L’ŒUVRE AU NOIR Née en 03 à Bruxelles, de parents rançais, Marguerite Yourcenar grandit en France, mais c’est surtout à l’étranger qu’elle résidera par la suite : Italie, Suisse, Grèce, puis Amérique où elle vit dans l’île de Mount Desert sur la côte nord-est des Etats-Unis. Son œuvre comprend des romans : Alexs ou le Traté du van combat (2); Le Coup de Grâce (3); Dener du Rêve, version déinitive (5); des poèmes en prose : Feux (3), en vers réguliers : Les Chartés d’Alcppe (5); des essais : Sous Bénéfice d’Inventare (2); des pièces de théâtre et des traductions. Il aut citer tout spécialement Mémores d’Hadren (5), roman historique d’une vérité étonnante qui lui a valu une réputation mondiale, et L’Œuvre au Nor qui a obtenu à l’unanimité le Prix Fémina . L’Œuvre au Noir est l’hstore d’un personnage fict, Zénon, médecn, alchmste, phlosophe, depus sa nassance llégtme à Bruges en l’an jusqu’à la tragque catastrophe qu termne sa ve. Nous le suvons dans ses voyages à travers l’Europe et le Levant de son temps, dans ses travaux de médecn des pestérés et des pauvres et de médecn de cour, dans ses recherches en avance sur la scence ofcelle de son sècle, dans ses expérences de l’esprt et de la char et son dangereux aufilement entre la révolte et le comproms. Ce Zénon dont les angosses et les problèmes n’ont pas cessé d’être actuels, ou sont en passe de le redevenr, tent par sa destnée et sa pensée du grand chmste allemand Paracelse, du médecn Mchel Servet, du Léonard des Cahiers, et du phlosophe contestatare que ut Campanella. Quatre ou cnq personnages ont route avec Zénon dans le labyrnthe de leur sècle : sa mère Hlzonde et son beau-père Smon Adransen, entraînés dans la révolte anabaptste; son cousn Henr-Maxmlen, lettré et soldat de ortune, compagnon de Montluc au sège de Senne; son protecteur le peux preur des Cordelers, déchré par les maux et le désordre du monde, habté à la os par la passon de la justce et la charté. L’Œuvre au Noir évoque un xv1e sècle nsolte, tout ensemble journaler et souterran, vu des perspectves de la grand-route, de l’ofcne, du cloître, de la taverne, et finalement de la prson. Le ttre est emprunté à une velle ormule alchmque : « l’œuvre au nor » état la phase de séparaton et de dssoluton de la matère qu consttuat pour les alchmstes la parte la plus dfcle du Grand Œuvre. Elle symbolsat auss les épreuves de l’esprt se lbérant des routnes et des préjugés.
ŒUVRES DE MARGUERITE YOURCENAR ROMANS ET NOUVELLES ALEXIS OU LE TRAITÉ DU VAIN COMBAT. — LE COUP DE GRÂCE (Gallmard, ). LA NOUVELLE EURYDICE (Grasset, , épuisé ). LA MORT CONDUIT L’ATTELAGE (Grasset, , épuisé ). DENIER DU RÊVE (Gallmard ). NOUVELLES ORIENTALES (Gallmard, ). MÉMOIRES D’HADRIEN (Pon, , édton llustrée Gallmard, ). L’ŒUVRE AU NOIR (Gallmard. ). ESSAIS ET AUTOBIOGRAPHIE PINDARE (Grasset, , épuisé ). LES SONGES ET LES SORTS (Grasset, , épuisé ). SOUS BÉNÉFICE D’INVENTAIRE (Gallmard, ). SOUVENIRS PIEUX (en préparaton). DISCOURS DE RÉCEPTION DE MARGUERITE YOURCENAR à l’Académe Royale de Belgque, précédé du dscours de benvenue de CARLO BRONNE (Gallmard, ). THÉÂTRE THÉÂTRE I : RENDRE A CÉSAR — LA PETITE SIRÈNE — LE DIALOGUE DANS LE MARÉCAGE (Gallmard, ). THÉÂTRE II : ELECTRE OU LA CHUTE DES MASQUES — LE MYSTÈRE D’ALCESTE — Qu N’A PAS SON MINOTAURE? (Gallmard, à paraître en 72 ). POÈMES ET POÈMES EN PROSE FEUX (Plon, ). LES CHARITÉS D’ALCIPPE (La Flûte Enchantée, , épuisé ). TRADUCTIONS Vrgna Wool : LES VAGUES (Plon, ). Henry James : CE QUE MAISIE SAVAIT (Laont, ). PRÉSENTATION CRITIQUE DE CONSTANTIN CAVAFY, suve d’une traducton ntégrale des POÈMES par M. Yourcenar et C. Dmaras (Gallmard, ). FLEUVE PROFOND, SOMBRE RIVIÈRE, les « Negro Sprtuals », commentares et traductons (Gallmard, ). PRÉSENTATION CRITIQUE D’HORTENSE FLEXNER, suve d’un chox de POÈMES (Gallmard, ). LA COURONNE ET LA LYRE, textes choss de poètes grecs (en préparaton). Dans Le Livre de Poche : MÉMOIRES D’HADRIEN. LE COUP DE GRÂCE.
MARGUERITE YOURCENAR
L’Œuvre au Nor
GALLIMARD
Tous drots de traducton, de reproducton re producton et e t d’adaptaton réservé rése rvéss pour tous les pays, y comprs l’U.R.S.S l’U.R.S.S.. © Éditions Gallimard, 1968.
PREMIÈRE PARTIE
LA VIE ERRANTE
Nec certam sedem, nec propram acem, nec munus ullum peculare tb dedmus, o Adam, ut quam sedem, quam acem, quae munera tute optavers, ea, pro voto, pro tua sententa, habeas et possdeas. Definta ceters natura ntra praescrptas a nobs leges coercetur. Tu, nulls angusts coerctus, pro tuo arbtro, n cuus manu te posu, tb llam praefines. Medum te mund posu, ut crcumspceres nde commodus qucqud est n mundo. Nec te caelestem neque terrenum, neque mortalem neque mmortalem ecmus, ut tu psus quas arbtrarus honorarusque plastes et fictor, n quam maluers tute ormam efngas… Pc de la Mrandole, Oratio de hominis dignitate.
Je ne t’ai donné ni visage, visage, ni place qui te soit propre propre,, ni aucun don qui te soit particulier, ô Adam, ain que ton visage, ta place, et tes dons, tu les veuilles, les conquières et les possèdes par toi-même. Nature enerme d’autres espèces en des lois par moi établies. Mais toi, que ne limite aucune borne, par ton propre arbitre, entre les mains duquel je t’ai placé, tu te déinis toi-même. Je t’ai placé au milieu du monde, ain que tu pusses mieux contempler ce que contient le monde. Je ne t’ai ait ni céleste ni terrestre, mortel ou immortel, ain que de toi-même, librement, à la açon d’un bon peintre ou d’un sculpteur habile, tu achèves ta propre orme.
LE GRAND CHEMIN
HENRI-MAXIMILIEN LIGRE poursuvat poursuvat par pettes pe ttes étapes sa route vers Pars. Des querelles opposant le Ro à l’Empereur, l gnorat tout. Il savat seulement que la pax velle de quelques mos s’eflochat déjà comme un vêtement trop longtemps porté. Ce n’état un secret pour personne que Franços de Valos contnuat à gugner le Mlanas comme un amant malchanceux sa belle ; on tenat de bonne source qu’l travallat sans brut à équper et à rassembler sur les rontères du duc de Savoe une armée toute neuve, chargée d’aller ramasser à Pave ses éperons perdus. Mêlant à des brbes de Vrgle les secs récts de voyage du banquer son père, Henr-Maxmlen magnat, par-delà des monts curassés de glace, des files de cavalers descendant vers de grands pays ertles et beaux comme un songe : des planes rousses, des sources boullonnantes où bovent des troupeaux blancs, des vlles cselées comme des corets, regorgeant d’or, d’épces et de cur travallé, rches comme
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des entrepôts, solennelles comme des églses ; des jardns plens de statues, sta tues, des salles plenes de manuscrts rares ; des emmes vêtues de soe accuellantes au grand captane ; toutes sortes de rafnements dans la mangealle et la débauche, et, sur des tables d’argent mass, dans des fioles en verre de Vense, l’éclat moelleux du malvose. Quelques jours plus tôt, l avat qutté sans regret sa mason natale de Bruges et son avenr de fils de marchand. Un sergent boteux, qu se vantat d’avor serv en Itale du temps de Charles VIII, lu avat un sor mmé ses hauts ats et décrt les filles et les sacs d’or sur lesquels l lu état arrvé de are man basse dans le pllage des vlles. HenrMaxmlen l’avat payé de ses hâbleres par un pot de vn à la taverne. Rentré chez lu, l s’état dt qu’l état temps de tâter à son tour de la rondeur du monde. Le utur connétable hésta s’l s’enrôlerat dans les troupes de l’Empereur ou dans celles du ro de France ; l fint par jouer sa décson à ple ou ace ; l’Empereur perdt. Une servante ébruta ses préparats de départ. Henr-Juste assena d’abord quelques horons au fils prodgue, ensute, radouc par la vue de son cadet en jupe longue, promené en lsères sur le taps du parlor, souhata acéteusement à son aîné bon vent arrère chez ces écervelés de Franças. Un peu par entralles paternelles, beaucoup par glorole, et pour se prouver qu’l avat le bras long, l se promt d’écrre en temps voulu à son agent lyonnas, Maître Muzot, de recommander ce fils ngouvernable à l’amral Chabot de Bron, lequel état ort endetté envers la banque Lgre. Henr-Maxmlen avat beau secouer de ses peds la poussère du comptor amlal, on n’est pas pour ren le fils d’un homme qu at hausser ou basser le cours des denrées et qu prête aux prnces. La mère du héros en herbe remplt ses poches de vctualles et lu glssa en cachette l’argent du voyage.
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En passant par Dranoutre, où son père possédat une mason des champs, l persuada l’ntendant de lu lasser échanger son cheval, qu botat déjà, contre la plus belle bête de l’écure du banquer. Il la revendt dès Sant-Quentn, un peu parce que cette magnfique monture asat croître comme par mage le chre des addtons sur l’ardose des taverners, un peu parce que cet équpage trop rche l’empêchat de goûter tout son saoul aux joes de la grand-route. Pour are durer son pécule, qu filat entre ses dogts plus vte qu’on n’aurat cru, l mangeat avec les roulers le lard rance et les pos chches des pètres auberges, et, le sor, couchat sur la palle, mas perdat de bon cœur en tournées et en cartes les sommes économsées ans sur de melleurs gîtes. De temps en temps, dans une erme solée, une veuve chartable lu orat du pan et son lt. Il n’oublat pas les bonnes lettres, ayant alourd ses poches de petts volumes habllés de peau d’agneau, prs en avance d’hore à la bblothèque de son oncle, le chanone Bartholommé Campanus, qu collectonnat les lvres. A md, couché dans un pré, l rat aux éclats d’une joyeuseté latne de Martal, ou encore, plus rêveur, crachant mélancolquement dans l’eau d’une mare, l songeat à quelque dame dscrète et sage à qu l déderat dans des sonnets à l’nstar de Pétrarque son âme et sa ve. Il dormat à dem ; ses chaussures pontaent vers le cel comme des tours d’églse ; les hautes avones étaent une compagne de lansquenets en souquenlles vertes ; un coquelcot état une belle fille au jupon rpé. A d’autres moments, le jeune géant épousat la terre. Une mouche le révellat, ou le bourdon d’un clocher de vllage ; son bonnet sur l’orelle, des étus dans ses cheveux jaunes, sa longue figure de con, toute en nez, vermllonnée par le solel et l’eau rode, Henr-Maxmlen marchat gaement vers la glore. glore.
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Il échangeat des plasanteres avec les passants, et s’normat des nouvelles. Depus l’étape de La Fère, un pèlern le précédat sur la route à une dstance d’une centane de toses. Il allat vte. HenrMaxmlen, ennuyé de n’avor à qu parler, pressa le pas. — Prez pour mo à Compostelle, fit le Flamand joval. — Vous Vous avez avez devné devné juste, dt l’autre. J’y vas. Il tourna la tête sous son capuchon d’étoe brune, et Henr-Maxmlen reconnut Zénon. Ce garçon magre, au long cou, semblat grand d’une coudée depus leur dernère équpée à la ore d’automne. Son beau vsage, toujours auss blême, parassat rongé, et l y avat dans sa démarche une sorte de précptaton arouche. — Salut, cousn ! fit joyeusement Henr-Maxmlen. Le chanone Campanus vous a attendu tout l’hver à Bruges ; le Recteur Magnfique à Louvan s’arrache la barbe de votre absence, et vous reparassez au tournant d’un chemn creux, comme je ne dra pas qu. — L’Abbé Mtré de Sant-Bavon Sant-Bavon à Gand m’a trouvé un emplo, dt Zénon avec prudence. N’a-je pas là un protecteur avouable ? Mas dtes-mo plutôt pourquo vous ates le gueux sur les routes de France. — Vous y ê tes peut-être peut-êtr e pour quelque chose, répondt le plus jeune des deux voyageurs. J’a planté là le comptor de mon père comme vous l’Ecole de théologe. Mas mantenant que vous volà retombé de Recteur Magnfique en Abbé Mtre… — Vous voulez rre, dt le clerc. On commence toujours toujours par être ê tre le amulus de quelqu’un. — Plutôt Plutôt porter l’arquebus l’arquebuse, e, dt Henr-Maxm Henr-Maxmlen. len. Zénon lu jeta un regard de dédan.
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— Votre père pèr eCancel est es t assez rcheAndpour ache ter Download Print vous acheter la melleure compagne de lansquenets du César Charles, dt-l, s touteos vous trouvez tous deux que le méter des armes est une convenable occupaton d’homme. — Les lansquenets que pourrat m’acheter m’ache ter mon père me charment autant que vous les prébendes de vos abbés, réplqua Henr-Maxmlen. Et pus d’alleurs, l n’y a qu’en France qu’on sert ben les dames. La plasantere tomba dans le vde. Le utur captane s’arrêta pour acheter à un paysan une pognée de cerses. Ils s’assrent au bord d’un talus pour manger. — Vous volà dégusé dé gusé en sot, dt Henr-Maxmlen, observant cureusement l’habt du pèlern. — Ou, fit Zénon. Mas j’étas j’é tas las du on des lvres. J’ame meux épeler un texte qu bouge : mlle chres romans et arabes ; des caractères courant tantôt de gauche à drote, comme ceux de nos scrbes, tantôt de drote à gauche, comme ceux des manuscrts d’Orent. Des ratures qu sont la peste ou la guerre. Des rubrques tracées au sang rouge. Et partout des sgnes, et, çà et là, des taches plus étranges encore que des sgnes… Quel habt plus commode pour are route naperçu ?… Mes peds rôdent sur le monde comme des nsectes dans l’épasseur d’un psauter psaute r. — Fort or t ben, fit dstratement dstrate ment Henr-Maxmlen. Mas pourquo se rendre à Compostelle ? Je ne vous vos pas asss parm les gros mones et chantant du nez. — Hou, dt le pèlern. Qu’a-je à are de ces anéants et de ces veaux ? Mas le preur des Jacobtes de Léon est es t amateur d’alchme. Il a correspondu avec le chanone Bartholommé Campanus, notre bon oncle, ce ade dot qu paros
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s’aventure comme par mégarde sur les lmtes Cancel Download And Print nterdtes. L’abbé de Sant-Bavon à son tour l’a dsposé par lettre à me are part de ce qu’l sat. Mas je dos me hâter hâte r, car l est es t veux. Je crans qu’l ne désapprenne bentôt son savor et qu’l ne meure. — Il vous nourrra d’ognons crus, e t vous era er a écumer sa soupe de cuvre épcée au soure. Grand merc ! J’entends conquérr à mons de ras de melleures melleures ptances. Zénon se leva sans répondre. Henr-Maxmlen, alors, crachant en chemn chemn ses derners de rners noyaux : — La pax branle dans le manche, rère Zénon. Les prnces s’arrachent les pays comme des vrognes à la taverne se dsputent les plats. Ic, la Provence, ce gâteau de mel ; là, le Mlanas, ce pâté d’angulles. Il tombera ben de tout cela une mette de glore à me mettre sous la dent. — Ineptissima vanitas, fit sèchement le jeune clerc. En êtes-vous encore à attacher de l’mportance au vent qu qu sort des bouches ? — J’a seze ans, dt Henr-Maxmlen. Dans qunze ans, on verra ben s je sus par hasard l’égal d’Alexandre. Dans trente ans, on saura s je vaux ou non eu César. Vas-je passer ma ve à auner du drap dans une boutque de la rue aux Lanes ? Il s’agt d’être homme. homme. — J’a vngt ans, calcula Zénon. A tout mettre me ttre au meux, j’a devant mo cnquante ans d’étude avant que ce crâne se change en tête de mort. Prenez vos umées et vos héros dans Plutarque, rère Henr. Il s’agt pour mo d’être plus qu’un homme. — Je vas du côté des Alpes, dt Henr-Maxmlen. — Mo, dt Zénon, du côté des Pyrénées. Pyrénée s. Ils se turent. La route plate, bordée de peuplers, étrat devant eux un ragment du lbre unvers.
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L’aventurer ’aventurer deCancel la pussance et e t l’aventurer du savor sa vor Download And Print marchaent côte à côte. — Voyez, oye z, contnua Zénon. Par-delà Par-delà ce vllage, d’autres vllages, par-delà cette abbaye, d’autres abbayes, par-delà cette orteresse, d’autres orteresses. Et dans chacun de ces châteaux d’dées, de ces masures d’opnons superposés aux masures de bos et aux châteaux de perre, la ve emmure les ous et ouvre un pertus aux sages. Par-delà les Alpes, l’Itale. Par-delà les Pyrénées, l’Espagne. D’un côté, le pays de La Mrandole, de l’autre, celu d’Avcenne. Et, plus lon encore, la mer, et, par-delà la mer, sur d’autres rebords de l’mmensté, l’Arabe, la Morée, l’Inde, les deux Amérques. Et partout, les vallées où se récoltent les smples, les rochers où se cachent les métaux dont chacun symbolse un moment du Grand Œuvre, les grmores déposés entre les dents des morts, les deux dont chacun a sa promesse, les oules dont chaque homme se donne pour centre à l’unvers. Qu serat assez nsensé pour mourr sans avor at au mons le tour de sa prson ? Vous le voyez, rère Henr, je sus vrament un pèlern. La route est longue, mas je sus jeune. — Le monde est es t grand, dt Henr-Maxmlen. — Le monde est es t grand, dt gravement gravement Zénon. Plase à Celu qu Est peut-être de dlater le cœur human à la mesure de toute la ve. Et de nouveau, ls se turent. Au bout d’un moment, Henr-Maxmlen, se rappant la tête, éclata de rre : — Zénon, dt-l, vous souvenez-vous de votre camarade Colas Gheel, l’homme aux chopes de bère, votre rère selon sant Jean ? Il a qutté la abrque de mon bon père, où d’alleurs on crève de am ; l est rentré à Bruges ; l se promène dans les rues, un chapelet au pognet, marmonnant des patenôtres pour l’âme de son Thomas à qu vos machnes machnes ont troublé troublé le cerveau, cer veau, et vous vous trate de
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suppôt du Dable, de Judas et d’Antéchrst. Quant à Cancel Download And Print son Perrotn, nul ne sat où l est ; Satan l’aura prs. Une lade grmace déorma le vsage du jeune clerc, et le vellt : — Sornettes Sorne ttes que tout cela, fit-l. Lassons ces gnares. Ils sont ce qu’ls sont : la char brute que votre père transorme en or dont vous hérterez un jour. Ne me parlez n de machnes n de cous rompus, et je ne vous parlera n des juments ourbues à crédt au maqugnon de Dranoutre, n de filles mses à mal et de barrques de vn déoncées par vous l’autre été. Henr-Maxmlen sans répondre sotat vaguement une chanson d’aventurer. Ils ne s’entretnrent plus que de l’état des routes et du prx des gîtes. Ils se séparèrent au prochan carreour. HenrMaxmlen chost la grand-route. Zénon prt un chemn de traverse. Brusquement, le plus jeune des deux revnt sur ses pas, rejognt son camarade ; l mt la man sur l’épaule du pèlern : — Frère, dt-l, vous souvenez-vous de Wwne, cette fillette pâle que vous déendez jads quand nous autres, mauvas garnements, lu pncons les esses au sortr de l’école ? Elle vous ame ; elle se prétend lée à vous par un vœu ; elle a reusé ces jours-c les ores d’un échevn. Sa tante l’a souetée et mse au pan et à l’eau, mas elle tent bon. Elle vous attendra, dt-elle, s’l le aut, jusqu’à la fin du monde. Zénon s’arrêta. Quelque chose d’ndécs passa dans son regard, et s’y perdt, comme l’humdté d’une vapeur dans un braser brase r. — Tant ps, dt-l. Quo de commun entre mo et cette pette fille souetée ? Un autre m’attend alleurs. Je Je vas à lu. Et l se remt en marche.
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— Qu ? demanda demaCancel nda Henr-Maxmlen Henr-Maxml en stupéat. s tupéat. Le Download And Print preur de Léon, cet édenté ? Zénon se retourna : — Hic Zeno, dt-l. Mo-même.
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LES ENFANCES ENFANCES DE ZENON ZENON
VINGT ans plus tôt, Zénon état venu au monde à Bruges dans la mason d’Henr-Juste. Sa mère se nommat Hlzonde, et son père, Alberco de’ Num, état un jeune prélat ssu d’une antque lgnée florentne. Messer Alberco de’ Num avat, sous ses cheveux longs, dans l’ardeur de la premère adolescence, brllé à la cour des Borga. Entre deux courses de taureaux sur la place de Sant-Perre, l s’état complu à parler chevaux et machnes de guerre avec Léonard de Vnc, alors ngéneur de César ; plus tard, dans le sombre éclat de ses vngt-deux ans, l ut du pett nombre de jeunes gentlshommes que l’amté passonnée de Mchel-Ange honorat comme un ttre. Il eut des aventures qu se concluaent au pognard ; l commença une collecton d’antques ; une dscrète lason avec Jula Farnèse ne nust pas à sa ortune. A Sngagla, ses astuces qu adèrent à are tomber dans l’embûche où ls pérrent les adversares du Sant-Sège lu attrèrent la aveur du pape et de son
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Les enances de Zénon
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fils ; on lu promt presque l’évêché de Nerp, mas Cancel Download And Print la mort nopnée du Sant-Père retarda cette promoton. Ce désappontement, ou peut-être un amour contraré dont le secret ne ut jamas connu, le jeta quelque temps tout enter dans la mortficaton et l’étude. On crut d’abord à quelque ambteux détour. Pourtant, cet homme eréné s’état prs d’un ureux élan d’ascétsme. On le dsat établ à Grotta-Ferrata, dans l’abbaye des mones grecs de Sant-Nl, au mleu d’une des plus âpres soltudes du Latum, où l préparat, dans la médtaton et la prère, sa traducton latne de la Vie des Pères du Désert ; l allut un ordre exprès de Jules II, qu estmat sa sèche ntellgence, pour le décder à suvre, en qualté de secrétare apostolque, les travaux de la Lgue de Cambra. A pene arrvé, l prt dans les dscussons une autorté qu l’emportat sur celle du légat lu-même. Les ntérêts du Sant-Sège au démembrement de Vense, auxquels l n’avat peut-être pas songé dx os dans sa ve, l’occupaent mantenant tout enter. Dans les estns qu se donnèrent pendant les travaux de la Lgue, Messer Alberco de’ Num, drapé de pourpre comme un cardnal, fit valor cette nmtable prestance qu le asat surnommer l’Unque par les courtsanes romanes. Ce ut lu, au cours d’une controverse acharnée, mettant sa parole ccéronenne au servce d’une étonnante ougue de convcton, qu emporta l’adhéson des ambassadeurs de Maxmlen. Pus, comme une lettre de sa mère, Florentne âpre à l’argent, lu rappelat quelques créances à recouvrer sur les Adorno de Bruges, l décda de récupérer sur-le-champ ces sommes s nécessares à sa carrère de prnce de l’Eglse. Il s’nstalla à Bruges chez son agent flamand Juste Lgre, qu lu ort l’hosptalté. Ce gros homme état éru é ru d’talansme d’talansme au pont d’magner d’magner qu’une qu’une
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LA VIE ERRANTE
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senne aïeule, pendant l’un de ces veuvages tempoCancel Download And Print rares dont pâtssent les emmes de marchands, avat dû prêter l’orelle aux dscours de quelque trafiquant génos. Messer Alberco de’ Num se consola de n’être payé qu’en nouvelles trates sur les Herwart d’Augsbourg en asant porter par son hôte la dépense de ses chens, de ses aucons, de ses pages. La Mason Lgre, accotée à ses entrepôts, état tenue avec une opulence prncère ; on y mangeat ben ; on y buvat meux encore ; et quoque Henr-Juste ne lût que les regstres de sa drapere, l tenat à honneur d’y avor avor des de s lvres. Souvent par monts et par vaux, à Tourna, à Malnes où l avançat des onds à la Régente, à Anvers où l venat d’entrer en compte à deux avec l’aventureux Lambrecht von Rechterghem pour le commerce du povre et des autres commodtés d’outre-mer, à Lyon, où l tenat le plus souvent à régler en personne ses transactons bancares à la ore de la Toussant, l confiat le gouvernement du ménage à sa jeune sœur Hlzonde. Tout de sute, Messer Alberco de’ Num s’éprt de celte fillette aux sens fluets, au vsage eflé, vêtue de rades velours brochés qu parassaent la soutenr, et parée, les jours de ête, de joyaux qu’eût envés une mpératrce. Des paupères nacrées, presque roses, sertssaent ses pâles yeux grs ; sa bouche un peu tuméfiée semblat toujours prête à exhaler un soupr, ou le premer mot d’une prère ou d’un chant. Et peut-être ne désrat-on la dévêtr que parce qu’l état dfcle de l’magner nue. Par un sor de nege qu asat rêver davantage de lts ben chauds dans des chambres ben closes, une servante subornée ntrodust Messer Alberco dans l’étuve où Hlzonde rottat de son ses longs cheveux crêpelés qu l’habllaent à la açon d’un
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Les enances de Zénon
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manteau. L’enant se couvrt le vsage, mas lvra Cancel Download And Print sans lutte aux yeux, aux lèvres, aux mans de l’amant son corps propre et blanc comme une amande mondée. Cette nut-là, le jeune Florentn but à la ontane scellée, apprvosa les deux chevreaux jumeaux, apprt à cette ce tte bouche bo uche les le s jeux j eux et e t les le s mgnardses de l’amour. A l’aube, une Hlzonde enfin conquse s’abandonna tout entère, et, le matn, grattant du bout des ongles la vtre blanche de gel, elle y grava à l’ade d’une bague de damant ses ntales entrelacées à celles de son amant, marquant ans son bonheur dans cette substance mnce et transparente, ragle, certes, mas à pene plus que la char et le cœur. Leurs délces s’accrurent de tous les plasrs du temps et du leu : musques savantes qu’Hlzonde exécutat sur le pett orgue hydraulque que lu avat donné son rère, vns ortement épcés, chambres chaudes, promenades en barque sur les canaux encore bleus du dégel ou chevauchées de ma dans les champs en fleur. Messer Alberco passa de bonnes heures, plus suaves peut-être que celles que lu accordat Hlzonde, à rechercher dans les pasbles monastères néerlandas les manuscrts antques oublés ; les érudts talens auxquels l communquat ses trouvalles croyaent vor refleurr en lu le géne du grand Marsle. Le sor, asss devant le eu, l’amant et l’amante regardaent ensemble une grande améthyste apportée d’Itale où l’on voyat des Satyres embrasser des Nymphes, et le Florentn ensegnat à Hlzonde les mots de son pays qu désgnent les choses de l’amour. Il composa pour elle une ballade en langue toscane ; les vers qu’l dédat à cette fille de marchands eussent pu convenr à la Sulamte du Cantque. Le prntemps passa ; l’été vnt. Un beau jour, une lettre de son cousn Jean de Médcs, en parte chrée, en parte rédgée sur ce ton de acéte dont
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Jean Jean assasonnat toutes toute s choses, la poltque, l’érudl’ér udCancel Download And Print ton et l’amour, apporta à Messer Alberco ce détal des ntrgues curales et romanes dont le sevrat son séjour en Flandre. Jules II n’état pas mmortel. Malgré les sots et les stpendés déjà tout acqus à ce rche nas, Raro, le subtl Médcs préparat de longue man son électon par le prochan conclave. Messer Alberco n’gnorat pas que ses quelques abouchements avec les hommes d’aares de l’Empereur n’avaent pas suf pour excuser aux yeux du présent Ponte l’ndu prolongement de son absence ; sa carrère dépendat désormas de ce cousn s papable. Ils avaent joué ensemble sur les terrasses de Caregg ; Jean, plus tard, l’avat ntrodut dans son exquse pette cotere de lettrés un peu bouons et un ren entremetteurs ; Messer Alberco se flattat de parvenr à gouverner cet homme fin, mas d’une mollesse de fille ; l l’aderat à se pousser vers la chase de sant Perre ; l serat, un peu en retrat, et en attendant meux, l’ordonnateur de son règne. Il mt une heure à organser son départ. dépar t. Peut-être n’avat-l pas d’âme. Peut-être ses soudanes ardeurs n’étaent que le débordement d’une orce corporelle ncroyable ; peut-être, acteur magnfique, essayat-l sans cesse une açon nouvelle de sentr ; ou plutôt n’état-ce qu’une successon d’atttudes volentes et superbes, mas arbtrares, comme celles que prennent les figures de Buonarott sur les voûtes de la Sxtne. Lucques, Urbn, Ferrare, ces pons sur l’échquer de sa amlle, obltérèrent soudan pour lu ces plats paysages de verdure et d’eau où l avat un moment consent à vvre. Il empla dans des cores ses ragments de manuscrts antques et les broullons de ses poèmes d’amour. Botté, éperonné, ganté de cur et coé de eutre, plus que jamas cavale cavalerr e t mons que jamas homme d’Eglse, l monta chez Hlzonde lu sgnfier qu’l partat.
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Les enances de Zénon
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Elle état grosse. Elle le savat. Elle ne le lu dt Cancel Download And Print pas. Trop tendre pour are obstacle à ses vsées ambteuses, elle état auss trop fière pour se prévalor d’un aveu que sa talle étrote, son ventre plat, ne confirmaent pas encore. Il lu eût déplu d’être accusée de mensonge, et, presque autant, de se rendre mportune. Mas quelques mos plus tard, ayant ms au monde un enant mâle, elle ne se crut pas le drot de lasser gnorer à Messer Alberco de’ Num la nassance de leur fils. Elle savat à pene écrre ; elle mt des heures à composer une lettre, eaçant du dogt les mots nutles ; ayant enfin achevé sa mssve, elle la confia à un marchand génos dont elle état sûre, et qu partat pour Rome. Messer Alberco ne répondt jamas. Ben que le Génos l’assurât plus tard avor rems lu-même ce message, Hlzonde voulut crore que l’homme qu’elle avat amé ne l’avat l’avat jamas reçu. r eçu. Ses brèves amours suves d’un brusque abandon avaent rassasé la jeune emme de délces et de dégoûts ; lasse de sa char et du rut de celle-c, elle semblat étendre à son enant la réprobaton ennuyée qu’elle avat pour elle-même. Inerte dans son lt d’accouchée, elle regarda avec ndérence les bonnes emmalloter cette pette masse brunâtre à la lueur des brases du oyer. La bâtardse n’étant qu’un accdent commun, Henr-Juste eût pu aclement négocer pour sa sœur de profitables marages, mas le souvenr de l’homme qu’elle n’amat plus sufsat à détourner Hlzonde du pesant bourgeos que le sacrement eût pu mettre près d’elle sous l’édredon et sur l’oreller. Elle traînat sans plasr les habts splenddes que son rère asat taller pour elle dans les plus chères étoes, mas par rancune envers so-même plutôt que par remords se prvat de vns, de mets recherchés, de bon eu et souvent de lnge
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LA VIE ERRANTE
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blanc. Elle assstat ponctuellement aux ofces de Cancel Download And Print l’Eglse ; le sor pourtant, après le repas, s’l arrvat qu’un convve d’Henr-Juste dénonçât les débauches et les exactons romanes, elle arrêtat pour meux entendre son traval de dentelle, cassant paros machnalement un fil qu’ensute elle renouat en slence. Pus, les hommes déploraent l’ensablement du port, qu vdat Bruges au profit d’autres places plus accessbles aux navres ; on se moquat de l’ngéneur Lancelot Blondeel qu prétendat à l’ade de chenaux et de ossés guérr cette gravelle. Ou ben, de grasses plasanteres crculaent ; quelqu’un débtat un conte, vngt os ressassé, d’amante avde, de mar berné, de séducteur caché dans un cuveau, ou de marchands retors se dupant l’un l’autre. Hlzonde passat dans la cusne pour surveller la desserte ; elle ne jetat qu’un coup d’œl à son fils tétant goulûment une servante. Un matn, Henr-Juste, au retour d’un de ses voyages, lu présenta un nouvel hôte. C’état un homme à barbe grse, s smple et s grave qu’on pensat en le voyant au vent salubre sur une mer sans solel. Smon Adransen cragnat Deu. L’âge qu venat et une rchesse qu’on dsat honnêtement acquse donnaent à ce marchand de Zélande une dgnté de patrarche. Il état deux os veu : deux ménagères écondes avaent successvement occupé sa mason et son lt avant d’aller s’étendre côte à côte dans la tombe amlale au mur d’une églse de Mddelbourg ; ses fils à leur tour avaent at ortune. Smon état de ceux à qu le désr donne envers les emmes une sollctude paternelle. Jugeant qu’Hlzonde état trste, l prt coutume d’aller s’asseor auprès d’elle. Henr-Juste avat pour lu une solde reconnassance. Le crédt de cet homme l’avat soutenu dans des passes dfcles ; l respectat Smon au pont de
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se retenr de tropCancel bore enDownload sa présence. Mas la tentaAnd Print ton des vns état grande. Ceux-c le rendaent loquace. Il ne fit pas longtemps mystère à son hôte des nortunes d’Hlzonde. Comme elle travallat dans la salle, sous la enêtre, un matn d’hver, Smon Adransen s’approcha d’elle et dt solennellement : — Un jour, jour, Deu eacera eace ra du cœur des hommes toutes les los qu ne sont pas d’amour. Elle ne comprt pas. Il reprt : — Un jour, Deu n’acceptera ’accepte ra d’autre baptême que celu de l’Esprt n d’autre sacrement du marage que celu que consomment tendrement les corps. Hlzonde alors se mt à trembler. Mas cet homme sévèrement doux commença de lu dre le soue de sncérté nouvelle qu passat sur le monde, le mensonge de toute lo complquant l’œuvre de Deu, l’approche d’un temps où la smplcté d’amer serat égale à la smplcté de crore. Dans son langage magé comme les eullets d’une Bble, les paraboles se mêlaent au souvenr des Sants qu selon lu avaent at échec à la tyranne romane ; parlant à pene plus bas, mas non sans un regard pour s’assurer que les portes étaent closes, l avoua héster encore à are publquement acte de o anabaptste, mas l avat répudé en secret les pompes pérmées, les rtes vans et les sacrements trompeurs. A l’en crore, les Justes, vctmes et prvlégés, ormaent d’âge en âge une pette bande ndemne des crmes et des oles du monde ; le péché n’état que dans l’erreur ; pour les cœurs chastes, la char état é tat pure. Pus, l lu parla de son fils. L’enant d’Hlzonde, conçu hors des los de l’Eglse, et contre elles, lu semblat plus désgné que tout autre pour recevor et transmettre un jour la bonne nouvelle des Smples et des Sants. L’amour de la verge vte sédute pour le beau démon talen au vsage d’archange devenat
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pour Smon une allégore mystéreuse : Rome état Cancel Download And Print la Prosttuée de Babylone à qu l’nnocente avat été bassement sacrfiée. Paros, un sourre crédule de vsonnare passat sur ce grand vsage erme, et dans cette calme vox l’ntonaton par trop péremptore de celu qu tent à se convancre, et réquemment à se duper so-même. Mas Hlzonde n’état sensble chez cet étranger qu’à sa tranqulle bonté. Tands que tous ceux qu entouraent la jeune emme n’avaent jusqu’c témogné envers elle que dérson, pté, ou qu’une ndulgence bonhomme et grossère, Smon dsat en lu parlant de l’homme qu l’avat abandonnée : — Votre époux. Et l rappelat gravement que toute unon est ndssoluble devant Deu. Hlzonde se rassérénat en l’écoutant. Toujours trste, elle redevnt fière. La mason des Lgre, que l’orguel du commerce martme avat blasonnée d’un navre, état amlère à Smon comme sa propre demeure. L’am d’Hlzonde revenat chaque année ; elle l’attendat, et, la man dans la man, ls parlaent de l’églse en esprt qu remplacera l’Eglse. Un sor d’automne, des marchands talens leur apportèrent des nouvelles. Messer Alberco de’ Num, nommé cardnal à trente ans, avat été tué à Rome au cours d’une débauche dans une vgne des Farnèse. Les pasquns en vogue accusaent de ce meurtre le cardnal Jules de Médcs, mécontent de l’nfluence prse par son parent sur l’esprt du Sant-Père. Smon n’écouta qu’avec dédan ces vagues bruts sorts de la sentne romane. Mas, une semane plus tard, un rapport reçu par Henr-Juste confirma ces dres. L’apparente tranqullté d’Hlzonde ne permettat pas de conjecturer s en secret elle se réjoussat ou pleurat.
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— Vous Vous volà Cancel veuve, dt ausstôt a usstôt Smon Adransen Download And Print sur ce ton de solennté tendre qu’l aectat sans cesse envers elle. Contrarement aux pronostcs d’Henr-Juste, l partt le lendeman. Sx mos plus tard, à la date accoutumée, l revnt et la demanda demanda à son rère. Henr-Juste le fit entrer dans la salle où travallat Hlzonde. Il s’asst près d’elle. Il lu dt : — Deu ne nous a pas donné le drot de are sourr sourr ses créatures. Hlzonde arrêta sa dentelle. Ses mans restaent étendues sur la trame, et ces longs dogts rémssants sur les rnceaux nachevés asaent penser aux entrelacs de l’avenr l’avenr.. Smon contnua : — Comment Deu nous aurat-l donné le drot de nous are sourr ? La belle leva vers lu son vsage d’enant malade. Il reprt : — Vous n’êtes ’ê tes pas heureuse dans cette ce tte mason plene de rres. Ma mason à mo est plene d’un grand slence. Venez. Elle accepta. Henr-Juste se rottat les mans. Jacquelne, sa chère emme, épousée peu après les débores d’Hlzonde, se plagnat bruyamment de ne passer dans la amlle qu’après une putan et un bâtard de prêtre, et le beau-père, le rche négocant tournasen Jean Bell, s’autorsat de ces crs pour retarder le payement de la dot. Et, en eet, ben qu’Hlzonde néglgeât son fils, le mondre hochet accordé à l’enant engendré dans des draps légtmes mettat la guerre entre les deux emmes. La blonde Jacquelne pourrat désormas tout son saoul se runer en bonnets et en bavors brodés, et lasser, les jours de ête, son gros Henr-Maxmlen ramper sur la nappe, les peds dans les plats.
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Malgré son averson pour les cérémones de l’Eglse, Cancel Download And Print Smon consentt à ce que les noces ussent célébrées avec une certane pompe, pusque tel état, de açon nattendue, le désr d’Hlzonde. Mas le sor, secrètement, quand les époux se urent retrés dans la chambre nuptale, l réadmnstra à sa manère le sacrement en rompant le pan et en buvant le vn avec celle de son chox. Hlzonde revvat au contact de cet homme comme une barque échouée qu’entraîne la marée montante. Elle goûtat le mystère sans honte de ces plasrs perms, et la açon dont le vel homme, penché sur son épaule, lu caressat les sens, comme s are l’amour état une manère de bénr. Smon Adransen se chargeat de Zénon. Mas l’enant, poussé par Hlzonde vers ce vsage barbu et rdé, où une verrue tremblat sur la lèvre, cra, se débattt, s’arracha arouchement à la man maternelle et à ses bagues qu lu rossaent les dogts. Il prt la ute. On le retrouva le sor caché dans le ournl au ond du jardn, prêt à mordre le valet qu le retra en rant de derrère un tas de bûches. Smon, désespérant d’apprvoser ce louveteau, dut se résoudre à le lasser en Flandre. D’alleurs, l état clar que la présence de l’enant aggravat la trstesse d’Hlzonde. Zénon grandt pour l’Eglse. La clércature restat pour un bâtard le moyen le plus sûr de vvre à l’ase et d’accéder aux honneurs. De plus, cette rage de savor, qu de bonne heure posséda Zénon, ces dépenses d’encre et de chandelle brûlée jusqu’à l’aube, ne semblaent tolérables à son oncle que chez un apprent prêtre. Henr-Juste confia l’écoler à son beau-rère, Bartholommé Campanus, chanone de Sant-Donaten à Bruges. Ce savant usé par la prère et l’étude l’é tude des des bonnes lettres le ttres état s doux
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qu’l semblat déjà veux. Il apprt à son élève le Cancel Download And Print latn, le peu qu’l savat de grec et d’alchme, et amusa la curosté de son écoler pour les scences à l’ade de l’Histoire naturelle de Plne. Le rod cabnet du chanone état un reuge où le garçon échappat aux vox des courters dscutant les draps d’Angleterre, à la plate sagesse d’Henr-Juste, aux caresses des chambrères cureuses de rut vert. Il s’y lbérat de la servtude et de la pauvreté de l’enance ; ces lvres et ce maître le trataent en homme. Il amat cette chambre tapssée de volumes, cette plume d’oe, cet encrer de corne, outls d’une connassance nouvelle, et l’enrchssement qu consste à apprendre que le rubs vent de l’Inde, que le soure se mare au mercure, et que la fleur qu’on nomme lilium en latn s’appelle en grec krinon et en hébreu susannah. Il s’aperçut ensute que les lvres dvaguent et mentent comme les hommes, et que les prolxes explcatons du chanone portaent souvent sur des ats qu, n’étant pas, n’avaent pas beson d’être explqués. explqués. Ses réquentatons nquétaent : ses compagnons avors de ce temps-là étaent le barber Jean Myers, hable homme, sans parel pour la sagnée et la talle de la perre, mas qu’on soupçonnat de dsséquer les morts, et un certan tsserand nommé Colas Gheel, rbaud et hâbleur, avec qu des heures, meux employées à l’étude et à la prère, se passaent à combner des poules et des manvelles. Ce gros homme à la os v et lourd, qu dépensat sans compter l’argent qu’l n’avat pas, asat figure de prnce aux yeux des apprents qu’l dérayat les jours de kermesse. kerme sse. Cette Ce tte solde masse de muscles, de crns roux et de peau blonde logeat un de ces esprts chmérques et avsés tout ensemble qu ont sans cesse pour souc d’aûter, de réajuster, de smplfier, ou de complquer quelque chose. Chaque année, des
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atelers ermaent en vlle ; et Henr-Juste qu se Cancel Download And Print vantat de garder les sens ouverts par chrétenne charté profitat du chômage pour rogner pérodquement les salares. Ses ouvrers apeurés, trop heureux encore d’avor un état et une cloche qu chaque jour les appelat au traval, vvaent ans sous le coup de vagues rumeurs de clôture, parlaent pteusement d’avor bentôt à grossr les bandes de mendants qu par ces temps de cherté erayaent les bourgeos et battaent les routes. Colas rêvat de soulager leurs travaux et leurs détresses par l’emplo de méters à tsser mécanques tels qu’on en essayat çà et là en grand secret à Ypres, à Gand, et à Lyon en France. Il avat vu des dessns qu’l communqua à Zénon ; l’écoler rectfia des chres, s’enflamma pour des épures, changea l’enthousasme de Colas pour ces engns nouveaux en mane partagée. Les genoux plés, penchés côte à côte sur un tas de erralle, ls n’étaent jamas las de s’entrader à suspendre un contrepods, à ajuster un lever, à monter et à démonter des roues s’engrenant l’une dans l’autre ; des dscussons sans ln s’établssaent autour de l’emplacement d’un boulon ou du grassage d’une glssère. L’ngénosté de Zénon dépassat de beaucoup celle du lent cerveau de Colas Gheel, mas les mans épasses de l’artsan étaent d’une dextérté dont s’émervellat l’élève du chanone, qu expérmentat pour la premère os avec autre chose que des lvres. — Prachtig werk, mijn zoon, prachtig werk, dsat pesamment le contremaître en passant son bras lourd autour du cou de l’écoler. Le sor, après l’étude, Zénon rejognat à la dérobée son compère, jetant une pognée de gravers contre la vtre de la taverne où le maître d’ateler s’attardat souvent plus que de rason. Ou ben, presque en cachette, l se aufilat dans le con d’entrepôt désert où Colas logeat avec ses machnes. La grande pèce
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état sombre ; deCancel peur du eu, la chandelle brûlat Download And Print au mleu d’un bassn d’eau placé sur la table, comme un pett phare au mleu d’une mer mnuscule. L’apprent Thomas de Dxmude, qu servat de actotum au maître d’ateler, sautat comme un chat, par jeu, sur les branlants châsss, et marchat dans la nut nore des combles, balançant d’une man une lanterne ou une chope. Colas Gheel alors rat d’un gros rre. Asss sur une planche, roulant les yeux, l écoutat les dvagatons de Zénon galopant des atomes d’Epcure à la duplcaton du cube, et de la nature de l’or à la sottse des preuves de l’exstence de Deu, et un pett sement sement d’admraton lu sortat des lèvres. L’écoler trouvat parm ces hommes en casaque de cur ce que les fils de segneurs trouvent auprès des palereners et des valets de chens : un monde plus rude et plus lbre que le sen, parce qu’l se mouvat plus bas, lon des préceptes et des syllogsmes, l’alternance rassurante de travaux grossers et de paresses acles, l’odeur et la chaleur humanes, un langage de jurons, d’allusons et de proverbes, auss secret que le jargon des compagnonnages, une actvté qu ne consste pas qu’à se courber sur un lvre une plume à la man. L’étudant prétendat rapporter de l’ofcne et de l’ateler de quo nfirmer ou confirmer les assertons de l’école : Platon d’une part, Arstote de l’autre étaent tratés en smples marchands dont on vérfie les pods. Tte-Lve n’état qu’un bavard ; César, s sublme qu’l ût, état mort. Des héros de Plutarque, dont la moelle avat nourr le chanone Bartholommé Campanus conjontement au lat des Evangles, le garçon ne retenat plus qu’une seule chose, et c’est que l’audace de l’esprt et de la char les avaent menés auss lon et auss haut que la contnence et le jeûne, qu condusent, dt-on, les bons chrétens à leur cel. Pour le chanone la sagesse sacrée et
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sa sœur proane s’étayaent l’une l’autre : le jour où Cancel Download And Print l entendt Zénon tourner en dérson les peuses rêveres du Songe de Scipion, l comprt que son élève avat renoncé en secret aux consolatons du Chrst. Pourtant, Zénon s’nscrvt à Louvan, à l’Ecole de théologe. Sa ougue étonna ; le nouvel arrvant, capable de soutenr sur-le-champ quelque thèse que ce ût, acqut parm ses condscples un prestge extraordnare. La ve des bachelers état large et joyeuse ; on le conva à des estns es tns où l ne but que de l’eau clare ; et les filles au bordel lu plurent autant qu’à un délcat un plat de vandes gâtées. On s’accordat à le trouver beau, mas sa vox coupante asat peur ; le eu de ses prunelles sombres ascnat et déplasat tout ensemble. Des bruts extravagants coururent sur sa nassance, qu’l ne réuta pas. Les adeptes de Ncolas Flamel reconnurent bentôt dans l’écoler rleux, toujours asss à lre sous le manteau d’une chemnée, les sgnes d’une préoccupaton alchmque : une pette socété d’esprts plus ureteurs et plus nquets que les autres ouvrt ses rangs pour l’accuellr. Avant la fin du terme, l regardat de haut les docteurs en robe de ourrure, courbés au réectore sur leur plene assette, lourdement satsats de leur épas et pesant savor ; et les étudants bruyants et rustauds, ben décdés à ne s’nstrure qu’autant qu’l le aut pour décrocher une snécure, pauvres hères dont la ermentaton d’esprt n’état qu’une poussée de sang qu passerat avec la jeunesse. Peu à peu, ce dédan s’étendt à ses ams cabbalstes eux-mêmes, esprts creux, gonflés de vent, gavés de mots qu’ls n’entendaent pas et les régurgtant en ormules. Il constatat avec amertume qu’aucun de ces gens, sur qu l avat d’abord compté, n’allat en esprt ou en acte plus avant, ou même auss lon que lu.
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Les enances de Zénon
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Zénon logeatCancel tout enDownload haut d’une mason drgée And Print par un prêtre ; un écrteau, suspendu dans l’escaler, ordonnat aux pensonnares de se réunr pour l’ofce de Comples, et déendat sous pene d’amende d’ntrodure des prosttuées et de se soulager alleurs qu’aux latrnes. Mas n les odeurs, n la sue de l’âtre, n l’agre vox de la ménagère, n les murs crblés par ses prédécesseurs de acétes latnes et de croqus obscènes, n les mouches posées sur les parchemns ne dérangeaent de ses calculs cet esprt pour qu chaque objet au monde état un phénomène ou un sgne. Le bacheler eut dans cette soupente ces doutes, ces tentatons, ces tromphes et ces déates, ces pleurs de rage et ces joes de la jeunesse que l’âge mûr gnore ou dédagne, et dont lu-même ne garda par la sute qu’un souvenr entaché d’oubl. Porté de préérence vers les passons des sens qu s’élognent le plus de ce qu’éprouvent ou qu’avouent la plupart des hommes, celles qu oblgent au secret, souvent au mensonge, paros au défi, ce Davd aux prses avec le Golath scolastque crut trouver son Jonathan dans un condscple ndolent et blond, qu bentôt s’écarta, abandonnant ce tyrannque camarade en aveur de compères plus connasseurs en vns et en dés. Ren n’avat paru au-dehors de cette accontance souterrane, tout en contact et en présence, cachée comme les entralles et le sang ; sa fin n’eut pour eet que de replonger Zénon plus avant dans l’étude. Blonde auss la brodeuse Jeannette Fauconner, fille antasque, harde comme un page, habtuée à traîner après ses jupons une escorte d’étudants, et à qu le clerc fit tout un sor une cour de ralleres et d’nsultes. Zénon s’étant vanté d’obtenr, s’l lu plasat, les aveurs de cette fille en mons de temps qu’l n’en aut pour galoper des Halles à l’églse SantPerre, une rxe s’ensuvt qu tourna en batalle rangée, et la belle Jeannette elle-même, tenant à se
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montrer généreuse, accorda à son nsulteur blessé Cancel Download And Print un baser de sa bouche que le jargon du temps appelat le portal de l’âme. Vers la Noël, enfin, à une époque où Zénon ne gardat d’autre souvenr de cette équpée qu’une balare en plen vsage, l’enjôleuse se glssa chez lu par une nut de lune, monta sans brut l’escaler grnçant et se coula dans son lt. Zénon ut surprs par ce corps serpentn et lsse, hable à mener le jeu, par cette gorge de colombe roucoulant à vox basse, par ces rres étoués juste à temps pour ne pont éveller la ménagère dormant dans la soupente vosne. Il n’en eut que la joe mêlée de crante du nageur qu plonge dans une eau raraîchssante et peu sûre. Pendant quelques jours, on le vt nsolemment se promener au côté de cette fille perdue, bravant les astdeuses semonces du Recteur ; l’appétt lu semblat venu de cette srène narquose et glssante. Mons d’une semane plus tard, néanmons, l s’état rejeté tout enter dans ses lvres. On le blâma d’abandonner s promptement cette fille pour laquelle l avat comproms s nsouceusement pour tout un terme les honneurs du cum laude : et son dédan relat des emmes le fit soupçonn soupçonner er d’un commerce avec les esprts succubes.
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LES LOISIRS DE L’ÉTÉ
CET été-là, un peu avant l’août, Zénon alla comme chaque année se mettre au vert dans la mason des champs du banquer. Mas ce n’état plus, comme autreos, dans la terre qu’Henr-Juste avat possédée de tout temps à Kuypen dans la campagne brugeose : l’homme d’aares s’état rendu acquéreur du domane de Dranoutre, entre Audenarde et Tourna, et de son antque habtaton segneurale remse en état après le départ des Franças. On avat rénové ce logs dans le style à la mode, avec des plnthes et des caryatdes de perre. De plus en plus, le gros Lgre se lançat dans ces achats de bens au solel qu attestent presque arrogamment la ortune d’un homme, et ont de lu en cas de danger le bourgeos de plus d’une vlle. En Tournass, l arrondssat pèce à pèce les terres de sa emme Jacquelne ; près d’Anvers, l venat d’acquérr le domane de Gallort, annexe splendde à son comptor de la place Sant-Jacques où l opérat désormas avec Lazarus Tucher. Grand Trésorer des Flandres, proprétare
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d’une rafnere de sucre à Maestrcht et d’une autre Cancel Download And Print aux Canares, ermer de la douane de Zélande, détenteur du monopole de l’alun pour les régons baltques, assurant pour un ters avec les Fuggers les revenus de l’ordre de Calatrava, Henr-Juste se rottat de plus en plus aux pussants de ce monde : la Régente à Malnes lu orat de sa man le pan bént ; le segneur de Croy, son oblgé pour la somme de treze mlle florns, avat récemment consent à tenr sur les onts un fils nouveau-né du marchand, et on avat prs date avec cette Excellence pour are en son château du Rœulx la ête du baptême. Aldegonde et Constance, les deux filles encore toutes jeunettes du grand homme d’aares, auraent un jour des ttres comme elles avaent déjà une traîne à leurs jupes. Sa drapere brugeose n’étant plus pour Henr Juste Juste qu’une entreprse surannée, concurrencée par ses propres mportatons de brocarts de Lyon et de velours d’Allemagne, l venat d’établr aux envrons de Dranoutre, en plen plat pays, des atelers ruraux où les ordonnances muncpales de Bruges ne le brmaent plus. On y montat sur son ordre une vngtane de méters à tsser mécanques abrqués l’autre été par Colas Gheel sur les dessns de Zénon. Le marchand avat prs antase d’essayer de ces ouvrers de bos et de métal qu ne buvaent n ne brallaent, asaent à dx l’ouvrage de quarante, et ne profitaent pas de la cherté des vvres pour demander une augmentaton de pae. Par un jour ras qu déjà sentat l’automne, Zénon se rendt à ped à cette tssutere d’Oudenove. Des chômeurs en quête de traval encombraent le pays ; dx leues à pene séparaent Oudenove des splendeurs pompeuses de Dranoutre, mas la dstance aurat auss ben pu être celle du cel à l’ener.
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Les loisirs de l'été
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Henr-Juste avat logé un pett groupe d’artsans et Cancel Download And Print de maîtres d’ateler brugeos dans une velle bâtsse réparée tant ben que mal à l’entrée du vllage ; ce dortor tournat au tauds. Zénon ne fit qu’apercevor Colas Gheel, vre ce matn-là, dont un pâle et morose apprent ranças nommé Perrotn lavat les écuelles et survellat le eu. Thomas, maré depus peu à une fille du pays, paradat sur la place dans un casaqun de soe rouge étrenné le jour des noces. Un pett homme sec et v, un certan Therry Loon, dévdeur promu subtement maître d’ateler, montra à Zénon les machnes enfin montées, et que les manœuvres avaent ausstôt prses en grppe, après avor ondé sur elles l’extravagant espor de gagner plus et de pener mons. Mas d’autres problèmes préoccupaent désormas le clerc ; ces châsss et ces contrepods ne l’ntéressaent plus. Therry Loon parlat d’Henr Juste Juste avec une révérence révé rence obséqueuse, mas jetat je tat à Zénon des regards de côté en déplorant les vvres nsufsants, les masures de bos et de plâtras bâtes à la hâte par les régsseurs du marchand, les heures plus longues qu’à Bruges, la cloche muncpale ne les gouvernant plus. Le pett homme regrettat le temps où les artsans soldement établs dans leurs prvlèges tordaent le cou aux ouvrers lbres et tenaent tête aux prnces. Les nouveautés ne lu asaent pas peur ; l apprécat l’ngénosté de ces espèces de cages où chaque manœuvre gouvernat smultanément des peds et des mans deux levers et deux pédales, mas cette cadence trop rapde épusat les hommes, et ces commandes complquées demandaent plus de son et d’attenton que n’en possèdent des dogts et des caboches d’artsans. Zénon suggéra des ajustements, mas le nouveau contremaître n’en parut pont are cas. Ce Therry ne songeat à coup sûr qu’à se débarrasser de Colas Gheel : l haussat les épaules en mentonnant cette gaure molle, ce
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LA VIE ERRANTE
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broullon dont les élucubratons mécanques n’auCancel Download And Print raent finalement pour eet que d’extorquer des hommes plus de traval et d’emprer leur chômage, ce veau à qu la dévoton état venue comme une gale depus qu’l n’avat plus à sa dsposton les ases et les agréments de Bruges, cet vrogne qu prenat après bore le ton contrt d’un prêcheur de place publque. Ces gens querelleurs et gnares dégoûtèrent le clerc ; comparés à eux, les docteurs ourrés d’hermne et ourbs de logque reprenaent du pods. Ses talents mécanques valaent à Zénon peu de consdératon dans la amlle, où l état à la os méprsé pour son ndgence de bâtard et vaguement respecté pour son utur état de prêtre. A l’heure du souper, dans la salle, le clerc écoutat Henr-Juste éructer de pompeux dctons sur la condute de la ve : l s’agssat toujours d’évter les pucelles, de peur des grossesses, les emmes marées, de peur du pognard, les veuves, parce qu’elles vous dévorent, de cultver ses rentes et de prer Deu. Le chanone Bartholommé Campanus, habtué à ne demander aux âmes que le peu qu’elles consentent à donner, ne désapprouvat pas cette épasse sagesse. Les mossonneurs, ce jour-là, avaent trouvé une sorcère occupée à psser malceusement dans un champ afin de conjurer la plue sur le blé déjà à dem pourr par d’nsoltes averses ; ls l’avaent jetée au eu sans autre orme de procès ; on se gaussat de cette sbylle qu croyat commander à l’eau, mas n’avat pas su se garer des brases. Le chanone explquat que l’homme, en nflgeant aux méchants le supplce des flammes, qu dure un moment, ne at que se régler sur Deu qu les condamne au même supplce, mas éternel. Ces propos n’nterrompaent pas la copeuse collaton du sor ; Jacquelne échauée par l’été gratfiat Zénon de ses agaceres d’honnête
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Les loisirs de l'été
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emme. Cette grasse Flamande, rembelle par ses Cancel Download And Print récentes couches, vane de son tent et de ses mans blanches, gardat une luxurance de pvone. Le prêtre ne parassat remarquer n le corsage bâllant, n les mèches blondes rôlant la nuque du jeune clerc penché sur une page avant l’arrvée des lampes, n le sursaut de colère de l’étudant contempteur des emmes. Chaque fille du sexe état pour Bartholommé Campanus Mare et Eve tout ensemble, celle qu verse pour le salut du monde son lat et ses larmes, et celle qu s’abandonne au serpent. Il bassat les yeux sans juger. Zénon sortat, marchant à grands pas. La rase terrasse, avec ses arbres tout neus et ses pompeuses rocalles, cédat bentôt la place aux pâturages et aux terres de labour ; un hameau aux tots bas se cachat sous le moutonnement des meules. Mas le temps n’état plus où Zénon aurat pu s’étendre près des eux de la Sant-Jean au côté des ouvrers de erme, comme naguère à Kuypen, dans la nut clare qu ouvre l’été. Par les sors rods, on ne lu aurat pas non plus at place sur le banc de la orge, où quelques rustres, toujours les mêmes, s’hébètent à la bonne chaleur, troquant des bouts de nouvelles, au bourdonnement des dernères mouches de la sason. Tout mantenant le séparat d’eux : leur lent jargon de vllage, leurs pensées à pene mons lentes, et la crante qu’nspre un garçon qu parle latn et lt dans les astres. Il lu arrvat paros d’entraîner son cousn dans des équpées nocturnes. Il descendat dans la cour, sant doucement pour éveller son camarade. Henr-Maxmlen enjambat le balcon, encore appesant du lourd sommel de l’adolescence, sentant le cheval et la sueur après les longues voltges de la velle. Mas l’espor d’une coureuse à culbuter au bord d’une route ou de claret à lamper dans l’auberge en compagne de roulers
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LA VIE ERRANTE
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le ranmat vte. Les deux compagnons prenaent Cancel Download And Print par les terres de labours, s’entradant au saut des ossés, se drgeant vers la flamme d’un camp de bohémens ou le eu rouge d’une dstante taverne. Au retour, Henr-Maxmlen se vantat de ses explots ; Zénon tasat les sens. La plus sotte de ces aventures ut celle où nutamment l’hérter des Lgre se glssa dans l’écure d’un maqugnon de Dranoutre, et pegnt de rose deux juments que leur proprétare le matn crut ensorcelées. Il se découvrt un beau jour qu’Henr-Maxmlen avat dépensé dans l’une l’une de ces sortes quelques quelques ducats volés au gros Juste Juste : moté jeu, moté pour de bon, le père e t le fils en vnrent aux mans ; on les sépara comme on sépare un taureau et son taurllon onçant l’un sur l’autre dans l’enclos d’une erme. Mas le plus souvent Zénon partat seul, à l’aube, ses tablettes à la man, et s’élognat dans la campagne, à la recherche d’on ne sat quel savor qu vent drectement des choses. Il ne se lassat pas de soupeser et d’étuder cureusement les perres dont les contours pols ou rugueux, les tons de roulle ou de mosssure racontent une hstore, témognent des métaux qu les ont ormées, des eux ou des eaux qu ont jads précpté leur matère ou coagulé leur orme. Des nsectes s’échappaent d’en dessous, étranges bêtes d’un anmal ener. Asss sur un tertre, regardant houler sous le cel grs les planes renflées çà et là par les longues collnes sablonneuses, l songeat aux temps révolus où la mer avat occupé ces grands espaces où poussat mantenant du blé, leur lassant dans son retrat la conormté et la sgnature des vagues. Car tout change, et la orme du monde, et les productons de cette nature qu bouge et dont chaque moment prend des sècles. Ou encore, son attenton devenue tout à coup fixe et urtve comme celle d’un braconner, l se
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Les loisirs de l'été
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tournat vers les Cancel bêtes quDownload courent, volent et rampent And Print dans les proondeurs des bos, s’ntéressat à la trace exacte qu’elles lassent derrère elles, à leur rut, leur accouplement, leur nourrture, à leurs sgnaux et leurs stratagèmes, et à la manère dont, rappées d’un bâton, elles meurent. Une sympathe l’attrat vers les reptles calomnés par la peur ou la superstton humane, rods, prudents, à dem souterrans, enermant dans chacun de leurs rampants anneaux une sorte de mnérale sagesse. Un de ces sors-là, durant le plus chaud de la cancule, Zénon, ort des nstructons de Jean Myers, prt sur so de sagner un ermer attent d’un coup de sang, au leu d’attendre l’ncertan secours du barber. Le chanone Campanus déplora cette ndécence ; Henr-Juste, venant à la rescousse, plagnt hautement ses ducats dépensés à dérayer les études de son neveu, s celu-c allat finr entre une lancette et un bassnet. Le clerc subt ces remontrances avec un slence haneux. A partr de ce jour-là, l prolongea ses absences. Jacquelne croyat à quelque amourette avec une fille de erme. Une os, emportant avec lu son pan pour pluseurs jours, l s’aventura jusqu’à la orêt d’Houthust. Ces bos étaent le reste des grandes utaes du temps païen : d’étranges consels tombaent deleurs eulles. La tête levée, contemplant d’en bas ces épasseurs de verdure et d’agulles, Zénon se rengageat dans les spéculatons alchmques abordées à l’école, ou en dépt de l’école ; l retrouvat dans chacune de ces pyramdes végétales le héroglyphe hermétque des orces ascendantes, le sgne de l’ar, qu bagne et nourrt ces belles enttés sylvestres, du eu, dont elles portent en so la vrtualté, et qu peut-être les détrura un jour. Mas ces montées s’équlbraent d’une descente : sous ses
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peds, le peuple aveugle et sentent des racnes Cancel Download And Print mtat dans le nor l’nfine dvson des brndlles dans le cel, s’orentat précautonneusement vers on ne sat quel nadr. Çà et là, une eulle trop tôt jaune trahssat sous le vert ver t la présence des métaux mé taux dont elle avat ormé sa substance et dont elle opérat la transmutaton. La poussée du vent déjetat les grands ûts comme un homme son destn. Le clerc se sentat lbre comme la bête et menacé comme elle, équlbré comme l’arbre entre le monde d’en bas et le monde d’en haut, ployé lu auss par des pressons s’exerçant sur lu et qu ne cesseraent qu’à sa mort. Mas le mot mort n’état encore qu’un mot pour cet homme de vngt ans. Au crépuscule, l remarqua sur la mousse la trace d’un charro d’arbres abattus ; une odeur de umée le condust dans la nut déjà sombre à la hutte de charbonners. Tros hommes, un père et ses deux fils, bourreaux des arbres, maîtres et servteurs du eu, oblgeaent celu-c à consumer lentement ses vctmes, changeant l’humde bos qu se et tressalle en charbon qu garde à jamas son afnté avec l’élément gné. Leurs loques se conondaent avec leurs corps presque éthopens grmés de sue et de cendres. Les pols blancs du père, les crns blonds des fils étonnaent autour de ces aces nores et sur ces nores potrnes nues. Ces tros-là, auss seuls que des anachorètes, avaent à peu près oublé tout ce qu est du sècle ou n’en avaent jamas ren su. Peu leur mportat qu régnat sur les Flandres, ou s c’état l’an 1529 de l’Incarnaton du Chrst. S’ébrouant plutôt qu’ls ne parlaent, ls accuellrent Zénon comme des anmaux de la orêt en accuellent un autre ; le clerc n’gnorat pas qu’ls l’eussent pu tuer pour lu prendre ses vêtements au leu d’accepter une porton de son pan et de partager tage r avec avec lu leur soupe d’herbes. d’herbe s. Tard Tard dans la nut,
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Les loisirs de l'été
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étouant dans leur hutte enumée, l se leva pour sa Cancel Download And Print coutumère observaton des astres, et sortt sur l’are calcnée qu dans la nut semblat blanche. Le bûcher des charbonners ardat sourdement, constructon géométrque auss parate que les ortns des castors et les ruches des abelles. Une ombre bougeat sur champ rouge ; le plus jeune des deux rères vellat sur la masse ncandescente. Zénon l’ada à séparer à l’ade d’un croc les rondns s’embrasant trop vte. Véga et Deneb étncelaent entre les aîtes des arbres ; les troncs et les branches occultaent les étoles placées plus bas dans le cel. Le clerc pensa à Pythagore, à Ncolas de Cusa, à un certan Copernc dont les théores récemment exposées étaent ardemment accuelles ou volemment contredtes à l’Ecole, et un mouvement d’orguel le prt à l’dée d’appartenr à cette ndustreuse et agtée race des hommes qu domestque le eu, transorme la substance des choses, et scrute les chemns des astres. Quttant ses hôtes sans plus de cérémone qu’l eût qutté des chevreuls des bos, l se remt mpatemment en marche comme s le but qu’l assgnat à son esprt état tout proche, et qu’en même temps l eût allu se hâter pour l’attendre. Il n’gnorat pas qu’l mâchat ses dernères portons de lberté, et que d’c quelques jours l lu audrat regagner le banc d’un collège, afin de s’assurer pour plus tard un poste de secrétare d’évêque, chargé d’arrondr de suaves phrases latnes, ou quelque chare de théologe d’où l convendrat de ne lasser tomber sur ses audteurs que des propos approuvés ou perms. Par une nnocence, qu état sa jeunesse, l s’magnat que personne jusque-là n’avat contenu dans sa potrne tant de rancœur à l’égard de l’état de prêtrse, n poussé s lon la révolte ou l’hypocrse. Pour le moment, le cr d’alarme d’un gea,
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le vrllement d’un pvert étaent les seuls ofces du Cancel Download And Print matn. Une fiente d’anmal umat délcatement sur la mousse, trace du passage d’une bête de la nut. Stôt la grand-route, l retrouva les bruts et les crs du sècle. Une bande de rustques exctés couraent avec des seaux et des ourches : une grosse erme solée brûlat, ncendée par un de ces anabaptstes qu mantenant pullulaent, et mélangeaent la hane des rches et des pussants à une orme partculère de l’amour de Deu. Zénon commsérat dédagneusement ces vsonnares sautant d’une barque pourre dans une barque qu at eau, et d’une aberraton séculare dans une mane toute neuve, mas le dégoût de l’épasse opulence qu l’entourat le mettat malgré lu du côté des pauvres. Un peu plus lon, l lu arrva de rencontrer un tsserand congédé, ayant prs la besace du mendant pour chercher subsstance alleurs, et l envat ce gueux d’être mons contrant que lu.
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LA FÊTE A DRANOUTRE
UN sor où l rentrat au logs comme un chen eanqué, après pluseurs jours d’absence, la mason lu apparut de lon llumnée de tant de flambeaux qu’l crut de nouveau à un ncende. De lourds coches encombraent la route. Alors, l se souvnt qu’Henr-J qu’Henr-Juste uste espérat e spérat et e t négocat né gocat depus des semanes une vste royale. La Pax de Cambra venat d’être sgnée. On l’appelat la Pax des Dames, car deux prncesses que le chanone Bartholommé Campanus comparat dans ses prônes aux Santes Femmes des Ecrtures avaent tant ben que mal assumé la tâche de reermer les plaes du sècle. La Rene Mère de France, d’abord retenue par sa crante des conjonctons astronomques néastes, avat enfin qutté Cambra pour regagner son Louvre. La Régente des Pays-Bas, en route vers Malnes, s’arrêtat pour une nut dans la mason champêtre du Grand Trésorer des Flandres, et Henr Juste Juste avat convé les notables du leu, acheté ache té un peu partout des provsons provsons de cre et e t de vctualles
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rares, at venr de Tourna les muscens de l’évêque, Cancel Download And Print et préparé un dvertssement à l’antque au cours duquel des Faunes vêtus de brocart et des Nymphes en chemse de soe verte orraent à Madame Marguerte une collaton de massepans, de rangpanes et de confitures. confitures. Zénon hésta à s’ntrodure dans la salle, de peur que ses vêtements usés, pousséreux, et l’odeur de son corps non lavé lu fissent perdre sa chance de se pousser auprès des pussants de ce monde ; pour la premère os de sa ve, la flattere et l’ntrgue lu parurent des arts où l serat bon d’exceller, et la place de secrétare prvé ou de précepteur de prnce préérable à celle de pédant de collège ou de barber de vllage. Pus, l’arrogance de la vngtème année l’emporta, et l’assurance que la ortune d’un homme dépend de sa nature, et du bon voulor des astres. Il entra et s’asst dans la chemnée qu’on avat estonnée de eullages, et regarda autour de lu cet Olympe human. Les Nymphes et les Faunes vêtus à l’antque étaent les rejetons de ermers enrchs ou de segneurs campagnards que le Grand Argenter lassat néglgemment becqueter dans ses cores ; Zénon reconnassat, sous les perruques et le ard, leurs crns blonds et leurs yeux bleus, et sous les boullonnés des tunques endues ou retroussées, les jambes un peu lourdes des filles dont quelques-unes l’avaent tendrement agacé à l’ombre d’une meule. Henr Juste, Juste, plus pompeux e t plus congestonné conges tonné encore qu’à l’ordnare, asat les honneurs de son luxe de marchand. La Régente vêtue de nor, menue et ronde, avat la pâleur trste des veuves, et des lèvres serrées de bonne ménagère qu survelle, non seulement le lnge et la desserte, mas l’Etat. Ses panégyrstes vantaent sa pété, son savor, la chasteté qu
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La ête à Dranoutre
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lu avat at préérer aux secondes noces les mélanCancel Download And Print colques austértés du veuvage ; ses détracteurs l’accusaent tout bas d’amer les emmes, tout en convenant que ce goût est mons scandaleux chez une noble dame que pour les hommes le penchant contrare, car l est plus beau, déclaraent-ls, pour la emme d’assumer la condton vrle que pour un homme d’mter la emme. Les vêtements de la Régente étaent somptueux, mas sévères, comme l sed à une prncesse qu se dot de porter les marques extéreures de sa stuaton royale, mas qu se souce peu d’éblour ou de plare. Tout en grgnotant des randses, elle écoutat d’une orelle complasante Henr-Juste mêler à ses complments de cour des plasanteres gallardes, en emme peuse, mas pont prude, qu sat entendre sans broncher de lbres propos d’hommes. On avat déjà bu des vns du Rhn, de Hongre et de France ; Jacquelne dégraa son corsage de drap d’argent, et commanda qu’on lu apportât son fils cadet, pont encore sevré, qu avat avat so auss. HenrHenr Juste Juste e t sa emme amaent à exhber cet ce t enant tout neu qu les les rajeunssat. rajeunssat. Le sen aperçu entre les pls du lnge fin charma les convves. — On ne pourra ner, dt Madame Marguerte, Margue rte, que celu-là n’at tété le lat de bonne mère. Elle demanda comment se nommat l’enant. — Il n’es n’estt encore qu’ondoyé, dt la Flamande. — Alors, Alor s, fit Madame Marguerte, Mar guerte, appelez-le Phlbert, ber t, comme mon segneur segneur qu est allé à Deu. Henr-Maxmlen, qu buvat outre mesure, parlat aux filles d’honneur des ats d’armes qu’l accomplrat lorsqu’l serat en âge. — L’occason des batalles batalle s ne lu manquera pas, fit Madame Marguerte, dans ce malheureux sècle. Elle se demandat à part so s le Grand Argenter
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LA VIE ERRANTE
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consentrat à l’Empereur cet emprunt au dener Cancel Download And Print douze qu’avaent reusé les Fuggers, et qu servrat à dérayer les ras de la dernère campagne, ou peut-être de la prochane, car on sat ce que valent les tratés de pax. Une mnce porton de ces nonante mlle écus sufrat à achever sa chapelle de Brou, en Bresse, où elle rat un jour dormr auprès de son prnce jusqu’à la fin du monde. Le temps de porter à ses lèvres une culler de vermel, et Madame Marguerte revt en esprt le jeune homme nu, aux cheveux collés par la sueur de la fièvre, la potrne gonflée par les humeurs de la pleurése, mas beau néanmons comme les Apollons de la Fable, qu’elle avat ms en terre volà plus de vngt ans. Ren ne l’en consolat, n les gentllesses de l’Amant Vert, son perroquet des Indes, n les lvres, n le doux vsage de sa tendre compagne, Madame Laodame, n les grandes aares, n Deu qu est le support et le confident des prnces. L’mage du mort rentra dans le trésor de la mémore ; le contenu de la culler répandt sur la langue de la Régente son goût d’entremets glacé ; elle retrouva la place à table qu’elle n’avat jamas quttée, les mans rouges d’Henr Juste Juste sur la nappe cramose, les atours atour s voyants de Madame d’Halloun, sa dame d’honneur, le nourrsson étalé sur le sen de la Flamande, et là-bas, nstallé sous la chemnée, un jeune homme au beau vsage arrogant qu mangeat sans prêter attenton aux convv c onvves. es. — Et celu-là, dt-elle, qu tent compagne aux tsons ? — Voc tout ce que j’a de fils, dt le banquer mécontent, montrant Henr-Maxmlen et le poupon sur son drap brodé. Bartholommé Campanus norma à m-vox la Régente de l’aventure d’Hlzonde, déplorant du même coup les senters hérétques héré tques dans lesquels lesquels la mère de
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La ête à Dranoutre
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Zénon s’état ourvoyée. Madame Marguerte ébauCancel Download And Print cha alors avec le chanone une de ces dscussons sur la o et les œuvres réengagées chaque jour par les personnes peuses et cultvées de l’époque, sans que jamas ces oseux débats servssent à résoudre le problème ou à en prouver l’nanté. A ce moment, du brut se fit à la porte ; tmdement, mas d’une seule poussée, des gens entrèrent. Ces ouvrers drapers venus à Dranoutre avec un rche présent pour Madame étaent une parte des dvertssements projetés pour la ête. Mas une bagarre survenue de l’avant-velle dans un ateler avat transormé le progrès des artsans en une sorte de chahut d’émeute. Le dortor de Colas Gheel état là dans son enter pour demander qu’on gracât Thomas de Dxmude menacé de la potence pour avor rompu à coups de marteau les méters mécanques montés depus peu et finalement ms en marche. La bande conuse enflée d’ouvrers orans congédés et de rôdeurs rencontrés en route avat ms deux jours à are les quelques leues séparant la abrque de la mason de plasance du marchand. Colas Gheel blessé aux mans en déendant ses machnes se trouvat néanmons au premer rang des péttonnares. Zénon reconnassat à pene dans cette figure aux lèvres marmottantes le solde Colas de sa sezème année. Le clerc, retenant par la manche un page qu lu orat des dragées, apprt qu’Henr-Juste avat reusé d’entendre les doléances des mécontents, mas qu’on les avat lassé coucher dans un pré, nourrs de ce que leur jetaent les cusners. Les domestques avaent vellé toute la nut sur les garde-manger, l’argentere, la cave et les meules. Ces malheureux pourtant semblaent docles comme des moutons qu’on mène à la tonte ; ls ôtèrent leurs bonnets ; les plus humbles s’agenoullèrent.
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— Grâce pour Thomas, mon compère compèr e ! Grâce Cancel Download And Print pour Thomas dont mes machnes ont troublé la rason, psalmodat Colas Gheel. Il est trop jeune pour pendre au gbet ! — Quo ? dt Zénon, tu déends ce gueux qu a jeté je té bas notre ouvrage ? Ton beau Thomas amat danser : qu’l danse en plen cel. L’altercaton en flamand fit éclater de rre la pette bande des filles d’honneur. Déconcerté, Colas promena autour de lu ses prunelles pâles, et se sgna en reconnassant dans l’âtre le jeune clerc qu’l nommat jads son rère selon sant Jean. — Deu m’a tenté, pleura l’homme aux mans banba ndées, mo qu jouas comme un enant avec des poules et des manvelles. Un démon m’a montré des proportons et des chres, et j’a construt les yeux ermés un gbet d’où pend une corde. Et l recula d’un pas, appuyé sur l’épaule du magre apprent Perrotn. Un pett homme v comme le mercure en qu Zénon reconnut Therry Loon se coula jusqu’à la Prncesse pour lu tendre un placet, qu’elle remt avec une dstracton apparente à un gentlhomme de sa sute. Le Grand Trésorer la pressat obséqueusement de passer dans la galere vosne, où des muscens apprêtaent pour les dames un concert d’nstruments et de vox. — Tout traître à l’Eglse est es t tôt ou tard rebelle à son prnce, conclut Madame Marguerte en se levant, bouclant enfin son entreten studeusement contnué avec le chanone par ces mots qu condamnaent la Réorme. Des tsserands poussés du regard par Henr-Juste orrent cérémoneusement à l’auguste veuve le nœud de perles brodé à son chre. Du bout de ses dogts bagués, elle prt avec grâce le cadeau des artsans ar tsans..
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La ête à Dranoutre
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— Voye Voyez, z, Madame, fit à dem plasamment plasa mment le marCancel Download And Print chand, ce qu’on gagne à mantenr ouvertes par pure charté des abrques qu travallent à perte. Ces rustques portent à vos orelles des dsputes que trancherat d’un mot un juge de vllage. S je n’avas pas à cœur l’honneur de nos velours et de nos étoes brochées… Arrondssant les épaules, comme toujours quand pesat sur elle le pods des aares publques, la Régente alors nssta gravement sur la nécessté de brder l’nsubordnaton populare, dans un monde déjà troublé par les querelles des prnces, le progrès du Turc, l’hérése déchrant l’Eglse. Zénon n’entendt pas le chuchotement du chanone l’nvtant à se rapprocher de Madame. Un brut de trlles et de sèges remués se mêlat déjà aux nterjectons des ouvrers draper drapers.s. — Non, dt le marchand reermant ree rmant derrèr der rèree lu la porte de la galere, et asant ace aux hommes comme un dogue aux bêtes du troupeau. Pas de pté pour Thomas dont le cou sera rompu comme l a rompu mes méters. Vous plarat-l qu’on vînt chez vous brser vos bos de lt ? Colas Gheel beugla beugla comme un bœu qu’on sagne. sagne. — Tas-to, l’am, dt le gros marchand avec méprs. Ta musque gâte celle qu’on sert aux dames. — Tu es savant, savant, Zénon ! Ton latn e t ton ranças plasent meux que nos vox flamandes, dt Therry Loon qu menat le reste des mécontents comme un bon chantre condut un chœur. Explque-leur qu’on augmente nos tas et qu’on dmnue nos paes, et que la poussère qu sort de ces engns nous at cracher le sang. — S ces machnes s’mplantent dans le plat pays, nous sommes cuts, dt un tssuter. Nous ne sommes pas ats pour nous démener entre deux roues comme des écureuls en cage.
