La mondialisation et l’internationalisation :
Introduction : Le terme de mondialisation désigne le développement de liens d’interdépendance entre hommes, activités humaine et système politique à l’échelle du monde.
Ce phénomène touche la plupart des domaines avec des effets et une temporalité propre à chacun. Il évoque aussi parfois les transferts internationaux de main- d’œuvre ou de connaissances Ce terme est souvent utilisé aujourd’hui pour désigner la mondialisation économique, et les changements induits par la diffusion mondiale des informations sous forme numérique sur Internet LA
MONDIALISATION :
I- Définitions : Il n'existe pas de définition universellement acceptée de la mondialisation, ce qui rend souvent confus les débats dont elle fait l'objet.
D’après le FMI :
Le Fond Monétaire International (FMI), traduit le terme anglo-saxon « globalization » par mondialisation. Il le définit comme « l’interdépendance économique croissante, provoquée par l’augmentation du volume et de la variété des transaction transfrontières de biens et services, ainsi que des flux internationaux de capitaux, en même temps que la diffusion accélérée et généralisée de la technologie ».
D’après les économistes :
Si les économistes ont précisé les premiers le sens du mot « mondialisation », ils ne sont pas pour autant d'accord sur une définition commune. Plus qu'en sciences politiques ou en géographie, les divergences d'interprétation du phénomène selon les auteurs ou les grandes écoles de pensée sont marquées et constituent la source d'importants débats au sein de la discipline économique.
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D’après Bouchet Michel Henry :
La mondialisation est un phénomène à la fois spatial et temporel .elle est portée par cinq ouvertures qui font que le centre du monde est aujourd’hui partout : 1. L’ouverture des mentalités : la dynamique intellectuelle de la mondialisation ; 2 .L’ouverture de l’espace : la dynamique démographique et migratoire ; 3 .L’ouverture des échanges : la dynamique commerciale ; 4 .L’ouverture des frontières : la dynamique des transports ; 5 .L’ouverture du progrès technique : la dynamique technologique.
Ainsi selon Michaëlle Jean-Louis (2001)
Le terme mondialisation utilisé de nos jours avant tout au processus dynamique et multidimensionnel, ainsi cette mondialisation concerne au moins cinq éléments de l’économie internationale 1-la mondialisation des marchés des biens et services 2-la mondialisation de la concurrence et l’apparition de nouveaux concurrents étrangers 3-la mondialisation de la technologie avec une forte vitesse de propagation des innovations et la convergence des standards. 4-la mondialisation des firmes et des industries avec d’importants investissements à l’étranger, des délocalisations des accords de coopération et des alliances internationales. 5-la mondialisation des marchés financiers qui se traduit par une forte croissance des investissements de porte feuille et des déplacements massifs et instantanés des capitaux a court terme.
Charle Albert Michalet, expose dans son livre « qu’est ce que la mondialisation» les 3 dimensions les plus importantes de la mondialisation :
1. la dimension internationale : où les échanges des biens et services dominent. Cette configuration se caractérise essentiellement par l’immobilité du capital, mobilité des humains, protectionnisme et souveraineté de l’état où la mobilité des activités productives portée par les firmes multinationales et leurs IDE est déterminante. 2. la dimension multinationale:
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3. la dimension globale : qui se caractérise par l’émergence de la sphère financière ainsi par la régression de la souveraineté de l’Etat. L’OCDE propose un découpage en trois temps du processus de la mondialisation :
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l'internationalisation (depuis le milieu du XIXe siècle) c’est l’étape la plus ancienne,
correspond au développement des flux d'exportation ; la multinationalisation (surtout depuis 1945) est liée à l'essor des flux d'investissements directs à l'étranger et des implantations à l'étranger; la globalisation (depuis les années 1980) traduit la mise en place de réseaux mondiaux de production de financement et d'information.
