André CHARDONNET – Dominique THIBAUDON
Le guide du PDCA de Deming PROGR PR OGRÈS ÈS CON CONTIN TINU U ET MAN MANAGE AGEMEN MENT T
© Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2839-6
Chapitre
La philosophie de Deming
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« Cultive-toi sur le modèle de l’homme de bien, non sur celui de l’homme de peu » Confucius, Livre VI-11.
Éditions
1. Faire connaissance avec Deming ..................................................... 1.1. Ce prophète des temps modernes modernes .................................................... 1.2. Sa philosophie philosophie ..................................................................................... 1.3. Son influence influence en Europe ....................................................................
4 4 5 6
2. Approfond Approfondir ir sa doctrine doctrine ...................................................................... 2.1. Le système de connaissance connaissance approfondie approfondie de l’organisation l’organisation .......... 2.2. Voir l’activité l’activité en tant que système .................................................... 2.3. Comprendre Comprendre les variations variations dans l’organisatio l’organisation n ................................ 2.4. Progresser Progresser dans le management des hommes ................................
7 7 8 9 10
3. Analyser ses recommandations ........................................................ 3.1. Panorama Panorama des quatorze points de Deming ..................................... 3.2. Obligations Obligations commentées commentées du management d’après Deming... Deming... ......
10 11 12
4. Constater le retour en force de 4 principes de Deming .......... 4.1. L’approche L’approche processus (1950) (1950) ............................................................. 4.2. La cybernétique cybernétique « PDCA » (1950) ...................................................... 4.3. L’usage L’usage des statistiques et la théorie des variations ....................... 4.4. La psychologie psychologie des collaborateurs collaborateurs .....................................................
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Chapitre
La philosophie de Deming
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« Cultive-toi sur le modèle de l’homme de bien, non sur celui de l’homme de peu » Confucius, Livre VI-11.
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1. Faire connaissance avec Deming ..................................................... 1.1. Ce prophète des temps modernes modernes .................................................... 1.2. Sa philosophie philosophie ..................................................................................... 1.3. Son influence influence en Europe ....................................................................
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2. Approfond Approfondir ir sa doctrine doctrine ...................................................................... 2.1. Le système de connaissance connaissance approfondie approfondie de l’organisation l’organisation .......... 2.2. Voir l’activité l’activité en tant que système .................................................... 2.3. Comprendre Comprendre les variations variations dans l’organisatio l’organisation n ................................ 2.4. Progresser Progresser dans le management des hommes ................................
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3. Analyser ses recommandations ........................................................ 3.1. Panorama Panorama des quatorze points de Deming ..................................... 3.2. Obligations Obligations commentées commentées du management d’après Deming... Deming... ......
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4. Constater le retour en force de 4 principes de Deming .......... 4.1. L’approche L’approche processus (1950) (1950) ............................................................. 4.2. La cybernétique cybernétique « PDCA » (1950) ...................................................... 4.3. L’usage L’usage des statistiques et la théorie des variations ....................... 4.4. La psychologie psychologie des collaborateurs collaborateurs .....................................................
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1. FAIRE CONNAISSA CONNAISSANCE NCE AVEC DEMING1
1.1. Ce prophète prophète des temps modernes modernes William Edwards Deming est le célèbre qualiticien américain né en 1900 et décédé en décembre 1993. Docteur ès sciences de l’Université de Yale, en 1928, il se spécialise dans les statistiques. En 1935, il rencontre le fameux statisticien Shewhart, inventeur de la « carte de contrôle ». Ce personnage était connu de Deming car il était l’auteur d’un ouvrage reconnu, Economic Control of Quality of Manufactured Product . C’est pour Deming l’occasion d’étudier en détail la théorie de la stabilité des systèmes. En effet, Shewhart la conçoit non seulement comme une application mathématique pour l’étude des processus industriels mais aussi comme une organisation du management de l’époque. En 1938, conseiller scientifique au Bureau Bureau nation national al du recens recenseme ement, nt, il fait fait appliq appliquer uer ces principes principes d’échantillonnage et, en 1942, il est détaché au ministère de la Guerre pour y enseigner les méthodes de Shewhart aux industriels afin d’améliorer la qualité des matériels militaires. Il y délivre ses cours pendant toute la durée de la guerre. À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, en 1946, il participe à une mission au Japon. Le « Department of Defense » lui demande une étude économique en vue de faire repartir les rouages industriels du Japon. Au cours de ce voyage, il tombe amoureux de ce pays. À Tokyo, il rencontre des statisticiens et des fondateurs fondateurs de la JUSE, la grande grande association association des ingénieurs japonais. japonais. C’est ainsi que Deming, invité par cette association, donne une série de cours aux plus hauts dirigeants dirigeants de l’industrie l’industrie japonaise japonaise en 1950. 1950. Jusqu’en Jusqu’en 1980, Deming se rendra vingt fois au Japon et sera le témoin de la formidable mutation qu’il a contribué à déclencher. En 1960, l’empereur Hirohito lui remet, ainsi qu’à un de ses collègues, le docteur ingénieur Joseph Juran, Juran, la médaille médaille du Trésor Trésor sacré. Enfin, le Japon donnera donnera son nom au Prix Qualité Qualité pour les industriels industriels japonais japonais : le « Deming Prize ». ». On pourrait même penser, au vu de la signification en mandarin des deux syllabes qui composent « Deming », que ce personnage était prédestiné à être accepté dans cette partie du monde.
1. Pour faire plus connaissa connaissance nce avec William William Edwards Deming, vous pouvez consulter consulter le site internet internet http://www.deming.org aux USA (The W. Edwards Deming Institute) ou en France http://fr-deming.org pour l’Association Française Edwards Deming.
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« dé » en chi chinoi nois s : ve vertu rtu,, mor morali alité, té, cœu cœur, r, vol volont onté é (ce (c e qu quii ac acco comp mpag agne ne la vo voie ie,, le « tao tao ») « te te » (en jap japon onais ais : voi voie, e, aid aide) e)
« míng míng » en chi chinoi nois s : lum lumine ineux, ux, cla clair, ir, dis distin tinct ct (éclairem (éclai rement ent au sen sens s d’i d’inte ntellig lligenc ence e des cho choses ses)) « min » (en jap japona onais is : mêm même e sig signif nifica icatio tion) n) Figure 1.1. Un nom prédestiné prédestiné pour le Japon et la Chine
Pendant tout ce temps, toutefois, ce « prophète des temps modernes » reste inconnu dans son pays. Pourtant, en 1975, les économistes sont formels, la qualité des produits japonais de grande diffusion a dépassé la qualité des produits occidentaux et américains. En juin 1980, la chaîne de télévision NBC diffuse un programme intitulé « Et si le Japon y arrive, pourquoi pas nous ? ». On y relate que Monsieur Deming, un ex-professeur de mathématiques, responsable de l’amélioration de la qualité d’un grand nombre de produits japonais, vit aux États-Unis dans une petite maison de Washington. Aussitôt, cette émission rencontre un fort impact et Deming devient célèbre, aux États-Unis, du jour au lendemain. En 1982, il édite son fameux ouvrage Out of the Crisis. Au cours de la décennie 1980, il devient conférencier international et forme, grâce à ses séminaires de quatre jours, plus de 50 000 cadres supérieurs pour la plupart américains. Les Anglo-Saxons se mettront très vite à l’application de ses préceptes, mais les autres Européens seront plus réticents à son enseignement.
1.2. Sa philosophi philosophie e Pour faire comprendre sa conception du management, Deming n’a de cesse d’étayer sa théorie avec de multiples exemples concrets vécus. Dans son enseignement, il se focalise toujours sur deux éléments : le client et l’individu dans l’entreprise. Sa réflexion est, bien sûr, nourrie de centaines d’observations collectées au cours des quara quarante nte années pass passées ées au contac contactt des industriels industriels japonais, américains et européens. Éditions
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Sa philosophie qu’il caractérise en une phrase : « Pour aller vers un nouveau style de management », s’appuie sur deux démarches fondamentales : Acquérir des connaissances approfondies du fonctionnement des organisations, pour en comprendre les principes ; il appelle cela « System of Profound Knowledge ». Se doter de bonnes pratiques de management, qu’il résume en quatorze points, « Fourteen Points », ceux-ci n’étant qu’une mise en application des thèmes du système de connaissance approfondi qu’il propose.
