la demande de crédits fournisseurs en période de récession, alors que celle de crédits bancaires diminue. En utilisant un échantillon de firmes britanniques, Mateut et Mizen (2003) et Mateut et al. (2006) notent aussi que, lorsque les banques baissent leurs encours crédits en période de restriction monétaire, le montant des encours de crédit commercial augmente. Dans ce contexte, le crédit commercial 2
Le terme 2/10 net 30 (condition à deux volets la plus fréquente) signifie une réduction de 2 % du prix de vente pour un paiement réalisé au plus tard 10 jours après la date de livraison. Autrement, la totalité du prix de vente doit être réglée dans les 30 jours suivant la livraison. Ces termes de crédits biparties sont plus courants aux USA. 3 Ce taux d’intérêt implicite de l’escompte est calculé de la manière suivante : {(100/ (100 –2))³65/ (30-10) – 1} ; ce qui donne i =0,446. 38
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES joue un rôle de financement de substitution (Meltzer, 1960). Les grandes entreprises bénéficiant d’un excès de liquidité et d’un accès plus facile au marché financier jouent un rôle d’intermédiaires en redistribuant le crédit aux firmes financièrement contraintes. La théorie de l’avantage de financement explique l’offre du crédit commercial par l’existence d’un avantage en faveur du fournisseur par rapport à un intermédiaire financier classique, le rendant plus enclin à financer les firmes présentant une asymétrie d’information importante. Le fournisseur possèderait un avantage dans l’acquisition de l’information (Biais et Gollier, 1997), le contrôle (Smith, 1987) et le recouvrement des créances (Mian et Smith, 1992 ; Cunat, 2007). Pour Burkart et Ellingsen (2004), l’avantage du fournisseur réside dans la nature du financement : la matière première. Cette dernière est plus difficile à détourner que la liquidité octroyée par la banque, d’où une probabilité d’investissement de l’entreprise plus importante que celle du détournement des actifs. En raison de l’avantage informationnel du fournisseur, l’octroi de la dette fournisseur agirait dès lors comme un signal de la qualité de la firme à destination des banques (Biais et Gollier, 1997 ; Burkart et Ellingsen, 2004), qui seront plus enclines à financer les entreprises (transfert de réputation). Dans ce contexte, la dette fournisseur et la dette bancaire sont complémentaires. Selon la théorie de discrimination par les prix, le crédit commercial permet au fournisseur de discriminer entre ses clients. Les clients de bonne qualité vont préférer payer plus rapidement afin de bénéficier des remises pour paiement anticipé ; les clients risqués trouveront le prix du crédit commercial plus attractif par rapport à d’autres options. Le fournisseur discrimine également en faveur des sociétés risquées car il détient une participation implicite dans le capital de l’entreprise, égale à la valeur présente des profits futurs correspondant au maintien de la relation. Allonger les délais de paiement permet la réalisation d’un bénéfice plus conséquent pour le vendeur puisque la demande globale sur ses biens devient plus importante (Schwartz et Whitcomb, 1978 ; Brennan et al. 1988). Les relations sous-jacentes légitimeraient ainsi l’aide des fournisseurs en faveur de leurs clients financièrement contraints. Le crédit commercial constitue dans ce contexte un substitut au financement bancaire. La théorie d’ordre de financement hiérarchique (Myers et Majluf, 1984) s’appuie sur l’existence des asymétries d’information susceptibles d’engendrer des problèmes de sélection adverse pour expliquer le choix de financement d’une entreprise. Pour éviter ces problèmes, les firmes utilisent d’abord l’autofinancement, puis recourent aux dettes peu risquées, aux dettes risquées et en dernier ressort à l’augmentation du capital. L’existence d’une hiérarchie dans les sources du financement a été vérifiée par plusieurs travaux empiriques (Kester, 1986 ; Titman et Wessels, 1988 ; Rajan et Zingales, 1995 ; Kremp et al., 1999 ; Weill, 2001). Pour Petersen et Rajan (1997), le crédit commercial se situe en dessous de la dette bancaire dans l’ordre de financement des firmes. Les auteurs fondent leur raisonnement sur le constat suivant : les PME entretenant des relations de long terme avec leurs banques détiennent un volume moins important de dettes fournisseurs dans leur total bilan ; les firmes situées dans les zones métropolitaines où les institutions financières sont peu présentes détiennent pour leur part un volume plus important de dettes fournisseurs que les autres. Le financement par crédit fournisseur étant plus onéreux que par crédit bancaire, son utilisation par les firmes est d’une part l’indice d’un rationnement de crédit et d’autre part qu’il est effectivement une alternative ultime, car coûteuse, de financement lorsqu’elles ne peuvent obtenir davantage de crédit bancaire (Petersen et Rajan, 1994). Petersen et Rajan (1997) soulignent que l’information collectée dans le temps par les banques ne semble pas affecter le montant de crédit offert par le fournisseur. Ce dernier collecte et utilise dans sa décision de financement une information privée différente de celle des banques. Les fournisseurs accordent plus facilement des crédits aux firmes qui ne sont pas rentables, les firmes en détresse financière et les plus exposées au rationnement de crédit mais qui disposent d’un potentiel de croissance élevé. Ce qui, selon les auteurs, corrobore la théorie de l’avantage de financement du fournisseur. 39
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II - Données méthodologie et spécification des modèles empiriques Pour étudier le comportement d’endettement des PME, nous utilisons les données de l’enquête NSSBF 2003. Cette dernière couvre un échantillon représentatif de 6 millions de firmes de moins de 500 salariés opérant aux USA. La base contient, outre les informations financières standards (bilan et compte de résultat), des informations qualitatives relatives à l’existence, l’année de l’étude, d’un crédit commercial, d’un crédit bancaire, etc. La NSSBF contient également des informations sur l’identité et les caractéristiques de l’emprunteur (genre, diplômes, expérience, race, etc.), le type de service financier utilisé (ligne de crédit, crédit immobilier, crédit d’équipement, crédit auto…), le montant du financement octroyé et restant dû, la nature de l’institution financière ayant accordé le prêt (banques commerciales ou banques non commerciales), etc. La première étape de notre analyse consiste à classer l’échantillon en quatre groupes d’entreprises : No credit, BC only, TC only, BC & TC. Les entreprises non endettées (No credit) représentent celles qui n’utilisent ni la dette bancaire, ni la dette fournisseur. Les entreprises endettées (Use credit) sont classées en trois catégories : celles qui recourent uniquement à la dette bancaire (BC only), celles qui recourent uniquement à la dette fournisseur (TC only), et celles qui utilisent simultanément les deux sources de financement (BC & TC). Une fois le classement établi, nous calculons des statistiques descriptives des firmes endettées (Use credit) et des firmes non endettées (No credit) et effectuons des tests de différence de moyennes entre ces deux groupes. Nous présentons pour le groupe (Use credit) les statistiques descriptives sur l’utilisation de la dette fournisseur et de la dette bancaire (Tableau 2 et Tableau 3). Nous utilisons un modèle de régression probit univarié pondéré afin de déterminer les différences entre les entreprises endettées (Use credit) et les entreprises non endettées (No credit). Les variables explicatives se rapportent aux caractéristiques de l’entreprise et de ses propriétaires. Ces variables affectent le comportement d’endettement des entreprises et la disponibilité du crédit et sont souvent mises en évidence dans la littérature. Le modèle proposé est le suivant : Type d’emprunteur = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (1A) Où le type d’emprunteur est égal à 1 si l’entreprise utilise la dette (Use credit), 0 sinon (No credit). Dans une seconde étape, nous effectuons un test probit bivarié, où la première équation est relative à la décision d’endettement (1A) et la deuxième équation est relative au choix du mode de financement : par dette fournisseur (2A) ou par dette bancaire (2B). Use TC = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (2A) Où Use TC est égal à 1 si l’entreprise recourt à la dette fournisseur et 0 sinon. Use BC = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (2B) Où Use BC est égal à 1 si l’entreprise recourt à la dette bancaire et 0 sinon. Enfin, nous utilisons l’équation (2A) puis (2B) comme premières équations d’un modèle d’équations simultanées (2SLS). La seconde équation du système est soit le volume de crédit commercial utilisé (3A) dans le cas du recours à la dette fournisseur (2A), soit le volume de crédit bancaire utilisé (3B) dans le cas du recours à la dette bancaire (2B).