Finalement cette interprétation montre que la mondialisation représente un processus (l'évolution vers une économie mondiale intégrée) et non un état: dans la réalité actuelle, les logiques internationales et mondiales coexistent
II- Historique et évolution de la mondialisation : Le processus d'extension des échanges économiques n'est pas nouveau, on le trouve déjà dans l'Antiquité. Il y a plus de 2000 ans, La tendance à la mondialisation de l'économie est constatée depuis longtemps par les économistes. Au début du XXe siècle et jusqu'à la crise de 1929 on a déjà pu observer une très forte extension des échanges internationaux de biens et de capitaux. On a ensuite observé une certaine stagnation des échanges jusqu'aux années 60, puis un décollage rapide de ceux-ci à partir des années 70 qui correspondent à l'apparition de difficultés économiques . L'extension de la libéralisation des échanges de biens et de capitaux apparaissait comme indispensable pour permettre le retour de la croissance. Au XXe siècle, la croissance économique a été sans précédent : le PIB mondial par habitant a presquegquintuplé. Trois étapes peuvent être repérées au cours des trois derniers siècles : 1- La configuration internationale de la mondialisation :
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La logique de l’économie internationale a pour objet d’expliquer les échanges de biens et services entre les ETATS NATIONS ; La référence centrale est constituée par les états nation qui n’ont d’autres rapports entre eux que les échanges commerciaux ; Théoriquement cela suppose l’acceptation d’une hypothèse centrale qui est l’immobilité des facteurs ; 3
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La configuration internationale de la mondialisation repose sur le principe de la spécialisation des pays dans la production et l’exportation des biens pour lesquels ils sont relativement plus productifs ; On conclut que l’espace international reste circoncit aux échanges de mar chandises entre pays souverains ; Le secteur privé, l’esprit d’entreprise la rentabilité étaient placés en retrait par rapport à la reconnaissan ce de la rationalité de l’état dont le pouvoir économique comme politique est acceptée sans beaucoup de réticence. La configuration s’étale au début des années 60 : Le facteur qui a piloté c’est l’état. Spécialisation au niveau international, considérée comme un acte de la mondialisation ; Régulation des affaires économique ; Le seul acteur q ui a piloté c’est l’état nation ;
2- La configuration multi nationale :
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Les facteurs de production ne sont plus immobilisés à l’extérieur des frontières ; Circulation des marchandises, des unités de production, des capitaux financiers ; Délocalisations vers d’autres pays des usines ; Le mouvement de territorialisation transforme les grandes firmes en multinationales ; Les firmes effectuent des IDE, mettent en place des réseaux de filiales à l’étranger qui soit produisent pour le marché local ou exportent leur production ; Les IDE s’accompagnent d’exportations de capitaux à long terme de la société mère vers les pays d’implantation et poussent le développement des marchés financiers internationaux ; La croissance multinationale entraine une plus grande mobilité du facteur travail ; Les Etats disposent d’un pouvoir économique affaibli ; Dans la plupart des pays il existe une législation spécifique pour les IDE ce qui signifie que les firmes étrangères n’ont pas les mêmes droits que les firmes nationales ;(Les investissements étrangers ont été interdits comme en URSS et quelques pays en voie de développement ) L’implantation étrangère doit être autorisée par une commission des investissements émanant de l’Etat ; Certaines activités sont interdites aux firmes étrangères par exemple : les services publics, les secteurs stratégiques, les mines et les hydrocarbures.
3- La configuration globale :
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La réduction de la taille du secteur public ; Baisse des tarifs douaniers ; 4
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Traitement national des IDE devient la règle ; Les interdictions sectorielles d’implantation sont prohibées par l’OMC ; La mobilité des firmes s’accroit : ils s’implantent là ou l’attractivité parait me illeure. Ce qui a pour effet de déclencher une concurrence entre les pays pour attirer les implantations étrangères sur leur territoire ; Changement de la sphère financière ;
III- La mondialisation contemporaine : Bien que la mondialisation affecte presque tous les pays du monde, les rôles joués ne sont pas tous les mêmes. Chaque pays possède sa propre ‘appellation’ ; il y a les pays industrialisés (PI), les ‘nouveaux’ pays industrialisés (NPI), les pays en voie de développement (PVD), et les pays moins avancés (PMA). En règle générale, ce sont les pays industrialisés qui ont profité le plus de la mondialisation pour arriver à leur stade actuel. Ces pays, technologiquement et économiquement plus avancés ont pu profit er plus rapidement de cet essor d’échanges ; c’est eux qui représentent un grand pourcentage du commerce international total....»