1.3. Son influence en Europe À l’invitation de Jean-Marie Gogue, il viendra plusieurs fois en Europe. En France, ses conférences n’auront pas un grand retentissement, seuls les Anglais lui feront honneur et lui permettront de former plus de 8000 managers. Certains ont dit qu’en France la langue anglaise a constitué une barrière à la diffusion de ces thèses, ce que nous ne croyons pas ; nous pensons plutôt que les dirigeants français n’étaient pas prêts à écouter des préceptes qui n’étaient pas ceux de la culture des années 1980. Toujours est-il que Deming ne fera qu’une seule conférence à Paris, en novembre 1989. Un collègue de Deming au Japon, le docteur Joseph Juran, lui aussi qualiticien et conférencier, a été bien mieux accueilli dans notre pays. Moins conceptuels et plus pragmatiques que ceux de Deming, ses principes d’assurance qualité collaient tout à fait aux idées qui avaient cours en France, à savoir, mettre des systèmes qualité en place pour surveiller la qualité des produits et des process. Pour notre part, nous sommes reconnaissants à Deming, de culture américaine par éducation, de culture japonaise par expérience et de culture occidentale par réflexion, de nous avoir transmis, comme l’a fait Descartes à son époque, le bon « discours sur le management » au travers de ses célèbres « Quatorze points ». Le Mouvement Français pour la Qualité, des auteurs comme J.-M. Gogue, ou d’autres qualiticiens, ont été porteurs de ce fameux cycle de l’amélioration continue, ce qui fait qu’aujourd’hui, le management par le « Cycle PDCA » est relativement connu, même si on en parle encore peu dans les écoles de management. On découvre aujourd’hui que ce concept fondamental est un principe de conduite managériale très simple et universel, comme le sont souvent les grandes lois. Le cycle de Deming est aussi un outil puissant dont l’ombre portée sur le management devient un formidable principe d’action, applicable aussi bien aux systèmes qu’aux hommes. 6
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2. APPROFONDIR SA DOCTRINE
2.1. Le « système de connaissance approfondie » de l’organisation Pour Deming, la voie de l’amélioration dans l’entreprise passe par un travail de réflexion requérant quelque recul avec les pratiques et par la transformation de son fonctionnement. Les points qu’il aborde convergent toujours vers une double réflexion d’analyse du management : sur l’organisation en tant que système et sur le personnel en tant qu’individus. Deming explique bien évidemment l’activité et l’organisation de façon « systémique », en se focalisant sur l’étude des variations de données et du système de production. L’approche qu’il recommande, pour le rôle et le comportement de l’individu dans ce système, ne peut être que managériale, psychologique et d’amélioration du savoir. Quatre parties interdépendantes sont développées dans cette méthode de connaissance approfondie, qu’il dénomme « The profound knowledge ». Si nous essayons de les résumer en quelques lignes, nous découvrons une progression de la réflexion qui va du système à l’individu. Deming nous oblige à parcourir l’entreprise en étendue et en profondeur. a) L’activité de l’entreprise et son organisation est un système dédié à la satisfaction du client pour sa propre pérennité. Le système de management en est le moteur principal. b) Tout système est sujet à des variations qu’il s’agit d’observer et dont il faut tirer parti. L’analyse statistique permet de trier entre les causes spéciales et les causes communes de variations afin d’apporter les solutions appropriées aux problèmes à résoudre. c) L’adéquation des compétences aux activités est une exigence constante. De ce fait, le savoir de l’entreprise est à renouveler sans cesse. Il faut donc former les individus, développer leurs connaissances et capitaliser le savoir et le savoir-faire, pour tous les niveaux hiérarchiques de l’entreprise. d) L’accélération des changements culturels et socio-techniques provoque des inadaptations et des réactions chez les employés. Elles sont néfastes à l’activité et augmentent le stress. Une nouvelle mission du management consiste à écouter ces nouveaux besoins et à y apporter des solutions.
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Figure 1.2. The Deming System of profound knowledge 1
On peut donc résumer la philosophie de Deming en deux idées majeures, s’appuyant sur deux composantes du savoir : la compréhension et la connaissance. Il est nécessaire de bien comprendre les mécanismes fondamentaux de l’entreprise (qu’il dénomme système) et de bien prendre en compte la psychologie des employés. Il est essentiel d’être compétent, sans être un expert, dans la théorie des variations et des méthodes d’acquisition du savoir, pour leur mise en pratique.
Dans notre culture cartésienne, nous pourrions dire qu’il faut un peu de savoir et beaucoup de savoir-faire, ça évite l’intellectualisme.
2.2. Voir l’activité en tant que système Dans son ouvrage Out of the Crisis, paru en 1982, Deming fait état des communications qu’il a exposées au Japon en 1950 et explique « pourquoi l’amélioration qualité a pour résultat une réaction en chaîne » : 2 Improve quality costs decrease (less rework, fewer delays) capture the market with better quality and lower price stay in business provide jobs and more jobs...
1. Source : W. Edwards Deming, « The New Economics », Massachusetts Institute of Technology – MIT Press Editeur, 1997. Reproduction autorisée. 2. Source : « Hors de la crise », Editions Economica, 1991, Traduction Jean-Marie Gogue de l’ouvrage « Out of the Crisis », W. Edwards Deming.
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Figure 1.3. Réaction en chaîne
L’amélioration de la qualité dans le système, assure-t-il, a pour conséquence une diminution des coûts de production (moins de rebuts et de retards). La productivité augmente ainsi que la satisfaction des clients grâce à une meilleure qualité. La fidélisation des clients et des prix plus faibles permettent de gagner de nouvelles parts de marché. L’entreprise reste compétitive sur le marché et elle peut créer de nouveaux emplois. Deming a particulièrement insisté sur le fait que l’activité devait être comprise comme un système et la production comme un processus. Ce concept simple a permis aux Japonais de capturer de nouveaux marchés pendant plus de vingt ans.
2.3. Comprendre les variations dans l’organisation Cette démarche a pour objet de parvenir à comprendre comment créer un produit et un service afin de réaliser une croissance continue, d’innover et d’accroître ses parts de marché. Il est parfaitement légitime de rechercher à proposer plus de produits avec des flux plus tendus mais il faut que les capacités et l’organisation industrielle suivent en « coûts, qualité, flux et tenue des délais », sinon le système global perd de l’efficacité. Selon Deming, ce changement passe par la prise en compte de « la théorie des variations », pour gérer les événements aléatoires. Une coopération intelligente avec ses concurrents, et non pas une concurrence exacerbée, peut être vitale pour la réussite de l’entreprise et l’intérêt du client.
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2.4. Progresser dans le management des hommes Les managers doivent donc explorer les causes des problèmes et des erreurs, et amener l’organisation à opérer des changements dans le système, en s’appuyant sur le personnel. Il faut rendre aux collaborateurs leur autonomie (ce qui ne veut pas dire indépendance, mais interdépendance) et fierté dans le travail accompli. Comme bon nombre de dirigeants le font aujourd’hui, il s’agit de remplacer les évaluations individuelles annuelles – ces examens de fin d’année – par des entretiens d’évaluation des performances et de développement des compétences, ce dernier complété d’un accompagnement individuel. La clé de ce changement, c’est la psychologie. Aujourd’hui, des entreprises n’hésitent pas à recourir à des psychosociologues dans leur démarche de changement de culture ou pour le développement de l’autonomie dans l’entreprise. Les organisations sont devenues matricielles, les projets transverses télescopent les métiers et les managers doivent négocier avec les spécialistes. Au carrefour de tout cela, les opérateurs essaient de trouver leur place. Quel développement de l’autonomie leur est-il réservé ? Comment sont-ils accompagnés dans ces changements ? Les démarches de développement des connaissances et de « coaching » apportent une première réponse. Deming faisait remarquer, suite à ses observations sur le management japonais, l’importance du fonctionnement « au consensus » ou « bottom-up ». Des spécialistes de ces questions en psychosociologie d’entreprise expliquent, comme Deming, l’importance que revêt, dans tout changement, la prise en compte du point de vue psychologique des individus. Il s’agit de parer aux risques de rejets ou de retour très rapide aux états antérieurs, pouvant occasionner une perte de crédibilité du changement et une régression en matière de confiance dans le management. Nous reviendrons sur ce point dans la deuxième partie de cet ouvrage.
3. ANALYSER SES RECOMMANDATIONS « Cette nouvelle efficacité que je vous propose », annonce Deming, « s’adresse à tous ceux qui vivent sous la tyrannie d’un style de management dominant ». De ce « Système de connaissance approfondi » découlent quatorze points de bonnes pratiques managériales. Les thèmes abordés constituent une aide à la réflexion au niveau stratégique et un outil d’ouverture au changement. En voici une traduction avec des commentaires extraits de son livre.
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3.1. Panorama des quatorze points de Deming 1 Nous allons tout d’abord laisser la parole à William Edwards Deming, en anglais, nous commenterons ensuite en français. DEMING’s fourteen points 1
Create constancy of purpose towards improvement of product and service.