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LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES Volume TC (%)= f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (3A) Volume BC (%)= f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (3B) Pour estimer le volume du crédit commercial utilisé, nous prenons en considération le ratio dette fournisseur rapporté au total bilan (DF/TA). Pour mesurer le volume de la dette bancaire, nous utilisons le ratio (BC/TA). Ce ratio regroupe les dettes bancaires de toute nature (lignes de crédit, crédit auto, crédit d’équipement, etc.). Ces informations se trouvent hors bilan et sont fournies par les emprunteurs qui indiquent pour chaque type de prêt le solde restant dû. Comme Cole (2010), nous avons choisi de calculer le montant de la dette bancaire via les sources d’informations financières disponibles au niveau des soldes débiteurs (outstanding balance) plutôt que de reprendre le montant inscrit dans le bilan, puisque c’est à partir de ces informations que nous avons pu classer les entreprises en quatre groupes. Comme mesure de robustesse au volume de la dette bancaire, nous utilisons deux variables : (LC/TA) représentant le volume de la ligne de crédit utilisé rapporté à l’actif total (ce ratio est calculé à partir des informations disponibles au niveau des soldes débiteurs) et (𝐵𝐶𝑏𝑖𝑙𝑎𝑛 /TA) représentant le montant de la dette bancaire inscrit dans le bilan rapporté à l’actif total. Rappelons que, pour estimer le volume du crédit commercial, nous utilisons le montant des dettes fournisseurs inscrit dans le passif du bilan.
Les variables explicatives : Caractéristiques de la firme AGE : l’âge de l’entreprise reflète une dimension importante de son expérience et donc de sa réputation. Une entreprise bien établie bénéficie généralement de plus de crédibilité auprès des bailleurs de fonds qu’une jeune entreprise. Avec le temps, l’entreprise réduit son risque grâce à la diversification de ses activités, de sa clientèle. L’âge est également corrélé au besoin financier et au montant des ressources internes dégagées. L’expérience et la rentabilité devraient avoir contribué à assurer une partie importante des capitaux permanents de l’entreprise, grâce à leur réinvestissement par les dirigeants. Pour capturer cet effet, nous retenons Ln (FAGE) représentant le logarithme népérien de l’âge de la firme. Taille : plus une entreprise prend de l’ampleur, plus elle devient performante. Les entreprises de grande taille sont généralement aptes à diversifier leurs activités et à réduire le niveau des asymétries d’information, et peuvent donc s’endetter plus facilement. Nous retenons comme mesure de la taille de la firme le logarithme népérien de ses ventes par la variable Ln (ventes). Qualité de la firme : les entreprises de bonne qualité ont une faible probabilité de défaut et un meilleur accès au financement. Nous utilisons comme mesure de la qualité de la firme l’existence d’éventuels retards de paiement ou de procédures judiciaires à son encontre durant les trois dernières années par la variable (F_delinq).Nous retenons également le D&B credit score qui indique le risque de faillite de la firme sur une échelle de 1 à 6 (où 1 représente les firmes les plus risquées, et 6 les moins risquées). Rentabilité : la relation entre la rentabilité et l’endettement est ambiguë. D’une part, la rentabilité augmente la disponibilité des financements externes (bancaire et/ou commercial). D’autre part, plus une entreprise est rentable, plus elle génère des ressources internes. Dans ce cas, la relation entre rentabilité et endettement est négative puisque les entreprises rentables vont préférer recourir à l’autofinancement. L’indicateur de performance choisi est le résultat net sur l’actif total. Liquidité : la liquidité est une mesure de l’aptitude de l’entreprise à faire face à ses engagements de court terme grâce à ses actifs les plus liquides (correspondance financière). Nous retenons la variable Liquidité représentant le volume des actifs liquides (trésorerie et autres titres à court terme) sur l’actif total. 41
LA REVUE DU FINANCIER Nous allons également utiliser la variable Actif circulant rapportée au total bilan, pour mettre en évidence l’équivalence entre emploi et ressource de même maturité. Tangibilité : la tangibilité des actifs, mesurée par la part des actifs corporels dans le total bilan de l’entreprise, est souvent utilisée comme facteur explicatif de la structure financière de la firme. La concentration de l’actionnariat (P_percent), mesurée par la part de l’actionnaire principal dans le capital de l’entreprise, joue sur son mode de financement (Holmes et Zimmer, 1994). Concernant la structure juridique de l’entreprise, nous allons intégrer une variable binaire pour les sociétés anonymes (Corporation). Ces dernières utilisent plus de levier en raison de la responsabilité limitée des propriétaires. Secteurs : Nous incluons dans notre régression des variables indicatrices de secteurs (commerce de gros, commerce de détail, services, industrie, transport, construction). Caractéristiques du propriétaire Au sein d’une PME, la décision en matière de financement revient avant tout au propriétairedirigeant. Ainsi, nous pouvons aisément prévoir que ses caractéristiques personnelles, telles que sa formation, son expérience, son âge, etc., auront une influence importante dans ses choix de financement. Selon Barton et Mattews (1989), plus que l’expérience du dirigeant, c’est sa propension à la prise de risque ainsi que ses objectifs qui sont déterminants. Les dirigeants qui manifestent une aversion au risque vont généralement privilégier le financement interne, les dirigeants qui ont une attitude proactive seront quant à eux plus portés sur l’endettement externe. Concernant les caractéristiques du propriétaire principal, nous retenons celles liées à l’âge (mesure de sa réputation), à son niveau d’étude (Bac/high school deg, diplôme de 1er et 2 e cycle/college deg, diplôme de 3e cycle/graduate deg), à son expérience, à sa qualité (si antécédents judiciaires). Nous introduisons également des variables binaires liées à la race et au genre du propriétaire (Afro-Américain, Asiatique, Hispanique, femme). Blanchflower, Levine et Zimmerman (1998, 2003) ont mis en évidence un effet de discrimination lié à la race et au genre du propriétaire principal. Aussi, nous pensons trouver un comportement de financement différent.
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LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES Tableau 1 - Définition des variables Variables expliquées Use Credit Use TC Use BC Volume BC
Volume TC Variables explicatives Caractéristiques Firme VENTES Actif Liquidité Actif circulant Actif corporel Croiss_ventes (+) Corporation FAGE F_ Delinq D&B credit score F_MSA Caractéristiques Propriétaire P_AGE P_Femme P_Asiatique P_Afro-américain P_Hispanique P_College deg P_Graduate deg P_Delinq P_Percent P_Exp Classification sectorielle Construction Industrie Transport Com. Gros Com. Détail Services
Si la firme dit recourir à la dette bancaire ou à la dette commerciale. Si la firme dit recourir à la dette fournisseur. Si la firme dit recourir à la dette bancaire. Volume de l’ensemble des dettes bancaires (ligne de crédit, créditbail, crédit auto, crédit d’équipement, etc.) souligné par l’emprunteur et fourni à partir des soldes bancaires restant dus (Outstanding balance of all bank loan). Montant des dettes fournisseurs dans le bilan.
Total des ventes. Total des actifs. Disponibilités. Somme des stocks, des créances et autres actifs circulants. Somme des terrains et des actifs corporels. Si la croissance des ventes est positive. Si les firmes sont organisées en (S_corporation ou C_corporation). Année d’établissement de l’entreprise. Si la firme a connu des problèmes juridiques durant les trois dernières années. Indique la classe de risque de la firme sur une échelle de 1 à 6. Où 1 représente les firmes les plus risquées, 6 les moins risquées. Firme située en métropole (Metropolitan Statistical Area).