Pour les pays riches :
Pour les pays riches, la mondialisation économique comporte deux bénéfices essentiels. Le premier profite au consommateur qui a accès à un éventail plus large de biens à un prix plus faible que s’il était fabriqué dans le pays même. Quantitativement cet effet est considérable et peut être appréhendé en additionnant les gains de c onsommateur à l’achat de produit textiles chinois. Le second bénéfice profite aux détenteurs de capitaux qui obtiennent un meilleur rendement de leurs capitaux. Ils souffrent en revanche de la délocalisation de leur industrie intensive en main d’œuvre peu qualifiée ainsi que la concurrence accru être pays riches eux même. Quantitativement, peu important, ces effets posent cependant des problèmes du fait qu’ils sont localisés, touchant particulièrement certains individus ou certaines régions alors que les gains sont repartis sur l’ensemble de la population. La part de la population active en concurrence avec la main d’œuvre peu qualifiée des pays en voie de développement n’est seulement que 3%.
Pour les nouveaux pays industrialisés :
Jusqu’à la crise asiatique les nouveaux pays industrialisés semblaient les grands gagnants de la mondialisation économique. Profitant d’un main d’œuvre qualifiée et à faible coûts, ils ont 5
bénéficiés d’investissements très importants en provenances des pays riches comme l’aide financière apportée au japon par les Etats Unis après la seconde guerre mondiale, ce qui leur a permis de construire une économie moderne et un système de formation solide, de sortir de la pauvreté.
Le bilan de la mondialisation économique pour ces pays est ainsi très contrasté des pays comme la Corée du sud ou Taïwan définitivement classés parmi les pays riches, d’autres Taillade Philippine ont du mal à se remettre de la volatilité des investissements, et d’autres encore bénéficient très largement de la mondialisation au niveau du pays mais avec une répartition très inégale de ces gains.
Pour les pays pauvres :
Au niveau économique, les pays les plus pauvres restent largement en dehors du processus de mondialisation celui-ci requière en effet des institutions stables, un respect du droit de la propriété privée, une absence de corruption ainsi qu’un certain développement humain qui ne présente pas la plupart de ces pays. Leur ressource économique principale, l’agriculture, reste dominée par les stratégies protectionnistes des pays riches, sauf pour les cultures propres aux pays pauvres.
IV- Les avantages et les inconvénients :
Les avantages pour le consommateur :
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Diversité des biens de consommation ;
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Amélioration du niveau de vie dans presque tous les pays ; L’émergence de nouveaux pays industrialisés qui ont pu sortir de la pauvreté ; Elle a dynamisé les économies des pays les plus prospères par l’ouverture d’un marché planétaire et les a aussi stimulés par une concu rrence accrue qui les a obligés à s’adapter.
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Les inconvénients Domination des pays capitalistes ; Concurrence forte qui amène la disparition des futurs producteurs ; Difficulté de gérer les crises financières, la mondialisation rend la crise plus complexe ; Elle a accentuée le déséquilibre entre les pays du nord et les pays du sud.
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L'INTERNATIONALISATION
I-
:
Définition :
C'est l'ouverture des entreprises nationales sur l'extérieur par le développement de leurs exportations de biens et services. Mouvement lancé dès le milieu du XIXe siècle par les firmes britanniques. C’est l’une des étapes du processus de la mondialisation économique. En économie, l’internationalisation est une stratégie de développement d'une entreprise audelà de son marché national d'origine. Elle peut se manifester par l'implantation d'unités de production dans d'autres pays ou la conquête de plusieurs marchés nationaux. Autrement dit, on parle d’internationalisation lorsqu’une entreprise acquiert en dehors de son territoire d’origine des capacités de commercialisation, de production ou de recherche. Il peut s’agir de la création d’unités nouvelles ou du rachat d’unités existantes. Les prises de participation dans des entreprises existantes sont considérées comme des investissements directs à l’étranger (IDE). Ce mouvement est ancien, puisqu’il acquiert une certaine importance dès le XIXe siècle. Après la parenthèse de l’entre-deux guerres, il a repris de la vigueur dans les années 60, dominé à l’époque par les implantations américaines à l’étranger. A partir du milieu des années 80, se dessinent une accélération et une diversification du mouveme nt d’internationalisation, qui touche aujourd’hui plus de pays et de secteurs d’activité que par le passé.