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Adopt the new philosophy. We are in a new economic age. Western management must awaken to the challenge, must learn their responsibilities, and take on leadership for change.
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Cease dependence on inspection to achieve quality. Eliminate the need for inspection on a mass basis by building quality into the product in the first place.
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End the practice of awarding business on the basis of price tag. Instead, minimize total cost. Move towards a single supplier for any one item, on a long-term relationship of loyalty and trust.
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Improve constantly and forever the system of production and service, to improve quality and productivity, and thus constantly decrease costs.
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Institute training on the job.
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Everybody must accomplish personal transformation to adopt the principle of system.
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Drive out fear, so that everyone may work effectively for the company.
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Break down barriers between departments. People in research, design, sales and production must work as a team, to foresee problems of production and in use that may be encountered with the product or service.
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Eliminate slogans, exhortations, and targets for the work force asking for zero defects and new levels of productivity.
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Eliminate work standards (quotas). Substitute leadership.
11b
Eliminate management by objective. Eliminate management by numbers.
12a
Remove barriers that rob people of their right to pride of workmanship.
12b
This means, inter alia, abolishment of the annual or merit rating and of management by objective, management by the numbers.
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Institute a vigorous program of education and self-improvement.
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Everybody in the company will work to accomplish the transformation. The transformation is everybody’s job.
Figure 1.4. Deming’s fourteen points
1. Source : W. Edwards Deming, « Out of the Crisis », Massachusetts Institute of Technology – MIT Press Editeur, 1992. Reproduction autorisée.
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Pour Deming, il s’agit là d’une suite de points essentiels qu’il est important de ne pas oublier : « Il ne faut pas chercher de chronologie de priorités dans cette suite, ils sont tous d’égale importance, même s’il faut travailler beaucoup plus sur certains, par exemple l’étude des variations. » Ces quatorze points sont relatifs, dit-il, « aux maladies mortelles du management ». Il répétera sans cesse que ce n’est pas là prêcher une nouvelle morale mais, au contraire, apprendre à maîtriser en permanence la qualité des produits et des services pour donner aux clients la meilleure satisfaction possible et que l’on n’y parvient pas à coup d’exhortations ni à coup d’objectifs arbitraires. Voyons ces quatorze points, auxquels nous ferons appel très souvent, tout au long de ce livre et pour lesquels nous donnons nos interprétations. Deming nous dit qu’il ne suffit pas de faire des efforts pour résoudre les problèmes. Il faut agir sur plusieurs niveaux et dans plusieurs directions à la fois. Pour cela, il nous propose 14 points, un peu comme Philip Crosby suggérait, en 1985, un programme pour nous vacciner contre le virus de la non-qualité.
3.2. Obligations commentées du management d’après Deming... 3.2.1. Avoir des buts constants d’amélioration des produits et des services – le client est le point focal de l’activité – les enjeux de l’activité sont les objectifs du management – la politique qualité et productivité est le levier de l’innovation – les buts constants d’amélioration sont reportés le plus en amont possible, vers la conception des produits et des services – l’allocation des ressources en recherche et en formation doit être suffisamment budgétée 3.2.2. Adopter une nouvelle philosophie du changement – les décennies actuelles s’inscrivent dans un contexte économique à contraintes fortes, et soumis à la mondialisation – le management doit prendre conscience de ce challenge – le management a de nouvelles responsabilités, plus étendues – le management doit s’engager comme leader du changement – le management doit voir la satisfaction de ses clients au travers de la tenue des délais et de la conformité
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3.2.3. Alléger les systèmes de contrôle – le niveau qualité des produits ne peut pas dépendre de la sévérité des contrôles – les contrôles sont à ramener le plus en amont possible dans le cycle de vie – les auto-contrôles sont préférables aux services Contrôle dédiés – les inspections de routine sont coûteuses car trop tardives – les inspections de routine sont redondantes et peu efficaces – préférer les démarches de conception robustes basées sur la capabilité – introduire les mesures statistiques dès la conception pour avoir accès aux analyses de variabilités 3.2.4. Mettre fin aux pratiques de sélection par les coûts – ne pas prendre en compte le seul coût d’achat mais le coût d’acquisition global – la concurrence par les prix est une vue restrictive – la pratique de sélection des fournisseurs par les prix est une mauvaise pratique – préférer des démarches de coopération et de relation à long terme avec les fournisseurs, avec des contrats de progrès et des approvisionnements en assurance qualité fiabilisée – pratiquer des politiques fournisseurs sélectives selon un principe de source unique – une direction des achats doit être à fort niveau de compétences – les fournisseurs doivent être évalués sur la base des 14 points 3.2.5. Améliorer constamment tous les processus – la cartographie des processus de production est nécessaire – l’entreprise peut tirer avantage à mieux connaître ses processus supports – la qualité des produits est principalement déterminée dès la conception – les processus doivent être en état de maîtrise « Sept M » 1 ; confère chapitre 5, § 1.3 « Les sept outils de travail en groupe » – l’avantage des processus mis sous système Kanban et JAT est d’imposer une discipline au dispositif de production 3.2.6. Mettre en œuvre un système de formation adapté ... et répondre aux questions suivantes : – pourquoi faut-il mieux connaître sa société, ses clients, ses fournisseurs ? – comment mieux discerner les problèmes qui privent les employés de la possibilité d’être satisfaits de leur travail, et donc de reconnaissance ? 1. « Machines, Milieu, Matières premières, Main-d’œuvre, Méthodes, Mesures et données, Management ».
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– comment être plus pédagogue vis-à-vis des dyslexiques, des dysphasiques et des dysorthographiques ? – comment mettre en concordance formation professionnelle et besoins des clients ? – comment transformer l’investissement formation en valeur ajoutée voire en actif du bilan ? – pourquoi améliorer la compréhension des processus et comment renforcer la connaissance de leurs variations ? – comment rendre le personnel davantage co-acteur sur les processus ? – comment améliorer l’efficacité des actions d’amélioration et des résolutions de problèmes par l’utilisation plus systématique de méthodes et d’outils ? – comment maintenir à niveau les compétences compte tenu des changements dans les techniques de production ?
3.2.7. Développer le leadership et l’accompagnement pratique – le management ne consiste plus à commander et à contrôler mais à diriger, entraîner et accompagner. L’action de déploiement est essentielle – l’encadrement a pour mission de donner au personnel toute l’aide nécessaire pour que les processus soient les plus efficaces – le management doit travailler sur les sources d’amélioration et sur les projets concernant la qualité des produits et des services 3.2.8. Faire disparaître les craintes, encourager une réelle communication ... en s’attaquant à : – la peur du changement et de ses conséquences – la peur de prendre de nouvelles délégations, par exemple, de faire son auto-contrôle alors qu’il y avait auparavant des contrôleurs – la peur, pour des ouvriers, de ne pas réussir une formation, et, pour les plus âgés, de ne pas comprendre assez vite – la peur d’une formation, pour certains cadres, qui les oblige à se remettre en question – la peur des relations internes contractualisées : la peur d’être le client de quelqu’un d’autre dans l’entreprise (alors qu’il n’y a pas de peur d’être fournisseur) – mais aussi la crainte de ne rien voir changer une fois les actions de formation et de sensibilisation passées – la crainte de s’exprimer alors qu’on n’a pas été écouté depuis des mois, des années, ou de dire quelque chose qui se retourne contre soi – la crainte d’avoir un entretien individuel où seul le chef s’exprime – la crainte d’une communication unilatérale – la crainte de ne plus avoir de chef dans une organisation matricielle – la crainte de parler dans une démarche d’autonomie 14
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– la crainte de prendre des responsabilités – la crainte d’être en position plus risquée...