Age du propriétaire principal. Le propriétaire principal est une femme. Le propriétaire principal est asiatique. Le propriétaire principal est afro-américain. Le propriétaire principal est hispanique. Le propriétaire principal a un college degree (équivalent 1er et 2 e cycle). Le propriétaire principal a un graduate degree (équivalent 3e cycle). Si le propriétaire a connu des antécédents juridiques à titre personnel durant les trois dernières années. La part du capital détenue par le propriétaire principal. Nombre d’années d’expérience du propriétaire principal. SIC 15 - 19 SIC 20 - 39 SIC 40 - 49 SIC 50 -51 SIC 52 - 59 SIC 70 - 89 43
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III - Les hypothèses 1 - Un premier ensemble d’hypothèses porte sur les différences entre les firmes endettées et les firmes non endettées Deux théories fondamentales sont souvent opposées lorsque la question du financement des entreprises est abordée : la théorie du compromis (Trade-Off Theory) et la théorie d’ordre de financement hiérarchique (Pecking Order Theory). La première prône l’existence d’un ratio d’endettement optimal tandis que la seconde remet en cause l’existence d’un tel ratio au profit d’un ordre hiérarchique dans les préférences de financement des entreprises. Pour tester empiriquement la théorie d’ordre de financement hiérarchique, les études régressent généralement la dette sur les principaux déterminants permettant de décrire les comportements induits par cette approche (Harris et Raviv, 1991 ; Rajan et Zingales, 1995 ; López-Gracia et Sogorb-Mira, 2008). La variable expliquée peut correspondre selon les études à la dette totale, à la dette financière, aux dettes d’exploitation, aux dettes à long terme, ou aux dettes à court terme. Concernant les variables explicatives, la littérature utilise généralement la rentabilité, les opportunités de croissance, les garanties, la taille, l’âge de la firme, etc. Ces variables explicatives mesurent généralement la capacité de l’entreprise à générer du financement interne et son degré d’asymétrie. La théorie d’ordre de financement hiérarchique souligne que le niveau d’endettement devrait être négativement corrélé à la profitabilité, que les firmes ayant d’importantes ressources internes et peu d’opportunités de croissance devraient être peu endettées, et inversement. Les entreprises appartenant à des secteurs à faibles besoins en actifs corporels devraient moins recourir à la dette. La théorie d’ordre de financement hiérarchique indique également que le niveau des dettes financières devrait être positivement corrélé à la proportion d’actifs tangibles, à la taille de l’entreprise et à la responsabilité limitée des dirigeants (cas d’une société anonyme). En accord avec la théorie de financement hiérarchique, nous pouvons formuler un premier ensemble d’hypothèses :
H1-1
« Les firmes non endettées disposent d’une plus grande rentabilité et liquidité, et de peu d’opportunités de croissance en comparaison des entreprises endettées. » « Les firmes non endettées disposent de peu d’actifs corporels dans leur bilan, et se situent principalement au sein du secteur des services. » « Les firmes endettées ont une forte probabilité d’être dotées d’un statut de sociétés anonymes - Corporation. »
Près de 1/5 des PME de notre échantillon indiquent ne pas recourir à l’endettement. À ce titre, deux questions se posent : Est-ce un choix délibéré du propriétaire de la firme (cf. H1-2) ? Ou la conséquence d’une discrimination de la part des prêteurs (cf. H1-3) ? Les défenseurs de la théorie de la finance comportementale estiment qu’un propriétaire qui choisit de ne pas recourir à la dette a une gestion irrationnelle de son entreprise puisqu’il passe au travers des effets positifs de l’endettement tels que le financement pendant une certaine période à un taux gratuit via le crédit commercial, la réduction de l’impôt liée aux intérêts de l’emprunt bancaire, ou l’opportunité d’augmenter le rendement des fonds propres ROE. Cette irrationalité dans la gestion du propriétaire de la firme nous amène à formuler l’hypothèse suivante : 44
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES
H1-2
« Les sociétés non endettées sont gérées par des propriétaires qui ont moins de diplômes et moins d’expérience que les sociétés endettées. » « Les sociétés non endettées sont localisées en zone rurale. »
Blanchflower, Levine et Zimmerman (2003) démontrent, à partir de la NSSBF 1998, que les entreprises détenues par des Afro-Américains subissent un taux de rejet des demandes de crédit supérieur à celui des propriétaires blancs (62,3 % contre 24,4 %), les propriétaires hispaniques faisant face, eux, à un taux de rejet de 54,5 %. Les auteurs notent également que les entreprises afro-américaines payent un taux d’intérêt plus élevé que celui des propriétaires blancs (11 % contre 9,3 %), même si elles bénéficient d’un bon historique de crédit. Ce qui amène ces auteurs à conclure que les minorités raciales font face à un désavantage significatif sur le marché du crédit aux PME, qui ne semble malheureusement pas être dû aux différences de solvabilité ou de géographie mais à une discrimination raciale. D’autres études ont affirmé l’existence de préjugés à l'égard des femmes entrepreneures, et donc des difficultés quant à leur accès au financement bancaire (Coleman, 2000 ; Marleau, 1995). Pour capturer l’existence d’une discrimination selon ces caractéristiques, nous allons utiliser les variables indicatrices de la race et de l’origine ethnique du propriétaire principal (Asiatiques, Afro-Américains, Hispaniques), et également de son genre (femme vs homme). Ce qui nous conduit à notre hypothèse 3 : H1-3
« Les firmes non endettées ont une forte probabilité d’être détenues par des propriétaires de minorités raciales (Asiatiques, Afro-Américains, Hispaniques) ou par des femmes. »
2 - Un second ensemble d’hypothèses porte sur les différences entre les firmes qui recourent à la dette fournisseur et celles qui recourent à la dette bancaire Selon le motif financier, les entreprises utilisent plus massivement la dette fournisseur durant les périodes de restriction monétaire. Le crédit commercial joue le rôle de financement de substitution au profit des firmes les plus exposées au rationnement de crédit bancaire. Pour tester cette théorie, nous allons utiliser les données de l’enquête NSSBF 1998 que nous comparons à celles de 2003. Durant ces deux périodes, il y a eu une forte variation du taux directeur de la Fed. En 2003, ce dernier s’établissait à 1 %, alors que durant les trois premiers trimestres de 1998, il s’établissait à 5,5 % (Tableau 3). Ceci nous amène à l’hypothèse suivante : H2-1
« En cas de hausse de taux (baisse de taux) d’intérêt, les entreprises vont augmenter (diminuer) leur utilisation de la dette fournisseur. »
Selon la théorie de discrimination, la participation implicite plus importante du fournisseur par rapport à une banque dans la société légitimerait l’aide des fournisseurs en faveur de leurs clients financièrement contraints. L’offre de crédit fournisseur est le résultat d’un arbitrage entre la prise en charge d’un risque plus élevé et l’anticipation de recettes futures issues du maintien de la relation commerciale. Devant une situation où, d’une part, le fournisseur est plus enclin à fournir le financement nécessaire à la survie de l’entreprise et où, d’autre part, le statut prioritaire de la dette bancaire sur la dette commerciale (rang senior) augmente la probabilité de liquidation par la banque afin de récupérer les garanties associées à la créance en cas de défaillance du débiteur (Berger et Udell, 1998), nous nous attendons à ce que les firmes de 45
LA REVUE DU FINANCIER faible qualité limitent leurs emprunts bancaires pour éviter un défaut potentiel contre la banque, qui aboutirait à une liquidation de leur société. Ces firmes constituent dès lors une part plus importante de leur endettement sous forme de dettes fournisseurs en vue d’une plus grande flexibilité en cas de défaut. L’étude empirique de Huyghebaert, Van de Gucht et Van Hulle (2007) en Belgique confirme cette prédiction. Les auteurs soulignent que les firmes appartenant à des secteurs enregistrant un taux d'échec historique important et une probabilité de liquidation élevée utilisent plus intensément le crédit fournisseur que les autres firmes. Pour capturer un tel effet, nous utilisons les variables indiquant l’existence d’antécédents d’impayés professionnels (F_delinq) ou personnels du propriétaire principal de la firme (P_delinq), ainsi que le D&B credit score. Notre hypothèse est la suivante : H2-2
« Les firmes de faible qualité préfèrent s’endetter auprès des fournisseurs. »
Selon la théorie de l’avantage de financement, les banques détiennent une participation implicite dans la firme moins importante que celle des fournisseurs, d’où une probabilité de liquidation plus grande dès lors que la valeur de liquidation de la créance est supérieure à la valeur de liquidation de la firme. Une valeur de liquidation élevée - ou des garanties importantes - rend crédible la menace de liquidation par les banques. Pour capturer cet effet, nous utilisons la part des actifs corporels dans le total bilan. Nous formulons l’hypothèse suivante : H2-3
« Les firmes à forte valeur de liquidation préfèrent recourir à la dette commerciale. »
Cependant, si les firmes ont besoin d’une part importante d’actifs corporels dans leur bilan, elles vont devoir les financer par des crédits à maturité comparable, d’où un recours plus important à la dette bancaire. Si tel est le cas, nous devrions constater une relation négative entre la part des actifs corporels et le recours à la dette commerciale, et une relation positive entre cette part d’actifs corporels et l'utilisation du crédit bancaire. H2-4
