CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
Cours de Géodésie Chapitre 6 REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS Version 2.0
20/10/2002 20/10/2 002
Didier BOUTELOUP Cellule pédagogique et de recherche en astro-géodésie
[email protected] (33) 01 64 15 31 37
COURS D ' INTRODUCTION À LA GÉODÉSIE
CHAPITRE 6 REALISATION DES RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
1
I ntr oduction ____________________________________________________________1
2
I nf luence de la dé viation de la verti cale sur l es mesur es angu lair es _______________1 2.1 Introduction ______________ _______________ _______________ ______________ 1 2.2 Formulation générale _______________ _______________ ______________ _______ 2 2.2.a 2.2.b
Déviation de la verticale _________ ________ ________ ________ _________ ________ ______2 Corrections des mesures angulaires__ ________ ________ _________ ________ ________ _____4
2.3 Application aux mesures de triangulation terrestre _______________ ____________ __ 7 2.3.a 2.3.b 2.3.c
3
Corrections aux distances zénithales ________ ________ ________ _________ ________ ______7 Corrections aux angles azimutaux________ _________ ________ ________ ________ ________7 Corrections aux angles horizontaux_______ _________ ________ ________ ________ ________7
Triangl es gé odé siques____________________________________________________ 7 3.1 Approximation des sections normales _____ _____ _____ _____ _____ _____ _____ ____ 7 3.2 Représentation des triangles géodésiques en projection conforme _________ _________ 9 3.3 Réduction des distances_________ _____ _____ _____ _____ _____ _____ _________ _ 10
4
Ré al isation des r é seaux gé odé siqu es bi di mension nels__________________________ 13 4.1 Principe d'élaboration__________ _____ _____ _____ _____ _____ _____ _________ _ 13 4.2 Référentiels et systèmes géodésiques _________ _____ _____ _____ _____ _________ _ 14
CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
1
Introduction
Avant le lancement des premiers satellites artificiels de la Terre dans les années 1960, les seules techniques utilisables pour l'élaboration des réseaux géodésiques étaient les suivantes : l'ast r onomie de posit ion : elle fournit la longitude et la latitude géographique λ a et ϕ a en un point ainsi que l'azimut d'une direction Az a . C'est une méthode de positionnement absolu, §
§
les mesures terrestres d'angles (t r iangulat ion ) et de distances (t r ilat érat ion ). Ces observations permettent de déterminer des différences de coordonnées, c'est-àdire de déterminer les coordonnées d'un deuxième point connaissant celles d'un premier. Il s'agit de techniques de positionnement relatif.
Les mesures terrestres d'angles et de distances peuvent théoriquement être traités dans l'espace (calcul tridimensionnel). Mais, historiquement, les calculs ont quasiment toujours été menés de manière bidimensionnelle. Les stations et les points de visées sont alors projetés orthogonalement sur l'ellipsoïde de référence. Après différentes corrections que nous allons étudier, les observations fournissent des longueurs de lignes géodésiques De , des différences d'azimuts ∆ Az et des distances zénithales Dz. De telles traitements ne permettent en aucun cas de connaître la hauteur h d'un point par rapport à l'ellipsoïde ; on ne réalise ainsi que des réseaux sur une surface, c'est-à-dire bidimensionnels. En fait, un réseau bidimensionnel est toujours couplé avec un réseau d'altitudes. Mais l'altitude H d'un point n'est pas une grandeur géométrique. Rappelons que l'altitude H est un paramètre homogène à une distance qui traduit l'éloignement par rapport au géoïde, et que, en un point, h et H peuvent différer de quelques dizaines de mètres. 2
Influence de la déviation de la verticale sur les mesures angulaires
2.1 Introduction
Pratiquement, les angles observés sont des différences d'azimuts (angles horizontaux) et des distances zénithales (angles verticaux). Pour pouvoir utiliser le modèle ellipsoïdique, il faut ramener ces mesures à des angles relatifs à la normale à l'ellipsoïde.
Didier BOUTELOUP / ENSG / 2002
VI-1
COURS D ' INTRODUCTION À LA GÉODÉSIE
2.2
Formulation générale
2.2.a
Déviation de la verticale
En un lieu M, on appelle verticale la direction du vecteur-accélération de r g . La verticale est dirigée par le vecteur unitaire v défini pesanteur terrestre r r
par
v= −
g r
g
Autrement dit, la verticale est "la direction du fil à plomb". Le plan passant par M et orthogonal à v est le plan horizontal. On appelle zénith la direction définie r r par + v et nadir la direction opposée de - v . On appelle déviation
r
r
r
de la verticale l'angle θ entre n et v . On a cos θ = n ⋅ v .