3.2.9. Renverser les barrières entre services et favoriser le travail d’équipe – barrières entre services techniques et services de production – barrières entre services de production et services supports – barrières dans la circulation des informations – barrières dans les mentalités pour le travail en projet – barrières géographiques naturelles entre les bureaux et les ateliers – barrières pour le travail en équipe quand l’évaluation annuelle se fait au mérite – barrières dans l’activité de travail en équipe, car ceux qui aident sont quelquefois moins bien notés que ceux qui ne font que leur travail – barrières entre services pour les stocks 3.2.10. Éliminer les slogans et les exhortations – remplacer les slogans qui incitent à augmenter la productivité par des plans d’actions clairs – les exhortations au zéro défaut ne sont que du verbiage si elles ne sont pas accompagnées de plans d’actions et de méthodes pour améliorer et changer – éliminer les affichages ridicules aux yeux du personnel, notamment ceux qui sont en contradiction avec la réalité quotidienne. Deming soutient que les exhortations et les affiches n’engendrent que des frustrations et des ressentiments – ce sont les « Sept M » qui sont responsables de la qualité des produits et des services, les opérateurs ne sont pas les seuls en cause – les tableaux de bord et les indicateurs tenus par les opérateurs doivent devenir leur propriété – les objectifs clairs promeuvent la responsabilisation, qui, elle-même, entraîne une bonne conduite managériale et un personnel motivé – ne pas oublier que 80 % de la non-qualité d’une entreprise provient d’actions de management 3.2.11. Éliminer les quotas de production pour les ateliers et les objectifs chiffrés sans méthode, pour les cadres – Deming insiste beaucoup sur ce point qui renvoie les managers à leurs chères études de management (techniques traditionnelles) – les quotas et les objectifs chiffrés sont un management par la crainte – Deming explique qu’il est futile d’établir des objectifs et des quotas basés sur les moyennes, quand il est tellement aisé de faire mieux – les quotas et les rendements sont une barrière au progrès continu Éditions
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– les entreprises qui fonctionnent aux quotas créent des postes fictifs qui entrent dans le calcul des quotas – il faut bien des objectifs chiffrés pour les cadres, mais ont-ils vraiment un sens en recherche et développement ? en productivité ? en coûts de garantie ? si l’on ne fixe pas les règles du jeu pour les établir – quelle crédibilité peut-on attribuer à des objectifs chiffrés sans méthode ni allocation de moyens pour les atteindre ? – Deming invite les dirigeants à fixer plutôt des objectifs sur la réduction des variabilités du système et à inciter les cadres à exploiter tout le potentiel de ce dernier – Il recommande aux cadres dirigeants de s’occuper du système sur le long terme plutôt que de fixer des objectifs au personnel sur le court terme
3.2.12. Supprimer tous les obstacles à la fierté du travail – les quotas, qui sont une incitation à produire des produits défectueux – l’évaluation des performances, l’estimation au mérite – les causes de non-qualité identifiées que l’on ne supprime pas et le gas pillage qui s’ensuit – les produits réalisés mais non conformes car il faut avant tout « tenir le rendement » – les défauts de communication (dont certains frôlent la faute professionnelle) – le travail de mauvaise qualité ou inutile – la non-reconnaissance 3.2.13. Favoriser « l’éducation » et l’amélioration de chacun – Deming rappelle qu’il n’y a pas, en général, de pénurie de gens valables, seulement peut-être sur des postes très pointus... – le progrès est toujours fondé sur la connaissance : l’éducation et la formation doivent donc être continues et adaptées – tout le management de l’entreprise a besoin d’une plus-value culturelle appelée par Deming « une nouvelle éducation » et doit notamment améliorer son savoir sur la connaissance approfondie du système, « the profound knowledge » – encourager les efforts culturels pour le plus grand nombre en combinant la formation professionnelle et la formation plus générale – l’entreprise a besoin de personnel qui s’instruise constamment, le personnel étant considéré comme sa vraie richesse 3.2.14. S’assurer du déploiement de la démarche d’amélioration et de l’implication de chacun dans le processus de changement – Deming pense qu’une direction doit s’engager sur une charte basée sur les points précédents 16
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– un noyau dur de managers est le vecteur nécessaire pour s’attaquer aux maladies mortelles qui affectent les entreprises – la formation et l’éducation sont les moyens qui permettront la mise en œuvre du changement – la direction doit exercer son leadership dans la voie du changement et dans le suivi de sa mise en œuvre – une des raisons d’être de la direction est d’amener l’entreprise à progresser – « Commencer, dit Deming, à construire le plus tôt possible, mais sans trop se presser, une organisation qui guidera une amélioration continue de la qualité. » – « Le cycle PDCA est une procédure très utile pour tous, pour suivre l’amélioration à toutes les étapes dans tous les processus. » « I know you believe you understand what you think I said, but I am not sure you realize that what you heard is not what I meant. » Je sais que vous croyez que vous comprenez ce que vous pensez que j’ai dit, mais je ne suis pas sûr que vous réalisez que ce que vous avez entendu n’est pas ce que je voulais dire.
4. CONSTATER LE RETOUR EN FORCE DE 4 PRINCIPES DE DEMING
Figure 1.5. Retour en force des 4 principes de Deming
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L’approche processus proposée par la nouvelle norme ISO 9000 version 2000 remet au goût du jour l’activité technique et industrielle, en redécouvrant le système de Deming. La méthodologie « Six sigma » reprend à la fois la cybernétique PDCA et l’emploi des techniques statistiques avec l’aide d’outils logiciels faciles et adaptés. Enfin, la psychologie des acteurs n’est plus à négliger avec les effets induits par les changements rapides dans les entreprises ou dans les organismes. Il y a des changements de culture qui doivent être opérés avec du « coaching ». Cet accompagnement du personnel et de l’encadrement est particulièrement intéressant pour aider au fonctionnement des organisations matricielles et pour adapter le travail en équipe (team-building). Voilà les nouvelles pers pectives qui s’offrent à nous dans ces entreprises qui désirent réagir plus vite et rester dans la compétition et sur le marché.
4.1. L’approche processus (1950)
Figure 1.6. Activité de production considérée comme un système 1
Ce graphique fait apparaître pour la première fois « la production » comme un système. Deming dit l’avoir utilisé, en 1950, pour expliquer à des directeurs généraux japonais la nécessité d’améliorer la qualité sur toute la ligne de production depuis les matières premières jusqu’aux client et utilisateur final. 1. Source : W. Edwards Deming, « The New Economics » – MIT Press Editeur, 1997. Reproduction autorisée.
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Ce « flugramme » ne vous rappelle-t-il pas quelque chose ? « Ah si, mais c’est... bien sûr ! », un schéma de processus type ! Examinez attentivement les dépliants des consultants en organisation industrielle : vous y retrouverez ce graphique qui sert de trame à leur présentation quand ils vous expliquent et vous décrivent les flux de la Supply Chain du dernier progiciel « ERP »1 pour lequel ils sont censés vous aider à faire le choix d’investissement. Deming commentait ainsi ce diagramme de processus de production : « C’est ce diagramme des flux qui donne le départ de l’amélioration. Sur la partie gauche, les matières premières et les équipements ; j’ai expliqué qu’il était nécessaire de travailler avec les fournisseurs sur le long terme pour améliorer la qualité et réduire le prix de ces produits, dans un esprit de confiance et de loyauté en les considérant comme des partenaires... » « Le client est le point le plus important de la ligne de production, la qualité a pour but de satisfaire les besoins du client, présents et futurs... » Voyons comment Deming évoque sa pédagogie : « Les directeurs apprenaient quelles étaient leurs responsabilités en matière d’amélioration à tous les stades, les ingénieurs apprenaient les leurs. Ils apprenaient des méthodes simples mais puissantes permettant de détecter l’existence des causes des variations spéciales. » « Ils apprenaient que l’amélioration continue des processus est essentielle... L’amélioration de la qualité devint, dès lors, pour les Japonais à qui j’enseignais ces concepts, un impératif général, comprenant toutes les activités industrielles : les études de marché, la conception, les approvisionnements, l’instrumentation, l’industrialisation, la production et la distribution. » Aujourd’hui, on se situe complètement dans cette optique : les ERP ont pris possession des grandes entreprises, l’ISO 9000 vient de s’organiser sur les « processus orientés clients ». Plus de vingt ans après la lecture de cette phrase majeure « ... ils apprenaient que l’amélioration continue des processus est essentielle », l’ISO 9001 vient de la faire sienne et de la porter au rang de norme internationale. Après ce constat pourra-t-on encore écouter sans réagir ceux qui disent, à propos de Deming, « c’est dépassé ! » ou bien « c’est du passé » ou encore ceux qui le qualifient de « has been ». Dans son dernier livre The New Economics for Industry, Government, Education, Deming présente cette démarche comme une méthode d’améliora1. ERP : Enterprise Resource Planning (planification des ressources de l’entreprise).
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tion : elle correspond au besoin minimal de culture managériale, pour faire des progrès au niveau de l’organisation des entreprises et changer le management au niveau des hommes.
4.2. La cybernétique « PDCA » (1950) Dès 1950, Deming introduit la dynamique de l’amélioration continue, qu’il avait découverte dans le principe des études statistiques dans le cycle de Shewhart. Le Japon l’a retenu sous le nom de « cycle PDCA de Deming ». C’est bien plus tard en Amérique, et maintenant en Europe, que l’on a découvert toute la puissance de cet outil très simple et porteur d’une méthode.