« Les entreprises à fort besoin d’actifs corporels recourent plus massivement à la dette bancaire. »
Une entreprise en croissance se caractérise par un besoin de financement élevé. Le financement interne étant une ressource limitée pour les PME, elles doivent dès lors faire appel aux partenaires financiers externes. Selon Myers (1984), les firmes ayant d’importantes opportunités de croissance, pour un même niveau de financement interne, devraient avoir besoin de plus de ressources externes et donc être plus endettées. Toutefois, les propriétaires de firmes à fortes opportunités de croissance subissent, en cas de liquidation, une perte (en termes de valeur présente des opportunités) supérieure à celle des autres firmes. Aussi, les entreprises en croissance devront favoriser les capitaux propres aux dettes bancaires mais, en cas de difficultés anticipées, elles devront favoriser la dette fournisseur par rapport à la dette bancaire, car les fournisseurs sont susceptibles de les soutenir en cas de détresse (théorie de l’avantage de financement). Les fournisseurs misent surtout sur l’avenir et cherchent à préserver une relation durable permettant la croissance de leur propre activité. Nous rapprochons la présence d’opportunités de croissance par la variable croiss_ventes (+), égale à 1 si la firme reporte une augmentation de son chiffre d’affaires par rapport à l’année précédente, 0 sinon. « Les firmes ayant peu de financement interne et d’importantes opportunités de croissance devraient être fortement endettées. » H2-5 « Les entreprises bénéficiant de fortes opportunités de croissance utilisent un volume plus élevé de la dette fournisseur. » 46
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES Concernant la relation entre la structure de propriété et l’endettement, les études présentent des résultats ambigus. Harris et Raviv (1990) et Stulz (1990) trouvent que la dette a un impact positif sur la structure de propriété puisqu’elle permet de réduire les phénomènes d’agence et d’augmenter le contrôle des dirigeants. D’autres études soulignent que la participation des dirigeants au capital affecte négativement le niveau d’endettement des firmes (Jensen, Solberg et Zorn, 1992). En effet, lorsque les dirigeants détiennent un pourcentage important du capital, ils subissent alors un risque non diversifiable important et sont incités, par conséquent, à réduire le niveau d’endettement afin de limiter le risque de défaut de la firme. Quand il s’agit d’actionnaires familiaux, ces derniers cherchent à préserver la survie à long terme de l’entreprise. Dans ce contexte, nous devrions constater que ces actionnaires ont tendance à éviter l’augmentation du risque de faillite et n’utilisent l'endettement qu’en dernier ressort, lorsque les fonds internes sont insuffisants. Une augmentation de l'endettement, et indirectement du risque de défaut de l'entreprise, peut être perçue par les actionnaires familiaux comme un abandon d'une partie de leur contrôle aux mains des créanciers. Nous formulons donc l’hypothèse suivante : H2-6
« La part détenue par le propriétaire principal est négativement corrélée à l’endettement bancaire. »
L’endettement est fortement lié à l’appartenance sectorielle. Certains secteurs nécessitent d’importants investissements en actifs corporels, la dette bancaire est dans ce contexte prédominante. D’autres ont peu ou pas besoin de dette commerciale (secteur des services). Aussi, nous formulons les hypothèses suivantes :
H2-7
« Les sociétés situées dans le secteur des services présentent un faible recours au crédit fournisseur, alors que les sociétés situées dans les secteurs tels que la construction et l’industrie ont un besoin plus important en crédit fournisseur. » « Les sociétés situées dans des secteurs caractérisés par de grands investissements en actifs corporels comme la construction, l’industrie et le transport, devraient montrer un recours plus important à la dette bancaire. »
IV - Les résultats 1 - Les résultats univariés Le tableau 2 (T2A) présente la distribution statistique des firmes selon leur comportement d’endettement. Les entreprises sont classées en quatre catégories : les firmes non endettées (No credit) et les firmes endettées (Use Credit) dans lesquelles nous distinguons trois types d’entreprises : celles qui recourent uniquement à la dette bancaire (BC only), celles qui recourent uniquement à la dette fournisseur (TC only), et celles qui utilisent simultanément les deux sources de financement (BC & TC). Le tableau 2 souligne le poids important des PME non endettées (19,1 %), et montre que la dette fournisseur coexiste en même temps et pratiquement dans la même proportion que la dette bancaire dans la structure de financement des PME endettées. Ainsi, ces deux modes de financement sont complémentaires. Le tableau 2 nous permet aussi d’avoir une première idée de la relation entre la dette bancaire et la dette fournisseur en fonction de l’évolution du taux d’intérêt. En 2003, lorsque le taux d’intérêt était de 1 %, le recours à la dette bancaire comme unique source de financement était plus élevé qu’en 1998 où le taux cible de la Fed était de 5,50%. A contrario, le recours à la dette fournisseur comme unique source de financement était 47
LA REVUE DU FINANCIER plus élevé en 1998 qu’en 2003. Ces résultats confirment le rôle de financement de substitution joué par le crédit commercial en période de restriction monétaire. En accord avec cette théorie, lorsque les taux d’intérêt sont moins favorables (plus élevés), les entreprises augmentent leur recours à la dette fournisseur et réduisent leur recours à la dette bancaire. Les calculs de Cole (2010) à partir de la NSSBF 1998 et 2003 (table T2B) confirment la prédiction de Stiglitz et Weiss (1981) : lorsque les taux du marché de crédit sont haussiers (cas de 1998), les banques décident de rationner la quantité de crédit qu’elles accordent au lieu d’augmenter ses taux dans la même proportion que le marché de crédit, car une action sur les taux d’intérêt influe sur le risque de l’emprunteur. La banque accroît ainsi ses standards de financement afin de minimiser les problèmes de sélection adverse et d’aléa moral (rationnement plus important). L’année 1998 était une année de taux d’intérêt haussier, le taux de rationnement était plus élevé (22,6 %, contre 12,1 % en 2003), alors que la prime de taux (différence entre le taux d’intérêt de la banque et le taux directeur de la réserve fédérale) était plus faible (4,14 % contre 5,09 %). Les résultats du tableau 3 montrent que les entreprises non endettées sont, comparativement aux entreprises endettées, de plus petite taille (mesurée par le total actif ou par le total des ventes), plus jeunes (12,37 ans contre 14,72 ans), et enregistrent une croissance des ventes plus faible. Le rating D&B, qui ventile le score en strates de 1 à 6 (du plus risqué au moins risqué), indique que les entreprises non endettées ont un score de crédit plus faible (3,38 contre 3,58), donc une probabilité de faillite plus grande que les entreprises endettées. Les No credit sont toutefois plus rentables, plus liquides et ont moins d’antécédents judiciaires professionnels (F_delinq) ou personnels au niveau du propriétaire principal (P_delinq). Les entreprises non endettées disposent de moins d’actifs corporels et d’actifs circulants dans leur total bilan, et sont généralement moins organisées sous forme de sociétés anonymes (Corporation). Les entreprises non endettées sont le plus souvent situées en métropole et dans le secteur des services. Les résultats du tableau 3 montrent que les propriétaires des firmes non endettées ont plus de diplômes supérieurs (3ème cycle/graduate degree) mais moins d’années d’expériences (16,63 contre 19,78). Ces derniers ont une plus forte probabilité d’être des femmes (34 % contre 19 %) ou d’appartenir à des minorités raciales (Afro-Américains, Hispaniques, Asiatiques).
2 - Les résultats multivariés 2.1 - Les déterminants de l’endettement Pour expliquer les différences entre les entreprises endettées et les entreprises non endettées, nous utilisons un modèle probit univarié pondéré. Le tableau 4 présente les résultats de l’estimation de l’équation (1A). Cette équation représente la décision de recourir ou non à la dette externe. Nous rappelons ci-dessous l’équation : Type d’emprunteur = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (1A) Où le type d’emprunteur est égal à 1 si l’entreprise est endettée (Use credit), 0 sinon (No credit). Le tableau 4 confirme les résultats des statistiques descriptives et du test de différence de moyennes. Les entreprises endettées sont, comparativement aux entreprises non endettées, de taille significativement plus importante, sont moins rentables et disposent de moins de liquidités. Elles détiennent une proportion plus importante d’actifs corporels et déclarent plus d’antécédents judiciaires professionnels (F_delinq). En général, ces résultats corroborent la théorie d’ordre de financement hiérarchique. Les entreprises endettées sont généralement moins présentes en zone métropolitaine. Les propriétaires des firmes endettées sont 48
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES significativement plus jeunes et ont moins de diplômes supérieurs. Nous constatons également que les propriétaires femmes et ceux de race asiatique et hispanique recourent moins à la dette. L’analyse sectorielle souligne que les firmes endettées sont significativement moins présentes dans les secteurs du commerce de détail et des services, comparativement à la variable sectorielle omise (construction).