I) Les causes de l'internationalisation : les conditions nécessaires à l'internationalisation sont aujourd'hui réunies. o o
un phénomène ancien depuis 1945, développement de facteurs favorisant l'internationalisation :
techniques
économiques
politiques
- développement des transports internationaux (baisse des coûts et augmentation de la rapidité) « Les nouveaux porte-
- qualification de la main d'œuvre dif férente selon les pays - niveau des salaires différents selon les pays « la Chine : usine du monde grâce à sa main d'œuvre compétitive et compétente.» - saturation de la demande dans les pays
- réduction des barrières douanières - diminution des obstacles non tarifaires - idéologie du libre-échange « l'OMC vient de parvenir à un nouvel accord sur une 7
techniques
économiques
politiques
containers d'Evergreen bientôt en services. » « l'A380 cargo permettra de transporter des charges plus importantes à moindre coût. » - amélioration des moyens de communication "Internet permet une communication en temps réel aux 4 coins de la planète"
industrialisés « La Logan de Renault doit principalement être vendue en Europe de l'Est. Le marché pour ce type de produits est trop faible en Europe de l'Ouest. » - inégale dotation des pays en ressources productives « sous la pression de la demande chinoise, le prix de l'acier sur les marchés internationaux s'envole. » - uniformisation partielle des modes de consommation « Mac Donald confiant dans l'américanisation de la consommation en Europe de l' Est a ouvert un nouveau restaurant à Prague. »
diminution des droits de douane » - création de zones de libre échange et de communautés économiques « Le traité de Rome a institué la CEE. » - incitations des pouvoirs publics « Le ministère du Commerce Extérieur dévoile un nouveau train de mesures en faveur des PME. »
III) les formes de l'internationalisation Les formes d'internationalisation diffèrent selon le type d'entreprise. Définitions
l'exportation : vente à l'étranger d'un produit fabriqué dans un pays d'origine. Elle peut être directe ou indirecte selon que l'entreprise vende elle-même ses produits ou qu'elle utilise des intermédiaires pour le faire.
Avantages
Exemple d'entreprise
Type d'entreprise
Directe : marge supérieure, acquérir de l'expérience,
Longchamp PME
Indirecte :connaissance rapide du marché, gain de temps, coûte moins cher que les autres formes d'exportation
Ziener
PME
Saint Jean Industries
PME
Citroën en Chine
Grandes entreprises
l'exportation associée, le portage : une entreprise utilise les services commerciaux d'une grande entreprise pour vendre ses produits à l'étranger.
- bénéficie de l'expérience d'une grande entreprise, proximité culturelle, bénéficie du nom de l'entreprise
La filiale commune ou « joint venture » : l'entreprise exportatrice crèe une filiale
- diminue les risques et investissements, connaissance de l'environnement local
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Définitions
Avantages
Exemple d'entreprise
Type d'entreprise
Renault en Roumanie avec la Logan
Moyennes et grandes
Total
FMN
commune avec un partenaire local. La délocalisation : transfert d'activités d'un pays à un autre
Les firmes multinationales vendent et produisent dans plusieurs pays dans lesquels elles ont des filiales. Elles conçoivent leurs activités à l'échelle mondiale pour leurs choix en matière de financement, de production et de distribution.