Numériquement, en France métropolitaine, on a toujours θ < 15′ , et, dans le monde, θ < 100′′ . r
r
r
v n
θ
uur
Si n ≠ v , définissons un vecteur normal Tα r r r uur orthogonal à n et coplanaire avec n et v . Tα est donc un vecteur du plan tangent et peut s'écrire: uur
Tα
uur
g
ellipsoïde
uur
= sin α T p + cos α Tm
Fig. 1 : Vecteurs g et n r
v s'exprime alors: r
r
uur
v = cos θ n + sin θ Tα
v
Il est clair que θ étant un angle infiniment r cosθ ≈ 1 petit, et les composantes de v dans le sin θ ≈ θ θ sin α r repère local sont v θ cos α , où θ cosα et 1 R
n
ξ T m
θ η T α T p
α
L
θ sin α
sont des angles infiniment petits. Fig. 2 : Décomposition de la déviation de la verticale
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VI-2
CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
On retiendra:
η et ξ sont les composantes de
η v ξ 1 R L
la déviation de la verticale, respecti-vement dans les directions Est-Ouest et NordSud.
r
g
On désigne par R L
R L
g
le repère local
uur uur r
a
= ( M 1; T1 , T2 , v ) le repère local astronomique en
1
uur uur r
en
géodésique
( M 1 ; Tp , Tm ,n)
1
et par
.
uur r
• ( M 1; T2, v ) est un repère orthonormé du pla n mérid ien ast r onomique , c'est à dire du plan contenant v et parallèle à l'axe des pôles, uur uur r
u u r
• T1 est tel que ( T1, T2, v ) soit une base orthonormée directe. Par définition de R
L
a
RL
a
v n
T m
, a priori,
≠ R1− (ξ ) R 2+ (η ) R L .
T 1 T p
θ
T2
M
g
ϕ
O
Cherchons une relation entre les coordonnées astronomiques ( λa ,ϕ a ) , les coordonnées géographiques ( λg , ϕg ) et les composantes (η, ξ ) de la déviation de la verticale.
g
λg
ϕ
a
λa
Fig. 3 : Repère local astronomique; coordonnées astronomiques r
Les composantes de v sont connues dans
R et dans R L
cos λa cos ϕa et v sin λa cos ϕa sin ϕa R r
Or la matrice R de passage de
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R à RL
g
g
:
η v ξ 1 R L r
g
a déjà été étudiée :
VI-3
COURS D ' INTRODUCTION À LA GÉODÉSIE
− sin λg cos λg R = − sin ϕg cos λg − sin ϕ g sin λ g cos ϕ g cos λg cos ϕg sin λg
cos ϕ g sinϕ g 0
D'où on tire l'identité matricielle: cos λg η − sin λg ξ = − sin ϕ cos λ − sin ϕ sin λ g g g g 1 cos ϕg cos λg cos ϕg sin λg
cos λa cos ϕ a cosϕ g sin λa cos ϕ a sinϕ g sin ϕ a 0
η = cosϕ a sin ( λa − λ g ) (1) ⇔ ξ = sin ϕa cosϕ g − cosϕ a sin ϕ g cos (λa − λg ) (2) 1 = cos ϕa cos ϕg cos ( λa − λg ) + sin ϕ a sinϕ g (3) L'égalité (1) montre que λa − λg est de l'ordre de η, c'est à dire un infiniment
petit de 1er ordre. Ainsi, au 1er ordre près, on peut donc écrire sin ( λa − λg ) = λa − λ g . − = cos 1 λ λ ( a g ) Les relations (1) et (2) s'écrivent donc: η = cosϕa (λa − λg ) ξ = sin ϕ a cos ϕg − cosϕa sin ϕ g ×1 = sin (ϕ a − ϕ g )
On en déduit que conditions: cos ϕ a ( λa
ϕ a − ϕ g est
aussi un infiniment petit de 1er ordre. Dans ces
− λg ) = cosϕ g cos (ϕ a − ϕ g ) − sinϕ g sin (ϕ a − ϕ g ) ( λa − λ g )
= cos ϕg ( λa − λg ) − sin ϕ g (ϕ a − ϕ g )(λ a − λ g ) = cos ϕ g (λ a − λ g ) 1444 4 24444 3 néligeable
En définitive, on peut écrire:
2.2.b
η = cos ϕ ( λa ξ
− λg )
= ϕa − ϕg
Corrections des mesures angulaires
Si on note R ga la matrice de passage de R La à R L , l'expression de R La est : g
g
Ra
π π π π = R 3+ R +2 − ϕg R +3 (λg ) R −3 ( λa ) R −2 − ϕ a R 3− 2 2 4 244444 2 23 14444 3 14444 4244444 passage de R à R L
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g
passage de R L à R a
VI-4
CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
De plus, si S désigne une station d'observations et V un point de visée, nous utiliserons les notations suivantes : §
Dza et Az a représentent
respectivement la distance zénithale et l'azimut
observés
vers 2 , Dzg et Az g représentent respectivement la distance zénithale et l'azimut c'est à dire ramenés dans R L .