2.2 - Les déterminants de l’endettement par dette fournisseur Pour expliquer les différences entre les entreprises endettées via la dette fournisseur et celles qui n’utilisent pas la dette fournisseur conditionnelle à l’utilisation de la dette (bancaire ou commerciale), nous utilisons un modèle probit bivarié où l’on estime d’abord l’équation (1A) sur l’ensemble de l’échantillon. Ensuite, nous estimons l’équation (2A) pour la catégorie de firmes qui utilisent la dette fournisseur. Type d’emprunteur = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (1A) Use TC = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (2A) Où le type d’emprunteur est égal à 1 si l’entreprise est endettée, 0 sinon. Use TC est égal à 1 si l’entreprise recourt à la dette fournisseur et 0 sinon. Le tableau 5 présente les résultats de l’estimation de l’équation (2A). Le coefficient de corrélation entre les termes d’erreurs des deux équations est statistiquement proche de 0, ce qui indique l’absence de biais de sélection quand on estime l’équation (2A) par un modèle probit simple. Les résultats du tableau 5 soulignent que les entreprises qui utilisent la dette fournisseur sont, comparativement à celles qui n’utilisent pas la dette fournisseur, plus âgées et de taille plus importante. Elles bénéficient d’opportunités de croissance plus élevées, et sont généralement organisées sous forme de sociétés anonymes (Corporation). Les Use TC montrent d’importants antécédents judiciaires (F_delinq) et disposent d’une faible rentabilité et d’une faible liquidité. Elles enregistrent un score de crédit plus élevé. Nous constatons un lien négatif entre les variables indicatrices de la discrimination (Femmes, Asiatiques, Hispaniques, Afro-Américains) et le recours à la dette fournisseur. Nos résultats montrent aussi que les entreprises qui utilisent la dette fournisseur sont moins présentes en zone MSA et dans les secteurs du transport, des services et du commerce de détail, comparativement à la variable omise (construction).
2.3 - Les déterminants de l’endettement par dette bancaire Le tableau 6 présente les résultats de l’estimation de l’équation (2B) afin d’expliquer les différences entre les entreprises recourant à la dette bancaire et celles qui n’y recourent pas conditionnelle à l’utilisation de la dette (bancaire ou commerciale). Nous utilisons un modèle probit bivarié, où l’on estime d’abord l’équation (1A) sur l’ensemble de l’échantillon. Ensuite, nous estimons l’équation (2B) pour prendre en considération les firmes recourant à la dette bancaire. Le coefficient de corrélation entre les termes d’erreurs des deux équations est statistiquement proche de 0, ce qui indique l’absence de biais de sélection quand on estime l’équation (2B) par un modèle probit simple. Rappelons les deux équations : Type d’emprunteur = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (1A) Use BC = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (2B) Où le type d’emprunteur est égal à 1 si l’entreprise est endettée, 0 sinon. Use BC est égal à 1 si l’entreprise recourt à la dette bancaire, 0 sinon. Selon les résultats du modèle (2B), les entreprises qui recourent à la dette bancaire sont, comparativement à celles qui n’y recourent pas, de taille relativement importante; elles sont également plus jeunes, moins rentables et moins liquides. Elles possèdent une proportion 49
LA REVUE DU FINANCIER importante d’actifs corporels. Ces résultats sont généralement cohérents avec la théorie d’ordre de financement hiérarchique. Nous constatons aussi que les Use BC enregistrent un plus grand nombre d’antécédents judiciaires de nature professionnelle (F_delinq). Les propriétaires des firmes dont l’endettement est de type bancaire sont plus jeunes, ont moins de diplômes supérieurs. Nous relevons également un lien négatif entre le recours à la dette bancaire et les variables indicatrices de discrimination (Femme et Asiatique). Nos résultats soulignent un lien positif entre la part détenue par le propriétaire principal (P_percent) et le recours à la dette bancaire, ce qui corrobore la théorie du signal par l’endettement. L’analyse par secteur fait ressortir que les firmes recourant à la dette bancaire sont moins présentes au sein des secteurs du commerce de détail, du commerce de gros et des services, comparativement à la variable omise (construction).
2.4 - Les déterminants du volume de crédit fournisseur utilisé Le tableau 7 présente les résultats de l'estimation de l'équation (3A) où la variable dépendante est le volume de la dette fournisseur utilisé (DF/TA), conditionnel à l’utilisation du crédit fournisseur. Cette équation est évaluée en utilisant un modèle 2SLS, où nous estimons d'abord l'équation (2A) sur l’ensemble de l’échantillon, puis nous estimons l'équation (3A) au niveau des sociétés qui utilisent la dette fournisseur. Use TC = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (2A) TC % = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (3A) Où Use TC est égal à 1 si l’entreprise recourt à la dette fournisseur et 0 sinon. TC % est mesuré par la part des dettes fournisseurs sur le total bilan (DF/TA). Il ressort du modèle que le volume de la dette fournisseur utilisé (DF/TA) diminue avec l’âge de la firme, ce qui souligne que les firmes les plus jeunes (les plus opaques) utilisent plus massivement la dette commerciale. Nous constatons également que le volume du crédit fournisseur est positivement corrélé à la part de l’actif circulant dans le bilan et à la part des actifs liquides, ce qui confirme que les firmes financent leurs actifs par des dettes à maturité comparable. Nos résultats soulignent que les entreprises bénéficiant d’opportunités de croissance utilisent un volume plus important de dette fournisseur. Ce volume est également plus important au sein d’entreprises de faible qualité mesurée par F_delinq. Toutefois, plus le D&B credit score de l’entreprise augmente (son risque diminue), moins important est le volume du crédit fournisseur dans son bilan. Ces résultats sont compatibles avec la théorie de l’avantage de financement du fournisseur. Nous constatons un niveau plus important de la dette fournisseur chez les sociétés anonymes. Ceci confirme l’hypothèse de l’impact de la responsabilité limitée dans le comportement d’endettement des firmes. Nous avons testé l’impact des actifs corporels et la durée de la relation bancaire sur le volume de crédit fournisseur utilisé (résultat non reproduit dans le tableau). Nous avons trouvé un lien négatif entre la part des actifs corporels et le volume des dettes fournisseurs. Ce résultat est compatible avec celui de Petersen et Rajan (1997) qui mettent également en évidence un lien négatif, et confirme les résultats du modèle de Cunat (2007) selon lequel les firmes avec peu d’actifs corporels (pouvant être utilisés comme garanties) ont recours plus massivement au crédit fournisseur. En ce qui concerne les effets de la relation bancaire de long terme sur le financement par dette fournisseur, nous avons constaté un lien négatif : les PME ayant instauré une relation de long terme avec leur banque utilisent moins intensément la dette fournisseur. Concernant les caractéristiques du propriétaire, les indicateurs de discrimination selon la race et le genre (femme vs homme) ne sont pas significatifs au niveau du modèle probit bivarié. Cependant, au niveau de la régression simple, nous constatons que les propriétaires afroaméricains utilisent un volume plus important de crédit fournisseur. Nos résultats montrent que l’expérience du propriétaire est négativement corrélée à l’utilisation de la dette fournisseur, et 50
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES que la part de capital détenue par ce dernier est positivement corrélée au volume du crédit fournisseur utilisé. Par secteur, le volume de crédit fournisseur utilisé est significativement plus faible dans les secteurs des services, du commerce de détail et de l’industrie, en comparaison avec le secteur de la construction (variable omise). Ce résultat confirme que le recours à la dette commerciale est fortement corrélé au secteur de la firme, les firmes situées dans le secteur des services s’avèrent moins utiliser la dette fournisseur que celles situées dans le secteur des produits tangibles.