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— Croyez-vous Croye z-vous que je raole de la nouveauté, Cancel Download And Print comme un Franças ? dt le banquer mêlant la bonhome à la sévérté comme du sucre à du verjus. Toutes les roues et tous les clapets ne valent pas des bras d’honnêtes gens. Sus-je un ogre ? Plus de menaces, plus de murmures contre l’amende pour les pèces manquées et les nœuds du fil ; plus de sottes demandes d’augmenter la pae comme s l’argent coûtat auss peu que du crottn, et j’envoe ces châsss servr de cadre aux aragnées ! Vos contrats au prx de l’an derner seront renouvelés pour l’an prochan. — Au prx de l’an derner, der ner, s’émut une vox qu déjà ablssat. Au prx de l’an derner, quand un œu aujourd’hu aujourd’hu coûte plus cher qu’une poule poule à la dernère Sant-Martn Sant-Martn ! Meux vaut prendre prendre un bâton et courr les routes. — Crève Thomas e t qu’on me rembauche, hurla un veux oran que asat paraître plus sauvage encore son chuntant ranças. Les ermers m’ont lâché leurs chens, et les bourgeos des vlles nous tratent à coups de perres. J’ame meux ma pallasse au dortor que le ond d’un ossé. — Ces méter mé terss dont vous ates ate s fi auraent at de mon oncle un ro et de vous des prnces, dt le clerc avec dépt. Mas je ne vos c qu’une brute rche et de sots pauvres. Un grondement monta de la cour où le reste de la bande apercevat d’en bas les flambeaux de la ête et le dessus des pèces montées. Une perre troua l’azur d’un vtral armoré ; le marchand se gara prestement de la chute de grêlons bleus. — Gardez vos perres per res pour ce songe-creux ! Le nas vous fit crore que vous pourrez anéanter auprès d’une bobne asant à elle seule l’ouvrage de trente mans, dt le gros Lgre avec dérson, montrant son neveu rencogné dans l’âtre. J’y perds mes
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La ête à Dranoutre
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sous et Thomas son cou. O le beau projet d’un benêt Cancel Download And Print qu ne connaît que ses lvres ! Le compagnon du eu cracha sans répondre. — Quand Thomas a vu le méter mé ter ouvrer ouvre r jour et nut et are à lu seul la tâche de quatre hommes, l n’a ren dt, reprt Colas Gheel, mas l tremblat et suat comme s’l avat peur. Et on l’a congédé l’un des premers quand on m’a retranché ma bande d’apprents. Et les moulns grnçaent toujours, et les perches de er contnuaent toutes seules à tsser la tole. Et Thomas restat asss au ond du dortor avec la emme qu’l a épousée l’autre automne, et je les entendas grelotter grelotte r comme ceux qu ont rod. Et j’a comprs que nos mécanques étaent un fléau comme la guerre, la cherté des vvres, les draps étrangers… Et mes mans ont mérté les coups qu’elles reçurent… Et je ds que l’homme dot travaller tout bonnement, comme avant lu ses pères l’ont l’at, et se contenter de ses deux bras et ses dx dogts. — Et qu’es-tu to-même, cra Zénon prs de ure, snon une machne mal grassée qu’on use, qu’on jette je tte au rebut, e t qu par malheur en engendre d’autres ? Je te croyas un homme, Colas, et je ne vos qu’une taupe aveugle ! Brutes qu n’aurez n eu, n chandelle, n culler à pot, s quelqu’un n’y avat pensé pour vous, et à qu une bobne erat peur, s on vous la montrat pour la premère los ! Retournez dans vos dortors pourrr à cnq ou sx sous la même couverture, et crevez sur vos galons et vos velours de lane comme vos pères l’ont l’at ! L’apprent Perrotn s’arma d’un hanap lassé sur une table et onça sur Zénon. Therry Loon lu sast le pognet ; les glapssements de l’apprent dégosant des menaces en patos pcard accompagnaent ses torsons de couleuvre. Soudan, la vox tonnante d’Henr-Juste qu venat de dépêcher en bas un de ses majordomes annonça qu’on débondat dans la
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LA VIE ERRANTE
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cour des tonneaux pour bore à la Pax. La ruée des Cancel Download And Print hommes entraîna Colas Gheel, gestculant de ses deux mans bandées ; Perrotn fila, s’arrachant d’une secousse au pong de Therry Loon. Seuls, quelques têtes ortes étaent restées sur place, avsant aux moyens de gonfler au mons de quelques magres sous les salares du prochan contrat. Thomas et ses ares étaent oublés. On ne songeat pas non plus à mplorer de nouveau la Régente nstallée ben à l’ase dans la salle vosne. L’homme d’aares état la seule pussance que ces artsans connussent et cragnssent ; ls n’apercevaent Madame Marguerte que de lon, comme l ne voyaent que conusément et en gros ces vasselles d’argent, ces bjoux, et sur les murs ou sur le corps des personnes présentes, ces étoes et ces rubans qu’ls avaent tssés. Henr-Juste rt doucement du succès de sa harangue et de ses largesses. Ce vacarme somme toute n’avat duré que le temps d’un motet. Ces méters mécanques auxquels l n’attachat qu’une pètre mportance venaent de are sans grands ras l’appont d’un marchandage ; on s’en resservrat peut-être, à l’avenr, mas seulement s, par malencontre, la man-d’œuvre renchérssat à l’excès ou venat à manquer. Zénon, dont la présence à Dranoutre nquétat le .marchand comme celle d’un brandon dans une grange, rat promener alleurs ses chmères et ses yeux de eu qu troublaent les emmes ; et Henr-Juste pourrat tout à l’heure se vanter en haut leu de savor par ces temps agtés régenter la plèbe, et paraître céder sur un pont sans céder jamas. De l’embrasure d’une crosée, Zénon regardat en bas les ombres en hallons mêlées aux valets et aux gardes de Madame. Des torches accrochées aux murs éclaraent cette ête. Le clerc reconnut dans la oule Colas Gheel Gheel à ses cheveux rouges et à ses lnges
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La ête à Dranoutre
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blancs. Pâle comme ses bandages, aalé contre un Cancel Download And Print barl, l buvat goulûment le contenu d’une large chope. — Il entonne sa bère pendant que son Thomas sue d’angosse dans sa prson, dt le clerc avec méprs. Et j’amas cet homme… Race de SmonPerre ! — Pax, fit Therry Ther ry Loon resté re sté à son côté. Tu ne sas pas ce que c’est que la peur et e t la am. Et, le poussant du coude : — Lasse là Colas e t Thomas, e t pense à nous dorénavant. Nos gens te suvraent comme le fil sut la navette, chuchota-t-l. Ils sont pauvres, gnorants, stupdes, mas nombreux, groullants comme des vers, avdes comme des rats qu sentent le romage… Tes méters leur plaraent s’ls n’étaent plus qu’à eux seuls. On commence par are flamber une mason de plasance : on fint par occuper des vlles. — Va Va bore avec les autres, vrogne vrog ne ! dt Zénon. Et, quttant la salle, l s’enonça dans l’escaler désert. Sur le paler, l se heurta dans l’ombre à Jacquelne qu remontat toute pantelante, tenant entre les mans un trousseau de cles. — J’a verroullé verro ullé la porte por te du celler, celle r, soua-t-elle. Sat-on jamas ? Et, se sasssant de la man de Zénon pour lu prouver que son cœur battat trop vte : — Demeurez, Demeurez , Zénon ! J’a peur. peur. — Fates-vous rassurer rassure r par les soldats de la garde, dt durement le jeune clerc. Le lendeman, le chanone Campanus chercha son élève pour lu apprendre que Madame Marguerte, avant de remonter en coche, s’état normée des connassances de l’étudant en grec et en hébreu, et avat manesté le désr de l’admettre parm les domestques de sa sute. Mas la chambre de Zénon état vde. Aux Aux dres des valets, l état é tat part à l’aube. l’aube.
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LA VIE ERRANTE
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La plue qu n’arrêtat pas de tomber depus pluCancel Download And Print seurs heures retarda quelque peu le départ de la Régente. Les ouvrers drapers étaent reparts pour Oudenove, pont trop mécontents d’avor finalement obtenu du Grand Trésorer une augmentaton d’un dem-sou par lvre. Colas Gheel cuvat sa bère sous une bâche. Quant à Perrotn, l avat dsparu aux pettes heures du jour. On sut plus tard qu’l s’état répandu cette nut-là en menaces contre Zénon. Il s’état auss beaucoup vanté de son hableté à jouer du couteau.
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LE DÉPART DE BRUGES
WIWINE CAUWERSYN occupat chez son oncle, curé de l’églse de Jérusalem Jé rusalem à Bruges, une chambrette pannelée de chêne pol. On y voyat un étrot lt blanc, un pot de romarn sur l’appu de la enêtre, un mssel sur une étagère : tout état propre, net, pasble. Chaque jour, à l’heure de prme, cette pette sacrstne bénévole devançat les premères dévotes et le mendant regagnant sa bonne place à l’angle du porche ; elle trottat, chaussée de eutre, sur les dalles du chœur, vdant l’eau des vases, récurant avec son les candélabres et les cbores d’argent. Son nez pontu, sa pâleur, sa gauchere n’nspraent à personne ces vs propos qu nassent d’eux-mêmes sur le passage d’une jole fille, mas sa tante Godelève comparat tendrement ses cheveux blonds à l’or des couques ben cutes et du pan bént, et toute sa contenance état relgeuse et ménagère. Ses ancêtres couchés en cuvre pol le long des muralles se élctaent sans doute de la vor s sage.
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LA VIE ERRANTE
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Car elle état de bonne amlle. Son père, Thbaut Cancel Download And Print Cauwersyn, ancen page de Madame Mare de Bourgogne, avat soutenu la cvère ramenant vers Bruges, parm les prères et les pleurs, sa jeune duchesse mortellement blessée. Jamas l’mage de cette chasse atale ne le qutta ; toute sa ve, l garda pour cette maîtresse s vte passée un respect attendr qu ressemblat à de l’amour. Il voyagea ; l servt l’empereur Maxmlen dans Ratsbonne ; l revnt mourr en Flandre. Wwne s’en souvenat comme d’un gros homme qu l’asseyat sur ses genoux couverts de cur et chantonnat d’une vox essouée des complantes allemandes. Sa tante Cleenwerck éleva l’orphelne. C’état une bonne emme débordante de grasse, sœur et ntendante du curé de l’églse de Jérusalem ; elle asat de réconortants srops et d’exquses confitures. Le chanone Bartholommé Campanus réquentat volonters cette mason plene d’une odeur de pété chrétenne et de bonne cusne. Il y ntrodust son puplle. La tante et la nèce gavaent l’écoler de randses toutes brûlantes du our, lavaent ses genoux et ses mans écorchés par une chute ou dans une bagarre, admraent de confiance ses progrès en langue latne. Plus tard, durant les rares vstes ates à Bruges par l’étudant de Louvan, le curé lu erma sa porte, sentant de ce côté un mauvas ar d’athésme et d’hérése. Mas Wwne avat apprs ce matn-là par une colporteuse qu’on venat d’apercevor Zénon éclaboussé et trempé se drgeant sous la plue vers l’ofcne de Jean Myers, et elle attendat tranqullement qu’l vînt la vor à l’églse l’é glse.. Il entra sans brut par la porte basse. Wwne courut à lu, les mans encore encombrées de nappes d’autel, avec une sollctude ngénue de pette servante.
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Le départ de Bruges
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— Je pars, W wne, dt-l. Fates une lasse des Cancel Download And Print cahers que j’a cachés dans votre armore ; et je vendra les chercher à la nut close. — Comme vous volà volà at, mon am, dt-elle. Il avat dû patauger sous l’averse dans la boue du plat pays, car ses chaussures et le bas de ses vêtements étaent encroûtés de terre. Il semblat auss qu’on l’eût lapdé, ou qu’l ût tombé, car son vsage n’état plus qu’une meurtrssure, et le rebord d’une de ses manches état stré de sang. — Ce n’est ’es t ren, dt-l. Une rxe. Je n’y pense déjà plus. Mas l la lassa éponger de son meux à l’ade d’un lnge humde les éclaboussures et la ange. Wwne troublée le trouvat beau comme le sombre Chrst de bos pent gsant près d’eux sous une arche et elle s’empressat autour de lu telle une pette Madelene nnocente. Elle s’ort à l’emmener dans la cusne de la tante Godelève pour nettoyer ses vêtements et lu are manger des gaures encore chaudes. — Je pars, Wwne, répéta répé ta Zénon. Je vas vor s l’gnorance, l’gnorance, la peur, peur, l’nepte et e t la superstton verbale règnent alleurs qu’c. Ce langage véhément l’eraya : tout ce qu état nusté l’erayat. Pourtant, cette colère d’homme se conondat pour elle avec les tempêtes de l’écoler, tout comme la boue et le sang norc lu rappelaent le Zénon rentrant mal en pont des combats de la rue, qu avat été son bel am et son doux rère vers leur dxème année. Elle dt sur un ton d’admonton tendre : — Comme vous parlez haut dans l’églse l’é glse ! — Deu n’entend guère, guèr e, répondt amèrement amèr ement Zénon. Il n’explqua n d’où l venat, n où l rat, n de quelle échauourée ou de quel guet-apens l sortat, n quel dégoût l’écartat d’une exstence
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LA VIE ERRANTE
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doctorale ourrée d’hermne et d’honneurs, n quels Cancel Download And Print dessens secrets l’entraînaent sans équpage sur des routes peu sûres, parcourues de pétons revenant de la guerre et de vagabonds sans eu n leu dont la pette bande composée du curé, de la tante Godelève et de quelques domestques se garat prudemment quand on rentrat d’une vste aux champs. — Les temps sont s mauvas, dt-elle, répétant répé tant les doléances habtuelles de la mason et du marché. Et s dereche vous vous rencontrez un malateur… malateur… — Qu vous dt que ce n’est ’es t pas mo qu auras rason de lu, fit-l âprement. Il n’est pas s dfcle de dépêcher quelqu’un… — Chréten Chré ten Merghelynck Mer ghelynck e t mon cousn Jean de Béhaghel, qu étudent à Louvan, s’apprêtent auss à repartr pour l’Ecole, nssta-t-elle. S vous allez les rejondre à l’auberge du Cygne… — Que Chréten Chré ten et Jean pâlssent s’ls le veulent sur les attrbuts de la personne dvne, fit avec dédan le jeune clerc. Et s le, curé, votre oncle, qu me soupçonne d’athésme, s’nquète encore de mes opnons, vous lu drez que je proesse ma o en un deu qu n’est pas né d’une verge, ne ressusctera pas au trosème jour, mas dont le royaume est de ce monde. M’entendez-vous ? — Je le lu répéter répé tera a sans l’entendre, fit-elle doucement, mas sans même essayer de retenr ces propos trop abstrus pour elle. Et comme ma tante Godelève verroulle la porte dès le couvre-eu et cache la cle sous son matelas, matelas, je lassera vos cahers sous l’auvent avec des vctualles pour la route. — Non, dt-l. Cec est es t pour mo temps de vgle et de jeûne. jeûne. — Pourquo ? fit-elle, cherchant cherc hant vanement à se rappeler quel sant on êtat au calendrer.
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Le départ de Bruges
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— Je me le prescrs presc rs à mo-même, dt-l sur un ton Cancel Download And Print de plasantere. N’avez-vous jamas vu des pèlerns se préparer préparer au départ dépar t ? — A votre ase, a se, fit-elle tands que des de s larmes lar mes montaent dans sa vox à l’dée de cet étrange voyage. Et mo, je comptera les heures, les jours et les mos, comme je le as chaque os durant vos absences. — Quelle ballade me réctez-vous récte z-vous là ? dt-l avec un mnce sourre. La route que je prends ne repassera jamas par c. Je ne sus pas de ceux qu rebroussent chemn pour revor une fille. — Alors, dt-elle, levant vers ver s lu son pett pet t ront têtu, j’ra un jour à vous au leu que vous revenez vers mo. — Penes perdues, fit-l, entrant comme par jeu dans cet échange de repartes. Je vous oublera. — Mon cher che r segneur, dt Wwne, Wwne, des de s gens de ma amlle sont couchés sous ces dalles, et leur devse est sur leur oreller. Plus est en vous. Plus est en mo que de rendre oubl pour oubl. Elle se tenat devant lu, pette source nspde et pure. Il ne l’amat pont ; cette enant un peu smple état sans doute le plus léger des lens qu l’attachaent à son court passé. Mas une able pté le gagna, mêlée à l’orguel d’être regretté. Soudan, avec le geste mpétueux d’un homme qu au moment du départ donne, jette ou consacre quelque chose, pour se concler on ne sat quels pouvors, ou au contrare se lbérer d’eux, l ôta son mnce anneau d’argent, gagné au jeu de bagues avec Jeannette Fauconner, et le déposa comme un sou dans cette man tendue. Il ne comptat nullement revenr. Cette fillette n’aurat de lu que l’aumône d’un pett rêve. La nut tombée, l alla chercher sous l’auvent les cahers qu’l porta chez Jean Myers. C’étaent pour
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LA VIE ERRANTE
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la plupart des extrats de phlosophes païens copés Cancel Download And Print en grand secret du temps où l s’nstrusat à Bruges sous la survellance du chanone, et qu contenaent un certan nombre d’opnons scandaleuses sur la nature de l’âme et sur l’nexstence de Deu ; ou encore des ctatons des Pères attaquant le culte des doles, et détournées de leur sens pour démontrer l’nanté de la dévoton et des cérémones chrétennes. Zénon restat assez neu pour attacher beaucoup deprx à ces premères lcences d’écoler. Il dscuta ses projets d’avenr avec Jean Myers : celu-c opnat pour des études à la Faculté de médecne de Pars, qu’l avat lu-même réquentée, sans touteos aller jusqu’à la soutenance de la thèse et au bonnet carré. Zénon s’enflammat pour de plus lontans voyages. Le chrurgen-barber déposa sogneusement les cahers de l’étudant dans le rédut où l rangeat ses velles boutelles et sa provson de lnges. Le clerc ne s’aperçut pas que Wwne avat placé entre les eullets un pett brn d’églanter.
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LA VOIX PUBLIQUE
ON sut plus tard qu’l avat d’abord passé quelque temps à Gand, chez le prévôt mtré de Sant-Bavon, qu s’occupat d’alchme. On crut ensute l’avor vu à Pars, dans cette rue de la Bûchere où les étudants dssèquent en secret des morts, et où se prennent comme un mauvas ar le pyrrhonsme et l’hérése. D’autres, ort dgnes de o, assuraent qu’l tenat ses dplômes de l’Unversté de Montpeller, ce à quo certans répondaent qu’l n’avat jamas at que s’nscrre à cette aculté célèbre, et qu’l avat renoncé aux ttres sur parchemn en aveur de la seule pratque expérmentale, dédagnant à la os Galen et Celsus. On crut le reconnaître en Languedoc dans la personne d’un magcen séducteur de emmes, et, vers la même époque, en Catalogne, sous l’habt d’un pèlern venu de Montserrat et recherché pour le meurtre d’un jeune garçon dans une hôtellere réquentée par des gens sans aveu, marns, maqugnons, usurers suspects de judaïsme et Arabes mal converts. On savat vaguement qu’l
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LA VIE ERRANTE
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s’ntéressat à des spéculatons sur la physologe et Cancel Download And Print l’anatome, et l’hstore de l’enant assassné, qu n’état pour les grossers ou les crédules qu’une nstance de mage ou de nore débauche, devenat sur les lèvres des plus doctes celle d’une opératon ayant pour but de transvaser du sang ras dans les venes d’un rche Hébreu malade. Plus tard encore, des gens revenus de longs voyages et de plus longs mensonges prétendrent l’avor vu dans le pays des Agathyrses, chez les Barbaresques, et jusqu’à la cour du Grand Daïr. Une nouvelle recette de eu grégeos, employée à Alger par le pacha Khéreddn Barberousse, endommagea gravement, vers 1541, une armadlle espagnole ; on mt à son compte cette nventon uneste, qu, dsat-on, l’avat enrch. Un mone rancscan envoyé en msson en Hongre avat rencontré à Bude un médecn flamand qu se serat gardé de dre son nom : c’état lu sans doute. On savat auss de bonne source qu’l aurat été appelé en consultaton à Gênes par Joseph Ha-Cohen, physcen prvé du Doge, mas aurat ensute nsolemment reusé de succéder au poste de ce Ju rappé d’une sentence d’exl. Comme les audaces de la char passent, souvent à juste ttre, pour accompagner celles de l’ntellgence, on lu attrbua des plasrs non mons audaceux que ses travaux, et on colporta dvers contes, varés ben entendu selon les goûts de ceux qu répandaent ou nventaent ses aventures. Mas, de toutes ces hardesses, la plus choquante peut-être état celle qu, dsat-on, lu asat ravaler la belle proesson de médecn en s’adonnant de préérence à l’art grosser de la chrurge, salssant ans ses mans de pus et de sang. Ren ne pouvat subsster, s un esprt nquet bravat de la sorte le bon ordre et les bons usages. Après une longue éclpse, on crut le revor à Bâle au cours d’une épdéme de peste nore : une sére de guérsons nespérées
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La voix publique
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lu firent cesCancelannées-là une réputaton de Download And Print thaumaturge. Pus, de nouveau, ce brut s’étegnt. Cet homme semblat crandre d’avor la glore pour tmbaler. Vers 1539, on avat reçu à Bruges un pett traté en ranças, mprmé chez Dolet à Lyon, qu portat son nom. C’état une descrpton mnuteuse des fibres tendneuses et des anneaux valvulares du cœur, suve d’une étude sur le rôle qu’aurat joué la branche gauche du ner vague dans le comportement de cet organe ; Zénon y afrmat que la pulsaton correspondat au moment de la systole, contrarement à l’opnon ensegnée en chare. Il dssertat auss du rétrécssement et de l’épassssement des artères dans certanes malades dues à l’usure de l’âge. Le chanone, qu se connassat peu en ces matères, lut et relut le court traté, presque déçu de n’y ren trouver qu justfiât les rumeurs d’mpété envronnant son ancen élève. N’mporte quel pratcen, semblat-l, eût pu composer un tel lvre, que n’ornat même aucune belle ctaton latne. Bartholommé Campanus apercevat assez souvent en vlle, monté sur sa bonne mule, le chrurgenbarber Jean Myers, de plus en plus chrurgen et de mons en mons barber depus que la consdératon lu état venue avec les années. Ce Myers état peutêtre le seul habtant de Bruges qu’on pût rasonnablement soupçonner de recevor de temps à autre des nouvelles de l’étudant passé maître. Le chanone état paros tenté d’aborder cet homme de peu, mas les convenances semblaent s’opposer à ce que les premères ouvertures vnssent de lu, et le bonhomme avat la réputaton d’être matos et moqueur. Chaque os qu’un hasard apportat jusqu’à lu quelque écho concernant son écoler d’autreos, le chanone se rendat ausstôt chez le curé Cleenwerck
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son vel am. Ils en dscouraent ensemble, le sor, Cancel Download And Print dans le parlor de la cure, que traversaent paros la tante Godelève ou sa nèce tenant une lampe ou un plat, mas n l’une n l’autre ne prenat la pene d’écouter, n’ayant pas l’habtude de prêter l’orelle aux propos des deux hommes d’Eglse. Wwne avat passé l’âge des amourettes enantnes ; elle gardat encore l’étrot anneau marqué d’un fleuron dans une boîte qu contenat des perles de verre et des agulles, mas n’gnorat pas que sa tante avat pour elle de séreux projets. Tands que les emmes plaent la nappe et rangeaent la vasselle, Bartholommé Campanus tournat et retournat avec le veux curé ces mnces brbes d’normaton qu étaent, à la ve tout entère de Zénon, ce que l’ongle est à la totalté du corps. Le curé hochat la tête, n’attendant que le pre de cet esprt aolé d’mpatence, de van savor et d’orguel. Le chanone déendat ablement l’étudant qu’l avat ormé. Peu à peu, pourtant, Zénon cessat d’être pour eux une personne, un vsage, une âme, un homme vvant quelque part sur un pont de la crconérence du monde ; l devenat un nom, mons qu’un nom, une étquette anée sur un bocal où pourrssaent lentement quelques mémores ncomplètes et mortes de leur propre passé. Ils en parlaent encore. En vérté, ls l’oublaent.
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LA MORT A MÜNSTER
SIMON ADRIANSEN vellssat. Il s’en apercevat mons à la atgue qu’à une sorte de crossante sérénté. Il en état de lu comme d’un plote devenu dur d’orelle qu n’entend plus que conusément le brut de la tempête, mas contnue à jauger avec la même hableté le pouvor des courants, des marées et des vents. Toute sa ve, l état allé d’une rchesse mondre à une rchesse plus grande : l’or auat dans ses mans ; l avat qutté son logs amlal de Mddelbourg pour une mason édfiée par ses sons sur un qua nouvellement construt d’Amsterdam, à l’époque où l avat obtenu dans ce port la concesson des épces. Dans son logs accoté à la Schrejerstoren, comme dans un core solde, les trésors d’outre-mer étaent recuells et rangés. Mas Smon et sa emme, retranchés de cette splendeur, vvaent au derner étage dans une pette chambre nue comme la cabne d’un navre, et tout ce luxe ne servat qu’à la consolaton des pauvres.
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LA VIE ERRANTE
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Pour eux, les portes étaent toujours ouvertes, Cancel Download And Print le pan toujours cut, les lampes toujours allumées. Ces loqueteux n’étaent pas que des débteurs nsolvables ou des malades que les hospces débordés reusaent de sogner, mas encore des acteurs amélques, des matelots assotés d’eau-de-ve, du gber de prson ramassé sur les plors et portant sur les épaules la marque du ouet. Comme Deu qu veut que tous marchent sur Sa terre et joussent de Son solel, Smon Adransen ne chosssat pas, ou plutôt, par dégoût des los humanes, chosssat ceux qu passent pour les pres. Revêtus de chauds habts par les mans du maître lu-même, ces gueux ntmdés s’asseyaent à sa table. Des muscens dssmulés dans la galere versaent dans leurs orelles un avant-goût du Parads ; Hlzonde pour recevor ses hôtes se parat de robes magnfiques qu rehaussaent encore le prx de ses aumônes et pusat dans les plats à l’ade d’une louche d’argent. Smon et sa emme, comme Abraham et Sarah, comme Jacob et Rachel, avaent, durant douze ans, vécu en pax. Ils avaent pourtant leurs penes. Pluseurs nouveau-nés tendrement chérs et sognés leur étaent morts l’un après l’autre. Chaque os, Smon nclnat nclnat la tête tê te et e t dsat : — Le Segneur est es t père. Il sat ce qu convent aux enants. Et cet homme vrament peux ensegnat à Hlzonde la douceur de se résgner. Mas un ond de trstesse leur restat. Enfin, une fille naqut et vécut. Smon Adransen cohabta désormas avec Hlzonde dans un esprt raternel. Ses vasseaux cnglaent de toutes les rves du monde vers le port d’Amsterdam, mas Smon pensat au grand voyage qu se termne névtablement pour nous tous, rches ou pauvres, par le naurage sur une plage nconnue. Les navgateurs et les géo-
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La mort à Münster
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graphes qu se penchaent avec lu sur des portulans Cancel Download And Print et dressaent des cartes à son usage lu étaent mons chers que ces aventurers en route vers un autre monde, prêcheurs déguenllés, prophètes baoués et bernés sur la place publque, un Jan Matthyjs, boulanger hallucné, un Hans Bockhold, baladn ambulant que Smon avat trouvé un sor à dem gelé sur le seul d’une taverne, et qu mettat au servce du Règne de l’Esprt les bonments de la ore. Parm eux, plus humble que tous, cachant son grand savor, volontarement abêt pour lasser plus lbrement descendre en lu l’nspraton dvne, on apercevat dans son vel habt de ourrure Bernard Rottmann, jads le plus cher des dscples de Luther, et qu vomssat mantenant l’homme de Wttenberg, ce aux juste, flattant d’une man le chou du rche et de l’autre la chèvre du pauvre, mollement asss entre la vérté et l’erreur. L’arrogance des Sants, l’mpudente açon dont ls arrachaent en dée leurs bens aux bourgeos et leurs ttres aux notables pour les redstrbuer à leur guse avaent attré sur eux la colère publque ; menacés de mort ou d’expulson mmédate, les Bons tenaent dans la mason de Smon des conclabules de marns sur un bâtment qu sombre. Mas l’espor pontat au lon comme une vole : Münster, où Jan Matthyjs avat réuss à s’mplanter après en avor chassé l’évêque et les échevns, état devenue la Cté de Deu où pour la premère os sur terre les agneaux ont un asle. En van, les troupes mpérales se proposaent de rédure cette Jérusalem Jér usalem des déshértés déshé rtés ; tous les pauvres pauvre s du monde se ralleraent autour de leurs rères ; des bandes raent de vlle en vlle pllant les honteux trésors des églses et renversant les doles ; on sagnerat le gros Martn dans sa bauge de Thurnge, le Pape dans sa Rome. Smon écoutat ces propos en lssant sa
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barbe blanche : son tempérament d’homme habtué Cancel Download And Print au rsque le portat à accepter sans broncher les dangers énormes de cette peuse aventure ; la tranqullté de Rottmann, les plasanteres de Hans lu enlevaent ses derners doutes ; elles le rassuraent comme l’avaent rassuré sur un de ses navres levant l’ancre dans la sason des tempêtes le séreux du captane et la gaeté du gaber. C’est d’un cœur confiant qu’l regarda un sor ses mnables hôtes, enonçant leur bonnet jusqu’aux yeux, ou serrant à leur cou les pans élmés d’une écharpe de lane, s’en aller côte à côte dans la boue et la nege, prêts à se traîner ensemble jusqu’à ce Münster de leurs songes. Un jour enfin, ou plutôt une nut, par une aube rode de évrer, l monta dans la chambre où Hlzonde reposat drote et mmoble dans son lt, éclarée par une mnce velleuse. Il l’appela à vox basse, s’assura qu’elle ne dormat pas, s’asst lourdement au ped de la couche, et, comme un marchand qu ressasse avec sa emme les comptes de la journée, lu fit part des conclabules qu s’étaent tenus dans la pette salle d’en bas. N’état-elle pas lasse, elle auss, de vvre dans une de ces vlles où l’argent, la char et la vanté paradent grotesquement sur la place publque, où la pene des hommes semble s’être soldfiée en perres, en brques, en vans et encombrants objets sur lesquels l’Esprt ne soue plus ? Quant à lu, l se proposat d’abandonner, ou plutôt de vendre (car pourquo gaspller sans rut un ben qu appartent à Deu ?), sa mason et ses possessons d’Amsterdam pour aller pendant qu’l en état temps encore s’nstaller dans l’Arche de Munster, déjà plene à craquer, et où leur am Rottmann saurat leur trouver un tot et des vvres. Il donnat à Hlzonde qunze jours pour réfléchr à ce projet au ond duquel se trouvaent la msère, l’exl, la mort
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peut-être, mas Cancel auss laDownload chance d’être parm les And Print premers à saluer le Règne Rè gne du Cel. Cel. — Qunze jours, répéta-t-l, répé ta-t-l, emme. Mas pas une heure de plus, car le temps presse. Hlzonde se redressa sur le coude, et fixant sur lu ses yeux soudan grands ouverts : — Les qunze jours sont passés, mon mar, dt-elle avec une sorte de dédan tranqulle pour ce qu’elle lassat lassat ans derrère derrè re so. Smon la loua d’être sans cesse en avance d’un bond dans leur marche vers Deu. Sa vénératon pour sa compagne avat réssté à l’usure de la ve journalère. C’est volontarement que ce vel homme néglgeat les mperectons, les ombres, les déauts vsbles pourtant à la surace de l’âme, pour ne retenr des êtres de son chox que ce qu’ls étaent peutêtre au plus pur d’eux-mêmes ou ce qu’ls aspraent à devenr. Sous l’apparence pteuse des prophètes qu’l hébergeat, l reconnassat des sants. Touché dès la premère rencontre par les yeux clars d’Hlzonde, l ne tenat pas compte du pl presque sournos de sa bouche trste. Cette emme magre et lasse restat pour lu un grand Ange. La vente de la mason et des meubles ut la dernère bonne aare de Smon. Comme toujours, son ndérence en matère d’argent servat sa ortune, en lu évtant à la os les erreurs dues à la crante de perdre et celles qu résultent de la hâte de trop gagner. Les exlés volontares quttèrent Amsterdam entourés de ce respect dont joussent malgré tout les rches, même s’ls prennent scandaleusement le part des pauvres. Un coche d’eau les porta à Deventer, d’où ls roulèrent en charot à travers les collnes du Gueldre revêtues de jeunes eulles. On s’arrêtat aux auberges westphalennes pour goûter au jambon umé ; la route vers Münster
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prenat pour ces gens de la vlle un aspect de parte Cancel Download And Print de campagne. Une servante nommée Johanna, que Smon vénérat parce qu’elle avat jads sub la torture pour la o anabaptste, accompagnat Hlzonde Hlzonde et e t l’enant. Bernard Rottmann les reçut aux portes de Münster dans un encombrement de charros, de sacs et de barls. Les apprêts du sège rappelaent l’actvté désordonnée de certanes velles de ête. Tands que les deux emmes descendaent de la voture un berceau et des hardes, Smon écoutat les explcatons du Grand Resttuteur : Rottmann état calme ; tout comme la oule endoctrnée par lu qu traînat par les rues les légumes et le bos de la campagne vosne, l comptat sur l’ade de Deu. Néanmons, Münster avat beson d’argent. Elle avat plus beson encore de l’appu des petts, des mécontents, des ndgnés dssémnés par le monde, qu n’attendaent pour secouer le joug de toutes les dolâtres que la premère vctore du nouveau Chrst. Smon restat rche ; l avat des créances recouvrables à Lübeck, à Elbng, et jusqu’au Jutland et dans la Norvège lontane ; l se devat de récupérer ces sommes qu n’appartenaent qu’au Segneur. Il saurat en cours de route transmettre aux cœurs peux le message des Sants révoltés. Sa réputaton d’homme de sens et d’argent, ses vêtements de bon drap et de cur souple le eraent écouter là où un prêcheur en hallons n’aurat pont accès. Ce rche convert état le melleur émssare du Consel des Pauvres. Smon entra dans ces vues. Il allat are vte pour échapper aux embûches des prnces et des prêtres. Embrassant hâtvement sa emme et sa fille, l repartt sur-le-champ, porté par la plus raîche des mules qu venaent de l’amener aux portes de l’Arche. Peu de jours plus tard, les pontes de er
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des lansquenets Cancel apparurent à l’horzon ; les troupes Download And Print du prnce-évêque s’établrent autour de la vlle sans tenter l’assaut, mas prêtes à rester le temps qu’l audrat pour rédure ces gueux par la am. Bernard Rottmann avat nstallé Hlzonde et son enant dans la mason du bourgmestre Knpperdollng, qu avat été dans Münster le plus ancen protecteur des Purs. Ce gros homme cordal et placde la tratat en sœur. Sous l’nfluence de Jan Matthyjs, qu pétrssat un monde nouveau comme jads ses pans dans sa cave de Haarlem, toutes les choses de la ve devenaent dérentes, acles, smplfiées. Les ruts de la terre appartenaent à tous comme l’ar et la lumère de Deu ; ceux qu avaent du lnge, de la vasselle ou des meubles les portaent dans la rue pour qu’on partageât. Tous, s’amant d’un rgoureux amour, s’adaent, se reprenaent, s’épaent les uns les autres pour s’avertr de leurs péchés ; les los cvles étaent aboles, abols les sacrements ; la corde punssat les blasphèmes et les autes charnelles ; les emmes volées glssaent çà et là comme de grands anges nquets, et on entendat sur la place les sanglots des conessons publques. La pette ctadelle des Bons, cernée par les troupes catholques, vvat dans la fièvre de Deu. Des prêches à l’ar lbre ranmaent chaque sor les courages ; Bockhold, le Sant prééré, plasat parce qu’l assasonnat les sanglantes mages de l’Apocalypse de ses acétes d’acteur. Les malades et les premers blessés du sège, couchés sous les arcades de la place par la tède nut d’été, mêlaent leurs gegnements aux vox aguës des emmes mplorant l’ade du Père. Hlzonde état l’une des plus ardentes. Debout, longue, étrée comme une flamme, la mère de Zénon dénonçat les gnomnes romanes. D’areuses vsons emplssaent ses yeux broullés de larmes ; s’abattant sur elle-même, soudan plée
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comme un grand cerge trop mnce, Hlzonde Cancel Download And Print pleurat de contrton, de tendresse, et d’espor de mourr. Le premer deul publc ut la mort de Jan Matthyjs, tué au cours d’une sorte tentée contre l’armée de l’évêque à la tête de trente hommes et d’une armée d’anges. Hans Bockhold, la tête cente d’une couronne royale, monté sur un cheval caparaçonné d’une chasuble, ut promptement proclamé Prophète Ro sur le parvs de l’églse ; on dressa une estrade où le nouveau Davd trônat chaque matn, décdant sans appel des aares de la terre et du cel. Quelques excursons heureuses, culbutant les cusnes de l’évêque, ayant rapporté un butn de pourceaux et de poules, on estoya sur l’estrade au son des fires ; Hlzonde rt comme les autres quand les ades de cusne de l’ennem, ats prsonners, urent orcés d’apprêter les mets, pus tués par la oule à coups de peds et de pongs. Peu à peu, un changement se asat à l’ntéreur des âmes, comme celu qu, la nut, transorme nsensblement un songe en cauchemar. L’extase donnat aux Sants une démarche ttubante d’vrognes. Le nouveau Chrst-Ro ordonnat jeûne sur jeûne pour ménager les vvres emplés partout dans les caves et les greners de la vlle ; paros, cependant, s une caque aux harengs puat outre mesure, ou s des taches apparassaent sur la rondeur d’un jambon, on se gorgeat. Bernard Rottmann, exténué, malade, gardat la chambre, endossat sans mot dre les décsons du nouveau Ro, se contentant de prêcher au peuple rassemblé sous ses enêtres l’Amour qu consume toutes les scores terrestres et l’attente du Royaume de Deu. Knpperdollng avat solennellement été promu du rang abol de bourgmestre à celu de bourreau ; cet homme gras, au cou rouge, resprat le ben-être dans l’exercce de ses nouvelles onctons, comme s’l avat de tout temps rêvé en
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secret du méter Cancel de boucher. On tuat beaucoup ; le Download And Print Ro asat dsparaître les lâches et les tèdes avant qu’ls en nectassent d’autres ; chaque mort d’alleurs économsat une raton. On parlat de supplces dans la mason où logeat Hlzonde, comme autreos à Bruges du taux des lanes. Hans Bockhold consentat par humlté à se lasser appeler Jean de Leyde, du nom de sa vlle natale, dans les assemblées terrestres, mas prenat auss devant ses fidèles un autre nom, neable, sentant en so une orce et une ardeur plus qu’humanes. Dx-sept épouses témognaent de la vgueur népusable de Deu. La peur ou la glorole poussa des bourgeos à lvrer au Chrst vvant leurs emmes comme ls avaent lvré leurs pèces d’or ; des pallardes trées de bourdeaux de bas étage brguèrent l’honneur de servr aux plasrs conjugaux du Ro. Il vnt chez Knpperdollng s’entretenr avec Hlzonde. Elle pâlt au contact de ce pett homme aux yeux vs, dont les mans ureteuses écartaent comme celles d’un talleur la bordure de son corsage. Elle se souvenat, et ne voulat pas se souvenr, qu’aux jours d’Amsterdam, Amste rdam, quand l n’état ’é tat encore enco re à sa table qu’un baladn amélque, l avat profité pour lu rôler la cusse du moment où elle se penchat sur lu, un plat à la man. Elle cédat avec dégoût aux basers de cette bouche mote, mas ce dégoût tournat à l’extase ; les dernères décences de la ve tombaent comme des guenlles, ou comme cette peau morte qu’on racle dans les étuves ; bagnée par cette halene ade et chaude, Hlzonde cessat d’être, et avec elle les crantes, les scrupules, les débores d’Hlzonde. Le Ro pressé contre elle admrat ce corps grêle dont la magreur semblat, dsat-l, are sallr davantage les ormes bénes de la emme, les longs sens tombants et le ventre bombé. Cet homme habtué aux catns ou aux matrones sans grâce s’émer-
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vellat des rafnements d’Hlzonde : ses rêles Cancel Download And Print mans posées sur la douce ourrure de son mont de Vénus lu rappelaent celles d’une dame dstratement placées sur son manchon ou son carln rsé. Il se racontat : dès l’âge de seze ans, l s’état su Deu. Il état tombé du haut mal dans la boutque du aseur d’habts où l état apprent, et d’où on l’avat chassé ; dans les crs et la bave, l état entré au cel. Il avat de nouveau éprouvé ce tremblement qu état Deu dans les coulsses du théâtre ambulant où l jouat son rôle de ptre battu ; dans une grange, où l avat eu sa premère fille, l avat comprs que Deu état cette char qu bouge, ces corps nus pour qu la pauvreté n’exste pas plus que la rchesse, ce grand flot de ve qu emporte auss la mort et coule comme du sang d’ange. Il tenat ces propos dans un prétenteux jargon d’acteur émallé des autes de grammare d’un fils de paysan. Pluseurs sors de sute, l l’emmena s’asseor parm les Femmes du Chrst à la table du banquet. La oule se pressat contre les tables à les are craquer ; les aamés happaent le cou ou les pattes de poulets que le Ro dagnat leur jeter, et l’mploraent de les bénr. Le pong des jeunes Prophètes qu servaent au Ro de gardes du corps tenat en respect cette cohue. Dvara, la rene en ttre, sorte d’un mauvas leu d’Amsterdam, mastquat placdement, découvrant à chaque bouchée ses dents et sa langue ; elle avat l’ar d’une vache ndolente et sane. Tout à coup, le Ro levat les mans et prat, et une pâleur de théâtre embellssat son vsage aux pommettes ardées. Ou ben, l souat au nez d’un convve pour lu communquer l’Esprt Sant. Une nut, l fit entrer Hlzonde dans l’arrère-salle, et souleva ses robes pour exhber aux jeunes Prophètes la blanche nudté de l’Eglse. Une rxe éclata entre la nouvelle rene et Dvara, orte de ses vngt ans, qu
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la trata de velle. Les deux emmes roulèrent sur Cancel Download And Print les dalles, s’arrachant des pognées de cheveux ; le Ro les mt d’accord en les réchauant ce sor-là toutes deux sur son cœur. Un élan d’actvté secouat par moment ces âmes hébétées et olles. Hans décréta la démolton mmédate des tours, des clochers, et de ceux des pgnons de la vlle qu dépassaent orguelleusement les autres, nsultant ans à l’égalté qu dot régner chez tous devant Deu. Des escouades d’hommes et de emmes suves d’enants palleurs s’engourèrent dans l’escaler des tours ; des volées d’ardoses et des pelletées de brques s’abattrent sur le sol, endommageant les têtes des passants et les totures des masons basses ; on descella à dem du tot de SantMaurce des sants de cuvre qu restèrent suspendus de gungos entre terre et cel ; on arracha des poutres, pratquant ans dans les logs des ancens rches des trouées par où tombaent la plue et la nege. Une velle emme qu s’état plante de geler toute vve dans sa chambre ouverte aux quatre vents ut chassée de la vlle ; l’évêque reusa de l’accuellr dans son camp ; on l’entendt crer pendant quelques nuts dans les ossés. Vers le sor, les travalleurs s’arrêtaent et restaent les jambes pendantes en plen vde, le cou levé, cherchant mpatemment dans le cel les sgnes de la fin des temps. Mas la couleur rouge à l’occdent pâlssat ; un crépuscule de plus tournat au grs, pus au nor, et les démolsseurs atgués redescendaent à l’ntéreur de leurs tauds, pour se coucher et dormr. Une nquétude qu ressemblat à de la gaeté poussat les gens à errer dans les rues croulantes. Du haut des remparts, ls jetaent cureusement les yeux sur la campagne ouverte où ls n’avaent pas
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accès, comme des passagers sur la mer dangereuse Cancel Download And Print qu entoure leur barque ; les nausées de la am étaent celles qu’on éprouve en s’aventurant au large. Hlzonde allat et venat sans cesse par les mêmes venelles, les mêmes passages voûtés et les mêmes escalers montant aux tourelles, tantôt seule, tantôt traînant par la man son enant. Les cloches de la amne sonnaent dans sa tête vde ; elle se sentat légère, vve comme les oseaux tournant sans arrêt entre les flèches d’églse, déallante, mas comme une emme sur le pont de jour. Paros, cassant un long glaçon suspendu à une poutre, elle ouvrat la bouche et suçat cette raîcheur. Les gens autour d’elle semblaent ressentr la même pérlleuse euphore ; en dépt de querelles éclatant pour un qugnon de pan, pour un chou pourr, une espèce de tendresse coulant des cœurs engluat en une seule masse ces mséreux et ces aamés. Depus quelque temps, néanmons, des mécontents osaent élever la vox ; on ne tuat plus les tèdes : ls étaent trop. Johanna Johanna rapportat rapporta t à sa maîtresse maître sse les bruts snstres qu commençaent à courr sur la nature des vandes qu’on dstrbuat au peuple. Hlzonde mangeat sans paraître entendre. Des gens se vantaent d’avor goûté du hérsson, du rat, ou ps encore, tout comme des bourgeos qu’on tenat pour austères se targuaent tout à coup de orncatons dont semblaent ncapables ces squelettes et ces antômes. On ne se cachat plus pour soulager les besons du corps malade ; on avat par atgue cessé d’enterrer les morts, mas le gel asat des cadavres emplés dans les cours des choses propres qu ne sentaent pas. Personne ne parlat des cas de peste qu se produraent sans doute dès les premères tédeurs d’avrl ; on n’espérat pas durer jusque-là. Personne non plus ne mentonnat les travaux d’approche de l’ennem, méthodquement occupé à combler les
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douves, n l’assaut qu’on croyat tout proche. Le Cancel Download And Print vsage des fidèles avat prs l’expresson sournose de chens courants qu ont semblant de ne pas entendre derrère leurs orelles le claquement du ouet. Un jour enfin, Hlzonde debout sur le rempart vt un homme à son côté désgner du bras quelque chose. Une longue colonne se mouvat dans les repls de la plane ; des files de chevaux pétnaent la terre boueuse du dégel. Un cr de joe éclata ; des ragments d’hymnes s’élevèrent des ables potrnes : n’étaent-ce pas là les armées anabaptstes recrutées en Hollande et en Gueldre dont Bernard Rottmann et Hans Bockhold ne cessaent d’annoncer la venue, les rères arrvés pour sauver leurs rères ? Mas bentôt ces régments raternsèrent avec les troupes épscopales qu encerclaent Münster ; le vent de mars asat jouer des étendards parm lesquels quelqu’un reconnut le anon du prnce de Hesse ; ce luthéren s’unssat aux dolâtres pour anéantr le peuple des Sants. Des hommes réussrent à are basculer du haut des murs un bloc de perre, écrasant ans quelques sapeurs travallant au ped d’un baston. Le coup de eu d’un velleur jeta bas une estaette hessose. Les asségeants répondrent par une arquebusade qu fit pluseurs morts. Personne ensute n’essaya plus ren. Mas l’assaut attendu n’eut leu n cette nut-là, n les nuts suvantes. Cnq semanes semanes s’écoulèrent dans une nerte ner te de létharge. Bernard Rottmann avat depus longtemps partagé ses dernères provsons de bouche et le contenu de ses flacons de remèdes ; le Ro, comme à son habtude, jetat par la enêtre des pognées de gran au peuple, mas sans lvrer le reste de ses réserves cachées sous son plancher. Il dormat beaucoup. Il passa trente-sx heures dans un sommel cataleptque avant d’aller une dernère os prêcher sur
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la place presque vde. Il avat depus quelque temps Cancel Download And Print déjà renoncé à ses vstes nocturnes au logs d’Hlzonde ; ses dx-sept épouses, gnomneusement chassées, avaent été remplacées par une fillette à pene pubère, un peu bègue, douée de l’esprt de prophéte, qu’l appelat tendrement son oselle blanche et sa colombe de l’arche. Hlzonde n’éprouvat de l’abandon du Ro n pene, n mécontentement, n surprse ; la rontère s’eaçat pour elle entre ce qu avat été et ce qu n’avat pas été ; l semblat qu’elle ne se souvînt plus d’avor été tratée par Hans en amante. Mas tout restat lcte : l lu arrva d’attendre en plene nut le retour de Knpperdollng, cureuse d’essayer s elle pourrat émouvor cette masse de char ; l passa sans la regarder, en grommelant, occupé d’autre chose que d’une emme. La nut où les troupes de l’évêque entrèrent dans la vlle, Hlzonde ut révellée vers mnut par le hurlement d’une sentnelle égorgée. Deux cents lansquenets, conduts par un traître, s’étaent ntroduts par une des poternes. Bernard Rottmann, alerté un des premers, se jeta hors de son lt de malade, s’élança dans la rue, ses pans de chemse battant grotesquement ses jambes magres ; l ut msércordeusement tué par un Hongros qu n’avat pas comprs les ordres de l’évêque, lesquels étaent de ramener les ches de la rébellon vvants. Le Ro surprs dans son sommel combattt de chambre en chambre, de corrdor en corrdor, avec un courage et une aglté de chat traqué par des dogues ; au pont du jour, Hlzonde le vt passer sur la place dépoullé de ses orpeaux de théâtre, nu jusqu’à la centure, plé en deux sous le ouet. On le fit entrer à coups de ped dans une grande cage où l avat coutume d’enermer les mécontents et les tèdes avant leur jugement. Knpperdollng à dem assommé ut lassé pour mort mor t sur un banc. Toute Toute la
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journée, le pas Cancel lourd des soldats retentt re tentt dans la Download And Print vlle ; ce brut cadencé sgnfiat que dans la place orte des ous le bon sens avat reprs son empre sous l’espèce de ces hommes qu vendent leur ve pour une pae ben détermnée, bovent et mangent à heure fixe, rapnent et volent à l’occason, mas ont quelque part une velle mère, une emme économe, une pette métare où ls revendront vvre éclopés et vells, vont à la messe quand on les y orce, et croent modérément en Deu. Les supplces recommencèrent, mas décrétés cette os par l’autorté légtme, approuvés également par le Pape et par Luther. Ces gens en hallons, hâves, aux gencves gangrenées par la am, asaent aux reîtres ben nourrs l’eet d’une vermne dégoûtante qu’l état acle et juste d’écraser. Le premer désordre passé, la vndcte publque élut domcle sur la place de la Cathédrale, au bas de l’estrade où le Ro avat tenu ses assses. Les mourants comprenaent vaguement que les promesses du Prophète se réalsaent pour eux, autrement qu’on avat cru, comme l arrve toujours avec les prophétes : le monde de leur trbulaton finssat ; ls s’en allaent de plan-ped dans un grand cel rouge. Très peu maudssaent l’homme qu les avat entraînés dans cette sarabande de rédempton. Certans, tout au ond d’eux-mêmes, n’gnoraent pas qu’ls avaent de longue date désré la mort, comme la corde trop tendue désre sans doute se brser. Hlzonde attendt son tour jusqu’au sor. Elle avat endossé la plus belle robe qu lu restat ; ses nattes étaent pquées d’épngles d’argent. Quatre soldats parurent enfin ; c’étaent d’honnêtes brutes qu asaent leur méter. Elle sast par la man la pette Martha Mar tha qu se mt à crer et lu dt : — Vens, mon enant, nous allons chez Deu. Un des hommes lu arracha l’nnocente l’nnocente et la jeta je ta
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à Johanna qu la reçut contre son corsage nor. Cancel Download And Print Hlzonde les suvt sans parler davantage. Elle allat s vte que ses exécuteurs durent presser le pas. Pour ne pont trébucher, elle retenat des deux mans les longs pans de sa robe de soe verte qu lu donnaent l’ar de marcher sur les vagues. Arrvée sur l’estrade, elle reconnut conusément parm les morts des gens qu’elle connassat, une des ancennes renes. Elle se lassa tomber sur ce tas encore chaud, et tendt la gorge. Le voyage de Smon tournat au chemn de crox. Ses prncpaux débteurs l'écondusrent sans payer, de crante d’emplr la poche ou la besace anabaptste ; des remontrances coulaent de la bouche des rpons et des avares. Son beau-rère Juste Lgre se déclara ncapable de représenter sans déla les grosses sommes placées par Smon dans son comptor d’Anvers ; l se flattat d’alleurs de meux ménager le ben d’Hlzonde et de son enant qu’un benêt qu asat cause commune avec les ennems de l’Etat. Smon repassa tête basse, en mendant congédé, le portal sculpté et doré comme une châsse de cette mason de commerce qu’l avat contrbué à onder. Il échoua également dans sa msson de quêteur : seuls, quelques mséreux consentrent à se sagner au profit de leurs Frères. Inquété à deux reprses par l’autorté ecclésastque, l paya pour échapper à la prson. Il restat jusqu’au bout l’homme rche que ses florns protègent. Une parte des magres sommes ans récoltées ut volée par un aubergste de Lübeck chez qu l tomba rappé d’un coup de sang. Son état de santé l’oblgeant à chemner par pettes étapes, l n’arrva en vue de Münster que l’avantvelle de l’assaut. L’espor de s’ntrodure dans la vlle asségée s’avéra van. Mal reçu, mas non
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molesté dans le Cancel camp du prnce-évêque, à qu l Download And Print avat jads rendu des servces, l réusst à se loger dans une erme toute proche des douves et des murs grs qu lu cachaent Hlzonde et l’enant. Il mangeat sur la table de bos blanc de la ermère avecun juge convoqué en vue du procès ecclésastque qu allat bentôt s’ouvrr, un ofcer de l’évêque, et pluseurs transuges échappés de Münster, jamas atgués ceux-là de dénoncer les oles des fidèles et les crmes du Ro. Mas Smon n’écoutat que d’une orelle les racontars de traîtres vlpendant des martyrs. Le trosème jour qu suvt la prse de la vlle, l obtnt enfin la permsson d’entrer dans Münster. Il marchat pénblement le long de rues patroullées par la troupe, luttant contre le solel et le vent sec de cette matnée de jun, cherchant conusément son chemn dans cette vlle qu’l ne connassat que par ouï-dre. Sous une arcade du Grand Marché l reconnut Johanna assse sur le pas d’une porte, l’enant sur les genoux. La fillette hurla quand cet étranger s’approcha pour l’embrasser ; Johanna fit sans mot dre sa révérence de servante. Smon poussa la porte aux serrures brsées, parcourut les pèces vdes du rez-de-chaussée, rez-de-chaussée, pus celles des étages. étage s. Ressort sur la place, l se drgea vers l’esplanade des exécutons. Un lé de brocart vert pendat sur l’estrade ; l reconnut de lon à ce bout d’étoe Hlzonde prse sous un tas de morts. Sans s’attarder cureusement auprès de ce corps dont s’état lbérée l’âme, l alla rejondre rejondre la ménagère et l’enant. l’enant. Un vacher passa dans la rue avec sa bête, un seau, et l’escabeau de la trate, crant du lat ; on rouvrat une taverne dans la mason d’en ace. Johanna employa les quelques lards dont l’avat mune Smon à are remplr des gobelets d’étan. Le eu crépta dans l’âtre ; on entendt bentôt le tntement
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LA VIE ERRANTE
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d’une culler entre les mans de la pette. La ve Cancel Download And Print domestque se reormat lentement autour d’eux, emplssant peu à peu cette mason dévastée, comme la marée montante recouvre une plage où s’étalaent des épaves, des trésors nauragés, et des crabes des bas-onds. La servante prépara au maître le lt de Knpperdollng, afin de lu évter la atgue d’avor à monter de nouveau les marches. Elle ne répondt d’abord que par un agre slence aux questons du vellard qu avalat lentement sa bère chaude. Quand elle parla enfin, ce qu sortt de sa bouche ut un torrent d’ordures qu sentat à la os l’éver et la Bble. Le Ro n’avat jamas été pour la velle Husste qu’un gueux qu’on at manger à la cusne et qu ose coucher avec la emme du maître. Lorsque tout ut dt, elle se mt à récurer le plancher à bruyant renort de brosses, de selles, et de claquements de torchons rncés. Il dormt peu cette nut-là, mas contrarement à ce que croyat sa servante, le sentment qu le pognat n’état n l’ndgnaton n la honte, mas ce mal plus tendre qu se nomme la pté. Smon étouant dans la nut tède pensat à Hlzonde comme à une fille qu’l aurat perdue. Il s’en voulat de l’avor lassée seule traverser cette mauvase passe, pus se dsat que chacun a son lot, sa part qu n’est qu’à so du pan de ve et de mort, et qu’l état juste qu’Hlzonde eût mangé ce pan à sa guse et à son heure. Cette os encore elle le précédat ; elle avat passé avant lu par les dernères ares. Il contnuat à donner rason aux fidèles contre l’Eglse et l’Etat qu les avaent écrasés ; Hans et Knpperdollng avaent versé le sang ; pouvat-on s’attendre à autre chose dans un monde de sang ? Depus plus de qunze sècles le Royaume de Deu sur la terre, que Jean, Jean, Perre Per re e t Thomas auraent dû vor de leurs veux d’hommes vvants, avat été paresseusement
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La mort à Münster
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relégué à la fin Cancel des temps par les lâches, les ndDownload And Print érents, les hables. Le Prophète avat osé proclamer c même ce Royaume qu est au cel. Il montrat la voe, même s par hasard l avat prs la mauvase route. Hans pour Smon restat un Chrst, au sens où chaque homme pourrat être un Chrst. Ses oles semblaent mons gnobles que les prudents péchés péchés des Pharsens Pharsens et des sages. Le veu veu ne s’ndgnat pas qu’Hlzonde eût cherché dans les bras du Ro des joes qu’l avat, lu, depus longtemps cessé de pouvor donner : ces Sants lvrés à eux-mêmes avaent goûté jusqu’à l’abus le bonheur qu naît de l’unon des corps, mas ces corps lbérés des attaches du monde, déjà morts à tout, avaent connu sans doute dans leurs embrassements une orme plus chaude de l’unon des âmes. La bère décontractant la potrne du vellard lu acltat cette mansuétude où entraent de la atgue, et une sensuelle et pognante bonté. Hlzonde au mons état en pax. Il voyat errer sur le lt, à la lueur de la chandelle brûlant à son chevet, les mouches qu en ce moment abondaent à Münster ; elles s’étaent peut-être posées sur ce blanc vsage ; l se sentat d’accord avec cette pourrture. Soudan l’dée que la char du Nouveau Chrst état chaque matn en proe aux pnces et au er rouge de la queston extraordnare s’empara de lu, révulsant ses entralles ; enchaîné au rsble Homme des Douleurs, l retombat dans cet ener des corps voués à s peu de joe et à tant de maux ; l sourat avec Hans comme Hlzonde avat jou avec lu. Toute la nut, sous ce drap, dans cette chambre où régnat un conort dérsore, l se heurta à l’mage du Ro encagé vvant sur la place comme un homme au ped gangrené heurte sans le voulor son membre malade. Ses prères ne dstnguaent plus entre le mal qu peu à peu lu resserrat le cœur, cœur, trallant les fibres de l’épaule l’é paule
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descendant jusqu’au pognet gauche, et les tenalCancel Download And Print les dans le gras du bras et autour des mamelles de Hans. Dès qu’l eut reprs assez de orces pour are quelques pas, l se traîna jusqu’à la cage du Ro. Les gens de Münster s’étaent lassés de ce spectacle, mas des enants, pressés contre les barreaux, persstaent à jeter à l’ntéreur des épngles, du crottn, des bouts d’os pontus, sur lesquels le capt état orcé de marcher nu-peds. Des gardes, comme autreos dans la salle des êtes, repoussaent mollement cette canalle : Monsegneur von Waldeck tenat à are durer le Ro jusqu’à son exécuton, prévue au plus tôt pour la m-été. On venat de rencager le prsonner après une séance de torture ; recroquevllé dans un con, l tremblat encore. Une odeur étde sortat de sa casaque et de ses plaes. Mas le pett homme avat gardé ses yeux vs et sa vox prenante d’acteur. — Je couds, je coupe, je aufile, chantonnat le supplcé. Je ne sus qu’un pauvre apprent talleur… Des habts de peau… L’ourlet d’une robe sans couture… Ne talladez pas l’œuvre de… Il s’arrêta court, jetant autour de lu le coup d’œl urt urt d’un homme homme qu veut à la os sauvegarsauvegarder son secret et le dvulguer à dem. Smon Adransen écarta les gardes, et réusst à passer le bras entre les barreaux, — Deu te garde, Hans, dt-l en lu tendant la man. Smon rentra chez lu recru comme par un long voyage. Depus sa dernère sorte, de grands changements s’étaent produts, rendant peu à peu à Münster son plat vsage habtuel. La cathédrale état plene du brut des chants d’Eglse. L’évêque avat rénstallé à deux pas du palas épscopal sa
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La mort à Münster
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maîtresse, la belle Jula Alt, mas cette dscrète Cancel Download And Print personne ne asat pas scandale. Smon prenat tout cela avec l’ndérence d’un homme sur le pont de qutter une vlle, et que ce qu’on y at ne préoccupe plus. Mas sa grande bonté d’autreos s’état tare comme une source. Stôt rentré, l éclata en ureur contre Johanna, qu avat néglgé de se procurer une plume, un flacon d’encre et du paper, comme l le lu avat commandé. Quand ces objets urent réuns, l s’en servt pour écrre à sa sœur. Il n’avat pas communqué avec celle-c depus près de qunze ans. La bonne Salomé avat épousé un fils cadet de la pussante mason des banquers Fuggers. Martn désavantagé par les sens s’état reat à lu seul une ortune ; l vvat à Cologne depus le commencement du sècle. Smon leur demanda de se charger de l’enant. Salomé reçut cette lettre dans sa mason des champs de Lulsdor, où elle survellat elle-même l’étendage de sa lessve. Abandonnant à ses servantes le son des draps et du lnge fin, elle commanda son coche sans même demander l’avs du banquer, qu comptat peu au logs, y empla des vvres et des couvertures, et roula vers Münster à travers une régon désolée par les troubles. troubles. Elle trouva Smon au lt, la tête soutenue par un veux manteau plé en quatre qu’elle remplaça ausstôt par un coussn. Avec cette obtuse bonne volonté des emmes qu s’eorcent de rédure la malade et la mort à une sére anodne de petts maux sans mportance, ats pour être adoucs par des sons maternels, la vsteuse et la servante s’engagèrent dans un échange de propos concernant le régme, la ltere et la chase percée. Le rod regard du mourant avat reconnu sa sœur, mas Smon profitat de son état de malade pour retarder d’un nstant la atgue des benvenues habtuelles. Il se souleva
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enfin, échangeant avec Salomé le baser d’usage. Cancel Download And Print Il retrouva ensute sa netteté d’homme d’aares pour énumérer les onds qu revenaent à Martha, et ceux qu’l mportat de récupérer au plus tôt pour elle. Les créances étaent plées dans une tole crée à portée de sa man. Ses fils établs, qu à Lsbonne, qu à Londres, qu à la tête d’une mprmere d’Amsterdam, n’avaent beson n de ses brbes de bens terrestres n de sa bénédcton ; Smon lassat le tout à l’enant d’Hlzonde. Le vellard semblat avor oublé ses promesses au Grand Resttuteur pour se conormer de nouveau aux coutumes du monde qu’l quttat et n’essayat plus de réormer. Ou peut-être, renonçant ans à des prncpes plus chers que la ve même, goûtat-l jusqu’au bout l’amer plasr de se déprendre de tout. Salomé cajola l’enant en s’attendrssant sur ses mollets magres. Elle ne pouvat proérer tros phrases sans appeler à l’ade la Verge et tous les sants de Cologne : Martha serat élevée par des dolâtres. Cela état dur, mas pas plus dur que la ureur des uns, la torpeur des autres, pas plus dur que la vellesse qu empêche l’époux de satsare l’épouse, pas plus dur que de retrouver morts ceux qu’on lassa vvants. Smon s’eorça de penser au Ro dans sa cage d’agone ; mas les tourments de Hans ne sgnfiaent plus aujourd’hu ce qu’ls avaent sgnfié her ; ls devenaent supportables, comme devenat supportable dans la potrne de Smon cette douleur qu mourrat avec lu. Il prat, mas quelque chose lu dsat que l’Eternel ne lu demandat plus de prer. Il fit un eort pour revor Hlzonde, mas le vsage de la morte ne se dstnguat plus. Il dut remonter plus lon, jusqu’à l’époque des noces mystques de Bruges, du pan et du vn partagés en secret, et du corsage échancré lassant devner un long sen pur. Cela auss s’eaça ; l revt sa premère
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emme, cette bonne âme, avec qu l prenat le ras Cancel Download And Print dans son jardn de Flessngue. Salomé et Johanna, erayées par un grand soupr, se précptèrent. On l’enterra dans l’églse de Sant-Lamprecht après une messe chantée.
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LES FUGGERS DE COLOGNE
LES Fuggers habtaent à Cologne au parvs de Sant-Géréon Sant-Géréon une pette pe tte mason sans aste où tout état é tat combné pour le conort et la pax. Une odeur de pâtssere et d’eau-de-ve de cerses y flottat sans cesse. Salomé se plasat à s’attarder à table après les longs repas composés avec art, essuyant ses lèvres d’une servette damassée ; à entourer d’une chaîne d’or sa talle épasse et son large cou rose ; à porter de bonnes étoes dont la lane cardée et tssée avec des sons révérenceux garde quelque chose de la douce chaleur des brebs vvantes. Ses gumpes dscrètement montantes attestaent sans rodeur sa modeste d’honnête emme. Ses dogts soldes touchaent chaent le pett orgue portat porta t nstallé dans dans le parparlor ; dans sa jeunesse, sa belle vox flexble s’état éployée dans les madrgaux et les motets d’Eglse ; elle amat ces entrelacs de sons comme elle amat ses broderes. Mas manger restat la grande aare : l’année lturgque, peusement observée, se doublat
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Les Fuggers de Cologne
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d’une année culnare, d’une sason des concombres Cancel Download And Print ou des confitures, du romage blanc ou du hareng ras. Martn état un pett homme magre que la cusne de sa emme n’engrassat pas. Redoutable en aares, ce dogue redevenat au logs un noens épagneul. Ses plus grandes audaces consstaent à débter à table des hstores égrllardes pour le bénéfice des servantes. Le couple avat un fils, Sgsmond, embarqué à seze ans avec Gonzalo Pzarre pour le Pérou, où le banquer avat d’mportantes mses de onds. Ils n’espéraent plus le revor, les choses ayant dernèrement assez mal tourné à Lma. Une fille encore toute jeune adoucssat cette perte ; Salomé racontat en rant cette grossesse tardve, un peu due à des neuvanes et un peu à l’eet de la sauce aux câpres. Cette fillette et Martha étaent à peu près du même âge ; les deux cousnes partagèrent le même lt, les mêmes jouets, les mêmes salutares essées, et plus tard les mêmes leçons de chant et les mêmes même s atours. Tantôt rvaux et tantôt compères, le gros Juste Lgre et le fluet Martn, le marcassn des Flandres et la belette rhénane, s’étaent survellés, consellés de lon, soutenus ou nu depus plus de trente ans. Ils se prsaent à leur vrae valeur, ce que n’eussent pu are n les badauds ébaubs par leur ortune, n les prnces qu’ls servaent et dont ls se servaent. Martn savat à un sou près ce que représentaent en argent comptant ces abrques, ces atelers, ces chanters, ces domanes quas segneuraux dans lesquels Henr-Juste avat placé son or ; le luxe épas du Flamand lu ournssat matère à bons contes et auss les deux ou tros grosses habletés, toujours les mêmes, qu servaent au veux Juste Juste à se dépêtrer dépê trer dans les cas dfcles. dfcle s. De son côté, Henr-Juste, ce bon servteur qu ballat révérenceusement à la Régente des Pays-Bas les sommes
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LA VIE ERRANTE
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nécessares à ses achats de tableaux talens et à ses Cancel Download And Print ondatons peuses, se rottat les mans en apprenant que l’Electeur Palatn ou le duc de Bavère gageaent leurs bjoux chez Martn et lu mendaent un prêt à un taux dgne de celu des Jus de l’usure ; l louat, non sans une ponte de pté moqueuse, ce rat qu grgnotat dscrètement la substance du monde au leu d’y mordre à belles dents, ce malngre dédagneux des rchesses qu se voent, se touchent et se confisquent, mas dont la sgnature au bas d’une eulle valat meux que celle de Charles-Qunt. On eût surprs ces personnages s respectueux des pussants du jour en les déclarant plus dangereux pour l’ordre établ que le Turc nfidèle ou le paysan révolté ; avec cette absorpton dans l’mmédat et dans le détal qu caractérse leur espèce, eux-mêmes ne se doutaent pas du pouvor perturbateur de leurs sacs d’or et de leurs calepns. Et pourtant, asss à leur comptor, regardant se dessner à contre-jour la rode slhouette d’une chevaler cachant sous ses grands ars la crante d’être écondut, ou le suave profil d’un évêque désreux d’achever sans trop de ras les tours de sa cathédrale, l leur arrvat de sourre. A d’autres les bruts de cloches ou de bombardes, les chevaux rngants, les emmes nues ou drapées de brocart, à eux la matère honteuse et sublme, honne tout haut, adorée ou couvée tout bas, parelle aux partes secrètes en ce qu’on en parle peu et qu’on y pense sans cesse, la jaune substance sans laquelle Madame Impéra ne desserrerat pas les jambes dans le lt du prnce, et Monsegneur ne pourrat payer les perreres de sa mtre, l’Or, dont le manque ou l’abondance décde s la Crox era ou non la guerre au Crossant. Ces balleurs de onds se sentaent sentaent maîtres ès réaltés. Comme Martn par Sgsmond, le gros Lgre avat été désapponté par son fils aîné. On n’avat ren reçu
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d’Henr-Maxmlen en dx ans que quelques demanCancel Download And Print des d’argent et qu’un volume de vers ranças, pondu sans doute en Itale entre deux campagnes. Ren que de âcheux ne pouvat venr de ce côté-là. L’homme d’aares survella de très près son cadet pour évter de nouveaux mécomptes. Dès que Phlbert, ce fils selon son cœur, eut attent l’âge où l’on sat are glsser convenablement les boules d’un bouler, l l’envoya apprendre les finesses de la banque chez Martn l’nallble. Phlbert à vngt ans état gras ; une rustcté naturelle se montrat sous ses manères sogneusement apprses ; ses petts yeux grs lusaent dans la ente de ses paupères toujours m-closes. Ce fils du Grand Argenter de la cour de Malnes aurat pu are le prnce ; l excellat, au contrare, à dépster les erreurs dans les calculs des comms ; sor et matn, dans une arrère-salle sans lumère où les scrbes se gâtaent la vue, l vérfiat les D, les M, les X et les C combnés aux L et aux I pour ormer des chres, Martn méprsant la numérotaton arabe, sans ner touteos son utlté dans les longues addtons. Le banquer s’habtuat à ce garçon tacturne. Quand l’asthme ou les tourments de la goutte le asaent penser à ses fins dernères, dernère s, on l’entendat l’entendat dre à sa emme : — Ce gros ngaud me remplacera. remplace ra. Phlbert semblat absorbé par ses regstres et ses grattors. Mas une ponte d’rone perçat sous ses paupères ; paros, réexamnant les aares du patron, l lu arrvat de se dre qu’après Henr-Juste et Martn, plus fin que l’un, plus éroce que l’autre, l y aurat un jour Phlbert l’hable homme. Ce n’est pas lu qu aurat accepté contre un mnce ntérêt de seze deners par lvre, payables par quarters aux quatre grandes ores, la substtuton des dettes du Portugal.
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Il venat le dmanche aux réunons qu se tenaent Cancel Download And Print l’été sous la trelle et l’hver au parlor. Un prélat ctat du latn ; Salomé, jouant au trctrac avec une vosne, commentat chaque bon coup d’un dcton rhénan ; Martn, qu avat at apprendre aux deux filles le parler ranças, s convenable aux emmes, s’en servat lu-même quand l lu arrvat d’avor à exprmer des dées plus délées ou plus relevées que celles des jours ouvrables. On causat de la guerre de Saxe et de son eet sur l’escompte, des progrès de l’hérése, et selon la sason des vendanges ou du carnaval. Le bras drot du banquer, un Genevos sentenceux nommé Zébédée Crêt, état prs à parte pour son horreur des ppes et du vn. Ce Zébédée, qu ne nat pas complètement avor qutté Genève à la sute d’une aare de gérance de trpots et de abrcaton llégale de cartes à jouer, mettat ses nractons sur le compte de ses ams lbertns, mantenant justement puns, et ne cachat pas l’enve de rentrer un jour ou l’autre au bercal de la Réorme. Le prélat protestat, agtant son dogt orné d’une bague volette ; quelqu’un, par plasantere, ctat les pettes bougreres versfiées de Théodore de Bèze, ce beau fils cajolé par l’rréprochable Calvn. Une dscusson s’engageat pour décder s ou ou non le Consstore état déavorable aux prvlèges des gens d’aares, mas personne au ond ne s’étonnat qu’un bourgeos s’accommodât des dogmes promulgués par les magstrats de sa bonne vlle. Après souper, Martn attrat dans une embrasure un conseller aulque ou l’envoyé secret du ro de France. Le Parsen galant proposat bentôt de se rapprocher des dames. Phlbert pnçat un luth ; Bénédcte et Martha se levaent la man dans la man. Les madrgaux trés du Livre des amants parlaent d’agneaux, de fleurs, et de la Dame Vénus, mas ces ars à la mode servaent
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à accompagner Cancel les paroles de cantques chez la Download And Print racalle anabaptste ou luthérenne contre laquelle l’homme d’Eglse venat de tonner au prône. Bénédcte substtuat nvolontarement le verset d’un psaume au couplet d’une chanson d’amour. Martha, nquète, lu asat sgne de se tare ; les deux filles se rasseyaent côte à côte, et l’on n’entendat plus d’autre rtournelle que celle de la cloche de SantGéréon sonnant l’angélus du sor. Le gros Phlbert qu avat du talent pour la danse s’orat paros à montrer à Bénédcte des figures nouvelles ; elle reusat d’abord, pus trouvat une joe d’enant à danser. Les deux cousnes s’amaent d’un clar amour d’anges. Salomé n’avat pas eu le cœur d’enlever à Martha sa nourrce Johanna, et la velle Husste avat communqué à l’enant de Smon son tremblement et son austérté. Johanna avat eu peur ; la crante avat at d’elle à l’extéreur une velle emme parelle à toutes les autres, qu prend l’eau bénte à l’églse et base l’Agnus Dei. Mas tout au ond d’elle-même subsstat la hane des Satans en dalmatque de brocart, des veaux d’or, et des doles de char. Cette able velle que le banquer n’avat pas prs la pene de dstnguer des édentées qu lavaent en bas ses écuelles grommelat à tout un éternel Non. A l’en crore, le mal couvat dans ce logs bourré d’ases et de ben-être comme une portée de rats dans le duvet mou d’un édredon. Il se cachat dans le bahut de Dame Salomé et dans le core-ort de Martn, dans les oudres de la cave et les couls au ond des marmtes, dans le brut rvole des concerts du dmanche, dans les pastlles de l’apothcare et dans la relque de sante Apollne qu guért les maux de dents. La velle n’osat s’en prendre ouvertement à la Mère de Deu dans sa
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nche de l’escaler, mas on l’entendat maugréer au Cancel Download And Print sujet de l’hule qu’on brûle pour ren devant des poupées poupées de perre. pe rre. Salomé s’alarmat de vor Martha à seze ans apprendre à Bénédcte à dédagner les boîtes de mercers plenes de coûteux brmborons apportés de Pars ou de Florence, ou are fi de Noël et de son mélange de musque, d’habts neus et d’oe truée. Le cel et la terre pour la bonne emme étaent sans problèmes. La messe état une occason d’édficaton, un spectacle, un prétexte à porter sa capette de ourrure l’hver et sa jaquette de soe l’été. Mare et l’Enant, Jésus en crox, Deu dans son nuage trônaent au Parads et sur les murs des églses ; l’expérence ensegnat par quelle Verge on avat dans tel ou tel cas le plus de chances d’être exaucée. Dans les crses domestques, la preure des Ursulnes, qu état de bon consel, état volonters consultée, ce qu n’empêchat pas Martn de se gausser des nonnes. Les ventes d’ndulgences avaent, l est vra, ndûment enflé les sacs du Sant-Père, mas l’opératon qu consste à trer sur le crédt de NotreDame et des sants pour couvrr les déficts du pécheur état auss logque que les transactons du banquer. Les bzarreres de Martha étaent mses sur le compte d’une complexon maladve ; l eût été monstrueux d’magner qu’une créature délcatement nourre pût pervertr sa tendre compagne, se mettre avec elle du côté de mécréants qu’on mutle et qu’on brûle, et renoncer pour se mêler des querelles de l’Eglse à ce slence modeste qu sed s ben aux filles. Johanna Johanna ne pouvat ren are que dénoncer à ses jeunes maîtresses, de sa vox un peu olle, les chemns de l’erreur ; sante, mas gnare, ncapable de recourr aux Ecrtures dont elle ne répétat dans son jargon néerlandas que quelques ragments
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apprs par cœur,Cancel l ne lu appartenat pas de monDownload And Print trer la bonne route. Stôt que l’éducaton lbérale que leur avat at donner Martn eut développé leur ntellgence, Martha se jeta en secret sur les lvres où l’on parle de Deu. Perdue dans la orêt des sectes, épouvantée d’être sans gude, la fille de Smon cragnat de renoncer aux veux errements en aveur d’une nouvelle erreur. Johanna Johanna ne lu avat caché n l’name de sa mère, mèr e, n la fin ptoyable de son père berné et trah. L’orphelne savat qu’en tournant le dos aux aberratons romanes ses parents n’avaent at que s’engager plus avant dans une route qu ne va pas au cel. Cette verge ben gardée, qu n’état jamas descendue dans la rue qu’escortée d’une servante, tremblat à l’dée d’aller grossr la bande d’exlés pleurards et de gueux extatques qu rôdaent de vlle en vlle, honns des gens de ben, et finssaent sur la palle, celle des cachots et celle des bûchers. L’dolâtre état Charybde, mas la révolte, la msère, le danger et l’abjecton Scylla. Prudemment, le peux Zébédée la tra de cette mpasse : un écrt de Jean Calvn, prêté sous le sceau du secret par ce Susse crconspect, et lu la nut à la lueur d’une chandelle, avec autant de précautons que d’autres filles en mettent à déchrer un message d’amour, apporta à l’enant de Smon l’mage d’une o nette de toute erreur, exempte de toute ablesse, strcte dans sa lberté même, d’une rébellon transormée en Lo. A en crore le comms, la pureté évangélque allat de par à Genève avec la prudence et la sagesse bourgeoses : les danseurs gambllant comme des païens derrère les portes closes, les marmots gloutons suçant mpudemment en plen prêche leur sucre et leurs dragées étaent ustgés jusqu’au sang ; les dssdents banns ; les joueurs et les débauchés puns de mort ; les athées justement proms au bûcher.
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Lon de céder aux mouvements lascs de son sang, Cancel Download And Print comme le gros Luther convolant au sortr du cloître entre les bras d’une nonne, le laïc Calvn avat attendu longtemps avant de contracter avec une veuve le plus chaste des marages ; au leu d’engrasser à la table des prnces, Maître Jean surprenat par sa rugalté ses hôtes de la rue des Chanones ; son ordnare n’état at que du pan et des possons de l’Evangle, dans l’espèce les trutes et les éras du lac, qu d’alleurs avaent ben leur prx. Martha endoctrna sa compagne, qu la suvat en tout dans les choses de l’esprt, qutte à lu en remontrer dans les choses de l’âme. Bénédcte état toute lumère ; un sècle plus tôt, elle eût goûté au cloître le bonheur de n’être qu’à Deu ; les temps étant ce qu’ls étaent, cette agnelle trouva dans la o évangélque l’herbe verte, le sel et l’eau pure. La nut, dans leur chambre sans eu, dédagnant les nvtes de l’édredon et de l’oreller, Martha et Bénédcte assses côte à côte relsaent la Bble à vox basse. Leurs joues appuyées l’une à l’autre semblaent n’être que la surace par où se touchaent deux âmes. Pour tourner le eullet, Martha attendat Bénédcte à la fin de la page et, s par hasard la pette s’assoupssat dans cette sante lecture, lu trat doucement les cheveux. La mason de Martn, engourde de ben-être, dormat son pesant sommel. Seule, comme la lampe des Verges sages, vellat dans une chambre haute, au cœur de deux filles slenceuses, la rode ardeur de la Réorme. Pourtant, Martha elle-même n’osat encore abjurer tout haut les turptudes papstes. Elle trouvat des prétextes pour évter la messe du dmanche, et son manque de courage lu pesat comme le pre péché. Zébédée approuvat cette crconspecton : Maître Jean Jean tout le premer preme r, mettant me ttant ses dscples en garde contre tout scandale nutle, eût blâmé Johanna de
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souer la velleuse aux peds deAnd la Print Verge de l’escaCancel Download ler. Une délcatesse de cœur retenat Bénédcte de pener ou d’nquéter les sens, mas Martha se reusa un sor de Toussant à prer pour l’âme de son père, qu, où qu’l se trouvât, n’avat pas beson de ses Ave. Tant de dureté consterna Salomé, qu ne comprenat pas qu’on reusât au pauvre mort l’obole d’une prère. Martn et sa emme se proposaent de longue date d’unr leur enant à l’hérter des Lgre. Ils en parlaent au lt, couchés tranqullement entre leurs draps ben bordés. Salomé comptat sur ses dogts les pèces du trousseau, les peaux de martre et les couvre-peds brodés. Ou ben, cragnant que la pudeur de Bénédcte ne la rendît rétve aux joes du marage, elle cherchat dans sa mémore la recette d’un baume aphrodsaque servant dans les amlles à ondre au sor des noces les jeunes épousées. Quant à Martha, on lu trouverat un marchand ben en vue sur la place de Cologne, ou même un chevaler ortement endetté, à qu Martn erat généreusement remse des hypothèques hypothèques qu grevaent ses terres. terre s. Phlbert tournat à l’hértère du banquer les complments d’usage. Mas les cousnes portaent les mêmes bonnets et les mêmes parures ; l s’y trompat, et Bénédcte semblat se plare à provoquer espèglement ces erreurs. Il en jurat tout haut : la fille valat son pods d’or, et la nèce tout au plus une pognée de florns. Quand le contrat ut à peu près dressé, Martn appela sa fille dans son cabnet pour fixer la date des noces. N gae n trste, Bénédcte, mettant court aux accolades et aux tendres eusons de sa mère, remonta dans sa chambre pour coudre avec Martha. L’orphelne parlat de ur ; un bateler consentrat peut-être à les condure à Bâle, où de
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bons chrétens les aderaent sans doute à ranchr Cancel Download And Print l’étape suvante. Bénédcte, renversant sur la table le sable de l’écrtore, y creusat pensvement du dogt le sllon d’un fleuve. Le matn pontat ; elle passa lentement la man sur la carte qu’elle s’état tracée ; quand le sable ut de nouveau lsse sur la surace pole, la promse de Phlbert se leva en souprant : — Je sus trop able. Alors Martha ne lu proposa plus de ur, se contentant de lu montrer du bout de l’ndex le verset où l état queston d’abandonner les sens pour suvre le Segneur. Segneur. Le rod du pett jour les oblgea à chercher reuge au lt. Chastement couchées dans les bras l’une de l’autre, elles se consolaent en mêlant leurs larmes. Pus, la jeunesse reprenant le dessus, elles se moquèrent des petts yeux et des grosses joues du fiancé. Les prétendants oerts à Martha ne valaent pas meux : Bénédcte la fit rre en décrvant le marchand un peu chauve, le hobereau sanglé les jours de tournos dans sa bruyante erralle er ralle ou le fils du bourgmestre, un sot atté comme les mannequns qu’on envoe de France aux talleurs, avec son bonnet à plumes et sa braguette rayée. Martha rêva cette nut-là que Phlbert, ce Sadducéen, cet Amalécte au cœur ncrconcs, emportat Bénédcte dans une boîte qu voguat toute seule sur le Rhn. L’an 1549 débuta par des plues qu emportèrent les sems des maraîchers ; une crue du Rhn nonda les caves où des pommes et des barls à dem plens flottaent sur l’eau grse. En ma, les rases encore vertes pourrrent dans les bos et les cerses dans les vergers. Martn fit dstrbuer des soupes aux pauvres sous le porche de Sant-Géréon ; la charté chrétenne et la peur des émeutes nspraent nspraent au
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bourgeos ces sortes d’aumônes. Mas ces maux Cancel Download And Print n’étaent que les ourrers d’une calamté plus terrble. La peste, venue d’Orent, entra en Allemagne par la Bohême. Elle voyageat sans se presser, au brut des cloches, comme une mpératrce. Penchée sur le verre du buveur, souant la chandelle du savant asss parm ses lvres, servant la messe du prêtre, cachée comme une puce dans la chemse des filles de joe, la peste apportat à la ve de tous un élément d’nsolente égalté, un âcre et dangereux erment d’aventure. Le glas répandat dans l’ar une nsstante rumeur de ête nore : les badauds rassemblés au ped des clochers ne se lassaent pas de regarder, tout en haut, la slhouette du sonneur tantôt accroup, tantôt suspendu, pesant de tout son pods sur son grand bourdon. Les églses ne chômaent pas, les tavernes non plus. Martn se barrcada dans son cabnet comme l l’eût at contre un voleur. A l’en crore, le melleur prophylactque consstat à bore modérément du johannsberg johannsber g de bonne date, à évter évte r les filles fille s e t les compagnons de chopes, à ne pas renfler l’odeur des rues, et surtout à ne pas s’normer du nombre des morts. Johanna contnuat d’aller au marché ou de descendre vder les ordures ; son vsage cousu de ccatrces, son jargon étranger avaent de tout temps ndsposé les vosnes ; par ces jours néastes, la méfiance se changeat en hane, et l’on parlat sur son passage de semeuses de peste et de sorcères. Qu’elle l’avouât ou non, la velle domestque se réjoussat en secret de l’arrvée du fléau de Deu ; cette terrble joe se lsat sur sa figure ; elle eut beau se charger auprès de Salomé, gravement attente, de corvées dangereuses que reusaent les autres servantes, sa maîtresse la repoussat en gegnant comme s la bonne au leu d’un cruchon eût porté une aulx et un sabler.