Figure 1.7. La cybernétique PDCA
Le terme de « cycle » suggère qu’à l’issue du contrôle des résultats, si l’objectif n’est pas atteint, il y a lieu d’interpréter les écarts et de comprendre les tendances. Le cycle se déroule une nouvelle fois avec un nouvel objectif, jusqu’à ce que soient atteints et compris les nouveaux résultats.
4.3. L’usage des statistiques et la théorie des variations Nous avons repris ci-après le dessin très simple de la « carte de contrôle » que Deming a présentée dans toutes ses conférences. Que veut-il nous faire découvrir dans ce schéma ? Pourquoi insiste-t-il tant sur la théorie des variations ? « Il y a deux erreurs fréquentes, écrit-il, dans l’attribution d’un défaut et dans la prise de décision pour améliorer une situation. » 20
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o
Erreur n 1 :
« Réagir à un résultat comme s’il provenait d’une cause spéciale, alors qu’il vient en réalité d’une cause commune de variation. » o
Erreur n 2 :
« Traiter un résultat comme s’il venait d’une cause commune de variation, alors qu’il provient en fait d’une cause spéciale de variation. »
La réflexion sur la variance doit précéder la réflexion sur la démarche réactive et le traitement des actions. Tout processus a des données de sortie mesura bles qui permettront au produit d’entrer dans des limites contractuelles : les spécifications. Au-delà des limites supérieure et inférieure de contrôle, calculées statistiquement et inhérentes au procédé, il y a lieu d’intervenir pour ramener le processus à l’intérieur des limites. Il faut faire ressortir les causes communes des causes spéciales.
Figure 1.8. Causes communes
La première des précautions est de vérifier qu’il n’y a rien d’anormal au
niveau du processus, ce qui dans la plupart des cas entraîne un résultat « normal », la loi de distribution autour de la moyenne étant gaussienne. On dit alors que le processus est sous contrôle statistique, c’est le fondement du SPC (Statistical Process Control) : la maîtrise statistique des procédés. En jouant sur les mots et en langage direct, on peut dire : « un processus normal donne une loi normale ».
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de bien distinguer, dans les variations, celles qui sont issues de causes communes et celles qui sont issues de causes spéciales. 1 Sont de « causes communes » les variations qui occasionnent des défauts ou des erreurs dus au hasard et provenant du système. En cela, elles provoquent des variations aléatoires autour d’une moyenne. Elles s’inscrivent dans les limites de la dispersion naturelle. Sont de « causes spéciales », celles dont la dispersion est identifiable et qui ont leur origine dans un événement passager ou accidentel et difficilement prévisible. Dès lors, nous voyons que les modes d’actions sur les processus ne seront pas du tout les mêmes selon les causes, d’où l’intérêt de la maîtrise statistique des procédés par cartes de contrôle.
Le deuxième point important est
Le message transmis par Deming est simple. En mécanique, il est assez facile de comprendre le sens donné au mot « variations », une machine ne fonctionnant bien qu’avec des jeux et des frottements. Il en est de même pour un processus de production : les variations sur les différents paramètres engendrent des résultats fluctuants sur les caractéristiques des produits, les délais et les coûts. Si nous grimpons d’un cran dans le domaine des variations alors nous parvenons au niveau expliqué par Deming, celui de l’entreprise en tant que système. Deming met en évidence dans notre esprit les paradigmes et les fausses idées qui jettent la confusion entre les causes communes et les causes spéciales. Il nous fait remarquer que, tant que les processus ne sont pas mis sous contrôle statistique et que l’on ne suit pas les données par des cartes de suivi et des cartes de contrôle, il est difficile de comprendre nos erreurs de jugements. Comme il sait avec quelle prudence il faut parler de méthodes statistiques aux dirigeants, il évite de trop rentrer dans les détails. S’il devait en parler aujourd’hui, après l’avènement du phénomène « Six Sigma », ce serait sûrement avec moins de prudence. Mais dans son héritage il recommande tout simplement l’usage des statistiques descriptives et des fonctions probabilistes, les quatre opérations donc ! « Faites parler les graphiques et les cartes de contrôles. »
4.4. La psychologie des collaborateurs Deming évoque dans son enseignement (ses conférences et ses livres) les freins à toute démarche d’amélioration et les pertes d’efficacité dus à l’absence d’approche psychologique, à tous les niveaux, des collaborateurs de l’entreprise. L’erreur fondamentale est de considérer, dit-il, les employés comme une « marchandise » qui se vend ou qui s’achète (l’intérim) ou comme une simple ressource dont on s’attache la contribution selon l’importance du moment. 1. Source : « Hors de la crise », Editions Economica, 1991, Traduction Jean-Marie Gogue de l’ouvrage « Out of the Crisis », W. Edwards Deming.
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Les entreprises doivent revoir leur point de vue et leurs valeurs. Le personnel n’est pas seulement une valeur économique, il est une valeur humaine et donc une richesse pour l’entreprise. Considéré comme tel, il devient alors un levier du progrès continu et un moteur du changement. Nous résumons dans la figure ci-après la « carte mentale » de Deming synthétisée à partir de son enseignement.
Figure 1.9. Psychologie des employés
Quelques phrases tirées du livre de Deming, Hors de la crise, traduit par Jean-Marie Gogue, reflètent assez bien le point de vue des « ouvriers » et l’attitude que devrait avoir l’encadrement par rapport à la qualité. « Tous les ouvriers savent pourquoi la productivité augmente quand la qualité s’améliore : moins de retouches, moins de gaspillage, il n’y a pas de meilleure réponse... » « Pour un ouvrier, faire de la qualité veut dire que sa performance lui donne satisfaction, le rend fier d’un travail bien fait. » « Les ingénieurs doivent pouvoir discerner les problèmes qui privent les ouvriers de la possibilité d’être satisfaits de leur travail. » « Le management doit faire disparaître les craintes et les peurs dont le dénominateur commun est la performance dégradée. Faire attention à la perversité du management par les chiffres. » « Les ingénieurs et cadres sont capables d’affronter toutes sortes de problèmes sauf les problèmes humains où ils semblent frappés de paralysie. Ils se réfugient alors dans des groupes de travail pour y trouver des solutions. »
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André CHARDONNET – Dominique THIBAUDON
Le guide du PDCA de Deming PROGRÈS CONTINU ET MANAGEMENT
© Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2839-6
Chapitre
Des applications multiples du cycle PDCA
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« Il ne faut pas essayer de forcer le résultat, tout excès est vain » Zhuang Zi.
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1. S’intéresser au PDCA ............................................................................
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1.1. Le caractère fractal du PDCA .............................................................
54
1.2. Déclinaison fractale de chacune des phases PDCA .........................
55
1.3. Intégration des PDCA dans l’organisation. ......................................
57
1.4. Partage de la pratique du PDCA .......................................................
58
2. Retrouver le PDCA dans les normes ISO .......................................
59
2.1. Le PDCA de la série des normes ISO ................................................
59
2.2. Le PDCA du système de management de la qualité .......................
60
2.3. Le PDCA de la norme environnementale ISO 14001 ......................
63
2.4. Modèle PDCA d’un système de management QSE ........................
64
3. S’approprier un modèle pour bien manager ...............................
65
3.1. PDCA du rôle du manager dans la démarche d’amélioration .......
65
3.2. L’efficacité managériale en PDCA huit phases .................................
66
3.3. PDCA de la « stratégie de percée Six Sigma » ..................................
67
3.4. Description du cycle PDCA de « l’IRQM » ........................................
68
3.5. PDCA – Qualité totale – Balanced Scorecard ...................................
69
4. Réfléchir « risques et objectifs » pour manager ..........................
70
4.1. Les dimensions PDCA dans l’approche du risque ...........................
70
4.2. Les objectifs PDCA dans le management .........................................
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LE GUIDE DU PDCA DE DEMING
1. S’INTÉRESSER AU PDCA
1.1. Le caractère fractal du PDCA
Figure 3.1. PDCA « gigognes »
Cette représentation schématique de PDCA « gigognes » qui montre un petit PDCA faisant tourner une grande roue PDCA sur la pente du progrès est extraite d’un livre de Michel Périgord 1. Les Japonais, confie-t-il, lui ont souvent répété la phrase suivante, à propos de cette roue de Deming : « Nous commençons par améliorer ce que nous savons faire mais pas encore suffisamment bien, ensuite nous innoverons, mais pas l’inverse. » Cela rend bien compte d’un trait de la culture nipponne : les Japonais font d’abord tourner de petites roues, avant d’en faire tourner de plus grandes. Chacun doit faire de petites réalisations concrètes en PDCA et c’est l’ensem ble de la collectivité qui fait tourner une grande roue pour l’amélioration en mode PDCA. Le concept de démultiplication du cycle PDCA est dû à un élève japonais du docteur Joseph Juran, Y. Kondo 2, avec qui il a travaillé sur les techniques d’audits. 1. Réussir la qualité totale , Michel PÉRIGORD, Éditions d’Organisation, 1987. 2. Y. Kondo, description issue du Quality Control Handbook Fifth, édité par Dr Joseph Juran.