corrigés,
de §
1
g
V
V
Dz g
Dz a v
n
Az
A z g
a
T
T
T 2
p
m
T 1
S
S Fig. 4 : Correction des mesures angulaires
uuur
r
Soit u =
SV uuur
SV
r
, les composantes de u sont connues dans RL et dans RL a : g
sin Dzg sin Az g u sin Dzg cos Az g cos Dz g R L
sin Dza sin Az a et u sin Dza cos Az a cos Dz R L a r
r
g
sin Dzg sin Azg et sin Dzg cos Az g = cos Dzg
a
sin Dza sin Az a g R a sin Dza cos Az a . cos Dz a
L'expression de R ga se développe comme il suit : g
Ra
− sin λg cos λg 0 − sin λa − sin ϕ a cos λa cos ϕ a cos λ a = − sin ϕg cos λg − sin ϕ g sin λ g cos ϕ g cos λa − sinϕ a sin λa cos ϕ a sin λ a cos ϕ g cos λg cos ϕ g sin λg sin ϕ g 0 cos ϕ a sinϕ a − sin ϕ a sin (λa − λg ) cos ϕ a sin ( λa − λ g ) cos ( λa − λg ) sin ϕg sin ϕ a cos ( λ a − λg ) cosϕ g sin ϕ a λa − λ sin sin ϕ ( g g) + cos ϕg cosϕa − sin ϕ g cosϕ a cos ( λa − λ g ) = g sin ϕ cos λ − λ − ϕ ϕ ϕ λ − λ cos cos cos cos ( ) ( ) a a g g a a g − cos ϕ g sin (λ a − λ g ) + sin ϕg cos ϕa + sin ϕ g sinϕ a
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VI-5
COURS D ' INTRODUCTION À LA GÉODÉSIE
−η tan ϕ η 1 ξ ⇔ R ga = η tan ϕ 1 −η −ξ 1
On en déduit : sin Dzg sin Azg 1 −η tan ϕ η sin Dza sin Az a = sin Dz cos Az sin Dz cos Az tan 1 η ϕ ξ g g a a cos Dzg −η −ξ 1 cos Dz a
sin Dzg sin Az g = sin Dza sin Aza − η tan ϕ sin Dz a cos Az a + η cos Dz a ⇔ sin Dzg cos Azg = η tan ϕ sin Dza sin Aza + sin Dza cos Az a + ξ cos Dz a cos Dzg = −η sin Dza sin Aza −ξ sin Dza cos Az a + cos Dz a
(1) (2) (3)
Écrivons la formule de Taylor au 1er ordre pour la fonction cos au voisinage de Dz a : cos Dzg = cos Dza − ( Dzg − Dza ) sin Dz a + ( Dz g − Dz a ) ε ( Dz g − Dz a ) avec lim ε ( Dzg − Dz a ) = 0 Dz → Dz g
a
Et l'égalité (3) s'écrit : cos Dzg
= cos Dza − sin Dz a (η sin Aza + ξ cos Az a )
Par identification on en tire l'identité suivante au 1er ordre près : Dzg
− Dza = η sin Aza + ξ cos Az a
Il se démontre également que, au 1er ordre près, cette formule peut s'écrire : Dzg
− Dza = η sin Az + ξ cos Az
Pour obtenir la relation liant Az g à Az a , formons (1) ⋅ cos Aza − (2) ⋅ sin Az a : sin Dzg sin ( Azg − Aza ) = −η tan ϕ sin Dza + η cos Dza cos Aza − ξ cos Dz a sin Az a Cette relation nous montre que sin ( Azg − Aza ) , et donc Azg − Az a est un infiniment petit du 1er ordre. Le premier membre de l'égalité s'écrit donc : sin Dzg sin ( Azg − Aza ) = ( Azg − Aza ) sin Dz a + (η sin Az + ξ cos Az ) = sin Dza ( Azg − Aza ) + cos Dza ( Az g − Az a ) (η sin Az + ξ cos Az ) = sin Dz a ( Az g − Az a ) 1444444424444444 3
négligeable car du 2ème ordre
Et (1)cos Aza − (2)sin Az a se transforme ainsi en : sin Dz a ( Azg − Aza ) = −η tan ϕ sin Dza + cos Dz a (η cos Az a − ξ sin Az a ) ⇔
Azg − Aza
Didier BOUTELOUP / ENSG / 2002
= −η tan ϕ + cot Dza (η cos Az a − ξ sin Az a )
VI-6
CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
La démonstration serait simple à faire que, dans cette dernière formule, au 1er ordre près, cot Dz a peut être remplacé par cot Dz g , cos Az a par cos Az g et sin Az a par sin Az g . Nous retiendrons donc : Azg − Aza
= −η tan ϕ + cot Dz (η cos Az − ξ sin Az )
ou encore : Azg
− Aza = sin ϕ ( λg − λa ) + cot Dz (η cos Az − ξ sin Az )
2.3 Application aux mesures de triangulation terrestre 2.3.a
Corrections aux distances zénithales