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Le trosème jour, Johanna ne reparut plus au Cancel Download And Print chevet de la malade à qu Bénédcte se chargea de are avaler des remèdes et de remettre entre les dogts le rosare qu’elle lassat sans cesse tomber. Bénédcte amat sa mère, ou plutôt ne savat pas qu’elle pût ne pas l’amer. Mas elle avat souert de sa pété nase et grossère, de ses caquets de chambre d’accouchée, de ses gaetés de nourrce qu se plaît à rappeler aux enants grands l’époque des bégaements, du pot et des langes. La honte de ces mpatences navouées ne fit qu’augmenter son zèle d’nfirmère. Martha portat les plateaux et les ples de lnge, mas s’arrangeat pour ne jamas entrer dans la chambre. On n’avat pas réuss à se procurer les servces se rvces d’un médecn. médecn. La nut qu suvt la mort de Salomé, Bénédcte couchée près de sa cousne sentt à son tour les premères approches approches du mal. Une so so ardente ardente la brûlat, qu’elle sut dstrare en magnant le cer bblque buvant à la source d’eau vve. Une pette toux convulsve lu raclat la gorge ; elle la retnt le plus possble pour lasser Martha dormr. Elle flottat déjà, les mans jontes, prête à échapper au lt à balustres, pour monter dans un grand Parads clar, où état Deu. Les cantques évangélques étaent oublés ; le vsage amcal des santes réapparassat entre les courtnes ; Mare du haut du cel tendat les bras sous des pls d’azur, mtée dans son geste par le bel Enant jouu aux dogts roses. En slence, Bénédcte déplorat ses autes : une dspute avec Johanna au sujet d’une bavolette déchrée, des sourres en réponse aux coups d’œl de garçons passant sous sa enêtre, une enve de mourr où l entrat de la paresse, de l’mpatence d’aller au cel, et du désr de n’avor plus à chosr entre Martha et les sens, sens, entre deux manères de parler à Deu. Martha
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poussa un cr enCancel apercevant le vsage ravagé de sa Download And Print cousne aux premères lueurs du matn. Bénédcte couchat nue, selon l’usage. Elle pra qu’on lu tînt prête sa chemse fine raîchement plssée, et fit de vans eorts pour se lsser les cheveux. Martha la servat, un mouchor sur le nez, consternée par l’horreur qu’elle éprouvat pour ce corps necté. Une sournose humdté remplssat la chambre ; la malade ayant rod, Martha alluma le poêle en dépt de la sason. D’une vox rauque, tout comme sa bonne mère l’avat at la velle, la pette réclama un chapelet que Martha lu tendt du bout des dogts. Soudan, remarquant avec une malce enantne les yeux terrfiés de sa compagne au-dessus du lnge mprégné de vnagre : — N’ae pas peur, peur, cousne, dt-elle gentment. Tu auras le gros galant qu danse le passe-ped. Elle se tourna du côté du mur comme à son habtude quand elle voulat dormr dor mr.. Le banquer se tenat co dans sa chambre : Phlbert état retourné en Flandre passer l’août avec son père ; Martha, abandonnée des servantes qu n’osaent monter à l’étage, leur cra d’appeler au mons Zébédée, qu avat retardé de quelques jours son départ pour sa vlle natale, afin de are ace à la presse des aares. Il consentt à s’aventurer sur le paler et montra une sollctude décente. Les médecns du leu étaent, ou sur les dents, ou rappés eux-mêmes, ou encore ermement décdés à ne pont contamner leurs malades habtuels en s’approchant du lt des pestérés, mas on avat entendu parler d’un homme de l’art qu justement venat d’arrver à Cologne pour étuder sur place les eets du mal. On erat ce qu’on pourrat pour le persuader de secourr Bénédcte. Ce secours ut long à venr. Entre-temps, l’enant s’enonçat. Martha appuyée au chambranle de la
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porte, la vellat à dstance. A pluseurs reprses pourCancel Download And Print tant, elle se rapprocha pour la are bore d’une man tremblante. La malade n’avalat plus qu’à grandpene ; le contenu du verre coulat sur le lt. De temps à autre, elle asat entendre sa toux sèche et courte, parelle au jappement d’un pett chen ; chaque os, Martha malgré so bassat les yeux, cherchant autour de ses jupes le barbet de la mason, se reusant à crore que ce cr de bête pût sortr de cette douce bouche. Elle fint par s’asseor sur le paler pour ne pas l’entendre. Pendant quelques heures, elle lutta contre la terreur de cette mort dont les apprêts se asaent sous ses regards, et davantage encore contre l’épouvante d’être nectée à son tour par la peste comme on l’est par le péché. Bénédcte n’état plus Bénédcte, mas une enneme, une bête, un objet dangereux qu’l allat se garder de toucher. Vers le sor, n’y tenant plus, elle descendt sur le seul guetter l’arrvée du médecn. Il demanda s c’état la mason Fugger et entra sans cérémone. C’état un homme magre et grand, aux yeux creux, qu portat la houppelande rouge des médecns ayant accepté de sogner les pestérés, et devant de ce at renoncer à vster les malades ordnares. Son tent basané lu donnat l’ar d’ur étranger. Il monta rapdement les marches ; Martha au contrare ralentssat malgré elle le pas. Debout dans la ruelle, l rejeta le drap, et découvrt le mnce corps secoué de spasmes sur le matelas sal. — Les servantes ser vantes m’ont toutes toute s quttée, dt Martha Mar tha s’eorçant d’explquer l’état du lnge. Il répondt d’un vague sgne de tête, occupé qu’l état à palper délcatement les ganglons de l’ane et ceux de l’asselle. La pette jasat ou chantonnat ablement entre deux toux rauques : Martha crut
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reconnaître un bout d’ar rvole mêlé à une comCancel Download And Print plante sur la vste du bon Jésus-Chrst. — Elle extravague, dt-elle comme avec avec dépt. — Eh, sans doute, fit-l dstratement. L’homme vêtu de rouge lassa retomber le drap et prt comme par acqut le pouls au pognet et au haut de la gorge. Il mesura ensute quelques gouttes d’un élxr et ntrodust dextrement une culler dans la commssure des lèvres. — Ne orcez orce z pas votre courage, admonesta-t-l, admones ta-t-l, s’apercevant que Martha ne soutenat qu’avec répugnance la nuque de la malade. Il n’est pas nécessare qu’en ce moment vous lu tenez la tête ou les mans. — Il essuya des lèvres lèvre s un peu de sane rougeâtre à l’ade d’un bout de charpe qu’l jeta dans le poêle. La culler et les gants dont l s’état serv prrent le même chemn. — Ne percer per cerez-vous ez-vous pont les enflures ? s’enqutelle, cragnant que le médecn pressé n’omît un son nécessare, et s’eorçant surtout de le retenr près du lt. — Non certes, cer tes, dt-l à m-vox. Les vases lymphatques sont à pene gonflés, et elle passera sans doute avant qu’ls s’engorgent. Non est medicamentum... La orce vtale de votre sœur est au plus bas. Nous pouvons tout au plus dmnuer ses maux. — Je ne sus pas la sœur, sœur, protesta prote sta soudan Martha, Mar tha, comme s cette mse au pont l’excusat de trembler surtout pour so-même. Je me nomme Martha Adransen et non Martha Fugger. Je sus la cousne. Il ne lu accorda qu’un coup d’œl, et s’absorba dans l’observaton des eets du remède. La malade mons agtée parassat sourre. Il compta pour la nut une seconde dose d’élxr. La présence de cet homme, qu pourtant ne promettat ren, transormat en une chambre ordnare ce qu avat été pour Martha depus l’aube un leu d’épouvantement. Une
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os sur l’escaler, l enleva le masque dont l Cancel Download And Print s’état serv au chevet de la pestérée, comme l état de règle. Martha le suvt jusqu’au bas des marches. Vous dtes vous nommer Martha Adransen, fit-l tout à coup. J’a connu dans mes jeunes ans un homme déjà sur l’âge qu portat ce nom. Sa emme s’appelat Hlzonde. Elle mt tous ses sons à engager le sor même — C’étaent C’é taent mes père et mère, mèr e, dt Martha Mar tha comme à contre-cœur. contre-cœur. — Vvent-ls Vvent-ls encore ? — Non, fit-elle en bassant la vox. Ils étaent ét aent à Münster quand l’évêque a prs la vlle. Il manœuvra la porte de la rue, aux serrures complquées comme celles d’un core-ort. Un peu d’ar pénétra dans le rche et oppressant vestbule. Le crépuscule au-dehors état pluveux et grs. — Remontez emonte z là-haut, dt-l enfin avec une sorte sor te de rode bonté. Votre tempérament paraît robuste, et la peste ne at plus guère de nouvelles vctmes. Je Je vous conselle de mettre met tre sous vos narnes un lnge trempé d’esprt-de-vn (j’a peu de confiance en vos vnagres) et de veller jusqu’au bout cette mourante. Vos crantes sont naturelles et rasonnables, mas la honte honte et e t le regret re gret sont auss des maux. Elle se détourna, les joues en eu, chercha dans la bourse qu’elle portat à sa centure, chost finalement une pèce d’or. Le geste de payer rétablssat les dstances, l’élevat ben au-dessus de ce vagabond qu allat de bourg en bourg, gagnant sa ptance au chevet des pestérés. Il mt la pèce sans la regarder dans la poche de sa houppelande et sortt. Restée seule, Martha alla chercher dans la cusne une fiole d’esprt-de-vn. La pèce état vde ; les servantes étaent sans doute à l’églse à marmotter des ltanes. Elle trouva sur une table une
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tranche de pâté Cancel qu’elle Download mangeaAndlentement, s’applPrint quant délbérément à se redonner des orces. Par précauton, elle s’oblgea auss à croquer un peu d’al. Quand elle eut prs sur so de remonter à l’étage, Bénédcte parassat somnoler, mas les grans de bus bougeaent de temps en temps sous ses dogts. Après la seconde dose d’élxr, elle alla meux. Un redoublement l’emporta à l’aube. Martha la vt enterrer le jour même avec Salomé dans le cloître des Ursulnes, et comme sceller sous un mensonge. Personne ne saurat jamas que Bénédcte avat all prendre la voe étrote où la poussat sa cousne, avancer avec elle vers la Cté de Deu. Martha se sentat dépoullée, trahe. Les cas de peste se asaent rares, mas en marchant le long des rues quas désertes, elle contnuat à serrer précautonneusement contre so les pls de son manteau. La mort de la pette n’avat at qu’augmenter son désr ureux de contnuer à vvre, de ne pont renoncer à ce qu’elle état et à ce qu’elle avat pour devenr un de ces paquets rods qu’on dépose sous une dalle d’églse. Bénédcte état morte assurée de son salut par des patenôtres et par des Ave ; Martha n’avat pas leu d’avor la même confiance pour son propre compte ; l lu semblat paros être de ceux que le décret dvn condamne avant leur nassance, et dont la vertu même est une orme d’opnâtreté qu ne plaît pas à Deu. De quelle vertu d’alleurs s’agssat-l ? En présence du fléau, elle avat été pusllanme ; l n’état pas certan qu’en présence de bourreaux elle se montrât plus fidèle à l’Eternel qu’en temps de peste à cette nnocente qu’elle avat cru s chèrement amer. Rason de plus pour retarder autant que possble le verdct dont on n’appelle pas.
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Elle mt tous ses sons à engager le sor même de Cancel Download And Print nouvelles servantes, les domestques en ute n’étant pas revenues, ou ayant été congédées à leur retour. On lava à grande eau ; on répandt sur le plancher des herbes aromatques mêlées d’agulles de pn. Ce ut durant ce nettoyage qu’on s’aperçut que Johanna état morte, néglgée de tous, dans son galetas de domestque ; Martha n’eut pas le temps de la pleurer. Le banquer reparut, convenablement agé par ces deuls, mas résolu à organser pasblement blement son exstence de veu veu dans une mason mason drgée par quelque bonne ménagère de son chox, pont bavarde, pont bruyante, pont trop jeune n trop dégoûtante non plus. Personne, pas même lu, ne s’état douté que son excellente épouse l’avat tyrannsé toute sa ve. Il serat désormas seul à décder de l’heure de son.lever, de celles de ses repas, et du jour où l prendrat médecne, et personne per sonne ne l’nterromprat plus s’l lu arrvat de raconter un peu longuement à une chambrère l’hstore de la fille et du rossgnol. rossgnol. Il avat hâte de se débarrasser de cette nèce dont la peste avat at sa seule hértère, mas qu’l n’avat nulle enve de vor en ace de lu présder à sa table. Il se procura une dspense en vue d’un marage entre cousns germans, et le nom de Martha remplaça sur le contrat celu de Bénédcte. Instrute des projets de son oncle, Martha descendt au comptor où s’aarat Zébédée. La ortune du Susse état ate ; la guerre avec la France ne pouvant tarder, le comms nstallé à Genève servrat désormas à Martn de prête-nom dans ses transactons avec ses royaux débteurs ranças. Zébédée avat réalsé durant la peste quelques bénéfices pour son propre compte qu lu servraent à reparaître au pays en bourgeos consdéré dont on a oublé les peccadlles de jeunesse. Martha le trouva occupé à s’entretenr avec un Ju, prêteur à la pette semane,
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qu rachetat dscrètement pour Martn Cancel Download And Print les créances et les bens meubles des trépassés, et sur lequel retomberat au beson tout l’opprobre l’opprobre de ce commerce lucrat. Il le congéda en apercevant l’hértère. — Prenez-mo pour emme, lu dt brusquement Martha. — Tout doux, fit le comms, cherchant cher chant un mensonge. — Il état ét at maré, ayant épousé dans sa jeunesse une fille de peu, boulangère aux Pâqus, ntmdé qu’l état par les pleurs de la belle et les crs de la amlle, à la sute de la seule ndscréton amoureuse de sa ve. Une convulson avat depus longtemps eu rason de leur unque enant ; l allouat une magre rente à sa emme, et s’arrangeat pour tenr à dstance cette ménagère aux yeux bordés de rouge. Mas le crme de bgame n’état pas de ceux qu’on commet d’un cœur léger. — S vous m’en croyez, croye z, fit-l, vous lasserez lasse rez en pax votre servteur et n’achèterez pas s cher deux sous de repentr… Vous plaît-l tant que cela de vor l’argent de Martn passer à des de s réectons réectons d’églse ? — Vvra-je jusqu’au bout au pays de Canaan ? répondt amèrement l’orphelne. — La emme orte, or te, entrée dans la demeure de l’Impe, peut y are régner la Justce, rétorqua le comms auss habtué qu’elle au style des Ecrtures. On voyat clarement qu’l ne se soucat pas de se brouller avec les pussants Fuggers. Martha bassat la tête ; la prudence du comms lu ournssat les bonnes rasons de se soumettre que sans le savor elle avat cherchées. Cette fille austère avat un vce de vellard : elle amat l’argent pour la sécurté qu’l apporte et la consdératon qu’l procure. Deu lu-même l’avat marquée du dogt pourvvre parm les pussants de ce monde ; elle n’gnorat pont
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qu’une dot comme la senne décuplerat son autorté Cancel Download And Print d’épouse, et l’unon de deux ortunes est un devor auquel un fille sensée ne se soustrat pas. Elle tenat pourtant à évter tout mensonge. A sa premère rencontre avec le Flamand, elle lu dt : — Vous gnorez gnore z peut-être peut-êtr e que j’a embrassé la sante o évangélque. Elle s’attendat sans doute à des reproches. Son pesant proms se contenta de répondre en hochant la tête : — Vous m’excuserez, m’excusere z, j’a ort or t à are. Les questons théologques sont très ardues. Et jamas plus l ne reparla de cet aveu. Il état dfcle de savor s’l état sngulèrement fin, ou seulement très lourd.
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LA CONVERSATION A INNSBRUCK
HENRI-MAXIMILIEN regardat pleuvor sur Innsbruck. L’Empereur s’y état nstallé pour surveller les débats du Concle de Trente, lequel, comme toutes les assemblées chargées de décder quelque chose, menaçat de se termner sans aboutr. On ne parlat à la cour que théologe et drot canon ; les chasses sur les pentes boueuses des montagnes tentaent peu un homme habtué habtué à courre le cer dans les grasses campagnes lombardes ; et le captane, regardant couler aux carreaux l’éternelle plue bête, se donnat le plasr, dans le secret de son cœur, de jurer à l’talenne. l’t alenne. Il bâllat vngt-quatre heures par jour. Le gloreux César Charles semblat au Flamand une sorte de ou trste, et la pompe espagnole lu asat l’eet d’une de ces armures encombrantes et poles sous lesquelles on sue les jours de parade, et auxquelles tout veux soldat préère une peau de bue. En s’engageant dans la carrère des armes, Henr-Maxmlen n’avat pas compté sur l’ennu des pérodes de morte-sason,
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et l attendat en grommelant que cette pax vermouCancel Download And Print lue ît place à la guerre. Par bonheur bonheur,, les repas re pas mpéraux comportaent orce poulardes, rôts de chevreuls et pâtés d’angulles ; l mangeat énormément, pour se dstrare. Un sor qu’asss dans une taverne l travallat à are entrer dans un sonnet les sens de satn blanc tout neu de Vanna Vanna Cam, sa bonne ame napoltane, l se crut heurté par le sabre d’un Hongros, à qu l chercha une querelle d’Allemand. Ces dsputes qu finssaent à l’épée asaent parte de son personnage ; elles lu étaent d’alleurs auss nécessares, par tempérament, qu’à un artsan ou à un rustre une rxe à coups de pongs ou à coups de savates. Mas cette os le duel commencé par des njures en latn macaronque tourna court ; le Hongros n’état qu’un pleutre qu prt reuge derrère la plantureuse hôtesse ; tout fint dans un brut de pleurs de emme et de vasselle cassée, et le captane dégoûté se rasst pour essayer de se remettre à lmer ses quatrans et ses tercets. te rcets. Mas sa ureur rmante état passée. Une estafilade à la joue lu asat mal, ben qu’l n’en voulût pas convenr ; et le mouchor vte roug qu’l s’état noué autour de la tête en guse de bandage lu donnat l’ar rdcule d’un homme attent d’une fluxon. Attablé devant un ragoût au povre, le cœur lu manqua pour manger. ma nger. — Vous Vous devrez vor un chrurgen, chrur gen, dt le taver taverner. ner. Henr-Maxmlen répondt que tous les chrurgens mérteraent de porter un bât. — J’en connas un d’hable, dt l’aubergste. l’auber gste. Mas l est bzarre et ne veut sogner personne. — C’est C’es t ben ma chance, dt le captane. Il pleuvat toujours. Le taverner debout sur le seul regardat cracher les gouttères. Tout à coup :
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La conversation à Innsbruck
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— Quand onCancel parle duDownload loup, loup, dt-l. And Print Un homme rleusement vêtu d’une houppelande, un peu courbé sous son capuchon brun, se hâtat le long du russeau. Henr-Maxmlen s’écra : — Zénon ! L’homme se retourna-. Ils se dévsagèrent pardessus la devanture où s’entassaent les pâtsseres et les poulets troussés. Henr-Maxmlen crut lre sur les trats de Zénon une nquétude qu ressemblat à de la peur. En reconnassant le captane, l’alchmste se calma. Il mt un ped dans la salle basse : — Vous Vous êtes ête s blessé ? dt-l. — Comme vous voyez, fit l’autre. Pusque vous n’êtes pas encore au cel des alchmstes, ates-mo l’aumône d’un peu de charpe et d’une goutte d’eau vulnérare, à déaut d’eau de Jouvence. Sa plasantere état amère. Il lu état sngulèrement pénble de constater comben Zénon avat vell. — Je Je ne sogne plus personne, per sonne, dt le médecn. Mas sa méfiance s’état dsspée. Il entra dans la salle, retenant du pong derrère lu le battant qu claquat au vent. — Pardonnez-mo, Pardonnez-mo, rère Henr, dt-l. J’ame à revor votre bonne figure. Mas je sus oblgé de me garder garder des mportuns. mportuns. — Qu n’a pas les sens ? dt le captane, qu pensat pensat à ses se s créancers. — Venez chez mo, fit après une héstaton hésta ton l’alchmste. Nous y serons plus à l’ase que dans cette taverne. Ils sortrent ensemble. La plue tombat par raales. C’état un de ces temps où l’ar et l’eau mutnés semblent are du monde un grand chaos trste. Le captane trouvat à l’alchmste l’ar souceux et atgué. Zénon poussa de l’épaule la porte d’une bâtsse à tot bas.
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LA VIE ERRANTE
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— Votre aubergste auber gste m’a loué ort or t cher cette ce tte orge Cancel Download And Print abandonnée où je vs à peu près à l’abr des cureux, dt-l. C’est lu qu at de l’or. La pèce état vaguement éclarée par le rougeoement d’un eu économe, sur lequel une préparaton quelconque cusat dans un pot de terre réractare. L’enclume et les tenalles du maréchal-errant qu avat précédemment occupé cette masure donnaent un ar de chambre de torture à ce sombre ntéreur. Une échelle montat à l’étage où sans doute Zénon couchat. Un jeune valet à cheveux roux, au nez court, asat semblant de s’aarer dans un con. Zénon lu donna congé pour la journée après lu avor recommandé d’apporter d’abord à bore. Il se mt ensute à chercher des lnges. Quand HenrMaxmlen ut pansé, l’alchmste lu dt : — Que ates-vous dans cette ce tte vlle ? — J’y as l’espon, répondt tout unment le captane. Le seur d’Estrosse m’a chargé c d’une msson secrète au sujet des aares de la Toscane ; le at est qu’l gugne Senne, ne se console pas d’être exlé de Florence et espère y regagner un jour le terran perdu. Je sus supposé essayer de dvers bans, ventouses et snapsmes d’Allemagne, et je as c ma cour au Nonce qu ame trop les Farnèse pour amer les Médcs, et qu à son tour at sans convcton sa cour à César. Autant jouer à cela qu’au tarot de Bohême. — Je connas le Nonce, dt Zénon ; je sus un peu son médecn, un peu son soueur ; l ne tendrat qu’à mo de ondre son argent à mon pett eu de brases. Avez-vous remarqué que ces hommes à tête caprne tennent du bouc et de l’antque Chmère ? Monsegneur abrque de petts vers badns et choe exagérément ses pages. S j’en avas le talent, j’auras ort à gagner à me are son entremetteur.
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La conversation à Innsbruck
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— Que as-jeCancelc, snon m’entremettre m’entreme ttre ? dt le Download And Print captane. Et c’est ce qu’ls ont tous : qu procure des emmes, ou autre chose, qu la Justce et qu Deu. Le plus honnête est encore celu qu vend de la char et non des umées. Mas je ne prends pas assez au séreux les objets de mon pett négoce, ces vlles déjà vendues dx os, ces loyautés vérolées, ces occasons pourres. Là où un amateur d’ntrgues remplrat ses poches, je ramasse tout au plus mes ras de chevaux de poste et d’auberge. Nous mourrons pauvres. — Amen, dt Zénon. Asseyez-vous. Henr-Maxmlen resta debout près du eu ; une buée montat de ses vêtements. Zénon asss sur l’enclume, lassant pendre ses mans entre ses genoux, regardat les brases enflammées. enflammées. — Toujours le compagnon du eu, Zénon, lu dt Henr-Maxmlen. Le jeune valet roux apporta du vn et ressortt en sant. Le captane reprt, se versant à bore : — Vous souvenez-vous des appréhensons du chanone de Sant-Donaten ? Vos Prognostications des choses utures auront confirmé ses crantes les plus nores ; votre opuscule sur la nature du sang, que je n’a pont lu, a dû lu paraître plus dgne d’un barber que d’un phlosophe ; et votre Traité du monde physique l’aura at pleurer. Il vous exorcserat, s le malheur vous ramenat à Bruges. — Il erat er at ps, dt Zénon avec une grmace. J’a J ’avas vas pourtant prs son d’envelopper ma pensée de toutes les crconlocutons qu convennent. J’avas ms c une majuscule, là un Nom ; j’avas même consent à encombrer ma phrase d’un pesant attral d’Attrbuts et de Substances. Il en est de ce verbage comme de nos chemses et de nos chausses ; elles protègent celu qu les porte, et n’empêchent pas dessous d’être tranqullement nu.
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— Elles Elle s empêchent, dt le soldat de ortune. or tune. Je n’a n’a Cancel Download And Print jamas regardé re gardé un Apollon dans les jardns du Pape sans l’enver de s’orr aux yeux tel que sa mère Latone le fit. On n’est ben que lbre, et cacher ses opnons est encore plus gênant que de couvrr sa peau. — Ruses de guerre, guer re, captane ! dt Zénon. Nous vvons là-dedans comme vous autres dans vos sapes et dans vos tranchées. On fint par trer vanté d’un sous-entendu qu change tout, comme un sgne négat dscrètement dscrètement placé devant devant une somme somme ; on s’ngéne à are çà et là d’un mot plus hard l’équvalent d’un cln d’œl, du soulèvement de la eulle de vgne, ou de la chute du masque ausstôt renoué comme s de ren n’état. Un tr s’opère de la sorte parm nos lecteurs ; les sots nous croent ; d’autres sots, nous croyant plus sots qu’eux, nous quttent ; ceux qu restent se débroullent dans ce labyrnthe, apprennent à sauter ou à contourner l’obstacle du mensonge. Je seras ben surprs s on ne retrouvat pas jusque dans les textes les plus sants les mêmes subteruges. Lu ans, tout lvre devent un grmore. — Vous vous exagérez exagé rez l’hypocrse des hommes, dt le captane en haussant les épaules. La plupart pensent trop peu pour penser double. Il ajouta médtatvement, remplssant son verre : — S é trange que cela sot, le Vctoreux César Charles crot en ce moment qu’l veut la pax, et Sa Majesté Très Chrétenne auss. — Qu’est Qu’es t l’erreur l’er reur,, e t son succédané le mensonge, poursuvt Zénon, snon une sorte de Caput Mortiium, une matère nerte sans laquelle la vérté trop volatle ne pourrat se trturer dans les morters humans ?… Ces plats rasonneurs portent aux nues leurs semblables et crent haro sur leurs contrares ; mas que nos pensées soent vértablement d’espèce dérente, elles leur échappent ; ls ne les voent plus,
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tout comme uneCancel bête hargneuse cesse bentôt de vor Download And Print sur le plancher de sa cage un objet nsolte qu’elle ne peut n déchrer n manger. On pourrat de la sorte se rendre nvsble. — Aegri somnia, fit le captane. Je ne vous comprends plus. — Sus-je Servet, Ser vet, cet ce t âne, reprt sauvagement Zénon, pour rsquer de me are brûler à pett eu sur une place publque en l’honneur de je ne sas quelle nterprétaton d’un dogme, quand j’a en tran mes travaux sur les mouvements dastolques et systolques du cœur, qu m’mportent beaucoup plus ? S je ds que tros ont un ou que le monde ut sauvé en Palestne, ne pus-je nscrre en ces paroles un sens secret au-dedans du sens extéreur, et m’enlever ans jusqu’à la gêne d’avor ment ? Des cardnaux (j’en connas) s’en trent de la sorte, et c’est ce qu’ont at des docteurs qu passent mantenant pour porter un halo au cel. Je trace comme un autre les quatre lettres du Nom auguste, mas qu’y mettras-je ? Tout, ou son Ordonnateur ? Ce qu Est, ou ce qu n’est pas, ou ce qu Est en n’étant pas, comme le vde et le nor de la nut ? Entre le Ou et le Non, entre le Pour et le Contre, l y a ans d’mmenses espaces souterrans où le plus menacé des hommes pourrat vvre en pax. — Vos censeurs ne sont pas s bêtes, bê tes, dt HenrMaxmlen. Ces Messeurs à Bâle et le Sant-Ofce à Rome vous entendent assez pour vous condamner. A leurs yeux, vous n’êtes qu’un athée. — Ce qu n’est ’es t pas comme eux leur paraît contre eux, dt amèrement Zénon. Et, remplssant un gobelet, l but à son tour avdement l’agre vn d’Allemagne. — Deu merc merc ! dt le captane, les cagots de toute espèce n’ront pas ourrer le nez dans mes petts vers d’amour. Je ne me sus jamas exposé qu’à des dangers smples : les coups à la guerre, guerre, les le s fièvres
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en Itale, la vérole chez les filles, les poux à Cancel Download And Print l’auberge, et partout les crédteurs. Je ne me commets pas plus avec la racalle à bonnets ou à barrettes, à tonsure ou sans tonsure, que je ne chasse le porc-épc. Je n’a même pas réuté ce coullon de Robortello d’Udne, qu crot trouver des erreurs dans ma verson d’Anacréon, et qu n’est qu’un balourd en grec et dans toutes les langues. J’ame la scence comme un autre, mas peu me chaut que le sang descende ou remonte la vene cave ; l me suft de savor qu’l rerodt quand on meurt. Et s la terre tourne… — Elle tourne, dt Zénon. — Et s la terre ter re tourne, je ne m’en souce guère en ce moment où je marche dessus, et m’en soucera mons encore quand j’y sera couché. En matère de o, je crora ce que décdera le Concle, s’l décde quelque chose, comme je mangera ce sor ce que rcasse le taverner. Je prends mon Deu et mon temps comme ls vennent, ben que j’eusse meux amé vvre au sècle où l’on adorat Vénus. Je Je ne voudras même pas me prver à mon lt de mort de me tourner s le cœur m’en dt vers NotreSegneur Jésus-Chrst. — Vous ê tes comme un homme qu consent volonters à crore qu’l y a dans le rédut vosn une table et deux bancs, parce que peu lu mporte. — Frère Zénon, dt le captane, je vous retrouve re trouve magre, harassé, hagard, et vêtu d’une souquenlle dont mon valet ne voudrat pas. Vaut-l la pene de s’évertuer durant vngt ans pour arrver au doute, qu pousse de lu-même dans toutes les têtes ben ates ? — Sans conteste, conte ste, répondt Zénon. Vos doutes e t votre o sont des bulles d’ar à la surace, mas la vérté qu se dépose en nous comme le sel dans la cornue au cours d’une dstllaton hasardeuse est en
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deçà de l’explcaton et de la orme, trop chaude ou Cancel Download And Print trop rode pour la bouche humane, trop subtle pour la lettre écrte, et plus préceuse qu’elle. — Plus préceuse que l’Auguste l’Auguste Syllabe ? — Ou, fit Zénon. Il bassat la vox malgré lu. A ce moment, un mone mendant rappa à la porte et s’en alla mun de quelques sous dus à la générosté du captane. Henr-Maxmlen vnt se rasseor auprès du eu ; lu auss parlat à vox basse. — Racontez-mo Raconte z-mo plutôt vos voyages, soua-t-l. — Pourquo ? dt le phlosophe. Je ne vous parlera pas des mystères de l’Orent ; ls n’exstent pont, et vous n’êtes pas de ces badauds qu’amuse la penture du Séral du Grand Segneur. Je connus vte que ces dérences de clmat dont on at tant de cas sont peu de chose au prx du at que l’homme a partout deux peds et deux mans, un membre vrl, un ventre, une bouche et deux yeux. On me prête des voyages que je n’a pont ats ; je m’en sus prêté à mo-même par subteruge, et pour être tranqullement alleurs que l’on me crot. On me supposat déjà en Tartare que j’expérmentas en pax à Pont-Sant-Esprt en Languedoc. Mas remontons plus haut : peu après mon arrvée à Léon, mon preur ut chassé de son abbaye par ses mones, qu l’accusaent de judaïser. Et l est vra que sa velle tête état plene d’étranges ormules trées du Zohar concernant les correspondances entre les métaux, les hérarches célestes et les astres. J’avas apprs à Louvan à méprser l’allégore, saoul que j’étas j’é tas des exercces exercce s par lesquels on symbolse les ats, qutte à bâtr ensute sur ces symboles comme s’ls étaent des ats. Mas personne de s ou qu’l n’at des partes de sage. A orce de are mtonner ses cornues, mon preur avat découvert quelques secrets pratques, dont j’a hérté. L’École à Montpeller
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ne m’apprt ensute presque ren : Galen avat Cancel Download And Print pour ces gens-là passé au rang d’dole à qu l’on sacrfie la nature ; quand j’attaqua certanes notons galénques dont le barber Jean Myers savat déjà qu’elles se ondaent sur l’anatome du snge, et non sur celle de l’homme, mes doctes préérèrent crore que l’épne dorsale avat changé depus le temps du Chrst plutôt que de taxer leur oracle de légèreté ou d’erreur. Il y avat pourtant là quelques cerveaux ntrépdes… Nous étons à court de cadavres, les préjugés publcs étant ce qu’ls sont. Un certan Rondelet, un pett médecn courtaud auss comque que son nom, perdt son fils attaqué la velle par une fièvre pourpre, un écoler de vngt-deux ans avec qu j’herborsas au Grau-du-Ro. Grau-du-Ro. Dans la chambre mprégnée de vnagre où nous dsséquons ce mort qu n’état plus le fils ou l’am, mas seulement un bel exemplare de la machne humane, j’eus pour la premère os le sentment que la mécanque d’une part et e t le Grand Art Ar t de l’autre ne ont qu’applq qu’applquer uer à l’étude de l’unvers les vértés que nous ensegnent nos corps, en qu se répète la structure du Tout. Ce n’état pas trop de toute une ve pour conronter l’un par l’autre ce monde où nous sommes et ce monde qu est nous. Les poumons étaent l’évental qu ranme la brase, la verge une arme de jet, le sang dans les méandres du corps état l’eau des rgoles dans un jardn d’Orent, le cœur, selon qu’on adopte une théore plutôt qu’une autre, état la pompe ou le braser, le cerveau l’alambc où se dstlle une âme… — Nous retombons re tombons dans l’allégore, l’allé gore, dt le captane. S vous entendez par là que le corps est la plus solde des réaltés, dtes-le. — Pas tout à at, dt Zénon. Ce corps, notre royaume, me paraît paros at d’un tssu auss
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lâche et auss ugt qu’une qu’un e ombre. Je J e ne m’étonCancel Download And Print neras guère plus de revor ma mère, qu est morte, que de retrouver au détour d’une rue votre vsage vell dont la bouche sat encore mon nom, mas dont la substance s’est reate plus d’une os au cours de vngt années, et dont le temps a altéré la couleur et retouché la orme. Que de roment a poussé, que de bêtes ont vécu et sont mortes pour sustenter cet Henr qu est et n’est pas celu que j’a connu à vngt ans. Mas revenons aux voyages… Pont-Sant-Esprt où les gens épaent derrère leurs volets les ats et gestes du nouveau médecn n’état pas toujours un lt de roses, et l’Emnence sur laquelle je comptas qutta Avgnon pour Rome… Ma chance prt la orme d’un renégat qu assurat en Alger la remonte des écures du ro de France : cet honnête orban se cassa la jambe à deux pas de ma porte, et m’ort en échange de mes sons passage sur sa tartane. Je lu en sas encore gré. Mes travaux balstques me valurent en Barbare l’amté de Sa Hautesse, et auss l’occason d’étuder les proprétés du naphte et sa combnason avec la chaux vve, en vue de la constructon de usées éjectables par les navres de sa flotte. Ubicumque idem : les prnces veulent des engns pour augmenter ou sauvegarder leur pussance, les rches de l’or, et dérayent pour un temps le coût de nos ourneaux ; les lâches et les ambteux veulent savor l’avenr. Je me sus arrangé comme j’a pu de tout cela. La melleure aubane état encore un doge cacochyme ou un sultan malade : l’argent auat ; une mason sortat de terre à Gênes près de Sant-Laurent ou à Péra dans le quarter chréten. Les outls de mon art m’étaent ourns, et parm eux le plus rare et le plus préceux de tous, la lcence de penser et d’agr à ma guse. Pus venaent les menées des enveux, les susurrements de nas m’accusant de
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blasphémer leur Alcoran ou leur Évangle, pus Cancel Download And Print quelque complot de cour où je rsquas d’être mplqué, et enfin le jour où meux vaut dépenser son derner sequn à acheter un cheval ou à louer une barque. J’a passé vngt ans dans ces pettes pérpétes qu dans les lvres s’appellent des aventures. J’a tué certans cer tans de mes malades malade s par un excès d’audace qu en a guér d’autres. Mas leur rechute ou leur meux m’mportaent surtout en tant que confirmaton d’un pronostc ou preuve de la bonté d’une méthode. Scence et contemplaton ne sont pont assez, rère Henr, s elles ne se transmutent en pussance : le peuple a rason de vor en nous les adeptes d’une mage blanche ou nore. Fare durer ce qu passe, avancer ou reculer l’heure prescrte, s’emparer des secrets de la mort pour lutter contre elle, se servr de recettes naturelles pour ader ou pour déjouer la nature, domner le monde et l’homme, les reare, peut-être les créer… — Il y a des jours, en relsant mon Plutarque, où je me sus dt qu’l état trop tard, et que l’homme et le monde ont été, dt le captane. — Mrages, Mrage s, fit Zénon. Il en est es t de vos âges âge s d’or comme de Damas et de Constantnople qu sont belles à dstance ; l aut marcher dans leurs rues pour vor leurs lépreux et leurs chens crevés. Votre Plutarque m’apprend qu’Hépheston s’entêtat à manger les jours de dète comme le premer égrotant venu, et qu’Alexandre buvat comme un soudard d’Allemagne. Peu de bpèdes depus Adam ont mérté le nom d’homme. — Vous Vous êtes êtes médecn, dt le captane. — Ou, dt Zénon. Entre autres autre s choses. — Vous ê tes médecn, reprt le Flamand têtu. tê tu. Je m’magne qu’on se lasse de recoudre les hommes comme on se lasse d’en découdre. N’êtes-vous pas
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atgué de vousCancel relever Download la nutAndpour sogner cette Print pauvre engeance ? — Sutor, ne ultra... repartt Zénon. Je tâtas des pouls, j’examnas des langues, j’étudas des urnes et non pas des âmes… Ce n’est pas à mo de décder s cet avare attent de la colque mérte de durer dx ans de plus, et s’l est bon que ce tyran meure. Le pre ou le plus sot de nos patents nous nstrusent encore, et leurs sanes ne sont pas plus nectes que celles d’un hable homme ou d’un juste. Chaque nut passée au chevet d’un qudam malade me replaçat en ace de questons lassées sans réponse : la douleur et ses fins, la béngnté de la nature ou son ndérence, et s l’âme survt au naurage du corps. Les explcatons analogques qu m’avaent jads paru élucder les secrets de l’unvers me semblaent pulluler à leur tour de nouvelles possbltés d’erreur en ce qu’elles tendent à prêter à cette obscure Nature ce plan préétabl que d’autres prêtent à Deu. Je ne ds pas que je doutas : douter est dérent ; je poursuvas l’nvestgaton jusqu’au pont où chaque noton ployat dans mes mans comme un ressort qu’on ausse ; dès que je grmpas à l’échelle d’une hypothèse, je sentas se casser sous mon pods l’ndspensable SI… Paracelse et son système des sgnatures m’avaent paru ouvrr à notre art une voe tromphale ; ls ramenaent en pratque à des supersttons de vllage. L’étude des horoscopes ne me semblat plus auss profitable qu’autreos pour le chox des remèdes et la prédcton des accdents mortels ; je veux ben que nous soyons de la même matère que les astres ; l ne s’ensut pas qu’ls nous détermnent ou pussent nous nclner. Plus j’y pensas, plus nos dées, nos doles, nos coutumes dtes santes, et celles de nos vsons qu passent pour neables me parassaent engendrées sans plus par les agtatons de la machne humane,
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tout comme le vent des narnes ou des partes basses, Cancel Download And Print la sueur et l’eau salée des larmes, le sang blanc de l’amour, les boues et les excréments du corps. Je m’rrtas que l’homme gaspllât ans sa substance propre à des constructons presque toujours néastes, parlât de chasteté avant d’avor démonté la machne du sexe, dsputât de lbre arbtre au leu de peser les mlle obscures rasons qu vous ont cller s j’approche brusquement un bâton de vos yeux, ou d’ener avant d’avor questonné de plus près la mort. Je Je connas la mort, mor t, dt en bâllant le captane. Entre le coup d’arquebuse qu me jeta bas à Cérsoles et la rasade d’eau-de-ve qu me ressuscta, l y a un trou nor. Sans la gourde du sergent, je seras encore dans ce trou-là. — Je vous l’accorde, dt l’alchmste, l’alchms te, ben qu’l y at ort à dre en aveur de la noton d’mmortalté, comme auss contre elle. Ce qu est retré aux morts, c’est d’abord le mouvement, pus la chaleur, ensute, plus ou mons promptement, selon les agents auxquels ls sont soums, la orme : seraent-ce le mouvement et la orme de l’âme, eux auss, mas non sa substance, qu s’abolssent dans la mort ?… J’étas J’étas à Bâle, à l’époque de la peste pe ste nore… Henr-Maxmlen l’nterrompt pour dre qu’l vvat alors à Rome, et que la peste l’avat sas dans la mason d’une courtsane. — J’étas J’é tas à Bâle, reprt Zénon. Vous saurez que j’avas j’avas manqué de peu à Péra Monsegneur Laurent de Médcs l’Assassn, celu que le peuple appelle par dérson Lorenzace. Ce prnce démun s’entremettat comme vous, rère Henr, l s’état at charger par la France d’une msson secrète pour la Porte ottomane. J’auras voulu connaître cet homme au grand cœur. Quatre ans plus tard, passant par Lyon où j’étas allé remettre mon Traité du monde physique
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au malheureux Dolet, mon lbrare, je le rencontra Cancel Download And Print mélancolquement attablé dans une arrère-salle d’auberge. Le hasard fit qu’l ut attaqué ces jours-là par un scare florentn ; je le sogna de mon meux ; nous pûmes à losr dscuter des oles du Turc et des nôtres. Cet homme harcelé se proposat de rentrer malgré tout dans son Itale natale. Avant de nous séparer, l me fit don d’un page caucasen qu’l tenat de Sa Hautesse elle-même, en échange d’un poson sur lequel l comptat pour mourr, s’l tombat entre les mans de ses ennems, sans déroger au style qu avat été celu de sa ve. Il n’eut pas l’occason d’essayer de ma dragée, s’étant at dépêcher à Vense dans une ruelle obscure par le même spadassn qu l’avat manqué en France. Mas son servteur me resta… Vous autres poètes avez at de l’amour une mmense mposture : ce qu nous échot semble toujours mons beau que ces rmes accolées comme deux bouches l’une sur l’autre. Et pourtant, quel autre nom donner à cette flamme ressusctant comme le Phénx de sa propre brûlure, à ce beson de retrouver le sor le vsage et le corps qu’on a quttés le matn ? Car certans corps, rère Henr, sont raraîchssants comme l’eau, et l serat bon de se demander pourquo les plus ardents sont ceux qu raraîchssent le plus. Donc, Aleï venat d’Orent, comme mes onguents et mes électuares ; jamas, sur les routes boueuses et dans les gîtes enumés de l’Allemagne, l ne me fit l’n jure de paraître regre re gretter tter les jardns du Grand Segneur et ses ontanes coulant au solel… J’amas surtout le slence auquel nous rédusat la dfculté des langues. Je sas l’arabe des lvres, mas du turc seulement ce qu’l aut pour demander son chemn ; Aleï parlat turc et quelque peu talen ; de son dome natal, quelques mots seulement lu revenaent en songe… Après tant de rbauds brallards et mpu-
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dents engagés par malchance, j’avas enfin ce ollet Cancel Download And Print ou cet ondn que le populare nous octroe pour ades… Or, un lad sor, à Bâle, l’année de la peste nore, je trouva dans ma chambre mon servteur ser vteur attent du fléau. Prsez-vous la beauté, rère Henr ? — Ou, dt le Flamand. Fémnne. Anacréon est es t bon poète et Socrate ort grand homme, mas je ne comprends pont qu’on renonce à ces orbes de char tendre et rose, à ces grands corps s plasamment dérents du nôtre où l’on entre comme des conquérants pénétrant dans une vlle en joe fleure et pavosée pour eux. Et s cette joe ment et ce pavos nous trompe, qu’mporte ? Ces pommades, ces rsures, ces parums dont l’emplo déshonore un homme, j’en jous par le truchement des emmes. Pourquo ras-je chercher des venelles dérobées, quand j’a devant mo une route au solel où je pus me pousser avec honneur ? F de ces joues qu cessent vte d’être lsses, et s’orent à l’amant ben mons qu’au barber ! — Mo, dt Zénon, je goûte par-dessus tout ce plasr un peu plus secret qu’un autre, ce corps semblable au men qu reflète mon délce, cette agréable absence de tout ce qu’ajoutent à la joussance les pettes mnes des courtsanes et le jargon des pétrarqustes, les chemses brodées de la Sgnora Lva et les gumpes de Madame Laure, cette accontance qu ne se justfie pont hypocrtement par la perpétuaton de la socété humane, mas qu naît d’un désr et passe avec lu, et à quo, s’l s’y mêle quelque amour, ce n’est pont parce que m’y ont dsposé à l’avance les rtournelles en vogue… J’habtas ce prntemps-là une chambre d’auberge au bord du Rhn, plene du tumulte des eaux en crue ; l allat crer pour s’y are entendre ; on n’y percevat qu’à pene le son d’une longue vole dont
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j’ordonnas à mon servteur ser vteur de jouer quand j’étas j’é tas Cancel Download And Print las, car la musque m’a toujours paru à la os un spécfique et une ête. Mas Aleï ne m’attendat pas ce sor-là, une lanterne à la man, près de l’écure où je logeas ma mule. Frère Henr, vous avez, je suppose, déploré le sort sor t de statues sta tues blessées blessée s par la poche et rongées par la terre ; vous avez prs à parte le Temps qu malmène la beauté. Et pourtant, je pus m’magner m’magne r que le marbre, atgué d’avor d’avor gardé s longtemps l’apparence humane, se réjousse de redevenr smplement perre… La créature au contrare redoute le retour à la substance normeDès le seul, une étdté m’avertt, et ces eorts de la bouche asprant et revomssant l’eau que le goser n’avale plus, et ce sang qu’éjaculent les poumons malades. Mas ce qu’on nomme âme subsstat, et les yeux de chen confiant qu ne doute pont que son maître lu pusse venr en ade… Ce n’état certes pas la premère os que mes juleps s’avéraent nutles, mas chaque mort n’avat guère été jusque-là qu’un pon perdu dans ma parte de médecn. Ben plus, à orce de combattre Sa Majesté nore, l se orme d’elle à nous une sorte d’obscure complcté ; un captane fint ans par connaître et par admrer la tactque de l’ennem. Il vent toujours un moment où nos malades s’aperçovent que nous La connassons trop ben pour ne pas nous résgner pour eux à l’névtable ; tands qu’ls supplent et se débattent encore, ls lsent dans nos yeux un verdct qu’ls n’y veulent pas vor. Il aut chérr quelqu’un pour s’apercevor qu’l est scandaleux que la créature meure… Mon courage me allt, ou du mons cette mpassblté qu nous est s nécessare. Mon méter me parut van, ce qu est presque auss absurde que de le crore sublme. Non que je soursse : je savas au contrare que j’étas ort ncapable de me représenter la douleur de ce corps qu se tordat
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LA VIE ERRANTE
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sous mes yeux ; mon domestque mourat comme au Cancel Download And Print ond d’un autre règne. J’appela, mas l’aubergste se garda de venr à mon ade. Je souleva le cadavre pour le déposer sur le plancher en attendant l’arrvée des ossoyeurs qu’au pett jour j’ras chercher ; je brûla pognée par pognée le matelas de palle dans le poêle de la chambre. Le monde du dedans et le monde du dehors, le macrocosme et le mcrocosme étaent encore les mêmes qu’au temps des dssectons de Montpeller, mas ces grandes roues s’emboîtant les unes dans les autres tournaent en plen vde ; ces mécanques ragles ne m’émervellaent plus… J’a honte d’avouer d’avouer que la mort mor t d’un valet suft à produre en mo une révoluton s nore, mas on se atgue, rère Henr, et je ne sus plus jeune : j’a plus de quarante ans. J’étas las de mon méter de rapetasseur de corps ; un dégoût me prt à l’dée de retourner au matn tâter le pouls de M. l’Echevn, rassurer Mme la Ballve, et regarder à contre-jour l’urnal de M. le Pasteur. Je me proms cette nut-là de ne plus sogner personne. L’hôte de L’Agneau d’Or m’a ms au at de cette antase, fit gravement le captane. Mas vous tratez la goutte du Nonce, et voc sur ma joue votre charpe et votre emplâtre. emplâtre. — Sx mos ont passé, repartt repar tt Zénon qu traçat du bout du tson des figures dans la cendre. La curosté renaît, et l’enve d’user du talent qu’on possède, et celle de secourr, s’l se peut, les compagnons engagés avec nous dans cette étrange aventure. La vson de la nut nore est derrère mo. A orce de ne parler à personne pe rsonne de ces choses, on les ouble. ouble. Henr-Maxmlen, se levant, s’approcha de la enêtre et e t fit remarquer remarquer : — Il pleut toujours. Il pleuvat toujours. Le captane tambournat sur la vtre. Tout à coup, redescendant vers son hôte :
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La conversation à Innsbruck
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— Savez-vous Savez-vousCancel que Sgsmond Fugger, mon parent Download And Print de Cologne, a été mortellement blessé dans une batalle au pays des Incas ? Cet homme, dt-on, avat cent captves, cent corps de cuvre rouge avec dverses ncrustatons de coral et des cheveux hulés qu sentaent les épces. Quand l vt qu’l allat mourr, Sgsmond fit couper les cent chevelures des prsonnères ; l ordonna qu’on les étalât sur un lt, et voulut qu’on le couchât pour rendre l’âme sur cette toson qu sentat la cannelle, la sueur et la emme. — J’a pene à crore que ces tresses tresse s s belles étaent nettes de vermne, dt agrement le phlosophe. Et, prévenant un mouvement rrté du captane : — Je sas ce que vous pensez. Ou, j’a paros époullé tendrement des boucles nores. Le Flamand contnuat à marcher au hasard, mons, semblat-l, pour se dégourdr les jambes que pour secouer ses pensées. — Votre humeur se gagne, fit-l en revenant enfin s’nstaller dans l’âtre, votre réct de tout à l’heure me dspose à remâcher ma ve. Je ne me plans pont ; mas tout dère de ce que j’avas cru. Je sas que je n’a pas l’étoe l’é toe d’un grand captane, mas j’a vu de près ceux qu passent pour l’être : ls m’ont ben surprs. J’a coulé par goût un bon ters de mes jours dans la Pénnsule ; l y at plus beau qu’en Flandre, mas on y mange plus mal. Mes poèmes ne mértent pas de survvre au paper sur lequel mon lbrare les mprme à mes ras, quand par hasard j’a les moyens de m’orr comme un autre un rontspce et un aux ttre. Les laurers d’Hppocrène ne sont pas pour mo ; je ne traversera pas les sècles relé en veau. Mas quand je vos comben peu de gens lsent L’Iliade d’Homère, je prends plus gaement gaement mon part d’être peu lu. Des Dames m’ont
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amé ; mas c’état rarement celles pour l’amour Cancel Download And Print desquelles j’eusse donné ma ve… (Mas je me regarde : quelle arrogance de crore que les belles pour qu je soupre aent enve de ma peau…) La Vanna à Naples, dont je sus quasment l’époux, est une ort bonne fille, mas son odeur n’est pas celle de l’ambre, et ses torsades de cheveux roux ne sont pas toutes à elle. Je sus retourné passer quelque temps au pays natal : ma mère est morte, Deu la garde ! la bonne emme vous voulat du ben. Mon père est en Ener, je suppose, avec ses sacs d’or. Mon rère m’a ben reçu, mas j’a comprs au bout de hut jours qu’l état temps que je repartsse. Il m’arrve de regretter de n’avor pas engendré d’enants légtmes, mas je ne voudras pas de mes neveux pour fils. J’a de l’ambton tout comme un autre, mas qu’un pussant du jour nous reuse un brevet ou une penson, et quelle joe de qutter l’antchambre sans avor à remercer Monsegneur, et de marcher à son gré dans les rues les mans dans ses poches vdes… J’a beaucoup jou : je remerce l’Eternel que chaque année amène son contngent de filles nubles et qu’on asse le vn chaque automne ; je me ds paros que j’aura eu la bonne ve d’un chen au solel, avec pas mal de rxes et quelques os à ronger. Et pourtant, l m’advent rarement de qutter une maîtresse sans ce pett soupr de soulagement de l’écoler qu sort de l’école, et je cros ben que ce sera un soupr du même genre que je poussera à l’heure de ma mort. Vous parlez de statues ; je sas peu de plasr plus exqus que celu de contempler la Vénus de marbre, celle que mon bon am le cardnal Caraa conserve dans sa galere napoltane : ses ormes blanches sont s belles qu’elles nettoent le cœur de tout désr proane et donnent enve de pleurer. Mas que je m’eorce à la regarder une moté de quart
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d’heure, et n mes yeux n mon esprt ne la voent Cancel Download And Print plus. Frère, l y a dans presque toutes les choses terrestres je ne sas quelle le ou quel débore qu vous en dégoûtent, et les rares objets qu par hasard ont la perecton en partage sont mortellement trstes. La phlosophe n’est pas mon at, mas je me ds paros que Platon a rason, et le chanone Campanus auss. Il dot exster alleurs je ne sas quo de plus parat que nous-mêmes, un Ben dont la présence nous conond et dont nous ne supportons pas l’absence. — Sempiterna Temptatio, fit Zénon. Je me ds souvent souvent que ren au monde, monde, sau sau un ordre éternel ou une bzarre vellété de la matère à are meux qu’elle-même, n’explque pourquo je m’eorce chaque jour de penser un peu plus clarement que la velle. Il restat asss, le menton bassé, dans la chambre envahe par l’humde crépuscule. Le rougoement de l’âtre tegnat ses mans tachées d’acdes, marquées çà et là de pâles ccatrces de brûlures et l’on voyat qu’l consdérat attentvement ces étranges prolongements de l’âme, ces grands outls de char qu servent à prendre contact avec tout. — Loué sos-je ! dt-l enfin avec une sorte sor te d’exaltaton dans laquelle Henr-Maxmlen eût pu reconnaître le Zénon vre de rêveres mécanques partagées avec Colas Gheel. Je ne cessera jamas de m’émerveller que cette char soutenue par ses vertèbres, ce tronc jont à la tête par l’sthme du cou et dsposant autour de lu symétrquement ses membres, contennent et peut-être produsent un esprt qu tre part de mes yeux pour vor et de mes mouvements pour palper… J’en sas les lmtes, et que le temps lu manquera pour aller plus lon, et la orce, s par hasard lu état accordé le temps.
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Mas l est, et, en ce moment, l est celu qu Est. Cancel Download And Print Je Je sas qu’l se trompe, erre, er re, nterprète nterprè te souvent à tort les leçons que lu dspense le monde, mas je sas auss qu’l a en lu de quo connaître et paros rectfier ses propres erreurs. J’a parcouru au mons une parte de cette boule où nous sommes ; j’a étudé le pont de uson des métaux et la génératon des plantes ; j’a observé les astres et examné l’ntéreur des corps. Je sus capable d’extrare de ce tson que je soulève la noton de pods et de ces flammes la noton de chaleur. Je sas que je ne sas pas ce que je ne sas pas ; j’enve ceux qu sauront davantage, davantage, mas je sas qu’ls auront tout comme mo à mesurer, peser, dédure et se méfier des déductons produtes, are dans le aux la part du vra et tenr compte dans le vra de l’éternelle admxton du aux. Je Je ne me sus jamas entêté entêt é à une dée par crante du désarro où je tomberas sans elle. Je n’a jamas assasonné un at vra à la sauce du mensonge, pour m’en rendre à mo-même la dgeston plus acle. Je n’a jamas déormé les vues de l’adversare pour en avor plus asément rason, pas même, au cours de notre débat sur l’antmone, celles de Bombast, qu ne m’en sut pas gré. Ou plutôt s : je me sus surprs à le are, e t me sus chaque os réprmandé comme on réprmande un valet malhonnête, ne me rendant confiance que sur ma promesse de are meux. J’a rêvé mes songes ; je ne les tens pas pour autre chose que des songes. Je me sus gardé de are de la vérté une dole, préérant lu lasser son nom plus humble d’exacttude. Mes tromphes et mes dangers ne sont pas ceux qu’on pense ; l y a d’autres glores que la glore et d’autres bûchers que le bûcher. J’a presque réuss à me défier des mots. Je mourra un peu mons sot que je ne sus né.
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— Volà qu Cancel va ben,Download dt en And bâllant l’homme de Print guerre. Mas le brut publc vous prête une réusste plus solde. Vous ates de l’or. — Non, dt l’alchmste, mas d’autres en eront. C’est aare de temps et d’outls adéquats adéquats pour mener à ben l’expérence. Qu’est-ce que quelques sècles ? — Fort longtemps, s’l s’agt de payer l’écot de L’Agneau d’Or, fit plasamment le captane. — Fare de l’or sera peut-être un jour auss acle que souer du verre, contnua Zénon. A orce de creuser de nos dents l’écorce des choses, nous finrons ben par trouver la rason secrète des afntés et des désaccords… Qu’est-ce qu’une broche mécanque ou qu’une bobne qu se remplt d’elle-même, et pourtant cette chaîne de mnces trouvalles pourrat nous mener plus lon que Magellan et qu’Amérc Vespuce leurs voyages. J’enrage quand je pense que l’nventon humane s’est arrêtée depus la premère roue, le premer tour, la premère orge ; on s’est à pene soucé de dversfier les emplos du eu volé au cel. Et cependant, l sufrat de s’applquer pour dédure de quelques prncpes smples toute une sére d’ngéneuses machnes propres à accroître la sagesse ou la pussance de l’homme : des engns qu par le mouvement produraent la chaleur, des conduts qu propageraent le eu comme d’autres Dropagent l’eau et tourneraent au profit des dstllatons et des de s ontes le dspost dspost des ancens hypohypocaustes et des étuves d’Orent… Remer à Ratsbonne crot que l’étude des los de l’équlbre permettrat de construre pour la guerre et la pax des chars allant dans l’ar et nageant sous l’eau. Votre poudre à canon qu relègue au rang de jeux d’enants les explots d’Alexandre est née ans des cogtatons d’une cervelle… — Halte-là ! dt Henr-Maxmlen. Quand nos pères ont ms le eu à la mèche pour la premère os, on eût pu crore que cette bruyante trouvalle
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allat mettre sens dessus dessous l’art de la guerre Cancel Download And Print et abréger les combats aute de combattants. Il n’en est ren, Deu merc ! On tue davantage (et encore j’en doute) et mes soudards manent l’arquebuse au leu de l’arbalète. Mas le veux courage, la velle couardse, la velle ruse, la velle dscplne et la velle nsubordnaton sont ce qu’ls étaent, et avec eux l’art d’avancer, de reculer ou de rester sur place, de are peur, et de paraître n’avor pas peur. Nos gens de guerre en sont encore à plager Hannbal et à compulser Végèce. Nous contnuons comme autreos à nous traîner au cul des maîtres. — Il y a longtemps lo ngtemps que je sas sa s qu’une once d’nerte pèse plus qu’un bosseau de sagesse, dt Zénon avec dépt. Je n’gnore pas que la scence n’est pour vos prnces qu’un arsenal d’expédents mons séreux que leurs carrousels, leurs panaches et leurs brevets. Et cependant, rère Henr, je connas çà et là dans dvers cons de la terre cnq bu sx gueux plus ous, plus démuns et plus suspects que mo, et qu rêvent en secret d’une pussance plus terrble que n’en détendra jamas le César Charles. S Archmède avat eu un pont d’appu, l aurat pu non seulement soulever le monde, mas le are retomber à l’abîme comme une coqulle brsée… Et ranchement, en Alger, en présence des bestales éroctés turques, ou encore au spectacle des oles et des ureurs qu partout ont rage dans nos chrétens royaumes, je me sus dt paros qu’ordonnancer, nstrure, enrchr ou nstrumenter notre espèce n’état peut-être qu’un ps-aller dans notre unversel désordre, et que c’est de plen gré et non par malencontre qu’un Phaéton pourrat un jour are flamber la terre. Qu sat s quelque comète ne finra pont par sortr de nos cucurbtes ? Quand je vos jusqu’où nos spéculatons nous entraînent, rère Henr, je sus mons surprs qu’on nous brûle.
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Et, se levant tout à coup : Cancel Download And Print poursute s causées par mes — J’a eu vent que les poursutes Prognostications reprennent de plus belle. Ren n’est encore décdé contre mo, mas les jours qu vennent promettent des alertes. Je couche rarement dans cette orge, préérant chercher pour la nut de mons présumables gîtes. Sortons ensemble, mas s vous cragnez le coup d’œl de certans cureux, vous erez sagement en vous séparant de mo sur le seul. — Pour qu me prenez-vous ? dt le captane, montrant peut-être plus de désnvolture qu’l n’en avat. Il reboutonna sa casaque en sacrant contre les mouchards qu mettent le nez dans les aares d’autru. Zénon remt sa houppelande à peu près séchée. Les deux hommes se partagèrent avant de sortr un reste de vn au ond d’une cruche. L’alchmste erma la porte et suspendt l’énorme cle sous une poutre où son valet saurat la trouver. Il ne pleuvat plus. La nut tombat, mas les ables lueurs du couchant se reflétaent encore sur la nege raîche des pentes de montagnes, par-dessus l’ardose des tots grs. Zénon tout en marchant scrutat les cons d’ombre. — Je sus à court d’espèces, dt le captane. S pourtant, eu égard é gard à vos présentes dfcultés… — Non, rère, dt l’alchmste. En cas de danger, le Nonce me ournra l’argent pour pler bagage. Gardez vos qubus pour paller vos propres maux. Un coche escorté de gardes qu menat sans doute quelque grand personnage au château mpéral d’Ambras s’engoura à ond de tran dans la rue étrote. Ils se garèrent pour lu lasser place. Le racas passé, Henr reprt médtatvement : — Nostradamus Nostra damus à Pars prédt l’avenr l’avenr e t exerce exerc e en pax. Que vous reproche-t-on ?
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— Il conesse le are grâce à une ade d’en haut Cancel Download And Print ou d’en bas, dt le phlosophe en essuyant d’un revers de manche les éclaboussures. Ces messeurs trouvent apparemment plus mpe encore l’hypothèse toute nue, et l’absence de tout cet attral de démons ou d’anges dans des chaudrons qu chantent… Pus, les quatrans de Mchel de Notre-Dame, dont je ne as pas fi, tennent en halene la curosté des oules par l’annonce de calamtés publques et de morts royales. Quant à mo, les présents soucs du ro Henr II me touchent trop peu pour que j’essae de dessner leur ssue uture… Une dée m’état venue au cours de mes voyages : à orce de rôder sur les routes de l’espace, de savor Ic que Là m’attendat, ben que je n’y usse pas encore, j’a voulu à ma manère m’aventurer sur les routes du temps. Combler le ossé entre la prédcton catégorque du calculateur d’éclpses et le pronostc déjà plus ondoyant du médecn, me rsquer précautonneusement à étayer l’une par l’autre la prémonton et la conjecture, tracer dans ce contnent où nous ne sommes pas encore la carte des océans et celle des terres déjà émergées… Je me sus atgué à cette tentatve. — Vous Vous aurez aure z le même sort sor t que le Docteur Faustus des maronnettes de la ore, dt par gaeté le captane. — Que non ! fit l’alchmste. Lassez aux velles velle s emmes ce sot conte de pacte et de perdton du docte docteur. Un Faustus vértable aurat d’autres vues sur l’âme et l’Ener. Ils ne s’occupèrent plus que d’évter les flaques. Ils longeaent les quas, Henr-Maxmlen ayant prs logement près du pont. Soudan : — Où passerez-vous passere z-vous la nut ? dt le captane. Zénon lança un regard en dessous à son compagnon : — Je Je ne sas encore, dt-l avec crconspecton.
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Le slence retomba : tous deux avaent épusé leur Cancel Download And Print sac de paroles. Brusquement Henr-Maxmlen s’arrêta, tra de sa poche un calepn et commença à lre à la lueur d’une chandelle placée derrère un grand globe plen d’eau à la devanture d’un orèvre qu travallat tard cette nut-là. ... Stultissimi, inquit Eumolpus, tum Encolpii, tum Gitonis aerumnae, et precipue blanditiarum Gitonis non immemor, certe estis vos qui elices esse potestis, vitam tamen aerumnosam degitis et singulis diebus vos ultro novis torquetis cruciatibus. Ego sic semper et ubique vixi, ut ultimam quamque lucem tanquam non redituram consumarem, id est in summa tranquillitate... — Lassez-mo rendre cec en ranças, dt le captane, car je pense que pour vous le latn de la pharmace a chassé l’autre. Ce veux pallard d’Eumolpe adresse aux deux mgnons Encolpe et Gton des propos que j’a jugés dgnes d’être nscrts en mon brévare : « Sots que vous êtes, dt Eumolpe, se souvenant des maux d’Encolpe, de ceux de Gton, et surtout des gentllesses de ce derner. Vous pourrez être heureux et menez pourtant une ve msérable, soums chaque jour à une gêne pre que la velle. Pour mo, j’a vécu chaque journée comme s ce jour que je vvas devat être le derner, c’est-à-dre, en toute tranquillité. » Pétrone, explqua-t-l, explqua-t-l, est l’un de mes sants nterce ntercesseurs sseurs.. — Le beau de la chose, approuva Zénon, est es t que votre auteur n’magne même pas que le derner jour d’un sage pusse ê tre vécu autrement qu’en pax. Nous erons en sorte de nous en souvenr à notre heure. Ils débouchèrent au tournant d’une rue devant une chapelle llumnée où se célébrat une neuvane. Zénon se dsposa à y entrer.
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— Qu’allez-vous Qu’allez -vous are parm ces ce s cagots ? dt le capCancel Download And Print tane. — Ne vous l’a-je pont déjà explqué ? fit Zénon. Me rendre nvsble. nvsble. Il se aufila derrère le rdeau de cur pendu en travers du seul. Henr-Maxmlen s’attarda un nstant, repartt, revnt sur ses pas, pus s’élogna pour tout de bon en sant sa velle rtournelle :
Nous étions deux compagnons Qui allions delà les monts. monts. Nous pensions aire ai re grand chère… Rentré chez lu, l y trouva un message du Seur Strozz mettant fin aux entretens secrets concernant les aares sennoses. Henr-Maxmlen pensa que le vent état à la guerre, ou peut-être l’avat-on desserv auprès du maréchal florentn, persuadant ans Son Excellence d’employer un autre agent. Pendant la nut, la plue recommença, pus tourna à la nege. Le lendeman, ses paquets ats, le captane partt à la recherche de Zénon. Les masons drapées de blanc asaent penser à des vsages cachant leurs secrets sous l’unormté d’une cagoule. Henr-Maxmlen retrouva avec plasr L’Agneau d’Or, où le vn état bon. L’hôte en lu apportant à bore lu apprt que le valet de Zénon état venu de grand grand matn rendre rendre la cle et payer le loyer de la orge. Vers l’heure de md, un ofcer de l’Inquston chargé d’arrêter Zénon avat requs le taverner de lu prêter man-orte. Mas un démon sans doute avat prévenu à temps l’alchmste. On n’avat ren trouvé chez lu de plus nsolte qu’un tas de fioles de verre sogneusement brsées. Henr-Maxmlen se leva précptamment, lassant sur la table la monnae de sa pèce. Quelques jours plus tard, l regagnat l’Itale par la vallée du Brenner.
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LA CARRIÈRE D’HENRI-MAXIMILIEN
IL avat brllé à Cérsoles, ms à déendre quelques branlantes bcoques mlanases autant de géne, se plasat-l à dre, que eu César à s’mpatronser maître du monde ; Blase de Montluc lu savat gré de ses bons mots qu donnaent du cœur aux hommes. Sa ve s’état passée à servr alternatvement le Ro Très Chréten et le Ro Catholque, mas la gaeté rançase s’accordat meux à son humeur. Poète, l excusat la ablesse de ses rmes par les soucs des campagnes ; captane, l explquat ses erreurs de tactque par la poése travallant sa cervelle ; estmé d’alleurs dans l’un et l’autre méter, dont la réunon n’apporte pas ortune. Ses vagabondages dans la Pénnsule l’avaent désabusé de l’Ausone de ses rêves ; l avat apprs à se méfier des courtsanes romanes, après leur avor une os payé son écot, et à chosr avec dscrmnaton les melons aux échoppes du Trastevere, jetant néglgemment au Tbre leurs écorces vertes. Il n’gnorat pas que le cardnal Maurzo Caraa ne le consdérat guère que
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comme un soudard pont trop sot, à qu on at Cancel Download And Print l’aumône en temps de pax d’un poste mal payé de captane des gardes ; sa maîtresse Vanna, à Naples, lu avat soutré une bonne somme pour un enant qu n’état peut-être pas de lu ; peu mportat. Madame Renée de France, dont le palas état l’HôtelDeu des déshértés, lu aurat volonters oert une snécure dans son Duché de Ferrare, mas elle y accuellat les premers dépenallés venus, pourvu qu’ls se grsassent avec elle du pett vn agrelet des Psaumes. Le captane n’avat que are de ces gens-là. Il vvat de plus en plus avec sa pétalle, et comme elle, réendossant chaque matn sa casaque rapécée avec le même plasr que l’on retrouve un vel am, avouant gaement ne se laver qu’à la plue, partageant avec son ramasss d’aventurers pcards, de mercenares albanas et de banns florentns le lard rance, la palle mose et les caresses du chen jaune qu suvat la troupe. Mas sa rude ve n’état pas dépourvue de délces. Il lu restat l’amour des beaux noms antques qu mettent sur le mondre pan de mur de l’Itale la poudre d’or ou le lambeau de pourpre d’un grand souvenr ; le plasr de déambuler par les rues, tantôt à l’ombre et tantôt au solel, d’nterpeller en toscan une belle fille dans l’attente d’un baser ou d’une bordée d’n jures, de bore aux ontanes en secouant de ses gros dogts les gouttelettes sur la poussère des dalles, ou encore de déchrer du con de l’œl un bout d’nscrpton latne en pssant dstratement contre une borne. Il n’avat recuell de l’opulence paternelle que quelques parts de la rafnere de Maestrcht dont les revenus trouvaent rarement le chemn de sa poche, et une des mondres terres amlales, un certan leu-dt de Lombarde en Flandre, dont le seul nom asat rre cet homme qu avat eu l’occa-
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La carrière d’Henri Maximilien
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son d’arpenter en tous sens la Lombarde vértable. Cancel Download And Print Les chapons et les cordées de bos de cette segneure allaent aux ourneaux et au bûcher de son rère ; c’état ben ans ; l avat joyeusement, un certan jour de sa sezème année, renoncé à son drot d’aînesse en échange du plat de lentlles du soldat. Les brèves et cérémoneuses lettres qu’l recevat paros de ce rère à l’occason d’une mort ou d’un marage se termnaent toujours, l est vra, par des ores de servce en cas de beson, mas Henr-Maxmlen savat ort ben qu’on n’gnorat pas en les ormulant qu’l ne s’en prévaudrat pont. Phlbert Lgre d’alleurs ne manquat guère de are alluson aux oblgatons énormes et aux vastes débours de sa place de membre du Consel des Pays-Bas, de sorte que finalement c’état le captane, lbre de tout souc, qu semblat are figure d’homme rche, et l’homme tout chargé d’or de partculer dans la gêne dans les cores duquel on aurat eu honte de puser. Une seule os, le soldat de ortune état retourné chez les sens. On l’avat beaucoup exhbé, comme s’l s’agssat de are assavor à chacun que ce prodgue état après tout montrable. Le at même que ce confident du maréchal d’Estrosse état à peu près sans emplo vsble et sans grade lu conérat une sorte de lustre, comme s’l devenat consdérable à orce d’obscurté. Les quelques années qu’l avat de plus que son puîné avaent at de lu, l le sentat, une relque d’un autre âge ; l se trouvat naï à côté de cet homme jeune, prudent prudent et glacé. Peu avant son départ, Phlbert lu soua que l’Empereur, à qu les tortls ne coûtaent pas cher, appendrat volonters un ttre à la terre de Lombarde, s les talents guerrers et dplomatques du captane étaent dorénavant ms au servce du seul Sant Empre. Son reus oensa : à supposer
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qu’Henr-Maxmlen dédagnât de traîner derrère Cancel Download And Print so une telle queue, ce ttre eût ajouté à l’llustraton de la amlle. Henr-Maxmlen répondt en consellant à son rère de mettre l’llustraton de la amlle là où l pensat. Il en eut vte assez des magnfiques lambrs du domane de Steenberg, que son cadet préérat désormas à celu, plus suranné, de Dranoutre, mas dont les pentures à sujets trés de la Fable parassaent grossères à cet homme habtué au plus fin de l’art talen. Il avat sa sufsance de la vue de sa maussade belle-sœur sous ses harnas de joyaux, et de la bande des sœurs et des beaux-rère beaux-rèress établ é tablss dans des gentlhommères gentlhommères du vosnage, avec leurs garnements d’enants tenus en lasse par de tremblants précepteurs. Les pettes querelles, les ntrgues, les ades comproms sous les ronts de ces gens-là lu asaent rapprécer la socété des soudards et des vvandères où du mons on peut jurer et roter à l’ase, et qu sont tout au plus une écume et non une le cachée. Du duché de Modène, où son camarade Lanza del Vasto lu avat trouvé emplo, la pax durant trop pour sa bourse, Henr-Maxmlen survellat du con de l’œl le résultat de ses négocatons sur les aares toscanes : des agents de Strozz ayant finalement décdé les Sennos à se révolter contre les Impéraux par amour de la lberté, ces patrotes s’étaent ausstôt donné une garnson rançase chargée de les déendre contre Sa Majesté Germanque. Henr reprt du servce sous Monseur de Montluc : un sège état une aubane à ne pas lasser passer. L’hver état rude ; les canons sur les remparts étaent recouverts le matn d’une mnce couche de gvre ; les olves et les salasons coraces des chches ratons rebutaent les appétts ranças. Monseur de Montluc ne se montrat à l’habtant qu’après avor rotté de vn ses joues hâves, comme un acteur
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La carrière d’Henri Maximilien
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se met du ard Cancel avant d’entrer en scène, et dssmuDownload And Print lat derrère sa man ben gantée les bâllements de la am. Henr-Maxmlen parlat en vers burlesques de mettre à la broche l’Agle mpérale elle-même ; en at, tout cela n’état qu’artfices et repartes de théâtre, comme on en trouve chez Plaute ou sur les tréteaux des comédens de Bergame. L’Agle dévorerat une os de plus les osons talens après avor allongé çà et là quelques bons coups au présomptueux coq ranças ; quelques braves gens mourraent, dont c’état le méter ; l’Empereur erat chanter un Te Deum pour la vctore de Senne ; et de nouveaux emprunts, négocés auss savamment qu’un traté entre deux prnces souverans, assujettraent davantage Sa Majesté à la Mason Lgre, qu d’alleurs, depus quelques années, portat dscrètement un autre nom, ou à quelque comptor rval d’Anvers ou d’Allemagne. Vngt-cnq ans de guerre et de pax armée avaent apprs au captane en quo consste l’envers l’envers des de s cartes. carte s. Mas ce Flamand mal nourr s’enchantat des jeux, des rs, des processons galantes de nobles dames sennoses paradant sur la place dégusées en Nymphes ou en Amazones aux cottes de satn rose. Ces rubans, ces bannères pentes, ces jupes agréablement troussées par la bse s’engourant au tournant des sombres rues parelles à des sapes, ragallardssaent les troupes, et à un mondre degré les bourgeos déconcertés par le marasme des aares et la cherté des vvres. Le cardnal de Ferrare portat aux nues la Sgnora Fausta, ben que la tramontane donnât la char de poule à ses opulentes épaules découvertes ; Monseur de Ternes décernat le prx à la Sgnora Fortnguerra, qu du haut des remparts exhbat galamment à l’ennem les longues jambes de Dane ; Henr-Maxmlen en tenat pour les nattes blondes de la Sgnora Pccolomn, beauté
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LA VIE ERRANTE
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fière, mas qu joussat sans contrante du doux Cancel Download And Print état de veuve. Il s’état prs pour cette déesse d’une épusante passon d’homme mûr. A l’heure des hâbleres ou des confidences, l’homme de guerre ne se prvat pas d’adopter parm ces Messeurs l’ar dscrètement gloreux d’un amant satsat, maladrotes grmaces dont chacun sat ce qu’elles valent, mas qu’on accepte entre camarades pour être auss chartablement écouté le jour où l’on voudra se vanter à son tour d’llusores bonnes ortunes. Il savat pourtant que la belle se gaussat de lu avec ses galants. Mas l n’avat jamas été beau ; l n’état plus jeune ; le solel e t le vent donnaent à son tent les tons recuts d’une brque sennose ; asss aux peds de sa dame, en amoureux trans, l lu venat paros à l’esprt que ces manèges de souprant d’une part et de coquette de l’autre n’étaent pas mons sots que celu de deux armées en présence et qu’l eût somme toute prééré la vor embrasser nue à nu un jeune Adons, ou se lvrer aux petts jeux avec une servante, plutôt que de are accepter à ce beau corps le pods rebutant du sen. Mas, la nut, couché sous sa magre couverture, l se rappelat brusquement un pett geste de cette longue man baguée, une manère ben à elle qu’avat son adorée de se lsser les cheveux, et, rallumant sa chandelle, l écrvat avec une jalouse pognante des vers complqués. Un jour où les garde-manger de Senne étaent, s’l se pouvat, plus vdes encore qu’à l’ordnare, l osa présenter à sa blonde Nymphe quelques tranches d’un jambon assez mal acqus. La jeune veuve état couchée sur son lt de repos, protégée du rod par une courteponte, jouant dstratement avec le gland d’or d’un coussn. Elle se redressa, les paupères soudan tremblantes, et, rapdement, d’un
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La carrière d’Henri Maximilien
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geste presque urt, se pencha vers le donateur Cancel Download And Print et lu basa la man. Il en éprouva un ébloussement de bonheur que ne lu auraent pas donné les complasances les plus abandonnées de cette même belle. Il se retra doucement pour la lasser manger. Il s’état souvent demandé quels seraent le mode et les crconstances de sa mort : un coup d’arquebuse qu le lasserat brsé, sanglant, noblement porté sur le pompeux débrs des lances espagnoles, regretté par les prnces et pleuré par ses rères d’armes, enterré enfin sous une éloquente nscrpton latne au ped d’un mur d’églse ; un coup d’épée au cours d’un duel en l’honneur d’une dame ; un couteau dans une rue sombre ; une recrudescence de la vérole d’autreos ; ou encore, passé soxante ans, l’apoplexe dans quelque château où l aurat trouvé une place d’écuyer pour finr ses jours. Jads, prs de malara, et grelottant sur le grabat d’une auberge de Rome, à deux pas du Panthéon, l s’état consolé d’avor à crever dans ce pays de fièvres, en songeant qu’après tout les morts y sont en melleure compagne qu’alleurs ; ces retombées de voûtes aperçues par sa lucarne, l les avat peuplées d’agles, de asceaux renversés, de vétérans en larmes, de torches éclarant les unéralles d’un empereur qu n’état pas lu-même, mas une sorte de grand homme éternel auquel l partcpat. A travers les volées de cloches de la fièvre terce, l avat cru entendre les fires déchrants et les sonores trompettes annonçant au monde le trépas du prnce ; l avat ressent dans son propre corps le eu qu dévore le héros et l’emporte au cel. Ces morts, ces obsèques magnares urent sa vrae mort, son enterrement vértable. Il succomba au cours d’une expédton ourragère durant laquelle ses cavalers s’eorcèrent s’eorcèrent d’emporter à deux pas des remparts une
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grange mal gardée ; le cheval d’Henr-Maxmlen Cancel Download And Print s’ébrouat gaement sur le sol tapssé d’herbe sèche ; l’ar ras de évrer état plasant sur les pentes ensolellées de la collne, après les rues venteuses et obscures de Senne. Une attaque mprévue des Impéraux débanda la troupe qu fit dem-tour vers les murs ; Henr-Maxmlen poursuvt ses hommes en hurlant des jurons. Une balle l’attegnt à l’épaule ; l tomba la tête contre une perre. Il eut le temps de sentr la secousse, mas non la mort. Sa monture délestée caracola dans les champs, où un Espagnol la captura pour la mener ensute à petts pas vers le camp de César. Deux ou tros reîtres se partagèrent les armes et les hardes du déunt. Il avat dans la poche de sa casaque le manuscrt de son Blason du Corps Féminin ; ce recuel de petts vers enjoués et tendres dont l attendat un peu de glore, ou du mons quelque succès auprès des belles, fint au creux du ossé, ensevel avec lu sous quelques pelletées de terre. Une devse qu’l avat gravée tant ben que mal en l’honneur de la Sgnora Pccolomn resta longtemps vsble sur la margelle de Fontebranda.