Economie
- coûts de production inférieurs - se rapprocher des consommateurs - contourner les barrières douanières
- répartition des risques - économies d'échelle - proche des clients -accroître le pouvoir de négociation -
mondiale/ Economie Internationale :
Le concept d'économie mondiale se distingue de celui d'économie internationale – qui est limité aux relations économiques avec l'extérieur et qui ne fait que compléter le concept d'Etatnation - en ce qu'il ne prend pas seulement en compte les flux de main- d'œuvre, de techniques et de moyens de paiement à travers les frontières, mais aussi les structures productives internes, en tant que parties intégrantes du système économique mondial. Le développement de l'économie mondiale est un phénomène qui a pris de l'envergure au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Tout d'abord caractérisée par l'hégémonie américaine et la puissance du dollar, l'économie mondiale est aujourd'hui marquée par la globalisation financière et la croissance du commerce mondial. L'évolution de l'économie mondiale Dans le développement de l'économie mondiale au XX e siècle, on peut distinguer quatre phases : le libéralisme, qui prend fin en 1914 ; la phase des conflits et de l'autarcie (1914-1950) ; l'âge d'or de la croissance rapide (1950-1973) ; le ralentissement de la croissance et l'accélération de l'inflation, depuis 1973.
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Points de divergence et de convergence entre la mondialisation et l’internationalisation
De point de vue linguistique : le terme de « Globalisation », est considéré comme un américanisme détestable imposé par la pauvreté de la langue anglaise incapable de proposer l’équivalent du terme de mondialisation . L’usage du terme de
globalisation est exceptionnel et tend à régresser tout comme celui d’internationalisation qui semble surtout caractériser les années 1970 et 1980. Le terme de mondialisation est ainsi utilisé dans les titres de la plupart des ouvrages récents rédigés en français). De même, le terme de « globalisation » ou « globalization » est généralement traduit par mondialisation 2 (Soros, Goldsmith & Mender). Symétriquement, dans le monde anglo-saxon, mais dans une moindre mesure (voir le tableau 1), le terme de globalization domine très largement celui d’internationalization sans que la distinction soit toujours claire (on trouve parfois les deux termes dans le même titre). On peut toutefois se demander pourquoi le néologisme globalization s’est imposé dans les années 1980 plutôt que celui de worldization, terme résiduellement utilisé pour évoquer la « third-worldization » (tiers-mondisation). Le fait, d’ailleur que le besoin d’un néologisme soir apparu si récemment pour se substituer au terme d’international devrait être considéré comme significatif. Tableau 1 – Le nombre de citations des termes dans Amazon (livres ;18/1/2004) Amazon.com (USA) Amazon.fr (France) Internationalizatio 5486 (26%) Internationalisatio 36 (5%) n (ou n internationalisation ) Globalization globalisation)
(ou 15441 (74%)
Globalisation
66 (9%)
Worldization worldisation)
(ou 36 (~0%)
Mondialisation
625 (86%)
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Cette normalisation du vocabulaire au profit du terme « mondialisation » en France et « globalisation » ( globalization) dans le monde anglo- saxon, n’aurait pas grand intérêt si elle n’introduisait pas une grande ambiguïté sur les concepts et ne révélait pas une forme de fuite devant la caractérisation de deux logiques de mondialisation : l’internationalisation et la glob lisation. La substitution des termes de « globalisation » et de « mondialisation » à celui d ’internationalisation révèle-t-il un consensus des observateurs sur le constat d’un changement historique radical ?