En ce qui concerne les distances zénithales Dz a , la correction Dz g − Dz a est de deuxième ordre par rapport à la correction de réfraction, qui est très mal connue; en général, on ne l'applique pas. 2.3.b
Corrections aux angles azimutaux
Quant aux angles azimutaux Az a , les visées étant le plus souvent proches de l'horizontale, Dz est le plus souvent proche de π 2 et cot Dz est suffisamment petit pour être négligé. La formule de correction, appelée f ormule de Laplace , à appliquer est donc : formule de Laplace : Azg − Az a = sin ϕ ( λ g − λa ) Cette formule indique la correction à apporter à une mesure d'azimut astronomique. 2.3.c
Corrections aux angles horizontaux
L'angle horizontal entre deux visées est une différence d'azimuts ∆ Az a = Az a − Az a . La correction ∆ Az g − ∆ Az a vaut donc : ∆ Azg − ∆Aza = ( Az2 − Az1 ) − ( Az2 − Az 1 ) 2
g
g
a
1
a
= cot Dz2 (η cos Az2 − ξ sin Az2 ) − cot Dz1 (η cos Az 1 − ξ sin Az 1 )
Tant que Dz 1 et Dz 2 sont suffisamment proches de π 2 , cot Dz 1 et négligeables et il n'y a pas lieu de corriger une différence d'azimuts.
cot Dz 2 sont
Il faut garder à l'esprit que, si cot Dz n'est plus négligeable, alors la formule de Laplace ne peut pas être utilisée et doit être remplacée par la formule générale de Az g − Az a établie précédemment ; cela peut être le cas en zone de montagne, ou lors de mesures d'angles sur un ouvrage architectural ou industriel. 3
Triangles géodésiques
3.1 Approximation des sections normales
Après correction de la déviation de la verticale, un tour d'horizon fournit donc les différences d'azimuts géodésiques ∆ Az g entre les différents points de visées, c'est à
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COURS D ' INTRODUCTION À LA GÉODÉSIE
dire les angles entre les différentes sections normales à l'ellipsoïde à la station. Nous noterons dans ce paragraphe S i j la section normale en i passant par j. Soit M, P et Q les trois côtés d'un triangle géodésique. À la station M, la différence des deux visées vers P et Q est l'angle entre les deux sections normales S M P et S M Q . À la station P (respectivement Q), la différence des deux visées vers M et Q (resp. M et P) est l'angle entre les sections normales S P M et S P Q (resp. S Q M et S Q P ). Ces six courbes sont a priori toutes différentes. En effet, si i ≠ j , alors a priori S i j ≠ S ij . Pratiquement, il se démontre que, pour un triangle de quelques dizaines de km de côtés au maximum, la ligne géodésique passant par i et j ( Γ G i j ) se situe toujours entre les deux sections normales S i j et S ji , et que la différence d'azimuts ∆ S ji ,k entre deux visées en une station ( ∆ S ji ,k = S kj − S ij ) peut être confondue, à 10 −4 gr près au pire, avec la différence d'azimuts des géodésiques ∆ΓG i j,k = ΓGkj − Γ G ij . Il est donc légitime de considérer que, à la précision des observations près, les mesures d'angles horizontaux entre stations géodésiques forment des triangles sur l'ellipsoïde dont les côtés sont des arcs de lignes géodésiques. Cette approximation est appelée approximation des sections normales. ( Π ij : plan normal à l'ellipsoïde en i passant par j)
Π M
Q Π M
Q Π P
P
Π P Q
Q
Π M Q
P Π M
M
P
Fig. 5 : Observation d'un triangle géodésique
Didier BOUTELOUP / ENSG / 2002
VI-8
CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS M
Γ
P
G M
M
S P
P S M
Fig. 6 : Sections normales et ligne géodésique entre deux points
3.2
Représentation des triangles géodésiques en projection conforme
Les calculs de triangulation ont le plus souvent été réalisés non pas sur l'ellipsoïde (estimation des coordonnées géographiques des sommets des triangles), mais plutôt en représentation plane conforme (estimation des coordonnées en projection). Dans ce cas, il faut réduire les triangles géodésiques sur le plan de projection, c'est à dire établir la relation entre un triangle géodésique et son image en représentation : §
la représentation étant conforme, un triangle infiniment petit a ses angles conservés et ne subit qu'une homothétie de facteur µ,
à l'échelle de la Terre, les triangles géodésiques de quelques dizaines de km de côtés ne peuvent pas être considérés infiniment petits. Les lignes géodésiques représentant les côtés du triangle ne peuvent donc pas être assimilées à des droites et les angles intérieurs ne sont ainsi pas conservés. On appelle gisement, noté V, l'angle en projection entre l'axe des ordonnées et la droite reliant deux points m1 et m 2 . §
Soit γ G l'image de la ligne géodésique reliant les points m1 et m 2 . On note traditionnellement dV l'angle en m 1 entre γ G et la droite m1 m 2 . Remarque : l’image d’une géodésique tourne sa concavité vers l’isomètre central de la représentation. Nord
X=X const m
λ=λ const
2
γ Az V
G
dV
m
1
Fig. 7 : Ligne géodésique en représentation
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COURS D ' INTRODUCTION À LA GÉODÉSIE
Dans le cas particulier d'une représentation conique conforme de Lambert : Az = γ + V − d V , où γ représente la convergence du méridien, la correction d V est donnée par la formule de Schols que nous admettrons : §
§ §
d Vradians
1
1
2
µ1 3
= ×
×
s ( β1 3
− β0 )
N 0 ρ0
sin Az 1 3
avec : §
§
§
§
(respectivement ρ 0 et β 0 ) représentent la grande normale (resp. le rayon de courbure du méridien ρ et la distance à l'équateur β) calculés sur le parallèle automécoïque, s est la longueur de γ G entre m 1 et m 2 , µ 1 3 (resp. Az 1 3 et β 1 3 ) représentent le module linéaire µ (resp. l'azimut de γ G et la fonction β) calculés en m1 3 , point situé sur γ G entre m 1 et m 2 à la distance s 3 de m1 . Autre formulation approché : 0
d Vradians
=
sin ϕ1 3
− sinϕ 0
2 R1 3 sinϕ 0
⋅ De ⋅ sin Az
3.3 Réduction des distances
Au delà de quelques dizaines de mètres, les techniques de mesure de distances utilisées en géodésie sont de deux types : fil en invar : l'utilité de cet instrument s'est beaucoup réduite depuis la disponibilité des distancemètres électroniques à partir des années 1960. Cette technique fournissait la distance euclidienne D p 1 entre deux points de la surface terrestre. La §
précision relative obtenue §
δ D p D p
était de l'ordre de 10-5 à quelques 10-6 ,
distancemètre électronique : ces
instruments utilisent la propagation d'une onde électromagnétique dans l'atmosphère, que le présent cours n'étudie pas en détail. Un distancemètre électronique fournit donc le temps de parcours d'une onde entre deux points. À partir de cette observation on peut obtenir la distance euclidienne D p entre deux points. La précision relative est de l'ordre de 10−6 .