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LES DERNIERS VOYAGES DE ZENON
C’ÉTAIT une de ces époques où la rason humane se trouve prse dans un cercle de flammes. Echappé d’Innsbruck, Zénon avat vécu quelque temps retré à Wurzburg chez son dscple Bonacus Kastel, qu pratquat l’art hermétque dans une masonnette au bord du Man dont le reflet glauque emplssat les vtres. Mas l’nacton et l’mmoblté lu pesaent, et Bonacus n’état assurément pas homme à courr longtemps des rsques pour un am en danger. Zénon passa en Thurnge, poussa ensute jusqu’en Pologne, où l s’engagea en qualté de chrurgen dans les armées du ro Sgsmond, qu se préparat avec l’ade des Suédos à chasser les Moscovtes de Courlande. Au bout du deuxème hver de campagne, la curosté des plantes et des clmats nouveaux le décda à s’embarquer pour la Suède à la sute d’un certan captane Guldenstarr qu le présenta à Gustave Vasa. Le Ro cherchat un homme de l’art capable de soulager les douleurs lassées dans son veux corps par l’humdté des
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LA VIE ERRANTE
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camps et le rod des nuts passées sur la glace Cancel Download And Print aux temps aventureux de sa jeunesse, les eets des ancennes blessures et du mal ranças. Zénon se fit ben vor en composant une poton réconortante pour le monarque las d’avor êté Noël avec sa jeune et trosème épouse, en son blanc château de Vadsténa. Tout l’hver, accoudé à une haute enêtre, entre le cel rod et les planes gelées du lac, l s’occupa à computer les postons des étoles susceptbles d’apporter le bonheur ou le malheur à la mason des Vasa, adé dans cette tâche par le jeune prnce Erk qu avat pour ces scences dangereuses une am maladve. En van, Zénon lu rappelat que les astres nclnent nos destnées, mas n’en décdent pas, et qu’auss ort, auss mystéreux, réglant notre ve, obéssant à des los plus complquées que les nôtres, est cet astre rouge qu palpte dans la nut du corps, suspendu dans sa cage d’os et de char. Mas Erk état de ceux qu préèrent recevor leur destn du dehors, sot par orguel, parce qu’l trouvat beau que le cel lu-même s’occupât de son sort, sot par ndolence, pour n’avor à répondre n du ben n du mal qu’l portat en lu. Il croyat aux astres, comme, en dépt de la o réormée qu’l avat reçue de son père, l prat les sants et les anges. Tenté d’exercer une nfluence sur une âme royale, le phlosophe essayat çà et là l’eet d’une nstructon, d’un consel, mas les pensées d’autru s’enlsaent comme dans un marécage dans le jeune cerveau qu dormat derrère ces pâles yeux grs. Quand le rod devenat par trop extrême, l’élève et le phlosophe se rapprochaent de l’énorme eu capt capt sous la hotte de la chemnée, chemnée, et Zénon s’émervellat chaque os que cette chaleur benasante, ce démon domestqué qu chauat doclement un pot de bère placé dans les cendres, ût ce même deu enflammé qu crcule au cel. D’autres sors, le
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Les derniers voyages de Zénon
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prnce ne venatCancel pas, occupé avec ses rères à bore Download And Print dans les tavernes en compagne des filles de joe, et le phlosophe, s les pronostcs cette nut-là s’avéraent néastes, les rectfiat alors avec un haussement d’épaules. Quelques semanes avant la Sant-Jean d’été, l se fit donner congé de remonter vers le Nord, pour observer par so-même les eets du jour polare. Tantôt à ped, tantôt empruntant l’ade d’un cheval ou d’une barque, l erra de parosse en parosse, s’explquant grâce au truchement du pasteur chez qu survvat encore l’usage du latn d’Eglse, recuellant paros des recettes efcaces auprès des guérsseuses de vllage qu connassent la vertu des herbes et des mousses de la orêt, ou chez les nomades qu sognent leurs malades par des bans, des umgatons, et l’nterprétaton des songes. Lorsqu’l rejognt la cour à Upsal, où Sa Majesté Suédose ouvrat l’assemblée d’automne, l s’aperçut que la jalouse d’un conrère allemand l’avat perdu dans l’esprt du Ro. Le veux monarque cragnat que ses fils ne se servssent des computatons de Zénon pour calculer trop exactement la durée de la ve de leur père. Zénon comptat sur l’appu de l’hérter du trône dont l s’état at un am et presque un dscple, mas quand l rencontra par hasard Erk dans les corrdors du château, le jeune prnce passa sans le vor, comme s le phlosophe eût acqus subtement le pouvor d’être nvsble. Zénon s’embarqua en secret sur un bateau de pêche du lac Malar par le moyen duquel l gagna Stockholm, et de là prt passage pour Kalmar, pus vogua vers l’Allemagne. Pour la premère os de sa ve, l éprouvat l’étrange beson de remettre les peds dans la trace de ses pas, comme s son exstence se mouvat le long d’une orbte préétable, à la açon des étoles errantes. Lübeck, où l exerça avec succès, le retnt
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LA VIE ERRANTE
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quelques mos à pene. L’enve lu état venue de Cancel Download And Print are mprmer en France ses Prothéories dont l s’état occupé de açon ntermttente toute sa ve. Il ne se soucat pas d’y exposer une doctrne quelconque, mas d’établr une nomenclature des opnons humanes, ndquant leurs raccrocs, leur emboîtures, et leurs secrètes tangentes ou latents rapports. A Louvan, où l s’arrêta en route, personne ne le reconnut sous le nom de Sébasten Théus, dont l s’état aublé. Comme les atomes d’un corps qu sans cesse se renouvelle, mas garde jusqu’au bout les mêmes lnéaments et les mêmes verrues, les maîtres et les étudants avaent plus d’une os changé, mas ce qu’l entendt en s’aventurant dans une salle ne lu parut pas ort dérent de ce qu’l y avat jads mpatemment, ou au contrare ardemment, écouté. Il ne prt pas la pene d’aller vor dans une tssutere récemment étable aux envrons d’Audenarde des machnes ort semblables à celles qu’l avat dans sa jeunesse construtes avec Colas Gheel, et qu y onctonnaent à la satsacton des ntéressés. Mas l écouta avec curosté la descrpton détallée que lu en fit un algébrste de la Faculté. Ce proesseur, qu par excepton ne dédagnat pas les problèmes pratques, pra à dîner le savant étranger et le garda la nut sous son tot. A Pars, Rugger, que Zénon avat autreos rencontré à Bologne, le reçut à bras ouverts ; l’homme à tout are de la rene Catherne se cherchat un assstant sûr, assez comproms pour qu’on eût barre sur lu en cas de danger, et qu l’aderat à médcamenter les jeunes prnces et à prédre leur avenr. L’Italen mena Zénon au Louvre pour le présenter à sa maîtresse, avec laquelle l parlat rapdement dans la langue de leur pays, non sans orce courbettes et orce sourres. La Rene examna l’étranger de ses yeux étncelants dont elle jouat avec hableté,
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Les derniers voyages de Zénon
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tout comme en Cancel gestculant elle se plasat à allumer Download And Print des eux dans les damants à ses dogts. Ses mans pommadées, un peu boufes, s’agtaent comme des maronnettes dans son gron de soe nore. Elle fit descendre sur son vsage l’équvalent d’un vole de crêpe, pour parler du atal accdent qu avat causé tros ans plus tôt la mort du déunt monarque : — Que n’a-je meux entendu vos Prognostications, où j’a vu naguère des calculs sur la longueur de la ve communément accordée aux prnces ! Et nous aurons peut-être évté au eu Ro le er de lance qu me fit veuve… Car je pense, ajouta-t-elle avec grâce, que vous n’êtes pas sans avor part à cet ouvrage réputé dangereux pour les cervelles ables, et qu’on met sur le compte d’un certan Zénon. — Parlons comme s j’étas j’é tas ce Zénon, dt l’alchmste. Speluncam exploravimus... Votre Majesté sat comme mo que l’avenr est gros de plus d’occurrences qu’l n’en peut mettre au monde. Et l n’est pont mpossble d’en entendre bouger quelques-unes au ond de la matrce du temps. Mas l’événement seul décde laquelle de ces larves est vable et arrve à terme. Je n’a jamas vendu au marché des catastrophes et e t des de s bonheurs accouchés d’avance. d’avance. — Déprécez-vous Dépréce z-vous ans votre art ar t auprès de Sa Majesté Suédose ? — Je n’a pas de rasons de mentr à la plus hable emme de France. La Rene sourt. — Parla per divertimento, protesta l’Italen nquet de vor un compère ravaler leur scence. Questo honorato viatore ha studiato anche altro che cose celeste ; sa le virtudi di veleni e plante beneiche di altre parti che possano sanare gli ascessi auricolari del Suo Santissimo Figlio. — Je pus sécher un abcès, mas non guérr le jeune Ro, Ro, dt laconquement Zénon. J’a vu de lon
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Sa Majesté dans la galere à l’heure de l’audence : Cancel Download And Print l ne aut pas grand art pour reconnaître la toux et les suées d’un pulmonque. Le cel vous a heureusement donné plus d’un fils. — Deu nous le conserve conser ve ! dt la Rene avec un machnal sgne de crox. Rugger vous établra près du Ro, et nous comptons sur vous pour soulager au mons une parte de ses maux. — Qu soulagera soulage ra les mens ? dt âprement le l e phlosophe. La Sorbonne menace de are sasr mes Prothéories, qu’mprme en ce moment un lbrare de la rue Sant-Jacques. La Rene peut-elle empêcher que la umée de mes écrts brûlés en place publque ne venne m’ncommoder dans mon galetas du Louvre ? — Ces Messeurs Messeur s de la Sorbonne trouveraent trouver aent mauvas que je me mêlasse de leurs querelles, dt évasvement l’Italenne. Avant de le congéder, elle s’enqut longuement de l’état du sang et des entralles du ro de Suède. Elle pensat paros are épouser à l’un de ses fils une prncesse du Nord. Stôt après la vste au pett Ro malade, les deux hommes sortrent ensemble du Louvre et prrent par les quas. L’Italen déversat tout en marchant un flot d’anecdotes de cour. Zénon préoccupé l’nterrompt : — Vous verrez ver rez à ce que ces emplâtres emplât res soent applqués cnq jours de sute à ce pauvre enant. — N’y retourne re tournerez-vous rez-vous pas vous-même ? dt le charlatan charlat an avec avec surprse. — Que non ! Ne voyez-vous pas qu’elle ne lèvera lèver a pas le dogt pour me trer du pérl où mes productons m’ont ms ? Je n’ambtonne pas l’honneur d’être appréhendé dans la sute des prnces.
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Les derniers voyages de Zénon
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l’Italen. Votre rudesse avat su — Peccato ! dt Cancel Download And Print plare. Et tout à coup, s’arrêtant en plene oule, prenant son compagnon par le coude et bassant la vox : — E questi veleni ? Sarà vero vero che ne abbia tanto e quanto ? — Ne me ates ate s pas crore que la vox populare a rason qu vous accuse d’expéder les ennems de la Rene ? — On exagère, exagè re, bouonna Rugger. ugge r. Mas pourquo Sa Majesté n’aurat-elle pas son arsenal de posons comme elle a ses arquebuses et ses bombardes ? Songez qu’elle est veuve, étrangère en France, tratée de Jézabel par les luthérens, d’Hérodas par nos catholques, et qu’elle a cnq petts enants sur les bras. — Deu la garde ! répondt l’athée. Mas s’l m’arrve jamas de me servr de posons, ce sera pour mon ben, non celu ce lu de la Rene. Il prt néanmons logement chez Rugger, dont la aconde semblat le dstrare. Depus qu’Etenne Dolet, son premer lbrare, avat été étranglé et jeté je té au eu pour opnons subversves, Zénon n’avat ’avat plus publé en France. Il survellat lu-même avec d’autant plus de son l’mpresson de son lvre dans la boutque de la rue Sant-Jacques, corrgeant çà et là un mot, ou une noton derrère un mot, élmnant une obscurté, ou paros à regret en ajoutant une au contrare. Un sor, à l’heure du souper, qu’l prenat seul chez Rugger, tands que l’Italen s’aarat au Louvre, Maître Langeler, son présent lbrare, vnt tout earé lu apprendre que décdément ordre état donné pour la sase des Prothéories et leur destructon par la man du bourreau. Le marchand déplorat la perte de ses denrées sur lesquelles l’encre séchat à pene. Une épître dédcatore à la Rene
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Mère pourrat peut-être tout replâtrer à la dernère Cancel Download And Print heure. Toute la nut, Zénon écrvt, ratura, écrvt de nouveau, ratura encore. Au pett matn, l se leva de son sège, s’étra, bâlla et jeta au eu ses eullets et la plume dont dont l s’état serv. ser v. Il n’eut pas de mal à assembler quelques hardes et sa trousse de médecn, le reste de son bagage ayant été prudemment lassé à Senls dans un grener d’auberge. Rugger ronflat à l’entresol dans les bras d’une fille. Zénon glssa sous sa porte un bllet où l lu annonçat son départ pour la Provence. En réalté, l avat prs le part de regagner Bruges et de s’y are oubler. Un objet apporté d’Itale pendat au mur de l’étrote antchambre. C’état un mror florentn au cadre d’écallé, ormé d’un assemblage d’une vngtane de petts mrors bombés, parels aux cellules hexagonales des ruches d’abelles, chacun enermé à son tour dans sa mnce bordure qu avat été autreos la carapace d’une bête vvante. A la lueur grse d’une aube parsenne, Zénon s’y regarda. Il y aperçut vngt figures tassées et rapetssées par les los de l’optque, vngt mages d’un homme en bonnet de ourrure, au tent hâve et jaune, aux yeux lusants qu étaent eux-mêmes des mrors. Cet homme en ute, enermé dans un monde ben à so, séparé de ses semblables qu uyaent auss dans des mondes parallèles, lu rappela l’hypothèse du Grec Démocrte, une sére nfine d’unvers dentques où vvent et meurent une sére de phlosophes prsonners. Cette antase le fit amèrement sourre. Les vngt petts personnages du mror sourrent auss, chacun pour so. Il les vt ensute détourner à dem la tête et se drger vers la porte. por te.
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DEUXIÈME PARTIE
LA VIE IMMOBILE
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Obscurum per obscurius Ignotum per ignotius Devse alchmque. Aller vers vers l’obscur et l’inconnu par ce qui est plus obscur et inconnu encore encore..
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LE RETOUR A BRUGES
A SENLIS, l trouva place dans la voture du preur des Cordelers de Bruges qu revenat de Pars où l avat asssté au chaptre général de son ordre. Ce preur état plus nstrut que son habt n’eût porté à le crore, cureux des gens et des choses, pont démun d’une certane connassance du monde; les deux voyageurs causèrent lbrement tands que les chevaux penaent contre le vent agre des planes pcardes. Zénon ne cacha guère à son compagnon que son nom vértable et les poursutes dont son lvre état l’objet ; la finesse du preur état telle qu’on pouvat d’alleurs se demander s’l n’en devnat pas plus sur le docteur Sébasten Théus qu’l n’eût trouvé courtos de le lasser vor. La traversée de Tourna ut ralente par la présence d’une oule encombrant les rues ; rensegnements prs, l se trouva que ces gens se rendaent sur la grand-place pour vor pendre un certan talleur nommé Adran convancu de calvnsme. Sa emme état égalemen é galementt coupable, coupable, mas comme l est ndé-
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LA VIE IMMOBILE
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cent qu’une créature du sexe se balance en plen Cancel Download And Print cel, les jupes ballottantes sur la tête des passants, on allat selon l’ancen usage l’enterrer vvante. Cette brutale sottse fit horreur à Zénon, qu d’alleurs endgua son dégoût derrère un vsage mpassble, ayant prs pour règle de ne jamas donner son sentment dans tout ce qu touchat aux querelles entre le Mssel et la Bble. Tout en détestant convenablement l’hérése, le preur trouva le châtment un peu rude, et cette prudente remarque fit ressentr à Zénon à l’égard de son compagnon de voyage cet élan presque excess de sympathe que cause la mondre opnon modérée exprmée par un homme dont la poston ou la robe ne permettat pas d’en espérer autant. La voture roulat de nouveau en plene campagne, et le preur parlat d’autre chose, que Zénon croyat encore étouer sous le pods de pelletées de terre. Il se rappela soudan qu’un quart d’heure avat passé, et que cette créature dont l sourat les angosses avat déjà elle-même cessé de les éprouver. On longeat les grlles et les balustrades assez néglgées du domane de Dranoutre ; le preur mentonna en passant Phlbert Lgre, qu, à l’en crore, asat à Bruxelles la plue et le beau temps au Consel de la nouvelle Régente, ou Gouvernante, qu commandat aux Pays-Bas. Il y avat longtemps que l’opulente amlle Lgre n’habtat plus Bruges ; Phlbert et sa emme vvaent presque contnuellement dans leur domane de Pradelles en Brabant, où ls étaent plus à même de are les valets auprès des maîtres étrangers. Ce méprs de patrote pour l’Espagnol et sa séquelle fit dresser l’orelle à Zénon. Un peu plus lon, des gardes-wallonnes coés de er et culottés de cur réclamèrent arrogamment les sau-conduts des voyageurs. Le preur les leur fit passer passe r avec avec un dédan glacé. Il I l y avat décdément
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Le retour à Bruges
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quelque chose deCancel changéDownload en Flandre. Sur la grandAnd Print place de Bruges, les deux hommes enfin se séparèrent avec des cvltés et des ores de servce récproques pour l’avenr. Le preur se fit condure dans son coche de louage jusqu’à son couvent, et Zénon, content de se dégourdr après la longue mmoblté du voyage, prt sous son bras ses paquets. Il s’étonna de se retrouver sans dfculté dans les rues de cette vlle, qu’l n’avat pas revue depus plus de trente ans. Il avat prévenu de son arrvée Jean Myers, son ancen maître et compère, qu lu avat pluseurs os proposé de venr partager avec lu sa bonne mason du Veux-Qua-au-Bos. Une servante tenant une lanterne reçut le vsteur sur le seul. En s’engourant dans l’embrasure de la porte, Zénon rôla rudement cette grande emme maussade qu ne s’eaçat pas pour lu lvrer passage. Jean Jean Myers Myer s é tat asss dans son auteul, ses jambes goutteuses étendues à une dstance convenable du eu. Le maître de mason et le vsteur réprmèrent hablement, chacun de son côté, un mouvement de surprse : le sec Jean Myers s’état changé en un pett vellard replet, dont les yeux vs et le sourre narquos se perdaent dans des pls de char rose ; l’éclatant Zénon d’autreos état un homme hagard au pol grs. Quarante ans de pratque avaent perms au médecn brugeos d’amasser ce qu’l aut pour vvre à l’ase ; sa table et sa cave étaent bonnes, trop bonnes même pour le régme d’un podagre. Sa servante Catherne, qu’l avat quelque peu lutnée naguère, état ort bornée, mas dlgente, fidèle, pont bavarde, et n’nstallat pas dans sa cusne des galants amateurs de fins morceaux et de velles boutelles. Jean Myers lâcha à table quelques-unes de ses plasanteres avortes sur le clergé et les dogmes ; Zénon se souvenat de les avor jads trouvées
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dvertssantes ; elles lu parurent mantenant assez Cancel Download And Print plates ; touteos, repensant au talleur Adran à Tourna, à Dolet à Lyon et à Servet à Genève, l se dt à part so qu’en un temps où la o portat à la ureur, le sceptcsme au gros sel du bonhomme avat ben son prx ; pour lu, plus avancé dans la voe qu consste à tout ner, pour vor s l’on peut ensute réafrmer quelque chose, à tout déare, pour regarder ensute tout se reare sur un autre plan ou à une autre guse, l ne se sentat plus capable de ces rsées acles. Des supersttons se mélangeaent bzarrement chez Jean Myers à ce pyrrhonsme de chrurgen-barber. Il se pquat de curostés hermétques, ben que ses travaux en la matère ussent des jeux d’enant ; Zénon eut grand-pene à évter de se lasser entraîner dans des explcatons sur la trade neable ou le Mercure lunare, qu lu parassaent un peu longues pour ce sor d’arrvée. En médecne, le veux Jean état rand de nouveautés, tout en ayant par prudence pratqué selon les méthodes reçues ; l espérat de Zénon un spécfique pour sa goutte. Quant aux écrts suspects de son vsteur, le vellard ne cragnat pas, s l’dentté vértable du docteur Sébasten Théus venat à se découvrr, que le brut at autour d’eux gênât beaucoup leur auteur à Bruges. Dans cette vlle préoccupée de querelles de murs mtoyens, sourant de son port ensablé comme un malade de sa gravelle, personne n’avat prs la pene de eulleter ces ce s lvres. Zénon s’étendt sur le lt qu’on avat garn pour lu de draps dans la pèce d’en haut. La nut d’octobre état rode. Catherne entra avec une brque chauée dans l’âtre et enveloppée de chons de lane. Agenoullée dans la ruelle, elle ntrodust le brûlant paquet sous les couvertures, toucha les peds du voyageur, pus ses chevlles, les massa
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longuement, et soudan, sans une parole, couvrt ce Cancel Download And Print corps nu de caresses avdes. A la lueur du lumgnon posé sur un core, le vsage de cette emme état sans âge, pas très dérent de celu de la servante qu, près de quarante ans plus tôt, lu avat ensegné à are l’amour. Il ne l’empêcha pas de s’étendre lourdement à son côté sous la courteponte. Cette grande créature état comme la bère et le pan dont on prend sa part avec ndérence, sans dégoût et sans délces. Quand l se révella, elle vaquat déjà en bas à son traval de servante. Elle ne leva pas les yeux sur lu au cours de la journée mas le servat ser vat abondamment aux repas avec une sorte de sollctude grossère. Il verroulla sa porte la nut venue, et entendt les lourds pas de la servante s’élogner après qu’elle eut sans brut essayé le loquet. Elle ne se comporta pas le lendeman envers lu déremment de la velle ; l semblat qu’elle l’eût une os pour toutes nstallé parm les objets qu peuplaent son exstence, comme les meubles et les ustensles de la mason du médecn. Par mégarde, plus d’une semane plus tard, l oubla de verrouller sa porte : elle entra avec un sourre nas, troussant haut ses jupons pour are valor ses pesants appas. Le grotesque de cette tentaton eut rason de ses sens. Jamas l n’avat éprouvé ans la pussance brute de la char elle-même, ndépendamment de la personne, du vsage, des lnéaments du corps, et même de ses propres préérences charnelles. Cette emme qu haletat sur son oreller état une Lémure, une Lame, une des ces emelles de cauchemar qu’on vot sur les chapteaux d’églse, à pene apte, semblat-l, à se servr du langage human. En plen plasr, pourtant, une kyrelle de mots obscènes, qu’l n’avat plus eu l’occason d’entendre n d’employer en flamand depus l’âge de
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l’école, s’échappaent comme des bulles d’ar de cette Cancel Download And Print bouche épasse ; l la bâllonnat alors d’un revers de man. Le matn suvant, la répulson prt le dessus ; l s’en voulat de s’être comms avec cette créature comme on s’en veut d’avor consent à coucher dans un douteux lt d’auberge. Il n’oubla plus de s’enermer chaque sor. Il n’avat compté rester chez Jean Myers que le temps nécessare pour lasser passer l’orage amassé par la sase et la destructon de son lvre. Mas l lu semblat paros qu’l demeurerat à Bruges jusqu’à la fin de ses jours, sot que cette ce tte vlle ût une trappe creusée pour lu au bout de ses voyages, sot qu’une sorte d’nerte l’empêchât de repartr. L’mpotent Jean Myers lu confia les quelques patents qu’l tratat encore ; cette mnce clentèle n’état pas de nature à allumer l’enve d’autres médecns de la vlle, comme c’avat été le cas à Bâle où Zénon avat ms le comble à l’rrtaton de ses conrères en proessant publquement son art devant un cercle chos d’étudants. Cette os, ses rapports avec ses collègues se bornaent à de rares consultatons durant lesquelles le seur Théus déérat polment à l’avs des plus âgés ou des plus notores, ou encore à de bres propos qu ne touchaent qu’au vent ou à la plue, ou à quelque ncdent local. Les entretens avec les malades tournaent ben entendu sur les malades eux-mêmes. Nombre de ceux-c n’avaent jamas entendu parler d’un Zénon ; l n’état pour d’autres qu’un vague on-dt parm les bruts de leur passé. Le phlosophe qu avat naguère consacré un opuscule à la substance et aux proprétés du temps put constater que son sable enlsat vte la mémore des hommes. Ces trente-cnq ans auraent pu être un dem-sècle. D’usages ou de règlements qu avaent été neus et débattus au temps de ses écoles, on dsat aujourd’hu qu’ls avaent toujours exsté. De ats qu alors
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avaent secoué leCancelmonde, l n’état plus queston. Download And Print Des morts d’l y avat vngt ans étaent déjà conondus avec ceux d’une génératon précédente. L’opulence du veux Lgre avat lassé quelques souvenrs ; on dsputat pourtant s’l avat eu un ou deux fils. Il y avat auss un neveu, ou un bâtard d’Henr-Juste, qu avat mal tourné. Le père du banquer passat pour avor été Trésorer des Flandres, comme son fils, ou rapporteur au Consel de la Régente, comme le Phlbert d’aujourd’hu. De la mason Lgre, noccupée depus longtemps, le rez-de-chaussée état loué à des artsans ; Zénon revsta la abrque qu état naguère le domane de Colas Gheel ; une cordere l’occupat. Personne parm les artsans ne se souvenat plus de cet homme vte assoté par les chopes, mas qu avant les mutneres d’Oudenove et la pendason de son mgnon avat été à sa açon un meneur et un prnce. Le chanone Bartholommé Campanus vvat encore, mas sortat peu, étant accablé par les nfirmtés qu vennent avec l’âge, et, par bonheur, Jean Myers n’avat jamas été appelé à le sogner. Zénon touteos évtat prudemment l’églse de Sant-Donaten, où son ancen maître assstat encore aux ofces dans une stalle du chœur. Par prudence auss, l avat renermé dans une cassette de Jean Myers son dplôme de Montpeller, qu portat son vra nom, et ne gardat par devers so qu’un parchemn acheté jads à tout hasard à la veuve d’un médcastre allemand nommé Gott, qu’l avat ausstôt, pour meux brouller les cartes, gréco-latnsé en Théus. Avec l’ade de Jean Myers, l s’état nventé autour de cet nconnu une de ces bographes conuses et banales qu ressemblent à ces demeures dont le prncpal mérte est qu’on peut y entrer ou en sortr par pluseurs ssues. Il y ajoutat, pour la vrasemblance, des ncdents de sa propre ve sogneusement choss de manère à
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n’étonner ou à n’ntéresser personne, et dont l’nCancel Download And Print vestgaton, s elle avat leu, ne mènerat pas lon. Le docteur Sébasten Théus état né à Zutphen dans l’évêché d’Utrecht, fils naturel d’une emme du pays et d’un médecn bressan attaché à la mason de Madame Marguerte d’Autrche. Elevé à Clèves aux ras d’un protecteur qu se voulat anonyme, l avat d’abord pensé entrer dans cette vlle dans un couvent d’Augustns, mas le goût de la proesson paternelle l’avat emporté ; l avat étudé à l’Unversté d’Ingolstadt, pus à Strasbourg, et avat exercé quelque temps dans cette dernère vlle. Un ambassadeur de Savoe l’avat emmené à Pars et à Lyon, de sorte qu’l avat quelque peu vu la France et la cour. Rentré en terre d’Empre, l s’état proposé de retourner s’nstaller à Zutphen, où sa bonne mère vvat encore, mas, ben qu’l n’en dît ren, l avat sans doute eu à sourr de gens de la relgon prétendue réormée, qu mantenant abondaent là. C’est alors qu’l avat accepté pour vvre ce poste de substtut que lu proposat Jean Myers, qu avat autreos connu son père à Malnes. Il convenat auss avor été chrurgen dans les armées du catholque ro de Pologne, mas antdatat cet engagement de dx bonnes années. années. Enfin, l état veu d’une d’une fille de médecn de Strasbourg. Ces ables, auxquelles l ne recourat d’alleurs qu’en cas de questons ndscrètes, amusaent ort le veux Jean. Mas le phlosophe sentat paros lu coller au vsage le masque nsgnfiant du docteur Théus. Cette ve magnare aurat auss ben pu être la senne. Quelqu’un un jour lu demanda s’l n’avat ’avat pas rencontré un certan cer tan Zénon au cours de ses voyages. Ce ut presque sans mentr qu’l répondt non. Peu à peu, du grs de ces journées monotones sallaent des reles ou se détachaent des ponts de
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repère. Chaque Cancel sor, auDownload souper,AndJean Myers entrat Print par le menu dans l’hstore des ntéreurs que Zénon avat vstés ce matn-là, narrat une anecdote comque ou tragque en elle-même banale, mas qu montrat dans cette vlle ensommellée autant de brgues qu’au Grand Séral, autant de débauches que dans un bourdeau de Vense. Des tempéraments, des caractères émergeaent de ces ves tout unes de renters ou de margullers d’églse ; des groupes s’établssaent, ormés comme partout par le même appétt pour le lucre ou l’ntrgue, la même dévoton au même sant, les mêmes maux ou les mêmes vces. Les soupçons des pères, les rasques des enants, les agreurs entre veux époux n’étaent pas dérents de ce qu’on voyat dans la amlle Vasa ou en Itale chez les prnces, mas la pettesse des enjeux donnat par contraste aux passons une carrure énorme. Ces ves lées asaent sentr au phlosophe le prx d’une exstence sans attaches. Il en état des opnons comme des êtres : elles rentraent bentôt dans une catégore étable d’avance. On devnat ceux qu allaent attrbuer tous les maux du sècle aux lbertns ou aux réormés, et pour qu Madame la Gouvernante avat toujours rason. Il aurat pu termner pour eux leurs propos, nventer à leur place le mensonge au sujet du mal talen contracté dans leur jeunesse, la dérobade ou le pett sursaut oensé quand l réclamat de la part de Jean Myers des honorares oublés. Il parat à coup sûr, sans se tromper jamas, ce qu sortrat du gaurer. Le seul leu de la vlle où lu parût brûler une pensée lbre état paradoxalement la cellule du preur des Cordelers. Il avat contnué à réquenter celu-c à ttre d’am, et bentôt de médecn. Ces vstes étaent rares, n l’un n l’autre n’ayant beaucoup de temps à leur donner. Zénon chost le preur pour
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conesseur, quand l lu parut nécessare d’en avor Cancel Download And Print un. Ce relgeux état chche d’homéles dévotes. Son ranças exqus reposat l’orelle de la boulle flamande. mande. La conver conversaton saton touchat touchat à tout, sau aux matères de la o, mas c’état surtout à la chose publque que s’ntéressat cet homme d’orason. Fort lé avec quelques segneurs qu s’eorçaent de lutter contre la tyranne de l’étranger, l les approuvat, tout en redoutant pour la naton belgque un ban de sang. Quand Zénon lu rapportat ces pronostcs, le veux Jean haussat les épaules : on avat toujours vu les petts se are tondre et les pussants s’emparer de la lane. Il état pourtant âcheux que l’Espagnol parlât d’établr de nouveaux mpôts sur les vctualles, et pour un chacun une taxe d’un pour cent. Sébasten Théus regagnat tard le logs du VeuxQua-au-Bos, préérant au parlor surchaué l’ar humde des rues et les longues marches hors des murs au bord des champs grs. Un certan sor, rentrant à l’époque où la nut tombe de bonne heure, l vt en traversant l’antchambre Catherne occupée à nspecter des draps dans le bahut placé sous l’escaler. Elle ne s’nterrompt pas pour l’éclarer, comme elle le asat d’ordnare, profitant chaque os du même tournant du corrdor pour rôler urtvement le pan de son manteau. Dans la cusne, l’âtre état étent. Zénon tâtonna pour allumer une chandelle. Le corps tède encore du veux Jean Myers état proprement étendu sur la table de la salle vosne. Catherne Cathe rne entra avec le drap chos pour l’ensevelr. — Le maître est e st mort mor t d’un coup de sang, dt-elle. Elle ressemblat à ces laveuses de morts volées de nor qu’l avat vu opérer dans les demeures de Constantnople, du temps qu’l servat le Sultan. La fin du veux médecn le surprenat peu. Jean Myers lu-même s’état attend a ttenduu à ce que sa goutte
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remontât au cœur. Quelques semanes plus tôt, l Cancel Download And Print avat at devant le notare de la parosse un testament enrobé des peuses ormules habtuelles qu lassat son ben à Sébasten Théus, et à Catherne une chambre sous les combles de la mason jusqu’à la ln de ses jours. Le phlosophe regarda de plus près le vsage convulsé et gonflé du mort. Une odeur suspecte, une tache brune au con de la lèvre évellèrent ses soupçons ; l monta dans sa chambre et oulla son core. Le contenu d’une mnce fiole de verre avat dmnué d’un dogt. Zénon se souvnt d’avor un sor montré au vel homme cette mxture de venns et de posons végétaux qu’l s’état procurée dans une ofcne de Vense. Un able brut lu fit tourner la tête ; Catherne l’observat, debout sur le pas de la porte, comme elle l’avat sans doute épé à travers le vantal de sa cusne, quand l avat at vor à son maître ces quelques objets rapportés de ses voyages. Il lu sast le bras ; elle tomba sur les genoux en déversant un torrent conus de paroles et de pleurs : — Voor u heb ik het gedaan ! J’a at cela pour vous, répétat-elle entre deux hoquets. Il l’écarta brutalement et redescendt veller le mort. A sa açon, le veux Jean avat savamment dégusté la ve ; ses maux n’étaent pas s volents qu’l n’eût pu jour encore pendant quelques mos de sa doullette exstence : un an peut-être, ou deux ans à tout mettre au meux. Ce sot crme le rustrat sans rason du modeste plasr d’être au monde. Ce vellard ne lu avat jamas voulu que du ben : Zénon se sentat prs pour lu d’une amère et atroce pté. Il éprouvat envers l’emposonneuse une vane rage que le mort n’eût pas sans doute à ce degré ressente lu-même. Jean Myers avat toujours employé son ngénosté, qu n’état pas pette, à tourner tourner en dérson les neptes neptes de ce monde ;
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cette servante débauchée se hâtant d’enrchr un Cancel Download And Print homme qu ne se soucat pas d’elle lu eût ourn matère à un bon conte, s’l avat vécu. Tel qu’l état, couché tranqullement sur cette table, l semblat à cent leues de sa propre mésaventure ; du mons l’ancen chrurgen-barber s’état-l tou jours moqué de ceux qu s’magnent qu’on pense ou qu’on soure encore, quand on ne marche n ne dgère plus. On enterra le vel homme dans sa parosse de Sant-Jacques. Au retour des obsèques, Zénon s’aperçut que Catherne avat transporté dans la chambre du maître ses hardes et sa trousse de médecn ; elle y avat at du eu et sogneusement apprêté le grand lt. Il rapporta sans ren dre ses eets dans le rédut qu’l occupat depus son arrvée. Stôt entré en possesson de son ben, l s’en dépoulla par acte notaré en aveur de l’ancen hospce de Sant-Cosme, stué rue Longue, et qu attenat au couvent des Cordelers. Dans cette vlle où n’abondaent plus les grandes ortunes d’autreos, les donatons peuses se asaent rares ; la générosté du seur Théus ut admrée, comme l l’escomptat. La mason de Jean Myers serat dorénavant un asle de vellards nfirmes ; Catherne y logerat en qualté de servante. L’argent comptant serat employé à réparer une parte des bâtments du vétusté hospce de SantCosme ; dans les salles encore habtables, le preur des Cordelers, dont dépendat cette nsttuton, chargeat Zénon d’établr un dspensare pour les pauvres du quarter et les paysans auant en vlle les jours de marché. Deux mones urent délégués délé gués pour le seconder dans l’ofcne. Ce poste état de nouveau trop peu gloreux pour attrer sur le docteur Théus la jalouse de ses conrères ; pour le moment, la nche état sûre. La velle mule de Jean Myers ut
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nstallée dans l’écure de Sant-Cosme, et le jardner Cancel Download And Print du couvent chargé de la sogner. On dressa un lt pour Zénon dans une pèce à l’étage, où l transporta une parte des lvres de l’ancen chrurgen-barber ; ses repas lu étaent é taent apporté apportéss du réectore. réectore. L’hver se passa à ce changement de quarter et à ces aménagements ; Zénon persuada le preur de lu lasser établr une étuve à la mode allemande, et lu remt quelques notes sur le tratement des rhumatques et des véroles par la vapeur chaude. Ses connassances mécanques le servrent pour l’établssement des condutes et l’économque agencement d’un poêle. Rue aux Lanes, un orgeron s’état nstallé dans les ancennes écures des Lgre ; Zénon s’y rendat sur le sor, et lmat, rvat, soudat, martelat, en perpétuelle consultaton avec le maître-errant et ses ades. Les garçons du quarter, réuns là pour passer le temps, s’émervellaent de l’hableté de ses magres mans. mans. C’est durant cette pérode sans ncdents qu’l ut reconnu pour la premère os. Il se trouvat seul à l’ofcne, comme toujours après le départ des deux mones ; c’état jour de marché, et le défilé habtuel des pauvres avat duré depus l’heure de none. Quelqu’un encore rappa à la porte ; c’état une velle emme qu venat chaque samed vendre son beurre en vlle, et qu désrat du médecn un remède pour sa scatque. Zénon chercha sur l’étagère un pot de grès plen d’un révuls pussant. pussant. Il s’approcha s’approcha d’elle pour lu en explquer l’emplo. Soudan, l vt dans ses yeux bleus délavés une expresson d’étonnement joyeux qu la lu fit reconnaître à son tour. tour. Cette Ce tte emme avat travallé dans les cusnes de la mason Lgre, à l’époque où l état encore tout enant. Greete (l se rappela subtement son nom) état marée au valet qu l’avat ramené au logs après sa premère ugue. Il se souvenat qu’elle l’avat traté
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avec bonté quand l se aufilat au mleu de ses Cancel Download And Print marmtes et de ses écuelles ; elle l’avat lassé prendre sur la table le pan chaud et la pâte crue prête à être enournée. Elle allat s’exclamer, quand l posa son dogt sur ses lèvres. La velle Greete avat un fils voturer qu avat at à l’occason la contrebande avec la France ; son pauvre veux, mantenant à peu près paralytque, avat eu malle à partr avec le segneur de l’endrot pour quelques sacs de pommes volées dans le verger adjacent à leur erme. Elle savat qu’l est paros opportun de se cacher, même quand on est un rche et un noble, espèces humanes dans lesquelles elle plaçat encore Zénon. Elle se tut, mas en se retrant, lu basa la man. Cet ncdent aurat dû l’nquéter, en lu prouvant qu’l rsquat chaque jour d’autres reconnassances du même genre ; l en éprouva au contrare un plasr qu l’étonna lu-même. A coup sûr, l se dsat qu’l y avat là, près des murs de la vlle, du côté de Sant-Perre-de-la-Dgue, une pette erme où l’on pourrat passer la nut en cas de danger, et un voturer dont le cheval et la carrole pourraent être utles. Mas ce n’étaent là que des prétextes qu’l se donnat à so-même. Cet enant auquel l ne pensat plus, cet être puérl qu’l état à la os rasonnable, et en un sens absurde, d’assmler au Zénon d’aujourd’hu, quelqu’un s’en souvenat assez pour l’avor reconnu en lu, et le sentment de sa propre exstence en état comme ortfié. Entre lu et une créature humane, un len, s mnce qu’l ût, s’état ormé, qu ne passat pas par l’esprt, comme dans ses rapports avec le preur, n, comme c’état le cas dans les rares connectons sensuelles qu’l se permît encore, par la char. Greete revnt presque chaque semane pour are sogner ses msères de velle emme ; mas elle ne manquat guère d’apporter
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un présent, du Cancel beurre Download dans une eulle de chou, And Print une part de galette abrquée par elle, du sucre cand, ou une pognée de châtagnes. Elle le regardat de ses veux yeux reurs tands qu’l mangeat. Il y avat entre eux l’ntmté d’un secret ben gardé.
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L’ABIME
PEU à peu, comme un homme qu absorbe chaque jour une certane cer tane nourrture fint par en ê tre modfié dans sa substance, et même dans sa orme, engrasse ou magrt, tre de ces mets une orce, ou contracte en les ngérant des maux qu’l ne connassat pas, des changements presque mperceptbles se asaent en lu, rut d’habtudes nouvelles qu’l s’état acquses. Mas la dérence entre her et aujourd’hu s’annulat dès qu’l y portat le regard : l exerçat la médecne, comme l l’avat toujours at, et l n’mportat guère que ce ût sur des loqueteux ou sur des prnces. Sébasten Théus état un nom de antase, mas ses drots à celu de Zénon n’étaent pas des plus clars. Non habet nomen proprium : l état de ces hommes qu ne cessent pas jusqu’au bout de s’étonner d’avor un nom, comme on s’étonne en passant devant un mror d’avor un vsage, et que ce sot précsément ce vsage-là. Son exstence état clandestne et soumse à certane ce rtaness contrantes : elle l’avat l’avat toujours
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L’abîme
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été. Il tasat les Cancel pensées Download qu pour lu comptaent le And Print plus, mas l savat de longue date que celu qu s’expose par ses propos n’est qu’un sot, quand l est s acle de lasser les autres se servr de leur goser et de leur langue pour ormer des sons. Ses rares accès de paroles n’avaent jamas été que l’équvalent des débauches d’un homme chaste. Il vvat à peu près claquemuré dans son hospce de SantCosme, prsonner d’une vlle, et dans cette vlle d’un quarter, et dans ce quarter d’une dem-douzane de chambres donnant d’un côté sur le jardn potager et les dépendances d’un couvent, et de l’autre sur un mur nu. Ses pérégrnatons, assez peu réquentes, à la recherche de spécmens botanques, passaent et repassaent par les mêmes champs labourés et les mêmes chemns de halage, les mêmes boqueteaux et la lsère des mêmes dunes, et l sourat, non sans amertume, de ces allées et venues d’nsectes qu crcule ncompréhensblement sur un empan de terre. Mas ce rétrécssement du leu, ces répéttons quas mécanques des mêmes gestes se produsaent chaque os qu’on harnachat les acultés en vue de l’accomplssement d’une seule tâche délmtée et utle. Sa ve sédentare l’accablat comme une sentence d’ncarcératon qu’l eût par prudence prononcée sur so-même, mas la sentence restat révocable : ben des os déjà, et sous d’autres cels, l s’état nstallé ans, momentanément ou, croyat-l, pour toujours, en homme qu a partout et n’a nulle part drot de’ cté. Ren ne prouverat qu’l ne reprendrat pas deman l’exstence errante qu avat été son lot et son chox. Et pourtant, son destn bougeat : un glssement s’opérat à l’nsu de lu-même. Comme un homme nageant à contre-courant et par une nut nore, les repères lu manquaent pour calculer exactement la dérve.
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Naguère encore, en retrouvant son chemn dans le Cancel Download And Print lacs des venelles de Bruges, l avat cru que cette halte à l’écart des grandes routes de l’ambton et du savor lu procurerat quelque repos après les agtatons de trente-cnq ans. Il comptat éprouver l’nquète sécurté d’un anmal rassuré par l’étrotesse et l’obscurté du gîte où l a chos de vvre. Il s’état trompé. Cette exstence mmoble boullonnat sur place ; le sentment d’une actvté presque terrble grondat comme une rvère souterrane. L’angosse qu l’étregnat état autre que celle d’un phlosophe persécuté pour ses lvres. Le temps, qu’l avat magné devor peser entre ses mans comme un lngot de plomb, uyat et se subdvsat comme les grans du mercure. Les heures, les jours, et les mos, avaent cessé de s’accorder aux sgnes des horloges, et même au mouvement des astres. Il lu semblat paros être resté toute sa ve à Bruges, et paros y être rentré de la velle. Les leux auss bougeaent : les dstances s’abolssaent comme les jours. Ce boucher, ce creur de denrées auraent auss ben pu être à Avgnon ou à Vadsténa ; ce cheval ouetté, l l’avat vu s’abattre dans les rues d’Andrnople ; cet vrogne avat commencé à Montpeller son juron ou son jet de vomssure ; cet enant qu vagssat dans les bras d’une nourrce état né à Bologne l y avat vngt-cnq ans ; cette messe du dmanche, à laquelle l ne manquat jamas d’assster, l en avat entendu l’Introït dans une églse de Cracove cnq hvers plus tôt. Il pensat peu aux ncdents de sa ve passée, déjà dssous comme des songes. Paros, sans rason apparente, l revoyat cette emme grosse qu’l avat consent à are avorter, en dépt du serment hppocratque, pour lu épargner une mort gnomneuse au retour d’un mar jaloux, dans un bourg du Languedoc, ou encore la grmace de Sa Majesté Suédose avalant une poton, ou son valet Aleï adant leur mule à passer le gué d’une rvère,
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entre Ulm et Constance, ou le cousn Henr-MaxmCancel Download And Print len, qu peut-être état mort. Un chemn creux, où des flaques ne séchaent pas, même en plen été, lu rappela un certan Perrotn qu l’avat guetté sous la plue, au bord d’une route soltare, au lendeman d’une querelle dont les mots n’apparassaent plus. Il recréat deux corps agrppés dans la boue, une lame brllante tombée à terre, et Perrotn dagué par son propre couteau lâchant prse, devenu lumême boue et terre. Cette velle hstore n’mportat plus, et n’eût pas mporté davantage s ce cadavre mou et chaud avat été celu d’un clerc de vngt ans. Ce Zénon qu marchat d’un pas précpté sur le pavé gras de Bruges sentat passer à travers lu, comme à travers ses vêtements usés le vent venu du large, le flot des mllers d’êtres qu s’étaent déjà tenus sur ce pont de la sphère, ou y vendraent jusqu’à cette catastrophe que nous appelons la fin du monde ; ces antômes traversaent sans le vor le corps de cet homme qu de leur vvant n’état pas encore, ou lorsqu’ls seraent n’exsterat plus. Les qudams rencontrés l’nstant plus tôt dans la rue, perçus d’un coup d’œl, pus rejetés ausstôt dans la masse norme de ce qu est passé, grossssaent ncessamment cette bande de larves. Le temps, le leu, la substance perdaent ces attrbuts qu sont pour nous leurs rontères ; la orme n’état plus que l’écorce déchquetée de la substance ; la substance s’égouttat dans un vde qu n’état pas son contrare ; le temps et l’éternté n’étaent qu’une même chose, comme une eau nore qu coule dans une mmuable nappe d’eau nore. Zénon s’abîmat dans ces vsons comme un chréten dans une médtaton sur Deu. Les dées glssaent elles auss. L’acte de penser l’ntéressat mantenant plus que les douteux produts de la pensée elle-même. Il s’examnat pensant, comme l eût pu compter du dogt à son pognet les
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pulsatons de l’artère radale, ou sous ses côtes le Cancel Download And Print va-et-vent de son soue. Toute sa ve, l s’état ébah de cette aculté qu’ont les dées de s’agglomérer rodement comme des crstaux en d’étranges figures vanes, de croître comme des tumeurs dévorant la char qu les a conçues, ou encore d’assumer monstrueusement certans lnéaments de la personne humane, comme ces masses nertes dont accouchent certanes emmes, et qu ne sont en somme que de la matère qu rêve. Bon nombre des produts de l’esprt n’étaent eux auss que de dormes veaux-de-lune. D’autres notons, plus propres et plus nettes, orgées comme par un maître ouvrer, étaent de ces objets qu ont alluson à dstance ; on ne se lassat pas d’admrer leurs angles et leurs parallèles ; elles n’étaent néanmons que les barreaux dans lesquels l’entendement s’enerme lu-même, et la roulle du aux mangeat déjà ces abstrates erralles. Par nstants, on tremblat comme sur le bord d’une transmutaton : un peu d’or semblat naître dans le creuset de la cervelle humane ; on n’aboutssat pourtant qu’à une équvalence ; comme dans ces expérences malhonnêtes par lesquelles les alchmstes de cour s’eorcent de prouver à leurs clents prncers qu’ls ont trouvé quelque chose, l’or au ond de la cornue n’état que celu d’un banal ducat ayant passé par toutes les mans, et qu’avant la cusson le soueur y avat ms. Les notons mouraent comme les hommes : l avat vu au cours d’un dem-sècle pluseurs génératons d’dées tomber en poussère. Une métaphore plus flude s’nsnuat en lu, produt de ses ancennes traversées marnes. Le phlosophe qu tentat de consdérer dans son ensemble l’entendement human voyat sous lu une masse soumse à des courbes calculables, strée de courants dont on eût pu dresser la carte, creusée de
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pls proonds parCancel les poussées de l’ar et la pesante Download And Print nerte des eaux. Il en allat des figures assumées par l’esprt comme de ces grandes ormes nées de l’eau ndérencée qu s’assallent ou se relaent à la surace du goure ; chaque concept s’aassat finalement dans son propre contrare, comme deux houles qu se heurtent s’annhlent en une seule et même écume blanche. Zénon regardat ur ce flot désordonné, emportant comme des épaves le peu de vértés sensbles dont nous nous croyons sûrs. Paros, l lu semblat entrevor sous le flux une substance mmoble, qu serat aux dées ce que les dées sont aux mots. Mas ren ne prouvat que ce substratum ût la dernère couche, n que cette fixté ne cachât pont un mouvement trop rapde pour l’ntellect human. Depus qu’l avat renoncé à confier de vve vox sa pensée ou à la consgner par écrt sur l’étal des lbrares, ce sevrage l’avat ndut à descendre plus proondément que jamas a la recherche de purs concepts. Mantenant, en aveur d’un examen plus poussé, l renonçat temporarement aux concepts eux-mêmes ; l retenat son esprt, comme on retent son soue, pour meux entendre ce brut de roues tournant s vte qu’on ne s’aperçot pas qu’elles tournent. Du monde des dées, l rentrat dans le monde plus opaque de la substance contenue et délmtée par la orme. Rencogné dans sa chambre, l n’employat plus ses vellées à s’eorcer d’acquérr de plus justes vues des rapports entre les choses, mas à une médtaton normulée sur la nature des choses. Il corrgeat de la sorte ce vce de l’entendement qu consste à appréhender les objets afin de s’en servr, ou au contrare de les rejeter, sans entrer assez avant dans la substance ndvduée dont ls sont ats. Ans, l’eau avat été pour lu une bosson qu désaltère et un lqude qu lave, une
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parte consttuante d’un unvers créé par le chréten Cancel Download And Print Démurge dont l’avat entretenu le chanone Bartholommé Campanus parlant de l’Esprt flottant sur les eaux, l’élément essentel de l’hydraulque d’Archmède ou de la physque de Thalès, ou encore le sgne alchmque d’une des orces qu vont vers le bas. Il avat calculé des déplacements, mesuré des doses, attendu que des gouttelettes se reormassent dans le tuyau des cucurbtes. Mantenant, renonçant pour un temps à l’observaton qu, du dehors, dstngue et sngularse, en aveur de la vson nterne du phlosophe hermétque, l lassat l’eau qu est dans tout envahr la chambre comme la marée du déluge. Le core et l’escabeau flottaent ; les murs crevaent sous la presson de l’eau. Il cédat à ce flux qu épouse toutes les ormes et reuse de se lasser comprmer par elles ; l expérmentat le changement d’état de la nappe d’eau qu se at buée et de la plue qu se at nege ; l asat sens l’mmoblté temporare du gel ou le glssement de la goutte clare oblquant nexplcablement sur la vtre, flude défi au par des calculateurs. Il renonçat aux sensatons de tédeur et de rod qu sont lées au corps ; l’eau l’emportat cadavre auss ndéremment qu’une jonchée d’algues. Rentré dans sa char, l y retroure trouvat l’élément aqueux, l’urne dans la vesse, la salve au bord des lèvres, l’eau présente dans le lqude du sang. Pus, ramené à l’élément dont l s’état de tout temps sent une parcelle, l tournat sa médtaton vers le eu, sentat en so cette chaleur modérée et béate que nous partageons avec les bêtes qu marchent et les oseaux qu traversent le cel. Il pensat au eu dévorant des fièvres qu’l avat souvent en van essayé d’étendre. Il percevat le bond avde de la flamme qu naît, la rouge joe du braser et sa fin en cendres nores. Osant aller plus lon, l ne asat qu’un avec cette mplacable ardeur
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qu détrut ce qu’elle touche ; l songeat aux bûchers, Cancel Download And Print tels qu’l en avat vu à l’occason d’un Acte-de-Fo dans une pette vlle de Léon, au cours duquel avaent pér quatre Jus accusés d’avor hypocrtement embrassé la relgon chrétenne sans cesser pour autant d’accomplr les rtes hértés de leurs pères, et un hérétque qu nat l’efcacté des sacrements. Il magnat cette douleur trop aguë pour le langage human ; l état cet homme ayant dans ses narnes l’odeur de sa propre char qu brûle ; l toussat, entouré d’une umée qu ne se dssperat pas de son vvant. Il voyat une jambe norce se levant toute drote, les artculatons léchées par la flamme, comme une branche se tordant sous la hotte d’une chemnée ; l se pénétrat en même temps de l’dée que le eu et que le bos sont nnocents. Il se souvenat, le lendeman de l’Acte-de-Fo célébré à Astorga, d’avor marché avec le veux mone alchmste Don Blas de Vela sur cette are calcnée qu lu rappelat celle des charbonners ; le savant Jacobte s’état nclné pour recuellr sogneusement parm les tsons étents de petts os légers et blanchs, cherchant parm eux le luz de la tradton hébraïque qu résste aux flammes et sert de semence à la résurrecton. Il avat sour autreos de ces supersttons de cabbalste. Suant d’angosse, l levat la tête, et, s la nut état assez clare, consdérat à travers le carreau, avec une sorte de rod amour, le eu naccessble naccessble des astres. Quo qu’l qu’l ît, sa médtaton le ramenat ramenat au corps, corps, son prncpal sujet d’étude. Il savat que son équpement de médecn se composat à parts égales d’hableté manuelle et de recettes emprques, supplémentées de trouvalles expérmentales elles auss, menant à leur tour à des conclusons théorques toujours toujours provsores provsores : une once once d’observa d’observaton ton ra-
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sonnée valat en ces matères plus qu’une tonne de Cancel Download And Print songes. Et pourtant, après tant d’années passées à anatomser la machne humane, l s’en voulat de ne pas s’être hasardé plus audaceusement dans l’exploraton de ce royaume aux rontères de peau, dont nous nous croyons les prnces, et où nous sommes prsonners. A Eyoub, le dervche Daraz avec qu l avat at amté lu avat communqué ses méthodes acquses en Perse dans un couvent hérétque, car Mohamet a ses dssdents comme le Chrst. Il reprenat dans sa soupente de Bruges des recherches commencées jads au ond d’une cour où brussat une source. Elles le menaent plus lon que ne l’avaent at aucune de ses expérmentatons dtes in anima vili. Couché sur le dos, rétractant les muscles du ventre, dlatant la cage du thorax où va et vent cette bête vte erayée que nous appelons un cœur, l gonflat sogneusement ses poumons, se rédusat scemment à n’être qu’un sac d’ar asant équlbre aux orces du cel. Daraz lu avat ans consellé de resprer jusqu’aux racnes racne s de l’être. l’ê tre. Il avat at auss avec le dervche l’expérence contrare, celle des premers eets de la strangulaton lente. Il levat le bras, s’ébahssant que le commandement ût donné et reçu, sans savor exactement quel maître meux serv que so-même contresgnat cet ordre : mlle os, en eet, l avat constaté que la volonté smplement pensée, le ût-elle avec toute la pussance mentale rassemblée en lu, n’état pas plus capable de le are cller ou roncer le sourcl que les objurgatons d’un enant ne le sont de are mouvor des perres. Il y allat l’acquescement tacte d’une part de so déjà plus vosne de l’abîme du corps. Métculeusement, comme on sépare les fibres d’une tge, l séparat les unes des autres ces dverses ormes de volonté.
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Il réglat de sonCancel meux Download les mouvements complqués And Print de son cerveau à l’œuvre, mas comme un ouvrer touche précautonneusement les rouages d’une machne qu’l n’a pas montée et dont l ne saurat réparer les avares : Colas Gheel état plus au at de ses méters à tsser que lu sous son crâne des délcates bougées de sa machne à peser les choses. Son pouls, dont l avat s assdûment étudé les battements, gnorat tout des ordres émanant de sa aculté pensante, mas s’agtat sous l’eet de crantes ou de douleurs auxquelles son ntellect ne s’abassat pas. L’engn du sexe obéssat à sa masturbaton, mas ce geste délbérémentaccompl le jetat pour un moment dans un état que son voulor ne contrôlat plus. De même, une ou deux os dans sa ve, avat jall scandaleusement et malgré so la source des larmes. Plus alchmstes qu’l ne l’avat jamas été lu-même, ses boyaux opéraent la transmutaton de cadavres de bêtes ou de plantes en matère vvante, séparant sans son ade l’nutle de l’utle. Ignis inerioris Naturae : ces sprales de boue brune savamment lovées, umant encore des cussons qu’elles avaent subes dans leur moule, ce pot d’argle plen d’un flude ammonaque et ntré étaent la preuve vsble et puante du traval parachevé dans des ofcnes où nous n’ntervenons pas. Il semblat à Zénon que le dégoût des rafnés et le rre sale des gnares étaent mons dus à ce que ces objets ousquent nos sens, qu’à notre horreur devant l’néluctable et secrète routne du corps. Descendu plus avant dans cette opaque nut ntéreure, l portat son attenton sur la stable armature des os cachés sous la char, qu dureraent plus que lu, et seraent dans quelques sècles les seuls témons attestant qu’l avat vécu. Il se résorbat à l’ntéreur de leur matère mnérale réractare à ses passons ou à ses émotons d’homme. Ramenant ensute sur lu comme un rdeau sa char
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provsore, l se consdérat étendu tout d’une pèce Cancel Download And Print sur le drap grosser du lt, tantôt dlatant volontarement l’mage qu’l se asat de cette île de ve qu état son domane, ce contnent mal exploré dont ses peds représentaent l’antpode, tantôt au contrare se rédusant à n’être qu’un pont dans l’mmense tout. Usant des recettes de Daraz, l essayat de are glsser sa conscence du cerveau à d’autres régons de son corps, à peu près comme on déplace dans une provnce élognée la captale d’un royaume. Il tentat çà et là de pro jeter je ter quelques quelque s lueurs dans ces ce s galeres galere s nores. Jads, avec Jean Myers, Myer s, l s’état s’é tat gaussé des dévots qu voent dans la machne humane la preuve patente d’un Deu Ouvrer, mas le respect des athées pour ce ortut che-d’œuvre qu’est à leurs veux la nature de l’homme lu parassat mantenant un auss beau sujet de rsée. Ce corps s rche en obscurs pouvors état déectble ; lu-même, en ses heures d’audace, l s’état prs à rêver d’ngéner un automate mons rudmentare que nous. Tournant et retournant sous son œl ntéreur le pentagone de nos sens, l avat osé postuler d’autres constructons, plus savantes, en qu se réracterat plus complètement l’unvers. La lste de neu portes de la percepton ouvertes dans l’opacté du corps, que Daraz lu avat autreos réctée, plant l’une après l’autre les dernères phalanges de ses dogts jaunâtres, lu avat paru d’abord une grossère tentatve de classficaton d’anatomste à dem barbare ; elle avat pourtant attré son attenton sur la précarté des chenaux dont nous dépendons pour connaître et pour vvre. Notre nsufsance état telle que c’en état assez de boucher deux pertus pour ermer le monde des sons, et deux autres voes d’accès pour que s’établît la nut. Qu’un bâllon pressât tros de ces ouvertures, s rapprochées rapprochées les le s unes des autres que la
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paume d’une man peut sans pene les couvrr, et Cancel Download And Print c’en état at de cet anmal dont la ve tent à un soue. Cette encombrante enveloppe qu’l lu allat laver, remplr, réchauer au con du eu ou sous la toson d’une bête morte, coucher le sor comme un enant ou comme un vellard mbécle, servat contre lu d’otage à la nature entère, et, ps encore, à la socété des hommes. C’est par cette char et par ce cur qu’l sourrat peut-être les ares de la torture ; c’est l’aablssement de ces ressorts qu l’empêcherat un jour de finr congrûment l’dée ébauchée. S’l tenat paros pour suspectes les opératons de son esprt, qu’l solat par commodté du reste de sa matère, c’état surtout parce que cet nfirme dépendat des servces du corps. Il état las de ce mélange de eu nstable et d’épasse argle Exitus rationalis : une tentaton s’orat, auss mpé reuse que le prurt charnel ; un dégoût, une vanté peut-être, le poussat à are le geste qu conclut tout. Il secouat la tête, gravement, comme devant un malade qu réclamerat trop tôt un remède ou une nourrture. Il serat toujours temps de pérr avec ce pesant support, ou de contnuer sans lu une ve nsubstantelle et mprévsble, pas nécessarement plus avorsée que celle que nous menons dans la char. Rgoureusement, presque à contrecœur, ce voyageur au bout d’une étape de plus de cnquante ans s’oblgeat pour la premère os de sa ve à retracer en esprt les chemns parcourus, dstnguant le ortut du délbéré ou du nécessare, s’eorçant de are le tr entre le peu qu semblat venr de so et ce qu appartenat à l’ndvs de sa condton d’homme. Ren n’état tout à at parel, n non plus tout à at contrare, à ce qu’l avat d’abord voulu ou préalablement pensé. L’erreur nassat tantôt de l’acton d’un
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élément dont l n’avat pas suspecté la présence, Cancel Download And Print tantôt d’une bévue dans la supputaton du temps, qu s’état avéré plus rétractle ou plus extensble que sur les horloges. A vngt ans, l s’état cru lbéré des routnes ou des préjugés qu paralysent nos actes et mettent à l’entendement des œllères, mas sa ve s’état passée ensute à acquérr sou par sou cette lberté dont l avat cru d’emblée posséder la somme. On n’est pas lbre tant qu’on désre, qu’on veut, qu’on crant, peut-être tant qu’on vt. Médecn, alchmste, artficer, astrologue, l avat porté bon gré mal gré la lvrée de son temps ; l avat lassé le sècle mposer à son ntellect certanes courbes. Par hane du aux, mas auss par l’eet d’une âcheuse âcreté d’humeur, l s’état engagé dans des querelles d’opnons où à un Ou nane répond un Non mbécle. Cet homme sur ses gardes s’état surprs à trouver plus odeux les crmes, plus sottes les supersttons des républques ou des prnces qu menaçaent sa ve ou brûlaent ses lvres ; conversement, l lu état arrvé de s’exagérer le mérte d’un benêt mtré, couronné ou taré, dont la aveur lu eût perms de passer des dées aux actes. L’enve d’agencer, de modfier ou de régenter au mons un segment de la nature des choses l’avat entraîné à la remorque des grands de ce monde, édfiant des châteaux de cartes ou chevauchant des umées. Il asat le compte de ses chmères. Au Grand Séral, l’amté du pussant et malheureux Ibrahm, le vzr de Sa Hautesse, lu avat at espérer mener à ben son plan d’assanssement des marécages aux alentours d’Andrnople ; l avat eu à cœur une réorme ratonnelle de l’hôptal des Janssares ; on avat commencé par ses sons à racheter çà et là les préceux manuscrts de médecns et d’astronomes grecs, acqus jads par les savants arabes, et qu, parm beaucoup de atras, contennent paros une vérté à redécouvrr. Il y
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avat eu surtout Cancel un certan Doscorde contenant des Download And Print ragments, plus ancens, de Crateüas, qu se trouvat appartenr au Ju Hamon, son collègue auprès du Sultan… Mas la sanglante chute d’Ibrahm avat entraîné avec elle tout cela, et le dégoût que lu avat causé cette vcsstude après tant d’autres lu avat at perdre jusqu’au souvenr de ces malencontreux débuts d’entreprse. Il avat haussé les épaules quand les pusllanmes bourgeos de Bâle s’étaent finalement reusés à lu accorder une chare, erayés par des bruts qu asaent de lu un sodomte et un sorcer. (Il avat été à ses heures l’un et l’autre, mas les mots ne correspondaent pas aux choses ; ls tradusent seulement l’opnon que le troupeau se at des choses.) Un goût de fiel lu état néanmons longtemps venu en bouche à la seule menton de ces gens-là. A Augsbourg, l avat amèrement regretté d’arrver trop tard pour obtenr des Fuggers cette place de médecn des mnes qu l’eût ms à même d’observer les malades des ouvrers travallant sous terre, soums aux pussantes nfluences métallques de Saturne et de Mercure. Il avat entrevu là des possbltés de cures et des combnasons nouïes. Et certes, l voyat ben que ces ambtons avaent été utles en véhculant pour ans dre son esprt d’un leu à un autre : meux vaut ne pas s’approcher trop tôt des mmobltés éternelles. Vues à dstance, ces agtatons lu asaent pourtant l’eet d’une tempête de sable. Il en allat de même du domane complqué des plasrs charnels. Ceux qu’l avat préérés étaent les plus secrets et les plus pérlleux, du mons en terre chrétenne, et à l’époque où le hasard l’avat at naître ; peut-être ne les avat-l recherchés que parce que cette occultaton et ces déenses en asaent un sauvage brs des coutumes, une plongée dans le monde qu boullonne sous-jacent au
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vsble et au perms. Ou peut-être ce chox tenat-l Cancel Download And Print à des appétences auss smples et auss nexplcables que celles qu’on a pour un rut plutôt que pour un autre : peu lu mportat. L’essentel état que ses débauches, comme ses ambtons, avaent somme toute été rares et brèves, comme s’l état dans sa nature d’épuser rapdement ce que les passons pouvaent apprendre ou donner. Cet étrange magma que les prédcateurs désgnent du mot, pont mal chos, de luxure (pusqu’l s’agt ben, semble-t-l, d’une luxurance de la char dépensant ses orces) défiat l’examen par la varété des substances qu le composent, et qu à leur tour se déont en d’autres components peu smples. L’amour y entrat, plus rarement qu’on ne le dsat peut-être, mas l’amour lumême n’état pas une noton pure. Ce monde dt bas communquat avec le plus fin dans la nature humane. De même que l’ambton la plus crasse état encore un rêve de l’esprt s’eorçant d’agencer ou de modfier les choses, la char en ses audaces asat sennes les curostés de l’esprt et antastquat comme l se plaît à le are ; le vn de la luxure trat sa orce des sucs de l’âme auss ben que de ceux du corps. Le désr d’une jeune char, l ne l’avat que trop souvent chmérquement assocé au van projet de se ormer un jour le parat dscple. D’autres sentments s’y étaent mêlés, qu’éprouvent avouablement tous les hommes. Fray Juan à Léon et Franços Rondelet à Montpeller avaent été des rères perdus jeunes ; l avat eu pour son valet Aleï et plus tard pour Gerhart à Lübeck la sollctude d’un père pour ses fils. Ces passons s prenantes lu avaent paru une part nalénable de sa lberté d’homme : mantenant, c’état sans elles qu’l se sentat lbre. Les mêmes réflexons s’applquaent aux quelques emmes avec lesquelles l avat entretenu une
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accontance charnelle. Il se soucat peu de remonter Cancel Download And Print aux causes de ces courts attachements, peut-être plus marquants que les autres, parce qu’l les avat mons spontanément ormés. Etat-ce soudan désr en présence des lnéaments partculers d’un corps, beson de ce proond repos que dspense paros la créature emelle, basse conormté à l’usage, ou encore, meux caché qu’une aecton ou qu’un vce, obscur souc d’essayer l’eet des ensegnements hermétques sur le couple parat qu reorme en so l’antque androgyne ? Meux valat dre tout bonnement que le hasard ces jours-là avat prs figure de emme. Trente ans plus tôt, en Alger, et par compasson pour sa jeunesse désolée, désolé e, l avat ache a cheté té une fille de bonne race récemment enlevée par des prates sur une plage aux envrons de Valence ; l comptat dès que are se pourrat la renvoyer en Espagne. Mas, dans l’étrote mason de la côte barbaresque, une ntmté s’état étable entre eux qu ressemblat ort à celle du marage. C’état la seule os qu’l avat eu aare à une verge : l gardat mons de leur premer commerce le souvenr d’une vctore que celu d’une créature qu’l avat allu rassurer et panser. Pendant quelques semanes, l avat eu au lt et à table cette belle un peu maussade qu avat pour lu la grattude qu’on a pour un sant d’églse. C’état sans regret qu’l l’avat confiée à un prêtre ranças sur le pont de s’embarquer pour Port-Vendres avec un pett groupe de capts des deux sexes rendus à leur amlle et à leur pays. La modque somme d’argent dont l l’avat pourvue lu aurat sans doute perms de regagner par acles étapes son Ganda natal… Plus tard, sous les murs de Bude, on lu avat alloué dans sa part de butn une jeune et rude Hongrose ; l l’avat acceptée pour ne pas se sngularser davantage dans un camp où son nom
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et son aspect le sgnalaent déjà, et où quoqu’l Cancel Download And Print pensât par-devers so des dogmes de l’Eglse, l avat à subr l’nérorté d’être un chréten. Il n’eût pas songé à abuser du drot de la guerre s elle n’avat été s avde de jouer son rôle de proe. Jamas, lu semblat-l, l n’avat ’avat meux goûté aux ruts d’Eve… Ce matn-là, l état entré dans la vlle à la sute des ofcers du Sultan. Peu de temps après son retour au camp, l apprt qu’un ordre état venu en son absence de se débarrasser des esclaves et des bens meubles qu encombraent l’armée ; des cadavres et des ballots d’étoe flottaent encore à la surace du fleuve… L’mage de ce corps ardent rerod s vte l’avat ensute dégoûté pour longtemps de toute allance charnelle. Pus, l état retourné dans les planes brûlantes peuplées de statues de sel et d’anges aux longues boucles… Dans le Nord, la dame de Frösö l’avat accuell noblement au retour de ses pérégrnatons à l’orée des contrées polares. Tout en elle état beau : sa haute talle, son tent clar, ses mans hables à bander les plaes et à essuyer les sueurs des fièvres, l’asance avec laquelle elle marchat sur le sol mou de la orêt, relevant tranqullement au gué des cours d’eau sa robe de gros drap sur ses jambes nues. Instrute dans l’art des sorcères lapones, elle l’avat emmené dans des huttes au bord des marécages où se pratquaent des umgatons et des bans magques accompagnés de chants… Le sor, dans son pett manor de Frösö, elle lu avat oert sur la table couverte d’une tole blanche le pan de segle et le sel, les baes et la vande séchée ; elle l’avat rejont dans le grand lt de la chambre haute avec une serene mpudeur d’épouse. Elle état veuve, et comptat se chosr pour mar à la SantMartn un ermer e rmer lbre du vosnage, vosnage, afin d’évter
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que le domaneCancel ne retombât sous la tutelle de ses Download And Print rères aînés. Il n’eût tenu qu’à lu d’exercer son art dans cette provnce grande comme un royaume, d’écrre ses tratés au con d’un poêle, de monter le sor sur la tourelle observer les astres… Néanmons, après hut ou dx de ces journées d’été qu ne sont là-bas qu’un seul jour sans ombre, l s’état rems en route pour Upsal, où en cette sason s’état transportée la cour, espérant encore durer près du monarque, et se are du jeune Erk ce dscple-ro qu est pour les phlosophes l’ultme chmère. Mas l’eort même d’évoquer ces personnes en exagérat l’mportance, et surasat celle de l’aventure charnelle. Le vsage d’Aleï ne réapparassat pas plus souvent que celu de soldats nconnus gelant sur les routes de Pologne, et que, manque de temps et de moyens, l n’avat pu essayer de sauver. La pette bourgeose adultère de Pont-Sant-Esprt lu avat répugné avec la rondeur de son ventre dssmulé sous des ronces de gupure, ses cheveux rsottants autour de ses trats trés et jauns, ses pteux et grossers mensonges. Il s’état rrté des œllades qu’elle lu décochat du ond de son angosse, ne connassant pas d’autres moyens de subjuguer un homme. Et pourtant, l avat rsqué pour elle son bon renom de médecn ; la hâte d’agr vte avant le retour du mar jaloux, le msérable reste de la conjoncton humane qu’l avat allu enterrer sous un olver du jardn, l’achat à prx d’or du slence des servantes qu avaent vellé Madame et lavé les draps tachés de sang, tout cela avat créé entre lu et cette malheureuse une ntmté de complces, et l l’avat meux connue qu’un amant une quelconque amante. La dame de Frösö avat été entèrement bénéfique, mas pas plus que cette boulangère au tent grêlé qu l’avat secouru un sor où l s’état
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asss à Salzbourg sous l’auvent de sa boutque. Cancel Download And Print C’état après sa ute d’Innsbruck ; l état recru et trans, ayant orcé les étapes par de mauvas chemns sous la nege. Elle avat examné à travers le volet de sa devanture cet homme rencogné dehors sur le pett banc de perre, et, le prenant sans doute pour un mendant, lu avat tendu une mche encore chaude. Pus, prudemment, elle avat renoncé le crochet qu assujettssat les vantaux. Il n’gnorat pas que cette méfiante benatrce eût auss ben pu, le cas échéant, lu jeter une brque ou une pelle. Elle n’en état pas mons un des vsages de la béngnté. L’amté ou l’averson comptaent d’alleurs finalement auss peu que les blandces charnelles. Des êtres qu avaent accompagné ou traversé sa ve, sans ren perdre de leurs partculartés ben dstnctes, se conondaent dans l’anonymat de la dstance, comme les arbres de la orêt qu, vus de lon, semblent rentrer les uns dans les autres. Le chanone Campanus se mélangeat avec Remer l’alchmste, dont l eût pourtant abhorré les doctrnes, et même avec le déunt Jean Myers, qu, s’l vvat encore, aurat également octante ans. Le cousn Henr dans sa peau de bue et Ibrahm en catan, le prnce Erk et ce Laurent l’Assassn avec lequel l avat jads passé à Lyon quelques sorées mémorables n’étaent plus que des aces dérentes d’un même solde, qu état l’homme. Les attrbuts du sexe comptaent mons que ne l’eût supposé la rason ou la dérason du désr : la dame aurat pu être un compagnon ; Gerhart avat eu des délcatesses de fille. Il en état des créatures abordées, pus quttées, au cours de l’exstence comme de ces figures spectrales, jamas vues deux os, mas d’une spécficté et d’un rele presque terrbles, qu se détachent sous la nut des paupères à l’heure qu précède le sommel et le songe, et tantôt passent et uent à la vtesse d’un
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météore, et tantôt se résorbent en elles-mêmes sous Cancel Download And Print la fixté du regard nterne. Des los mathématques plus complexes et plus nconnues encore que celles de l’esprt ou des sens présdaent à ce va-et-vent de antômes. Mas le contrare auss état vra. Les événements étaent en réalté des ponts fixes, ben qu’on eût lassé derrère so ceux du passé, et qu’un tournant cachât ceux de l’avenr, et l en allat de même des personnes. Le souvenr n’état qu’un regard posé de temps en temps sur des êtres devenus ntéreurs, mas qu ne dépendaent pas de la mémore pour contnuer d’exster. A Léon, où Don Blas de Vela lu avat at endosser temporarement l’habt de novce jacobte, pour être plus à même de s’en are seconder dans ses travaux d’alchme, un mone de son âge, Fray Juan, avat été son compagnon de pallasse dans ce couvent encombré où les nouveaux venus se partageaent à deux et à tros la botte de on et la couverture. Zénon état arrvé secoué d’une toux hargneuse entre ces murs où s’nsnuaent le vent et la nege. Fray Juan avat sogné son camarade de son meux, volant pour lu des boullons au rère cusner. Un amor perectissimus avat exsté quelque temps entre les deux jeunes hommes, mas les blasphèmes et les négatons de Zénon étaent comme s’ls n’étaent pas pour ce cœur tendre emprent d’une dévoton spécale à l’Apôtre BenAmé. Quand Don Blas chassé par ses mones qu voyaent en lu un dangereux sorcer cabbalste descendt le chemn en pente du monastère, hurlant des malédctons, Fray Juan avat chos d’accompagner dans sa déchéance le vel homme dont l n’état pourtant n le amler n l’adepte. Pour Zénon, ce coup d’Etat monastque avat été au contrare la chance de rompre à jamas avec une proesson dégoûtante, et d’aller sous l’habt séculer séculer
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s’nstrure alleurs de scences mons engluées dans la Cancel Download And Print matère des songes. Que son maître eût ou non observé des rtes judaïques lassat rod le jeune clerc pour qu, selon l’audaceuse ormule transmse sous le manteau par des génératons d’écolers, la Lo chrétenne, la Lo juve et la Lo mahométane n’étaent autre chose que les Tros Impostures. Don Blas état sans doute mort sur la route ou dans les cachots de quelque ofcalté ; l avat allu trente-cnq ans pour que son ancen élève reconnût dans sa ole une nexplcable sagesse. Quant à Fray Juan, s’l exstat encore quel- que part, l aurat bentôt soxante ans. Leur mage avat été volontarement obltérée avec celle de ces quelques mos passés sous le roc et la coule. Et cependant, Fray Juan et Don Blas penaent encore sur le chemn perreux, sous l’agre vent d’avrl, et l n’état pas nécessare qu’on se souvînt pour qu’ls ussent là. Franços Rondelet marchant dans la garrgue, élaborant avec son condscple des projets d’avenr, coexstat avec Franços couché nu sur la table de marbre du théâtre unverstare, et le docteur Rondelet explquant l’artculaton du bras semblat plutôt qu’à ses élèves s’adresser au mort lu-même, et argumenter à travers le temps avec un Zénon vell. Unus ego et multi in me. Ren ne modfiat ces statues fixées à leur poste, sses pour toujours sur une surace étale qu état peutêtre l’éternté. Le temps n’état qu’une pste qu les relat entre elles. Un len exstat : les servces qu’on n’avat pas rendus à l’un, on les avat rendus à l’autre : on n’avat pas secouru Don Blas, mas on avat porté secours à Gênes à Joseph Ha-Cohen, qu n’en avat pas mons contnué à vous consdérer comme un chen de chréten. Ren ne finssat : les maîtres ou les conrères dont l avat reçu une dée ou grâce à qu l s’en état ormé une
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autre, contrare,Cancelpoursuvaent sourdement leur Download And Print naccommodable controverse, chacun asss dans sa concepton du monde comme un magcen à l’ntéreur de son cercle. Daraz qu se cherchat un deu plus vosn de so que sa vene jugulare dscuterat jusqu’au bout avec Don Blas pour qu Deu é tat l’Un-non manesté, et Jean Myers rrat de ce mot Deu de son rre à bouche ermée. Depus près d’un dem-sècle, l se servat de son esprt comme d’un con pour élargr de son meux les nterstces du mur qu de toute part nous confine. Les alles grandssaent, ou plutôt le mur, semblat-l, perdat de lu-même sa soldté sans pour autant cesser d’être opaque, comme s’l s’agssat d’une muralle de umée au leu d’une muralle de perre. Les objets cessaent de jouer leur rôle d’accessores utles. Comme un matelas son crn, ls lassaent passer leur substance. Une orêt remplssat la chambre. Cet escabeau, mesuré sur la dstance qu sépare du sol le cul d’un homme asss, cette table qu sert à écrre ou à manger, cette porte qu ouvre un cube d’ar entouré de closons sur un cube d’ar vosn, perdaent ces rasons d’être qu’un artsan leur avat données pour n’être plus que des troncs ou des branches écorchées comme des sants Barthélemy de tableaux d’églse, chargés de eulles spectrales et d’oseaux nvsbles, grnçant encore de tempêtes depus longtemps calmées, et où le rabot avat lassé çà et là le grumeau de la sève. Cette couverture et cette déroque pendue à un clou sentaent le sunt, le lat, et le sang. Ces chaussures qu bâllaent au bord du lt avaent bougé au soue soue d’un d’un bœu étendu sur l’herbe, et un porc sagné à blanc pallat dans la grasse dont le saveter les avat endutes. La mort volente état partout, comme dans une bouchere ou dans un
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enclos patbulare. Une oe égorgée crallat dans la Cancel Download And Print plume qu allat servr à tracer sur de veux chons des dées qu’on croyat dgnes de durer tou jours. Tout é tat autre : cette ce tte chemse que blanchssaent pour lu les sœurs Bernardnes état un champ de ln plus bleu que le cel, et auss un tas de fibres roussant au ond d’un canal. Ces florns dans sa poche à l’efge du déunt empereur Charles avaent été échangés, donnés et volés, pesés et rognés mlle os avant que pour un moment l les crût sens, mas ces vrevoltes entre des mans avares ou prodgues étaent brèves comparées à l’nerte durée du métal lu-même, nstllé dans les venes de la terre avant qu’Adam eût vécu. Les murs de brque se résolvaent en boue qu’ls redevendraent un jour. L’annexe du couvent des Cordelers où l se trouvat rasonnablement au chaud et au couvert cessat d’être une mason, ce leu géométrque de l’homme, abr solde pour l’esprt encore plus que pour le corps. Elle n’état tout au plus qu’une hutte dans la orêt, une tente au bord d’une route, un lambeau d’étoe jeté entre l’nfinté et nous. Les tules lassaent passer la brume et les ncompréhensbles astres. Des morts par centanes l’occupaent et des vvants auss perdus que des morts : des douzanes de mans avaent posé ces carreaux, moulé ces brques et scé ces planches, cloué, cousu ou collé : l eût été auss dfcle de retrouver l’ouvrer encore ben vvant qu avat tssé ce pan de bure que d’évoquer un trépassé. Des gens avaent logé là comme un ver dans son cocon, et y logeraent après lu. Ben cachés, snon tout à at nvsbles, un rat derrère une closon, un nsecte taraudant du dedans une solve malade voyaent autrement que lu les plens et les vdes qu’l appelat sa chambre… Il levat les yeux. Au plaond, une poutre remployée portat un mllésme :
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1491. A l’époque où cec avat été gravé pour fixer Cancel Download And Print une date qu n’mportat plus à personne, l n’exstat pas encore, n la emme dont l état sort. Il retournat ces chres, comme par jeu : l’an 1941 après l’Incarnaton du Chrst. Il tentat d’magner cette année sans rapport avec sa propre exstence, et dont on ne savat qu’une chose, c’est qu’elle serat. Il marchat sur sa propre poussère. Mas l en état du temps comme du gran du chêne : l ne sentat pas ces dates tallées de man d’homme. La terre tournat gnorante du calendrer julen ou de l’ère chrétenne, ormant son cercle sans commencement n fin comme un anneau lsse. Zénon se rappela qu’on état chez le Turc en l’an 973 de l’Hégre, mas Daraz avat compté en secret d’après l’ère de Khosroès. Passant de l’an au jour, l songea qu’en ce moment le solel nassat sur les tots de Péra. La chambre donnat de la bande ; les sangles craent comme des amarres ; le lt glssat d’occdent en orent à l’nverse du mouvement apparent du cel. La sécurté de reposer stablement sur un con du sol belgque état une erreur dernère ; le pont de l’espace où l se trouvat contendrat une heure plus tard la mer et ses vagues, un peu plus tard encore les Amérques et le contnent d’Ase. Ces régons où l n’rat pas se superposaent dans l’abîme à l’hospce de SantCosme. Zénon lu-même se dsspat comme une cendre au vent. SOLVE ET COAGULA… Il savat ce que sgnfiat
cette rupture des dées, cette alle au sen des choses. Jeune Jeune clerc, l avat lu dans Ncolas Flamel la descrpton de l’opus nigrum, de cet essa de dssoluton et de calcnaton des ormes qu est la part la plus dfcle du Grand Œuvre. Don Blas de Vela lu avat souvent solennellement afrmé que l’opératon
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aurat leu d’elle-même, qu’on le voulût ou non, Cancel Download And Print quand les condtons s’en trouveraent remples. Le clerc avat avdement médté ces adages qu lu semblaent trés d’on ne sat quel snstre et peutêtre vérdque grmore. Cette séparaton alchmque, s dangereuse que les phlosophes hermétques n’en parlaent qu’à mots couverts, s ardue que de longues ves s’étaent usées en van à l’obtenr, l l’avat conondue jads avec une rébellon acle. Pus, rejetant ce atras de rêvasseres auss antques que l’lluson humane, ne retenant de ses maîtres alchmstes que quelques recettes pragmatques, l avat chos de dssoudre et de coaguler la matère dans le sens d’une expérmentaton ate avec le corps des choses. Mantenant, les deux branches de la parabole se rejognaent ; la mors philosophica s’état accomple : l’opérateur brûlé par les acdes de la recherche état à la os sujet et objet, alambcragle et, au ond du réceptable, précpté nor. L’expérence qu’on avat cru pouvor confiner à l’ofcne s’état étendue à tout. S’en suvat-l que les phases subséquentes de l’aventure alchmque ussent autre chose que des songes, et qu’un jour l connaîtrat auss la pureté ascétque de l’Œuvre au Blanc, pus le tromphe conjugué de l’esprt et des sens qu caractérse l’Œuvre au Rouge ? Du ond de la lézarde nassat une Chmère. Il dsat Ou par audace, comme autreos par audace l avat dt Non. Il s’arrêtat soudan, trant volemment sur ses propres rênes. La premère phase de l’Œuvre avat demandé toute sa ve. Le temps et les orces manquaent pour aller plus lon, à supposer qu’l y eût une route, et que par cette route un homme pût passer. Ou ce pourrssement des dées, cette mort des nstncts, ce broement des ormes presque nsupportables à la nature humane seraent rapdement dement suvs suvs par la mort mor t vértable, et l serat
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cureux de vor Cancel par quelle voe, ou l’esprt revenu Download And Print des domanes du vertge reprendrat ses routnes habtuelles, mun seulement de acultés plus lbres et comme nettoyées. Il serat beau d’en vor les eets. Il commençat à les vor. Les besognes du dspensare le lassaent sans atgue : sa man et son coup d’œl n’avaent jamas été plus sûrs. Ses dépenallés qu attendaent patemment chaque matn l’ouverture de l’hospce étaent sognés avec autant d’art qu’autreos les grands de ce monde. La complète absence d’ambton ou de crante lu permettat d’applquer plus lbrement ses méthodes, et presque toujours avec de bons résultats : cette applcaton totale excluat même la pté. Sa consttuton naturellement sèche et nerveuse semblat ortfiée par les approches de l’âge ; l sourat mons du rod ; l semblat nsensble au gel de l’hver et à l’humde été ; un rhumatsme acqus en Pologne ne le tourmentat plus. Il avat cessé de se ressentr des sutes d’une fièvre terce ramenée autreos d’Orent. II mangeat avec ndérence ce que l’un des rères que le preur avat attachés à l’hospce lu apportat du réectore, ou chosssat à l’auberge des mets à bas prx. La vande, le sang, les entralles, tout ce qu a palpté et vécu lu répugnaent à cette époque de son exstence, car la bête meurt à douleur comme l’homme, et l u déplasat de dgérer des agones. Depus l’époque où l avat égorgé lu-même un porc chez un boucher de Montpeller, pour vérfier s’l y avat ou non coïncdence entre la pulsaton de l’artère et la systole du cœur, l avat cessé de trouver utle d’employer deux termes, dérents pour désgner la bête qu’on abat et l’homme qu’on tue, l’anmal qu crève et l’homme qu qu meurt. Ses préérences préé rences en
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matère d’alments allaent au pan, à la bère, aux Cancel Download And Print boulles qu gardent quelque chose de la saveur épasse de la terre, aux aqueuses verdures, aux ruts raraîchssants, aux souterranes et sapdes racnes. L’aubergste et le rère cusner s’émervellaent de ses abstnences, dont l’ntenton leur parassat peuse. Paros, cependant, l s’applquat à manger pensvement un morceau de trpe ou un bout de oe sagnant, pour se prouver que son reus venat de l’esprt et non d’un caprce du goût. Son équpage avat toujours été néglgé : par dstracton ou par dédan, l ne le renouvelat plus. En matère érotque, l état toujours ce médecn qu avat jads recommandé à ses malades les réconorts de l’amour, comme en d’autres occasons on leur recommande du vn. Ces brûlants mystères lu semblaent encore pour nombre d’entre nous la seule accesson à ce royaume gné dont nous sommes peut-être d’nfimes étncelles, mas cette remontée sublme état brève, et l doutat à part so qu’un acte s sujet aux routnes de la matère, s dépendant des outls de la génératon charnelle ne ût pas pour le phlosophe une de ces expérences qu’on se dot de are pour ensute y renoncer. La chasteté, où l avat vu naguère une superstton à combattre, lu semblat mantenant un des vsages de sa sérénté : l goûtat cette rode connassance qu’on a des êtres quand on ne les désre plus. Une os pourtant, sédut par une rencontre, l s’adonna de nouveau à ces jeux, et s’étonna de ses propres orces. Il s’emporta un jour contre un gueux de mone qu vendat en vlle les onguents du dspensare, mas sa colère état plus délbérée qu’nstnctve. Il se passat même une bouée de vanté à la sute d’une opératon ben ate, comme on lasse un chen s’ébrouer sur l’herbe.