Pour répondre a cette question il faut distinguer, définir et opposer deux formes de mondialisation : la mondialisation « inter-nationale » (ou internationalisation) et la mondialisation « globale » (ou globalisation) Nous montrerons dans un premier point en quoi les deux concepts d’« internationalisation » et de « globalisation » se distinguent. Dans un seconde, nous verrons que les m esures du degré d’internationalisation ne sont pas adaptées aux mesures de la globalisation. Le Monde peut être peu globalisé et fortement internationalisé et, au contraire, très globalisé et faiblement internationalisé. Un troisième point analysera, recensera et proposera des indicateurs de globalisation. 1. La mondialisation inter-nationale n’est pas la mondialisation globale
Nous opposons ici deux conceptions de la mondialisation. L’une insiste sur la similarité entre les formes passées de la mondialisation, dessinées par les Étatsnations, et les formes actuelles. Elle ne relève pas d’évolution radicale ou irréversible. La seconde au contraire m arquerait l’accélération d’un processus de « fin de l’histoire », caractérisée par la généralisation des régulations marchandes et l’effacement des frontières. Si l’une et l’autre approche relèvent l’intégration croissante des économies, elles divergent en revanche sur les conséquences de cette évolution. Les frontières entre les deux concepts nous permettent aussi de repérer que la mondialisation est alors une form e avancée d’internationalisation, modernisée et donc plus complexe, ou bien encore que la mondialisation identifie un processus et l’adjectif « international » en décrit la nature. La mondialisation « internationale » se caractériserait donc par : 1) La généralisation et l’expansion du volume des échanges à la fois d’un point de vue géographique (échanges entre pays lointains, généralisation de l’ouverture commerciale) et d’un point de vue qualitatif (internationalisation des services, généralisation des investissements à l’étranger). 11
2) Une perspective historique cyclique. La m ondialisation n’est pas considérée comme un phénomène nouveau. Elle correspond seulement à des phases de l’activité économique, modulées par des évènements exogènes comme les guerres. 3) La structuration du Monde en entités politiques distinctes et indépendantes est une constante historique qui n’est pas remise en cause par la mondialisation. La principale différence entre ces deux concepts concerne les implications du processus d’intégration des marchés, reconnu par t ous. L’intégration remet-elle en cause le caractère « international » de la mondialisation au profit de son caractère « global » ? S. Berger (2003, p. 6) précise : «
Par mondialisation, j’entends une série de mutations dans l’économie internationale qui tendent à créer un seul marché mondial pour les biens et les services, le travail et le capital ».
Le tableau 2 résume les différences saillantes entre les deux conceptions de la mondialisation. Tableau 2 – Internationalisation vs globalisation Internationalisation
Mondialisation
Le Monde est une somme de nations interdépendantes
Le Monde est intégré avec effacement des frontières
Accent mis sur l’interdépendance et la coopération inter-Etats
Accent mis sur l’intégration et le retrait d e l’État au profit des marchés ou de régulations « globaux »
Les
individus conservent Les spécificités individuelles des spécificités nationales sont indépendantes de la nation d’origine
Indicateurs portant sur des volumes : flux internationaux, stocks d’actifs détenus à
Indicateurs de convergence éco- nomique ou sociale (prix, conjoncture,
Phénomène non-inédit et répétitif fin de l’histoire
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2. Les globalisation
indicateurs
d’internationalisation ne mesurent
pas
la
Si l’internationalisation ne raconte pas exactement la même histoire que la globalisation, laquelle est la plus vraisemblable ? Comment mesurer deux phénomènes certes distincts, mais aux relations ambiguës ? Peuvent-ils être simultanés ? L’un exclut-il l’autre ou peuvent-ils cohabiter ? On retrouve dans la mesure des phénomènes de « mondialisation » la confusion conceptuelle que nous avons décrite. Les travaux cherchent souvent à mesurer la « mondialisation » en général, sans trancher sur son caractère « International » ou « global ». Certains indicateurs utilisés identifient l’internationalisation, d ’autres la globalisation. Les indicateurs d ’internationalisation mesurent des opérations qui impliquent au moins deux pays et exigent donc le franchissement de frontières nationales. Ils portent sur des flux de biens, de services, de facteurs ou d’actifs qui peuvent être cumulés pour donner des évaluations en termes de stocks. Les indicateurs d’internationalisation les plus courants sont notamm ent les taux d’ouverture (par exemple : ex po rt at io ns /PNB), les flux d’investissements directs ou le stock d’actifs détenus à l’étranger. A priori, l’internationalisation et l’intégration doivent suivre les mêmes variables : La baisse des