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Des applications multiples du cycle PDCA
Michel Périgord a imaginé que dans un PDCA on pouvait inscrire d’autres PDCA venant s’insérer dans chacune des parties, à l’image des « poupées gigognes », chaque petit PDCA venant contribuer à un PDCA plus grand. Dans ce cadre, il explique qu’il faut voir un petit PDCA comme un engrenage « moteur » à l’intérieur d’un autre engrenage, plus grand, qui l’entraîne dans le même sens de rotation mais avec un couple très important, comme, en mécanique, un « satellite fait tourner une couronne dentée ». Nous livrons à votre réflexion que la vitesse de rotation de la grande roue peut se situer au-delà des possibilités de « pédalage » des petites ! Nous pourrions nous laisser à penser que chaque individu dans l’entreprise fait tourner son propre PDCA afin de faire tourner chaque fonction, qui elle-même ferait tourner une finalité ou une activité dans un processus, ainsi de suite. Cette vision n’est pas si éloignée que ça de la réalité. La déclinaison de l’autonomie, par exemple, répond bien à ce principe. Dans une équipe autonome, le fonctionnement s’appuie sur des activités déléguées à des opérateurs appelés « animateurs ». Un animateur est chargé de faire vivre l’activité qui lui est déléguée et de la promouvoir au sein de l’équipe. Son PDCA « animation » entraîne le bon fonctionnement du cycle PDCA « équipe autonome », ce dernier assurant la marche régulière du PDCA « unité de production » pour la réalisation des produits conformément aux objectifs. On peut alors parler du caractère fractal du PDCA, applicable à tous les niveaux de l’entreprise où chacun devrait se considérer comme une petite roue motrice et se sentir porteur d’un tout de l’entreprise pour la mise en œuvre des objectifs majeurs de l’entreprise.
1.2. Déclinaison fractale de chacune des phases PDCA Cas d’une action de formation
Les différentes phases successives du PDCA ont chacune un but : [PLAN] préparer la formation [DO] réaliser la formation [CHECK] évaluer la formation [ACT] combler les écarts, modifier... Étudions le cas d’application de la phase « PLAN » que nous allons décom poser à partir d’un autre PDCA plus détaillé, pour la préparation de la formation.
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Figure 3.2. Action de formation
Sans en passer par ses déclinaisons multiples, pourrait-on assurer que l’on n’a rien oublié ? Il est évident qu’une telle décomposition permet de hiérarchiser les déclinaisons des tâches. Dans le cycle « mère », les expressions formalisent des finalités, dans le cycle « fractal » elles précisent des objectifs. En effet, il est souvent important de pousser plus avant afin de pouvoir identifier les acteurs. Déclinons le cycle PDCA de la phase « préparer la formation » : prendre en compte les attentes et définir les objectifs opérationnels et pédagogiques en fonction des besoins apporter les réponses « Qui, Quoi, Où, Quand, Comment et Pourquoi » évaluer la cohérence et la pertinence pour atteindre les objectifs critiquer la conception et apporter les retouches éventuelles. Nous pouvons constater que ce nouveau PDCA, plus précis, est rédigé sous forme de propositions opérationnelles (presque des objectifs). Il faut porter un grand soin à la rédaction de ce deuxième PDCA car il conditionne l’efficacité du premier. Si nous poussons un peu plus la déclinaison d’un PDCA pour la partie « apporter les réponses en termes QQOQCP », alors les nouvelles propositions deviennent plus précises, concernant les tâches à réaliser : préparer le questionnaire et les check-lists et identifier dans les listes des personnes compétentes, les personnes disponibles lancer les convocations ; louer les moyens matériels et la salle vérifier la logistique, le matériel, et que la salle est bien retenue pour la
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bonne date ; vérifier que les intervenants ont confirmé, ont bien pris en compte le programme, les contraintes de projection et compris les objectifs de la formation une conférence téléphonique est prévue pour répondre aux dernières questions.
Le troisième PDCA est une déclinaison très détaillée des tâches à effectuer. Il doit être pensé en termes de coûts et de délais. Ce n’est donc pas aussi simple, mais très efficace pour bien gérer les risques et préparer le planning. Êtes-vous prêt à décliner l’une des trois autres phases ? Quelle phrase clé écririez-vous dans chaque case PDCA, pour la caractériser ? Laquelle est la plus difficile ?
1.3. Intégration des PDCA dans l’organisation Les PDCA de management (les plus intéressants) doivent se retrouver sur chacun des processus. Ce sont eux qui vont donner la dynamique aux activités en tant que système. Dans une organisation un tant soit peu dirigée, les cycles PDCA sont naturellement présents dans le fonctionnement, la gestion et les processus. Comme ce sont des cycles, les phases reviennent régulièrement à des moments particuliers de la vie de l’entreprise et de la vie du produit. Même s’ils ne sont pas matérialisés en tant que tels, les cycles PDCA sont donc facilement repérables, par la présence des revues ou des réunions de vérification, lors des phases ACT ou CHECK. Une revue est un indice de fonctionnement en mode PDCA sous-jacent. Dans une entreprise de type PME, on peut facilement dénombrer une vingtaine de types de « Revues » ou de « Réunions de feed-back » représentant autant de cycles PDCA. Voyons quelques exemples de « Revues » représentatives
• Revues de direction, chaque fois que le comité de direction en sent la nécessité mais le plus souvent dans les phases suivantes : PLAN : politique, clients, budget, schéma directeur, objectifs... DO : suivi des activités courantes commerciales, techniques et industrielles. État des événements de la vie de l’entreprise. CHECK : point mensuel de contrôle de gestion et des activités des services supports. Éditions
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ACT : états et bilans semestriels ou annuels pour les activités, les résultats et le personnel (entretiens annuels et people’s review), pour en dégager les grandes décisions. • Revues de processus : le propriétaire du processus prévoit de les réaliser selon un mode prédéfini avec les acteurs et les clients du processus, ses collaborateurs et le comité de direction. Le cycle PDCA sous-jacent est le déploiement des objectifs, l’accompagnement terrain en temps réel et en continu, les vérifications et le contrôle managérial nécessaire, etc. Il fait des points de synthèses à intervalles réguliers et une « Revue formelle » pour revoir les points d’amélioration du processus afin de le rendre plus efficace. Nous avons inséré une fiche outil « Revue de processus » dans le chapitre 6. Tous les actes formels et figés retenus dans l’organisation d’une grande entre prise peuvent être ainsi décrits. Par exemple : Revues du plan industriel et commercial (PIC) Revues du plan de production (PDP) Revues des plans de charges (CBN) Revues budgétaires et de gestion mensuelles Revues de production mensuelle Revues d’étude et de développement Revues de la satisfaction client Revues de contrats Revues de projets Revues de déclinaison des objectifs majeurs Revues des plans d’actions stratégiques Revues des indicateurs du tableau de bord Codir Revues de direction qualité (audits et bilan qualité) Revues d’auto-évaluation EFQM Revues de développement du personnel (People’s Review)
1.4. Partage de la pratique du PDCA • Les managers doivent diriger les activités en mode PDCA : Plan (planifier) – Do (déployer) – Check (comprendre) – A ct (améliorer) • Les opérateurs en équipe autonome doivent appliquer le principe d’action PAVR pour réaliser leurs tâches et maintenir leur poste au bon niveau de compétence et de polyvalence : Prévoir – A gir – V érifier – R éagir.
Le personnel fait donc du PDCA, comme « monsieur Jourdain », sans le savoir. Il faut donc que l’organisation lui permette de les reconnaître et qu’il apprenne à identifier les phases du fonctionnement cyclique, ce qui valorise son action qualité. 58
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L’important pour chacun est de bien percevoir dans quel cycle il est impliqué et d’être sensibilisé aux phases amont et aval de celle où il œuvre couramment. C’est la base de l’appropriation et de « l’éducation PDCA » par le personnel. Pour les besoins d’une représentation commune, nous avons regroupé dans « le cycle vertueux du PDCA » le modèle de management et le principe d’action.