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Un matn, au Cancel cours d’une de ses promenades d’herDownload And Print borste, une occurrence nsgnfiante et presque grotesque le fit réfléchr ; elle eut sur lu un eet comparable à celu d’une révélaton llumnant pour un dévot quelque sant mystère. Il état sort de la vlle au pont du jour pour se rendre à l’orée des dunes, emportant avec lu une loupe qu’l avat at construre sur ses spécficatons par un lunetter de Bruges, et qu lu servat à examner de près les radcelles et les granes des plantes ramassées. Vers le md, l s’endormt couché à plat ventre dans un creux du sable, la tête contre le bras, sa loupe tombée de sa man reposant sous lu sur une toue sèche. Au rével, l crut apercevor contre son vsage une bête extraordnarement moble, nsecte ou mollusque qu bougeat dans l’ombre. Sa orme état sphérque ; sa parte centrale, d’un nor brllant et humde, s’entourat d’une zone d’un blanc rosâtre ou terne ; des pols rangés crossaent sur la pérphére, ssus d’une sorte de molle carapace brune strée de crevasses et bossuée de boursouflures. Une ve presque erayante habtat cette chose ragle. En mons d’un nstant, avant même que sa vson pût se ormuler en pensée, l reconnut que ce qu’l voyat n’état autre que son œl reflété et gross par la loupe, derrère laquelle l’herbe et le sable ormaent un tan comme celu d’un mror. Il se redressa tout songeur. Il s’état vu voyant ; échappant aux routnes des perspectves habtuelles, l avat regardé de tout près l’organe pett et énorme, proche et pourtant étranger, v mas vulnérable, doué d’mparate et pourtant prodgeuse pussance, dont l dépendat pour vor l’unvers. Il n’y avat ren de théorque à trer de cette vson qu accrut bzarrement sa connassance de so, et en même temps sa noton des multples objets qu composent ce so. Comme l’œl de Deu dans certanes cer tanes estampes, cet œl œl
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human devenat un symbole. L’mportant état de Cancel Download And Print recuellr le peu qu’l filtrerat du monde avant qu’l ît nut, d’en d’en contrôler le témognage témognage et, s’l se pouvat, d’en rectfier les erreurs. En un sens, l’œl contrebalançat l’abîme. II sortat du défilé nor. A la vérté, l en état déjà sort plus d’une os. Il en sortrat encore. Les tratés consacrés à l’aventure de l’esprt se trompaent en assgnant à celle-c des phases successves : toutes au contrare s’entremêlaent ; tout état sujet à des redtes et à des répéttons nfines. La quête de l’esprt tournat en cercle. A Bâle jads, et en ben d’autres leux, l avat passé par la même nut. Les mêmes vértés avaent été réapprses pluseurs os. Mas l’expérence état cumulatve : le pas à la longue se asat plus sûr ; l’œl voyat plus lon dans certanes ténèbres ; l’esprt constatat au mons certanes los. Comme l arrve à un homme qu gravt, ou peut-être descend, la pente d’une montagne, l s’élevat ou s’enonçat sur place ; tout au plus, à chaque lacet, le même abîme s’ouvrat tantôt à drote et tantôt à gauche. La montée n’état mesurable qu’à l’ar devenu plus rare et aux nouvelles cmes pontant derrère celles qu avaent semblé barrer l’horzon. Mas la noton d’ascenson ou de descente état ausse : des astres brllaent en bas comme en haut ; l n’état pas plus au ond du goure qu’l n’état au centre. L’abîme état à la os par-delà la sphère céleste et à l’ntéreur de la voûte osseuse. Tout semblat avor leu au ond d’une sére nfine de courbes ermées. Il s’état rems à écrre, mas sans projeter de rendre ses productons publques. Entre tous les tratés de la médecne ancenne, l avat toujours
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admré le lvre Cancel iii desDownload d’Hppocrate, Epidémiques And Print pour l’exacte descrpton de cas clnques avec leurs symptômes, leur progrès jour par jour, et leur ssue. Il tenat un regstre analogue en ce qu concernat les malades tratés à l’hospce de Sant-Cosme. Tel médecn vvant après lu saurat peut-être trer part de ce journal rédgé par un pratcen exerçant en Flandre du temps de Sa Catholque Majesté Phlppe II. Un projet plus hard l’occupa quelque temps, celu d’un Liber Singularis, où l eût mnuteusement consgné tout ce qu’l savat d’un homme, qu état so-même, sa complexon, son comportement, ses actes avoués ou secrets, ortuts ou voulus, ses pensées, et auss ses songes. Rédusant ce plan trop vaste, l se restregnt à une seule année vécue par cet homme, pus à une seule journée : la matère mmense lu échappat encore, et l s’aperçut bentôt que de tous ses passe-temps celu-là état le plus dangereux. Il y renonça. Paros, pour se dstrare, l mettat par écrt de prétendues prophétes qu satrsaent en réalté les erreurs et les monstruostés de son temps en leur donnant l’aspect nusté d’une nouveauté ou d’un prodge. A l’occason, et en guse de dvertssement, l communquat à l’organste de Sant-Donaten, dont l s’état at un am depus qu’l avat opéré sa bonne emme d’une tumeur béngne, quelques-unes de ces bzarres éngmes. L’organste et sa moté se creusaent la tête à en pénétrer le sens, comme de devnettes, pus en raent sans y vor malce. Un objet qu l’occupa durant ces années-là ut un plant de tomate, rareté botanque ssue d’une bouture qu’l avat à grand-pene obtenue d’un spécmen unque apporté du Nouveau Monde. Cette préceuse plante qu’l gardat dans son ofcne lu nspra de se remettre à ses ancennes études sur le mouvement de la sève : à l’ade d’un couvercle
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empêchant l’évaporaton de l’eau versée sur la terre Cancel Download And Print du pot, et en pratquant chaque matn de sogneuses pesées, l parvnt à mesurer comben d’onces lqudes étaent chaque jour absorbées par les pouvors d’mbbton de la plante ; l tenta plus tard de calculer algébrquement jusqu’à quelle hauteur cette aculté pouvat élever les fludes à l’ntéreur d’un tronc et d’une tge. Il correspondat à ce sujet avec le savant mathématcen qu l’avat hébergé à Louvan quelque sx ans plus tôt. Ils échangeaent des ormules. Zénon attendat mpatemment ses réponses. Il commençat auss à penser à de nouveaux voyages.
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LA MALADIE DU PRIEUR
UN lund de ma, le jour de la ête du Sant-Sang, Zénon expédat comme d’habtude son repas à l’auberge du Grand Cer, asss seul dans son usuel con sombre. Les tables et les bancs placés près des crosées ouvrant sur la rue étaent au contrare partculèrement achalandés, car on pouvat de là vor défiler la processon. Une maquerelle qu tenat à Bruges une mason célèbre, et qu’à cause de sa corpulence on avat surnommée la Ctroulle, occupat l’une de ces tables avec un pett homme blaard qu passat pour son fils et deux belles de l’établssement. Zénon connassat la Ctroulle par les récrmnatons d’une fille phtsque qu venat paros lu demander une prescrpton pour sa toux. Cette créature n’arrêtat pas de parler des vlenes de la patronne qu la grugeat et lu volat son lnge fin. Un pett groupe de gardes-wallonnes qu venaent de are la hae au seul de l’églse entrèrent pour manger. La table de la Ctroulle plut à l’ofcer, qu ordonna à ces gens-là de décamper. Le fils et les
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putans ne se le firent pas dre deux os, mas la Cancel Download And Print Ctroulle avat le cœur fier et reusa de bouger. Trallée par un garde qu s’eorçat de la are lever, elle s’accrocha à la table, renversant les plats ; un souet de l’ofcer marqua d’une trace lvde sa grosse figure jaune. Paulant, mordant, s’agrppant aux bancs et au montant de la porte, elle se lassa traîner et pousser dehors par les gardes ; l’un d’eux, pour are rre, l’agullonnat plasamment du bout de son estoc. L’ofcer nstallé dans la place conquse donnat dédagneusement des ordres à la servante qu essuyat le plancher. Personne ne fit mne de se lever. Quelques-uns rcanaent par lâche complasance, mas la plupart au contrare détournaent les yeux ou maugréaent, le nez dans l’assette. Zénon vt la scène avec une nausée de dégoût : la Ctroulle état décrée de tous ; à supposer qu’on pût lutter contre la brutalté soldatesque, l’occurrence état mal chose, et le déenseur de la grosse emme n’eût recuell que des quolbets. On sut plus tard que la maquerelle avat été ensute ouettée pour attente à la pax publque et renvoyée au logs. Hut jours plus tard, elle asat comme à l’ordnare les honneurs de son bourdeau, montrant à qu le voulat ses ccatrces. Quand Zénon alla rendre ses devors au preur qu gardat la chambre, las d’avor suv à ped la processon, l le trouva au courant de l’ncdent. Il lu conta ce qu’l avat vu de ses yeux. Le relgeux soupra, reposant devant so sa tasse de tsane. — Cette Ce tte emme est es t le rebut de son sexe, fit-l, et je ne vous blâme pont d’être resté co. Mas eussonsnous protesté contre cette ndgnté s’l se ût ag d’une sante ? Cette Ctroulle est ce qu’elle est, et cependant elle avat aujourd’hu la justce pour elle, autant dre Deu et ses anges.
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— Deu e t ses anges ne sont pas ntervenus nter venus en Cancel Download And Print sa aveur, aveur, dt évasvement é vasvement le médecn. — Lon de mo de mettre me ttre en doute les sants prodges de l’Ecrture, dt le relgeux avec quelque chaleur, mas de nos jours, mon am (et j’a passé soxante ans), je n’a jamas vu que Deu ntervînt drectement dans nos aares terrestres. Deu se délègue. Il n’agt qu’à travers nous pauvres hommes. Il alla chercher dans le tror d’un cabnet deux eullets d’une écrture serrée et les remt au docteur Théus. — Voye Voyez, z, dt-l. Mon filleul, Monseur de Wthem, un patrote, me tent au at d’atroctés que nous ne connassons autrement que trop tard, quand l’émoton en est déjà morte, ou tout de sute, mas édulcorées de mensonges. Notre magnaton est ben able, monseur mon médecn. Nous nous nquétons, et avec rason, d’une maquerelle maltratée, parce que ces sévces se sont perpétrés sous nos yeux, mas des monstruostés qu se commettent à dx leues d’c ne m’empêchent pas de finr cette nuson de mauve. — L’magnaton ’magna ton de Votre Révérence Révé rence est es t assez orte pour are trembler ses mans et répandre ce reste de tsane, observa Sébasten Théus. Le preur épongea de son mouchor sa robe de lane grse. — Près de tros cents hommes e t emmes déclarés rebelles à Deu et au prnce ont été exécutés à Armcntères, murmura-t-l comme à contre-cœur. Contnuez à lre, mon am. — Les pauvres pauvre s gens que je sogne savent savent déjà les sutes de l’échauourée d’Armentères, dt Zénon en rendant sa lettre au preur. Quant aux autres abus dont ces eulles sont plenes, c’est le ondement des conversatons du marché et des tavernes. Ces nouvelles-là volent à ras de terre. Vos bourgeos et
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vos notables dans leurs bonnes masons caleutrées Cancel Download And Print n’entendent tout au a u plus qu’une vague va gue rumeur. — S at, dt le preur avec une colère colè re trste. Her, après la messe, me trouvant sur le parvs NotreDame avec mes conrères du clergé, j’a osé toucher mot des aares publques. Aucun de ces santes gens qu n’approuvât les fins, snon les moyens des trbunaux d’excepton, ou du mons ne protestât que mollement contre leur sanglant excès. Je mets à part le curé de Sant-Glles : l déclare que nous sommes ben capables de brûler nos hérétques sans que l’étranger venne nous ensegner comment. — Il est es t dans les bonnes tradtons, dt Sébasten Théus avec avec un sourre. — Sus-je mons ervent er vent chréten chré ten et peux catholcathol que ? s’écra le preur. On ne vogue pas sa ve durant sur un beau navre sans détester les rats qu rongent ses œuvres vves. Mas le eu, le er et la osse ne servent qu’à endurcr ceux qu les nflgent, ceux qu y courent comme à un théâtre, et ceux qu les sourent. Des opnâtres ont ans figure de martyrs. On se moque, monseur mon médecn. Le tyran s’arrange pour décmer nos patrotes sous couleur de venger Deu. — Votre Révérence Révé rence approuverat ces exécutons s elle les jugeat efcaces à rétablr l’unté de l’Eglse ? — Ne me tentez tente z pas, mon am. Je sas seulement que notre père Franços, qu mourut en tâchant d’apaser des dscordes cvles, eût approuvé nos gentlshommes flamands de travaller à un comproms. — Ces mêmes segneurs ont cru pouvor demander au Ro l’arrachement des placards publant l’anathème prononcé contre l’hérétque au Concle de Trente, dt dubtatvement le médecn. — Pourquo non ? s’écra le preur. preur. Ces placards gardés par la troupe nsultent à nos lbertés cvques.
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Tout mécontentCancelest Download étquetéAndprotestant. Deu Print me pardonne ! Ils auront suspecté cette maquerelle elle-même d’nclnatons évangélques… Quant au Concle, vous savez comme mo de quel pods ont pesé sur ses délbératons les dscrètes volontés de nos prnces. L’empereur Charles s’nquétat avant tout de l’unté de l’Empre, ce qu est naturel. Le ro Phlppe pense à la suprémate des Espagnes. Hélas ! S je ne m’étas pas aperçu de bonne heure que toute poltque de cour n’est que ruse et contreruse, abus de mots et abus de orce, je n’auras peutêtre pas trouvé en mo assez de pété pour échanger le monde contre le servce de Notre-Segneur. — Votre Révérence Révé rence aura sans doute éprouvé de grands revers, dt le docteur Théus. — Que non ! fit le preur. J’a été courtsan cour tsan ben vu par le maître, négocateur plus heureux que mes ables talents ne le mértaent, mar ortuné d’une peuse et bonne emme. J’aura été prvlégé dans ce monde plen de maux. Son ront s’humectat de sueur, ce qu parut au médecn symptomatque de ablesse. Il tourna vers le docteur Théus un vsage préoccupé : — Ne dsez-vous dsez -vous pas que les pettes pet tes gens que vous sognez suvent avec sympathe les mouvements de la prétendue Réorme ? — Je n’a ren dt n remarqué rema rqué de parel, fit précautonneusement Sébasten. Votre Révérence n’gnore pas que ceux qu entretennent des opnons compromettantes savent d’ordnare garder le slence, ajouta-t-l avec une ponte d’rone. Il est vra que la rugalté évangélque a des attrats pour certans de ces pauvres. Mas la plupart sont bons catholques, ne serat-ce que par habtude. — Par habtude, répéta répé ta douloureusement le relgeux.
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— Pour mo, dt d’un ton rod le docteur Théus, chosssant de s’étendre pour lasser aux émotons du preur le temps de se calmer, ce que je vos surtout dans tout cec, c’est l’éternelle conuson des aares humanes. Le tyran at horreur aux cœurs ben placés, mas nul ne ne que Sa Majesté ne règne légtmement sur les Pays-Bas, qu’elle tent d’une aïeule qu ut l’hértère et l’dole des Flandres. Je n’examne pas s’l est juste qu’on lègue un peuple comme une crédence ; nos los sont ans. Les gentlshommes qu par démagoge prennent le nom de Gueux sont des Janus, traîtres pour le Ro dont ls sont les vassaux, héros et patrotes pour la oule. D’autre part, les brgues entre prnces et les dssensons dans les vlles sont telles que ben des esprts crconspects préèrent encore les exactons de l’étranger au désordre qu suvrat sa déconfiture. L’Espagnol persécute sauvagement les so-dsant réormés, mas la majorté des patrotes sont bons catholques. Ces réormés s’enorguellssent de l’austérté de leurs mœurs, mas leur che en Flandre, Monseur de Bréderode, est un coqun débauché. La Gouvernante, qu tent à garder sa place, promet la suppresson des trbunaux d’Inquston, et annonce du même coup l’établssement d’autres chambres de justce qu enverront les hérétques héré tques au bûcher. L’Eglse nsste chartablement pour que ceux qu se conessent in extremis ne soent soums qu’à la mort smple, poussant de la sorte des malheureux au parjure et au mésusage des sacrements. Les évangélstes, de leur côté, égorgent quand ls le peuvent les msérables restes des anabaptstes. L’Etat ecclésastque de Lège qu, par définton, est pour la Sante Eglse, s’enrcht à ournr ouvertement des armes aux troupes royales, et subreptcement aux Gueux. Chacun déteste les soldats à la pae de l’étranger, et d’autant plus que, cette pae étant able,
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ls se rattrapent sur le dos des ctoyens, mas les bandes Cancel Download And Print de brgands qu parcourent les campagnes à la aveur des troubles ont réclamer aux bourgeos la protecton des hallebardes et des pques. Ces bourgeos jaloux de leurs ranchses boudent par prncpe la noblesse et la monarche, mas les hérétques se recrutent pour la plupart dans le bas peuple, et tout bourgeos hat les pauvres. Dans ce tntoun de paroles, ce racas d’armes, et paros ce bon brut d’écus, ce qu’on entend encore le mons, ce sont les crs de ceux qu’on rompt ou qu’on tenalle. Tel est le monde, monseur le preur. preur. — Durant la grand-messe, dt mélancolquement le supéreur, j’a pré (c’est l’usage) pour la prospérté de la Gouvernante et de Sa Majesté. Pour la Gouvernante, passe encore : Madame est une assez bonne emme qu cherche des accommodements entre la hache et le bllot. Mas dos-je prer pour Hérode ? Faut-l demander à Deu la prospérté du cardnal de Granvelle dans sa retrate, qu d’alleurs est postche, et d’où l contnue à nous harceler ? La relgon nous oblge à respecter les autortés consttuées, et je n’y contreds pas. Mas l’autorté se délègue, elle auss, et plus on descend plus elle prend des vsages grossers et bas où se marque presque grotesquement la trace de nos crmes. Dos-je y aller de ma prère pour le salut des gardeswallonnes ? — Votre Révérence Révé rence peut toujours prer Deu d’éclarer ceux qu nous gouvernent, dt le médecn. — J’a surtout sur tout beson qu’l m’éclare mo-même, fit le Cordeler avec componcton. Zénon tourna l’entreten sur les besons et les débours de l’hospce, cette conversaton au sujet des aares publques agtant par trop le relgeux. Au moment de prendre congé, touteos, le preur le retnt, lu asant sgne de reermer par prudence la porte de la cellule :
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— Je n’a pas beson de vous conseller conselle r la crconsCancel Download And Print pecton, dt-l. Vous voyez que nul n’est placé assez haut ou assez bas pour évter les soupçons et les avanes. Que personne ne sache nos propos. — A mons de parle pa rlerr à mon ombre, dt le docteur Théus. — Vous ê tes é trotement assocé à ce couvent, rappela le relgeux. Dtes-vous ben qu’l y a pas mal de gens dans cette vlle, et même dans ces murs, qu ne seraent pas âchés d’accuser le preur des Cordelers de rébellon ou d’hérése. Ces entretens se renouèrent assez réquemment. Le preur en semblat avde. Cet homme s respecté parassat à Zénon auss seul et plus menacé que so-même. A chaque vste, le médecn voyat plus clarement sur le vsage du relgeux les sgnes d’un mal ndéfinssable qu sapat ses orces. L’angosse et la pté provoquées chez le preur par la msère du temps pouvaent être la seule cause de ce décln nexplcable ; l se pouvat, au contrare, qu’elles en ussent l’eet, et la marque d’une consttuton trop ébranlée pour supporter les maux du monde avec cette robuste ndérence qu est celle de presque tous les hommes. Zénon persuada Sa Révérence d’user chaque jour de restaurats mêlés à du vn ; elle les prenat pour lu complare. Le médecn, lu auss, avat prs goût à ces échanges de propos courtos, et pourtant presque exempts de mensonges. Il en sortat néanmons avec le sentment d’une vague mposture. Une os de plus, comme on se contrant à parler latn en Sorbonne, l avat dû adopter, pour se are entendre, un langage étranger qu dénaturat sa pensée, ben qu’l en possédât paratement les nflexons et les tours ; dans l’espèce, le langage état celu du chréten déérent, snon dévot, et du sujet loyal, mas alarmé par
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l’état présent du Cancel monde. Download Une os de plus, et tenant And Print compte des vues du preur par respect encore plus que par prudence, l acceptat de partr de prémsses sur lesquelles, dans son or ntéreur, l eût reusé de ren bâtr ; reléguant ses propres soucs, l s’oblgeat à montrer de son esprt une seule ace, toujours la même, celle qu reflétat son am. Cette ausseté nhérente aux rapports humans et devenue pour lu une seconde nature le troublat dans ce lbre commerce entre deux hommes désntéressés. Le preur eût été surprs de constater comben peu de place des sujets longuement débattus dans sa cellule tenaent dans les cogtatons soltares du docteur Théus. Non que les maux des Pays-Bas lassassent Zénon ndérent, mas l avat trop vécu dans un monde à eu et à sang pour éprouver devant ces nouvelles preuves de la ureur humane le sasssement de douleur du preur des Cordelers. Quant à ses dangers propres, ls lu semblaent pour le moment plutôt dmnués qu’accrus par les perturbatons publques. Personne ne pensat à l’nsgnfiant Sébasten Théus. Cette clandestnté que les adeptes de la mage juraent de garder dans l’ntérêt de leur scence l’enveloppat par la orce des choses ; l état en vérté nvsble. Un sor du même été, à l’heure du couvre-eu, l remonta dans sa soupente après avor donné à la porte le tour de clé habtuel. L’hospce en bonne règle ermat à l’angélus : une os seulement, à l’occason d’une épdéme durant laquelle l’hôptal Sant-Jean débordat de malades, le médecn avat prs sur lu d’nstaller des pallasses et de garder des fiévreux dans la salle d’en bas. Le rère Luc chargé de laver le carrelage venat de repartr avec ses serpllères et ses selles. Soudan, Zénon entendt contre sa vtre le crssement d’une pognée de graver,
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qu lu rappela le temps lontan où l rejognat Cancel Download And Print Colas Gheel après la cloche du sor. Il s’hablla et descendt. C’état le fils du orgeron de la rue aux Lanes. Ce Josse Cassel lu explqua qu’un sen cousn, orgnare de Sant-Perre-lez-Bruges, s’état rompu la jambe du at des ruades d’un cheval qu’l menat errer chez son oncle ; l gsat très mal en pont dans un rédut stué derrère la orge. Zénon prt ce qu’l allat et suvt Josse par les rues. A un carreour, ls tombèrent sur le guet, qu les lassa passer sans encombre quand Josse eut explqué qu’l état allé chercher un chrurgen pour son père, lequel venat de se broyer deux dogts d’un coup de marteau. Ce mensonge donna à penser au médecn. Le blessé état étendu sur un lt mprovsé ; c’état un rustque d’envron vngt ans, une sorte de loup blond, aux cheveux collés sur les joues par la sueur, à dem pâmé par la sourance et la perte de sang. Zénon admnstra un réconortant et examna la jambe ; les os en deux endrots sortaent sor taent de la char qu elle-même pendat en lambeaux. Ren dans cet accdent ne ressemblat à l’eet de ruades ; les marques de sabots n’étaent nulle part vsbles. La prudence en parel cas exgeat l’amputaton, mas le blessé, en voyant le médecn passer au eu la lame de sa sce, se ranma assez pour hurler ; le orgeron et son fils étaent à pene mons nquets, cragnant, s l’opératon tournat mal, d’avor un corps mort sur les bras. Changeant de plan, Zénon décda d’essayer d’abord de rédure la racture. Le garçon n’y gagna guère : l’eort d’étendre la jambe pour remboîter remboîte r les os lu arracha des crs comme à la torture ; l’homme de l’art dut à coups de rasor ouvrr la plae et y plonger la man pour y chercher les esqulles. Il en lava ensute la surace d’un vn ort dont par bonheur le orgeron possédat
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une cruche. Le Cancel père et Download le fils travallaent à prépaAnd Print rer des bandages et des attelles. On étouat dans le rédut, les deux hommes ayant sogneusement caleutré toutes les ouvertures pour qu’on n’entendît pas crer. Zénon qutta la rue aux Lanes ort ncertan du résultat. Le garçon état au plus bas, et seule la vgueur de la jeunesse lassat une espèce de chance. Le médecn revnt ensute chaque jour, tantôt de bon matn, tantôt au contrare après la ermeture de l’hospce, pour rrguer les chars d’un vnagre qu en nettoyat les sanes. Il les ognt plus tard d’eau de rose pour empêcher l’excès de sécheresse et l’nflammaton des lèvres. Il évtat le plus possble les heures nocturnes où ses allées et venues eussent été remarquées. Ben que le père et le fils en tnssent pour leur hstore de ruades, l état tactement entendu que meux valat are le slence sur cette aare. Vers le dxème jour un abcès se orma ; la char devnt spongeuse, et la fièvre, qu n’avat jamas qutté le blessé, monta comme une flamme. Zénon le tenat à une dète sévère ; Han délrat en demandant à manger. Une nut, les muscles se contractèrent avec tant de volence que la jambe rompt ses attelles. Zénon s’avoua que par une lâche pté l n’avat pas sufsamment serré les éclsses ; l allut de nouveau étendre et rédure. La sourance en ut pre qu’aux premer sons, mas cette os le malade enveloppé par Zénon d’une umée d’opum la supporta meux. Au bout de sept jours, les drans avaent vdé l’abcès, et la fièvre se termna par d’abondantes suées. Zénon sortt de la orge le cœur léger, avec le sentment d’avor eu pour lu cette Fortune sans laquelle toute hableté est vane. Pendant tros semanes, l lu semblat, à travers ses autres préoccupatons et travaux, avor contnuellement ms toutes
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ses orces au servce de cette guérson. Cette attenton Cancel Download And Print perpétuelle ressemblat ort à ce que le preur eût appelé l’état d’orason. Mas certans aveux avaent échappé au blessé dans son délre. Josse et le orgeron finrent par confirmer et par compléter de leur plen gré la compromettante hstore. Han venat d’un pauvre hameau du côté de Zévecote, à tros leues de Bruges, où s’étaent passés récemment des ncdents sanglants que chacun connassat. Tout avat commencé par un prédcant dont les prêches avaent échaué le vllage ; ces rustres, mécontents du curé qu ne plasantat pas sur la dîme, avaent envah l’églse le marteau au pong, brsant les statues de l’autel et la Verge qu’on sortat dans les processons, asant man basse sur les jupons brodés, le manteau et l’auréole de laton de Notre-Dame et sur les pauvres trésors de la sacrste. Une escouade commandée par un certan captane Julan Vargaz vnt ausstôt réprmer ce désordre. La mère de Han, chez qu l’on trouva un lé de satn soutaché de semences de perles, ut assommée après les volences d’usage, ben que pour celles-c elle n’eût plus tout à at l’âge qu convînt. Le reste des emmes et des enants ut chassé et s’égalla par les champs. Tands que la pendason des quelques hommes du hameau s’exécutat sur la place, le captane Vargaz rappé au ront d’une balle d’arquebuse tomba à terre, vdant les étrers. On avat tré par la lucarne d’une grange ; les soldats battrent et pquèrent les meules de on sans trouver personne, et finalement mrent le eu. Assurés d’avor at flamber l’assassn, ls s’étaent ensute retrés, emportant avec eux le cadavre de leur captane au travers d’une selle, et quelques têtes de bétal confisqué.
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Han avat sautéCancel du tot,Download se rompant la jambedans sa And Print chute. Serrant les dents, l s’état traîné sous un tas de palle et d’mmondces au bord de la mare et y état resté caché jusqu’au départ des soldats, cragnant que le eu ne se communquât à son msérable msé rable abr. Ver Verss le sor, des paysans d’une erme vosne, venus vor ce qu restat à grappller dans le vllage désert, le découvrrent à ses plantes qu’l ne retenat plus. Ces maraudeurs avaent le cœur bon ; on décda de placer Han sous la bâche d’une charrette, et de l’envoyer en vlle chez son oncle. Il y arrva évanou. Peter et son fils se flattaent que personne n’avat vu entrer la carrole dans la cour de la rue aux Lanes. L’hstore de sa mort dans la grange en flammes mettat Han à l’abr de poursutes, mas cette sécurté dépendat du slence des paysans, qu, d’un moment à l’autre, pourraent parler de gré, et surtout de orce. Peter et Josse rsquaent leur ve à héberger un rebelle et un brseur d’mages, et le danger couru par le médecn n’état pas mondre. Sx semanes plus tard, le convalescent sautllat, adé d’une béqulle, mas les adhérences de la ccatrce le asaent encore cruellement sourr. Le père et le fils mplorèrent le médecn de les débarrasser de ce garçon qu n’état pas, d’alleurs, de ceux auxquels on s’attache : sa longue récluson l’avat rendu gegnard et hargneux ; on se lassat de l’entendre raconter sans cesse son unque prouesse, et le orgeron, qu lu en voulat d’avor sé son préceux vn et sa bère, enragea d’apprendre que ce vauren avat demandé à Josse de lu procurer une fille. Zénon s’avsa que Han serat meux caché dans la grande vlle d’Anvers, d’où l pourrat peut-être, une os tout rems, jondre sur l’autre rve de l’Escaut les pettes bandes de rebelles du captane Henr Thomaszoon et du captane Sonoy, qu, dans leurs bâtments embusqués çà et là le long des côtes de la Zélande, harcelaent de leur meux les troupes royales.
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Il pensa au fils de la velle Greete, qu, en sa Cancel Download And Print qualté de voturer, asat chaque semane le voyage avec ses ballots et ses sacs. Celu-c, ms partellement dans la confidence, voulut ben emmener avec so le garçon et le déposer chez des gens sûrs ; encore allat-l un peu d’argent pour ce départ. Peter Cassel, en dépt de sa hâte de vor son neveu déguerpr, dsat n’avor plus un sou à dépenser à son servce ; Zénon n’avat ren. Après quelques héstatons, l se rendt chez le preur. Le sant homme termnat sa messe dans la chepelle attenante à sa cellule. Après l’Ite, Missa est e t les prères d’actons de grâce, Zénon lu demanda un entreten et lu raconta sans ard l’aventure. — Vous avez là couru de gros rsques, dt gravegravement le preur. — Dans ce monde ort conus, l y a quelques prescrptons assez clares, dt le phlosophe. J’a pour méter de sogner. Le preur acquesça. — Personne er sonne ne pleure Vargaz, argaz , contnua-t-l. Vous souvenez-vous, Monseur, des nsolents soldats qu encombraent partout les rues à l’époque où vous arrvâtes en Flandre ? Sous dvers prétextes, deux ans après la concluson de la guerre avec la France, le Ro nous mposat encore la présence de cette armée. Deux ans ! Ce Vargaz avat reprs c du servce pour contnuer sur nous ses brutaltés qu l’avaent rendu odeux aux Franças. On ne peut guère louer le jeune Davd de l’Ecrture sans applaudr l’enant que vous avez avez sogné. sog né. — Il aut avouer qu’l est es t bon treur, dt le médecn.
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— Je voudrasCancel crore Download que Deu a gudé sa man. And Print Mas un sacrlège est un sacrlège. Ce Han reconnaît-l avor prs part au brs des mages ? — Il l’assure, mas je vos surtout sur tout dans ces vanteres l’expresson détournée du remords, dt prudemment Sébasten Théus. J’nterprète de même certanes paroles lâchées dans le délre. Quelques prêches n’ont pu are perdre à ce garçon tout souvenr de ses ancens Ave Maria. — Trouvez-vous ces ce s remords mal ondés ? — Votre Révérence Révé rence at-elle de mo un luthéren ? demanda le phlosophe avec un mnce sourre. — Non, mon am, je crans que vous n’ayez pas assez de o pour être hérétque héré tque.. — Chacun soupçonne les autortés autorté s d’mplanter dans les vllages des prédcants vras ou aux, poursuvt ausstôt le médecn, ramenant précautonneusement l’entreten sur autre chose que l’orthodoxe de Sébasten Théus. Nos gouvernants provoquent des excès pour sévr ensute plus à l’ase. — Je connas certes cer tes les astuces astuce s du Consel d’Espagne, dt le relgeux avec quelque mpatence. Mas dos-je vous explquer mes scrupules ? Je sus le derner à souhater souhater qu’un malheureux malheureux brûle brûle v pour des finesses théologques qu’l n’entend pas. Mas l y a dans ces voes de at contre Notre-Dame une volence qu sent l’Ener. Encore s’l s’agssat de l’un de ces sants Georges ou de l’une de ces santes Catherne dont l’exstence est mse en doute par nos doctes, et qu charment nnocemment la pété du peuple… Est-ce parce que notre Ordre exalte tout partculèrement cette haute déesse (un poète que j’a lu dans ma jeunesse l’appelat ans) et l’assure mmune du péché d’Adam, ou sus-je plus touché qu’l ne aut du souvenr de ma pauvre emme, qu portat avec grâce et humlté ce beau nom… Aucun crme contre la o ne m’outre autant qu’une oense
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à cette Mare qu contnt l’Espérance du monde, à Cancel Download And Print cette créature appontée dès l’aube des temps qu est notre avocate au cel… — Je cros vous suvre, dt Sébasten Théus, voyant des larmes monter aux yeux du preur. Vous sourez qu’un brutal ose lever la man sur la orme la plus pure qu’at prse, selon vous, la Bonté dvne. Les Jus (j’a réquenté des médecns de ce peuple) m’ont ans parlé de leur Shechna qu sgnfie la tendresse de Deu… Il est vra qu’elle reste pour eux une ace nvsble… Mas tant qu’à donner à l’Ineable l’apparence humane, je ne vos pas pourquo nous ne lu prêterons pas certans trats emelles, sans quo nous rédusons de moté la nature des choses. S les bêtes des bos ont quelque sens des sacrés mystères (et qu sat ce qu se passe au-dedans des créatures ?) elles magnent sans doute auprès du Cer dvn dvn une bche bche mmaculée. mmaculée. Cette noton ousque le preur ? — Pas plus que l’mage de l’Agneau sans tache. Et Mare n’est-elle pas auss la Colombe très pure ? — De tels emblèmes ont cependant leurs dangers, danger s, reprt médtatvement Sébasten Théus. Mes rères alchmstes usent des figures du Lat de la Verge, du Corbeau Nor, du Lon Vert Unversel et de la Copulaton Métallque pour désgner des opératons de leur art, là où la vrulence ou la subtlté de cellesc passe les mots humans. Le résultat en est que les esprts grossers s’attachent à ces smulacres, et que de plus judceux, au contrare, méprsent un savor qu pourtant va lon, mas qu leur paraît enlsé dans un marécage de songes… Je ne pousse pas davantage davantage la comparason. — La dfculté est es t nsoluble, mon am, dt le preur. Que j’alle dre à des malheureux que la coe d’or de Notre-Dame et son bleu manteau ne sont
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qu’un maladrotCancel symboleDownload des splendeurs And Print du cel, et le cel à son tour une pauvre portrature du Ben nvsble, et ls en concluront que je ne cros n à Notre-Dame n au cel. Ne serat-ce pas là un pre mensonge ? La chose sgnfiée authentfie le sgne. — Revenons au garçon que j’a sogné, nssta le médecn. Votre Révérence ne suppose pas que ce Han a cru abattre l’avocate appontée de tout temps par la Msércorde dvne ? Il a rompu un bllot de bos atourné d’un habt de velours qu’un prédcant lu représente comme une dole, et j’ose dre que cette mpété qu à bon drot ndgne le preur lu aura semblé conorme au plat bon sens qu’l a reçu du cel. Ce rustque n’a pas plus nsulté l’nstrument du salut du monde qu’l n’a pensé en tuant Vargaz arga z venger la patre belge. — Il a pourtant pour tant at l’un et e t l’autre. — Je me le demande, dt le phlosophe. C’est C’e st vous et mo qu cherchons à donner un sens aux actons volentes d’un rustre de vngt ans. — Tenez-vous beaucoup à ce que cet ce t enant échappe aux poursutes, monseur le médecn ? demanda brusquement le preur. preur. — Outre que ma propre sûreté sûre té y est es t ntéressée, ntére ssée, je préère préè re qu’on ne jette jet te pas au eu mon ched’œuvre, réplqua sur le ton de la plasantere Sébasten Théus. Mas ce n’est pas ce que le preur peut penser pense r. Tant meux, dt le relgeux, vous en attendrez — Tant l’événement avec plus de calme. Je ne veux pas non plus gâter votre ouvrage, am Sébasten. Vous trouverez dans ce tror ce qu’l vous audra. Zénon tra la bourse cachée sous du lnge, et y chost parcmoneusement quelques pèces d’argent. En la remettant à sa place, l accrocha un bout d’étoe rude qu’l fit de son meux pour désengager.
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C’état une hare où séchaent çà et là des grumeaux Cancel Download And Print norâtres. Le preur détourna la tête comme embarrassé. — La santé de Sa Révérence Révé rence n’est ’es t pas assez bonne pour lu lu permettre perme ttre des pratques s dures. — J’en voudras redoubler au contrare, protesta prote sta le relgeux. Vos occupatons, occupa tons, Sébasten, contnua-t-l, ne vous auront pas lassé le temps de réfléchr aux malheurs publcs. Tout ce qu’on colporte n’est que trop exact. Le Ro vent de rassembler en Pémont une armée sous les ordres du duc d’Alve, le vanqueur de Mühlberg, qu passe en Itale pour un homme de er. Ces vngt mlle hommes avec leurs bêtes de somme et leur bagage ranchssent en ce moment les Alpes pour ondre ensute sur nos malheureuses provnces… Nous regretterons peutê tre bentôt le captane Julan Vargaz Vargaz.. — Ils se hâtent avant que les routes route s soent bloquées par l’hver, dt l’homme qu jads s’état enu d’Innsbruck par des chemns de montagne. — Mon fils est es t leutenant du Ro, e t c’est c’es t mracle s’l ne se trouve pas dans la compagne du duc, fit le preur sur le ton de quelqu’un qu s’oblge à un pénble aveu. Nous sommes tous mêlés au mal. Une toux qu l’avat déjà troublé pluseurs os le sast de nouveau. Sébasten Théus lu prt le pouls, rentrant dans ses onctons de médecn. — Le souc explque peut-être peut-ê tre la mauvasee mne du preur, dt-l après un slence. Mas cette toux qu persste depus quelques jours et cette étse crossante ont des causes qu’l est de mon devor de chercher. Sa Révérence consentra-t-elle deman à me lasser examner sa gorge à l’ade d’un nstrument de ma açon ? — Tout ce qu’l vous plara, mon am, dt le preur. L’été pluveux a sans doute causé cette angne. Et vous voyez vous-même que je n’a pas la fièvre.
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Han partt le sor même avec le voturer en qualté Cancel Download And Print de valet de chevaux. Un peu de botere ne lu nusat pas dans ce rôle. Son gude le déposa à Anvers chez un acteur des Fuggers, secrètement avorable aux dées nouvelles, qu habtat sur le port, et qu l’employa à clouer et à déclouer des casses d’épces. Vers la Noël, on apprt que le garçon, ermement d’aplomb sur sa jambe remse, s’état embauché comme charpenter sur un négrer apparellant pour la Gunée. On avat toujours beson sur ces sortes de navres d’ouvrers aptes non seulement à réparer les avares du bâtment, mas encore à construre ou à déplacer des closons ou à abrquer abrquer des de s carcans et des de s entraves, et capables auss de are le coup de eu en cas de mutnere. La pae étant bonne, Han avat prééré cet emplo à la solde ncertane qu’l eût trouvée auprès du captane Thomaszoon et de ses Gueux de Mer Me r. L’hver revnt. rev nt. Le preur avat de lu-même renoncé, r enoncé, du at de son enrouement chronque, à prêcher les sermons de l’Avent. Sébasten Théus obtnt de son malade qu’l passât dans I’après-dîner une heure au lt pour épargner ses orces, ou tout au mons dans le auteul qu’l avat depus peu consent à lasser mettre dans sa cellule. Celle-c ne contenant selon la règle n chemnée n poêle, Zénon le convanqut non sans pene d’y are placer un brasero. Il le trouva cet après-md-là les lunettes sur le nez occupé à vérfier des chres. L’économe du couvent, Perre de Hamaere, écoutat debout les observatons de son supéreur. Zénon éprouvat envers ce relgeux, auquel l n’avat pas adressé la parole dx os dans sa ve, une nmté qu’l sentat récproque ; Perre de Hamaere sortt après avor basé la man de Sa Révérence avec une de ses génuflexons à la os hautanes hautanes et e t servles. ser vles. Les nouvelles nouvelles du jour étaent
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partculèrement sombres. Le comte d’Egmont et son Cancel Download And Print assocé le comte de Hornes, ncarcérés à Gand depus près de tros mos sous l’nculpaton de haute trahson, venaent de se vor reuser ce jugement par leurs pars qu leur eût probablement lassé la ve sauve. La vlle bourdonnat de ce dén de justce. Zénon évta de parler le premer de cette nquté, ne sachant pas s le preur en état déjà avert. Il lu raconta au contrare l’ssue grotesque de l’hstore de Han. — Le grand Pe II a jads condamné les entreprses des négrers, mas qu y prend garde ? dt le relgeux d’un ar las. Il est vra que nous avons parm nous des njustces encore plus pressantes… Sat-on ce qu’on pense en vlle de l’ndgnté ate au Comte ? — On le plant plus que jamas d’avor d’avor ajouté o aux promesses du Ro. — Lamoral a le cœur grand, mas peu de jugement, dt le preur avec plus de calme que Zénon n’en attendat. Un bon négocateur ne at pas confiance. Il prt doclement les gouttes astrngentes que lu versat son médecn. Celu-c le regarda are avec une secrète trstesse : l ne croyat pas aux vertus de ce remède par trop anodn, mas cherchat en van à l’angne du preur un spécfique plus pussant. L’absence de fièvre lu avat at renoncer à l’hypothèse d’une phtse. Un polype à la gorge explquat peut-être cet enrouement, cette toux persstante, cette gêne crossante à resprer et à manger. manger. — Merc, Mer c, dt le preur, preur, lu rendant le verre ver re vde. Ne me quttez pas trop vte aujourd’hu, am Sébasten. Ils parlèrent d’abord de choses et d’autres. Zénon s’état asss tout près du relgeux pour lu évter de orcer la vox. Celu-c revnt tout à coup à son prncpal souc :
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— Une nquté éclatante comme celle que vent Cancel Download And Print de subr Lamoral entraîne avec so toute une séquelle d’njustces auss nores, mas qu demeurent naperçues, reprt-l, ménageant son soue. Le concerge du comte a été arrêté peu après son maître et rompu à coups de barre de er dans l’espor d’en obtenr des aveux. J’a dt ce matn ma messe à l’ntenton des deux comtes, et l n’y a sans doute pas de mason en Flandre où l’on ne pre pour leur salut dans ce monde ou dans l’autre. Mas qu songe à prer pour l’âme de ce msérable, lequel d’alleurs n’a ren pu avouer, n’ayant pont part aux secrets de son gentlhomme. Il ne lu restat pas un os ou une vene ntacts… — Je vos ce qu en est, es t, fit Sébasten Théus. Votre Votre Révérence at l’éloge d’une humble fidélté. — Ce n’est ’es t pas tout à at cela, dt le preur. preur. Ce concerge état un prévarcateur, enrch, dt-on, aux dépens de son maître. Il paraît auss qu’l détenat un tableau que le duc avat ordre d’acquérr pour Sa Majesté, une de nos dableres flamandes où l’on vot des démons grotesques qu supplcent des damnés. Notre Ro ame la penture… Que cet homme de ren at parlé ou non est d’alleurs ’sans mportance, la cause du comte étant déjà comme jugée. Mas je me ds que ce même comte mourra proprement d’un coup de hache sur un échaaud tendu de nor, consolé par le deul de la populace qu vot à juste ttre en lu un amateur de la patre belge, ayant reçu les excuses du bourreau qu le rappera, et accompagné par les prères de son aumôner qu l’expédera l’expédera au cel… — J’y sus, cette ce tte os, dt le médecn. Votre Révérence se dt qu’en dépt de tous les leux communs des phlosophes, le rang et le ttre procurent à leurs possesseurs certans avantages soldes. C’est quelque chose que d’être grand d’Espagne.
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— Je m’explque mal, murmura le preur. preur. C’est C’es t Cancel Download And Print parce que cet homme a été pett, nul, sans doute gnoble, pourvu seulement d’un corps accessble à la douleur et d’une âme pour laquelle Deu lumême a versé son sang, que je m’arrête à contempler son agone. Je me sus lassé dre qu’au bout de tros heures on l’entendat encore crer. — Prenez garde, monseur le preur, preur, dt Sébasten Théus pressant de sa man celle du relgeux. Ce msérable a souert tros heures, mas pendant comben de jours et comben de nuts Votre Révérence revvra-t-elle cette fin ? Vous vous tourmentez plus que les bourreaux cet nortuné. — Ne dtes pas cela, fit le preur en secouant la tête. La douleur de ce concerge et la ureur de ses tortonnares emplssent le monde et débordent le temps. Ren ne peut are qu’elles n’aent été un moment de l’éternel regard de Deu. Chaque pene et chaque mal est nfin dans sa substance, mon am, et ls sont auss nfins en nombre. — Ce que Votre Révérence Révé rence dt de la douleur, douleur, elle pourrat auss le dre de la joe. — Je sas… J’a eu mes me s joes… joe s… Chaque joe nnocente est un reste de l’Eden… Mas la joe n’a pas beson de nous, Sébasten. La douleur seule requert notre charté. Le jour où s’est enfin révélée à nous la douleur des créatures., la joe devent auss mpossble qu’au Bon Samartan une halte dans une auberge avec du vn et des filles pendant qu’à côté de lu son blessé sagnat. Je ne comprends même plus la sérénté des sants sur la terre n leur béattude au cel… — S j’entends quelque chose au langage de la dévoton, le preur traverse sa nut obscure. — Je vous en conjure, mon am, ne rédusez pas cette détresse à je ne sas quelle peuse épreuve sur le chemn de la perecton, où d’alleurs je ne
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m’magne pas engagé… Regardons plutôt la nut Cancel Download And Print obscure des hommes. Hélas ! on crant de se tromper quand on se plant de l’ordre des choses ! Et cependant, Monseur, comment osons-nous envoyer à Deu des âmes aux autes desquelles nous ajoutons le désespor et le blasphème, par sute des tourments que nous asons subr aux corps ? Pourquo avons-nous lassé l’opnâtreté, l’mpudence et la rancune se glsser dans des dsputes de doctrne qu, comme celle du Sant Sacrement pente par Sanzo dans les appartements du Sant-Père, auraent dû ne se passer qu’en plen cel ?… Car enfin, s le Ro l’an derner avat dagné entendre la protestaton de nos gentlshommes ; s, au temps de notre enance, le pape Léon avat reçu avec bonté un gnorant mone augustn… Que voulat-l de plus que ce dont toutes nos nsttutons ont toujours beson, je veux dre de réormes… Ce rustre s’ousquat d’abus qu m’ont choqué mo-même quand j’a vsté la cour de Jules Jules III ; l n’a pas tort tor t de reprocher reproc her à nos Ordres une opulence qu nous encombre, et qu n’est pas toute au servce de Deu… — Le preur ne nous éblout pas par son luxe, nterrompt avec un sourre Sébasten Théus. — J’a toutes mes ases, dt le relgeux é tendant la man vers les charbons grs. — Que Votre Révérence Révé rence ne asse pas par grandeur d’âme la part trop belle à l’adversare, fit après réflexon le phlosophe. Odi hominem unius libri : Luther a propagé une dolâtre du Lvre pre que ben des pratques jugées par lu superstteuses, et la doctrne du salut par la o ravale la dgnté de l’homme. — J’en convens, dt le preur é tonné, mas, après tout, nous révérons tous, comme lu, l’Ecrture, et nous abîmons tous nos ables mértes aux peds du Sauveur.
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— Certes, Cer tes, Votre Révérence, Révé rence, e t c’est c’es t peut-être peut-ê tre ce Cancel Download And Print qu rendrat ces agres débats ncompréhensbles à un athée. — N’nsnuez pas ce que je ne veux pas entendre, murmura le preur. preur. — Je me tas, dt le phlosophe. Je constate consta te seulement que les segneurs réormés d’Allemagne jouant aux boules avec des têtes tê tes de paysans révoltés valent ben les lansquenets du duc, et que Luther fit le jeu des prnces tout comme le cardnal de Granvelle. — Il a opté pour l’ordre, comme nous tous, dt le preur avec avec atgue. a tgue. Il negeat dehors par raales. Le médecn s’étant levé pour regagner son dspensare, le supéreur lu fit remarquer que peu de malades s’aventuraent par un temps s rude, et que le rère nfirmer sufrat. — Lassez-mo Lassez -mo vous avouer ce que je cacheras cachera s à un homme d’Eglse, tout comme vous me erez part plutôt qu’à un conrère d’une conjecture anatomque hasardeuse, reprt pénblement le preur. Je n’en pus plus, mon am… Sébasten, seze cents ans auront bentôt passé depus l’Incarnaton du Chrst, et nous nous endormons sur la Crox comme sur un oreller… On drat presque que la Rédempton ayant eu leu une os pour toutes, l ne reste qu’à s’accommoder du monde comme l va, ou, tout au plus, à are son salut pour so seul. Nous exaltons, l est vra, la Fo ; nous la promenons et pavanons par les rues ; nous lu sacrfions, s’l le aut, mlle ves, y comprs la nôtre. Nous asons auss grand-ête à l’Espérance ; nous ne l’avons que trop réquemment vendue aux dévots à prx d’or. Mas qu s’nquète de la Charté, Charté, sau quelques quelques sants, et encore je tremble en pensant aux étrotes lmtes dans lesquelles ls l’exercent… Même à mon âge, et sous ce roc, ma
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compasson tropCancel tendre Download m’a paru souvent une tare And Print de ma nature contre laquelle l convenat de lutter… Et je me ds que s l’un de nous courat au martyre, non pour la Fo, qu a déjà assez de témons, mas pour la seule Charté, s’l grmpat au gbet ou se hssat sur les agots à la place ou tout au mons à côté de la plus lade vctme, nous nous trouverons peut-être peut-être sur une autre terre et e t sous un nouveau cel… Le pre coqun ou le plus pernceux hérétque ne sera jamas plus néreur à mo que je ne le sus à Jésus-Chrst. — Ce dont rêve le preur ressemble r essemble beaucoup à ce que nos alchmstes appellent la voe sèche ou la voe rapde, dt gravement Sébasten Théus. Il s’agt en somme de tout transormer d’un seul coup, et par nos ables orces… C’est un senter dangereux, monseur le preur. — Ne cragnez cragne z ren, dt le malade avec une sorte sor te de honteux sourre. Je ne sus qu’un pauvre homme, et je ménage tant ben que mal soxante mones… Les entraîneras-je de mon plen gré dans je ne sas quelle mésaventure ? N’ouvre pas qu veut par un sacrfice la porte du cel. L’oblaton, s elle a leu, devra se are autrement. — Elle se produt d’elle-même quand l’hoste est es t prête, songea tout haut Sébasten Théus, pensant aux secrètes mses en garde des phlosophes hermétques. Le preur le regarda avec étonnement : — L’hoste… fit-l, peusement, goûtant ce beau mot. On assure que vos alchmstes ont de JésusChrst la perre phlosophale, et du sacrfice de la messe l’équvalent du Grand Œuvre. — Quelques-uns le dsent, fit Zénon, ramenant sur les genoux du preur une couverture glssée à terre. Mas que pouvons-nous trer de ces équvalences, snon que l’esprt human a une certane pente ?
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— Nous doutons, dt le preur de sa vox soudan Cancel Download And Print tremblante, nous avons douté… Pendant comben de nuts a-je repoussé l’dée que Deu n’est au-dessus de nous qu’un tyran ou qu’un monarque ncapable, et que l’athée qu le ne est le seul homme qu ne blasphème pas… Pus, une lueur m’est venue ; la malade est une ouverture. S nous nous trompons en postulant Sa toute-pussance, et en voyant dans nos maux l’eet de Sa volonté ? S c’état à nous d’obtenr que Son règne arrve ? J’a dt naguère que Deu se délègue ; je vas plus lon, Sébasten. Peut-être n’est-l dans nos mans qu’une pette flamme qu’l dépend de nous d’almenter et de ne pas lasser étendre ; peut-être sommes-nous la ponte la plus avancée à laquelle Il parvenne… Comben de malheureux qu’ndgne la noton de Son omnpotence accourraent du ond de leur détresse s on leur demandat de venr en ade à la ablesse de Deu ? — Volà qu s’accorde ort or t mal avec les dogmes dogme s de la Sante Eglse. — Non, mon am ; j’abjure d’avance d’avance tout ce qu déchrerat un peu plus la robe sans couture. Deu règne omnpotent, je le veux ben, dans le monde des esprts, mas nous sommes c dans le monde des corps. Et sur cette terre où Il a marché, comment L’avons-nous ’avons-nous vu, s ce n’est comme un nnocent nnocent sur la palle, tout parel aux nourrssons gsant sur la nege dans nos vllages de la Campne dévastés par les troupes du Ro, comme un vagabond n’ayant pas une perre où reposer re poser sa tête, tê te, comme un supplcé supplcé pendu pendu à un carreour et se demandant lu auss pourquo Deu l’a abandonné ? Chacun de nous est ben able, mas c’est une consolaton de penser qu’l est plus mpussant et plus découragé encore, et que c’est à nous de L’engendrer et de Le sauver dans les créatures… Je m’excuse, dt-l en toussant. Je vous a at le sermon que je ne peux plus are en chare.
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Il avat rejetéCancel sur le Download dosser And duPrint auteul sa tête massve et comme soudan vdée de pensée. Sébasten Théus se pencha amcalement sur lu tout en agraant sa houppelande : — Je réfléchra aux dées qu’a ben voulu m’exposer le preur, dt-l. Avant de prendre congé, pus-je en échange lu are part d’une hypothèse ? Les phlosophes de ce temps postulent pour la plupart l’exstence d’une Anima Mundi, sentente et plus ou mons conscente, à laquelle partcpent toutes choses ; j’a mo-même rêvé aux sourdes cogtatons des perres… Et pourtant, les seuls ats connus semblent ndquer que la sourance, et conséquemment la joe, et par là même le ben e t ce que nous nommons le mal, la justce, et ce qu est pour nous l’njustce, et enfin, sous une orme ou sous une autre, l’entendement, qu sert à dstnguer ces contrares, n’exstent que dans le seul monde du sang et peutêtre de la sève, de la char sllonnée par les filets nerveux comme par un réseau d’éclars, et (qu sat ?) de la tge qu croît vers la lumère, son Souveran Ben, pâtt du manque d’eau et se rétracte au rod, ou résste de son meux aux empétements nques d’autres plantes. Tout le reste, je veux dre le règne mnéral et celu des esprts, s’l exste, est peut-être nsentent et tranqulle, par-delà nos joes et nos penes, ou en deçà d’elles. Nos trbulatons, monseur le preur, ne sont possblement qu’une excepton nfime dans la abrque unverselle, et cec pourrat explquer l’ndérence de cette substance mmuable que dévotement nous appelons Deu. Le preur réprma un rsson. — Ce que vous dtes épouvante, fit-l. Mas, s’l en est ans, nous volà rengagés plus que jamas dans le monde du roment qu’on broe et de l’Agneau qu sagne. Allez en pax, Sébasten.
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Zénon retraversa l’arcade qu rattachat au couCancel Download And Print vent l’hospce de Sant-Cosme. La nege balayée par le vent s’amoncelat çà et là en grandes gsées blanches. Rentré au logs, l alla drot à la pette chambre où l avat placé sur des rayons les lvres hértés de Jean Myers. Le veux possédat un traté d’anatome publé vngt ans plus tôt par Andréas Vésalus, qu avat lutté comme Zénon contre la routne galénque en aveur d’une connassance plus complète du corps de l’homme. Zénon n’avat n’avat rencontré qu’une seule os le célèbre médecn, qu avat at depus une belle carrère de cour avant de mourr de la peste en Orent ; cantonné dans sa spécalté médcale, Vésalus n’avat eu à crandre d’autres persécutons que celles des custres, qu d’alleurs ne lu avaent pas manqué. Lu auss avat volé des cadavres ; l s’état at de l’homme ntéreur une dée basée sur des os ramassés sous les potences et sur les bûchers, ou, plus ndécemment encore, obtenue grâce aux embaumements de hauts personnages auxquels on prend en cachette un ren ou le contenu d’une coulle remplacé par un peu de charpe, ren ensute n’ndquant que ces préparatons vennent de Leurs Altesses. Plaçant l’n-olo sous la lampe, Zénon chercha la planche où figure une coupe de l’œsophage et du larynx avec l’artère trachée : le dessn lu parut l’un des plus mparats du grand démonstrateur, mas l n’gnorat pas que Vésalus, comme lu-même, avat souvent dû travaller trop vte sur des chars déjà putréfiées. Il posa le dogt sur la place où l soupçonnat chez le preur l’exstence d’un polype qu un jour ou l’autre étouerat le malade. Il avat eu l’occason en Allemagne de dsséquer un vagabond mort du même mal ; ce souvenr et l’examen à l’ade
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du speculum orisCancel le portaent à dagnostquer sous Download And Print les symptômes obscurs de la malade du preur l’acton néaste d’une parcelle de char dévorant peu à peu les structures vosnes. On eût dt que l’ambton et la volence, s étrangères à la nature du relgeux, s’étaent apostées dans ce recon de son corps, d’où elles détruraent finalement cet homme de bonté. S’l ne se trompat pont, Jean-Lous de Berlamont, preur des Cordelers de Bruges, ancen grand orester de la rene douarère Mare de Hongre, plénpotentare au traté de Crespy, mourrat d’c quelques mos, strangulé par ce nœud qu se ormat au ond de la gorge, à mons touteos que le polype ne rompît sur sa route une vene, noyant l’nortuné dans son propre sang. Excepton ate de la possblté, jamas néglgeable, d’une mort accdentelle gagnant pour ans dre de vtesse sur la malade elle-même, le destn du sant homme état auss scellé que s’l avat déjà vécu. Le mal trop nterne état naccessble au scalpel ou au cautère. Les seules chances de prolonger la ve de cet am consstaent à soutenr ses orces par un prudent régme ; l audrat songer à se procurer des alments sem-lqudes, à la os rches et légers, qu’l avalerat sans trop de pene quand l’anguste crossante aurat rendu nabsorbable l’ordnare du couvent ; l convendrat auss de veller à ce qu’on lu épargnât les sagnées et les purgatons des pratcens habtuels, qu ne ont dans les tros quarts des cas qu’épuser barbarement la substance humane. Quand le temps vendrat d’endormr d’excessves sourances, des opats seraent efcaces, et l serat sage de contnuer à l’amuser d’c là de médcaments anodns, qu lu évteraent l’angosse de se sentr abandonné à son mal. L’art du médecn pour le moment ne pouvat pas plus.
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Il soua la lampe. La nege avat cessé, mas sa Cancel Download And Print blancheur mortellement rode remplssat la chambre ; les tots nclnés du couvent lusaent comme du verre. Une seule et jaune planète lusat au sud d’un éclat mat dans la constellaton du Taureau, non lon du splendde Aldébaran et des lqudes Pléades. Zénon avat renoncé depus longtemps à dresser des thèmes astrologques, tenant nos rapports avec ces lontanes sphères trop conus pour qu’on pût trer des calculs certans, même s çà et là d’étranges résultats s’mposaent. Accoudé à l’embrasure, l s’enonçat pourtant dans des rêveres sombres. Il n’gnorat pas que, d’après leur natvté à tous deux, le preur et lu avaent tout à crandre de cette ce tte opposton opposton de Saturne.
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LES DÉSORDRES DE LA CHAIR
DEPUIS quelques mos, Zénon avat pour rère nfirmer un jeune Cordeler de dx-hut ans, qu remplaçat avantageusement l’vrogne voleur de baumes dont on s’état débarrassé. Le rère Cypren état un rustque entré au couvent dans sa qunzème année, qu savat à pene assez de latn pour répondre à la messe, et ne parlat que l’épas flamand de son vllage. On le surprenat souvent à chantonner des rtournelles qu’l avat dû apprendre en pquant les bœus. Il lu restat des ables puérls, tels que de plonger la man à la dérobée dans le bocal plen du sucre qu servat à adoucr les juleps. Mas ce garçon ndolent avat une dextérté sans parelle pour poser un emplâtre ou enrouler un bandage ; aucune plae, aucune apostume ne l’erayat n ne le dégoûtat. Les enants qu venaent au dspensare amaent son sourre. Zénon le chargeat de recondure au logs les malades trop chancelants qu’l n’osat renvoyer
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seuls par la vlle ; le nez en l’ar, joussant du brut Cancel Download And Print et du mouvement de la rue, Cypren courat de l’hospce à l’hôptal Sant-Jean, prêtant ou empruntant des médcaments, obtenant un lt pour quelque gueux qu’on ne pouvat lasser mourr à la dure, ou, aute de meux, persuadant une dévote du quarter de recuellr ce dépenallé. Au début du prntemps, l se fit une aare en volant des aubépnes pour orner la Bonne Verge placée sous l’arcade, le jardn du couvent n’étant pas encore encor e en fleur. Sa tête gnare état plene de supersttons hértées de radoteuses du vllage : l allat l’empêcher de coller sur les plaes des malades l’mage à un sou d’un sant guérsseur. Il croyat au loup-garou qu aboe dans les rues désertes, et voyat partout des sorcers et des sorcères. L’ofce dvn, à l’en crore, ne pourrat s’accomplr sans la dscrète présence d’un de ces votatares de Satan. Quand l lu arrvat de servr seul la messe dans la chapelle vde, l soupçonnat l’ofcant, ou magnat dans l’ombre un magcen nvsble. Il prétendat qu’à certans jours de l’année le prêtre état oblgé de abrquer des sorcers, ce qu se asat en réctant à l’envers les prères du baptême, et avançat pour preuve que sa marrane l’avat en hâte retré des onts, voyant que Monseur le Curé tenat sens dessus dessous son brévare. On se protégeat en évtant les contacts, ou en posant la man sur les gens suspects de sorcellere plus haut qu’ls ne l’avaent at sur vous. Un jour, jour, Zénon l’ayant par hasard touché à l’épaule, l s’arrangea un moment après pour lu rôler le vsage. Ce matn-là, après le dmanche de Quasmodo, ls se tenaent ensemble dans l’ofcne. Sébasten Théus mettat à jour son regstre. Cypren plat langussamment des grans de cardamome. Il s’arrêtat paros pour bâller bâlle r.
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— Vous dormez dorme z debout, dt brusquement le médeCancel Download And Print cn. Dos-je crore que vous avez passé la nut à prer ? Le garçon sourt d’un ar uté : — Les Anges se réunssent la nut, dt-l après un coup d’œl du côté de la porte. La burette de vn crcule ; la cuve est prête pour le ban des Anges. Ils s’agenoullent devant la Belle qu les accole et les base ; la servante de la Belle lu déat ses longues tresses, et toutes deux sont nues comme au Parads. Les Anges enlèvent leurs vêtements de lane et s’admrent dans les habts de peau que Deu leur a ats ; les cerges brllent et s’étegnent, et chacun sut le désr dé sr de son cœur. — Volà de bons contes conte s ! dt le médecn avec méprs. Mas une sourde nquétude l’envaht. Il connassat ces appellatons angélques et ces mages doucement lascves : elles avaent été l’apanage de sectes oublées qu’on se flattat d’avor détrutes en Flandre par le er et par le eu depus plus d’un dem-sècle. Il se souvenat, tout enant, sous le manteau de la chemnée de la rue aux Lanes, d’avor entendu parler à vox basse de ces assemblées où les fidèles se connassaent dans la char. — Où avez-vous ramassé ces adases dangereuses ? dt-l sévèrement. Fates de melleurs rêves. — Ce ne sont pont des contes, dt le garçon d’un ar oensé. Quand Mynheer le voudra, Cypren le prendra par la man, et l verra et touchera les Anges. — Vous voulez rre, dt Sébasten Théus avec trop de ermeté. Cypren s’état rems à pler ses cardamomes. De temps à autre, l portat à ses narnes une des granes nores pour en meux sentr la bonne odeur d’épce. La prudence eût été de tenr comme non
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avenues les paroles du garçon, mas la curosté Cancel Download And Print de Zénon l’emporta l’emporta : — Et où e t quand se ont vos prétendues pré tendues conjonctons nocturnes ? dt-l avec rrtaton. Il n’est pas s acle de qutter nutamment le couvent. Certans mones, je sas, sautent le mur… — Ce sont des sots, repartt repar tt Cypren d’un ar de dédan. Le rère Floran a trouvé un passage par où les Anges vont et vennent. Il ame Cypren. — Gardez vos secrets, secre ts, dt volemment le médecn. Qu prouve que je ne vas pont vous trahr ? Le garçon secoua doucement la tête. — Mynheer ne voudrat pas nure aux Anges, nsnua-t-l avec avec une mpudence de complce. Un coup de heurtor les nterrompt. Zénon alla ouvrr avec un sursaut qu’l n’avat plus éprouvé depus les alarmes d’Innsbruck. Ce n’état qu’une fillette sourant d’un lupus qu se présentat toujours volée de nor, non par honte de son mal, mas parce que Zénon avat remarqué que la lumère en accrossat les ravages. Ce ut une dverson de recevor et de trater cette malheureuse. D’autres mséreux suvrent. Aucun propos dangereux ne s’échangea plus pendant quelques jours entre le médecn et l’nfirmer. Mas Zénon regardat désormas le pett mone d’un autre œl. Un corps et une âme nquétants et tentants vvaent sous ce roc. En même temps, l lu semblat qu’une lézarde s’état ouverte dans le sol de son asle. Sans se l’avouer à somême, l chercha l’occason d’en savor plus. Elle se produst le samed suvant. Asss à une table, ls nettoyaent des nstruments après la ermeture de l’hospce. Les mans de Cypren remuaent dlgemment parm les pnces aguës et les bstours tranchants. Soudan, s’accoudant des deux bras parm cette erralle, l chantonna en sourdne sur un ar ancen et complqué :
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J’appelleDownload et suis appelé, appelé , And Print Je bois et je suis bu, Je mange et suis mangé, mangé, Je danse, danse, et chacun chante, chante, Je chante chante,, et chacun danse... danse...
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— Qu’est-ce Qu’e st-ce encore enco re que cette ce tte rtournelle rtour nelle ? demanda brusquement le médecn. En réalté, l avat reconnu les versets condamnés d’un évangle apocryphe, pour les avor pluseurs os entendu récter par des hermétstes qu leur attrbuaent d’occultes pouvors. — C’est C’es t le cantque de sant Jean, dt nnocemment le garçon. Et, se penchant par-dessus la table, l contnua sur un ton de tendre confidence : — Le prntemps est es t venu, la colombe soupre, le ban des Anges est tout tède. Ils se prennent par la man et chantent à pett brut, de peur d’être entendus des méchants. Le rère Floran her avat apporté un luth, et l jouat tout bas des musques s douces qu’elles asaent pleurer. — Etes-vous nombreux dans cette ce tte aventure ? demanda malgré lu Sébasten Théus. Le garçon compta sur ses dogts : — Il y a Qurn, mon am, e t le novce Franços de Bure, qu a un clar vsage et une belle vox clare. Mattheu Aerts vent de temps à autre, contnua-t-l, ajoutant encore deux noms que le médecn ne connassat pas, et le rère Floran manque rarement l’assemblée des Anges. Perre de Hamaere ne vent jamas, mas l les ame. Zénon ne s’attendat pas à la menton de ce mone supposé austère. Une nmté exstat entre eux depus que l’économe s’état opposé aux réectons de Sant-Cosme, et avat à pluseurs reprses
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tenté de rogner les deners de l’hospce. Un nstant, l Cancel Download And Print lu sembla que les étranges aveux de Cypren n’étaent qu’un pège ourd par Perre pour l’y are tomber. Mas le garçon reprt : — La Belle non plus ne vent pas toujours, mas seulement quand les méchantes ne lu ont pont peur. Sa noraude apporte dans un lnge du pan bént des Bernardnes. Il n’y a chez les Anges n honte, n jalouse, n déense concernant le doux usage du corps. La Belle donne à tous ceux qu l’en requèrent la consolaton de ses basers, mas elle ne chért que Cypren. — Comment l’appelez-vous ? dt le médecn, soupçonnant pour la premère os un nom et un vsage sous ce qu lu avat paru jusque-là les amoureuses abrcatons d’un garçon prvé de filles, depus qu’l avat dû renoncer aux jeux sous les saules avec les vachères. — Nous l’appelons Eve, dt doucement Cypren. Une pognée de charbons brûlat dans un réchaud sur l’appu de la enêtre. On s’en servat pour are ondre la gomme des collyres. Zénon sast le garçon par la man et l’entraîna vers la pette flamme. Un long nstant, l lu mantnt le dogt au-dessus de la masse ncandescente. Cypren pâlt jusqu’aux lèvres, qu’l se mordt pour ne pas crer. Zénon état à pene mons pâle. Il lu lâcha ausstôt la man. — Comment supportere suppor terez-vous z-vous sur tout votre corps la même flamme ? dt-l à vox basse. Trouvez des plasrs mons dangereux que vos assemblées d’Anges. De sa man gauche, Cypren avat attent sur un rayon un bocal contenant de l’hule de lys dont l se servt pour endure la parte brûlée. Zénon l’ada slenceusement à bandager son dogt.