2.5 - Les déterminants du volume de crédit bancaire utilisé Concernant les déterminants du volume de crédit bancaire utilisé, les résultats sont présentés dans le tableau 8. Ce dernier est composé de quatre colonnes selon le proxy utilisé pour mesurer la dette bancaire : (T8A, T8B, T8C et T8D). La colonne (T8A) présente les résultats de la régression lorsque l’on mesure le volume de la dette bancaire à partir des informations hors bilan fournies par l’entreprise 4. Ce montant représente le solde des dettes bancaires restant dû de toute nature (lignes de crédit et hors lignes de crédit), c'est-à-dire selon que le financement est relationnel ou transactionnel. La colonne (T8A) présente les résultats de l'estimation de l'équation (3B) où la variable dépendante est le volume de la dette bancaire utilisé (BC/TA), conditionnel à l’utilisation du crédit bancaire. Cette équation est évaluée par la méthode des doubles moindres carrés (2SLS), où nous estimons d'abord l'équation (2B) sur l’ensemble de l’échantillon et estimons ensuite l'équation (3B) sur les sociétés qui utilisent la dette bancaire. Use BC = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (2B) BC % = f (caractéristiques de la firme, caractéristiques du propriétaire) (3B) Où BC % est mesuré par la part des dettes bancaires sur le total bilan (BC/TA). Comme mesure de robustesse, nous avons calculé le montant des dettes bancaires utilisé en considérant uniquement les lignes de crédit, et dans ce cas la variable explicative est (LC/TA), calculée à partir des informations hors bilan. Les résultats sont présentés au niveau de la colonne (T8B). Nous avons également considéré comme variable explicative le montant des dettes bancaires inscrites dans le bilan. Les résultats sont présentés au niveau de la colonne (T8C) et de la colonne (T8D). La colonne (T8B) et la colonne (T8C) présentent les résultats de l’estimation par la méthode des doubles moindres carrés. La colonne (T8D) présente les résultats d’estimation d’un probit simple. Les résultats d’estimation présentés dans la colonne T8A montrent que le volume de la dette bancaire (BC/TA) est négativement corrélé à la taille de l’entreprise et à sa rentabilité. Le montant de la dette bancaire est plus important chez les firmes les plus jeunes (les plus opaques). Les entreprises bénéficiant d’une bonne qualité de crédit (variable D&B credit score) ont un ratio d’endettement plus faible que les plus risquées, ce qui corrobore l’hypothèse d’ordre de financement hiérarchique. Nous retrouvons majoritairement ces résultats lorsque le financement est de type relationnel (mesuré par les lignes de crédit). De plus, certaines variables gagnent en significativité. Nous constatons à ce titre que le volume de la dette bancaire est négativement corrélé à la liquidité de la firme et positivement corrélé à la part des actifs corporels, ce qui est également compatible avec la théorie d’ordre de financement hiérarchique. Toutefois, contrairement au résultat de la table T8A, nous constatons que les entreprises de grande taille disposent d’un volume plus important de lignes de crédit. C’est la méthode préconisée par Cole (2010), qui justifie ce choix par la manière dont la répartition des entreprises en quatre catégories a été effectuée. 4
51
LA REVUE DU FINANCIER Concernant l’impact du statut juridique de l’entreprise sur son levier, les résultats montrent que les sociétés par action (Corporation) disposent d’un volume plus important de crédit bancaire que les autres (T8C et T8D). Ceci peut être expliqué par la responsabilité limitée des propriétaires de ces structures face aux activités de l’entreprise. Lorsque l’on introduit la durée de la relation bancaire dans le modèle probit simple, nous constatons que cette dernière a un effet positif sur le volume du crédit bancaire utilisé (résultat non reproduit). La durée de la relation, par la réduction des asymétries d’information banquePME qui en découle, augmente la disponibilité du financement bancaire. Concernant l’impact des caractéristiques du propriétaire sur le volume de crédit utilisé, nous constatons que la part détenue par le propriétaire principal de l’entreprise et son âge influencent négativement son degré d’endettement. A contrario, le niveau d’expérience du propriétaire principal a un effet positif sur le volume de crédit contracté. De même, les propriétaires dotés d’un diplôme supérieur (college deg) semblent bénéficier d’un ratio d’endettement bancaire plus important. Concernant les variables indicatrices de discrimination, nous constatons que les propriétaires afro-américains disposent d’un volume moins important de dette bancaire de type relationnel dans leur bilan (T8A), mais d’un volume plus important de dette bancaire de type transactionnel (T8C). Les propriétaires de sexe féminin semblent contracter moins de financement bancaire que les propriétaires de sexe masculin (T8C, T8D). Par secteur, nous constatons que les firmes du secteur du transport disposent, contrairement à celles du secteur du commerce de détail, d’un volume de crédit bancaire plus important. En effet, le secteur du transport présente plus de garanties pour une banque que le secteur du commerce de détail, ce qui, dans une certaine mesure, contribue à diminuer la méfiance des banques et à faciliter l’accès aux crédits bancaires.
V - Conclusion L’objectif de cette recherche était d’étudier le comportement d’endettement des PME à partir des données de l’enquête NSSBF 2003. Nous nous sommes d’abord intéressée aux firmes non endettées pour identifier les facteurs explicatifs de l’absence d’endettement. Ensuite, pour celles qui ont recours à la dette externe, nous nous sommes intéressée aux facteurs susceptibles d’expliquer le choix du mode de financement (bancaire et/ou fournisseur). Nos résultats soulignent que les firmes non endettées sont, comparativement aux firmes endettées, plus petites, plus rentables, plus liquides, et enregistrent moins d’antécédents juridiques professionnels. Nous constatons également que les sociétés non endettées se situent le plus souvent dans le secteur des services et détiennent moins d’immobilisations corporelles. Ces résultats sont globalement compatibles avec la théorie d’ordre de financement hiérarchique. Les résultats montrent aussi que les entrepreneurs femmes et ceux issus de minorités raciales ont peu recours à la dette externe. Les firmes qui recourent à la dette fournisseur sont de taille importante, mais de faible liquidité, rentabilité et qualité puisqu’elles enregistrent davantage de défauts de paiement. Elles bénéficient de meilleures opportunités de croissance. Ces firmes sont moins présentes dans les secteurs des services et du transport. En ce qui concerne le volume de crédit fournisseur utilisé par ces firmes, nous relevons que ce dernier est positivement corrélé à la liquidité de la firme, à la part des actifs circulants dans le bilan et à sa faible qualité. Toutefois, plus le risque de crédit de l’entreprise diminue, moins important est son volume de dette fournisseur dans le bilan. Ces résultats sont généralement compatibles avec la théorie de l’avantage de financement par dette fournisseur. Notre étude fait également état d’un effet de discrimination selon la race et le genre du propriétaire principal. En effet, nous constatons que la dette commerciale est moins utilisée par les propriétaires afro-américains, hispaniques et asiatiques que par les propriétaires blancs (variable omise). Les propriétaires femmes utilisent également moins la dette 52
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES fournisseur que les propriétaires hommes. Toutefois, en termes de volume, les propriétaires afro-américains semblent utiliser un volume plus important de dette fournisseur. Concernant les firmes qui utilisent la dette bancaire, celles-ci sont de grande taille, moins rentables, moins liquides et plus opaques (plus jeunes) et disposent d’un volume important d’actifs corporels. La quantité de crédit bancaire utilisée par cette catégorie de firme est positivement corrélée à la tangibilité des actifs (cas des lignes de crédit) et à l’opacité de la firme, et négativement corrélée à la taille de la firme (à l’exception des lignes de crédit), à sa rentabilité et à sa liquidité. Ces résultats sont compatibles avec la théorie d'ordre de financement hiérarchique. Notre étude fait également état d’un effet de discrimination selon la race et le genre du propriétaire principal. Les propriétaires asiatiques et les propriétaires femmes utilisent moins de crédit bancaire que les autres. Les propriétaires afro-américains semblent avoir accès à un volume plus important de financement transactionnel que de financement relationnel. En ce qui concerne la relation entre la dette bancaire et la dette fournisseur, ces deux modalités de financement coexistent en même temps, et pratiquement dans la même proportion, dans la structure financière des PME; elles sont donc complémentaires (44,5 % de l’échantillon les utilisent simultanément). Toutefois, en période de restriction monétaire, le crédit fournisseur joue pleinement son rôle de financement de substitution, évitant l’asphyxie financière des PME confrontées au rationnement du crédit bancaire.
Annexe - Tableaux 2 à 8 Tableau 2 - Distribution des firmes selon le taux d’utilisation de la dette bancaire et de la dette fournisseur (T2A). No credit Obs (non pondérée) Obs (pondérée, millions) % (pondéré) TC only Obs (non pondérée) Obs (pondérée, millions) % (pondéré) BC only Obs (non pondérée) Obs (pondérée, millions) % (pondéré) TC & BC Obs (non pondérée) Obs (pondérée, millions) % (pondéré) Total Obs (non pondérée) Obs (pondérée, millions) % (pondéré) Taux cible de la Fed
1998
2003
608 1057 21,5 %
510 1033 19,1 %
660 1165 23,7 %
602 993 18,4 %
485 0,731 14,9 %
544 964 17,9 %
1575 1965 39,9 %
2096 2403 44,5 %
3328 4919 100 % 5,5 %5
3752 5393 100 % 1%
La variable No credit représente les firmes qui disent n’utiliser ni la dette bancaire ni la dette fournisseur. La variable TC only représente les firmes qui disent utiliser uniquement la dette fournisseur et ne pas utiliser la dette bancaire. BC only représente les firmes qui disent utiliser uniquement la dette bancaire et ne pas utiliser la dette fournisseur. TC & BC représente les 5
Taux cible de la Fed (target fed funds) au cours des trois premiers trimestres. 53
LA REVUE DU FINANCIER firmes qui disent utiliser simultanément la dette fournisseur et la dette bancaire. Nous utilisons la pondération car l’échantillon n’est pas aléatoire. T2B - Comparaison des taux de crédit. Moyenne Taux d’intérêt (a) Taux directeur de la réserve fédérale (b) Écart (a-b) Taux de refus
1998 9,37 % 5,23 % 4,14 % 22,6 %
2003 6,54 % 1,45 % 5,09 % 12,1 %
Selon les calculs de Cole (2010) à partir de la NSSBF 1998 et 2003 Tableau 3 - Statistiques descriptives des firmes et test de différence de moyennes (firmes endettées vs non endettées). Obs.