coûts de transaction (tarifs douaniers, coûts de transport, conversion des monnaies, etc.) favorise le volume des échanges et, en même temps, l ’intégration des économies nationales. Certains paradoxes peuvent être relevés : Paradoxe 1 – Plus de fragmentation crée plus d ’internationalisation et souvent moins d’intégration : La construction des indicateurs d’internationalisation, comme les taux d’ouverture (ou d’exposition), est par définition nationale. Ses valeurs sont donc soumises à la configuration politique du Monde. Or, les études empiriques montrent que, même en l’absence de barrières douanières, la simple existence d’une frontière suffit à segmenter les marchés nationaux 12 et donc à em pêcher l’égalisation des prix. Paradoxe 2 – Une moindre intégration des marchés favorise (parfois) l’internationalisation : L’échange n’obéit pas aux mêmes déterminants dans un Monde « internationalisé » et dans un monde « globalisé ». Avec l'internationalisation, l'échange est provoqué par les écarts de prix relatifs ou absolus entre les pays qui trouvent eux-mêmes leur origine dans l’hétérogénéité des pays enn terme de dotations relatives en facteurs, de techniques ou de préférences. Un monde de plus en plus hétérogène favorise donc l’échange. Au contraire, dans un monde globalisé, l'échange est limité à l'arbitrage. On n’échange que 13
les quantités nécessaires à rétablir un prix d’équilibre stationnaire Paradoxe 3 - Un même degré de globalisation est compatible avec plusieurs niveaux d’internationalisation: Imaginons deux pays semblables en tout, parfaitement concurrentiels et libérés de toute barrière aux échanges. Les prix relatifs et absolus sont donc identiques dans les deux pays. Si les biens sont homogènes, les consommateurs sont indifférents à l’échange ce qui signifie que le niveau d’internationalisation est indéterminé et peut prendre toutes les valeurs de 0% à 100% sans que le degré d’intégration, mesuré par l’écart des prix, ne soit affecté. En revanche, si les biens sont différenciés, les consommateurs ne sont plus indifférents à l’échange : si par exemple les préférences sont réparties de manière homogène dans les deux territoires, la part de la production exportée sera de 50% sans que, cette fois encore, le degré d’intégration ne se trouve modifié. Enfin, certains indicateurs tirent partie des contraintes comptables de la balance des paiements. Dans un monde peu globalisé, les déficits « jumeaux » (déficits budgétaires et courants) sont contraints par le solde épargne- investissement. Au contraire, dans un monde financièrement globalisé, l’épargne accessible est l’épargne mondiale. Un déficit d’épargne nationale peut alors être financé par le recours au marché financier « global ». La globalisation doit donc s’accompagner d’une réduction du coefficient de corrélation entre l’épargne et l’investissement nationaux selon l’approche de Feldstein & Horioka (1980). Le desserrement de la contrainte de financement implique aussi que des indicateurs comme l’« écart type des soldes courants » ou le « déséquilibre du solde courant/PNB » puissent être considérés comme des indicateurs de globalisation financière. Nous avons tenté de distinguer deux formes de « mondialisation » répondant à deux logiques différentes, l’une « internationale »internationalisation, l’autre « globale » modialisation. Cette distinction conduit, dans un souci de précision, à substituer au terme de « mondialisation » soit celui d’ « internationalisation », soit celui de « globalisation ». Le fait que les deux logiques soient concom itantes n’implique pas qu’elles soient confondue Cette distinction invite à jeter un œil critique à l’égard des études historiques menées ces dernières années pour comparer les différents épisodes de la mondialisation. S’agit-il de comparer les niveaux d’internationalisation, c'est-àdire le degré d’interdépendance entre les nations, ou de comparer les niveaux de globalisation c'est-à-dire le degré d’intégration des différentes économies ? Ces études, dont beaucoup ont été évoquées dans le texte, montrent, en général, que si l’internationalisation n’est sans doute pas extraordinairement plus élevée aujourd’hui qu’il y a cent ans, la globalisation est peut-être plus avancée et, surtout, elle s’accélère dans les années 1980-90 (diminution des écarts de prix, de taux d’intérêt, de la corrélation Feldstein-Horioka, etc.).
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Or, la globalisation n’a pas les mêmes implications que l’internationalisation pour les politiques économiques et leur cadre institutionnel, à l’intérieur comme à l’extérieur des nations. Il n’est pas certain que le système de « gouvernance » mondiale actuel, encore largement fondé sur le pouvoir régulateur d’États « coopératifs » et qui repose sur une logique « internationale », soit adapté à la globalisation. Toute évolution du système de gouvernance implique donc une évaluation préalable de la nature du processus de mondialisation en cours.
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