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A ce moment,Cancel le rèreDownload Luc entra avec un plateau And Print destné au preur, auquel on portat chaque sor une poton calmante. Zénon s’en chargea, et monta seul chez le relgeux. Le lendeman, l’ncdent tout enter ne semblat plus qu’un cauchemar, mas l revt Cypren dans la salle, occupé à laver le ped d’un enant blessé. Il portat toujours son bandage. Par la sute, et chaque os avec la même nsupportable angosse, Zénon détournat son regard de la ccatrce du dogt brûlé. Cypren semblat s’arranger pour la lu mettre presque coquettement sous les yeux. Les spéculatons alchmques dans la cellule de Sant-Cosme urent remplacées par le va-et-vent anxeux d’un homme qu vot le danger et cherche une ssue. Peu à peu, comme des objets émergeant de la brume, des ats perçaent sous les dvagatons de Cypren. Le ban des Anges et leurs lcenceuses assemblées s’explquaent sans pene. Le sous-sol de Bruges état un lacs de passages souterrans s’embranchant de magasn en magasn et de cave en cave. Une mason abandonnée séparat seule les dépendances du couvent des Cordelers de celu des Bernardnes ; le rère Floran, un peu maçon, un peu pentre, dans ses travaux de réecton de la chapelle et des cloîtres, avat pu trouver d’ancennes étuves ou d’ancens lavors devenus pour ces ols une chambre secrète et un tendre asle. Ce Floran état un drôle de vngt-quatre ans dont la premère jeunesse s’état s’é tat passée à errer er rer gaement par le pays, portraturant les nobles dans leurs châteaux et les bourgeos dans leurs masons de vlle et recevant d’eux en échange la pallasse et le manger. Les troubles d’Anvers ayant at évacuer le couvent où l avat subtement prs le roc, on l’avat casé depus l’automne chez les Cordelers de Bruges. Plasant,
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ngéneux, portant beau, l état toujours entouré Cancel Download And Print d’une bande d’apprents voltgeant sur ses échelles. Ce cerveau êlé avat pu rencontrer quelque part un reste de ces Béguns ou de ces Frères du Sant-Esprt extermnés au début du sècle, et attraper d’eux, comme une contagon, ce langage fleur et ces appellatons séraphques qu’l aurat ensute transms à Cypren. A mons touteos que le jeune rustque n’eût lu-même recuell ce dangereux jargon parm les supersttons de son vllage, comme ces germes d’une peste oublée qu contnuent à couver secrètement au ond d’une armore. Depus la malade du preur, Zénon avat remarqué dans le couvent une tendance à l’rrégularté et au désordre : les ofces de nut n’étaent plus, dsat-on, qu’nexactement suvs par certans des rères ; tout un groupe résstat sourdement aux réormes étables par le preur en conormté avec les recommandatons du Concle ; les plus débauchés des mones détestaent déte staent Jean-Lous Jean-Lous de Berlamont Berlamont pour l’austérté dont l donnat l’exemple ; les plus rgdes, au contrare, le méprsaent pour sa béngnté jugée excessve. Des brgues se ormaent déjà en vue de l’électon du prochan supéreur. Les audaces des Anges avaent sans doute été acltées par cette atmosphère d’nterrègne. L’extraordnare état qu’un homme prudent comme Perre de Hamaere leur lassât courr le rsque mortel d’assemblées nocturnes, et commettre la ole encore plus grande d’y mêler deux filles, mas Perre n’avat sans doute ren à reuser à Floran et à Cypren. Ces filles elles-mêmes n’avaent d’abord semblé à Sébasten Théus que d’ngéneux sobrquets, ou tout smplement des songes. Pus, l se souvnt qu’on parlat beaucoup dans le quarter d’une demoselle de bonne extracton qu vers Noël avat prs logement
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chez les Bernardnes, pendant une absence de son Cancel Download And Print père, avoyer au Consel des Flandres, part rendre des comptes à Valladold. Sa beauté, ses afquets coûteux, le tent sombre et les anneaux d’orelles de sa pette servante almentaent les propos des boutques et de la rue. La demoselle de Loos sortat avec sa morcaude pour se rendre aux églses ou are des emplettes chez le passementer ou le pâtsser. Ren n’empêchat que Cypren durant l’une de ses courses n’eût échangé des regards, pus des paroles avec ces belles, ou que Floran réparant les resques du chœur n’eût trouvé moyen de les persuader pour lu-même ou pour son am. Deux filles hardes pouvaent ort ben se glsser de nut, par un dédale de corrdors, jusqu’aux assemblées nocturnes des Anges, et ournr à leur magnaton arce d’mages de l’Ecrture une Sulamte et une Eve. Peu de jours après les révélatons de Cypren, Zénon se rendt chez le pâtsser de la rue Longue acheter un vn d’hypocras qu entrat pour un ters dans la poton du preur. Idelette de Loos chosssat des mervelles et des échaudés sur le comptor. C’état une fille de qunze ans à pene, mnce comme un roseau, avec de longs cheveux d’un blond presque blanc et des yeux de source. Cette chevelure pâle et ces yeux d’eau clare rappelèrent à Zénon le jouvenceau qu avat été à Lübeck son compagnon nséparable. C’état à l’époque où l s’adonnat avec le père, le savant Aegdus Fredho, rche orèvre de la Bretenstrasse, expert lu auss ès arts du eu, à certans essas sur le rvetage et le ttre des métaux nobles. Cet enant réfléch avat été à la os un objet délceux et un studeux dscple… Gerhart s’état engoué de l’alchmste au pont de voulor l’accompagner dans ses voyages vers la France, et son père avat consent à ce qu’l commençât ans son tour d’Allemagne ; mas le phlosophe avat crant pour
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ce garçon délcatement nourr la rudesse des routes Cancel Download And Print et leurs autres dangers. Ces réquentatons de Lübeck, semblables à une sorte d’été de la SantMartn de sa ve errante, lu revenaent, non plus rédutes à une sèche préparaton de la mémore, comme ces souvenrs charnels qu’l avat évoqués naguère en médtant sur so-même, mas capteuses comme un vn par lequel l allat avant tout ne pas se lasser grser. Elles le rapprochaent, qu’l le voulût ou non, de la troupe nsensée des Anges. Mas d’autres souvenrs tourbllonnaent autour du pett vsage d’Idelette : quelque chose d’audaceux et de mutn chez la demoselle de Loos ramenat hors de l’oubl cette Jeannette Fauconner, mgnonne des étudants de Louvan, qu avat été sa premère conquête d’homme ; la fierté de Cypren ne lu semblat plus s puérle n s vane. Sa mémore se tendt pour remonter plus lon encore ; mas le fil se cassa ; la morcaude rat en croquant des dragées, et Idelette en sortant jeta à cet nconnu aux mèches grses un de ces sourres qu’elle décochat à tous les passants. Son ample robe encombrat l’étrote entrée de la boutque ; le pâtsser, qu amat les emmes, fit remarquer à son clent comment la demoselle savat ramener d’une man le paquet de ses jupes, découvrant ses chevlles, et plaquant sur ses cusses la belle more. — Flle qu montre ses ormes orme s at assavor assavor à chacun qu’elle a am d’autre chose que de broches, dt-l égrllardement au médecn. Cette plasantere état de celles qu’on se dot d’échanger entre hommes. Zénon en rt conscenceusement. Le va-et-vent nocturne reprenat : hut pas entre le core et le lt, douze pas entre la lucarne et la porte : l usat le plancher dans ce qu état déjà une
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promenade de prsonner. De tout temps, l avat su Cancel Download And Print que certanes de ses passons, assmlées à une hérése de la char, pouvaent lu valor le sort réservé aux hérétques, c’est-à-dre le bûcher. On se at à la érocté des los de son sècle, comme on se at aux guerres susctées par la sottse humane, à l’négalté des condtons, à la mauvase polce des routes et à l’ncure des vlles. Il allat de so qu’on pût brûler pour avor amé Gerhart tout comme on pouvat grller pour lre la Bble en langue vulgare. Ces los nopérantes par la nature même de ce qu’elles prétendaent punr ne touchaent n aux rches n aux grands de ce monde : le Nonce à Innsbruck s’état vanté de vers obscènes qu eussent at rôtr un pauvre mone ; on n’avat jamas vu un segneur jeté je té aux flammes pour avor sédut son page. Elles sévssaent sur des ndvdus plus obscurs, mas l’obscurté même état un asle : en dépt des hameçons, des filets et des torches, la plupart des possons poursuvent dans les proondeurs nores leur route sans sllage, sans guère se soucer de ceux de leurs compagnons qu tressautent ensanglantés sur le pont d’une barque. Mas l savat auss qu’l sufsat de la rancune d’un ennem, d’un moment de ureur et de ole d’une oule, ou tout smplement de l’nepte rgueur d’un juge, pour perdre des coupables qu peut-être étaent nnocents. L’ndérence tournat en rage, et la dem-complcté en exécraton. Toute sa ve, l avat expérmenté cette crante mêlée à tant d’autres. Mas on supporte mons aclement pour autru ce qu’on accepte assez convenablement pour so-même. Ces temps de troubles encourageaent la délaton en toute chose. Le pett peuple secrètement sédut par les brseurs d’mages se jetat avdement sur tout esclandre qu pouvat déconsdérer les pussants Ordres auxquels auxquels l reprochat leurs rchesses et e t leur
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autorté. A Gand, quelques mos plus tôt, neu moCancel Download And Print nes augustns suspects à tort ou à rason d’amtés sodomtques, avaent brûlé après des tortures nouïes pour satsare à l’exctaton de badauds ameutés contre des gens d’Eglse ; la crante de paraître étouer une aare scandaleuse avat empêché de s’en tenr, comme l’eût recommandé la sagesse, à des penes dscplnares nflgées par l’ordre lu-même. La stuaton des Anges état plus dangereuse encore. Les jeux amoureux avec les deux filles, qu eussent dû dluer aux yeux de l’homme de la rue ce qu’on jugeat la norceur de l’aventure, exposaent au contrare davantage ces nortunés. La demoselle de Loos devenat le pont de mre sur qu se fixerat la basse curosté du peuple ; le secret des assemblées nocturnes dépendat désormas du babl émnn ou d’une ndue écondté. Mas le rsque le plus grand état dans ces appellatons angélques, ces cerges, ces rtes enantns de vn et de pan bént, ces réctatons de versets apocryphes auxquels personne, pas même leurs auteurs, n’avaent jamas ren comprs, cette nudté enfin, qu pourtant ne dérat guère de celle de garçons jouant autour d’une mare. Des rrégulartés qu mértaent assurément des souets mèneraent à la mort ces cœurs ous et ces têtes ables. Personne n’aurat le sens de trouver tout smple que des enants gnares découvrant avec émervellement les joes de la char se servssent des phrases et des mages sacrées qu’on avat de tout temps nstllées en eux. Tout comme la malade du preur réglat à peu de chose près la date et la nature de sa fin, Cypren et ses camarades semblaent à Zénon auss perdus que s’ls avaent déjà cré dans les flammes. Asss à sa table, dessnant vaguement sur les marges d’un regstre des chres ou des sgnes, l se dsat que sa propre lgne de repl état sngulè-
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rement vulnérable. Cypren avat tenu à are de Cancel Download And Print lu un confident, snon un complce. Un nterrogatore un peu poussé révélerat presque névtablement son nom et sa personnalté vértables, et l n’état pas plus consolant d’être appréhendé pour athésme que pour sodome. Il n’oublat pas non plus les sons donnés à Han et les précautons prses pour le soustrare à la justce, qu pouvaent d’un jour à l’autre le are trater trate r en rebelle smplement pendable. La prudence eût été de partr, et tout de sute. Mas l n’état pas queston de qutter en ce moment le chevet du preur. Jean-Lous Jean-Lous de Berlamont Ber lamont mourat lentement, conormément à ce qu’on savat du cours habtuel de son mal. Il état devenu d’une magreur presque étque, qu se remarquat davantage chez cet homme jads de complexon robuste. La dfculté d’avaler d’avaler ayant augmenté, Sébasten Théus asat abrquer par la velle Greete des alments légers, couls et srops, qu’elle préparat selon d’ancennes recettes autreos en honneur dans la cusne de la mason Lgre. Ben que le malade s’eorçât d’y prendre plasr, l n’y touchat que du bout des lèvres, et Zénon le soupçonnat de sourr sans cesse de la am L’extncton de vox état presque totale ; le preur réservat la parole aux communcatons les plus nécessares avec ses subordonnés et son médecn. Le reste du temps, l écrvat ses désrs ou ses ordres sur des bouts de paper placés sur le lt, mas, comme l le fit une os observer à Sébasten Théus, l n’y avat plus grand-chose à écrre ou à dre. L’homme de l’art avat demandé qu’on communquât au malade le mons possble des événements du dehors, tenant à lu épargner le réct des barbares commses commse s par le Trbunal des Troubles, qu
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sévssat à Bruxelles. Mas les nouvelles semblaent Cancel Download And Print filtrer jusqu’à lu. Vers la m-jun, le novce chargé des sons corporels du preur dscutat avec Sébasten Théus du jour où, pour la dernère os, on lu avat donné le ban de son qu lu raraîchssat la peau et semblat lu restaurer pour un temps un certan ben-être. Le preur tourna vers eux son vsage grs et marmonna avec eort : — C’état C’é tat le lund sx, le jour où les deux comtes comte s ont été exécutés. Quelques larmes coulaent slenceusement sur ses joues hâves. hâves. Zénon apprt par la sute que JeanLous de Berlamont état apparenté à Lamoral par sa déunte emme. Peu de jours plus tard, le preur confia à son médecn un mot de consolaton pour la veuve du comte, Sabne de Bavère, que l’nquétude et la douleur avaent mse, dsat-on, à deux dogts de la tombe. Sébasten Théus ayant emporté ce pl pour le remettre à un messager, Perre de Hamaere qu rôdat dans un corrdor s’nterposa, cragnant pour le couvent une mprudence de son supéreur. Zénon tendt le bllet avec dédan. L’économe le rendt après en avor prs connassance : l n’y avat ren de dangereux dans ces condoléances à l’llustre veuve et ces promesses de prer. Madame Sabne état tratée avec déérence par les ofcers du Ro eux-mêmes. A orce de penser à l’aare qu l’occupat, Zénon se persuada qu’l sufrat pour parer au pre d’envoyer le rère Floran restaurer alleurs des chapelles. Lassés à eux-mêmes, Cypren et les novces n’oseraent renouveler leurs assemblées nocturnes, et l n’état pas, d’autre part, mpossble d’engager les Bernardnes à meux surveller deux filles. Le déplacement de Floran dépendant du seul preur,
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le phlosophe seCancel décda Download à confier à celu-c le peu And Print qu’l allat pour le décder à agr sans retard. Il attendt un jour où le malade se sentît mons mal. Ce ut le cas un certan après-md du début de jullet julle t où l’évêque é tat venu en personne per sonne prendre des nouvelles du preur. Monsegneur venat de repartr ; Jean-Lous de Berlamont revêtu de son roc état étendu sur son lt, et l’eort at pour recevor courtosement son hôte semblat lu avor rendu momentanément de l’anmaton et des orces. Sébasten vt sur la table un plateau à peu près ntact. — Vous remerce reme rcerez rez cette ce tte bonne emme, dt le relgeux d’une vox mons able qu’à l’ordnare. J’a peu mangé, l est es t vra, ajouta-t-l presque gaement, mas l n’est pas mauvas qu’un mone sot contrant au jeûne. — L’évêque aura certanement cer tanement accordé au preur une dspense, dt le médecn sur le même ton de plasantere. Le preur sourt. — Monsegneur est es t ort or t cultvé, et je le cros homme de cœur, ben que je sos de ceux qu s’opposèrent à sa nomnaton par le Ro, lequel passat outre à nos veux usages. J’a eu plasr à lu recommander mon médecn. — Je ne cherche cherc he pas un autre poste, dt Sébasten Théus avec enjouement. Le vsage du malade exprmat déjà la atgue. — Je ne veux pas me plandre, Sébasten, lt-l patemment, gêné comme toujours lorsqu’l parlat de ses propres maux. Mes penes sont ort tolérables… Mas l y a des eets pénbles. Ans, j’héste à recevor la Sante Communon… Il ne audrat pas qu’une toux ou qu’un hoquet… S quelque pallat pouvat rédure un peu cette angne…
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— L’angne peut se guérr, monseur le preur, preur, Cancel Download And Print mentt le médecn. Nous comptons beaucoup sur ce bel été… — Sans doute, fit dstratement le preur. preur. Sans doute… Il tendt son magre pognet. Le mone de garde s’étant momentanément éclpsé, Sébasten Théus dt qu’l venat par hasard de rencontrer le rère Floran. — Ou, fit le preur, preur, tenant peut-être peut-êtr e à montrer qu’l avat encore la mémore des noms. On l’occupera à rénover les resques du chœur. Les onds manquent pour acheter des pentures plus neuves… Il semblat crore le mone aux pnceaux et aux godets arrvé de la velle. Contrarement aux bruts qu couraent dans les corrdors du couvent, Zénon jugeat Jean-Lous de Berlamont Berl amont en possesson de ses acultés, mas celles-c s’étaent pour ans dre ntérorsées. Soudan, le preur lu fit sgne de se pencher comme s’l avat à chuchoter un secret, mas l n’état déjà plus queston du rère pentre. — … L’oblaton dont nous avons un jour parlé, am Sébasten… Mas l n’y a ren à sacrfier… Il mporte peu qu’un homme de mon âge vve ou meure… — Il m’mporte m’mpor te que le preur vve, répondt ermement le médecn. Mas celu-c avat renoncé à appeler à l’ade. Tout recours rsquat de tourner en délaton. Ces secrets eussent pu s’échapper par nadvertance d’une bouche atguée ; l se pouvat même que cet homme à bout de orces ît preuve d’une d’une rgueur rgueur qu autreautrement n’état pas dans sa nature. Enfin, l’ncdent du bllet prouvat que le preur n’état plus maître chez lu. Zénon fit encore une tentatve pour erayer Cypren. Il lu parla du désastre des Augustns de Gand, dont le mone nfirmer devat d’alleurs
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Les désordres de la chair
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savor quelque chose. Le résultat ne ut pas ce qu’l Cancel Download And Print attendat. — Les Augustns sont des bêtes, bêt es, dt laconquement le jeune Cordeler Cordele r. Mas tros jours plus tard, l s’approcha du médecn d’un ar nquet : — Le rère Floran a perdu un talsman qu’l tenat d’une Égyptenne, dt-l tout troublé. Il paraît que de grands maux pourraent s’ensuvre. S Mynheer, avec les pouvors qu’l a… — Je ne sus pas marchand d’amulettes, d’amulette s, réplqua Sébasten Théus en tournant les talons. Le lendeman, dans la nut du vendred au samed, le phlosophe travallat parm ses lvres quand un objet léger tomba à travers la enêtre ouverte. C’état une baguette de coudrer. Zénon s’approcha de la crosée. Une ombre grse dont l ne dstnguat que vaguement le vsage, les mans et les peds nus, se tenat en bas dans une atttude d’appel. Au bout d’un moment, Cypren s’en alla et dsparut sous l’arcade. Zénon revnt tremblant s’asseor à sa table. Un volent désr s’état emparé de lu, auquel l savat d’avance qu’l ne céderat pas, comme dans d’autres cas, en dépt d’une résstance pourtant plus orte, on sat d’avance qu’on s’abandonnera. Il ne s’agssat pas de suvre cet nsensé vers quelque vague débauche ou mage nocturne. Mas, dans cette ve sans répt, en présence du lent traval de rune qu s’accomplssat dans la char du preur, et peut-être dans son âme, une enve le prenat d’oubler auprès d’un corps jeune et chaud ces pussances du rod, de la perdton et de la nut. Fallat-l vor dans l’entêtement de Cypren le son de se concler un homme jugé utle, e t cru doué par surcroît d’occultes pouvors ? État-ce un exemple de plus de l’éternelle
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séducton tentée par Alcbade sur Socrate ? Une Cancel Download And Print dée plus démente vnt à l’esprt de l’alchmste. Se pouvat-l que ses propres désrs matés au profit de recherches plus savantes que celles de la char ellemême eussent prs hors de lu cette orme enantne et nocve ? Extinctis luminibus : l soua la lampe. Vanement, en anatomste et non en amant, l essayat de se représenter avec méprs les jeux de ces enants charnels. Il se redt que la bouche, où se dstlle les basers, n’est que la caverne des mastcatons, et que la trace des lèvres qu’on vent de mordre rebute au bord d’un verre. Vanement, l magna de blanches chenlles pressées l’une sur l’autre ou de pauvres mouches engluées dans le mel. Quo qu’on qu’on ît, Idelette et e t Cypren, Cypren, Franços Franços de Bure et Mattheu Aerts Aer ts étaent é taent beaux. L’étuve L’étuve abandonnée abandonnée état vrament une chambre magque ; la grande flamme sensuelle transmutat tout comme celle de l’athanor alchmque et valat qu’on rsquât celle des bûchers. La blancheur des corps nus lusat comme ces phosphorescences qu attestent les vertus cachées des perres. Au matn, la révulson état venue. La pre débauche au ond d’un bouge valat meux que les momeres des Anges. En bas, dans la salle grse, en présence d’une velle emme qu venat chaque samed are trater ses plaes varqueuses, l réprmanda cruellement Cypren pour avor lassé chor la boîte de pansements. Ren d’nsolte ne se lsat sur ce vsage aux paupères un peu boufes. L’nvte nocturne pouvat n’avor n’avor été é té qu’un songe. Mas les sgnes émanés du pett groupe s’mprégnaent mantenant d’hostlté et d’rone. Un matn, en entrant dans l’ofcne, le phlosophe trouva en évdence sur la table un dessn trop hable pour provenr de Cypren, qu pouvat à pene se servr
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d’une plume pour sgner son nom. L’esprt anCancel Download And Print tasque de Floran état présent dans cet amas de figures. C’état un de ces jardns de délces qu’on rencontrat de temps en temps chez les pentres, et où les bonnes gens voyaent la satre du péché, et d’autres, plus malns, la kermesse au contrare des audaces charnelles. Une belle entrat dans une vasque pour s’y bagner, accompagnée par ses amoureux. Deux amants s’embrassaent derrère un rdeau, trahs seulement par la poston de leurs peds nus. Un jeune homme écartat d’une man tendre les genoux d’un objet amé qu lu ressemblat comme un rère. De la bouche et de l’orfice secret d’un garçon prosterné s’élevaent vers le cel de délcates florasons. Une morcaude promenat sur un plateau une rambose géante. Le plasr ans allégorsé devenat un jeu sorcer, une rsée dangereuse. Le phlosophe déchra pensvement la eulle. Deux ou tros jours plus tard, un autre badnage lasc l’attendat l’attenda t : on avat tré d’un placard quelques velles chaussures qu servaent pour traverser le jardn par la boue et la nege ; ces soulers ben en vue se chevauchaent sur le plancher en un désordre obscène. Zénon les dspersa d’un coup de ped ; la plasantere état grossère. Plus nquétant ut un objet qu’l trouva un sor dans sa propre chambre. C’état un galet sur lequel un vsage et des attrbuts émnns, ou peut-être hermaphrodtes, avaent été maladrotement crayonnés ; le callou état entouré d’une mèche blonde. Le phlosophe brûla la boucle, et jeta avec dédan dans un tror cette espèce de poupée d’envoûtement. Ces persécutons cessèrent ; l ne s’état jamas abassé à en parler à Cypren. Il commençat à crore que les oles des Anges passeraent d’elles-mêmes, pour la smple rason que tout passe.
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Les malheurs publcs achalandaent l’hospce de Cancel Download And Print Sant-Cosme. Aux patents atttrés se mêlaent des vsteurs qu’on voyat rarement deux os : des rustques traînant avec eux un attral hétéroclte d’objets ramassés à la velle d’une ute ou trés d’une mason qu brûle, couvertures rousses, édredons lassant passer leurs plumes, battere de cusne ou pots ébréchés. Des emmes dans des ballots de lnge sale portaent des enants. Ces rustres chassés de hameaux rebelles méthodquement vdés par la troupe souraent presque tous de horons ou de blessures, mas leur mal prncpal état tout smplement la am. Certans traversaent la vlle comme des troupeaux transhumants, ne sachant ce que serat l’étape suvante ; d’autres se rendaent chez des parents nstallés dans cette régon mons éprouvée et ayant encore des bêtes et un tot. Avec l’ade du rère Luc, Zénon s’arrangea pour avor du pan à dstrbuer aux plus démuns. Mons gegnards, mas plus nquets, voyageant généralement seuls, ou par petts groupes de deux ou tros, on reconnassat des hommes de proesson ou de méter venus des vlles de l’ntéreur et que recherchat sans doute le Trbunal de Sang. Ces ugts arboraent de bons habts bourgeos, mas leurs soulers en loques, leurs peds gonflés et couverts d’ampoules trahssaent les longues marches dont ces sédentares n’avaent pas l’habtude ; ceux-là cachaent leur destnaton, mas Zénon savat par la velle Greete que des chaluters partaent presque chaque jour de ponts solés de la côte, emmenant ces patrotes en Angleterre ou en Zélande, selon ce que leur permettaent leurs moyens et l’état du vent. On les sognat sans poser de questons. Sébasten Théus ne quttat plus guère le preur, mas on pouvat se fier aux deux mones qu avaent fin par apprendre au mons les rudments de l’art
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de sogner. Le Cancel rère Luc état un homme rasss, Download And Print attaché à ses devors, dont l’esprt n’allat pas plus lon que l’mmédat traval à are. Cypren n’état pas dépourvu d’une sorte de gentlle bonté. Il avat allu renoncer à endormr à l’ade d’opats les maux du preur. Celu-c avat un sor reusé sa poton calmante. — Comprenez-mo, Comprene z-mo, Sébasten, murmura-t-l anxeusement, cragnant sans doute une résstance du médecn. On ne voudrat pas sommeller au moment où… Et invenit dormientes dor mientes... ... Le phlosophe acquesça d’un sgne. Son rôle auprès du mourant conssta désormas à lu are avaler quelques cullerées d’un boullon ou à ader le rère garde-malade à soulever ce grand corps décharné qu déjà sentat la tombe. Revenu tard à Sant-Cosme, l se couchat tout habllé, s’attendant toujours à une crse d’étouement dont le supéreur ne sortrat sor trat pas. Une nut, l crut entendre des pas rapdes s’approcher de sa cellule le long des dalles du corrdor. Il se leva précptamment et ouvrt la porte. Il n’y avat ren n personne. Il courut pourtant chez le preur. Jean-Lous Jean-Lous de Berlamont Berl amont se tenat dressé sur son séant, soutenu par le traversn et les orellers. Ses yeux grands ouverts se tournèrent vers le médecn avec ce qu parut à celu-c une sollctude sans bornes. — Partez, Parte z, Zénon ! artcula-t-l. ar tcula-t-l. Après ma mort… mor t… Une qunte de toux l’nterrompt. l’nte rrompt. Bouleversé, Boulever sé, Zénon s’état nstnctvement retourné, pour vor s le garde-malade asss sur son escabeau avat pu entendre. Mas ce vellard somnolat, dodelnant la tête. Le preur preur épusé état retombé re tombé de bas sur sur
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ses coussns, en proe à une sorte de torpeur agtée. Cancel Download And Print Zénon s’nclna sur lu, le cœur battant, tenté de le réveller pour obtenr une parole ou un regard de plus. Il doutat des témognages de ses sens, et même de sa rason. Au bout d’un nstant, l s’asst près du lt. Après tout, l n’état pas mpossble que le preur eût de tout temps su son nom. Le malade remuat par ables saccades. Zénon lu massa longuement les peds et les jambes, comme le lu avat jads ensegné à le are la dame de Frösö. Ce tratement valat tous les opats. Il fint lu-même par s’endormr au bord du lt, la tête dans les mans. Au matn, l descendt au réectore prendre un bol de soupe tède. Perre de Hamaere se trouvat là. Le cr du preur avat presque superstteusement révellé toutes les alarmes de l’alchmste. Il prt Perre de Hamaere à part et lu dt à brûle-pourpont : — J’espère J’espè re que vous avez ms ordre aux oles de vos ams. Il allat parler de l’honneur et de la sécurté du couvent. L’économe lu épargna ce rdcule. — Je ne sas ren de toute cette ce tte hstore, dt-l volemment. Et l s’élogna dans un grand claquement de sandales. Le preur reçut ce sor-là l’Extrême-Oncton pour la trosème os. La pette pèce et la chapelle contguë étaent bondées de mones tenant des cerges. Quelques-uns pleuraent ; d’autres se contentaent d’assster avec décorum à la cérémone. Le malade à dem engourd, s’applquant, semblat-l, à resprer le mons pénblement possble, regardat comme sans les vor les pettes flammes jaunes.
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Quand les prères des agonsants eurent prs fin, les Cancel Download And Print assstants sortrent en file, lassant seulement derrère eux deux mones avec leur rosare. Zénon qu s’état tenu à l’écart reprt sa place habtuelle. Le temps des communcatons verbales, même les plus brèves, état passé ; le preur se bornat à demander par sgnes un peu d’eau, ou l’urna accroché au con du lt. A l’ntéreur de ce monde en rune, comme un trésor sous un tas de décombres, l semblat à Zénon qu’un esprt subsstat encore, avec lequel l état peut-être possble de rester en contact au-delà des mots. Il contnuat à tenr le pognet du malade, et ce able attouchement parassat sufre pour are passer au preur un peu de orce, et pour en recevor en échange un peu de sérénté. De temps à autre, le médecn, pensant à la tradton qu veut que l’âme d’un homme qu s’en va flotte au-dessus de lu comme une flammèche enveloppée de brume, regardat dans la pénombre, mas ce qu’l voyat n’état probablement que le reflet dans la vtre d’une chandelle allumée. Vers le pett matn, Zénon retra sa man ; le moment état venu de lasser le preur s’avancer seul vers les dernères portes, ou peut-être au contrare accompagné par les figures nvsbles qu’l avat dû conjurer dans son agone. Un peu plus tard, le malade parut s’agter sur le bord du rével ; les dogts de sa man gauche semblaent chercher vaguement quelque chose sur sa potrne, à l’endrot où jads, sans doute, Jean-Lous de Berlamont avat porté sa Toson d’or. Zénon aperçut sur l’oreller un scapulare dont le fil s’état dénoué. Il le remt en place; le mourant y appuya les dogts d’un ar de contentement. Ses lèvres remuaent sans brut. A orce de prêter l’orelle, Zénon fint pourtant par entendre, répétée sans doute pour la mllème os, la fin d’une prère : — ... nunc et in hora mortis nostrae. nostrae.
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Une dem-heure passa ; l demanda aux deux Cancel Download And Print mones de s’occuper des sons à donner au corps. Il asssta aux unéralles du preur de l’un des bas-côtés de l’églse. La cérémone avat attré beaucoup de monde. Il reconnut au premer rang l’évêque et, tout près, appuyé sur une canne, un vellard à dem perclus, mas robuste, qu n’état autre que le chanone Bartholommé Campanus ayant acqus de la prestance et de l’assurance avec le grand âge. Les mones sous leurs capuchons se ressemblaent tous. Franços de Bure manœuvrat l’encensor ; l avat vértablement un vsage d’ange. L’auréole ou la tache vve du manteau d’une sante brllaent çà et là dans les resques rénovées du chœur. Le nouveau supéreur état un personnage assez terne, mas d’une haute pété, et qu passat pour un hable admnstrateur. Le brut courat que, sur les consels de Perre de Hamaere, qu avat travallé à son électon, l erat probablement ermer à brève échéance l’hospce de Sant-Cosme, jugé trop dspendeux. Peut-être auss avat-on eu vent des servces rendus aux ugts du Trbunal des Troubles. Aucune observaton touteos n’avat été ate au médecn. Peu lu mportat : Zénon s’état décdé à dsparaître stôt après les obsèques du preur. Cette os, l n’emportat ren. Il lasserat derrère lu ses lvres, qu’l ne consultat plus d’alleurs qu’assez peu. Ses manuscrts n’étaent n assez préceux, n assez compromettants pour qu’l les prît avec so, au leu de les lasser finr un jour ou l’autre dans le poêle du réectore. La sason étant chaude, l se décda à abandonner sa houppelande et ses hardes d’hver ; une smple casaque sur son melleur vêtement sufrat. Il mettrat dans un sac ses nstruments enveloppés d’un peu de lnge et
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quelques médcaments rares et coûteux. Au derner Cancel Download And Print moment, l y mt auss ses deux veux pstolets d’arçon. Chaque détal de cette réducton à l’essentel avat été l’objet de longues délbératons. L’argent ne manquat pas : outre le peu que Zénon avat économsé pour ce voyage sur les mnces émoluments alloués par le couvent, l avat reçu, quelques jours avant la mort du preur, un paquet apporté par le veux mone garde-malade qu contenat la bourse où l avat pusé autreos pour Han. Le preur depus ne semblat semblat pas s’en être serv. se rv. Sa premère ntenton avat été d’emprunter la charrette du fils de Greete jusqu’à Anvers, et de se glsser de là en Zélande ou en Gueldre ouvertement révoltées contre l’autorté royale. Mas s des soupçons se portaent sur lu après son départ, l valat meux que cette velle emme et son voturer de fils ne ussent en ren comproms. Il prt la décson de se rendre à ped sur la côte et de s’y procurer une barque. La velle de son départ, l échangea pour la dernère os quelques mots avec Cypren, qu’l trouva chantonnant dans l’ofcne. Le garçon avat un ar de contentement tranqulle qu l’exaspéra. — J’ame à crore que vous avez renoncé à vos plasrs par cette pérode de deul, lu dt-l sans préambule. — Cypren ne se souce plus guère d’assemblées nocturnes, dt le jeune mone avec ce pl enantn qu’l avat de parler de so-même comme s’l s’agssat d’un autre. Il rencontre la Belle seul à seule et en plen solel. Il ne se fit pas beaucoup prer pour explquer qu’l avat découvert le long du canal un jardn abandonné dont l avat orcé la grlle, et où Idelette
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le rejognat paros. La morcaude asat le guet, Cancel Download And Print cachée derrère un mur. — Avez-vous songé à ménager la Belle ? Votre ve peut dépendre d’un bavardage bavardage d’accouchée. — Les Anges ne conçovent n n’enantent, dt Cypren du ton aussement assuré dont on récte des ormules apprses. — Ah ! Lassez là ce langage de bégun, fit le médecn excédé. Le sor qu précéda sa sorte de la vlle, l soupa comme l le asat souvent avec l’organste et sa bonne emme. Après le repas, l’organste l’emmena selon sa coutume écouter les morceaux qu’l exécuterat le dmanche suvant sur les grandes orgues de Sant-Donaten. L’ar enermé dans les tuyaux sonores se répandat répandat dans la ne vde, plus plus harmoneux et plus pussant qu’aucune vox humane. Toute la nut, couché une dernère os sur son lt dans sa cellule de Sant-Cosme, Zénon se joua et se rejoua un certan motet de Roland de Lassus, mêlé à ses projets d’avenr. Il état nutle de partr trop tôt, les portes de la vlle n’ouvrant qu’au solel levant. Il écrvt un bllet explquant qu’un de ses ams tombé malade dans une localté vosne l’avat appelé d’urgence, et qu’l serat sans doute de retour dans mons d’une semane. Il aut toujours se réserver les moyens d’une rentrée possble. Quand l se glssa précautonneusement hors de l’hospce, la rue état déjà plene d’une aube grse d’été. Le pâtsser rouvrant le volet de sa boutque ut le seul à le vor sortr.
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LA PROMENADE SUR LA DUNE
IL arrva à la Porte de Damme au moment où on levat la herse et où on abassat le pont-levs. Les gardes le saluèrent polment ; ls étaent habtués à ces sortes matnales de l’herborste ; son paquet n’attra pas l’attenton. Il marchat à grands pas rapdes le long d’un canal ; c’état l’heure où les maraîchers entraent en vlle pour vendre leurs légumes ; beaucoup de ces gens le connassaent et lu souhatèrent bon vent ; un homme qu comptat justement venr à l’hospce se are sogner d’une descente ut agé d’apprendre que le médecn s’absentat ; le docteur Théus l’assura qu’l serat de retour vers la fin de la semane, mas ce mensonge ut dur à are. On avat devant so une de ces belles matnées où le solel perce peu à peu les brumes. Un ben-être s act qu’l état presque une joe emplss emplssat at le marcheur. Il semblat sufsant pour jeter derrère so, comme d’un d’un coup d’épaule, d’épaule, les angosses et e t les
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soucs qu avaent agté ces dernères semanes, Cancel Download And Print de se drger d’un pas erme vers un pont de la côte où l trouverat une barque. Le matn enterrat les morts ; l’ar lbre dsspat le délre. Bruges une leue derrère lu aurat pu être stuée dans un autre sècle ou dans une autre sphère. Il s’étonnat d’avor consent à s’emprsonner pendant près de sx années dans l’hospce de Sant-Cosme, enlsé dans une routne conventuelle pre que l’état d’homme d’Eglse qu lu asat horreur à vngt ans, s’exagérant l’mportance des pettes ntrgues et des petts esclandres névtables en hus clos. Il lu semblat presque avor nsulté aux nfines possbltés de l’exstence ’en renonçant s longuement au monde grand ouvert. La démarche de l’esprt se rayant un chemn à l’envers des choses menat à coup sûr à des proondeurs sublmes, mas rendat mpossble l’exercce même qu consste à être. Il avat trop longtemps aléné le bonheur d’aller drot devant so dans l’actualté du moment, lassant le ortut redevenr son lot, ne sachant pas où l coucherat ce sor, n comment dans hut jours l gagnerat son pan. Le changement état une renassance et presque une métempsycose. Le mouvement alterné des jambes sufsat à contenter l’âme. Ses yeux se bornaent sans plus à drger sa marche, tout en joussant de la belle verdeur de l’herbe. L’ouïe enregstrat avec satsacton le hennssement d’un poulan galopant le long d’une hae vve ou l’nsgnfiant grncement d’une carrole. role. Une totale lberté lber té nassat nassat du départ. dépar t. Il approchat du bourg de Damme, l’ancen port de Bruges où naguère, avant l’ensablement de cette côte, abordaent les grands navres d’outre-mer. Ces temps d’actvté étaent révolus ; des vaches passaent où on débarquat autreos les balles de lane. Zénon se souvnt d’avor entendu l’ngéneur Blondeel suppler Henr-Juste d’avancer une parte des
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La promenade sur la dune
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onds nécessaresCancel pour lutter contre l’envahssement Download And Print par le sable ; ce rche à courte vue avat repoussé l’hable homme qu eût sauvé la vlle. Cette gent avarceuse n’agssat jamas autr autrement. ement. Il s’arrêta sur la place pour acheter une mche. Les masons bourgeoses entrebâllaent leurs portes. Une matrone rose et blanche sous sa pmpante cornette lâcha un barbet qu s’élogna gaement, flarant l’herbe, avant d’aller se figer un nstant dans l’atttude contrte des chens qu se soulagent, pour reprendre ensute ses bonds et ses jeux. Une bande d’enants palleurs allaent à l’école, graceux et ronds comme des rouges-gorges dans leurs vs habts. C’étaent pourtant là les sujets du ro d’Espagne qu raent un jour casser la tête à ces coquns de Franças. Un chat passa, rentrant au logs ; les pattes pendantes d’un oseau lu sortaent de la gueule. Une bonne odeur de pâte et de grasse émanat de la boutque du rôtsseur, mêlée à l’odeur ade de la bouchere vosne ; la patronne rnçat à grande eau le seul taché de sang. L’habtuelle ourche patbulare se dressat hors du bourg, sur un pett mamelon herbu, mas le corps qu pendat là avat été s longtemps exposé à la plue, au solel et au vent qu’l avat presque acqus la douceur des velles choses à l’abandon ; la brse jouat amcalement avec ses loques aux couleurs anées. Une compagne d’arbalétrers sortat pour trer des grves ; c’étaent de bons bourgeos réjous qu se donnaent en causant des claques sur l’épaule ; chacun portat en bandoulère la sacoche qu contendrat bentôt des parcelles de ve ayant un nstant plus tôt chanté en plen cel. Zénon pressa le pas. Il ut seul pendant un long moment sur une route qu serpentat entre deux pâtures. Le monde tout enter semblat composé de cel pâle et d’herbe verte, saturée de sève, bougeant sans cesse à ras du sol comme une onde. Un
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nstant, l évoqua le concept alchmque de la Cancel Download And Print viriditas, l’nnocente percée de l’être poussant tranqullement à même la nature des choses, brn de ve à l’état pur, pus renonça à toute noton pour se lvrer sans plus à la smplcté du matn. Au bout d’un quart d’heure, l rejognt un pett mercer qu marchat devant lu avec son ballot ; ls échangèrent un salut ; l’homme se plagnat que le commerce allat mal, tant de vllages à l’ntéreur du pays ayant été pllés par les reîtres. Ic, du mons, c’état calme ; l ne se passat pas grand-chose. Zénon contnua son chemn et se retrouva seul. Vers md, l s’asst pour manger son pan sur un talus d’où l voyat déjà brller au lon la lgne grse de la mer. Un voyageur mun d’une longue gaule vnt s’asseor auprès de lu. C’état un aveugle qu sortt lu auss de sa besace quelque chose pour rompre le jeûne. Le médecn admra l’hableté avec laquelle l’homme aux yeux blancs se débarrassa de la cornemuse qu’l portat à l’épaule, débouclant la courroe et posant délcatement l’nstrument sur l’herbe. L’aveugle se élctat que la journée ût belle. Il gagnat sa ve en asant danser les garçons et les filles à l’auberge ou dans les cours de erme ; l coucherat ce sor à Heyst où l jouerat dmanche ; l contnuerat ensute du côté de Sluys : grâce à Deu, l y avatjoujours assez de jeunesse pour qu’on trouvât partout son profit, et paros sa réjoussance. Mynheer le crorat-l ? On trouvat çà et là des emmes apprécant les aveugles ; l ne allat pont s’exagérer le malheur de n’avor plus d’yeux. Comme beaucoup de ses parels, cet aveugle usat et abusat du mot vor : l voyat que Zénon état un homme dans la orce de l’âge et qu avat de l’éducaton ; l voyat que le solel état encore au mleu du cel ; l voyat que ce qu passat dans le senter derrère eux état une emme un peu nfirme portant un joug
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La promenade sur la dune
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d’où pendaent deux seaux. Tout d’alleurs n’état pas Cancel Download And Print aux dans ces vanteres : ce ut lu qu s’aperçut le premer du glssement d’une couleuvre à travers l’herbe. Il tâcha même à l’ade de son bâton de tuer cette sale bête. Zénon le qutta après une aumône d’un lard, et s’en ut poursuv par de crardes bénédctons. Le chemn contournat une assez grande erme ; c’état la seule dans cette régon où l’on sentat déjà sous ses peds le crssement du sable. Le domane avat bon ar avec ses terres lées çà et là par des talls de noseters, son mur longeant un canal, sa cour ombragée d’un tlleul, et où la emme au joug se reposat dételée sur un banc, gardant près d’elle ses deux selles. Zénon hésta, pus passa. Ce leu-dt d’Oudebrugge avat appartenu aux Lgre ; l état peut-être encore dans la amlle. Cnquante ans plus tôt, sa mère et Smon Adransen, peu avant leurs noces, étaent allés recuellr pour Henr-Juste la rente de la pette terre ; cette vste avat été une parte de plasr. Sa mère s’état assse au bord du canal, lassant pendre dans l’eau ses peds qu’elle avat déchaussés, et qu, vus de la sorte, parassaent encore plus blancs. Smon en mangeant répandat des mettes sur sa barbe grse. La jeune emme avat décortqué pour pour l’enant l’enant un œu dur et lu avat donné la préceuse coqulle. Le jeu consstat à courr dans le sens du vent sur les dunes toutes proches, en tenant sur la paume cet objet léger qu s’échappat pour voleter devant vous, pus se posat un nstant, comme un oseau, de sorte qu’l allat perpétuellement tenter de s’en ressasr, et que la course se complquat d’une sére de courbes nterrompues et de drotes brsées. Il lu semblat paros avor avor joué ce jeu toute sa ve. Il avançat déjà mons rapdement sur le sol plus meuble. La route montat et redescendat à travers
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les dunes, marquée seulement par des ornères sur Cancel Download And Print le sable. Il crosa deux soldats qu sans doute asaent parte de la garnson de Sluys, et se élcta d’être armé, car tout soldat rencontré dans un leu désert tourne asément au bandt. Mas ls se contentèrent de grommeler une salutaton tudesque, et parurent tout réjous quand l leur répondt dans la même langue. Au haut d’une émnence, Zénon aperçut enfin le vllage de Heyst, avec son estacade à l’abr de laquelle reposaent quatre ou cnq barques. D’autres se balançaent en mer. Ce hameau au bord de l’mmensté possédat en pett toutes les commodtés essentelles des vlles : une halle, qu servat sans doute à la crée du posson, une églse, un mouln, une esplanade avec une potence, des masons basses et de hauts greners. L’auberge de La Belle Colombelle que Josse lu avat ndquée comme servant de pont de rallement aux ugts état une masure au ped de la dune, avec un colomber dans lequel on avat fiché un bala en guse d’ensegne, ce qu sgnfiat que cette pauvre hôtellere état auss un rustque bourdeau. Il audrat dans un parel endrot veller à son bagage et à l’argent qu’l avat sur so. Dans les houblons du jardnet, un clent trop ben abreuvé dégorgeat sa bère. Une emme cra quelque chose à l’vrogne par une lucarne du premer étage, pus retra sa tête ébourée et retourna sans doute are seule un bon somme. Josse avat donné à Zénon le mot de passe, qu’l tenat lu-même d’un am. Le phlosophe entra et salua son monde. La salle commune état enumée et nore comme une cave. La patronne accroupe devant la chemnée abrquat une omelette, adée par un jeune garçon qu tenat les souets. Zénon s’asst à une table et dt, gêné d’avor à débter cette phrase toute ate, comme un acteur sur les tréteaux de la ore : — Qu veut la fin…
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— … veut lesCancel moyens,Download dt la And emme re tourPrint en se retournant. D’où venez-vous ? C’e st Josse qu m’envoe. — C’est — Il nous envoe pas mal de monde, fit la patronne pa tronne avec un énorme cln d’œl. — Ne vous trompez pas sur mon compte, dt le phlosophe mécontent d’entrevor dans le ond de la salle un sergent à bonnet emplumé qu vdat son pot. Je sus en règle. venez are chez nous ? — Alors, qu’est-ce que vous venez protesta la belle hôtesse. Ne vous tourmentez pas pour Mlo, contnua-t-elle en désgnant du pouce le soldat. C’est l’amoureux de ma sœur. Il est d’accord. Vous mangerez manger ez ben quelque chose ? Cette queston état presque un ordre. Zénon accepta de manger quelque chose. L’omelette état pour le sergent ; l’hôtesse apporta dans une écuelle un ragoût passable. La bère état bonne. Il se trouva que l’homme de guerre état Albanas, et qu’l avat passé les Alpes dans l’arrère-tran des troupes du duc. Il parlat un flamand bgarré d’talen, dans lequel la patronne semblat se débrouller sans trop de pene. Il se plagnat d’avor grelotté tout l’hver, et les profits n’étaent pont ce qu’on avat dt dans le Pémont, car les luthérens pllables et rançonnables abondaent mons qu’on ne l’avat prétendu là-bas pour allécher les troupes. — C’est comme ça, dt l’hôtesse d’un ton consolant. On ne gagne jamas ce que les gens croent qu’on gagne. Marken ! Marken descendt, coée d’un châle. Elle s’asst auprès du sergent. Ils mangeaent la man dans le même plat. Elle lu mettat dans la bouche les bons morceaux de lard qu’elle trat de l’omelette. L’enant au souet s’état éclpsé.
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Zénon repoussa son écuelle et voulut payer. Cancel Download And Print — Pourquo tant se presser ? fit néglgemment la belle hôtesse. Mon homme et Nclas Bambeke vendront souper tout à l’heure. Ça mange toujours rod en mer, pauvres pauvres créatures créa tures ! — J’ame meux vor tout de sute la barque. — C’est vngt lards la vande, cnq lards la bère et cnq ducats le lassez-passer du sergent, explquat-elle avec poltesse. Le lt est en plus. Ils ne mettront pas à la vole avant deman matn. mon sau-con sau-condut, dut, protesta le voyageur voyageur.. — J’a déjà mon — Il n’y a de sau-condut que s Mlo est content, repartt la maîtresse emme. Ic, c’est lu le ro Phlppe. — Il n’est pas encore dt que je m’embarque, objecta Zénon. — Pas de marchandages ! gronda l’Albanas, élevant la vox du ond de la salle. Je ne vas pas m’échner jour et nut sur l’estacade à vor qu part ou qu ne part pas. Zénon paya ce qu’on demandat. Il avat prs la précauton de mettre dans une bourse juste ce qu’l allat d’argent pour qu’on ne crût pas qu’l en avat davantage davantage caché sur lu. — Comment s’appelle la barque ? — C’est du parel au même comme c, fit l’hôtesse. La Belle-Colombelle. Faudrat pas qu’l s’y trompât, hen, Marken ? — Pour ça non, dt la fille. Avec Les Quatre-Vents ls s’égareraent dans la brume et fileraent tout drot sur Vlvorde. La plasantere plasantere parut ort drôle aux deux emmes, emmes, et et même l’Albanas la comprt assez pour rre aux éclats. Vlvorde état une place à l’ntéreur des terres. — Vous pouvez lasser vos paquets c, remarqua l’hôtesse avec bonne humeur. humeur.
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embarquer tout And de sute, — Autant lesCancel Download Print dt Zénon. — Volà un partcule par tculerr qu n’a pas confiance, fit moqueusement Marken tands qu’l sortat. Il allt se heurter sur le seul à l’aveugle qu venat are danser la jeunesse. Celu-c le reconnut et le salua obséqueusement. Sur la route du port, l rencontra un peloton de soldats remontant vers l’auberge. L’un d’eux lu demanda s’l venat de La Belle-Colombelle ; sur sa réponse afrmatve, on le lassa passer. Mlo état assurément maître c. La Belle-Colombelle martme état une assez grosse barque à coque ronde posant à marée basse sur le sable. Zénon put s’approcher à peu près à ped sec. Deux hommes travallaent aux gréements avec l’enant qu tout à l’heure avat mané les souets devant le eu de la taverne ; un chen courat parm les tas de cordes. Plus lon, dans une flaque, une masse sanglante de têtes et de queues de harengs montrat qu’on avat porté alleurs le produt de la pêche. Un des hommes sauta à terre en voyant venr le voyageur. voyageur. — C’est mo Jans Bruyne, dt-l. Josse vous envoe pour l’Angleterre ? Faut encore savor ce que vous voudrez payer. payer. Zénon comprt que l’enant avat été dépêché là pour prévenr. On avat dû spéculer sur son degré d’opulence. Josse m’a parlé de seze ducats. duca ts. — Josse — Monseur, c’est quand l y a du monde. L’autre jour, jour, j’avas j’avas onze personnes. per sonnes. Plus de onze, ça ne se peut pas. Seze ducats par luthéren, ça asat cent septante-sx. Je ne ds pas que pour un homme seul… Je n’appartens pont à la relgon réormée, — Je nterrompt le phlosophe. J’a une sœur marée à Londres à un marchand…
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— Nous en avons beaucoup de ces sœurs-là, dt Cancel Download And Print acéteusement acé teusement Jans Bruyne. C’est C’es t beau de vor les gens rsquer tout d’un coup le mal de mer pour s’embrasser en amlle. — Dtes-mo votre prx, nssta le médecn. — Mon Deu, Monseur, je ne veux pas vous dégoûter de are un tour en Angleterre. Mo, ce voyage ne me plaît pont. Etant donné qu’on est comme en guerre… — Pas encore, dt le phlosophe, caressant la tête du chen qu avat suv son maître sur la plage. — C’est chou vert et vert chou, fit Jans Bruyne. Le voyage est perms, parce que ce n’est pas encore déendu, mas ce n’est pas tout à at perms. Du temps de la rene Mare, la emme à Phlppe, ça allat ; sau votre respect, on brûlat les hérétques comme c. Mantenant, tout va mal : La Rene est bâtarde et at des poupons en cachette. Elle se dt verge, mas c’est seulement pour are pèce à Notre-Dame. On étrpe les prêtres dans ce pays-là et on che dans les vases sacrés. Ça n’est pas beau. J’ame meux pêcher pêche r près des de s côtes. — On peut auss pêcher en haute mer, dt Zénon. — Quand on pêche, on rentre quand on veut ; s je vas en Angleterre, Anglete rre, c’est c’es t un voyage qu peut durer… Le vent, savez-vous, ou un calme… Et s des cureux allaent se mêler de ma cargason, un drôle de gber à l’aller, et, au retour… Une os même, ajoutat-l en bassant la vox, j’a rapporté de la poudre à mousquet pour Monseur de Nassau. Il ne asat pas bon ce jour-là navguer dans ma coqulle. — Il y a d’autres barques, dt néglgemment le phlosophe. — C’est à vor, Monseur. La Sainte-Barbe travalle avec nous d’habtude ; elle a une avare : ren à are. Le Saint-Boniace a eu des ennus. Il y a des barques en mer, ben sûr, mas maln qu sat
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quand elles rentrent… S vousAnd n’êtes pas pressé Cancel Download Print vous pourrez aller vor à Blankenberghe ou à Weenduyne, mas vous trouverez les prx d’c. — Et celle-là, dt Zénon, ndquant une embarcaton plus légère sur laquelle un pett homme placdement nstallé à la poupe cusat son manger. — Les Quatre-Vents ? Allez-y s le cœur vous en dt, fit Jans Bruyne. Zénon réfléchssat, asss sur une caque abandonnée. Le museau du chen reposat sur ses genoux. — En tout cas, vous partez à l’aube ? — Pour la pêche, mon bon monseur, pour la pêche. Ben sûr, s vous avez autant dre cnquante ducats… — J’en a quarante, dt ermement er mement Sébasten Théus. — Va pour quarante-cnq. Je ne veux pas gruger un clent. S vous n’avez ren de plus pressant que d’aller vor votre sœur à Londres, pourquo ne pas rester deux ou tros jours à La Colombelle ?... Des uyards qu ont le eu au cul, l en vent tout le temps… Vous Vous ne payerez que votre quote-part. quote-par t. Je préère pré ère partr par tr sans attendre. — Je Je m’en doute… Et c’est c’es t plus prudent, car à — Je supposer que le vent change… Vous vous êtes ms en règle avec l’oseau qu’elles ont à l’auberge ? — S’l s’agt des cnq ducats qu’ls m’ont extorqués… — C’est pont nos ognons, dt dédagneusement Jans Bruyne, les emmes s’arrangent avec lu pour qu’on n’at pas d’ennus en terre erme. Hé, Nclas, cra-t-l à son camarade, volà le passager ! Un homme roux à carrure énorme sortt à moté par une écoutlle. — C’est Nclas Bambeke, déclara le patron. Il y a auss Mchel Sottens, mas l est allé souper au logs. Vous mangerez ben avec nous à La Colombelle ? Lassez vos paquets.
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beson pour la nut, dt le médecn, — J’en aura Cancel Download And Print déendant sa sacoche sacoc he dont Jans voulat s’emparer s’empare r. Je sus chrurgen chrurg en et j’a avec mo mes ns— Je truments, ajouta-t-l pour explquer le pods du sac, qu autrement aurat pu donner leu à des conjectures. — Monseur le chrurgen s’est auss pourvu d’armes à eu, fit sarcastquement le patron, notant du con de l’œl les crosses de métal qu asaent bâller les poches du médecn. — C’est d’un homme prudent, dt Nclas Bambeke en sautant de la barque. On rencontre du vlan monde, même en mer. Zénon leur emboîta le pas pour remonter à l’auberge. Arrvé à l’angle de la halle, l oblqua, leur lassant crore qu’l s’agssat seulement de lâcher de l’eau. Les deux hommes contnuaent à marcher en dscutant avec anmaton quelque chose, escortés du chen et de l’enant qu couraent en cercles. Zénon contourna la halle et se retrouva bentôt sur la plage. La nut venat. A deux cents pas, une chapelle à dem eondrée s’enlsat dans le sable. Il regarda à l’ntéreur. Une flaque lassée par la dernère grande marée emplssa emplssatt la ne aux statues rongées par le sel. Le preur sans doute se serat recuell là et aurat pré. Zénon s’nstalla sous le porche, reposant la tête sur sa sacoche. On voyat sur la drote les coques sombres des barques, avec une lanterne allumée à la poupe des Quatre-Vents. Le voyageur songea à ce qu’l erat en Angleterre. Le premer pont serat d’évter d’y passer pour un espon papste jouant au réugé. Il se vt errant dans les le s rues de Londres, sollctant un poste de chrurgen de la flotte ou chez un médecn une place analogue à celle qu’l avat occupée auprès de Jean Myers. Il ne parlat pont l’anglas, mas une langue s’apprend vte, et d’alleurs le latn va lon. Avec un
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peu de chance, Cancel on trouverat à s’employer chez un Download And Print grand segneur cureux d’aphrodsaques ou de remèdes pour sa goutte. Il avat l’habtude des salares généreux mas pas toujours payés, du sège au haut bout ou au bas bout de la table, selon l’humeur qu’aurat Mlord ou Son Altesse ce jour-là, des dsputes avec les médcastres du leu hostles au charlatan étranger. A Innsbruck ou alleurs, l avat déjà vu tout cela. Il audrat auss se rappeler de ne jamas parler du Pape Pape qu’avec qu’avec exécraton, exécra ton, comme c de Jean Calvn, et de trouver le ro Phlppe rdcule, comme l’état en Flandre la rene d’Angleter d’Angleterre. re. La lanterne des Quatre-Vents se rapprocha, balancée au bout du bras d’un homme en marche. Le pett patron chauve s’arrêta devant Zénon, qu se redressa à dem. — J’a vu Monseur venr se reposer repose r sous le porche. Ma mason est c tout près ; s Sa Segneure crant le seren… — Je sus ben où je sus, dt Zénon. — Sans voulor sembler trop cureux, pus-je demander à Sa Segneure comben ls prennent pour l’Angleterre ? — Vous devez ben savor savor leurs prx. — Ce n’est ’es t pont que je les blâme, Votre Segneure. La sason est courte : après la Toussant l aut que Monseur se rende compte qu’l n’est pas toujours commode de mettre à la vole. Mas au mons qu’ls soent honnêtes… Vous ne supposez pont qu’ls vont pour ce prx-là vous condure jusqu’à Yarmouth ? Non, Monseur, ls vous échangent en mer avec les pêcheurs de là-bas, et vous recommencez à payer sur de nouveaux ras. — C’est C’e st une méthode mé thode comme une autre, fit dstratement le voyageur. voyageur. — Monseur ne s’est-l s’es t-l pont dt que c’est c’es t chanceux pour un homme qu n’est plus jeune de partr
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seul avec tros gallards ? Un coup d’avron est vte donné. Ils revendent les hardes aux Anglas, et n vu n connu. — Venez-vous me proposer de m’emmener en Angleterre sur Les Quatre-Vents ? — Non pas, Monseur, mon bateau n’a pas l’envergure. Et même la Frse auss est ort lon. Mas s’l ne s’agt que de changer d’ar, Monseur dot ben savor que la Zélande coule comme qu drat hors des mans du Ro. Ça groulle de Gueux, là-bas, depus que Monseur de Nassau lu-même a commssonné le captane Sonnoy… Je sas les ermes où se ravtallent Messeurs Sonnoy et de Dolhan… Quelle est la proesson de Sa Segneure Segneure ? — Je Je sogne mes semblables, dt le médecn. — Monseur aura sur les régate ré gatess de ces Messeurs Messeur s l’occason de sogner de beaux coups et de belles entalles. Et on y est rendu en quelques heures quand on sat prendre le vent. On peut même partr avant la mnut ; Les Quatre-Vents n’ont pas beson d’un gros trant d’eau. — Comment évtere évte rez-vous z-vous les patroulles patroul les de Sluys ? — On connaît du monde, Monseur. Monseur. J’y a des ams. Mas Sa Segneure devra qutter ses bons vêtements et s’habller en pauvre matelot… S par hasard quelqu’un monte à bord… — Vous ne m’ayez pont encore ndqué vos prx. — Qunze ducats duca ts seraent seraent trop pour Sa Segneure ? — Le prx est es t modeste. modes te. Etes-vous sûr dans le nor de ne pas voguer sur Vlvorde Vlvorde ? Le pett homme chauve fit une grmace de damné. — Foutu calvnste, calvnste , va ! Mangeux de Sante Verge ! C’est La Belle-Colombelle qu vous aura at crore celle-là ? — Je ds ce qu’on m’a dt, fit laconquement Zénon.
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L’homme s’enCancel alla en Download jurant. Dx pas plus lon, l And Print se retourna, asant vrevolter sa lanterne. Le vsage ureux état redevenu un vsage servle. — Je vos que Monseur connaît les nouvelles, reprt-l onctueusement, mas l ne aut pas s’en lasser conter. Sa Segneure m’excusera d’avor été un peu v, mas je n’y sus pour ren, mo, dans l’arrestaton de Monseur de Battenbourg. Ce n’état même pas un plote d’c… Et pus, ça ne se comparat pas pour le gan : Monseur de Battenbourg est un gros morceau. Monseur sera auss en sûreté à mon bord que dans la mason de sa sante mère… — Il suft, dt Zénon. Votre barque peut mettre me ttre à la vole à mnut ; je pus changer d’habts dans votre mason qu est à côté, et votre prx est qunze ducats. Lassez-mo en pax. Mas le pett homme n’état pas de ceux qu’on décourage aclement. Il n’obét qu’après avor assuré Sa Segneure que celle-c, au cas où elle se ressentrat par trop de la atgue, pourrat se reare chez lu à bon marché et ne partr qu’à la nut suvante. Le captane Mlo ermat l’œl ; l n’état pas maré à Jans Bruyne. Zénon lassé seul se demanda comment l se asat qu’l eût sogné avec dévouement ces coquns malades, pusqu’l les eût volonters tués ben portants. Quand la lanterne eut reprs sa place à la poupe des Quatre-Vents, l se leva. La nut nore cachat ses mouvements. Il fit lentement un quart de leue dans la drecton de Weenduyne, son paquet sous le bras. Ce serat sans doute partout la même chose. Il état mpossble de décder lequel de ces deux bouons mentat, ou s par hasard tous deux dsaent vra. Il se pouvat auss que tous deux mentssent, et qu’l n’y eût là qu’une rvalté de msérables. En décderat qu voudrat. Une dune lu cacha les eux de Heyst pourtant tout proche. Il se chost un creux abrté de la brse,
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et ben en deçà de la lgne de marée haute qu se Cancel Download And Print devnat, même dans le nor, à l’humdté du sable. La nut d’été état tède. Il serat toujours temps d’avser au pett matn. Il étendt sur lu sa casaque. La brume cachat les étoles, sau Véga près du zénth. La mer asat son brut éternel. Il dormt sans rêves. Le rod le révella avant l’aube. Une pâleur envahssat le cel et les dunes. La marée montante lapat presque ses chaussures. Il rssonnat, mas ce rod portat déjà en lu la promesse du beau jour d’été. Frottant doucement ses jambes engourdes par l’mmoblté nocturne, l regardat la mer norme enanter ses vagues vte évanoues. Le brut qu dure depus le commencement du monde grondat tou jours. Il fit couler coule r entre ses dogts une pognée de sable. Calculus : avec cette ute d’atomes commençaent et s’achevaent toutes les cogtatons sur les nombres. Il avat allu pour émetter ans des rochers plus de sècles qu’l n’y avat de journées dans les récts de la Bble. Dès son jeune temps, la médtaton des phlosophes antques lu avat apprs à regarder de haut ces pauvres sx mlle ans qu sont tout ce que Jus et Chrétens consentent à connaître de la vénérable antquté du monde, mesurée par eux à la courte durée de la mémore de l’homme. Des paysans de Dranoutre lu avaent montré dans des tourbères d’énormes troncs d’arbres qu’ls magnaent apportés là par les marées du Déluge, mas l y avat eu d’autres envahssements par l’eau que celu auquel on appendat l’hstore d’un patrarche amateur de vn, tout comme l y avat eu d’autres destructons par le eu que la grotesque catastrophe de Sodome. Daraz avat parlé de myrades de sècles qu ne sont qu’un temps d’une respraton nfine. Zénon calcula que le vngt-quatre évrer prochan, s’l vvat encore, l aurat cnquante-neu ans. Mas l en état de ces onze ou douze lustres
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comme de cetteCancel pognéeDownload de sable : le vertge des And Print grands nombres émanat d’eux. Pendant plus d’un mllard et dem d’nstants, l avat vécu çà et là sur la terre, tands que Véga tournat aux alentours du zénth et que la mer asat son brut sur toutes les plages du monde. Cnquante-hut os, l avat vu l’herbe du prntemps et la pléntude de l’été. Il mportat peu qu’un homme de cet âge vécût ou mourût. Le solel état déjà v quand du haut de la dune l vt La Belle-Colombelle déployer sa vole et prendre la mer. Le temps eût été beau pour le voyage. La lourde barque s’élognat plus rapdement qu’on n’aurat cru. Zénon se recoucha dans sa bauge de sable, lassant la bonne chaleur élmner de lu toute trace de courbature nocturne, contemplant son sang rouge à travers ses paupères ermées. Il pesat ses chances comme s’l s’agssat de celles d’un autre. Armé comme l l’état, l pourrat orcer le coqun asss à la barre des Quatre-Vents de le débarquer sur quelque plage réquentée seulement des Gueux de mer ; l saurat au contrare lu casser la tête d’une balle s’l asat mne de mettre le cap sur un bâtment du Ro. Il s’état serv sans componcton de cette même pare de pstolets pour dépêcher un Arnaute qu l’avat assall jads dans la orêt bulgare ; tout comme après avor déjoué le guetapens de Perrotn, l s’en état sent d’autant plus homme. Mas l’dée d’avor à répandre la cervelle de ce ourbe lu semblat aujourd’hu rebutante sans plus. L’avs de rejondre en qualté de chrurgen les équpages de Messeurs Sonnoy ou de Dolhan état bon ; c’état de ce côté qu’l avat drgé Han à l’époque où ces patrotes à dem prates n’avaent pas encore l’autorté et les ressources qu’ls venaent d’acquérr à la aveur des nouveaux troubles. Une place auprès de Maurce de Nassau n’état pas exclue :
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ce gentlhomme manquat sûrement d’hommes de Cancel Download And Print l’art à son servce. Cette exstence de partsan ou d’écumeur de mer dérerat peu de ce qu’l avat vécu dans les armées de Pologne ou sur la flotte turque. Acculé au ps, on pouvat même maner pour quelque temps le cautère ou le scalpel dans les troupes du duc. Et le jour où la guerre lu donnerat des haut-le-cœur, l restat l’espor de gagner à ped un con du monde où pour le moment la plus éroce des sottses humanes ne sévssat pas. Ren de tout cela n’état nasable. Mas l allat se rappeler qu’après tout l ne serat peut-être jamas nquété à Bruges. Il bâlla. Ces alternatves ne l’ntéressaent plus. Il enleva ses soulers alourds par le sable, enonçant avec satsacton ses peds dans la couche chaude et flude, cherchant et trouvant plus bas la raîcheur marne. Il ôta ses habts, plaça précautonneusement sur eux son bagage et ses pesantes chaussures, et s’avança vers la mer. La marée bassat déjà : de l’eau jusqu’à m-jambe, l traver traversa sa des flaques mrotantes, mrotante s, et s’exposa au mouvement des vagues. Nu et seul, les crconstances tombaent de lu comme l’avaent at ses vêtements. Il redevenat cet Adam Cadmon des phlosophes hermétques, placé au cœur des choses, en qu s’élucde et se proère ce qu partout alleurs est nus et mprononcé. Ren dans cette mmensté n’avat de nom : l se retnt de penser que l’oseau qu péchat, balancé sur une crête, état une mouette, et l’étrange anmal qu bougeat dans une mare ses membres s dérents de ceux de l’homme une étole de mer. La marée bassat toujours, lassant derrère elle des coqullages aux sprales auss pures que celles d’Archmède ; le solel montat nsensblement, dmnuant cette ombre humane sur le sable. Plen d’une révérenceuse pensée qu l’eût at mettre à mort sur toutes les places
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publques de Mahomet ou du Chrst, l songea Cancel Download And Print que les symboles les plus adéquats du conjectural Ben Suprême sont encore ceux qu passent absurdement pour les plus dolâtres, et ce globe gné le seul Deu vsble pour des créatures qu dépérraent sans lu. De même, le plus vra des anges état cette mouette qu avat de plus que les Séraphns et les Trônes l’évdence d’exster. Dans ce monde sans antômes, la érocté même état pure : le posson qu rétllat sous la vague ne serat dans un nstant qu’un sanglant bon morceau sous le bec de l’oseau pêcheur, mas l’oseau ne donnat pas de mauvas prétextes à sa am. Le renard et le lèvre, la ruse et la peur, habtaent la dune où l avat dorm, mas le tueur ne se réclamat pas de los promulguées jads par un renard sagace ou reçues d’un renard-deu ; la vctme ne se croyat pas châtée pour ses crmes et ne protestat pas en mourant de sa fidélté à son prnce. La volence du flot état sans colère. La mort, toujours obscène chez les hommes, état propre dans cette soltude. Un pas de plus sur cette rontère entre le flude et le lqude, entre le sable et l’eau, et la poussée d’une vague plus orte que les autres lu erat perdre ped ; cette agone s brève et sans témon serat un peu mons la mort. Il regretterat peut-être un jour cette fin-là. Mas l en état de cette possblté comme des projets d’Angleterre ou de Zélande, nés de crantes de la velle ou de dangers uturs absents de ce moment sans ombre, plans ormés par l’esprt et non nécessté s’mposant à l’être. L’heure du passage n’avat pas encore sonné. Il revnt vers ses vêtements, qu’l eut quelque pene à retrouver, recouverts comme ls l’étaent déjà par une légère couche de sable. Le recul de la mer avat en peu de temps changé les dstances. La trace de ses pas sur la grève humde avat été
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mmédatement bue par l’onde ; sur le sable sec, le Cancel Download And Print vent eaçat toutes les marques. Son corps lavé avat oublé la atgue. Une autre matnée au bord de la mer se raccordat de plan-ped à celle-c, comme s ce bre nterlude de sable et d’eau durat depus dx ans : pendant son séjour à Lübeck, l s’état rendu à l’embouchure de la Trave avec le fils de l’orèvre pour recuellr l’ambre baltque. Les chevaux auss s’étaent bagnés ; débarrassés de leurs selles et de leurs housses, moullés d’eau de mer, ls redevenaent des créatures exstant pour elles-mêmes, au leu des pasbles montures habtuelles. Un des ragments d’ambre contenat un nsecte prs dans sa résne ; l avat regardé comme à travers une lucarne cette bestole enermée dans un âge de la terre où l n’avat pont accès. Il secoua la tête, comme on le at pour écarter une mportune abelle : l revvat mantenant trop souvent des moments révolus de son propre passé, non par regret ou par nostalge, mas parce que les closons du temps semblaent avor éclaté. La journée de Travemunde état prse dans la mémore comme dans une matère presque mpérssable, relque d’une sason où l avat at bon exster. S’l vvat dx ans de plus, l en serat peut-être de même de la journée d’aujourd’hu. Il remt sans plasr sa carapace humane. Un reste du pan d’her et sa gourde à dem plene de l’eau d’une cterne lu rappelèrent que sa route jusqu’au bout serat ser at parm les le s hommes. Il allat se garer d’eux, mas auss contnuer à en recevor des servces et à leur en rendre. Il équlbra son sac sur son épaule, et suspendt par leurs lacets ses soulers à sa centure, pour se donner plus longtemps le plasr de marcher peds nus. Evtant Heyst, qu lu asat l’eet d’un ulcère sur la belle peau du sable, l prt par les dunes. Du haut de
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l’émnence la plus proche, l se retourna pour regarCancel Download And Print der la mer. Les Quatre-Vents reposaent toujours sous l’estacade ; d’autres barques s’étaent rapprochées du port. Une vole à l’horzon semblat auss pure qu’une ale ; c’état peut-être le bateau de Jans Bruyne. Il marcha près d’une heure à l’écart des senters tracés. Dans un vallonnement entre deux montcules semés d’herbes coupantes, l vt venr à lu un groupe de sx personnes : un vellard, une emme, deux hommes d’âge mûr et deux garçons armés de bâtons. Le vellard et la emme avançaent avec pene dans les ondrères. Tous étaent vêtus en bourgeos de la vlle. Ces gens semblaent préérer passer sans attrer l’attenton. Ils répondrent pourtant quand l leur adressa la parole, vte rassurés par l’ntérêt que leur portat ce voyageur courtos et parlant ranças. Les deux jeunes gens venaent de Bruxelles ; c’étaent des patrotes catholques qu s’eorçaent de rejondre les troupes du prnce d’Orange. L’autre groupe état calvnste ; le vellard état un maître d’école de Tourna qu s’échappat vers l’Angleterre en compagne de ses deux fils ; la emme qu lu essuyat le ront de son mouchor état sa bru. La longue route à ped état plus que le pauvre homme n’en pouvat supporter ; l s’asst un moment sur le sable pour reprendre halene ; les autres firent cercle autour de lu. Cette amlle s’état jonte à Eeclo aux deux jeunes bourgeos de Bruxelles : le même danger et la même ute asaent des compagnons de ces gens qu en d’autres temps eussent été ennems. Les garçons parlaent avec admraton du segneur de La Mark qu avat juré de lasser croître sa barbe jusqu’à ce que les Comtes Comte s ussent vengés ; l avat prs les bos avec les sens, et branchat sans pté
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les Espagnols qu lu tombaent dans les mans : Cancel Download And Print c’état d’hommes de sa sorte qu’on avat beson dans les Pays-Bas. Zénon apprt auss des ugts bruxellos les détals de la capture de Monseur de Battenbourg et des dx-hut gentlshommes de sa sute trahs par le plote qu les transportat en Frse : ces dx-neu personnes avaent avaent été ncarcérées dans la orteresse de Vlvorde et décaptées. Les fils du maître d’école pâlssaent à ce réct, s’nquétant de ce qu les attendat eux-mêmes au bord de la mer. Zénon les calma : Heyst semblat un endrot sûr, pourvu qu’on payât sa dîme au captane du port ; des ugts quelconques couraent peu de rsques d’être lvrés comme des prnces. Il s’norma s les Tournasens étaent armés ; ls l’étaent : la emme même avat un couteau. Il les avsa de ne pont se séparer : réuns, ls n’avaent guère à crandre d’être dévalsés pendant la traversée ; l convenat néanmons de ne dormr que d’un œl à l’auberge et sur le pont de la barque. Quant à l’homme des Quatre-Vents, l état douteux, mas les deux soldes Bruxellos sauraent sans doute le tenr en man et, une os en Zélande, les chances de rencontrer des bandes d’nsurgés semblaent bonnes. Le maître d’école s’état pénblement ms debout. Zénon nterrogé à son tour explqua qu’l état médecn dans le pays, et qu’l avat lu auss songé à passer outre-mer. Les questons n’allèrent pas plus lon ; ses aares ne les ntéressaent pas. En se séparant d’eux, l remt au magster un flacon contenant des gouttes qu pour quelque temps lu allongeraent l’halene. Il prt congé ort remercé. Il les regarda contnuer vers Heyst et décda brusquement de les suvre. A pluseurs, le voyage état mons rsqué ; on pouvat même pendant les premers jours s’entrader sur l’autre rve. Il fit
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derrère eux uneCancel centaneDownload de pas, pus ralentt, lasAnd Print sant la dstance augmenter entre la pette bande et lu. L’dée de se retrouver en ace de Mlo ou de Jans Bruyne l’emplssat d’avance d’avance d’une lasstude nsupportable. Il s’arrêta net et oblqua vers l’ntéreur des des terres. te rres. Il repensat aux lèvres bleues et au soue court du vel homme. Ce magster abandonnant son pauvre état, bravant le glave, le eu et l’onde pour attester tout haut sa o en la prédestnaton de la plupart des hommes à l’Ener lu semblat un bon spécmen de l’unverselle démence ; mas, par-delà ces dogmatques oles, l exstat sans doute entre les nquètes créatures humanes des répulsons et des hanes surges du plus proond de leur nature, et qu, le jour où l ne serat plus de mode de s’extermner pour cause de relgon, se donneraent cours autrement. Les deux patrotes bruxellos semblaent plus sensés, mas ces garçons rsquant leur peau pour la lberté se flattaent néanmons d’être de loyaux sujets du ro Phlppe ; tout rat ben, à les en crore, dès qu’on se serat débarrassé du duc. Les malades du monde étaent plus nvétérées que cela. Il se retrouva bentôt à Oudebrugge, et cette os entra dans la cour de erme. La même emme s’y trouvat : assse par terre, elle arrachat l’herbe pour des lapereaux capts dans une grande corbelle. Un enant en jupon tournat autour d’elle. Zénon demanda un peu de lat et quelque nourrture. Elle se leva avec une grmace et le pra de trer lu-même du puts la jarre de lat ; ses mans rhumatques avaent du mal à tourner la manvelle. Tands qu’l manœuvrat la poule, elle entra dans la mason et en rapporta du romage blanc et un quarter de tarte. Elle s’excusa de la qualté du lat, qu état mnce et bleuâtre. bleuâtre.
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—La velle vache est es t quas sèche, dt-elle. Elle est es t Cancel Download And Print comme atguée de donner. Quand on la mène au taureau, elle n’en veut plus. On sera bentôt orcé de la manger mange r. Zénon demanda s la erme appartenat ben à la amlle Lgre. Elle le regarda d’un ar soudan méfiant. — Vous ne serez sere z pont l’agent, par hasard ? On ne dot ren avant la Sant-Mchel. Il la rassura : l herborsat par plasr et rentrat à Bruges. La erme appartenat comme l l’avat cru à Phlbert Lgre, segneur de Dranoutre et d’Oudenove, un gros bonnet au Consel des Flandres. Comme l’explquat la bonne emme, les gens rches ont toute une rbambelle de noms. — Je sas, dt-l. Je Je sus de la amlle. Elle n’eut pas l’ar de le crore. Ce voyageur à ped n’avat ren de précsément magnfique. Il mentonna être venu une os à la erme, l y avat ort longtemps. Tout état à peu près comme l se le rappelat, mas plus pett. — S vous ê tes venu, j’étas j’é tas là, dt la emme. Il y a plus de cnquante ans que je ne bouge pas d’c. Il lu semblat ben qu’après le repas sur l’herbe on avat lassé les reles aux manants, mas l ne se remémorat plus leurs vsages. Elle vnt s’asseor près de lu sur le banc ; l l’avat mse sur la voe des souvenrs. — Les maîtres maître s venaent quelqueos de ce tempslà, contnua-t-elle. Je sus la fille de l’ancen ermer ; l y avat onze vaches. A l’automne, on envoyat chez eux à Bruges une charrette plene de pots de beurre salé. Mantenant, ce n’est plus parel ; ls lassent tout tomber… Et pus, avec mes mans, ça me gêne pour travaller dans l’eau rode. Elle les reposat sur ses genoux, entrecrosant ses dogts déormés. Il lu consella de plonger chaque jour les mans dans du sable chaud.
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La promenade la dune In order to print thissur document from Scribd, you'll
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— Le sable, c’est c’es t pas ce qu manque c, dt-elle. Cancel Download And Print L’enant contnuat à tourner dans la cour comme une toupe en produsant des bruts ncompréhensbles. Il état peut-être able d’esprt. Elle l’appela, et une mervelleuse tendresse llumna son vsage ngrat ausstôt qu’elle le vt trottner vers elle. Sogneusement, elle essuya les bulles de salve au con des lèvres. — Volà mon Jésus, dt-elle doucement. Sa mère travalle travalle aux champs avec les le s deux qu’elle nourrt. nour rt. Zénon s’norma du père. C’état le patron du Saint-Boniace. — Le Saint-Boniace a eu des ennus, fit-l de l’ar de quelqu’un qu sat. — C’est C’e st arrangé mantenant, dt la emme, l va travaller pour Mlo. Faut ben qu’l gagne : de tous mes garçons, l ne me reste plus qu’une couple. Car j’a eu deux mars, Monseur, Monseur, mo, contnua-t-elle, e t à nous tros dx enants. Il y en a hut qu sont au cmetère. Toute cette pene pour ren… Le cadet at des heures chez le meuner les jours de vent, de sorte qu’on a toujours du pan à manger. Il a drot auss à la balayure. La terre c est pauvre pour le blé. Zénon regardat la grange délabrée. Au haut de la porte, quelqu’un jads avat, selon l’usage, afxé un hbou sans doute attent d’un coup de perre et cloué vvant ; ce qu restat des plumes bougeat dans la brse. — Pourquo avez-vous supplcé cet ce t oseau qu vous état bénéfique, demanda-t-l en montrant du dogt le grand rapace crucfié. Ces créatures mangent les sours qu dévorent le blé. — Je ne sas pont, Monseur, Monseur, dt la emme, mas c’est la coutume. Et pus, leur cr annonce la mort. Il ne répondt ren. Elle voulat évdemment lu demander quelque chose.
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— Ces uyards, Monseur, Monseur, qu’on passe sur le Cancel Download And Print Saint-Boniace... Ben sûr, c’est du profit pour tout le pays. Aujourd’hu même, à sx que j’en a vendu à manger. Et pus, l y en a qu ont pene à vor… Mas on se demande tout de même s c’est là un trafic honnête. Les gens qu s’enuent, ce n’est pas pour des prunes… Le duc et le Ro dovent ben savor ce qu’ls ont. — Vous n’êtes ’ê tes pas oblgée de vous normer norme r qu sont ces personnes, dt le voyageur. — Ça, c’est c’es t ben vra, fit-elle en hochant le menton. Il avat prs sur le tas d’herbe quelques brns qu’l passat entre les barreaux de la corbelle et que mâchonnaent les lapereaux. — S ces bêtes-là bê tes-là vous plasent, Monseur, Monseur, contnua-t-elle d’un ton oblgeant. C’est gras, c’est doux, c’est à pont… On les aurat apprêtées dmanche. C’est seulement cnq sous par tête. — Mo ? dt-l, surprs. Que mangerez-vous mangere z-vous dmanche à dîner ? — Monseur, Monseur, fit-elle, l’œl supplant, l n’y a pas que la mangealle… Avec ça et les tros sous du casse-croûte, j’enverra ma bru chercher la goutte à La Belle Colombelle. Il aut ben de temps en temps se réchauer le cœur. On lèvera le coude à votre santé. Elle n’avat pont de monnae pour lu changer son florn. Il s’en état douté. Peu mportat. Le contentement l’avat rajeune : après tout, c’état peut-être elle, cette fille de qunze ans qu avat at la révérence quand Smon Adransen lu avat donné quelques sous. Il prt son sac et se drgea vers la grlle avec les complments d’usage. — Ne les oublez pas, Monseur, dt-elle en lu tendant la corbelle. Ça era plasr à votre dame : y en a pas de parels à la vlle. Et pusque vous êtes
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un peu de la amlle, vous leur drez qu’ls nous Cancel Download And Print réparent avant l’hver. Ça pleut dedans toute l’année. Il sortt le paner au bras comme un paysan qu va au marché. Le chemn s’engagea bentôt dans un bocage, pus déboucha dans des guérets. Il s’asst sur le rebord du ossé et plongea avec précauton la man dans la corbelle. Longuement, presque voluptueusement, l caressa les bêtes au doux pelage, à l’échné souple, aux flancs mous sous lesquels battaent à grands coups les cœurs. Les lapereaux pas même crants contnuaent à manger ; l se demandat quelle vson du monde et de lu-même se mrat dans leurs gros yeux vs. Il leva le couvercle et les lassa prendre les champs. Joussant de leur lberté, l regarda dsparaître dans les broussalles les connls lascs et voraces, les archtectes de labyrnthes souterrans, les créatures tmdes, et qu pourtant jouent avec le danger, désarmées, sau pour la orce et l’aglté de leurs rens, ndestructbles seulement de par leur népusable écondté. S elles parvenaent à échapper aux lacs, aux bâtons, aux ounes et aux épervers, elles contnueraent encore quelque temps leurs bonds et leurs jeux ; leur ourrure l’hver blanchrat sous la nege ; elles recommenceraent au prntemps à se nourrr de bonne herbe verte. Il poussa du ped la corbelle dans le ossé. Le reste de la route ut sans ncdents. Il dormt cette nut-là sous un bouquet d’arbres. Il arrva le lendeman d’assez bonne heure aux portes de Bruges, et ut comme toujours salué avec respect par le corps de garde. Stôt en vlle, l’angosse momentanément étouée remonta à la surace ; malgré lu, l prêtat l’orelle aux propos des passants, mas n’entendat ren d’nsolte concernant quelques jeunes mones ou ayant
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trat aux amours d’une belle fille noble. Personne ne Cancel Download And Print parlat non plus d’un médecn ayant sogné des rebelles et dégusé sous un aux nom. Il arrva à l’hospce à temps pour soulager le rère Luc et le rère Cypren qu asaent ace à la presse des malades. Le bout de paper lassé avant son départ traînat sur la table ; l le rossa entre ses dogts ; ou, son am d’Ostende allat meux. Ce sor-là, l s’ort à l’auberge un souper plus long et plus sogné que d’habtude.