L’ensemble
No credit
Use credit
3752
510
3242
Différence
t-test
509789
89244
609501
-520257
-9,11
***
VENTES
1.135.816
203179
1.356.946
-1.153.767
-10,84
***
Rentabilité
1,0448
1,6203
0,9083
0,712
4,99
***
Liquidité
0,2362
0,3806
0,202
0,1786
10,66
***
Actifs circulants
0,3685
0,306
0,3834
-0,0774
-4,69
***
Actifs corporels
0,3657
0,291
0,3835
-0,0925
-5,59
***
Croissance ventes (+)
0,4130
0,3345
0,4317
-0,0972
-4,29
***
Corporation
0,4802
0,2862
0,5262
-0,24
-10,97
***
FAGE
14,2761
12,3725
14,7275
-2,355
-4,81
***
D&B credit score
3,5509
3,3864
3,5899
-0,2035
-3,36
***
F_Delinq
0,1693
0,067
0,1936
-0,1266
-9,68
***
F_MSA
0,8234
0,8596
0,8148
0,0448
2,66
***
P_AGE
51,1504
51,7435
51,0095
0,734
1,32
P_EXP
19,3191
16,6317
19,7849
-3,1532
-5,81
***
P_Femme
0,2196
0,3488
0,1891
0,1597
7,19
***
P_Asiatique
0,0405
0,0493
0,0384
0,0109
1,07
P_Afro-américain
0,0387
0,0651
0,0326
0,0325
2,86
***
P_Hispanique
0,0424
0,0573
0,0389
0,0184
1,69
*
P_College deg
0,2611
0,2708
0,2457
0,0251
1,19
P_Graduate deg
0,2011
0,2339
0,187
0,0469
2,34
**
P_Degree
0,4622
0,5047
0,4326
0,0721
3,01
***
P_Percent
0,8146
0,869
0,8053
0,0637
5,91
***
P_Delinq
0,1237
0,1072
0,1277
-0,0205
-1,37
Construction
0,1243
0,0615
0,1393
-0,0778
-6,34
***
Industrie
0,0799
0,0405
0,0893
-0,0488
-4,85
***
Transport
0,0418
0,0208
0,0468
-0,026
-3,55
***
Com. Gros
0,0633
0,0404
0,0688
-0,0284
-2,9
***
Com. Détail
0,2064
0,1922
0,2098
-0,0176
-0,93
Services
0,4839
0,6446
0,4459
0,1987
8,65
ACTIF
***
Les « Use credit » sont les firmes qui recourent à la dette (bancaire ou fournisseur). Les moyennes sont présentées pour l’ensemble de l’échantillon puis séparément pour les entreprises endettées et non endettées. La dernière colonne présente les résultats du test de différence de moyennes entre ces deux groupes (endettés et non endettés). ***, **, * indiquent que les statistiques sont significatives respectivement au seuil de 99 %, 95 % et 90 %. 54
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES
Tableau 4 - Les déterminants de l’endettement : « Use credit ».
Constante Ln (ventes) Rentabilité Liquidité Actifs corporels Croiss_ventes (+) Corporation Ln (FAGE) D&B credit score F_ Delinq F_ MSA Ln (P_AGE) Ln (P_EXP) P_Femme P_Asiatique P_Afro-américain P_Hispanique P_College deg P_Graduate deg P_Percent P_Delinq Industrie Transport Com. Gros Com. Détail Services
Probit bivarié Marg. effect t-stat -0,32 0,0627 15,49 -0,0097 -5,13 -0,0763 -4,04 0,0394 2,3 0,0098 0,96 -0,0014 -0,12 0,0091 1,1 0,0021 0,57 0,0539 3,47 -0,0242 -1,73 -0,099 -3,5 0,0092 1,05 -0,0265 -2,33 -0,0295 -1,17 -0,0092 -0,4 -0,0206 -0,84 -0,0187 -1,59 -0,0208 -1,6 -0,0156 -0,7 0,0138 0,83 0,0139 0,57 -0,0024 -0,08 -0,0132 -0,47 -0,0434 -2,16 -0,0486 -2,74
*** *** *** **
*** * *** **
* *
** ***
Probit simple pondéré Marg. effect t-stat -2,43 ** 0,0683 16,21 *** -0,0103 -5,47 *** -0,0907 -4,82 *** 0,0386 2,24 ** 0,0111 1,08 -0,0108 -0,95 0,0045 0,54 0,0035 0,97 0,0746 4,52 *** -0,0135 -0,99 -0,0463 -1,7 * 0,0024 0,28 -0,0196 -1,72 * -0,0612 -2,66 *** -0,0070 -0,31 -0,0361 -1,54 * -0,0195 -1,65 * -0,0235 -1,81 * 0,0002 0,01 0,0053 0,32 0,0035 0,13 -0,0281 -0,92 -0,0507 -1,81 * -0,0796 -3,72 *** -0,0722 -3,73 ***
Le tableau 4 présente les résultats d’une régression probit univarié afin d’expliquer les déterminants de l’endettement des PME. Les « Use credit » représentent les firmes qui disent utiliser l’endettement (bancaire ou fournisseur). ***, **, * indiquent que les statistiques sont significatives respectivement au seuil de 99 %, 95 % et 90 %.
55
LA REVUE DU FINANCIER Tableau 5 - Les déterminants de l’endettement par dette fournisseur : « Use TC »
Constante Ln (ventes) Rentabilité Liquidité Actifs circulants Croiss_ventes (+) Corporation Ln (FAGE) D&B credit score F_Delinq F_MSA Ln (P_AGE) Ln (P_ EXP) P_Femme P_Asiatique P_Afro-américain P_Hispanique P_College deg P_Graduate deg P_Percent P_Delinq Industrie Transport Com. Gros Com. Détail Services
Probit bivarié Marg. effect t-stat -1,16 0,0648 12,61 -0,0131 -5,19 -0,0696 -3,02 0,0219 1,09 0,0360 2,83 0,0367 2,64 0,0395 3,77 0,0077 1,75 0,1454 7,61 -0,0299 -1,82 -0,1062 -3,05 0,0119 1,05 -0,0280 -1,89 -0,0459 -1,55 -0,0729 -2,31 -0,0817 -2,99 -0,0244 -1,64 -0,0197 -1,21 -0,0111 -0,42 -0,0296 -1,45 -0,0610 -2,06 -0,1773 -5,19 -0,0912 -2,78 -0,1074 -4,47 -0,1634 -7,56
*** *** *** *** *** *** * *** ** *** ** * ** *** *
** *** *** *** ***
Probit simple pondéré Marg. effect t-stat -4,2 *** 0,0684 12,97 *** -0,0126 -4,68 *** -0,0699 -3,03 *** 0,0208 1,03 0,0384 3,04 *** 0,0409 2,96 *** 0,0355 3,4 *** 0,0082 1,84 ** 0,1463 7,58 *** -0,0275 -1,66 * -0,0073 -0,22 0,0059 0,52 -0,0292 -1,99 ** -0,0405 -1,36 -0,0666 -2,08 ** -0,0810 -2,89 *** -0,0239 -1,6 * -0,0233 -1,43 0,0088 0,33 -0,0268 -1,27 -0,0712 -2,39 *** -0,1897 -5,57 *** -0,1104 -3,35 *** -0,1147 -4,69 *** -0,1719 -7,74 ***
Le tableau 5 présente les résultats d’une régression probit bivarié afin d’expliquer les déterminants de l’endettement des PME conditionnel au recours à la dette bancaire ou à la dette fournisseur. Les « Use TC » sont les firmes qui disent utiliser la dette fournisseur au cours de l’année de référence. ***, **, * indiquent que les statistiques sont significatives respectivement au seuil de 99 %, 95 % et 90 %.