2. RETROUVER LE PDCA DANS LES NORMES ISO
2.1. Le PDCA de la série des normes ISO
Figure 3.3. PDCA des normes ISO
La déclinaison classique des normes, dans ce cycle, montre le principe de cohérence attaché à l’ensemble des 4 normes : (A) « J’apprends et je décide »... J’apprends l’organisation des normes ISO 9000, les principes essentiels, et je décide leur mise en œuvre : 1 heure dans une vie ! (P) « Je construis »... le système de management de la qualité sur la base des recommandations de l’ISO 9004. Cette dernière constitue le référentiel, par excellence, pour l’amélioration des performances. À mettre dans le cursus de manager. Éditions
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(D) « Je démontre »... Les exigences de la norme ISO 9001 ont plus de 10 ans d’expérience. Comme les bons whiskies, elles commencent à être « buva bles ». (C) « Je vérifie pour améliorer »... La qualité des audits, décrite par l’ISO 19011, n’est plus à démontrer quand ils sont bien conduits. Ils ont même des vertus pédagogiques en plus de leur force managériale. Enfin, ils sont généralisables (qualité, sécurité, environnement).
2.2. Le PDCA du système de management de la qualité
-
Figure 3.4. PDCA du SMQ
Le système de management qualité ISO 9001 : 2000 permet de mettre de la simplicité dans la complexité de l’organisation. L’« IQM »1 le rappelait déjà en 1994 : « Il y a en effet nécessité d’organiser le management du progrès dans l’entre prise car il ne suffit pas d’avoir de bonnes idées et une bonne politique, encore faut-il être capable de les mettre en œuvre effectivement. » Le modèle structuré de l’ISO 9001 : 2000 répond à cette formule et rappelle le principe de cette organisation, comme le montre le schéma présenté plus haut :
1. Institut Qualité Management, « Cahiers Qualité Management », no1 de juin 1994.
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– Partie droite : « Les processus qui créent de la valeur pour le client et pour tous ceux qui ont un intérêt dans leur développement et à leur réussite. » – Partie gauche : « Les systèmes de contrôle où chaque niveau inférieur justifie son existence à chaque niveau supérieur, qui, en contrepartie, lui donne son sens. » C’est le fonctionnement de cet ensemble qui constitue le management de l’entreprise.
À ce stade de modélisation, il n’est peut-être pas inutile de rappeler quelques définitions. Quand on parle de système de management, mieux vaut bien comprendre ce que signifient ces deux termes, d’une part, isolément et, d’autre part, quand ils sont associés. Système : ensemble d’éléments corrélés ou interactifs Management : activités coordonnées pour orienter et contrôler un organisme Système de management : se définit dès lors comme un système permettant d’établir une politique et des objectifs, et de les accomplir. Système de management qualité (SMQ) : il doit donc permettre d’orienter et de contrôler une entreprise sur le plan qualité.
Pour une question de facilité de langage, nous appellerons ce dernier aussi bien « système qualité » car, pour nous, il n’y a pas de différence entre « système qualité » et « système de management qualité ». Derrière le concept de système de management de la qualité, se trouve l’ensemble des ressources, procédures, processus et objectifs nécessaires au management de la qualité. Mais cela est bien insuffisant, car c’est la mise en œuvre du PDCA qui va permettre d’instaurer la dynamique. Faire tourner « la roue de Deming », c’est ce qui va permettre de progresser et de s’élever. Chacun est invité à y apporter sa contribution. La direction, de par sa compréhension du système, définit sa stratégie :
Le Codir définit la politique et les objectifs, alloue les ressources nécessaires pour les atteindre. Dans cette phase « Plan », la question de la pertinence, c’est-à-dire de la juste relation entre les objectifs et les moyens, prend toute son importance : – soit on est à ressources constantes, et on parle alors d’adaptation des objectifs aux moyens. C’est souvent le cas de la production qui se trouve souvent placée dans un champ de contraintes ; – soit on est à ressources variables, et on définit les moyens pertinents et adaptés aux objectifs. Dans le contexte des études et du développement, c’est souvent le cas. Éditions
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Le Codir déploie la réalisation en phase « Do » ; pour cela, il incite, communique, accompagne et suit les activités. Le Codir contrôle au sens noble du terme. Il vérifie que l’on avance bien comme prévu. Voilà tout le sens de la phase « Check ». Le Codir prend les décisions en « Revue » de direction, à la lumière des résultats et au vu des bilans et synthèses. Cette phase « Act » est vraiment très importante puisqu’elle occasionne des modifications du système, des évolutions nécessaires, des ressources nouvelles, des objectifs pour le cycle suivant, et, tout cela, à la réflexion des évolutions du marché, de la satisfaction des clients et des exigences nouvelles (normatives ou réglementaires). Le Service qualité s’inscrit aussi dans cette dynamique de par sa « raison d’être » même et au travers d’actions appropriées. Il en est de même pour les responsables opérationnels. Dans aucune entreprise il n’y a de « Superman ». Chaque personne a en charge de « pousser » la « Roue de Deming » sur les pentes de l’amélioration continue. Il faut gagner « en ordonnée » sur le plan de la compétitivité et tenir sur la durée, « en abscisse », pour assurer la pérennité. C’est la plus grande pente possible qui est visée.
Figure 3.5. PDCA de la « Roue de Deming ».
L’ISO 9001 n’est évidemment pas une cale mais bien un levier pour manager le progrès continu !
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2.3. Le PDCA de la norme environnementale ISO 14001
Figure 3.6. PDCA de la norme ISO 14001
La prise de conscience de la question de « l’environnement » dans les pays industrialisés et les grandes industries les a conduits à légiférer en la matière. À défaut de parvenir dans l’immédiat à des accords internationaux, des recommandations ont précédé les lois. Des chartes de bonne conduite sont apparues çà et là, des interdictions sont même tombées brutalement. Souvenons-nous de celle sur les chlorofluorocarbones (CFC) pour protéger la couche d’ozone. Pertinents ou non, les règlements ont toujours leur bien-fondé et ont amené progressivement les entreprises polluantes à prendre des mesures correctives et préventives. Non seulement celles-ci ont des comptes à rendre vis-à-vis des instances réglementaires (obligations de résultats) mais elles sont invitées (obligations de moyens) à mettre en œuvre des démarches préconisées par la norme internationale ISO 14001. Il est même possible de se faire certifier par un organisme accrédité. La norme ISO 14001, de mise en œuvre d’un « Système de management environnemental », suit le même principe PDCA que la norme ISO 9001 : 2000, mais les obligations en sont plus coercitives.
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2.4. Modèle PDCA d’un système de management QSE
Figure 3.7. Système de management « QSE »
Le PDCA sous-tend tout système de management, a fortiori, celui de la qualité, sécurité et environnement. Cette représentation a un double intérêt. D’une part, elle montre bien l’implication de la direction dans la phase « ACT ». D’autre part, elle donne naturellement les huit points à mettre à l’ordre du jour d’une « Revue de direction » portant sur le SMQ. Ce système ne nous est pas inconnu puisqu’il introduit « la séparation des pouvoirs législatifs et exécutifs ». Les activités de la direction et celles des opérationnels et supports (dont le service qualité) sont clairement différenciées. Ce modèle est issu d’une représentation de la Cogema. Faire vivre un système d’amélioration continu tel que celui-ci, pour viser le niveau d’excellence, nécessite la mise en œuvre de 4 principes de base : [penser P] Principe d’ajustement pour assurer la COHÉRENCE [penser D] Principe de maturité pour atteindre la MAÎTRISE [penser C] Principe d’efficacité pour garantir le RÉSULTAT [penser A] Principe d’amélioration pour accroître la COMPÉTITIVITÉ ➞ ➞ ➞ ➞
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3. S’APPROPRIER UN MODÈLE POUR BIEN MANAGER
3.1. PDCA du rôle du manager1 dans la démarche d’amélioration
Figure 3.8. PDCA du rôle du manager
« Phase A » Agir en connaissance de causes et dans un souci d’amélioration, décider les objectifs par rapport aux enjeux et le budget par rapport aux résultats... « Phase P » Prévoir, planifier, préparer... en regard des risques, activités, ressources, moyens, objectifs de management, dispositifs d’évaluation... « Phase D » Mettre en œuvre, déployer, accompagner... toutes les actions de formation, réalisation du produit, mise en œuvre des actions de progrès... « Phase C » Mesurer, analyser, comprendre... à partir des données factuelles des résultats, indicateurs qualité, rendements, indicateurs de progrès et de gestion, et à nouveau passer par la « Phase A » L’entreprise Cogema en a fait une déclinaison intéressante, résultat de brainstormings réalisés avec trente groupes de cadres, lors de séminaires sur « le management de la qualité » que nous avons animés en 1998-99 (voir la fiche pratique au chapitre 8). ➞
➞
➞
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1. ... Il faut dire « manageur » maintenant car ce n’est plus le cadre, paraît-il, qui fait le chef-d’œuvre !