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LA SOURICIÈRE
PLUS d’un mos passa sans encombre. Il état entendu entendu que l’hospce ermerat ses portes por tes peu avant avant la Noël, mas le seur Sébasten Théus partrat cette os ouvertement pour l’Allemagne où l avat vécu et exercé jads. En son prvé, et sans mentonner publquement ces régons acquses au luthéransme, Zénon se proposat de remonter vers Lübeck. Il y aurat plasr à revor le judceux Aegdus Fredho et de retrouver Gerhart arrvé à l’âge d’homme. Peutêtre serat-l possble d’obtenr cette place de régent de l’hôptal du Sant-Esprt que l’opulent orèvre lu avat à peu près prè s assurée autreos. De Ratsbonne, son conrère alchmste, Remer, à qu Zénon avat fin par communquer de ses nouvelles, lu annonçat une bonne ortune nespérée. Un exemplare des Prothéories échappé au eu de joe parsen avat at son chemn vers l’Allemagne ; un docteur de Wttenberg avat tradut l’ouvrage en latn, et cette publcaton ramenat autour du phlosophe un brut de glore. Le Sant-Ofce en prenat ombrage,
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comme naguère la Sorbonne, mas le savant homme Cancel Download And Print de Wttenberg et ses conrères découvraent au contrare dans ces textes entachés d’hérése aux yeux des catholques l’applcaton du lbre examen ; et les aphorsmes explquant le mracle par l’eet de la erveur chez le mraculé semblaent à la os propres à combattre les supersttons papstes et à étayer leur propre doctrne de la o qu sauve. Les Prothéories devenaent entre leurs mans un nstrument légèrement aussé, mas on dot s’attendre à ces basements tant qu’un lvre exste et agt sur l’esprt des hommes. Il état même queston de proposer à Zénon, s touteos on retrouvat sa trace, une chare de phlosophe naturelle dans cette unversté saxonne. L’honneur n’allat pas sans rsque, et l serat prudent de le déclner en aveur d’autres et plus lbres travaux, mas le contact drect avec les esprts état tentant après ce long repl sur so-même, et vor tressallr une œuvre crue morte asat éprouver au phlosophe dans toutes ses fibres la joe d’une résurrecton. En même temps, le Traité du monde physique physique,, néglgé depus la catastrophe survenue à Dolet, avat reparu chez un lbrare de Bâle, où l semblat ben qu’on eût oublé les préventons et les agres querelles d’autreos. La présence corporelle de Zénon devenat presque mons utle : ses dées avaent essamé sans lu. Depus son retour de Heyst, l n’entendat plus parler du pett groupe des Anges. Il évtat avec le plus grand son les tête-à-tête avec Cypren, de sorte que le flot des confidences état endgué. Certanes mesures que Sébasten Théus avat souhaté are prendre à l’ancen preur pour évter à tous des désastres s’étaent accomples d’elles-mêmes. Le rère Floran partat bentôt pour Anvers où l’on reconstrusat son couvent brûlé naguère par les brseurs d’mages d’mages ; l y pendrat à resque les arceaux du
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La souricière
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cloître. Perre deCancelHamaere vstat dverses filales Download And Print de la provnce dont l épurat les comptes. La nouvelle admnstraton avat ordonné des travaux dans les sous-sols du couvent ; on en avat condamné certanes partes menaçant rune, ce qu enlevat aux Anges leur secret asle. Les réunons nocturnes avaent presque assurément cessé ; des mprudences scandaleuses retombaent sans doute désormas au rang de banals et urts péchés du cloître. Quant aux rendez-vous de Cypren et de la Belle dans le jardn abandonné, la sason leur état peu avorable, et Idelette s’état peut-être procuré un galant plus prestgeux qu’un jeune mone. Pour toutes ces rasons peut-être la contenance de Cypren s’état assombre. Il ne chantat plus ses rtournelles de paysan et accomplssat ses tâches d’un ar morne. Sébasten Théus avat d’abord supposé que le jeune nfirmer, tout comme le rère Luc, s’ageat de la prochane ermeture de l’hospce. Un matn, l s’aperçut que le vsage du garçon état sllonné de traces de larmes. Il le fit entrer dans l’ofcne et erma la porte. Ils se retrouvaent là seul à seul comme ls l’avaent été le lendeman du dmanche de Quasmodo, à l’époque des dangereux aveux de Cypren. Zénon parla le premer : — Est-l arrvé malheur à la Belle ? fit-l brusquement. — Je ne la vos plus, répondt ré pondt le garçon d’une vox qu s’étranglat. Elle se renerme avec la noraude dans sa chambre et se dt malade pour dssmuler son ardeau. Il explqua que les seules nouvelles qu’l reçût passaent par la bouche d’une converse, un peu corrompue par de petts présents, un peu attendre par l’état de la Belle qu’elle état chargée de sogner.
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Mas l état dfcle de communquer à travers cette Cancel Download And Print emme smple jusqu’à la bêtse. Les ssues secrètes d’autreos n’exstaent plus, et de toute açon les deux filles mantenant erayées d’une ombre n’eussent plus osé tenter de sortes nocturnes. Le rère Floran, l est vra, avat comme pentre ses entrées dans l’oratore des Bernardnes, mas l se lavat les mans de cette ce tte aare. — Nous nous sommes querellés, querel lés, dt sombrement Cypren. Les emmes attendaent la délvrance d’Idelette pour l’époque de la Sante-Agathe. Le médecn calcula qu’l s’en allat encore de près de tros mos. A cette époque, l serat depus longtemps à Lübeck. — Ne désespére dése spérezz pas, dt-l, s’eorçant de lutter contre l’accablement du jeune mone. L’ngénosté et le courage des emmes sont grands en ces matères. Les Bernardnes, s elles découvrent cette mésa venture, n’ont aucun ntérêt à l’ébruter. Une nouveau-né est aclement placé dans un tour et confié à la charté publque. — Ces jarres jarre s et ces bocaux sont plens de poudres et de racnes, dt avec agtaton Cypren. La peur la tuera s on ne lu vent en ade. S Mynheer voulat… — Ne voyez-vous pas qu’l est es t trop tard e t que je n’a pont accès accè s auprès d’elle ? N’ajoutons pas à tant de désordres un sanglant malheur. — Le curé d’Ursel a jeté je té le roc e t s’est s’es t enu en Allemagne avec sa mgnonne, fit subtement Cypren. Ne pourrons-nous pont… — Avec une fille de ce rang, e t dans cet ce t é tat, vous serez reconnus avant d’être sorts du terrtore du Franc de Bruges. N’y pensez plus. Mas personne ne s’étonnera qu’un jeune Cordeler coure les routes en mendant son pan. Partez seul. Je pus vous ournr de quelques ducats pour le voyage.
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— Je ne peuxCancel pas, dt Download CyprenAndenPrintsanglotant. Il s’état aalé sur la table, la tête dans les mans. Zénon le contemplat avec une compasson nfine. La char état une trappe où ces deux enants s’étaent prs. Il caressa aectueusement la tête tondue du jeune mone, et e t qutta la pèce. La oudre tomba plus tôt qu’on n’aurat cru. Vers la Sante-Luce, l se trouvat à l’auberge, quand l entendt ses vosns dscuter d’une nouvelle avec ces chuchotements exctés qu ne sgnfient jamas ren de bon, car l s’agt presque toujours du malheur de quelqu’un. Une fille noble qu logeat chez les Bernardnes avat étranglé un enant prématurément né, mas vable, dont elle venat d’accoucher. Le crme ne s’état découvert que grâce à la pette servante moresque de la demoselle qu s’état enue épouvantée de la chambre de sa maîtresse et avat erré comme olle dans les rues. De bonnes gens poussés auss par une honnête curosté avaent recuell la morcaude ; dans son babl dfcle à comprendre, elle avat fin par tout explquer. Il n’avat plus ensute été possble aux Sœurs d’empêcher que le guet ne s’emparât de leur pensonnare. De grasses plasanteres sur la chaleur de sang des filles nobles et sur les petts secrets des nonnes se mêlaent à des exclamatons ndgnées. Dans la plate exstence de la pette vlle, où le brut même des grands événements du jour n’arrvat qu’assourd, ce scandale état plus ntéressant qu’une hstore rebattue d’églse brûlée ou de protestants pendus. Quand Zénon sortt de l’auberge, l vt passer dans la rue Longue Idelette couchée au ond de la charrette du guet. Elle état ort pâle, d’une pâleur d’accouchée, mas ses pommettes et ses yeux brûlaent de fièvre. Quelques personnes la regardaent avec pté, mas la plupart s’exctaent à la huer. Le pâtsser et sa emme étaent é taent de ce nombre. nombre. Les pettes pette s gens
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du quarter se revanchaent des splenddes vêtements Cancel Download And Print et des olles dépenses de cette belle poupée. Deux des filles de la Ctroulle, qu par hasard se trouvaent là, étaent des plus acharnées, comme s la demoselle leur eût gâté le méter. Zénon rentra chez lu le cœur serré, comme s’l venat de vor une bche abandonnée aux chens courants. Il chercha Cypren à l’hospce, mas le jeune mone ne s’y trouvat pas, et Zénon n’osa s’normer de lu au couvent, de peur de le are remarquer. Il espérat encore qu’Idelette nterrogée par le prévôt ou les grefers aurat la présence d’esprt de s’nventer un galant magnare. Mas cette enant qu toute la nut s’état mordu les mans pour ne pas crer, de peur que ses gémssements ne donnassent l’ével, état au bout de son courage. Elle parla et pleura abondamment, ne cachant n les rendezvous avec Cypren au bord de l’eau, n les jeux et les rs dans l’assemblée des Anges. Ce qu fit le plus horreur aux scrbes qu enregstraent ces aveux, et ensute au publc qu en reçut avdement les échos, ce ut cette consommaton de pan bént et de vn volé à l’autel, mangé et bu à la lueur de bouts de cerges. Les abomnatons de la char semblaent s’aggraver d’on ne savat quels sacrlèges. Cypren ut arrêté le lendeman ; le tour de Franços de Bure, de Floran, du rère Qurn et de deux autres novces mplqués vnt ensute. Mattheu Aerts ut arrêté lu auss, mas mmédatement élarg à la sute d’un verdct d’erreur sur la personne. Un de ses oncles état échevn au Franc de Bruges. Pendant quelques jours, l’hospce de Sant-Cosme, déjà à dem ermé, et que le médecn état supposé qutter pour l’Allemagne la semane suvante, s’emplt d’une cohue de cureux. Le rère Luc leur asat
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vsage de bos Cancel ; l reusat de crore à toute cette Download And Print aare. Zénon les tratat en dédagnant de répondre aux questons. Une vste de Greete l’émut presque jusqu’aux larmes larme s : la velle emme s’état s’é tat contentée de hocher la tête en dsant que c’état ben trste. Il la garda tout le jour en la prant de laver et de réparer son lnge. Il avat rrtablement at ermer par le rère Luc la porte de l’hospce avant l’heure ; la velle emme cousant ou repassant près d’une enêtre le calmat tantôt par son amcal slence et tantôt par ses propos emprents d’une tranqulle sagesse. Elle lu raconta de petts ats qu’l gnorat de la ve d’Henr-Juste, de basses lésnes ou des prvautés obtenues de gré ou de orce avec des servantes : c’état d’alleurs un assez brave homme, ayant dans ses bons jours la plasantere et même la gratficaton acles. Elle se souvenat du nom et du vsage de nombreux parents dont l ne savat ren : c’est ans qu’elle état capable de récter toute une lste de rères et de sœurs morts jeunes échelonnés entre Henr-Juste et Hlzonde. Il rêva un nstant à ce qu’eussent pu être ces destnées vte nterrompues, ces pousses du même arbre. Pour la premère os de sa ve, l écouta attentvement un long réct concernant son père, dont l connassat le nom et l’hstore, mas auquel l n’avat entendu are que d’amères allusons durant son enance. Ce jeune cavaler talen, prélat pour la orme et pour satsare à ses ambtons et à celles de sa amlle, avat donné des êtes, promené avec arrogance dans Bruges sa cape de velours rouge et ses éperons d’or, jou d’une fille auss jeune mas mons nortunée somme toute qu’Idelette aujourd’hu, et l en état résulté ces travaux, ces aventures, ces médtatons, ces projets qu duraent depus cnquante-hut ans. Tout dans ce monde, qu est le seul où nous ayons accès, état plus étrange que l’habtude ne nous porte
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LA VIE IMMOBILE
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à le crore. Fnalement, Greete remt dans sa poche Cancel Download And Print ses cseaux, son fil et son étu à agulles, et fit remarquer que le lnge de Zénon état en état pour le voyage. Après qu’elle l’eut qutté, l chaua le poêle pour le ban d’eau et de vapeur nstallé par lu dans un recon de l’hospce à l’nstar de celu qu’l avat eu jads à Péra, mas dont l s’état s’é tat peu serv ser v pour ses malades, souvent réts à de tels sons. Il fit de longues ablutons, se coupa les ongles, se rasa métculeusement. A pluseurs reprses, par nécessté aux armées ou sur le grand chemn, alleurs pour meux se déguser ou du mons pour ne pas surprendre en contrevenant à la mode, l avat lassé croître sa barbe, mas préérat la netteté d’un vsage nu. L’eau et la buée lu rappelèrent le ban cérémoneusement prs à son arrvée à Frösö, après son expédton en terre lapone. Sgn Ulsdatter l’avat serv elle-même selon l’usage des dames de son pays. Elle avat été d’une dgnté de rene dans ces prévenances de servante. Il revt en pensée le grand cuveau cerclé de cuvre cuvre et le dessn de ssn des des servettes ser vettes brodées. Il ut appréhendé le jour suvant. Cypren, pour s’évter la torture, avat avoué tout ce qu’on lu demandat, et ben davantage. Il en résulta un mandat d’amener contre Perre de Hamaere, qu se trouvat alors à Audenarde. Quant à Zénon, les témognages du jeune mone étaent de nature à le perdre : le médecn, à l’en crore, aurat dès le début été le confident et le complce des Anges. Ce serat lu qu aurat ourn à Floran les phltres nécessares pour sédure Idelette au profit de Cypren, et plus tard proposé de nores potons pour lu are passer son rut. L’nculpé nventat entre le médecn et lu une ntmté hors la lo. Zénon par la sute eut l’occason de réfléchr à ces allégatons qu prenaent exactement le contre-ped des ats : l’hypothèse la
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La souricière
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plus smple étatCancel que leDownload garçonAnd éperdu cherchat à Print s’nnocenter en accablant autru ; ou peut-être, ayant souhaté obtenr de Sébasten Théus des servces et des caresses, l avat fin par crore les avor reçus. On tombe toujours dans une trappe quelconque : autant valat valat que ce ût celle-là. En tout cas, Zénon se tenat prêt. Il se lvra sans résstance. En arrvant au gree, l surprt tout le monde en donnant son vra nom.
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TROISIÈME PARTIE
LA PRISON
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Non è vltà, ne da vltà procede S’alcun, per evtar pù crudel sorte, Oda la propra propra vta e cerca morte… mor te… Meglo è morr all’anma gentle Che supportar nevtabl danno Che lo arra cambar anmo e stle. Quant ha la morte gà tratt tra tt d’aanno d’aanno ! Ma molt ch’hanno l chamar morte a vle Quanto talor sa dolce ancor non sanno. Julen Julen de Médcs.
Ce n’est point vilenie, ni de vilenie procède, Si tel, pour éviter un sort plus cruel. Hait sa propre vie, recherchant la mort… Mieux vaut mourir, pour l’être au cœur noble, Que supporter l’inévitable mal Qui lui ait a it perdre et vertu et style… style… Qu’ils sont nombreux, ceux dont la mort a guéri l’angoisse ! Mais beaucoup vilipendent ce recours à la mort, Ignorant encor qu’il est doux de mourir… mourir…
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L’ACTE D’ACCUSATION
IL ne passa qu’une nut dans la prson de la vlle. Dès le lendeman, l ut transéré, non sans certans égards, dans une chambre donnant sur la cour du veux gree, mune de barreaux et de verrous soldes, mas qu orat à peu près toutes les commodtés auxquelles un ncarcéré de marque peut prétendre. On y avat naguère retenu un échevn accusé de malversatons et, plus ancennement, un segneur gagné à prx d’or au part ranças ; ren n’état plus convenable qu’un tel leu de détenton. La nut au cachot avat d’alleurs suf pour encombrer Zénon d’une vermne dont l mt pluseurs jours à se débarrasser. A son étonnement, on lu permt de se are apporter son lnge ; au bout de quelques jours, on lu rendt même son écrtore. On lu reusa pourtant des lvres. Il eut bentôt la permsson de se promener quotdennement dans la cour au sol tantôt gelé, tantôt boueux, en compagne du drôle qu’l avat pour geôler. Une peur néanmons ne le quttat pas, celle de la torture. Que des hommes
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LA PRISON
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ussent payés pour tourmenter méthodquement leurs Cancel Download And Print semblables avat toujours scandalsé cet homme dont c’état le méter de sogner. De longue date, l s’état curassé, non contre la pene, guère pre en elle-même que celle du blessé opéré par un chrurgen, mas contre l’horreur qu’elle ût scemment nflgée. Il s’état at par degré à l’dée d’avor peur. S’l lu arrvat un jour de gémr, de crer, ou d’accuser mensongèrement quelqu’un comme l’avat at Cypren, la aute en serat à ceux qu réussssent à dsloquer l’âme d’un homme. Mas cette épreuve tant crante ne vnt pas. De pussantes protectons entraent évdemment en jeu. Elles ne purent empêcher que la terreur du chevalet ne durât quelque part en lu jusqu’à la fin, l’oblgeant à reréner un sursaut chaque os qu’on ouvrat la porte. Quelques années plus tôt, en arrvant à Bruges, l avat cru trouver son souvenr dssous dans l’gnorance et l’oubl. Il avat ondé là-dessus son ncertane sécurté. Mas un spectre de lu avat dû survvre tap au ond des mémores ; l en ressortat à la aveur de cet esclandre, plus réel que l’homme qu’on avat ndéremment coudoyé s longtemps. De vagues on-dt se coagulaent tout à coup, amalgamés aux grossère grossèress mages du magcen, du renéga renégat,t, du bougre, de l’espon de l’étranger qu flottent partout et toujours dans les magnatons gnares. Personne n’avat reconnu Zénon dans Sébasten Théus ; tout le monde rétrospectvement le reconnassat. Personne non plus n’avat lu autreos ses écrts à Bruges ; ls n’étaent sans doute pas davantage eulletés aujourd’hu, mas savor qu’ls avaent été condamnés à Pars et suspectés à Rome permettat mantenant à un chacun de décrer ces dangereux grmores. Quelques cureux un peu perspcaces avaent dû, certes, soupçonner de bonne heure son dentté ; Greete Gree te n’é n’état tat pas seule à avor de la
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L’acte d'accusation
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mémore et des Cancel yeux. Mas ces gens-là s’étaent tus, Download And Print ce qu semblat en are des ams plutôt que des ennems, ou peut-être avaent-ls attendu leur heure. Zénon douta toujours s quelqu’un avat avert le preur des Cordelers, ou s au contrare celu-c en orant à un nconnu de monter dans son coche à Senls savat avor aare au phlosophe dont on brûlat sur la place publque un ouvrage ort controversé. Il penchat pour la seconde alternatve, tenant à avor le plus d’oblgaton possble à cet homme de cœur. Quo qu’l en ût, sa catastrophe avat changé de ace. Il avat cessé d’être l’obscur comparse d’une débauche mplquant une pognée de novces et deux ou tros mauvas mones ; l redevenat le protagonste de sa propre aventure. Les ches d’accusaton se multplaent, mas au mons l ne serat pas l’nsgnfiant personnage balayé en toute hâte par une justce expédtve, comme probablement Sébasten Théus l’eût été. Son procès menaçat de traîner du at d’épneuses questons de compétence. Les magstrats bourgeos jugeaent en derner ressort les crmes de drot commun, mas l’évêque tenat à dre le mot final dans une complexe cause d’athésme et d’hérése. Cette prétenton choquat chez un homme récemment établ par le Ro dans une vlle où l’on s’état jusque-là passé d’évêché, e t qu semblat à beaucoup un suppôt de l’Inquston savamment mplanté à Bruges. En at, ce prélat se proposat de justfier avec éclat son pouvor en condusant ce procès avec équté. Le chanone Campanus, malgré son grand âge, se dépensa dans cette aare ; l proposa, et finalement obtnt, que deux théologens de l’Unversté de Louvan, d’où l’accusé tenat son degré de drot canon, ussent adms en qualté d’audteurs ; on gnorat s cet arrangement état prs en accord avec l’évêque ou contre lu. Une opnon outrée, qu
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LA PRISON
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avat cours chez quelques esprts excesss, état Cancel Download And Print qu’un mpe dont l mportat à ce pont de conondre les doctrnes relevat drectement du trbunal roman du Sant-Ofce, et qu’l serat expédent de l’envoyer sous bonne garde réfléchr dans quelque geôle du couvent de Sante-Mare-sur-Mnerve à Rome. Les gens sensés tenaent au contrare à juger sur place ce mécréant né à Bruges, et revenu sous un aux nom dans la vlle, où sa présence au sen d’une peuse communauté avat avorsé des désordres. Ce Zénon qu avat passé deux ans à la cour de Sa Majesté Suédose état peut-être un espon des pussances du Nord ; on n’oublat pas qu’l avat jads séjourné chez le Turc nfidèle ; l s’agssat de savor s’l y avat ou non apostasé comme le brut en avat couru. On s’nstallat dans un de ces procès à charges multples qu menacent de durer des années et servent d’abcès de fixaton aux humeurs d’une vlle. Dans ce brouhaha, les allégatons qu avaent amené l’arrestaton de Sébasten Théus passaent au second rang. L’évêque opposé par prncpe aux charges de mage méprsat l’hstore des phltres amoureux, qu’l regardat comme une bllevesée, mas certans magstrats bourgeos y croyaent ermement, mement, et e t pour le pett peuple peuple le v de la chose état là. Peu à peu, comme dans tous les procès qu pour un temps aolent les badauds, on voyat se dessner sur deux plans deux aares étrangement dssemblables ; la cause telle qu’elle apparaît aux hommes de lo et aux gens d’Eglse dont c’est le méter de juger, et la cause telle que l’nvente la oule qu veut des monstres et des vctmes. Le leutenant chargé des poursutes au crmnel avat d’emblée élmné la amlarté avec le pett groupe adamque et béatfique des Anges ; les mputatons de Cypren étaent contredtes par les sx autres ncar-
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L’acte d'accusation
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cérés ; ceux-là neCancel connassaent le médecn que pour Download And Print l’avor aperçu sous les arcades du couvent ou dans la rue Longue. Floran se flattat d’avor sédut Idelette à l’ade de promesses, de basers, de douces musques, et de rondes dans lesquelles on se tent par les mans, sans qu’l ût beson de racne de mandragore ; le crme même d’Idelette nfirmat l’hstore de la poton abortve, que la demoselle jurat santement n’avor ’avor jamas sollcté ou eu à reuser ; enfin, et meux encore, Zénon semblat à Floran un partculer déjà sur l’âge, adonné, l est vra, à la sorcellere, mas hostle par malgnté aux jeux des Anges, e t qu avat voulu détacher dé tacher d’eux Cypren. On pouvat tout au plus conclure de ces dres peu cohérents que le prétendu Sébasten Théus avat su par son nfirmer quelque chose des débauches dans l’étuve, sans avor accompl son devor, qu état de dénoncer. Une ntmté détestable avec Cypren restat plausble, mas le quarter portat aux nues les bonnes mœurs et belles vertus du médecn ; l y avat même on ne savat quo de louche dans une réputaton s hors par. On enquêta sur ce pont de sodome qu rrtat la curosté des juges : à orce de chercher, on crut trouver le fils d’un malade de Jean Myers avec lequel l’nculpé avat lé amté au début de son séjour à Bruges ; on en resta là par respect pour une bonne amlle, et ce jeune chevaler ort réputé pour sa belle mne état depus longtemps à Pars où l termnat ses études. Cette découverte eût at rre Zénon : la lason s’état bornée à des échanges de lvres. Des accontances plus basses, s’l en état, aucune trace n’état restée. Mas le phlosophe avat souvent dans ses écrts préconsé l’expérmentaton avec les sens et la mse en œuvre de toutes les possbltés du corps, et les plus nors plasrs peuvent
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se dédure d’un tel précepte. La présompton Cancel Download And Print demeurat, mas on retombat aute de preuve au crme d’opnon. D’autres accusatons étaent, s’l se pouvat, plus mmédatement dangereuses. Des Cordelers euxmêmes mputaent au médecn d’avor tourné l’hospce en leu de rallement pour uyards se dérobant à la justce. Le rère Luc ut ort utle sur ce sujet comme sur beaucoup d’autres ; son opnon état des plus nettes : tout état aux dans cette aare. On avat beaucoup exagéré les dsspatons dans l’étuve ; Cypren n’état qu’un béjaune qu s’état lassé enjôler par une trop belle fille ; le médecn état rréprochable. Quant aux uyards rebelles ou calvnstes, s quelques-uns avaent passé le seul de l’hospce, ls ne portaent pas de pancarte autour du cou, et des gens occupés avaent meux à are qu’à leur trer les vers du nez. Ayant at ans le plus long dscours de sa ve, l se retra. Il rendt à Zénon un autre servce nsgne. En rangeant dans l’hospce l’hospce désert, dése rt, l tomba sur le galet à figure humane ms au rebut par le phlosophe, et jeta dans le canal cet objet qu n’état pont à lasser traîner. L’organste au contrare ut préjudcable à l’nculpé ; on n’avat certes que du ben à en dre, mas ça leur avat donné un coup, à lu et à son épouse, que Sébasten Théus ne ût pas Sébasten Théus. La menton la plus nusble ut celle des prophétes comques dont les deux bonnes gens avaent tant r ; on les retrouva à Sant-Cosme dans un placard de la chambre aux lvres, et les ennems de Zénon surent s’en servr. Tands que des scrbes recopaent avec des plens et des délés les vngt-quatre ches d’accusaton rassemblés contre Zénon, l’aventure d’Idelette et des Anges touchat à son terme. Le crme de la demoselle de Loos Loos état patent pa tent et sa punton la mort ; la
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présence même Cancel de son père ne l’eût pas sauvée, et Download And Print celu-c, retenu avec d’autres Flamands comme otage en Espagne, ne sut que plus tard la nouvelle de sa catastrophe. Idelette fit une bonne et peuse fin. On avat avancé de quelques jours l’exécuton, pour ne pas tomber dans les êtes de la Natvté. L’opnon publque s’état retournée : touché qu’on état par la contenance repentante et les yeux éplorés de la Belle, on plagnat cette fille de qunze ans. En bonne règle, Idelette eût dû brûler vve pour nantcde, mas sa noble nassance lu valut d’être décaptée. Par malheur, le bourreau, ntmdé par ce cou délcat, n’eut pas la man sûre : l dut s’y reprendre à tros los et s’échappa, justce ate, hué par la oule, poursuv par une grêle de sabots et une averse de choux ramassés dans les paners du marché. Le procès des Anges dura plus longtemps : on s’eorçat d’obtenr des aveux qu eussent ms à jour des ramficatons ramficat ons secrètes, secrè tes, remontant peut-être peut-êt re jusqu’à cette ce tte secte des Frères du Sant-Esprt, extermnée au début du sècle, et qu avat, prétendat-on, conessé et pratqué de parelles erreurs. Mas ce ol de Floran état ntrépde ; van jusque dans la torture, l déclarat ne ren devor aux ensegnements hérétques d’un certan Grand Maître Adamque Jacob Van Van Almagen, Al magen, ju par surcroît, surc roît, et mort mor t quelque cnquante ans plus tôt. C’état à lu seul et sans théologe qu’l avat découvert le pur parads des délces du corps. Toutes les tenalles du monde ne lu eraent pas dre autrement. Le seul qu échappa à la sentence de mort ut le rère Qurn, qu avat eu la constance de are sans cesse le ou, même au mleu des tourments, et ut conséquemment séquestré comme tel. Les cnq autres condamnés firent comme Idelette une peuse fin. Par l’entremse de son geôler, qu avat l’habtude de ce genre de négocatons,
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Zénon avat payé les bourreaux pour que ces Cancel Download And Print jeunes gens ussent é tranglés avant d’être d’êtr e touchés par le eu, pett accommodement ort en usage, et qu arrondssat très opportunément le magre salare des exécuteurs. Le stratagème réusst pour Cypren, Franços de Bure et l’un des novces ; l les sauva du pre, sans avor pu, ben entendu, leur épargner l’épouvante dont ls avaent préalablement pât. Mas l’arrangement allt au contrare pour Floran et l’autre novce, auxquels le bourreau n’eut pas le temps d’aller dscrètement porter secours ; on les entendt crer pendant près de deux quarts d’heure. L’économe état de la parte, mas mort. Stôt ramené d’Audenarde et écroué à Bruges, l s’état at porter du poson par des ams qu’l avat en vlle, et on l’avat suvant la coutume ncnéré déunt pusqu’on ne pouvat le brûler v. Zénon n’amat guère ce cauteleux personnage, mas l allat reconnaître que Perre de Hamaere avat su prendre en man son destn et finr en homme. Zénon sut tous ces détals par son geôler à la langue trop ben pendue ; le coqun s’excusat du contretemps survenu en ce qu concernat deux des condamnés ; l proposat même de rendre une parte de l’argent, ben que ce ne ût la aute de personne. Zénon haussa les épaules. Il s’état revêtu d’une mortelle ndérence : l’mportant état de ménager jusqu’au bout ses orces. Cette nut-là se passa pourtant sans dormr. Cherchant dans sa pensée un antdote à cette horreur, l songea que Cypren ou Floran se ussent assurément jetés au eu pour sauver quelqu’un : l’atrocté état comme toujours mons dans les ats que dans l’nepte humane. Soudan, l buta sur un souvenr : dans sa jeunesse, l avat vendu à l’émr Nourreddn sa recette de eu lqude dont on s’état serv en Alger dans un combat naval, et qu’on avat peut-être contnué à utlser depus. L’acte en
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lu-même état Cancel banal :Download tout artficer en eût at And Print autant. Cette nventon qu avat brûlé des centanes d’hommes avat même paru une avance dans l’art de la guerre. Fureurs pour ureurs, les volences d’un combat dans lequel chacun tue auss ben qu’l meurt ne se comparaent certes pas à l’abomnaton méthodque d’un supplce ordonné au nom d’un Deu de bonté ; néanmons l état lu auss auteur et complce d’outrages nflgés à la msérable char de l’homme, et l avat allu trente ans pour qu’un remords lu vînt, qu eût probablement at sourre des amraux ou des prnces. Autant sortr bentôt de cet ener. On ne pouvat se plandre que les théologens chargés d’énumérer les propostons mpertnentes, hérétques, ou ranchement mpes trées des écrts de l’accusé n’eussent pas at honnêtement leur tâche. On s’état procuré en Allemagne la traducton des Prothéories ; les autres ouvrages se trouvaent dans la bblothèque de Jean Myers. Pour le plus grand étonnement de Zénon, le preur avat possédé ses Prognostications des choses utures. En réunssant entre elles ces propostons, ou plutôt leurs censures, le phlosophe se plut à dessner la carte des opnons humanes, en cet an de grâce 1569, du mons en ce qu concernat les abstruses régons où son esprt s’état promené. Le système de Copernc n’état pas proscrt par l’Eglse ben que les plus entendus parm les gens à rabat et à bonnet carré secouassent la tête d’un ar fin, assurant qu’l ne pouvat manquer de l’être bentôt, mas l’asserton qu consste à placer le solel et non la terre au centre du monde, tolérée à condton d’être présentée comme une tmde hypothèse, n’en blessat pas mons Arstote, la Bble, et plus encore l’human beson de mettre notre habtacle au mtan du Tout. Il état naturel
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qu’une vue s’élognant des grosses évdences du bon Cancel Download And Print sens déplût au vulgare : sans aller plus lon, Zénon savat par lu-même comben la noton d’une terre qu bouge racture les habtudes que chacun de nous s’est ates pour vvre ; l s’état grsé d’appartenr à un monde qu n’état plus seulement la masure humane ; au plus grand nombre cet élargssement donnat la nausée. Pre encore que l’audace de remplacer la terre par le solel au centre des choses, l’erreur de Démocrte, c’est-à-dre la croyance en l’nfinté des mondes, qu enlève au solel lu-même sa place prvlégée et déne l’exstence d’un centre, parassat à la majorté des esprts une mpété nore. Lon de s’élancer avec joe, comme le phlosophe, crevant la sphère des fixes, dans ces rods et ardents espaces, l’homme s’y sentat perdu, et l’audaceux qu se rsquat à en démontrer l’exstence devenat un transuge. Les mêmes règles valaent pour le domane plus scabreux encore des dées toutes pures. L’erreur d’Averroès, l’hypothèse d’une dvnté rodement agente à l’ntéreur d’un monde éternel, semblat enlever au dévot la ressource d’un deu at à son mage et réservant à l’homme seul ses colères et ses bontés. L’éternté de l’âme, l’erreur d’Orgène, ndgnat parce qu’elle rédusat à peu de chose l’mmédate aventure : l’homme voulat ben que s’ouvrît devant lu une mmortalté heureuse ou malheureuse dont l état responsable, mas non que s’étalât de toutes parts une durée éternelle où l état tout en n’étant pas. L’erreur de Pythagore, qu permettat d’attrbuer aux bêtes une âme semblable à la nôtre en nature et en essence, choquat plus encore le bpède sans plumes qu tent à être le seul vvant à durer toujours. L’énoncé de l’erreur d’Epcure, c’est-à-dre l’hypothèse que la mort est une fin, ben que la plus conorme à ce que nous observons auprès des cadavres cadavres et e t dans les cmetères, cmetè res, blessat à v, non
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L’acte d'accusation
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seulement notre Cancel avdté d’être au monde, mas l’orDownload And Print guel qu sottement nous assure que nous mértons d’y rester. Toutes ces opnons passaent pour oenser Deu ; en at, on leur reprochat surtout d’ébranler l’mportance de l’homme. Il état donc naturel qu’elles menassent en prson ou plus lon leurs propagateurs. Qu’on redescendît des pures dées aux chemns tortueux de la condute humane, et la peur, encore plus que l’orguel, devenat le premer moteur des exécratons. La hardesse du phlosophe qu préconse le lbre jeu des sens et trate sans méprs des plasrs charnels enrageat la multtude, sujette dans ce domane à beaucoup de superstton et à plus d’hypocrse. Peu mportat que l’homme qu s’y rsquât ût ou non plus austère et paros même plus chaste que ses acharnés détracteurs : l état convenu qu’aucun eu n supplce au monde n’état capable d’exper une s atroce lcence, précsément parce que l’audace de l’esprt semblat aggraver celle du smple corps. L’ndérence du sage pour qu tout pays est patre et toute relgon un culte valable à sa manère exaspérat mêmement cette oule de prsonners ; s ce phlosophque renégat, qu ne renat pourtant aucune de ses croyances vértables, état pour eux tous un bouc émssare, c’est que chacun, un jour, secrètement ou paros même à son nsu, avat souhaté sortr du cercle où l mourrat enermé. Le rebelle qu se levat contre son prnce provoquat chez les gens d’ordre quelque chose de la même enveuse ure : son Non déptat leur ncessant Ou. Mas les pres de ces monstres qu pensaent sngulèrement étaent ceux qu pratquaent quelque vertu : ls asaent ben plus peur quand on ne pouvat les méprser tout enters.
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LA PRISON PRISON
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: l’nsstance de Cancel Download And Print certans cer tans juges juges sur les pratques magques auxquelles auxquelles l se serat jads ou récemment adonné dsposa le capt, qu, pour économser ses orces, ne pensat presque plus, à médter sur ce sujet rrtant qu l’avat accessorement préoccupé toute sa ve. Dans ce domane surtout, les vues des doctes contredsaent celles du vulgare. Par le commun bétal, le magcen état à la os révéré et haï pour ses pouvors, qu’on supposat mmenses : l’orelle de l’enve pontat encore là. C’est avec désappontement qu’on n’avat trouvé chez Zénon que l’ouvrage d’Agrppa de Netteshem, que possédaent auss le chanone Campanus et l’évêque, et celu plus récent de Govann della Porta, que Monsegneur avat également sur sa table. Pusqu’on s’obstnat sur ces matères, l’évêque tnt par équté à nterroger l’accusé. Tands que pour les sots la mage état la scence du surnaturel, ce système nquétat au contrare le prélat parce qu’l nat le mracle. Zénon ut sur ce pont à peu près sncère. L’unvers dt magque état consttué d’attractons et de répulsons obéssant à des los encore mystéreuses, mas pont nécessarement mpénétrables à l’entendement human. L’amant et l’ambre, parm les substances connues, semblaent les seules à révéler à dem ces secrets que personne encore n’avat explorés et qu un jour peut-être élucderaent tout. Le grand mérte de la mage, et de l’alchme, sa fille, état de postuler l’unté de la matère, à telles ensegnes que certans phlosophes de l’alambc avaent cru pouvor assmler celle-c à la lumère et à la oudre. On s’engageat ans dans une voe qu menat lon, mas dont tous les adeptes dgnes de ce nom reconnassaent les dangers. Les scences mécanques, dont Zénon s’état ort mêlé, s’apparentaent à ces poursutes en ce qu’elles s’eorçaent de transormer la connassance DE OCCULTA PHILOSOPHIA
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des choses en pouvor sur les choses, et ndrectement Cancel Download And Print sur l’homme. En un sens, tout état mage : mage la scence des herbes et des métaux qu permettat au médecn d’nfluencer la malade et le malade ; magque la malade elle-même, qu s’mpose au corps comme une possesson dont celu-c paros ne veut pas guérr ; magque le pouvor des sons agus ou graves qu agtent l’âme ou au contrare l’apasent ; magque surtout la vrulente pussance des mots presque toujours plus orts que les choses et qu explque à leur sujet les assertons du Sepher Yetsira, pour ne pas dre de l’ Evangile selon saint Jean. Le prestge qu entoure les prnces et se dégage des cérémones d’églse état mage, et mage les nors échaauds et les tambours lugubres des exécutons qu ascnent et terrfient les badauds encore plus que les vctmes. Magques enfin l’amour, et la hane, qu mprment dans nos cerveaux l’mage d’un être par lequel nous consentons à nous lasser hanter. Monsegneur secoua pensvement la tête : un unvers organsé de la sorte ne lassat plus de place à la volonté personnelle de Deu. Zénon agréa, non sans savor quel rsque l courat. On échangea ensute quelques arguments sur ce que c’est que la volonté personnelle de Deu, par quels ntermédares elle s’exerce, et s elle est nécessare à l’opératon des mracles. L’évêque, par exemple, ne trouvat ren de âcheux dans l’nterprétaton que l’auteur du Traité du monde physique avat donnée des stgmates de sant Franços, représentés par lu comme un extrême eet du pussant amour, qu partout modèle l’amant à la semblance de l’amé. L’ndécence dont le phlosophe s’état rendu coupable état d’orr cette explcaton comme exclusve et non nclusve. Zénon na l’avor at. Abondant, par une sorte de poltesse de dalectcen, dans le sens de l’adversare.
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Monsegneur rappela ensute que le très peux cardnal Cancel Download And Print Ncolas de Cusa avat naguère découragé l’enthousasme autour des statues mraculeuses et des hostes qu sagnent ; ce vénérable savant (qu avat postulé lu auss un unvers nfin) semblat presque avor accepté d’avance la doctrne de Pomponace, pour qu les mracles sont entèrement l’eet de la orce magnatve, comme Paracelse et Zénon voulaent que le ussent les appartons de la mage. Mas le sant cardnal, qu avat jads contenu de son meux les erreurs des Husstes, tarat peutêtre aujourd’hu des vues s hardes, pour ne pont paraître donner des gages aux hérétques et aux mpes plus nombreux que de son temps. Zénon ne put qu’acquescer : le vent état certanement mons que jamas à la lberté d’opnon. Il ajouta même, rendant à l’évêque sa poltesse dalectque, que dre d’une apparton qu’elle est tout entère dans l’magnaton ne sgnfie pas qu’elle sot magnare au sens grosser du terme : les deux et les démons qu résdent en nous sont ort réels. L’évêque ronça le sourcl au premer de ces deux plurels, mas l état lettré, et savat qu’l aut passer quelque chose aux gens qu ont lu leurs auteurs grecs et latns. Déjà, le médecn contnuat en décrvant la sollcteuse attenton qu’l avat de tout temps portée aux hallucnatons de ses malades : le plus vra des êtres s’y asat jour, et paros un cel authentque et un vértable ener. Pour en revenr à la mage, et autres doctrnes analogues, ce n’état pont seulement contre la superstton qu’l allat lutter, mas contre l’épas sceptcsme qu ne témérarement l’nvsble et l’nexplqué. Sur ce pont, le prélat et Zénon urent d’accord sans arrèrepensée. On toucha pour finr aux chmères de Copernc : ce terran tout hypothétque état pour l’nculpé sans théologque danger. Tout au plus pouvat-on
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l’accuser de présompton pour avor présenté comme Cancel Download And Print la plus plausble une obscure théore contredsant l’Ecrture. Sans égaler Luther et Calvn dans leurs dénoncatons d’un système qu tournat en moquere l’hstore de Josué, l’évêque le jugeat mons recevable pour les bons chrétens que celu de Ptolémée. Il y fit d’alleurs une objecton mathématque ort juste basée sur les parallaxes. Zénon convnt que ben des choses restaent à prouver. En rentrant chez so, c’est-à-dre en prson, et sachant ort ben que l’ssue de cette malade d’ncarcératon serat atale, Zénon las d’argutes s’arrangeat pour réfléchr le mons possble. Meux valat ournr à son esprt des occupatons machnales qu lu évteraent de tomber dans la terreur ou la ureur : l état lu-même le patent qu’l s’agssat de soutenr et de ne pas désespérer. Sa connassance des langues lu vnt en ade : l avat su les tros ou quatre langages savants qu’on apprend à l’école et s’état en cours de route et de ve amlarsé tant ben que mal avec une bonne demdouzane des dérents parlers vulgares. Souvent, l avat regretté de traîner avec so ce bagage de mots dont l n’usat plus : l y avat quelque chose de grotesque à savor le brut ou le sgne dont on se sert pour désgner l’dée de vérté ou l’dée de justce en dx ou douze langues. Ce atras devnt un passe-temps : l établt des lstes, orma des groupes, compara des alphabets et des règles de grammare. Il joua pluseurs jours avec le projet d’un dome logque, auss net que la notaton muscale, capable d’exprmer avec ordre tous les ats possbles. Il s’nventa des langages chrés, comme s’l avat quelqu’un à qu adresser des messages secrets. Les mathématques auss urent utles : l supputat par-dessus le tot de la prson la déclnason des astres ; l refit mnuteusement les calculs concernant
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la quantté d’eau bue et évaporée chaque jour par la Cancel Download And Print plante qu sans doute se desséchat dans son ofcne. Il repensa longuement aux machnes volantes et plongeantes, aux enregstrements de sons par des mécanques mtant la mémore humane dont Remer et lu avaent jads dessné les dsposts, et qu’l lu arrvat encore de profiler sur ses calepns. Mas une méfiance l’avat prs de ces rallonges artficelles à ajouter aux membres de l’homme : peu mportat qu’on pût s’enoncer dans l’océan sous une cloche de er et de cur tant que le plongeur rédut à ses seules ressources étouerat dans l’onde ; ou encore qu’on montât au cel à l’ade de pédales et de machnes tant que le corps human resterat cette lourde masse qu chot comme une perre. Peu mportat surtout qu’on trouvât moyen d’enregstrer la parole humane, qu déjà ne remplssat que trop le monde de son brut de mensonge. Des ragments de tables alchmques apprses par cœur à Léon sortrent brusquement de l’oubl. Auscultant tantôt sa mémore, tantôt son jugement, l s’oblgea à retracer pont par pont certanes de ses opératons de chrurgen : cette transuson du sang, par exemple, qu’l avat tentée deux os. Le premer essa avat réuss par-delà son attente, mas le second avat amené la mort subte, non de celu qu versat le sang, mas de celu qu l’avat reçu, comme s’l y avat vrament entre deux lqudes rouges coulant d’ndvdus dérents des hanes et des amours dont nous ne sommes pas nstruts. Les mêmes accords et les mêmes répulsons explquaent sans doute chez les couples la stérlté ou la écondté. Ce derner mot le ramena malgré lu à Idelette emmenée par le guet. Des brèches se asaent dans ses déenses s ben dressées : un sor, asss à sa table, regardant vaguement la flamme de sa chandelle, l se rappela tout à coup les jeunes
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mones jetés au Cancel bûcher,Download et l’horreur, And Printla pté, l’angosse, et une colère qu devenat de la hane lu firent à sa honte verser un flot de larmes. Il ne savat plus très ben sur qu n sur quo l pleurat ans. La prson l’aablssat. Au chevet des malades, l avat eu souvent l’occason d’entendre raconter des rêves. Il avat auss songé ses songes. On se contentat presque toujours de trer de ces vsons des présages paros vras, pusqu’ls révèlent les secrets du dormeur, mas l se dsat que ces jeux de l’esprt lvré à lu-même pourraent surtout nous rensegner sur la manère dont l’âme perçot les choses. Il énumérat les qualtés de la substance vue en rêve : la légèreté, l’mpalpablté, l’ncohérence, la lberté totale à l’égard du temps, la moblté des ormes de la personne qu at que chacun y est pluseurs et que pluseurs se rédusent en un, le sentment quas platoncen de la rémnscence, le sens presque nsupportable d’une nécessté. Ces catégores antomales ressemblaent ort à ce que les hermétstes prétendaent savor de l’exstence d’outre-tombe, comme s le monde de la mort eût contnué pour l’âme le monde de la nut. Touteos, la ve elle-même, vue par un homme prêt à la qutter, acquérat elle auss l’étrange nstablté et la bzarre ordonnance des songes. Il passat de l’un à l’autre, comme de la salle du gree où on l’nterrogeat à sa cellule ben verroullée, et de sa cellule au préau sous la nege. Il se vt à la porte d’une étrote tourelle où Sa Majesté Suédose le logeat à Vadsténa. Un grand élan que le prnce Erk avat la velle poursuv dans la orêt se tenat devant lu, mmoble et patent comme les bêtes qu attendent une ade. Le rêveur sentat qu’l lu ncombat de cacher et de sauver la créature sauvage, mas sans savor par quels moyens lu are ranchr le seul de ce gîte human. L’élan état d’un
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nor lusant et moullé, comme s’l état venu à lu Cancel Download And Print à travers une rvère. Une autre os, Zénon état dans une barque qu débouchat d’un fleuve vers le large. C’état un beau jour de solel et de vent. Des possons par centanes filaent et nageaent autour de l’étrave, emportés par le courant et le devançant à leur tour, allant de l’eau douce vers les eaux amères, et cette mgraton et ce départ étaent plens de joe. Mas rêver devenat nutle. Les choses prenaent d’elles-mêmes ces couleurs qu’elles n’ont que dans les songes, et qu rappellent le vert, le pourpre et le blanc purs des nomenclatures alchmques : une pomme d’orange, qu vnt un jour luxueusement orner sa table, brlla longtemps comme une boule d’or ; son parum et sa sapdté auss urent un message. A pluseurs reprses, l crut entendre une musque solennelle qu ressemblat à celle des orgues, s celle des orgues pouvat s’épandre en slence ; l’esprt plutôt que l’ouïe recevat ces sons. Il eeura du dogt les ables aspértés d’une brque couverte de lchen et crut explorer des mondes. Un matn, en tournant dans la cour avec son garden Glles Rombaut, l vt sur le pavé négal une couche de glace transparente sous laquelle courat et palptat une vene d’eau. La mnce coulée cherchat et trouvat sa pente. Une os au mons, l ut l’hôte d’une apparton durne. Un bel et trste enant d’une dzane d’années s’état nstallé dans la chambre. Tout de nor vêtu, l avat l’ar d’un nant sort d’un de ces châteaux magques qu’on vste en rêve, mas Zénon l’eût cru réel s’l ne s’état brusquement et slenceusement trouvé là sans avor eu à entrer et à marcher. Cet enant lu ressemblat, et n’état pourtant pas celu qu avat grand rue aux Lanes. Zénon chercha dans son passé, qu contenat peu de emmes. Il avat prudemment ménagé Caslda Perez, se soucant peu
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de renvoyer cette pauvre fille en Espagne grosse Cancel Download And Print de ses œuvres. La captve sous les murs de Bude état morte peu après qu’l l’eut prse, et l ne s’en souvenat que pour cette rason. Les autres emmes n’avaent guère été que des rbaudes contre lesquelles l’avaent jeté les hasards de la route : l avat peu apprécé ces paquets de jupons et de char. Mas la dame de Frösö s’état montrée dérente : elle l’avat assez amé pour souhater lu orr un durable asle ; elle avat voulu de lu un enant ; l ne saurat jamas s s’état réalsé ou non ce vœu qu va plus lon que le désr du corps. Se pouvat-l que ce jet de semence, traversant la nut, eût about à cette créature, prolongeant et peut-être multplant sa substance, grâce à cet être qu état et n’état pas lu ? Il éprouva le sentment d’une nfine atgue, et malgré lu quelque orguel. S cela état, l avat parte lée, comme l l’avat d’alleurs déjà par ses écrts et ses actes ; l ne sortrat du labyrnthe qu’à la fin des temps. L’enant de Sgn Ulsdatter, l’enant des nuts blanches, possble entre les possbles, contemplat cet homme épusé de ses yeux étonnés, mas graves, comme prêt à lu poser des questons auxquelles Zénon n’avat pont de réponses. Il eût été dfcle de dre lequel regardat l’autre avec le plus de pté. La vson se défit d’un seul coup, comme elle s’état ormée ; l’enant peut-être magnare dsparut. Zénon s’oblgea à n’y plus penser ; ce n’état sans doute qu’une hallucnaton de prsonner. Le garden de nut, un certan Hermann Mohr, état un grand et gros homme tacturne, qu dormat d’un œl au ond du corrdor, et semblat n’avor d’autre passon que d’huler et d’astquer les verrous. Mas Glles Rombaut état un plasant coqun. Il avat vu le monde, monde, ayant ayant at le colpor colpor tage et la guerre gue rre ; son ntarssable bavardage bavardage rensegnat Zénon sur ce qu
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se dsat ou se asat en vlle. C’état lu qu avat la Cancel Download And Print dsposton des soxante sols par jour alloués au capt, comme à tous les prsonners de condton honorable, snon noble. Il le gorgeat de vctualles, sachant ort ben que son pensonnare y toucherat à pene, et que ces pâtés et ces salasons raent finr sur la table des époux Rombaut et de leurs quatre enants. Cette abondance de mangealle et son lnge assez ben blanch par la emme Rombaut charmaent peu le phlosophe, qu avat entrevu l’ener de la commune geôle, mas une certane camaradere s’état ormée entre lu et le luron, comme l ne manque guère d’arrver quand un homme apporte à un autre sa nourrture, le promène, lu at la barbe et vde son baquet. Les réflexons du drôle étaent un agréable antdote au style théologque et judcare : Glles n’état pas très sûr qu’l y eût un Bon Deu, vu le vlan état de ce bas monde. Les malheurs d’Idelette lu coûtaent une larme : c’état dommage qu’on n’eût pas lassé vvre une s belle pette. Il trouvat rdcule l’aventure des Anges, tout en déclarant qu’on se dstrat comme on peut, et que des goûts et des couleurs l ne aut pont juger. Pour lu, l amat les filles, ce qu est un plasr mons dangereux, mas cher, qu lu amenat paros du trouble au logs. Quant aux aares publques, l s’en outat. Zénon et lu jouaent aux cartes ; Glles gagnat toujours. Le médecn médcamentat la amlle Rombaut. Une grande part de galette que Greete déposa au gree le jour des Ros à l’ntenton de Zénon donna dans l’œl du vauren qu la confisqua au profit des sens, ce qu d’alleurs n’état pont mal are, pusque le prsonner avat de toute açon trop à manger. Zénon ne sut jamas que Greete lu avat donné cette tmde preuve de fidélté.
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Quand vnt leCancel moment, le phlosophe se déendt Download And Print assez ben. Certanes des charges finalement retenues étaent neptes : l n’avat certanement pas embrassé en Orent la o de Mahomet ; l n’état même pas crconcs. Se blanchr d’avor serv le Barbare nfidèle à une époque où ses flottes et ses armées combattaent l’Empereur état une tâche mons asée ; Zénon fit valor que, fils d’un Florentn, mas établ et exerçant en ce temps-là en Languedoc, l se consdérat alors comme un sujet du Ro Très Chréten, lequel entretenat de bons rapports avec la Porte Ottomane. L’argument n’état guère solde, mas des ables ort propces à l’accusé se répandrent sur cette vste dans le Levant. Zénon aurat été un des agents secrets de l’Empereur en pays barbaresque, et seule la dscréton lu ermat la bouche. Le phlosophe ne contredt pas cette noton, et quelques autres non mons romanesques, pour ne pas décourager des ams nconnus qu, évdemment, les asaent courr. Les deux années passées près du ro de Suède étaent plus dommageables encore, parce que plus récentes, et qu’aucune buée de légende ne pouvat les embellr. II s’agssat de savor s’l avat vécu catholquement dans ce pays prétendu réormé. Zénon na avor abjuré, mas n’ajouta pas qu’l état allé au prêche, d’alleurs le mons souvent possble. possble. Le gre gre d’esponnage d’esponnage au profit de l’étranger reparut à la surace ; l’accusé se fit mal vor en arguant que s’l avat eu souc d’apprendre et de transmettre à quelqu’un quelque chose, l se ût nstallé dans une vlle mons à l’écart des grandes aares que ne l’état l’é tat Bruges. Mas précsément ce long séjour de Zénon dans sa vlle natale sous un nom d’emprunt plssat le ront des juges : on y voyat des abîmes. Qu’un mécréant condamné par la Sorbonne se ût caché quelques mos auprès d’un chrurgen-barber de ses
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ams, peu noté pour sa pété chrétenne, on l’adCancel Download And Print mettat, mas qu’un hable homme qu avat eu des pratques royales eût adopté pour longtemps l’exstence mpécuneuse d’un médecn d’hospce état trop étrange pour être nnocent. L’accusé resta sur ce pont à court de réponse : l ne comprenat plus lumême pourquo l s’état attardé à Bruges s longtemps. Par une sorte de décence, l ne fit pas alluson à l’aecton qu l’avat lé de plus en plus étrotement avec le déunt preur : cette rason du reste n’en eût semblé une que pour lu. Quant aux relatons abomnables avec Cypren, l’accusé les nat tout plat, mas chacun s’aperçut que son langage manquat de cette vertueuse ndgnaton qu eût été de mse. On ne revnt pas sur la charge d’avor sogné et restauré des ugts à Sant-Cosme ; le nouveau preur des Cordelers, jugeant sanement que son couvent avat déjà trop pât de toute cette aare, nssta pour qu’on ne ravvât pont autour du médecn de l’hospce ces rumeurs de déloyauté. Le prsonner qu s’état jusque-là ort ben comporté, éclata en ureur lorsque Perre Le Cocq, le procureur de Flandre, remettant sur le taps le veux sujet des nfluences ndues et magques, fit remarquer que l’natuaton de Jean-Lous de Berlamont pour le médecn pouvat s’explquer par un maléfice. Zénon après avor exposé à l’évêque qu’en un sens tout est mage enrageat qu’on ravalât ans le commerce de deux esprts lbres. Le révérendssme évêque ne releva pas l’apparente contradcton. En matère de doctrne, l’accusé ut auss agle que peut l’être un homme lgoté de pussantes toles d’aragnée. La queston de l’nfinté des mondes préoccupat plus partculèrement les deux théologens appelés en qualté d’audteurs ; on dsputa longuement s nfin et llmté sgnfient la même chose. chose. La passe d’armes au sujet de l’éternté l’éte rnté de
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l’âme, ou de sa Cancel surve seulement partelle ou seuleDownload And Print ment temporare qu équvaudrat en at pour le chréten à une mortalté pure et smple, dura davantage encore : Zénon rappela ronquement la définton des partes de l’âme chez Arstote, sur laquelle avaent ensute ntellgemment rafné les docteurs arabes. Postulat-on l’mmortalté de l’âme végétatve ou de l’âme anmale, de l’âme ratonnelle ou de l’âme ntellectuelle, et finalement de l’âme prophétque, ou celle d’une entté qu sous-gît à toutes celles-là ? A un moment donné, l fit valor que certanes de ses hypothèses rappelaent en somme la théore hylémorphque de sant Bonaventure, qu mplque une certane corporalté des âmes. On na la conséquence, mas le chanone Campanus qu assstat à ce débat et se souvenat d’avor ensegné jads à son élève ces subtltés scolastques, scolastque s, éprouva de cette ce tte argumentaton une bouée d’orguel. Ce ut au cours de cette séance qu’on lut, un peu trop longuement au gré des juges, qu estmaent qu’on en savat assez pour juger, des cahers où Zénon quarante ans plus tôt avat transcrt des ctatons de païens ou d’athées notores, ou de Pères de l’Eglse se contredsant les uns les autres. Jean Myers par malheur avat sogneusement conservé cet arsenal d’écoler. Ces arguments assez rebattus mpatentèrent presque également l’accusé et Monsegneur, mas les non-théologens en urent plus choqués que des hardesses des Prothéories, trop abstruses pour être aclement comprses. Enfin, dans un slence lugubre, on fit lecture des Prophéties comiques dont Zénon avat naguère régalé l’organste et sa emme comme de devnettes noensves. Ce monde grotesque comme celu que l’on vot dans les tableaux de certans pentres parut brusquement redoutable. Avec le malase qu’nspre la ole, on écouta l’hstore de l’abelle qu’on dépoulle
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de sa cre pour honorer des morts prvés d’yeux, Cancel Download And Print devant qu vanement se consument des cerges, et qu sont non mons démuns d’orelles pour entendre les supplques et de mans pour donner. Bartholommé Campanus lu-même pâlt à la menton des peuples et des prnces de l’Europe pleurant et gémssant à chaque équnoxe de prntemps sur un rebelle condamné jads en Orent, ou encore à celle des ourbes et des ols qu menacent ou promettent au nom d’un Segneur nvsble et muet dont ls se dsent sans preuves les ntendants. On ne rt pas non plus de l’mage des Sants Innocents égorgés et embrochés chaque jour par mllers en dépt de leurs bêlements ptoyables, n de celle des hommes endorms sur des plumes d’oseaux et transportés au cel des songes, n des osselets des morts décdant de la ortune des vvants sur des planches de bos tachées du sang de la vgne, n encore mons des sacs percés aux deux bouts et juchés sur des échasses, répandant sur le monde un sale vent de paroles et dans leur géser dgérant la terre. Par-delà l’ntenton blasphématore vsble en plus d’un endrot à l’égard des nsttutons chrétennes, on sentat dans ces élucubratons un reus plus total encore et qu lassat dans la bouche un vague écœurement. Au phlosophe lu auss cette lecture asat l’eet d’une régurgtaton amère, et sa suprême mélancole état que les audteurs s’ndgnassent contre l’audaceux qu montrat dans son absurdté la pauvre condton humane, et non contre cette condton elle-même qu’ls avaent cependant pour une pette parte le pouvor de changer. L’évêque ayant proposé qu’on lassât là ces sornettes, le docteur en théologe Héronymus Van Palmaert, qu évdemment détestat l’accusé, revnt aux ctatons anthologsées par Zénon, et opna que la ruse qu consste à trer d’ncens auteurs des opnons mpes et nocves
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état plus méchante encore qu’une afrmaton drecte. Cancel Download And Print Monsegneur trouva cette vue excessve. Le vsage apoplectque du docteur s’enflamma, et l demanda ort haut pourquo on l’avat dérangé pour donner son avs sur des erreurs en matère de mœurs et de doctrne qu n’eussent pas at héster un nstant un juge de vllage. Deux ats ort préjudcables à l’nculpé se produsrent durant cette séance. Une grande emme aux trats grossers se présenta avec agtaton. C’état l’ancenne servante de Jean Myers, Catherne, qu s’état vte dégoûtée de tenr le ménage des nfirmes établs par Zénon dans la mason du VeuxQua-au-Bos, et qu lavat mantenant la vasselle de la Ctroulle. Elle accusa le médecn d’avor emposonné Jean Myers à l’ade de ses panacées ; se chargeant elle-même pour perdre le prsonner, elle avouat avor adé Zénon dans cette tâche. Ce vlan homme avat préalablement allumé ses sens à l’ade de potons vénéfiques, de sorte que corps et âme elle avat été son esclave. Elle ne tarssat pas sur les prodgeux détals de son commerce charnel avec le médecn ; l allat crore que sa amlarté avec les filles et les clents de la Ctroulle l’avat entretemps ort nstrute. Zénon na ermement avor emposonné le veux Jean, mas admt avor connu par deux os cette emme. Les aveux hurlants et gestculants de Catherne ranmèrent ausstôt l’ntérêt langussant des juges ; leur eet ut énorme sur le publc qu se pressat à l’entrée de la salle ; tous les bruts snstres concernant le sorcer en urent confirmés d’autant. Mas la martorne lancée à ond n’arrêtat plus ; on la fit tare ; chantant poulles aux juges, elle ut jetée hors de la salle et envoyée chez les olles où elle put se déchaîner tout à l’ase. Les magstrats pourtant demeuraent perplexes.
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Que Zénon n’eût pas conservé l’hértage du Cancel Download And Print chrurgen-barber prouvat son désntéressement et enlevat tout moble au crme ; le remords, d’autre part, avat pu lu nsprer cette condute. Pendant qu’on en délbérat, une dénoncaton plus redoutable encore, dans l’état présent des aares publques, parvnt aux juges par lettre anonyme. Le message émanat évdemment des vosns du veux orgeron Cassel. On assurat que le médecn deux mos durant se serat rendu chaque jour à la orge pour sogner un blessé qu n’état autre que l’assassn du déunt captane Vargaz ; le même médecn aurat ort hablement at évader le meurtrer. Par bonheur pour Zénon, Josse Cassel, qu eût pu parler sur ben des ponts, se trouvat en Gueldre au servce du Ro, dans le régment de Monseur de Landas sous les ordres duquel l venat de s’engager. Le veux Peter lassé seul avat ms la cle sous la porte et s’en état retourné dans un vllage où l avat du ben, personne ne savat exactement où. Zénon na comme l convenat et trouva à l’mprovste un allé dans le prévôt qu avat naguère porté sur ses regstres la mort de l’assassn de Vargaz dans une grange à on et ne se soucat pas qu’on vînt l’accuser d’avor néglgemment nstrut cette déjà lontane aare. L’auteur de la lettre ne ut pont découvert, et les vosns de Josse, nterrogés, firent des réponses mfigue, m-rasn : personne dans son bons sens n’eût avoué avor attendu deux ans avant de dénoncer parel crme. Mas l’accusaton état grave, et rendat du pods à celle d’avor secouru des ugts dans l’hospce. Pour Zénon, le procès n’état plus guère que l’équvalent d’une de ces partes de cartes avec Glles, que par dstracton ou par ndérence l perdat toujours. Tout comme les bouts de carton barolé qu runent ou enrchssent les joueurs, chaque pèce du jeu légal avat une valeur arbtrare ;
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exactement comme à la blanque ou à l’hombre l état Cancel Download And Print convenu qu’on se gardât à carreau, qu’on broullât les cartes ou qu’on passât la man, qu’on se couvrît et qu’on mentît. La vérté, s on l’eût dte, eût d’alleurs dérangé tout le monde. Elle se dstnguat ort peu du mensonge. Là où l dsat vra, ce vra ncluat du aux : l n’avat abjuré n la relgon chrétenne n la o catholque, mas l l’eût at, s’l l’eût allu, avec une tranqulle bonne conscence, et ût peut-être devenu luthéren s’l état retourné, comme l l’avat espéré, en Allemagne. Il nat à bon drot les relatons charnelles avec Cypren, mas l avat un sor désré ce corps mantenant évanou ; en un sens, les allégatons de ce malheureux enant étaent mons ausses que Cypren lu-même en les asant ne l’avat peut-être cru. Personne ne l’accusat plus d’avor proposé à Idelette une poton abortve, et l avat honnêtement né l’avor at, mas avec cette restrcton mentale qu’l l’eût secourue s elle l’en avat mploré à temps, et qu’l regrettat n’avor pu lu épargner de la sorte sa lamentable lamentable fin. D’autre part, là où ses dénégatons n’étaent lttéralement qu’un mensonge, comme dans l’aare des sons donnés à Han, la vérté pure eût non mons ment. Les servces rendus aux rebelles ne prouvaent pas, comme le pensaent avec ndgnaton le procureur, et avec admraton les patrotes, qu’l eût embrassé la cause de ces derners : personne d’entre ces acharnés n’eût comprs son rod dévouement de médecn. Les escarmouches avec les théologens avaent eu leur charme, mas l savat ort ben qu’l n’exste aucun accommodement durable entre ceux qu cherchent, pèsent, dssèquent, et s’honorent d’être capables de penser deman autrement qu’aujourd’hu, et ceux qu croent ou afrment crore, et oblgent sous pene de mort leurs semblables à en are autant. Une astdeuse rréalté régnat dans
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LA PRISON PRISON
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ces colloques où les questons et les réponses ne Cancel Download And Print s’emboîtaent pas. Il lu advnt de s’endormr durant l’une des dernères séances ; une bourrade de Glles, qu se tenat à son côté, le rappela à l’ordre. En at, un des juges auss dormat. Ce magstrat se révella croyant la sentence de mort déjà donnée, ce qu fit rre tout le monde, y comprs l’accusé. Non seulement au trbunal, mas en vlle, les opnons s’étaent algnées dès le début en schémas complqués. La poston de l’évêque n’état pas clare, mas l ncarnat évdemment la modératon, snon l’ndulgence. Monsegneur étant ex ofcio un des soutens du pouvor royal, nombre de gens en place mtaent son atttude ; Zénon devenat presque le protégé du part de l’ordre. Mas certanes des charges contre le prsonner étaent s graves que la modératon à son égard avat ses dangers. Les parents et ams que Phlbert Lgre gardat à Bruges héstaent : l’accusé somme toute appartenat à la amlle, mas ls doutaent s c’état là une rason pour l’accabler ou le déendre. Ceux au contrare qu avaent eu à pâtr des dures manœuvres des banquers Lgre englobaent Zénon dans leur rancœur : ce nom leur mettat le mors aux dents. Les patrotes qu abondaent chez les bourgeos et composaent la melleure part du pett peuple eussent dû soutenr ce malheureux qu passat pour avor secouru leurs parels ; quelques-uns le firent en eet, mas la plupart de ces enthousastes nclnaent vers les doctrnes évangélques et détestaent plus que tout autre le seul soupçon d’athésme ou de débauche ; de plus, ls haïssaent les couvents, et ce Zénon leur semblat avor eu à Bruges parte lée avec les mones. Seuls, quelques hommes, ams nconnus du phlosophe, rattachés à lu par des sympathes dont pour chacun la cause état é tat dérente, s’eorçaent s’eorçaent dscrètement
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L’acte d'accusation
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de le servr, sans attrer sur eux l’attenton de la Cancel Download And Print Justce, Justce, dont presque tous avaent des rasons de se méfier. Ceux-là ne lassaent passer aucune occason d’embrouller les choses, comptant sur cette conuson pour obtenr quelque gan pour le prsonner, ou tout au mons pour rdculser ses persécuteurs. Le chanone Campanus se souvnt longtemps qu’au début de évrer, peu avant la atale séance où avat at rrupton Catherne, Messeurs les Juges étaent restés un nstant sur le seul du gree à échanger des ponts de vue après la sorte de l’évêque. Perre Le Cocq, qu état en Flandre l’homme à tout are du duc d’Alve, fit remarquer qu’on avat perdu près de sx semanes à des vétlles, alors qu’l eût été s smple d’applquer les sanctons de la lo. Néanmons, l se élctat que ce procès ort dénué d’mporlance, pusqu’l ne se relat à aucun des grands ntérêts du jour, orît par là même au publc une dverson des plus utles : les pettes gens de Bruges s’nquétaent mons de ce qu se passat à Bruxelles au Trbunal des Troubles, quand ls se préoccupaent sur place du seur Zénon. De plus, l n’état pas mauvas, en ce moment où chacun reprochat à la Justce son prétendu arbtrare, de montrer qu’en Flandre on savat encore en matère légale observer les ormes. Il ajouta en bassant la vox que le révérendssme évêque avat sagement at usage de la légtme autorté que quelques-uns lu contestaent ben à tort, mas qu’l seyat peut-être de dstnguer entre la oncton et l’homme : l y avat chez Monsegneur certans scrupules scrupules dont l audrat qu’l se dé ît s’l voulat voulat contnuer à se mêler du méter de juger. Le populare tenat beaucoup à vor brûler ce partculer, et l est dangereux de retrer à un mâtn l’os qu’on a at danser sous ses yeux.
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Bartholommé Campanus n’gnorat pas que l’nCancel Download And Print fluent procureur état ort endetté envers ce qu’on contnuat encore à Bruges d’appeler la banque Lgre. Il dépêcha le lendeman un courrer à son neveu Phlbert et à la dame Martha, sa emme, en leur demandant de dsposer Perre Le Cocq à trouver quelque bas avorable avorable au prsonner.
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UNE BELLE DEMEURE
LA somptueuse résdence de Forestel avat été assez récemment construte par Phlbert et sa emme à la mode talenne ; on admrat les enfilades de pèces au parquet lusant et les hautes enêtres ouvrant sur le parc où ce matn de évrer tombaent la plue et la nege. Des pentres ayant étudé dans la Pénnsule avaent couvert le plaond des salles d’apparat de belles scènes de l’hstore proane et de la Fable : la générosté d’Alexandre, la clémence de Ttus, Danaé nondée par la plue d’or et Ganymède montant au cel. Un cabnet florentn ncrusté d’vore, de jaspe et d’ébène, auquel les tros règnes avaent contrbué, état orné de colonnettes torses et de nus émnns que multplaent des mrors ; des ressorts ouvraent des trors secrets. Mas Phlbert état trop fin pour confier ses papers d’Etat à ces trappes complquées comme l’ntéreur d’une conscence, et quant aux lettres d’amour, l n’en avat jamas rédgé, n reçu, ses passons, d’alleurs ort modérées, allant à de belles filles à qu on n’écrt pas. Dans la chemnée décorée de médallons représentant les Vertus Cardnales, du eu
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brûlat entre deux rods et lusants plastres ; les Cancel Download And Print grosses souches prses à la orêt vosne étaent dans cette splendeur les seuls objets naturels qu n’eussent pas été pols, rabotés, verns de man d’ouvrer. Rangés sur une crédence, quelques tomes montraent leurs dos de véln ou de basane estampée d’or fin ; c’étaent des ouvrages de dévoton que n’ouvrat personne ; l y avat longtemps que Martha avat sacrfié L’Institution chrétienne de Calvn, ce lvre hérétque étant, comme le lu avat polment at remarquer Phlbert, par trop compromettant. Phlbert lu-même possédat une collecton de tratés généalogques, et, dans un tror, un bel Arétn qu’l montrat de temps en temps à ses hôtes, tands que les dames parlaent bjoux ou fleurs fleurs des parterre par terres.s. Un ordre parat régnat dans ces pèces qu’on venat de ranger après la récepton de la velle. Le duc d’Alve et son ade de camp Lancelot de Berlamont avaent consent à souper et à passer la nut de retour d’une nspecton au pays de Mons ; le duc étant trop las pour monter sans atgue les grands escalers, on avat dressé son lt dans une des salles d’en bas, sous une tente de tapssere qu le protégeat des vents couls et que soutenaent des pques et des trophées d’argent ; l ne restat déjà pas trace de ce lt de repos héroïque où le vsteur de marque avat regrettablement mal dorm. La conversaton au souper avat été à la os solde et prudente ; on avat parlé des aares publques sur le ton de gens qu y partcpent et savent à quo s’en tenr ; par bon goût, on n’avat d’alleurs nssté sur ren. Le duc montrat plene confiance en ce qu concernat la stuaton en Germane Inéreure et en Flandre : les troubles étaent matés ; la monarche espagnole n’avat pas à crandre qu’on lu enlevât jamas Mddelbourg ou Amsterdam, non plus d’alleurs que Llle ou Bruxelles. Il pouvat prononcer son
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Une belle demeure
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le Ro de lu donner un remNunc dimittis d imittis,, et mplorat Cancel Download And Print plaçant. Il n’état plus jeune, et son tent attestat sa malade de oe ; son manque d’appétt oblgea ses hôtes à rester sur leur am. Lancelot de Berlamont, touteos, mangeat ort à l’ase, tout en donnant des détals sur la ve aux armées. Le prnce d’Orange état battu ; l état seulement âcheux pour la dscplne que les troupes ussent s rrégulèrement payées. Le duc ronça le sourcl et parla d’autre chose ; l lu semblat peu stratégque d’étaler à ce moment les plaes pécunares de la cause royale. Phlbert, qu savat paratement à quo se montat le défict, préérat lu auss qu’on ne parlât pont d’argent à table. Stôt leurs hôtes reparts sous une grse aurore, Phlbert, peu satsat d’avor dû débter des complments s matneux, état remonté se mettre au lt, où l travallat de préérence, eu égard à sa jambe goutteuse. Pour sa emme au contrare, qu se levat chaque jour à l’aube, cette heure n’avat ren d’nsolte. Martha marchat de son pas égal dans les pèces vdes, rectfiant çà et là sur un bahut une babole d’or ou d’argent légèrement déplacée par un domestque, ou grattant de l’ongle sur une console une mperceptble coulée de cre. Au bout d’un moment, un secrétare lu apporta d’en haut la lettre décachetée du chanone Campanus. Une pette note ronque de Phlbert l’accompagnat, ndquant qu’elle y trouverat des nouvelles de leur cousn et d’un sen rère. Assse devant la chemnée, protégée du eu trop v par un écran brodé, brodé, Martha prt connassance connassance de cette longue mssve. Les eullets couverts d’une pette écrture nore crssaent dans ses mans magres sortant de leurs manchettes de dentelle. Elle s’nterrompt bentôt pour songer. Bartholommé Campanus lu avat apprs l’exstence de ce rère
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utérn dès son arrvée en Flandre en qualté de Cancel Download And Print nouvelle épousée ; le chanone lu avat même recommandé de prer pour cet mpe, ne sachant pas que Martha s’abstenat de prer. L’hstore de ce fils llégtme avat été pour elle une soullure de plus sur sa mère déjà s sale. Il ne lu avat pas été dfcle d’dentfier le phlosophe-médecn qu s’état rendu célèbre par les sons donnés aux pestérés d’Allemagne avec l’homme vêtu de rouge qu’elle avat reçu au chevet de Bénédcte, et qu l’avat s étrangement questonnée sur leurs parents déunts. Ben des os, elle avat pensé à ce passant redoutable, et elle en avat rêvé. Tout autant que Bénédcte sur son lt de mort, l l’avat vue nue : l avat devné le vce mortel de lâcheté qu’elle portat en so, nvsble à tous ceux qu la prenaent pour une emme orte. L’dée de son exstence lu état une écharde. Il avat été ce rebelle qu’elle n’avat pas su être ; tands qu’l errat sur les routes du monde, son chemn à elle ne l’avat menée que de Cologne à Bruxelles. Mantenant, l état tombé dans cette prson obscure qu’elle avat jads abjectement crante pour so-même ; le châtment qu le menaçat lu semblat juste : l avat vécu à sa guse ; les rsques qu’l courat étaent de son chox. Elle tourna la tête, dérangée par un soue rod : le eu à ses peds ne parvenat à échauer qu’une able parte de la grande salle. Ce rod de glace état celu qu’on ressent, paraît-l, au passage d’un antôme : cet homme désormas s proche de sa fin en avat toujours été un pour elle. Mas l n’y avat ren derrère Martha que le salon magnfique et vde. Le même vde somptueux avat régné dans sa ve. Les seuls souvenrs un peu doux étaent ceux de cette Bénédcte que Deu lu avat reprse, à supposer qu’l y eût un Deu, et qu’elle n’avat même pas su sogner jusqu’au bout ; la o évangélque qu
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l’avat brûlée dans sa jeunesse, elle l’avat étouée Cancel Download And Print sous le bosseau : l n’en restat qu’une mmense cendre. Depus plus de vngt ans, la certtude de sa damnaton ne l’avat pas quttée ; c’état tout ce qu’elle retenat de cette doctrne qu’elle n’avat pas osé conesser tout haut. Mas cette noton deson propre ener avat fin par prendre quelque chose de rasss et de flegmatque : elle se savat damnée comme elle se savat emme d’un homme rche auquel elle avat un sa ortune, et mère d’un écervelé bon tout au plus à erraller et à bore en compagne de jeunes gentlshommes, ou encore comme elle savat que Martha Lgre mourrat un jour. jour. Elle avat é té sans pene vertueuse, ver tueuse, n’ayant jamas eu de galants à écondure ; les ables ardeurs de Phlbert avaent cessé de s’adresser à elle après la nassance de leur fils unque, de sorte qu’elle n’avat même pas eu à pratquer les plasrs perms. Elle seule état au at des désrs qu paros lu avaent passé sous la peau ; elle les avat mons domptés que tratés par le méprs, comme on trate par le méprs une passagère ndsposton du corps. Elle avat été pour son fils une mère juste sans vancre l’nsolence naturelle de ce garçon n s’en are amer ; on la dsat dure jusqu’à la cruauté envers ses valets et ses servantes, mas l allat ben se are respecter de cette racalle. Son atttude à l’églse édfiat tout le monde, mas elle méprsat tout bas ces momeres. S ce rère qu’elle n’avat vu qu’une seule os avat passé sx ans sous un aux nom, cachant ses vces et exerçant des vertus entes, c’état peu de chose comparé à ce qu’elle avat at toute la ve. Elle prt la lettre du chanone et monta chez Phlbert. Comme toujours, lorsqu’elle entrat dans la chambre de son mar, elle plssa les lèvres avec dédan en constatant ses erreurs de comportement et de
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régme. Phlbert enonçat dans de mols orellers qu Cancel Download And Print étaent préjudcables à sa goutte, et son drageor à portée de man ne l’état pas mons. Il eut le temps de ourrer sous son drap un Rabelas qu’l tenat près de lu pour se dstrare entre deux dctées. Elle s’asst, le buste très drot, sur un sège placé assez lon du lt. Le mar et la emme échangèrent quelques propos sur la vste de la velle ; Phlbert loua Martha de l’excellente ordonnance du repas, auquel par malheur le duc avat peu touché. Tous deux commsérèrent sa mauvase mne. Pour le bénéfice du secrétare qu ramassat ses papers avant d’aller coper dans la pèce vosne, le gros Phlbert observa révérenceusement qu’on parlat beaucoup du courage des rebelles exécutés par ordre du duc (on en doublat d’alleurs le nombre), mas pas assez de la orttude de cet homme d’Etat et de guerre mourant sous le harnos pour son maître. Martha acquesça d’un sgne. — Les aares aare s publques me parassent mons assurées que le duc ne le crot, ou ne veut le are crore, ajouta-t-l plus sèchement une os la porte reermée. Tout dépendra de la pogne de son successeur. Martha au leu de répondre lu demanda s’l trouvat ben nécessare de suer sous tant d’édredons. — J’a beson des bons avs de ma emme sur autre chose que mes orellers, dt Phlbert sur ce ton de légère dérson qu’l adoptat avec elle. Avez-vous lu la lettre de notre oncle ? — C’est C’e st une aare assez sale, fit Martha Mar tha avec héstaton. — Toutes celles celle s où la Justce met le nez sont ans, et elle les rend telles s elles ne le sont pas, dt le conseller. Le chanone, qu prend la chose ort à cœur, trouve peut-être que c’est trop de deux exécutons publques dans une amlle.
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— Chacun sat que ma mère est e st morte mor te à Münster Münste r Cancel Download And Print vctme des troubles, dt Martha dont les yeux norcrent de colère. — C’est C’es t tout ce qu’l mporte mpor te qu’on sache, e t c’est ce que je vous a consellé mo-même de are graver sur un mur d’églse, reprt Phlbert avec une douce rone. Mas je vous parle pour le moment du fils de cette rréprochable mère… Il est certan que le procureur de Flandre est nscrt pour une grosse somme sur nos lvres, je veux dre sur ceux des hérters Tucher, et qu’l pourrat trouver agréable qu’on grattât certanes nscrptons… Mas l’argent n’arrange pas tout, du mons pas auss aclement que le croent ceux qu comme le chanone en ont peu. L’aare me paraît déjà ort engagée, et Le Cocq a peut-être ses rasons à lu pour passer outre. Etes-vous très touchée par tout cela ? — Songez que je ne connas pas cet ce t homme, dt rodement Martha, qu au contrare se rappelat ort ben le moment où cet étranger avat ôté dans l’obscur vestbule de la mason Fugger son masque réglementare de médecn de la peste. Mas l état vra qu’l en savat sur elle plus qu’elle n’en savat sur lu, et, de toute açon, ce recon de son passé état de ceux qu n’mportaent qu’à elle seule, et Phlbert n’y avat pas drot d’accès. Notez que je n’a ren contre mon cousn et — Notez votre rère, que je souhateras ort avor c pour sogner ma goutte, reprt le conseller en se calant dans ses coussns. Mas quelle dée lu a prs d’aller se ourrer à Bruges comme un lèvre sous le ventre des chens et encore sous un aux nom qu ne trompe que des sots… Le monde ne demande de nous qu’un peu de dscréton et un peu de prudence. A quo sert de publer des opnons qu déplasent à la Sorbonne et au Sant-Père ?
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— Le slence est es t lourd à porter, por ter, fit soudanement Cancel Download And Print Martha comme malgré elle. Le conseller la regarda avec un étonnement narquos. — Fort or t ben, dt-l, adons ce qudam à se trer tre r d’aare. Mas remarquez que s Perre Le Cocq y consent, je devens son oblgé au leu qu’l sot le men, et que s par hasard l n’y consent pont, j’aura à avaler un non. Il se peut que Monseur de Berlamont me sache gré d’évter une fin scandaleuse à un homme que protégeat son père, mas, ou je me trompe ort, or t, ou l s’nquète s’nquè te peu de ce qu se at à Bruges. Que propose ma chère emme ? — Ren que vous pussez me reprocher repro cher après l’événement, fit-elle d’une vox sèche. — Volà qu va ben, dt le conseller conselle r avec le contentement d’un homme qu vot s’élogner la chance d’une querelle. Mes mans goutteuses m’nterdsant de tenr la plume, vous aurez la complasance d’écrre pour mo à notre oncle en nous recommandant à ses santes prères… prère s… — Sans mentonner l’artcle l’ar tcle prncpal ? fit pertper tnemment nemment Martha. Mar tha. — Notre oncle est es t assez fin pour comprendre une omsson, approuva-t-l en nclnant la tête. Il mporte que le courrer ne reparte pas les mans vdes. Vous avez sûrement des provsons de bouche à envoyer pour le Carême (des pâtés de posson eraent l’aare), et quelque lé d’étoe pour son églse. Le mar et la emme échangèrent un regard. Elle admrat Phlbert pour sa crconspecton, comme d’autres emmes admrent leur homme pour son courage ou sa vrlté. Tout allat s ben qu’l eut l’mprudence d’ajouter : — Tout Tout le mal vent de mon père qu fit élever ce neveu bâtard comme un fils. Nourr dans une amlle obscure et sans réquenter l’école…
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— Vous parlez parleCancel z sur ce Download sujet desAndbâtards en homme Print d’expérence, dt-elle avec un pesant sarcasme. Il put sourre tout à l’ase, car déjà elle lu tournat le dos et s’approchat de la porte. Cet enant naturel qu’l avat eu d’une chambrère (et qu d’alleurs n’état peut-être pas de lu) avat aclté ses rapports conjugaux plutôt qu’l ne les avat dérangés. Elle revenat toujours à ce seul gre, et en lassat passer de plus consdérables sans mot dre et (qu sat ?) sans même les remarquer. Il la rappela. — Je vous réserve rése rve une surprse, dt-l. J’a reçu ce matn quelque chose de meux qu’un courrer de notre oncle. Voc les lettres d’entérnement de l’érecton de la terre de Steenberg en vcomté. Vous savez que j’a at substtuer Steenberg à Lombarde, ce ttre rsquant de are rre chez un fils et pett-fils de banquers. — Lgre et Foulcre sonnent assez ben à mes orelles, dt-elle avec un rod orguel, rancsant selon l’usage le nom des Fuggers. Fugger s. — Ils ont un peu trop penser à des é tquettes tque ttes sur des sacs d’écus, dt le conseller. Nous vvons en un temps où un beau nom est ndspensable pour se pousser dans une cour. Il aut hurler avec les loups, ma chère emme, et crer avec les paons. Quand elle lut sorte, l étendt la man vers le drageor et s’emplt la bouche. Il n’état pas dupe de son dédan des ttres : toutes les emmes ament le clnquant. Quelque chose lu gâtat un peu le goût des dragées. C’état dommage qu’on ne pût ren are pour ce pauvre bougre sans se compromettre. Martha redescendt l’escaler d’honneur. Malgré elle, ce ttre tout neu lu bourdonnat agréablement aux orelles ; leur fils en tout cas leur en saurat gré un jour. Par comparason, la lettre du chanone en dmnuat d’mportance. La réponse à are état une corvée ; elle se reprt à penser avec
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amertume que Phlbert somme toute en asat Cancel Download And Print toujours à sa guse, et qu’elle n’aurat été toute sa ve que la rche ntendante d’un homme rche. Par une étrange contradcton, ce rère qu’elle abandonnat à son sort état en ce moment plus proche d’elle que son mar et son fils unque : avec Bénédcte et sa mère, l asat parte d’un monde secret où elle restat enermée. En un sens, elle se condamnat en lu. Elle fit appeler son majordome pour lu donner l’ordre d’assembler les cadeaux qu’on remettrat au courrer, lequel se gobergeat dans les cusnes. Le marjordome avat une pette aare dont l aurat voulu parler à Madame. Une mervelleuse occason s’orat. Comme Madame ne l’gnorat pas, les bens de Monseur de Battenbourg avaent été confisqués après son exécuton. Ils étaent encore sous séquestre, la vente au profit de l’Etat ne devant avor leu qu’après le payement des dettes aux partculers. On ne pouvat pas dre que les Espagnols ne fissent pas les choses dans les règles. Mas, grâce à l’ancen concerge du supplcé, l avat eu vent de l’exstence d’un lot de tapsseres qu ne figuraent pas sur l’nventare et dont on pourrat dsposer à part. C’étaent de beaux Aubussons représentant des épsodes de l’Hstore sante, L’Adoration du Veau d’or, Le Reniement de saint Pierre, L’Incendie de Sodome, Le Bouc émissaire, Les Hébreux jetés dans la ournaise ardente. Le métculeux majordome remt sa pette lste dans son gousset. Madame avat justement mentonné qu’elle amerat assez rénover les tentures du Salon de Ganymède. Et, de toute açon, ces pèces augmentaent de valeur avec le temps. Elle y réflécht un nstant et acquesça du menton. Ce n’étaent pas là des sujets proanes, comme ceux dans lesquels Phlbert donnat un peu trop. Et elle croyat ben avor vu jads ces tentures dans l’hôtel de Monseur de Battenbourg, où elles asaent un eet ort noble. C’état une aare à ne pas manquer.