56
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES Tableau 6 - Les déterminants de l’endettement par dette bancaire : « Use BC » Probit bivarié Probit simple pondéré Marg. effect t-stat Marg. effect t-stat Constante -0,72 -2,99 *** Ln (ventes) 0,0935 17,82 *** 0,0980 17,76 *** Rentabilité -0,0116 -4,03 *** -0,0116 -4,01 *** Liquidité -0,1726 -6,89 *** -0,1636 -6,56 *** Actifs corporels 0,1158 5,59 *** 0,1253 6,09 *** Croiss_ventes (+) -0,0014 -0,12 0,0003 0,02 Corporation -0,0287 -2,01 ** -0,0308 -2,15 ** Ln (FAGE) -0,0386 -3,57 *** -0,0418 -3,88 *** D&B credit score -0,0033 -0,75 -0,0037 -0,82 F_Delinq 0,0570 3,09 *** 0,0546 2,88 *** F_MSA -0,0134 -0,86 -0,0130 -0,82 ln (P_AGE) -0,1595 -4,53 *** -0,0833 -2,41 *** ln (P_ EXP) 0,0042 0,36 -0,0048 -0,41 P_Femme -0,0249 -1,69 * -0,0220 -1,47 P_Asiatique -0,1138 -3,69 *** -0,0990 -3,2 *** P_Afro-américain -0,0339 -1,1 -0,0361 -1,14 P_Hispanique -0,0125 -0,39 0,0054 0,17 P_College deg -0,0580 -3,94 *** -0,0596 -4,02 *** P_Grad deg -0,0334 -1,99 ** -0,0393 -2,3 ** P_Percent 0,0651 2,47 *** 0,0718 2,7 *** P_Delinq -0,0110 -0,54 -0,0053 -0,26 Industrie 0,0103 0,35 0,0068 0,23 Transport 0,0194 0,54 0,0149 0,41 Com. Gros -0,0884 -2,91 *** -0,0936 -3,06 *** Com. Détail -0,1090 -4,71 *** -0,1124 -4,81 *** Services -0,0386 -1,84 * -0,0366 -1,73 * Le tableau 6 présente les résultats d’une régression probit bivarié afin d’expliquer les déterminants de l’endettement des PME conditionnel au recours à la dette bancaire ou à la dette fournisseur. Les « Use BC » sont les firmes qui disent utiliser la dette bancaire au cours de l’année de référence. ***, **, * indiquent que les statistiques sont significatives respectivement au seuil de 99 %, 95 % et 90 %.
57
LA REVUE DU FINANCIER Tableau 7 - Les déterminants du volume de la dette fournisseur utilisé : TC %
Variables Constante Ln (ventes) Rentabilité Liquidité Actifs circulants Croiss_ventes (+) Corporation Ln (FAGE) D&B credit score F_Delinq F_MSA Ln (P_AGE) Ln (P_ EXP) P_Femme P_Asiatique P_Afro-américain P_Hispanique P_College deg P_Graduate deg P_Percent P_Delinq Industrie Transport Com. Gros Com. Détail Services
Probit bivarié Coef. t-stat -0,2027 -1 0,0090 1,35 0,0023 0,51 0,0762 2,17 0,1982 7,02 0,0384 2,2 0,0584 2,99 -0,0239 -1,58 -0,0259 -4,31 0,0774 3,24 0,0183 0,84 0,0922 1,81 -0,0479 -2,7 -0,0123 -0,54 -0,0470 -1,07 -0,0474 -0,84 0,0121 0,26 0,0058 0,28 0,0256 1,06 0,0623 1,79 0,0023 0,08 -0,0729 -2,12 -0,0359 -0,78 -0,0193 -0,51 -0,0678 -2,39 -0,0697 -2,59
** ** ** *** * *** *** * ***
* **
** ***
Probit simple pondéré Coef. t-stat -0,0166 -0,11 0,0150 3,23 *** 0,0069 2,24 ** 0,0777 2,95 *** 0,1686 7,39 *** 0,0365 2,55 * 0,0500 3,1 *** -0,0114 -0,95 -0,0205 -4,01 *** 0,0838 4,03 *** 0,0240 1,31 0,0067 0,17 -0,0380 -2,86 *** -0,0088 -0,51 -0,0164 -0,47 0,1057 2,91 *** 0,0425 1,24 -0,0121 -0,72 -0,0029 -0,15 0,0476 1,62 * 0,0127 0,54 -0,0779 -2,5 *** 0,0277 0,72 -0,0320 -0,94 -0,0724 -2,89 *** -0,0738 -3,22 ***
Le tableau 7 présente dans la première colonne l’estimation d’une 2SLS (probit bivarié) et dans la deuxième colonne l’estimation d’une régression OLS pondéré, afin d’expliquer les déterminants du volume de crédit fournisseur utilisé, conditionnel au recours à la dette fournisseur. Le montant de la dette fournisseur utilisé est calculé à partir du bilan. Il est égal au montant des dettes fournisseurs sur total actif (DF/TA). ***, **, * indiquent que les statistiques sont significatives respectivement au seuil de 99 %, 95 % et 90 %.
58
LES DETERMINANTS DU COMPORTEMENT DE FINANCEMENT DES PME AMERICAINES Tableau 8 - Les déterminants du volume de la dette bancaire utilisé : BC %. Probit bivarié Probit simple BC conditionnel à LC conditionnel à BC conditionnel à l'utilisation de la dette l'utilisation de la dette l'utilisation de la dette OLS pondéré bancaire bancaire bancaire (T8A) (T8B) (T8C) (T8D) Dettes bancaires inscrites hors bilan Dettes bancaires inscrites dans le bilan Variables Coef. t-stat Coef. t-stat Coef. t-stat Coef. t-stat Constante 4,5782 1,91 ** 2,9434 6,33 *** 0,8936 1,35 0,2486 0,56 Ln (ventes) -0,1000 -1,58 * 0,1095 5,35 *** -0,0783 -3,14 *** 0,0015 0,11 Rentabilité -0,0775 -1,94 ** -0,0694 -2,34 ** 0,0380 2,64 -0,0022 -0,25 Liquidité 0,2951 0,81 -0,9404 -3,61 *** 0,0569 0,44 -0,0579 -0,72 Actifs corporels 0,1101 0,38 0,3457 1,68 * -0,0959 -1 0,0822 1,23 Croiss_ventes (+) 0,1757 0,99 0,0070 0,06 0,0777 1,34 0,0063 0,15 Corporation 0,2624 1,3 0,1117 0,82 0,1590 2,46 ** 0,1551 3,33 *** Ln (FAGE) -1,0360 -6,96 *** -0,4862 -4,61 *** -0,0652 -1,33 -0,0719 -2,07 ** D&B credit score -0,3106 -4,82 *** -0,0953 -2,07 ** -0,0011 -0,05 0,0037 0,25 F_Delinq 0,2729 1,07 0,2207 1,21 0,1860 2,36 ** 0,1845 3,07 *** F_MSA -0,0417 -0,18 -0,0209 -0,13 0,0190 0,26 0,0587 1,11 Ln (P_AGE) -0,2026 -0,35 -1,0614 -4,65 *** 0,2083 1,26 0,0936 0,83 Ln (P_ EXP) 0,3024 1,78 * 0,4209 3,71 *** -0,0699 -1,29 -0,0609 -1,58 P_Femme 0,0410 0,19 -0,2209 -1,4 -0,1738 -2,33 ** -0,1408 -2,83 *** P_Asiatique -0,2754 -0,51 -0,3877 -1,21 0,0297 0,2 -0,0205 -0,2 P_Afro-américain -0,2326 -0,5 -0,6784 -1,97 ** 0,4411 2,66 *** 0,1642 1,57 * P_Hispanique -0,1187 -0,24 -0,3327 -1,11 0,0133 0,1 0,0000 0 P_College deg 0,3602 1,7 * 0,1088 0,71 0,0957 1,36 0,0167 0,34 P_Graduate deg -0,3542 -1,44 -0,0746 -0,43 -0,1128 -1,39 -0,0422 -0,76 P_Percent -0,6908 -1,78 * -0,5229 -1,99 ** 0,0788 0,66 0,1152 1,35 P_Delinq -0,4026 -1,39 -0,3324 -1,59 0,2402 2,61 *** 0,2326 3,43 *** Industrie -0,2406 -0,62 -0,0163 -0,06 0,0637 0,54 -0,0362 -0,4 Transport 0,0856 0,17 0,0006 0 0,2947 2,12 ** 0,1093 0,99 Com. Gros -0,3583 -0,77 -0,1353 -0,45 -0,1606 -1,2 -0,2794 -2,85 *** Com. Détail -0,3998 -1,29 -0,4294 -2,09 ** 0,0461 0,46 -0,1086 -1,5 Services -0,0602 -0,21 -0,0124 -0,06 0,1265 1,43 -0,0689 -1,04
La T8A présente les résultats du modèle d’estimation 2SLS pour expliquer les déterminants du montant de crédit bancaire utilisé, conditionnel au recours à la dette bancaire. Le volume du crédit bancaire utilisé est égal à la somme des dettes bancaires de toute nature sur le total du bilan (ligne de crédit, crédit auto, crédit d’équipement, etc.). La T8B présente les résultats du modèle en prenant comme proxy au montant de la dette bancaire utilisé le volume des lignes de crédit rapporté au total bilan. La T8C présente les résultats d’un modèle d’estimation 2SLS en prenant en compte le montant des dettes bancaires inscrit dans le bilan. La T8D présente pour le même proxy les résultats d’un modèle OLS pondéré. ***, **, * indiquent que les statistiques sont significatives respectivement au seuil de 99 %, 95 % et 90 %.
59
LA REVUE DU FINANCIER
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