Pour pouvoir se servir de la modélisation de la Terre par un ellipsoïde, il faut transformer les distances spatiales D p en longueur sur l'ellipsoïde De . Les distances mesurées au fil invar ou au distancemètre étant toujours inférieures à 50 km environ, nous sommes autorisés, au niveau millimétrique, à confondre la ligne géodésique avec son cercle osculateur. 1. On l'appelle aussi de «distance selon la pente». Didier BOUTELOUP / ENSG / 2002
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CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
Appelons A et B les deux points de la surface terrestre et A 0 et B 0 leurs projections normales sur l'ellipsoïde. R désigne le rayon du cercle osculateur, C son centre et Dc la distance spatiale2 entre A 0 et B 0 . Cherchons Dc en fonction de D p , puis De en fonction de Dc . D
p
h A
De
A0
h B
D
0
c
R
α
R
C Fig. 8 : Réduction des distances à l'ellipsoïde
Si α est l'angle entre les vecteurs CA et CB , on a : 2 p
D
=
uuur uuur 2
AB ⋅ AB
=
(
uuur
AC + CB
En appliquant obtient : 2
Dc
uuu r
le
uuur
2
uuu r
) ⋅ ( AC + CB ) = ( R + h A ) + ( R + hB ) − 2cos α ( R + hA )( R + hB )
même
2
raisonnement
2
au
triangle
( A0 ,C , B0 ) ,
on
= R 2 + R 2 − 2cos α R2
En isolant cosα dans les deux équations, on arrive à : 2 R2 − Dc2 R 2
⇔
Dc2 R 2
2
2
=
2
( R + hA ) + ( R + hB ) − D p2 = ( R + h A )( R + hB )
D p2 − ( R + h A )
2
− ( R + hB ) + 2 ( R + h A )( R + hB ) ( R + h A )( R + hB ) 2
⇔
En conclusion :
Dc2 R
2
h A − hB − 1 2 D D p2 − ( h A − hB ) p 2 2 = ⇔ Dc = Dp 1 + h A 1 + hB ( R + h A )( R + hB ) R R 2
Dc
= Dp
h − hB 1 − A D p 1 + h A 1 + hB R R
2. D est aussi appelée «distance selon la corde». c Didier BOUTELOUP / ENSG / 2002
VI-11
COURS D ' INTRODUCTION À LA GÉODÉSIE
Il reste à déterminer s'écrire α = 2arcsin
D c 2 R
D e en
fonction de
arcsin x = x +
3
x
6
+
3 40
arcsin x
5
On sait que
sin
α 2
=
D c 2 R
, ce qui peut
et : D e
Le développement de
D c .
+L +
= α R = 2 R arcsin
D c 2 R
selon les puissances de x s'écrit : 3 × 5 ×L × (2n −1) x 2n+1 2 × 4 × L× (2n)
⋅
2n + 1
+L
On a donc : Dc Dc3 3 Dc5 Dc2 3 Dc4 + + ⋅ + + ⋅ + L = Dc 1 + L De = 2 R 3 5 2 4 2 R 48R 1280 R 24 R 640 R Or Dc < 5 ×10 4 m et R ≈ 6,4 ×10 6m d'où on tire les ordres de grandeurs suivants : Dc2 −6 24 R2 < 3 ×10 4 3 ⋅ Dc < 2 ×10 −11 640 R4
Le terme en
D c4 R
4
peut donc être négligé , puisque
D p est
connue au mieux à
10−6 près.