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LA VISITE DU CHANOINE
L’APRÈS-DÎNER qu suvt la condamnaton de Zénon, le phlosophe apprt que le chanone Bartholommé Campanus l’attendat dans le parlor du gree. Il descendt accompagné de Glles Rombaut. Le chanone demanda au geôler qu’on les lassât seuls. Pour plus de sûreté, Rombaut en s’en allant donna donna un tour tour de cle cle à la porte. Le veux Bartholommé Campanus état lourdement asss dans un auteul à haut dosser près d’une table ; ses deux cannes reposaent près de lu à terre. En son honneur, on avat allumé dans la chemnée un bon eu, dont la lueur suppléat au jour avare et rod de cet après-md de évrer. Le large vsage du chanone, sllonné de centanes de pettes, rdes, semblat dans cette lumère presque rose, mas Zénon nota ses yeux rougs et le tremblement réprmé des lèvres. Les deux hommes héstaent sur la manère de s’aborder. Le chanone fit un vague mouvement pour se lever, mas son âge et ses nfirmtés mettaent cette poltesse hors de queston, et
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LA PRISON PRISON
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l n’état pont sûr qu’l n’y eût pas on ne savat quo Cancel Download And Print d’nconvenant dans cet hommage rendu à un condamné. Zénon resta à une dstance de quelques pas. — Optime pater, dt-l, reprenant une appellaton dont l s’état serv pour le chanone au temps de ses écoles, je vous remerce des servces petts et grands que vous m’avez rendus durant ma captvté. J’a bentôt devné d’où venaent ces ce s attentons. Votre vste en est e st une que je n’espéras n’espér as pas. — Que ne vous ê tes-vous découvert découver t plus tôt ! fit le vellard avec un aectueux reproche. Vous avez toujours eu mons confiance en mo qu’en ce chrurgen-barber… — Vous é tonnez-vous que je me sos méfié ? réplqua le phlosophe. II rottat méthodquement ses dogts gourds. Sa chambre, ben que stuée à l’étage, état d’une humdté nsdeuse par ce temps d’hver. Il s’asst sur un sège placé près du eu et tendt ses paumes. — Ignis noster, fit-l doucement, employant une ormule alchmque que Bartholommé Campanus avat été le premer à lu ensegner. Le chanone ut traversé d’un rsson. — Ma part par t dans les servce ser vcess qu’on a essayé e ssayé de vous rendre se rédut à peu de chose, dt-l, s’eorçant de poser sa vox. Vous vous souvendrez peut-être qu’un grave dérend avat opposé naguère Monsegneur et l’ancen preur des Cordelers. Mas ces deux santes personnes avaent fin par s’apprécer. Le eu preur vous recommanda au révérendssme évêque sur son lt de mort. Monsegneur a tenu à ce que vous ussez jugé avec avec équté. — Je l’en remerce, reme rce, fit le condamné. Le chanone sentt dans cette réponse une ponte d’rone.
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La visite du chanoine
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— Rappelez-vous que ce n ’état ’é tat pas à MonCancel Download And Print segneur seul à porter le verdct. Il a jusqu’au bout recommandé l’ndulgence. — N’est-ce N’e st-ce pont l’usage, dt Zénon avec quelque âcreté. Ecclesia Ecclesia abhorret abhor ret a sanguine. sanguine. — C’état C’é tat sncère cette ce tte os, dt le chanone blessé. Mas, par malheur, les crmes d’athésme et d’mpété sont patents, et vous avez voulu qu’l en sot ans. En matère de drot commun, ren, grâce à Deu, n’a été prouvé contre vous, mas vous savez comme mo que dx présomptons équvalent à une convcton pour le populare, et même pour la plupart des juges. Les accusatons de ce déplorable enant dont je ne veux même pas me rappeler le nom vous avaent tout d’abord beaucoup nu… — Vous ne m’magnez m’magne z pourtant pour tant pas me mêlant aux rs et aux jeux dans l’étuve à la lueur de cerges volés ? — Personne er sonne ne l’a at, dt gravement gravement le chanone. N’oublez pas qu’l est d’autres espèces de complcté. — Il est es t é trange que pour nos chrétens chré tens les prétendus désordres de la char consttuent le mal par excellence, dt médtatvement Zénon. Personne ne punt avec rage et dégoût la brutalté, la sauvagere, la barbare, l’njustce. Nul deman ne s’avsera de trouver obscènes les bonnes gens qu vendront regarder mes me s tressautements tressautements dans les flammes. Le chanone se couvrt le vsage d’une de ses mans. — Excusez-mo, mon père, père , dt Zénon. Non decet. Je Je ne commettra comme ttra plus l’ndécence qu consste à essayer de montrer les choses comme elles sont. — Oseras-je Osera s-je dre que ce qu conond dans da ns l’a l ’avenventure dont vous êtes la vctme est l’étrange soldarté du mal, fit le chanone presque à vox basse. L’mpureté sous toutes ses ormes, des enantllages peut-être ntentonnellement sacrlèges, la volence contre un nouveau-né nnocent, et finalement cette
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volence contre so-même, la pre de toutes, qu’a Cancel Download And Print perpétrée ce Perre de Hamaere. Je conesse que d’abord toute cette nore aare m’avat paru démesurément grosse par les ennems de l’Eglse, snon nventée par eux. Mas un chréten et un mone qu se donne la mort est un mauvas chréten et un mauvas mone, et ce crme n’est sûrement pas son premer crme… Je ne me console pas de retrouver votre grand savor savor mêlé à tout cela. — La volence commse contre son enant par cette malheureuse ressemble ort à celle d’une bête se rongeant un membre pour s’arracher à la trappe où la cruauté des hommes l’a at chor, dt amèrement le phlosophe. Quant à Perre de Hamaere… Il s’nterrompt prudemment, se rendant compte que la seule chose qu’l eût trouvée à louer chez ce déunt état justement sa mort volontare. Dans sa desttuton totale de condamné, l lu restat encore une chance à conserver sogneusement et un secret à garder. — Vous n’êtes ’ê tes pas venu c pour reare devant mo le procès de quelques nortunés, dt-l. Employons meux ces préceux moments. — La gouvernante de Jean Myers Myer s vous fit auss grand tort, reprt trstement le chanone avec l’entêtement du grand âge. Nul n’honorat ce méchant, que je tenas d’alleurs pour ort oublé. Mas le soupçon de poson l’a rems dans toutes les bouches. J’a scrupule à préconser le mensonge mas meux eût valu ner tout commerce charnel avec cette domestque éhontée. — J’admre qu’une des plus dangereuses dangereuse s actons de ma ve aura été de coucher deux sors avec une servante, dt Zénon avec dérson. Bartholommé Campanus soupra : cet homme qu’l amat chèrement semblat barrcadé contre lu.
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— Vous ne Cancel saurez jamas quel pods votre Downloadde And Print naurage pèse sur ma conscence, hasarda-t-l, essayant d’une autre approche. Je ne parle pas de vos actes, dont je sas peu de chose, et que je veux crore nnocents, ben que le conessonnal m’ensegne que de pres peuvent s’aller à des vertus comme les vôtres. Je parle de cette atale révolte de l’esprt qu transormerat en vce la perecton elle-même, et dont j’a peut-être sans le voulor ms en vous les germes. Que le monde est changé, et que les scences et l’Antquté parassaent bénéfiques au temps où j’étudas les lettres et les arts… Quand je pense que je us le premer preme r à vous ensegner ensegne r cette Ecrture dont vous ates fi, je me demande s un maître plus erme ou plus nstrut que je n’étas… — Ne vous agez pas, optime pater, dt Zénon. La révolte qu vous nquète état en mo, ou peutêtre dans le sècle. — Vos dessns de bombes volantes e t de charots mus par le vent qu prêtaent à rre aux juges m’ont at songer à Smon le Magcen, dt le chanone levant sur lu des yeux nquets. Mas j’a pensé auss aux chmères mécanques de votre jeune âge, qu n’ont produt que trouble et tumulte. Hélas ! Ce ut ce jour-là que j’obtns pour vous de la Régente l’assurance d’une place qu vous eût ouvert une carrère d’honneurs… — Elle m’eût possblement amené au même pont par d’autres voes. Nous en savons mons sur les routes et le but d’une ve d’homme que sur ses mgratons l’oseau. Bartholommé Campanus perdu dans une rêvere revoyat le clerc de vngt ans. C’état lu dont l eût voulu sauver le corps, ou tout au mons l’âme. — N’attachez N’att achez pas plus de prx que mo à ces antases mécanques qu ne sont en elles-mêmes n
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astes n néastes, reprt dédagneusement Zénon. Il en Cancel Download And Print est d’elles comme des trouvalles du soueur qu le dstraent de la scence pure, mas qu paros actvent ou écondent celle-c. Non cogitat qui non experitur. Même dans l’art du médecn, auquel je me sus surtout applqué, l’nventon vulcanque et alchmque joue son rôle. Mas j’avoue que la race étant ce qu’elle restera sans doute jusqu’à la fin des sècles, l est mauvas de mettre des ols à même de renverser la machne des choses et des ureux de monter au cel. Quant à mo, et dans l’état où le Trbunal m’a ms, ajouta-t-l avec un rre sec qu fit horreur à Bartholommé Campanus, j’en sus venu à blâmer Prométhée d’avor donné le eu aux mortels. — J’a vécu octante ans sans me douter jusqu’où allat la malgnté des juges, dt avec ndgnaton le chanone. Héronymus Van Palmaert se réjout qu’on vous mande explorer vos mondes nfins, et Le Cocq, cet homme de boue, propose par moquere qu’on vous envoe combattre Maurce de Nassau sur un bombarder bombarder céleste. — Il a tort tor t de rre. Ces chmères chmère s se réalseront réalse ront le jour où l’espèce s’y acharnera comme à bâtr ses Louvres et ses églses cathédrales. Il descendra du cel, le Ro des Frayeurs, avec ses armées de sauterelles et ses jeux d’hécatombe… O bête cruelle ! Ren ne restera sur terre, sous terre ou dans l’eau qu ne sot persécuté, gâté ou détrut… Ouvre-to, goure éternel, et englouts pendant qu’l en est temps encore la race erénée… — Plaît-l ? dt le chanone alarmé. — Ren, fit dstratement dstrateme nt le phlosophe. Je me réctas une de mes Prophéties grotesques. Bartholommé Campanus soupra. L’angosse avat été trop orte pour ce cerveau pourtant solde. L’approche de la mort le asat délrer.
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— Vous avez Cancel ben perdu votreAndoPrint dans la sublme Download excellence de l’homme, dt-l en secouant trstement la tête. On commence par douter de Deu… — L’homme est es t une entreprse qu a contre elle le temps, la nécessté, la ortune, et l’mbécle et toujours crossante prmauté du nombre, dt plus posément le phlosophe. Les hommes tueront l’homme. Il tomba dans un long slence. Cet accablement sembla bon sgne au chanone qu ne cragnat ren plus que l’ntrépdté d’une âme trop sûre d’ellemême, curassée à la os contre le repentr et la peur. Il reprt précautonneusement : — Dos-je donc crore, comme vous l’avez l’avez dt à l’évêque, que le Grand Œuvre n’a pour vous d’autre but que de perectonner l’âme humane ? S’l en est ans, contnua-t-l d’un ton nvolontarement déçu, vous serez plus près de nous que Monsegneur et mo ne l’osons crore, et ces magques arcanes que je n’a jamas contemplés que de lon se rédusent à ce que la Sante Eglse ensegne journellement à ses fidèles. — Ou, dt Zénon. Depus seze cents ans. Le chanone hésta s cette réponse ne contenat pas la ponte d’un sarcasme. Mas les moments étaent préceux. Il passa outre. — Mon cher fils, dt-l, magnez-vous magne z-vous que je sus venu pour engager avec vous un débat qu n’est plus de sason ? J’a de melleures rasons d’être c. Monsegneur me at observer qu’l ne s’agt pas chez vous à proprement parler d’hérése, comme chez ces sectares détestables qu à notre époque ont la guerre à l’Eglse, mas d’mpétés savantes dont le danger n’est somme toute évdent qu’aux doctes. Le révérendssme évêque m’assure que vos Prothéories, justement condamnées pour ravaler ravaler nos sants dogmes au rang de vulgares notons dssémnées jusque chez les le s pres dolâtres, pourraent tout auss ben
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servr à une nouvelle Apologétique : l sufrat-que Cancel Download And Print les mêmes propostons montrassent dans nos vértés chrétennes le couronnement des ntutons nuses dans l’humane nature. Vous savez comme mo que tout n’est qu’aare de drecton… — Je cros comprendre où tend ce dscours, dt Zénon. S la cérémone de deman état remplacée par celle d’une rétractaton… — N’espére N’e spérezz pas trop, dt le chanone avec prudence. Ce n’est pas la lberté qu’on vous ore. Mas Monsegneur se at ort d’obtenr votre rétenton in loca carceris dans une mason relgeuse de son chox ; vos ases utures dépendront des gages que vous aurez su donner à la bonne cause. Vous savez que les prsons perpétuelles sont celles dont on s’arrange presque toujours pour sortr. — Vos secours vennent ben tard, optime pater, murmura le phlosophe. Il eût meux valu museler plus tôt mes accusateurs. — Nous ne nous flattons pas d’amadouer le procureur de Flandre, dt le chanone, ravalant l’amertume que lu causat sa vane démarche auprès des rches Lgre. Un homme de cette espèce condamne comme un chen se jette sur une proe. Force nous a été de lasser aller la procédure, qutte à user ensute des pouvors qu nous sont lassés. Les ordres mneurs que vous avez reçus jads vous désgnent aux censures de l’Eglse, mas vous garantssent auss des protectons que la grossère justce séculère n’ore pas. J’a, l est vra, tremblé jusqu’au bout que vous ne fissez par défi quelque aveu rréparable… — Force vous eût été ét é pourtant pour tant de m’admrer m’admre r, s je l’avas l’avas at par contrton. — Je vous sauras gré de ne pas conondre le trbunal de Bruges avec les assses de la péntence, dt le chanone avec mpatence. Ce qu compte c
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c’est que le déplorable rère Cypren et ses complces Cancel Download And Print se soent contredts, que nous nous soyons délvrés des names de la laveuse de vasselle en l’enermant chez les olles, et que les malvellants qu vous accusaent d’avor sogné l’assassn d’un captane espagnol se soent éclpsés… Les crmes qu ne concernent que Deu sont de notre ressort. — Placez-vous Place z-vous parm les orats ces sons donnés à un blessé ? — Mon avs est es t sans pertnence, per tnence, dt évasvement le chanone. Mon opnon, s vous la voulez, est que tout servce rendu au prochan dot être jugé mértore, mas qu’l s’y mêle dans votre cas une rébellon qu ne l’est jamas. Le déunt preur, qu pensat paros mal, n’aura sans doute que trop approuvé cette charté sédteuse. Félctons-nous du mons qu’on n’en n’en at pu produre la preuve. pr euve. — On l’eût at sans pene s vos bons sons ne m’eussent épargné la torture, dt le prsonner avec un haussement d’épaules. Je vous en a déjà remercé. — Nous nous sommes retranché re tranchéss derrèr der rèree l’adage Clericus regulariter torqueri non potest per laycum, fit le chanone de l’ar d’un homme qu enregstre un tromphe. Rappelez-vous pourtant que sur certans ponts, comme celu des mœurs, vous demeurez véhémentement soupçonné, et aurez à comparaître novis survenientibus inditiis. Il en va de même en matère de rébellon. Pensez ce qu’l vous plara des pouvors de ce monde, mas songez que les ntérêts de l’Eglse et ceux de l’ordre contnueront à ne are qu’un tant que les rebelles auront parte lée avec l’hérése. — J’entends tout cela, fit le condamné en nclnant la tête. Ma précare sûreté dépendrat entèrement du bon voulor de l’évêque dont le pouvor peut décroître ou le pont de vue changer. Ren ne prouve
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que dans sx mos je ne me retrouve pas exactement Cancel Download And Print auss près des flammes que je sus. — N’est-ce N’e st-ce pas là une crante que vous avez dû avor avor toute la ve ? dt le chanone. — A l’époque l’ époque où vous m’ensegnez les rudments des lettres et des scences, un qudam convancu d’un crme vra ou aux a été brûlé à Bruges, et un de nos valets m’a raconté son supplce, dt le prsonner en guse de réponse. Pour augmenter l’ntérêt du spectacle, on l’avat lé au poteau par une longue chaîne, ce qu lu permt de courr tout embrasé jusqu’à ce qu’l tombât la ace contre terre, ou, pour parler net, dans les brases. Je me sus souvent dt que cette horreur pourrat servr d’allégore à l’état d’un homme qu’on lasse presque lbre. — Croyez-vous Croye z-vous que nous n’en soyons so yons pas tous là ? dt le chanone. Mon exstence a été pasble, et j’ose dre, nnocente, mas on n’a pas vécu quatre-vngts ans sans savor ce que c’est que la contrante. — Pasble, ou, dt le phlosophe. phlosophe. Innocente, non. L’entreten des deux hommes reprenat sans cesse malgré eux le ton quas hargneux de leurs ancens débats de maître et d’élève. Le chanone décdé à tout supporter pra ntéreurement que lu ussent donnés les mots qu convanquent. — Iterum peccavi, dt enfin Zénon d’une vox plus égale. Mas ne vous étonnez pas, mon père, que vos bontés pussent paraître un pège. Mes quelques rencontres avec le révérendssme évêque ne m’ont pas montré un homme plen de pté. L’évêque ne vous ame pas plus que Le Cocq — L’évêque ne vous hat, dt le chanone étouant des larmes. Mo seul… Mas outre que vous êtes un pon dans la parte qu se joue entre eux, contnua-t-l d’un ton plus rasss, Monsegneur n’est pas dépourvu d’humane vanté, et s’honore de ramener à Deu un mpe capable de persuader ses parels. La cérémone de
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deman sera pourCancel l’EglseDownload une vctore plus sensble And Print que votre votre mort mor t ne l’eût été. — L’évêque dot se rendre compte que les vértés vérté s chrétennes auraent en mo un apologste ort comproms. — C’est C’es t ce qu vous trompe, repartt repar tt le vellard. Les rasons qu’un homme a de se rétracter s’oublent vte, et ses écrts restent. Déjà, certans de vos ams représentent dans votre suspect séjour à Sant-Cosme l’humble péntence d’un chréten qu se repent d’avor mal vécu et change de nom pour s’adonner obscurément aux bonnes œuvres. Deu me pardonne, ajouta-t-l avec un able sourre, s je n’a pas cté mo-même l’exemple de sant Alexs revenu vvre dégusé en pauvre dans le palas où l état né. — Sant Alexs rsquat à chaque nstant d’être d’êtr e reconnu par sa peuse épouse, plasanta le phlosophe. Ma orce d’âme n’aurat pas été jusque-là. Bartholommé Campanus ronça le sourcl, choqué de nouveau par cette désnvolture. Zénon lut sur ce veux vsage une pene qu lu fit pté. Il reprt doucement : — Ma mort mor t semblat sûre, e t je n’avas ’avas plus qu’à couler quelques heures in summa serenitate... A m’en supposer capable, poursuvt-l avec un hochement amcal qu sembla ou au chanone, mas qu s’adressat à un promeneur lsant Pétrone dans une rue d’Innsbruck. Mas vous me tentez, mon père : je me vos explquant en toute sncérté à mes lecteurs que le rustre qu rcanat d’avor dans son champ de blé des nfintés de Jésus-Chrst est un bon sujet de acétes, mas que le drôle serat à coup sûr mauvas alchmste, ou encore que les rtes et les sacrements de l’Eglse ont autant et paros plus de vertus que mes spécfiques de médecn. Je ne vous ds pas que je cros, fit-l prévenant un mouvement de joe du chanone, je ds que le smple
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paraître une réponse, ce qu ne non a cessé de me Cancel Download And Print sgnfie pas que je sos prêt à prononcer un smple oui. Enermer l’naccessble prncpe des choses à l’ntéreur d’une Personne tallée sur l’human modèle me paraît encore un blasphème, et cependant je sens malgré mo je ne sas quel deu présent dans cette char qu deman sera umée. Oseras-je dre que c’est ce deu qu m’oblge à vous dre non ? Et pourtant, toute vue de l’esprt s’étae sur des ondements arbtrares : pourquo pas ceux-là ? Toute doctrne qu s’mpose aux oules donne des gages à l’nepte humane : l en rat de même s par hasard Socrate prenat deman la place de Mahomet ou du Chrst. Mas s’l en est ans, dt-l, passant la man sur son ront avec une soudane atgue, pourquo renoncer au salut corporel et aux délces du commun accord ? Il me semble que volà quelques sècles que j’a déjà consdéré et reconsdéré tout cela… — Lassez-mo Lassez -mo vous guder, fit presque tendrement le chanone. Deu seul sera juge du degré d’hypocrse que contendra deman votre rétractaton. Vous ne l’êtes pas vous-même : ce que vous prenez pour un mensonge est peut-être une authentque proesson de o qu se ormule à votre nsu. La vérté a des secrets pour s’nsnuer dans une âme qu ne se barrcade plus contre elle. — Dtes-en Dte s-en autant de l’mposture, fit le phlosophe avec calme. Non, mon excellent père, j’a paros ment pour vvre, mas je commence à perdre mon apttude au mensonge. Entre vous et nous, entre les dées de Héronymus Van Palmaert, celles de l’évêque et les vôtres, d’une part, et les mennes de l’autre, l y a çà et là smltude, souvent comproms, et jamas constant rapport. Il en est es t d’elles comme de courbes tracées à partr d’un plan commun, qu est l’human ntellect, dvergeant ausstôt pour se
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rapprocher ensute, pus s’élognant de nouveau les Cancel Download And Print unes des autres, s’ntersectant paros dans leurs tra jectores jectore s ou se conondant au contrare sur un segse gment de celles-c, mas dont nul ne sat s elles se rejognent ou non en un pont qu est au-delà de notre horzon. horzon. Il y a ausseté à les le s déclarer parallèles. — Vous dtes nous, murmura le chanone avec une sorte d’ero. Vous êtes pourtant seul. — En eet, ee t, dt le phlosophe. phloso phe. Je n’a n’a heureusement heur eusement pas de lstes de noms à ournr à qu que ce sot. Chacun de nous est son seul maître et son seul adepte. L’expérence se reat chaque os à partr de ren. — Le déunt preur des Cordelers, Cordeler s, qu, ben que trop acle, état un bon chréten et e t un relgeux exemexemplare, n’a pas pu savor dans quel abîme de révolte vous chosssez de vvre, dt presque acrmoneusement le chanone. Vous lu aurez sans doute beaucoup et souvent ment. — Vous vous trompez, trompez , fit le prsonner, jetant je tant un regard presque hostle à cet homme qu avat voulu le sauver. Nous nous retrouvons au-delà des contradctons. Il se leva comme s c’état à lu de donner congé. Le chagrn du vellard devnt de la colère. — Votre opnâtreté opnâtre té est es t une o mpe dont vous vous croyez le martyr, dt-l avec ndgnaton. Vous semblez voulor oblger l’évêque à se laver les mans… — Le mot est es t malheureux, remarqua le phlosophe. Le vel homme se pencha pour ramasser les deux cannes qu lu servaent de béqulles, traînant avec brut son auteul. Zénon s’nclna et les lu tendt. Le chanone se mt debout avec eort. Le geôler Hermann Mohr qu se tenat aux aguets dans le coulor, alerté par ce brut de pas et de sèges remués, tournat déjà déjà la cle dans la serrure, croyant croyant l’entreten termné, te rmné, mas Bartholommé Campanus Campanus éleva
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la vox et lu cra d’attendre un moment. La porte Cancel Download And Print entrebâllée entrebâllée se reerma. ree rma. — J’a mal rempl ma msson, dt le veux prêtre prêtr e avec une soudane humlté. Votre constance me at horreur, parce qu’elle équvaut à une nsensblté totale à l’égard de votre âme. Que vous le sachez ou non, la ausse honte seule vous at préérer la mort à la remontrance publque qu précède la rétractaton… — Avec cerge cer ge allumé, e t réponse en latn au dscours latn de Monsegneur, fit sarcastquement le prsonner. C’eût été, je l’admets, un mauvas quart d’heure à passer passe r… — La mort mor t auss, dt le vellard navré. navré. — Je vous avoue qu’à un cer ce r tan degré de gré de ole, ou de sagesse au contrare, l semble peu mportant que ce sot mo ou le premer venu qu’on brûle, dt le prsonner, n que cette exécuton at leu deman ou dans deux sècles. Je ne me flatte pas que des sentments s nobles tennent devant l’apparel du supplce : nous verrons sous peu s j’a vrament en mo cette anima stans et non cadens que définssent nos phlosophes. Mas peut-être attache-t-on trop de prx au degré de ermeté dont at preuve un homme qu meurt. — Ma présence ne at que vous endurcr, dt douloureusement le veux chanone. Je tens pourtant avant de vous qutter à vous sgnaler un avantage légal que nous vous avons sogneusement lassé et dont vous ne vous êtes peut-être pas aperçu. Nous n’gnorons pas que vous vous êtes naguère enu d’Innsbruck après avor été secrètement prévenu d’un mandat d’arrêt lancé par l’ofcalté du leu. Nous gardons le slence sur ce at qu vous placerat, s’l état connu, dans la poston désastreuse de ugitivus ugiti vus,, et rendrat ardue, snon mpossble, votre réconclaton avec l’Eglse. Vous n’aurez
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donc pas à crandre de are nutlement certanes Cancel Download And Print soumssons… Vous avez encore pour réfléchr toute une nut devant de vant vous… — Volà qu me prouve que j’aura é té toute ma ve épé de plus près encore que je n’avas cru, dt mélancolquement le phlosophe. Ils s’étaent peu à peu drgés vers la porte que le geôler avat rouverte. Le chanone rapprocha son vsage de celu du condamné. — En ce qu concerne conce rne la douleur corporelle, dt-l, je pus vous promettre prome ttre qu’en tout cas vous n’avez ’avez ren à crandre. Monsegneur et mo avons prs toutes les dspostons… — Je vous en rends grâces, grâce s, fit Zénon, se rappelant non sans amertume avor en van at de même pour Floran et l’un des novces. Une lourde atgue avat prs possesson du vel homme. L’dée de are ur le prsonner lu traversa l’esprt ; elle état absurde ; l n’y allat pas penser. Il eût voulu donner à Zénon sa bénédcton, mas cragnat qu’elle ne ût mal reçue, et pour la même rason n’osat l’embrasser. Zénon de son côté fit un mouvement pour baser la man de son ancen maître, mas se retnt, redoutant que ce geste eût quelque chose de servle. Ce que le vellard avat tenté pour lu ne parvenat pas à le lu are amer. Pour se rendre au gree, le chanone par ce mauvas temps avat at usage d’une ltère ; les porteurs transs attendaent dehors. Hermann Mohr tnt à ce que Zénon remontât dans sa cellule avant qu’on ne recondusît le vsteur sur le seul. Bartholommé Campanus vt son ancen élève gravr l’escaler en compagne du geôler. Le concerge du gree, ouvrant et ermant l’une après l’autre une sére de portes, ada ensute l’homme d’Eglse à monter en ltère et tra sur lu le rdeau de cur. Bartholommé
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Campanus, la tête appuyée à un coussn, réctat Cancel Download And Print ardemment les prères des agonsants, mas cette ardeur n’état que machnale ; les mots roulaent sur ses lèvres sans que sa pensée pût les suvre. La route du chanone passat par la Grand-Place. L’exécuton y aurat leu le lendeman, s la nut entre-temps ne portat pas consel au prsonner, et Bartholommé Campanus en doutat, connassant ce lucéren orguel. Il se souvnt que, le mos précédent, les prétendus Anges avaent été supplcés hors de la vlle, aux abords de la Porte Sante-Crox, les crmes charnels étant consdérés comme s abomnables que leur punton même devat être tenue quas clandestne, mas la mort d’un homme convancu d’mpété et d’athésme état au contrare un spectacle en tout pont édfiant pour le peuple. Pour la premère os de sa ve, ces arrangements dus à la sagesse des ancêtres parurent parurent contestab contes tables les au vellard. C’état la velle du Mard gras ; des gens en joe parcouraent déjà les rues, asant et dsant les mpertnences habtuelles. Le chanone n’gnorat pas que l’annonce d’un supplce ajoutat en parel cas à l’exctaton de la canalle. Par deux os, des bambocheurs arrêtèrent la ltère et ouvrrent le rdeau pour regarder à l’ntéreur, déçus sans doute de n’y pas trouver quelque belle dame à earoucher. L’un de ces sots avat un masque en trogne d’vrogne et régala Bartholommé Bar tholommé Campanus Campanus de crs ncongrus ; le second passa sans ren dre entre les courtnes une ace lvde de antôme. Derrère lu, un carêmeprenant à tête de cochon y allat d’un pett ar de flûte. Arrvé sur le pas de sa porte, le vellard ut reçu avec empressement par sa nèce adoptve, Wwne, qu’l avat prse pour gouvernante à la mort du curé Cleenwerck, et qu l’attendat comme toujours dans
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le pett passage Cancel voûté de leur mason ben tède, Download And Print épant à un judas s l’oncle vendrat bentôt pour souper. Elle état devenue grasse et sotte comme autreos sa tante Godelève, ayant d’alleurs eu sa part des espors et des désappontements de ce monde : on l’avat fiancée sur le tard à un sen cousn nommé Ncolas Cleenwerck, pett segneur des envrons de Caestre qu avat de bons bens au solel et le ort bon poste de leutenant général au ballage de Flandre ; par malheur, ce proms s avantageux s’état noyé peu avant la noce en traversant l’étang de Dckebusch à l’énoque de la onte des glaces. La tête de Wwne ne s’état pas remse de ce coup, mas elle demeurat sogneuse ménagère et cusnère hable comme autreos sa tante ; personne ne l’égalat pour les vns cuts et les confitures. Le chanone avat tenté sans succès ces jours-là de la are prer pour Zénon, dont elle ne se souvenat plus, mas l l’avat persuadée de temps à autre d’apprêter un paner pour un pauvre prsonner. Il reusa le souper de bœu rôt qu’elle lu avat préparé et monta ausstôt se mettre au lt. Il tremblat de rod ; elle s’aara avec une bassnore plene de bonnes cendres chaudes. Il mt longtemps à s’endormr sous sa couette brodée.
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LA FIN DE ZENON ZE NON
Q UAND la porte de sa cellule se ut reermée sur lu à grand brut brut de erralle, Zénon pens pens tra l’escabeau et s’asst devant la table. Il asat encore grand jour, jour, l’obscure prson des allégores allé gores alchmques étant dans son cas une prson ort clare. A travers le réseau serré du grllage qu protégeat la crosée, une blancheur plombée montat de la cour couverte de nege. Glles Rombaut avant de céder la place au garden de nut avat comme toujours lassé sur un plateau le souper du prsonner ; l état ce sor-là encore plus copeux que d’habtude. Zénon le repoussa : l semblat absurde et quas obscène de transormer ces alments en chyle et en sang qu’l n’utlserat plus. Mas l se versa dstratement quelques gorgées de bère dans un gobelet d’étan et but la lqueur amère. Son entreten avec le chanone avat ms fin à ce qu avat été pour lu depus le verdct du matn la solennté de la mort. Son sort cru fixé oscllat de nouveau. L’ore qu’l avat rejetée restat valable quelques heures de plus : un Zénon capable de finr par dre ou se terrat peut-être dans un con de sa conscence, et la nut qu allat s’écouler pouvat donner à ce pleutre l’avantage sur so-
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La in de Zénon
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même. Il sufsat qu’une chance sur mlle subssCancel Download And Print tât : l’avenr s court et pour lu s atal en acquérat malgré tout un élément d’ncerttude qu état la ve même, et, par une étrange dspensaton qu’l avat constatée auss au chevet de ses malades, la mort gardat ans une sorte de trompeuse rréalté. Tout fluctuat : tout fluctuerat jusqu’au derner soue. Et cependant, sa décson état prse : l le reconnassat mons aux sgnes sublmes du courage et du sacrfice qu’à on ne sat quelle obtuse orme dé reus qu semblat le ermer comme un bloc aux nfluences du dehors, et presque à la sensaton elle-même. Installé dans sa propre fin, l état déjà Zénon in aeternum. D’autre part, et placée pour ans dre en repl derrère la résoluton de mourr, l en état une autre, plus secrète, et qu’l avat sogneusement cachée au chanone, celle de mourr de sa propre man. Mas là auss une mmense et harassante lberté lu restat encore : l pouvat à son gré s’en tenr à cette décson ou y renoncer, are le geste qu termne tout ou au contrare accepter cette mors ignea guère dérente de l’agone d’un alchmste enflammant par mégarde sa longue robe aux brases de son athanor. Ce chox entre l’exécuton et la fin volontare, suspendu jusqu’au bout dans une fibrlle de sa substance pensante, n’oscllat plus entre la mort et une espèce de ve, comme celu d’accepter ou de reuser de se rétracter l’avat at, mas concernat le moyen, le leu, et l’exact moment. A lu de décder s’l finrat sur la Grand-Place parm les huées ou tranqullement entre ces murs grs. A lu, ensute, de retarder ou de hâter de quelques heures l’acton suprême, de chosr, s’l le voulat, de vor se lever le solel d’un certan dx-hut évrer 1569, ou de finr aujourd’hu avant la nut close. Les coudes sur les genoux, mmoble, presque pasble, l regardat
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LA PRISON
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devant lu dans le vde. Comme au mleu d’un Cancel Download And Print ouragan, quand s’établt redoutablement un calme, le temps n l’esprt ne bougeaent plus. La cloche de Notre-Dame sonna : l compta les coups. Brusquement, une révoluton se fit : le calme cessa, emporté par l’angosse comme par un vent tournant en cercle. Des brbes d’mages se tordaent dans cette tempête, arrachées à l’autodaé d’Astorga trente-sept ans plus tôt, aux récents détals du supplce de Floran, aux rencontres ortutes avec les hdeux résdus de la justce exécutve sur les carreours de vlles traversées. On eût dt que la nouvelle de ce qu allat être attegnat subtement en lu l’entendement du corps, ournssant chaque sens de leur quote-part d’horreur : l vt, sentt, flara, entendt ce que seraent deman sur la place du Marché les ncdents de sa fin. L’âme charnelle, prudemment tenue à l’écart des délbératons de l’âme rasonnable, apprenat tout à coup et du dedans ce que Zénon lu avat caché. Quelque chose en lu cassa comme une corde ; sa salve sécha ; les pols des pognets et du dos de la man se dressèrent ; l claquat des dents. Ce désordre jamas expérmenté sur lu-même l’épouvanta plus que tout le reste de sa mésaventure : pressant des deux mans ses mâchores, resprant longuement pour rener son cœur, l réusst à réprmer cette espèce d’émeute du corps. C’en état trop : l s’agssat d’en finr avant qu’une débâcle de sa char ou de sa volonté l’eût rendu ncapable de reméder à ses propres maux. Des rsques non prévus jusque-là et qu menaçaent d’empêcher sa sorte ratonnelle se présentèrent en oule à son esprt redevenu lucde. Il jeta sur sa stuaton le coup d’œl du chrurgen qu cherche autour de so ses nstruments et suppute ses chances.
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Il état quatreCancel heures Download ; son And repas état serv, et Print on avat poussé l’oblgeance jusqu’à lu lasser l’ordnare l’ordnare chandelle. chandelle. Le porte-cl por te-cle e qu l’avat l’avat verroullé à son retour de la salle du gree ne reparaîtrat qu’après le couvre-eu, pour ne repasser ensute qu’à l’aube. Il semblat donc qu’l eût le chox de deux longs ntervalles durant lesquels accomplr sa tâche. Mas cette nut dérat des autres : un mportun message pouvat venr de l’évêque ou du chanone, nécesstant qu’on rouvrît la porte ; une éroce pté nstallat paros au côté du condamné un rocard quelconque ou un membre d’une Conrére de la Bonne Mort chargé de sanctfier le mourant en le persuadant de prer. Il se pouvat auss qu’on prévînt son ntenton ; on allat peut-être d’un moment à l’autre lu ler les mans. Il guetta autour de lu des grncements, des pas ; tout état calme, mas les moments étaent plus chers qu’ls ne l’avaent jamas été au cours des départs dé parts orcés d’autreos d’autreos.. D’une man tremblante encore, l souleva le couvercle de l’écrtore posée sur la table. Entre deux fines planchettes qu à l’œl semblaent jontes, le trésor qu’l avat caché là s’y trouvat toujours : une lame souple et mnce, longue de mons de deux pouces, qu’l avat portée d’abord dans la doublure de son pourpont, pus transérée dans cette cachette après que l’écrtore qu’on lu avat rendue eut été dûment vstée par ses juges. Chaque jour, à vngt reprses, l s’état assuré de la présence de cet objet qu’l n’eût pas jads dagné ramasser dans le russeau. Dès son appréhenson dans l’ofcne de SantCosme, pus par deux os, après la mort de Perre de Hamaere, et lorsque Catherne avat ramené sur le taps la queston des posons, on l’avat oullé à la recherche de fioles ou de dragées suspectes, et l se élctat d’avor par prudence renoncé à s’encombrer de ces denrées nestmables, mas détérorables rorables ou ragles, presque mpossbles mpossbles à conserver
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sur so ou à dssmuler longtemps dans une cellule Cancel Download And Print nue, et qu eussent mmanquablement dénoncé son projet de mourr. Il y perdat le prvlège d’une de ces fins oudroyantes qu sont les seules msércordeuses, mas ce bout de rasor sogneusement eflé lu évterat au mons d’avor à déchrer son lnge pour ormer des nœuds paros nefcaces ou de s’évertuer peut-être sans profit avec un tesson de potere brsée. Le passage de la peur avat bouleversé ses entralles. Il alla au baquet placé dans un con de la chambre et se vda. L’odeur des matères cutes et rejetées par la dgeston humane emplt un nstant ses narnes, lu rappelant une os de plus les connexons ntmes entre la pourrture et la ve. Ses agullettes urent rajustées d’une man sûre. Le broc sur la planchette état plen d’eau glacée ; l s’humecta le vsage, retenant sur sa langue une gouttelette. Aqua permanens : pour lu, ce serat l’eau pour la dernère os. Quatre pas le ramenèrent au lt sur lequel l avat dorm ou vellé soxante nuts : parm les pensées qu traversaent vertgneusement son esprt état celle que la sprale des voyages l’avat ramené à Bruges, que Bruges s’état restrente à l’are d’une prson, et que la courbe s’achevat enfin sur cet étrot rectangle. Un murmure sortt derrère lu des runes d’un passé plus dédagné et plus abol que les autres, la vox rauque et douce de Fray Juan parlant latn avec un accent castllan dans un cloître envah par l’ombre : Eamus ad dormiendum, cor meum. Mas l ne s’agssat pas de dormr. Jamas l ne s’état sent de corps et d’âme plus alerte : l’économe et la rapdté de ses gestes étaent celles de ses grands moments de chrurgen. Il dépla la grossère couverture de lane, épasse comme du eutre, et en orma à terre, le long du lt, une sorte d’auge qu retendrat et mbberat au mons en
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parte par te le lqude ver vCancel ersé. sé. Pour plus de sûre sû reté, té, l ramassa Download And Print sa chemse de la velle et la tordt en guse de bourrelet devant la porte. Il allat évter qu’une coulée sur le sol légèrement en pente n’attegnît trop vte le corrdor, et qu’Hermann Mohr levant par hasard la tête de dessus son établ ne remarquât sur le carreau une tache nore. Sans brut, l enleva ensute ses chaussures. Tant de précauton n’état pas nécessare, mas le slence semblat une sauvegarde. Il s’étendt sur le lt, calant sa tête sur le dur oreller. Il eut un retour vers le chanone Campanus que cette fin remplrat d’horreur, et qu pourtant avat été le premer à lu are lre les Ancens dont les héros pérssaent de la sorte, mas cette rone crépta à la surace de son esprt sans le dstrare de son seul but. Rapdement, avec cette dextérté de chrurgen-barber dont l s’état toujours at glore parm les qualtés plus prsées et plus ncertanes du médecn, l se pla en deux, relevant légèrement les genoux, et coupa la vene tbale sur la ace externe du ped gauche, à l’un des endrots habtuels de la sagnée. Pus, très vte, redressé, et reprenant appu sur l’oreller, se hâtant pour prévenr la syncope toujours possble, l chercha et tallada à son pognet l’artère radale. La brève et superficelle douleur causée par la peau tranchée ut à pene perçue. Les ontanes jallrent ; le lqude s’élança comme l le at toujours, anxeux, eût-on dt, d’échapper aux labyrnthes obscurs où l crcule enermé. Zénon lassa pendre le bras gauche pour avorser la coulée. La vctore n’état pas encore complète ; l pouvat se are qu’on entrât par hasard, et qu’on le traînât deman sanglant et bandagé au bûcher. Mas chaque mnute qu passat état un tromphe. Il jeta un coup d’œl sur la couverture déjà nore de sang. Il comprenat mantenant qu’une noton grossère grossère ît de ce lqude lqude l’âme elle-même, elle-même,
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pusque l’âme et le sang s’échappaent ensemble. Ces Cancel Download And Print antques erreurs contenaent une vérté smple. Il songea, avec l’équvalent d’un sourre, que l’occason état belle pour compléter ses velles expérences sur la systole et la dastole du cœur. Mas les connassances acquses ne comptaent désormas pas plus que le souvenr des événements ou des créatures rencontrées ; l se rattachat pour quelques moments encore au mnce fil de la personne, mas la personne délestée ne se dstnguat plus de l’être. Il se redressa avec eort, non parce qu’l lu mportat de le are, mas pour se prouver que ce mouvement état encore possble. Il lu état souvent arrvé de rouvrr une porte, smplement pour attester qu’l ne l’avat pas derrère lu ermée à jamas, de se retourner vers un passant qutté pour ner la finalté d’un départ, se démontrant ans à so-même sa courte lberté d’homme. d’homme. Cette os, l’rréversble état accompl. accompl. Son cœur battat à grands coups ; une actvté volente et désordonnée régnat dans son corps comme dans un pays en déroute, mas où tous les combattants n’ont pas encore ms bas les armes ; une sorte d’attendrssement le prenat pour ce corps qu l’avat ben serv, qu aurat pu vvre, à tout prendre, une vngtane d’années de plus, et qu’l détrusat ans sans pouvor lu explquer qu’l lu épargnat de la sorte de pres et plus ndgnes maux. Il avat so, mas aucun moyen d’étancher cette so. De même que les quelque tros quarts d’heure qu s’étaent écoulés depus son retour dans cette chambre avaent été bondés d’une nfinté presque nanalysable de pensées, de sensatons, de gestes se succédant à une vtesse d’éclar, l’espace de quelques coudées qu séparat le lt de la table s’état dlaté à l’égal de celu qu s’approportonne entre les sphères : le gobelet d’étan flottat comme au ond d’un autre monde. Mas cette so cesserat bentôt.
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Il avat la mort d’un de ces blessés réclamant à Cancel Download And Print bore à l’orée d’un champ de batalle, et qu’l englobat avec so dans la même rode pté. Le sang de la vene tbale ne coulat plus que par saccades ; pénblement, comme on soulève un pods énorme, l parvnt à déplacer son ped pour le lasser pendre hors du lt. Sa man drote contnuant à serrer la lame s’état légèrement coupée à son tranchant, mas l ne sentat pas la coupure. Ses dogts s’agtaent sur sa potrne, cherchant vaguement à déboutonner le col de son pourpont ; l s’eorça en van de réprmer cette agtaton nutle, mas ces crspatons et cette angosse étaent bon sgne. Une rsson glacal le traversa comme au début d’une nausée : c’état ben ans. A travers les bruts de cloches, de tonnerre et de crards oseaux regagnant leurs nds qu rappaent du dedans ses orelles, l entendt au-dehors le son précs d’un égouttement : la couverture saturée ne retenat plus le sang qu s’écoulat sur le carreau. Il essaya de calculer le temps qu’l audrat pour que la flaque rouge s’allongeât de l’autre côté du seul, par-delà la rêle barrère de lnge. Mas peu mportat : l état sauvé. Même s par malchance Hermann Mohr ouvrat bentôt cette porte aux verrous lents à trer, l’étonnement, la peur, la course le long des escalers à la recherche de secours lasseraent à l’évason le temps de s’accomplr. plr. On ne brûlerat brûle rat deman qu’un cada c adavre. vre. L’mmense rumeur de la ve en ute contnuat : une ontane à Eyoub, le russellement d’une source sortant de terre à Vaucluse en Provence, un torrent entre Ostersund et Frösö se pensèrent en lu sans qu’l eût beson de se rappeler leurs noms. Pus, parm tout ce brut, l perçut un râle. Il resprat par grandes et bruyantes aspratons superficelles qu n’emplssaent plus sa potrne ; quelqu’un qu n’état plus tout à at lu, mas semblat placé un peu en
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retrat sur sa gauche, consdérat avec ndérence Cancel Download And Print ces convulsons d’agone. Ans respre un coureur épusé qu attent au but. La nut état tombée, sans qu’l pût savor s c’état en lu ou dans la chambre : tout état nut. La nut auss bougeat : les ténèbres s’écartaent pour are place à d’autres, abîme sur abîme, épasseur sombre sur épasseur sombre. Mas ce nor dérent de celu qu’on vot par les yeux rémssat de couleurs ssues pour ans dre de ce qu état leur absence : le nor tournat au vert lvde, pus au blanc pur ; le blanc pâle se transmutat en or rouge sans que cessât pourtant l’orgnelle norceur, tout comme les eux des astres et l’aurore boréale tressallent dans ce qu est quand même la nut nore. Un nstant qu lu sembla éternel, un globe écarlate palpta en lu ou en dehors de lu, sagna sur la mer. Comme le solel d’été dans les régons polares, la sphère éclatante parut héster, prête à descendre d’un degré vers le nadr, pus, d’un sursaut mperceptble, remonta vers le zénth, se résorba enfin dans un jour aveuglant qu état en même temps la nut. Il ne voyat plus, mas les bruts extéreurs l’attegnaent encore. Comme naguère à Sant-Cosme, des pas précptés résonnèrent le long du coulor : c’état le porte-cle qu venat de remarquer sur le sol une flaque norâtre. Un moment plus tôt, une terreur eût sas l’agonsant à l’dée d’être reprs et orcé à vvre et à mourr quelques heures de plus. Mas toute angosse avat cessé : l état lbre ; cet homme qu venat à lu ne pouvat être qu’un am. Il fit ou crut are un eort pour se lever, sans ben savor s’l état secouru ou s au contrare l portat secours. Le grncement des cles tournées et des verrous repoussés ne ut plus pour lu qu’un brut suragu de porte qu s’ouvre. Et c’est auss lon qu’on peut aller dans la fin de Zénon.
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NOTE DE L’AUTEUR
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LE roman qu’on vent de lre a pour pont de départ un réct d’une cnquantane de pages, D’après Dürer, publé avec deux autres nouvelles, également à arrère-plan hstorque, dans le volume nttulé La Mort conduit l’Attelage, chez Grasset, en 1934. Ces tros récts, unfiés et en même temps contrastés entre eux par des ttres trouvés après coup (D’après Dürer, D’après Greco, D’après Rembrandt), n’étaent d’alleurs que tros ragments solés d’un énorme roman conçu et en parte fiévreusement composé entre 1921 et 1925, entre ma dx-hutème et ma vngt-deuxème année. De ce qu eût été une ample resque romanesque s’étalant sur pluseurs sècles et sur pluseurs groupes humans relés entre eux sot par les lens du sang, sot par ceux de l’esprt, les quelque quarante pages d’abord smplement nttulées Zénon ormaent le premer chaptre. Ce roman trop ambteux ut pour quelque temps mené de par avec les premères ébauches d’un autre ouvrage, celu qu allat devenr plus tard les Mémoires d’Hadrien.
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Je Je renonça provsorement à tousAnddeux ver s 1926, e t Cancel Download Print vers les tros ragments déjà ctés, devenus à eux seuls La Mort conduit l’Attelage, parurent à peu près nchangés en 1934, augmentés seulement, en ce qu concerne l’épsode de Zénon, d’une dzane de pages beaucoup plus récentes, brève esqusse de la rencontre d’Henr-Maxmlen et de Zénon à Innsbruck dans L’Œuvre au Noir d’aujourd’hu. La Mort conduit l’Attelage ut à l’époque très ben reçue par la crtque ; certans de ces artcles, relus, m’emplssent encore de grattude. Mas l’auteur d’un lvre a ses rasons d’être plus sévère que ses juges : l vot de plus près les alles ; l est seul à savor ce qu’l aurat voulu et dû are. En 1955, quelques années après l’achèvement des Mémoires d’Hadrien, je reprs ces tros récts avec l’ntenton de les retoucher en vue d’une rémpresson. De nouveau, le personnage du médecn phlosophe et alchmste s’mposa à mo. Le chaptre La conversation à Innsbruck, qu date de 1956, ut le premer résultat de cette rentrée en contact ; le reste de l’ouvrage ne ut finalement rédgé qu’en 1962 et 1965. Une douzane de pages tout au plus sur les cnquante d’autreos subsstent modfiées et comme émettées dans le long roman d’aujourd’hu, mas l’aabulaton qu mène Zénon de sa nassance llégtme à Bruges à sa mort dans une geôle de cette même vlle est dans ses grandes lgnes demeurée telle quelle. La premère parte de L’Œuvre au Noir (La vie errante ) sut d’assez près le plan du Zénon-D’après Dürer de 1921-1934 ; la seconde et la trosème parte ( La vie immobile e t La prison) sont tout entères dédutes des sx dernères pages de ce texte d’l y a plus de quarante ans . . Le ttre de 1934 avat le tort, comme d’alleurs ceux des deux autres nouvelles du recuel, de présenter ces récts comme mtant
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Je Je n’gnore pasCancel que desDownload ndcatons comme celles-c celle s-c And Print peuvent déplare quand elles provennent de l’auteur lu-même et sont oertes de son vvant. Je me décde cependant à les donner pour les quelques lecteurs qu’ntéresse la genèse d’un lvre. Ce que je tens surtout à soulgner c, c’est que L’Œuvre au Noir aura été, tout comme les Mémoires d’Hadrien, un de ces ouvrages entreprs dans la premère jeunesse, abandonnés et reprs au gré des crconstances, mas avec lesquels l’auteur aura vécu toute sa ve. La seule dérence, tout accdentelle, aura été qu’une ébauche de ce qu devat être L’Œuvre au Noir a paru trente et un ans avant l’achèvement du texte défint, tands que les premères versons des Mémoires d’Hadrien n’ont pas eu cette chance ou cette malchance. Pour le reste, et de la même açon, les deux romans se sont construts au cours des années par travaux de terrassement successs, jusqu’à ce qu’enfin, dans les deux cas, l’ouvrage at été composé et parachevé d’un seul élan. J’a exprmé alleurs ce que je pense des avantages, du mons en ce qu me concerne, de ces longs rapports d’un auteur avec un personnage chos ou magné dès l’adolescence, mas qu ne nous révèle tous ses secrets qu’à partr de notre propre maturté. La méthode est en tout cas assez rarement suve pour justfier justfie r l’nserton l’nser ton des quelques quelque s détals déta ls qu précèsystématquement l’œuvre de tros pentres, ce qu n’état pas le cas. D’après Dürer avat été chos à cause de l’llustre Melancholia, dans laquelle un sombre personnage qu est sans doute le géne human médte amèrement parm ses outls, mas un lecteur d’esprt lttéral me fit remarquer que l’hstore de Zénon état plus flamande qu’allemande. La remarque est plus vrae aujourd’hu qu’autreos, pusque la seconde et la trosème parte, alors nexstantes, se passent tout entères en Flandre, et que les thèmes boschens et breughélens du désordre et de l’horreur du monde envahssent l’ouvrage, ce qu’ls ne asaent pas dans l’ancenne esqusse.
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dent, ne ût-ce que l’ntenton d’évter certanes Canceldans Download And Print conusons bblographques. * Encore ben plus que la lbre recréaton d’un personnage réel ayant lassé sa trace dans l’hstore, comme l’empereur Hadren, l’nventon d’un personnage « hstorque » fict, comme Zénon, semble pouvor se passer de pèces à l’appu. En at, les deux démarches sont sur ben des ponts comparables. Dans le premer cas, le romancer, pour essayer de représenter dans toute son ampleur le personnage tel qu’l a été, n’étudera jamas avec assez de mnute passonnée le dosser de son héros, tel que la tradton hstorque l’a consttué ; dans le second cas, pour pour donner donner à son personnage fict fict cette réalté spécfique, condtonnée par le temps et le leu, aute de quo le « roman hstorque » n’est qu’un bal costumé réuss ou non, l n’a à son servce que les ats et dates de la ve passée, passée, c’est-à-d c’es t-à-dre re l’Hstore. Zénon, suppos supposéé né en 1510, aurat eu neu neu ans à l’époque où le veux Léonard s’étegnat dans son exl d’Ambose, trente et un ans au décès de Paracelse, dont je le as l’émule et paros l’adversare, trente-tros à celu de Copernc, qu ne publa son grand ouvrage qu’à son lt de mort, mas dont les théores crculaent de longue date sous orme manuscrte dans certans mleux aux dées avancées, ce qu explque que j’en montre le jeune clerc rensegné sur les bancs de l’école. A l’époque de l’exécuton de Dolet, représenté par mo comme son premer « lbrare », Zénon aurat eu trente-sx ans, et quarante-tros à celle de Servet, comme lu médecn, et s’occupant comme lu de recherches sur la crculaton du sang. Contemporan à peu près exact de
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l’anatomste Vésale, chrurgen Ambrose Paré, Cancel du Download And Print du botanste Césalpn, du mathématcen et phlosophe Jérôme Cardan, l meurt cnq ans après la nassance de Gallée, un an après celle de Campanella. A l’époque de son sucde, Gordano Bruno, destné à mourr par le eu trente et un ans plus tard, aurat eu à peu près vngt ans. Sans qu’l s’agît de composer mécanquement un personnage synthétque, ce qu’aucun romancer conscenceux n’accepte de are, d’assez nombreux ponts de suture rattachent l’magnare phlosophe à ces authentques personnaltés échelonnées le long de ce même sècle, et auss à quelques autres ayant vécu dans les mêmes leux, couru des aventures analogues, ou cherché à attendre les mêmes buts. J’ndque c certans rapprochements, tantôt conscemment cherchés et ayant serv à l’magnaton de mse en marche, tantôt au contrare notés après coup en guse de vérficaton. C’est ans que la nassance llégtme de Zénon et son éducaton en vue d’une carrère ecclésastque ne sont pas sans évoquer celles d’Erasme, fils d’un homme d’Eglse et d’une bourgeose de Rotterdam, et commençant sa ve d’homme sous l’habt de mone augustn. L’algarade causée par l’nstallaton chez des artsans ruraux de rudmentares méters à tsser mécanques rappelle des ats de ce genre survenus vers le mleu du sècle, dès 1529 à Dantzg, où l’auteur d’une semblable machne ut, dt-on, ms à mort, pus en 1533 à Bruges où les magstrats nterdrent un nouveau procédé pour tendre les lanes, un peu plus tard à Lyon avec le perectonnement des presses d’mprmere. Certans aspects volents du caractère de Zénon jeune pourraent are penser à Dolet, le meurtre de Perrotn, par exemple, rappelant, d’alleurs de lon, celu de Compang. Les stages du jeune clerc auprès auprè s de l’abbé mtré de Sant-Bavon, Sant-Bavon, à
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Gand, supposé Cancel c préoccupé d’alchme, ensute Download And Print auprès du marrane Don Blas de Vela, ressemblent d’une part aux nstructons reçues par Paracelse de l’évêque de Settgach et de l’abbé de Spanhem, de l’autre aux études cabbalstques de Campanella sous la drecton du Ju Abraham. Les voyages de Zénon, sa trple carrère d’alchmste, de médecn et de phlosophe, et jusqu’à ses ennus à Bâle, suvent de très près ce qu’on sat ou ce qu’on raconte de ce même Paracelse, et l’épsode du séjour en Orent, presque de rgueur dans la bographe des phlosophes hermétques, s’nspre auss des pérégrnatons réelles ou légendares du grand chmste susse allemand. L’hstore de la captve rachetée en Alger sort d’épsodes quas rebattus des romans espagnols de l’époque ; celle de Sgn Ulsdatter, dame de Frösö, tent compte de la réputaton de guérsseuses et d’« herborstes » des emmes Scandnaves du temps. La ve de cour de Zénon en Suède s’étae pour une part sur celle de Tycho-Brahé à la cour de Danemark, pour le reste de ce qu’on rapporte d’un certan docteur Théophlus Homode, qu ut médecn de Jean III de Suède une génératon plus tard. L’opératon chrurgcale accomple sur Han est calquée sur le réct d’une nterventon du même genre dans les Mémoires d’Ambrose Paré. Dans un domane plus secret, peut-être vaut-l la pene de noter que le soupçon de sodome (et paros sa réalté, cachée autant que possble, et née quand l le allat) a tenu sa place dans les ves de Léonard de Vnc et de Dolet, de Paracelse et de Campanella, tout comme je le montre dans celle, magnare, de Zénon. De même, les précautons du phlosophe alchmste se cherchant des protecteurs, tantôt chez les réormés, tantôt au sen même de l’Eglse, se retrouvent à l’époque chez nombre d’athées ou de déstes plus ou mons persécutés. En dépt de cec, dans le débat
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entre l’Eglse etCancel la Réorme, DownloadZénon, And Print comme tant d’autres esprts lbres du même sècle, comme Bruno, qu mourra pourtant condamné par le Sant-Ofce, ou comme Campanella, malgré ses trente et un ans de prson nqustorale, reste plutôt stué sur le versant catholqu ca tholquee . Sur le plan des dées, ce Zénon marqué encore par la scolastque, et réagssant contre elle, à m-chemn entre le dynamsm dynamsmee subvers subvers des alchmstes et la phlosophe mécanstque qu allat avor pour elle l’mmédat avenr, entre l’hermétsme qu place un Deu latent à l’ntéreur des choses et un athésme qu ose à pene dre son nom, entre l’emprsme matéralste du pratcen et l’magnaton quas vsonnare de l’élève des cabbalstes, prend également appu sur d’authentques phlosophes ou hommes de scence de son sècle. Ses recherches scentfiques ont été magnées en grande parte d’après les Cahiers de Léonard : l en est ans, en partculer, pour les expérmentatons sur le onctonnement du muscle cardaque, qu préludent à celles de Harvey. Celles qu concernent la montée de la sève et les « pouvors d’mbbton » de la plante, antcpant les travaux de Haes, se ondent sur une remarque de Léonard, et eussent représenté, de la part de Zénon, un eort de vérficaton d’une théore ormulée à la même époque par Césalpn . Les . Il ne m’appartent pas de dscuter c les rasons de cette atttude, admrablement analysée par Léon Blanchet. Campanella, Pars, 1920, en ce qu concerne un grand nombre de phlosophes du xve sècle. Le lvre de J. Huznga sur Erasme, part d’un tout autre pont de vue, montre dans un cas partculer les mêmes eets des mêmes causes. Dsons seulement que le preur des Cordelers n’a pas tort de dscerner dans les crtques adressées par Zénon à Luther une attaque de bas contre le chrstansme lu-même. . Pour les expérmentatons médcales et chrurgcales de Zénon, vor Les Dissections anatomiques de Léonard de Vinci, par E. Belt, et Léonard de Vinci, biologiste, par F. S. Bodenhemer, dans Léo-
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hypothèses sur les changements dePrint l’écorce terrestre Cancel Download And vennent auss des Cahiers, mas l aut ben dre qu’nsprées des phlosophes et des poètes antques, des médtatons de ce genre sont quas banales dans la poése du temps. Les opnons sur les ossles sont très proches de celles exprmées non seulement par Vnc, mas par Frascator dès 1517, et par Bernard Palssy une quarantane d’années plus tard. Les projets hydraulques du phlosophe, ses « utopes mécanques », en partculer les dessns de machnes volantes, et enfin l’nventon d’une ormule de eu lqude utlsable dans les combats navals, sont ben entendu calqués sur des nventons analogues de Vnc et de quelques autres chercheurs du xv e sècle ; ls exemplfient les curostés et les recherches d’un type d’esprts, pont rares à l’époque, mas qu auront pour ans dre traversé souterranement la Renassance, plus proches à la os du Moyen Age et des temps modernes, et pressentant déjà nos tromphes et nos dangers . Les mses en garde contre le mauvas emplo des nventons technques par la race humane, qu rsquent aujourd’hu de paraître prémontores, abondent dans les tratés alchmques ; nard de Vinci et l’expérience scientiique au seizième siècle, Presses Unverstares de France, 1953. Pour l’énoncé de la théore de Césalpn, et en général pour les recherches des botanstes de la Renassance, lre entre autres la premère parte de l’ouvrage de E. Guyénot, Les Sciences de la vie aux dix-septième et dix-huitième siècles, Pars, 1941. . En ce qu concerne le « eu lqude », qu ut longtemps l’arme secrète de Byzance, pus contrbua à la conquête mongole, son nterdcton en Occdent par le second concle du Latran (1139) ut respectée, en parte parce que le naphte, matère premère ndspensable, état à peu près hors de portée des ngéneurs mltares occdentaux ; la poudre à canon le relégua ensute jusqu’à nos jours parm les « progrès » oublés. L’nventon de Zénon eût donc conssté à reprendre la velle ormule byzantne et à l’assocer à des procédés balstques nouveaux. Vor sur ce sujet R. J. Forbes, Studies in Ancien! Technology, vol. 1, Leyde, 1964.
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on les rencontre dans AndunPrinttout dérent Cancelauss, Download contexte, chez Léonard et chez Cardan. Dans quelques cas, l’expresson même d’un sentment ou d’une pensée a été empruntée à d’hstorques contemporans du personnage, comme pour meux authentfier que de telles vues sont à leur place au xve sècle. Une réflexon sur la ole de la guerre est trée d’Erasme, une autre de Léonard de Vnc. Le texte des Prophéties grotesques est es t emprunté aux Proezie de Léonard, à l’excepton de deux lgnes trées d’un quatran de Nostradamus. La phrase sur l’dentté de la matère, de la lumère et de la oudre résume deux cureux passages de Paracelse . La dscusson sur la mage s’nspre d’auteurs du temps, tels qu’Agrppa de Netteshem et Govann della Porta, nommés d’alleurs en cours de route. Les ctatons en latn de ormules alchmques sortent presque toutes de tros grands ouvrages ouvrages modernes sur l’alchme : Marceln Berthelot, La Chimie au Moyen Age, 1893 ; C. G. Jung, Psychologie und Alchemie, 1944 (éd. revsée, 1952), et J. Evola, La Tradizione ermetica, 1948, placés chacun à un pont de vue dérent, et ormant à eux tros une utle voe d’accès au domane encore éngmatque de la pensée alchmque. La ormule L’Œuvre au Noir, donnée comme ttre au présent lvre, désgne dans les tratés alchmques la phase de séparaton et de dssoluton de la substance qu état, dt-on, la part la plus dfcle du Grand Œuvre. On dscute encore s cette expresson s’applquat à d’audaceuses expérences sur la matère elle-même ou s’entendat symbolquement des épreuves de l’esprt se lbérant des routnes et des préjugés. Sans doute a-t-elle sgnfié tour à tour ou à la os l’un et l’autre. . Paracelse, Das Buch Meteororum, édt. de Cologne, 1566, cté par B. de Telepne, Telepne, Paracelsus, Sant-Gall, 1945.
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Les quelque Cancel soxanteDownload annéesAndàPrintl’ntéreur desquelles s’enerme l’hstore de Zénon ont vu s’accomplr un certan nombre d’événements qu nous concernent encore : la scsson de ce qu restat vers i5i0 de l’ancenne Chrétenté du Moyen Age en deux parts théologquement et poltquement hostles ; la allte de la Réorme devenue protestantsme et l’écrasement de ce qu’on pourrat appeler son ale gauche ; l’échec parallèle du catholcsme enermé pour quatre sècles dans le corselet de er de la Contre-Réorme ; les grandes exploratons tournées de plus en plus en smple mse en coupe du monde ; le bond en avant de l’économe captalste, assocé aux débuts de l’ère des monarches. Ces ats trop vastes pour être entèrement vsbles aux contemporans aectent ndrectement l’hstore de Zénon, plus drectement peut-être la ve et le comportement des personnages secondares, nstallés davantage dans les routnes de leur sècle. Bartholommé Campanus a été dessné sur le modèle déjà désuet de l’homme d’Eglse du sècle précédent, pour qu la culture humanste état sans problème. Le généreux preur des Cordelers n’a malheureusement, par la orce des choses, que peu de répondants déclarés dans l’hstore du xv e sècle, mas s’nspre en parte de tel sant personnage de l’époque ayant eu sa plene part d’expérence séculère avant l’entrée dans la carrère ecclésastque ou la prse d’habt. Le lecteur reconnaîtra dans ses propos contre la torture un argument, d’alleurs proondément chréten, emprunté avant la lettre à Montagne. Le savant et poltque évêque de Bruges a été magné d’après d’autres prélats de la Contre-Réorme, mas ne contredt pas le peu qu’on sache du ttulare vértable de ces années-là. Don Blas de Vela a été vu à l’nstar d’un certan César Brancas, abbé de SantAndré de Vlleneuve-lez-Avgnon, grand cabbalste
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qu ut chassé Cancel par sesDownload mones vers 1597 pour And Print cause de « judaïsme ». La figure volontarement estompée de Fray Juan rappelle Fra Petro Ponzo, qu ut l’am et le dscple du jeune Campanella. Les portrats de banquers et d’hommes d’aares, Smon Adransen avant sa converson à l’anabaptsme, les Lgre et leur ascenson socale, Martn Fugger, personnage fict lu auss, mas enté sur l’authentque amlle qu gouverna sous man l’Europe du xve sècle, suvent de très près leurs modèles réels dans l’hstore financère du temps, sous jacente à l’hstore l’hstor e tout court. cour t. Henr-Maxmlen appartent à tout un batallon de gentlshommes lettrés et aventureux, muns d’un modeste bagage de sagesse humanste, qu’l n’est pas beson de rappeler au lecteur ranças, mas dont la race allat malheureusement s’étendre vers la fin du sècle l. Enfin, Colas Gheel, Glles Rombaut, Josse Cassel et leurs camarades du mondre état sont vus autant que possble à travers les magres documents concernant la ve de l’homme du peuple, à une époque où les chronqueurs et les hstorens se sont préoccupés presque exclusvement de la ve bourgeose, quand ce n’état pas de celle des cours. Une smlare réflexon pourrat se hasarder pour les personnages émnns, les figures de emmes de l’époque, quelques prncesses mses à part, étant généralement mons éclarées que les vsages d’hommes. Un bon quart des comparses qu traversent ce lvre sont d’alleurs prs tels quels à l’hstore ou aux chronques locales : le nonce della Casa, le . Le ragment 99 de Pétrone, tel que le cte Henr-Maxmlen, s’augmente de quelques lgnes nauthentques qu’on suppose c, pour les besons de la cause, composées, non par l’nvent l’nvent Nodot au xve sècle, mas par quelque ardent humanste de la Renassance, peut-être par Henr-Maxmlen lu-même. In summa serenitate est un noble apocryphe.
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procureur Le Cocq, proesseur Rondelet qu en Cancel le Download And Print eet fit scandale à Montpeller en asant dsséquer devant lu le cadavre de son fils, le médecn Joseph Ha-Cohen, et, ben entendu, parm beaucoup d’autres, l’amral Barbarossa et le charlatan Rugger. Bernard Rottmann, Jan Matthyjs, Hans Bockhold, Knpperdollng, prncpaux acteurs du drame de Münster, sont trés de chronques contemporanes, et, ben que le réct de la révolte anabaptste at été at unquement par des adversares, les exemples de anatsme et d’accès de fièvre obsdonale sont trop nombreux de notre temps pour ne pas nous are accepter comme plausbles la plupart des détals de leur atroce aventure. Le talleur Adran et sa emme Mare Mare sortent sor tent des Tragiques d’Agrppa d’Aubgné ; les belles Italennes et leurs admrateurs ranças à Senne sont dans Brantôme et dans Montluc. La vste de Marguerte d’Autrche à Henr-Juste est magnare comme Henr-Juste lu-même, mas non les transactons de cette prncesse avec les banquers, n sa tendresse pour son perroquet « L’Amant Vert » dont un poète de cour a pleuré la mort, n son attachement pour Madame Laodame mentonné par Brantôme ; le cureux commentare sur les amours émnnes qu accompagne c le portrat de Marguerte d’Autrche est tré d’une autre page du même chronqueur. Le détal de la maîtresse de mason allatant son enant durant une vste prncère est prs aux Mémoires de Marguerte de Navarre, qu vsta la Flandre une génératon plus tard. L’ambassade de Lorenzacco en Turque au servce du ro de France, son passage à Lyon en 1541 avec sa sute qu contenat au mons un « morsque », et la tentatve d’assassnat dont l ut l’objet dans cette vlle sont donnés par les documents d’époque. L’épsode de la peste à Bâle et à Cologne se justfie par la réquence de ce mal presque endémque dans
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e l’Europe du xvCancel sècle, Download mas l’an 1549 a été chos And Print pour les besons du réct et sans réérence à une recrudescence connue en pays rhénans. La menton par Zénon en octobre 1551 des rsques encourus par Servet (jugé et brûlé en 1553) n’est pas prématurée, comme on pourrat le crore, mas tent compte des dangers courus de longue date par le médecn catalan, tant aux mans des catholques que des réormés, qu s’entendaent au mons pour vouer au eu ce malchanceux homme de géne. L’alluson à une maîtresse de l’évêque de Münster est sans base hstorque, mas le nom at écho à celu de la maîtresse d’un célèbre évêque de Salzbourg au xve sècle. A deux ou tros exceptons près, les noms des personnages ficts sont tous trés d’archves ou de généaloges, paros de celles de l’auteur lumême. Quelques noms ben connus, par exemple celu du duc d’Albe, sont donnés c dans leur orthographe de la Renassance.
* Les ches d’accusaton assemblés contre Zénon par les autortés tant cvles qu’ecclésastques et les détals jurdques de son procès ont été empruntés, mutatis mutandis, à une dem-douzane de causes célèbres ou obscures de la seconde moté du xve sècle et des débuts du xv e sècle, plus partculèrement peut-être aux premers procès de Campanella, dans lesquels des gres d’ordre séculer vosnaent auss avec ceux d’mpété et d’hérése Le conflt larvé qu oppose le procureur Le Cocq à l’évêque de Bruges, retardant et complquant le procès de Zénon, est nventé comme toute cette aare, . Vor, pour ces complexes questons de procédure m-ecclé-, sastque, m-cvle, les mmenses procès-verbaux réuns par Lug Amable, Fra Tommaso Campanella, Naples, 1882, 3 vol.
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mas peut se dédure deDownload l’hostlté volente exstant Cancel And Print alors dans les vlles de Flandre contre les prérogatves admnstratves des nouveaux évêques nstaurés sous Phlppe II. La remarque acéteuse du théologen Héronymus Van Palmaert envoyant Zénon explorer ses mondes nfins a été ate en réalté par Gaspar Schopp, champon allemand de la ContreRéorme, à l’occason de l’exécuton de Gordano Bruno ; de Schopp, également, la plasantere qu consste à proposer de mettre à même le prsonner (dans ce cas Campanella) de combattre l’hérétque sur des bombarders volants de son nventon. La plupart des détals de procédure pénale spécfiquement brugeose, mentonnés dans les derners chaptres, comme le supplce décrt par Zénon au chanone Campanus, et qu eut leu à Bruges en 1521 pour un crme non désgné, la pene du eu pour nantcde, et le bûcher dressé hors des murs pour les supplcés convancus de mœurs hors la lo sont prs au lvre de Malcolm Letts, Bruges and Its Past , partculèrement ben documenté en ce qu concerne les archves judcares de Bruges. L’épsode du Mard gras a été magné d’après ce qu se passa près d’un sècle plus tôt dans cette même vlle lors de l’exécuton des consellers de l’empereur Maxmlen. Celu du juge qu dort à l’audence et se révelle croyant la sentence de mort déjà prononcée ressert à peu près telle quelle une anecdote qu courat à l’époque sur Jean Hessele, juge au Trbunal Trbunal de Sang. Certans ncdents hstorques, touteos, ont été légèrement modfiés pour leur permettre de tenr dans le cadre du présent réct. L’autopse pratquée par le docteur Rondelet sur un fils en réalté mort en bas âge a été antdatée de quelques quelques années, et e t ce . Desclée de Brouwer, Bruges, et A. G. Berry, Londres. 1926.
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fils représenté comme au seulAnd Print de l’âge adulte, Cancel Download pour qu’l pût devenr ce « bel exemplare de la machne humane » sur lequel médte Zénon. En at, Rondelet, célèbre de bonne heure pour ses travaux d’anatome (et auquel l arrva de dsséquer auss sa belle-mère), état de peu l’aîné de son magnare élève. Les séjours de Gustave Vasa dans ses châteaux d’Upsal et de Vadsténa urent réquents, mas les dates qu’on leur assgne c et la menton de la présence du ro à une assemblée de notables durant l’automne 1558 sont dues surtout au désr de donner en quelques lgnes une dée à peu près adéquate des déplacements du monarque et de ses besognes d’homme d’Etat. La date des premères commssons octroyées aux captanes des « Gueux de Mer » est authentque, mas les explots et le prestge de ces partsans sont peut-être quelque peu antdatés. L’hstore du « concerge » du comte d’Egmont ond en un tout l’exécuton de Jean de Beausart d’Armentères, homme d’armes d’Egmont, et celu de la torture extraordnare nflgée à Perre Col, concerge du comte de Nassau, qu en at reusa de céder une penture de Bosch, non au duc d’Albe, comme le dt c le preur des Cordelers, mas à Juan Boléa, captane de justce et grand prévôt de l’armée espagnole ; l’hypothèse que cette penture état destnée aux collectons du Ro, dont on sat le goût pour l’œuvre de Bosch, est de mon cru et me parat au mons déendable. L’épsode de la ute manquée de M. de Battenbourg et de ses gentlshommes et de leur exécuton à Vlvorde est légèrement resserré dans le temps. La chronologe des ntrgues de la cour ottomane sous le règne de Solman a été auss quelque peu modfiée. Deux ou tros os enfin, l’état d’esprt du personnage qu parle ntrodut dans le réct un élément d’apparente nexacttude.
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Zénon à vngt ans, pour défint Cancel en route Download And l’Espagne, Print ce pays comme celu d’Avcenne, parce que c’est par l’Espagne que la phlosophe et la médecne arabes urent tradtonnellement transmses à l’Occdent chréten, et s’nquète assez peu que ce grand homme du xe sècle sot né à Bokhara et mort à Ispahan. Ncolas de Cusa ut longtemps, snon jusqu’au bout, plus conclant envers l’hérése husste que ne le dt l’évêque de Bruges, mas ce derner, dscutant avec Zénon, ramène plus ou mons conscemment l’œcuménque prélat du xv e sècle aux vues plus ntolérantes de la Contre-Réorme. Contre-Réorme. Un changement à certans ponts de vue plus consdérable est celu qu porte sur la date des deux procès de mœurs ntentés à deux groupes de mones augustns et cordelers de Gand et de Bruges, et qu se termnèrent par le supplce de treze mones gantos et de dx mones brugeos. Ces deux procès n’eurent leu qu’en 1578, dx ans après l’époque à laquelle je les place, et à un moment où les adversares des ordres monastques, consdérés comme acqus à la cause espagnole, avaent brèvement le dessus dans ces deux vlles . En antdatant ces procès pour are du second de ces deux esclandres l’un des ressorts de la catastrophe de Zénon, j’a néanmons tenté de montrer, sur un arrère-plan de poltque locale orcément dérent, mas tout auss sombre, la même ureur partsane des ennems de l’Eglse, jonte à la crante des autortés ecclésastques de paraître étouer un scandale, aboutssant aux mêmes atroctés légales. Il ne s’ensut pas que ces accusatons ussent nécessarement calomneuses. Je prends à mon compte les réflexons . Pour cette aare, comme pour pluseurs des ncdents mentonnés au paragraphe précédent, vor les Mémoires anonymes des troubles des Pays-Bas, édtés par J. B. Blaes, Bruxelles, Heussner, 1859-1860, 2 vol.
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de BartholomméCancel Campanus surAnd le Print sucde de Perre Download de Hamaere, qu eut leu comme je le raconte, mas à Gand, ce condamné appartenant au groupe des mones gantos et non à ceux de Bruges : cette mort volontare, at rarssme à l’époque, et consdéré par la morale chrétenne comme un orat quas rrémssble, donne à penser que l’nculpé avat pu auss enrendre d’autres prescrptons avant de braver celle-là. L’authentque Perre de Hamaere ms à part, le groupe des mones brugeos a été rédut par mo à sept personnages, tous ficts, et la demoselle de Loos, dont s’éprend Cypren, est également magnare. Inventée auss l’hypothèse d’un len, soupçonné par Zénon et recherché par les juges, entre les prétendus préte ndus « Anges » e t des survvants de sectes extermnées, pus tombées dans l’oubl depus près d’un sècle, comme ces Adamtes ou ces Frères et Sœurs du Lbre Esprt, suspects de promscutés sexuelles analogues, et dont certans érudts ont cru pouvor, trop systématquement peut-être, trouver des traces dans l’œuvre de Bosch. Leur rappel n’a pour but que de montrer, sous les algnements doctrnaux du xv e sècle, l’éternel boullonnement des antques héréses sensuelles devné auss dans d’autres procès de l’époque. On aura remarqué, de plus, que le dessn envoyé par dérson à Zénon par le rère Floran n’est autre chose qu’une réplque à peu près exacte de deux ou tros groupes de figures appartenant au Jardin des Délices terrestres de Jérôme Bosch, aujourd’hu au musée du Prado, et qu figurat dans le catalogue des œuvres d’art appartenant à Phlppe II sous le ttre : Una pintura de la variedad variedad del Mundo.
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TABLE
PREMIÈRE PARTIE : LA VIE ERRANTE Le grand chemn ............................... ............... ...................... ...... Les enances de Zénon............................. ................. ............ Les losrs de l’été .................. ........................... .................. ......... La ête ê te à Dranoutre ................... ............................ .............. ..... Le départ de Bruges................... ............................. .............. .... La vox publque ................................ ................ .................... .... La mort à Münster .................. ........................... ................ ....... Les Fuggers de Cologne .................. .......................... ........ La conversaton conversa ton à Innsbruck .................... ................. ... La carrère carrè re d’Henr-Maxmlen ............... Les derners derner s voyages voyages de Zénon ................. ................. DEUXIÈME PARTIE : LA VIE IMMOBILE Le retour re tour à Bruges .................................. ............................ ...... L’abîme .................................. ................. ................................. ................ La malade du preur .............................. .............. ..................
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Les désordres désordre s de la char .......................... ................ .......... La promenade sur la dune........................ ................. ....... La sourcère .................................. ................. .......................... ......... TROISIÈME ROISIÈ ME PAR ARTIE TIE : LA PRISON L’acte d’accusaton ................................. ................ ................. Une belle demeure ................................ ................ .................... La vste du chanone............................... ................ ............... La fin de Zénon ............................... ............... ....................... ....... NOTE DE L’AUTEUR ........................
IMPRIMÉ EN FRANCE PAR BRODARD ET TAUPIN , place d’Alletay d’Alle tay - Pars. Usne de La Flèche, le --. - - Dépôt légal n° , e trmestre . LE LIVRE DE POCHE - , avenue Perre er de Serbe - Pars. - - -