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3.2. L’efficacité managériale en PDCA huit phases
Figure 3.9. Management en PDCA huit phases
L’analyse plus poussée du 2 e modèle de Deming nous a conduits à montrer que certaines activités dans les phases sont plutôt de type organisation et management (MGT) et d’autres plutôt de type réalisation (ACTION)... Le modèle du « Management efficace » proposé est donc obtenu par une suite alternée d’actes de management et d’actions de réalisation, d’où nous pouvons tirer quelques règles de bonne pratique : – mener les actions correctives avant d’introduire les innovations, – planifier et organiser le développement avant de préparer le déploiement de l’action proprement dite, – déployer l’action de formation, de communication et d’accompagnement avant de lancer la réalisation elle-même, – être sûr d’avoir bien mesuré, avant de tirer des conclusions. La méthode Six Sigma a montré que la mesure ou sa validité était le maillon faible (30 % des mesures sur les activités en Six Sigma auraient une valeur du test de validité insuffisante, c’est-à-dire un pourcentage GRR 1 trop élevé).
1. « GRR » : Gage Reproductibility & Repeatability (méthodologie Six Sigma).
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3.3. PDCA de la « stratégie de percée Six Sigma »
Figure 3.10. PDCA de la stratégie Six Sigma
Pour bien atteindre un bon niveau de compétitivité, les industriels américains de l’électronique des semi-conducteurs ont développé une démarche stratégique de progrès visant le « Zéro défaut », c’est-à-dire la capabilité Six Sigma des processus. Celle-ci a été déclinée en huit phases par Mikel Harry et Richard Schroeder, en 1985, sous la dénomination « Six Sigma Breakthrough Strategy »1. Nous l’avons représentée selon le cycle PDCA de Deming. ... Partir d’un état de situation « D » Définir les plans à mettre en place pour les améliorer « M » Mesurer les activités gérées par les plans, identifier les CTQ 2 « A » Analyser les écarts de façon comparative « I » Améliorer les facteurs clés afin d’atteindre les objectifs « C » Maîtriser les caractéristiques CTV 3 de la structure ... Rationaliser et intégrer les meilleures pratiques dans la planification stratégique. En deçà de la démarche stratégique, la méthode Six Sigma de résolution de problème se limite aux phases formelles « DMAIC », et, pour la conception « Design For Six Sigma », aux phases « DMADV » où les phases « Improve & Control » sont remplacées par « Design & Verify ». 1. Six Sigma, The Breakthrough Management Strategy Revolutionizing the World’s Top Corporations by Mikel Harry and Richard Schroeder Editeur : The Doubleday Broadway Publishing Group – NY. 2. CTQ : Critical To Quality, caractéristique qualité du produit, critique pour le client. 3. CTV : Critical To Value, caractéristique d’une fonction critique pour le client et le fournisseur.
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3.4. Description du cycle PDCA de « l’IRQM »1
Figure 3.11. Cycle PDCA proposé par l’IRQM
Les appropriations de ces méthodes par les entreprises ont été nombreuses dans les années 1990. L’IRQM présentait cette application très spécifique au métier de l’automobile. Dans ce concept de cycle PDCA, on trouve tous les ingrédients d’un système de planification, de mise en œuvre, de contrôle et d’analyse des actions de progrès fondés sur la résolution des problèmes : cette caractéristique est essentielle. En France, comme au Japon, les constructeurs automobiles, ont mis très vite en application le cycle PDCA pour leur démarche d’amélioration continue. Ils ont beaucoup fait progresser sa crédibilité chez les autres industriels de par leur position de leaders, montrant ainsi que le PDCA allait bien au-delà d’une simple représentation schématique destinée aux cours de formation qualité ou aux conférences sur la compétitivité. Ainsi, Valeo utilise couramment le PDCA transposé en méthode de résolution de problème. « On va faire un PDCA » est synonyme chez Valeo de « on va résoudre un problème en groupe avec la méthode PDCA ».
1. L’Institut Renault de la qualité et du management (IRQM) a beaucoup influencé la démarche de qualité totale en France. Cet organisme a formé de nombreux ingénieurs qualité.
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3.5. PDCA – Qualité totale – Balanced Scorecard
Figure 3.12. TQM – PDCA – BSC
En 1992, l’Institut Renault de la qualité mettait la qualité totale « au cœur du changement ». Par la voix du P-DG de Renault, R. H. Levy, la démarche qualité totale se devait d’être un recentrage pour l’entreprise. Cette dynamique de progrès continu pouvait se résumer sur les quatre axes de la « Qualité totale », dont les grands principes sont rappelés dans l’ouvrage Au cœur du changement 1, articulés autour du PDCA de Deming : la primauté du client l’efficience économique l’amélioration des processus l’adhésion des hommes Il est remarquable de noter que ces mêmes quatre axes sont ceux qui ont été retenus comme base pour l’établissement du tableau de bord prospectif (Balanced Scorecard) de la Business Harvard School en 1996 auquel nous avons consacré un long développement au chapitre 5.
1. Au cœur du changement, Pierre Jocou (ex-directeur qualité chez Renault) et Frederic Lucas, Dunod, 1992.
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4. RÉFLÉCHIR « RISQUES ET OBJECTIFS » POUR MANAGER
4.1. Les dimensions PDCA dans l’approche du risque1 L’Institut Européen de Cindyniques 2 étudie les approches globales des sciences du danger et des risques. Sous cet angle, les sciences et techniques de l’ingénieur couvrent notamment les domaines de la « sûreté de fonctionnement » et de la sécurité. Par le biais des sciences humaines, la cindynique aborde par ailleurs la totalité des phénomènes d’un système et de ses variabilités à travers les métiers, les partenaires et toutes les sciences.
Figure 3.13. Dimensions PDCA dans l’approche du risque
L’amélioration continue, qui est une forme de dynamique de progrès, analyse le pourquoi et le comment via le « Retour d’EXpérience », REX, entre le modèle et la réalisation, afin de minimiser les risques ; on considère en effet le processus et pas le résultat. Cette approche propose quatre types de dimensions du risque à prendre en compte autour des finalités d’entreprise.
1. Selon l’excellent article de Claude Frantzen (président de l’Institut Européen de Cindyniques), « La cindynique : une approche conceptuelle de l’étude des dangers », paru dans le revue du MFQ, Qualité en mouvement, no 52 (décembre 2001), dossier spécial « Management des risques ». 2. IEC 9, rue de Rocroy 75010 Paris, http://www.Cindynics.org.
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Nous en avons reporté les principales dimensions dans le modèle PDCA de Deming pour illustrer une fois encore le bien-fondé de l’approche proposée. L’hyperespace du danger, selon Claude Frantzen, consiste en un regard posé sur les dangers et les risques selon cinq dimensions différentes : les faits, les modèles, les valeurs, les règles et les finalités : dimension des faits de mémoire, de l’histoire et des statistiques dimension des systèmes de valeurs (buts, vision) dimension des objectifs (survie de l’entreprise, protection du client, etc.) dimension des représentations et modèles élaborés à partir de faits dimension des normes, règles, codes de déontologie (obligatoire ou de libre adhésion), contrôles a priori ou non... En combinant ces différentes dimensions, on obtient des domaines d’étude et de réflexion familiers, représentés sur la figure précédente selon deux axes : la dimension des faits et celle des modèles se combinent dans le retour d’expérience, technique de base des gestionnaires de risques de grandes entreprises, la dimension des objectifs, celle des normes et celle des valeurs se combinent dans le domaine de l’éthique. Cette représentation, dit-il, devrait réconcilier les ingénieurs, qui représentent le monde technique, et les psychosociologues pour ce qui est des sciences humaines. On constate actuellement une rupture entre les ingénieurs qui pensent « yaka » puisqu’ils se situent sur l’axe téléologique (les objectifs) et les psychosociologues qui disent « ils sont comme ça » en se plaçant sur l’axe des résistances au changement. Du chef d’entreprise à l’expert extérieur, en passant par l’ingénieur sécurité jusqu’aux managers et le personnel, chacun possède son propre regard sur la sûreté. Le management des risques s’effectue alors selon des cycles concentriques, dont le plus grand est celui du dirigeant. Dans cette approche, l’homme est trop souvent considéré comme « le maillon faible ». En effet, les indicateurs de productivité sont très parlants, mais ceux de la sûreté et de la sécurité ne se mesurent pas autrement qu’en termes de vigilance, dixit Claude Frantzen dans son article. Nous reviendrons en détail sur ces points au chapitre 9.
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