Nous retiendrons la formule dite de cor r ect ion de cour bur e : Dc2 De = Dc 1 + 2 24 R
En toute rigueur, il est nécessaire de connaître les hauteurs des stations A et B audessus de l'ellipsoïde h A et h B pour pouvoir réduire sur l'ellipsoïde la distance mesurée. Historiquement, les réductions ont été calculées en utilisant les altitudes H au lieu des hauteurs h. L'ordre de grandeur de l'erreur ainsi introduite est celui de h − H . En R
France métropolitaine, pour le calcul de la triangulation sur l'ellipsoïde Clarke 1880 IGN, l'erreur est toujours inférieure à 15 6 , soit 310 −6 . 6,4 ×10
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VI-12
CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
4
Réalisation des réseaux géodésiques bidimensionnels
4.1 Principe d'élaboration
On appelle point f ondament al d'un réseau un point où, un ellipsoïde géodésique ayant été préalablement choisi, par convention : λa = λg ϕ = ϕ a g
En général, on fixe conventionnellement aussi la hauteur du point fondamental par (ortho) rapport à l'ellipsoïde en posant : h point fond. = H point fond. Remarquons qu'il est équivalent de dire qu'au point fondamental, par convention, le géoïde et l'ellipsoïde sont parallèles, voire tangents si h = H (o) . Autrement dit, cela correspond à faire subir à l'ellipsoïde de référence un mouvement de translation et de rotation dans l'espace, afin d'annuler la déviation de la verticale au point fondamental. Géoïde
Ellipsoïde tangent au géoïde en P f
Ellipsoïde géocentrique P
f
ϕ g
ϕ a
T
Fig. 9 : Utilisation d'un point fondamental
La plupart des réseaux bidimensionnels sont construits à partir d'un point fondamental. Puis, les coordonnées des autres points se déduisent de celles du point fondamental par la mesure d'au moins une distance (appelée mesure de base) et par triangulation (mesures terrestres d'angles). À titre d'illustrations, le point fondamental du réseau national de triangulation en France métropolitaine, la Nouvelle Triangulation de la France
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VI-13
COURS D ' INTRODUCTION À LA GÉODÉSIE
(NTF) est l'axe de la croix surplombant le Panthéon à Paris, et le point fondamental du
réseau allemand de triangulation principale DHDN 3 est la Tour Helmert à Potsdam.
Les observations sont toujours faites en nombre surabondant, afin de renforcer et de vérifier le réseau : mesures de plusieurs bases, observations angulaires redondantes, éventuellement observations de points de Laplace : on appelle ainsi un point du réseau (donc muni de coordonnées λ g et ϕ g ) où sont de plus déterminés les coordonnées astronomiques λ a et ϕ a et l'azimut Az a d'une direction. Ainsi, en tel point, la déviation de la verticale est estimée et l'azimut astronomique peut être corrigé. L'orientation du réseau peut y être vérifiée. La surabondance est traitée par estimation par moindres carrés § §
§
De tels réseaux sont bidimensionnels dans la mesure où les observations utilisées ne permettent pas de déterminer les hauteurs par rapport à l'ellipsoïde h. En général, la détermination d'un tel réseau bidimensionnel est associée à l'élaboration d'un réseau d'altitudes. Les réseaux bidimensionnels réalisés selon ce processus sont entachés d'imprécisions caractéristiques : l'échelle de tout le réseau dépend de la mesure de quelques bases courtes. L'imprécision relative (quelques 10 -6) reste constante sur l'ensemble du réseau, les calculs ont souvent été expédiés, faute de capacité de calculs suffisante. Par exemple, en France, l' imprécision relative de la NTF est évaluée à 10 -5, ce qui représente 1 cm d'erreur entre deux points distants de 1 km (ou 10 m pour 1000 km). §
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4.2
Référentiels et systèmes géodésiques
Un défaut majeur des réseaux bidimensionnels est le caractère non-géocentrique de leurs coordonnées. En effet, l'usage d'un point fondamental revient implicitement à déplacer l'origine O du repère R . On appelle référentiel géodésique R = (O;i,j,k) un repère affine de l'espace tel que : • est à peu près au centre de gravité de la Terre, i = j = k et i vaut environ 1, (i j , ,k ) est une base orthogonale directe respectant à peu près l'orientation suivante : (O;k ) est parallèle à l'axe de pôles, (O;i ,k ) est confondu avec le plan méridien de Greenwich . On appelle système géodésique la réalisation numérique d'un référentiel géodésique. §
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3. Deutsche Hauptdreiecknetz. Didier BOUTELOUP / ENSG / 2002
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CHAPITRE VI : REALISATION DE RESEAUX GEODESIQUES BIDIMENSIONNELS
Les référentiels et systèmes géodésiques sous-jacents aux réseaux bidimensionnels ne sont pas exactement géocentriques; leur origine peut être éloignée du centre de gravité terrestre jusqu'à couramment quelques centaines de mètres, et au pire, 2000 m. Un système bidimensionnel est caractérisé comme il suit : • les coordonnées et l'azimut au point fondamental en fixent l'origine et l'orientation, • les mesures de bases déterminent le facteur d'échelle, c'est à dire la norme exacte des trois vecteurs de base. Deux réseaux basés sur deux points fondamentaux distincts réalisent donc deux systèmes géodésiques a priori différents. L'étude des systèmes géodésiques et des transformations entre systèmes est un pointclef de la géodésie moderne.
Didier BOUTELOUP / ENSG / 2002
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