Chapitre 35
La pratique de l'évaluation de l'entreprise �
L'avenir est L'avenir est il il toujours toujours rose ? 35:1
Sans s'en apercevoir, notre lecteur a déjà acquis l'ensemble des outils financiers qui lui seront nécessaires pour mener à bien une valorisation. Il a appris les bases de la méthode d'actualisation des flux de trésorerie aux chapitres 19 et 23 et a découvert la méthode des multiples au cha pitre 26 26.. Dans ce chapitre, nous mettrons en forme ces connaissances et aborderons des problèmes concrets auxquels il sera probablement confronté. Toutefois, il nous faut souligner que l'évaluation est un « sport complet » et qu'un bon évaluateur devra maîtriser, au-delà des outils financiers que nous présentons, une culture comptable, juridique, fiscale. Il devra également comprendre suffisam ment l'activité de la société à évaluer pour être en mesure de porter un jugement sur les projections financières. La compréhension de ce chapitre ne sera donc qu'une première étape dans un savoir- faire qui ne peut s'acquérir qu'à force de pratique.
Section 1 35:2
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Aperçu des différentes méthodes
La pratique de l'évaluation a généralement pour ambition d'aboutir à une valorisation des actions et/ou à une valeur des capitaux capitaux propres propres de l'entreprise. Les capitaux capitaux propres propres peuvent être évalués de façon indirecte, c'est-à-dire en évaluant d'abord la valeur de l'actif économique puis en retranchant la valeur de l'endettement net . Ils peuvent l'être aussi de façon directe, sans passer par l'intermédiaire de la valeur de l'actif l'actif économique. économique. 1
1 Après ajustements que nous verrons aux paragraphes 35 12 à 35 16 et que nous laissons de côté pour l'instant
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
L'évaluation par actualisation des flux de trésorerie disponibles (méthode DCF) Section 2 35:4
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La méthode DCF consiste à appliquer, pour le calcul de la valeur de l'actif l'actif économique, économique, les tech niques de choix choix des des investissements (chapitre 32) 32).. C'est la méthode d'évaluation fondamentale. Elle permet d'évaluer la valeur de l'actif l'actif économique. économique. Déduction faite de la valeur de l'endettement net, l'évaluateur obtiendra la valeur des capitaux capitaux propres. propres. Globalement, la valeur de marché de l'entreprise, ou valeur de l'actif l'actif économique, économique, est égale à la somme des flux flux de de trésorerie disponibles après impôt (FTD) actualisés au taux taux de de rentabilité exigé en moyenne par l'ensemble des pourvoyeurs de fonds (le coût moyen pondéré du capital, k) : 1 X FTDi V ¼ i i 0 ð1 þ kÞ Cette formule suppose la détermination des flux flux de de trésorerie disponibles chaque année jusqu'à l'infini. Ceci est une tâche surhumaine et l'évaluateur sera donc amené à faire des hypothèses simplificatrices. Plus précisément, on procède à la prévision de flux flux de de trésorerie que l'on actualise pendant un certain nombre d'années appelé horizon explicite variable selon les secteurs (5 à 7 ans pour les biens de consommation, 20 à 30 ans dans les services aux aux collectivités collectivités ) et on borne valeur terminale terminale . l'horizon par une valeur …
1
La valeur de l'actif l'actif économique économique est la somme de la valeur actuelle des flux flux de de trésorerie après impôt sur l'horizon explicite et de la valeur actuelle de la valeur terminale retenue à la fin de l'horizon explicite.
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L'estimation des flux flux de de trésorerie disponibles
Les flux flux de de trésorerie disponibles mesurent les flux flux dégagés dégagés par l'actif l'actif économique. économique. Ils se calculent de la façon suivante : Explications
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–
–
Excédent brut d'exploitation Impôt sur les sociétés théorique calculé sur le résultat d'exploitation Variation du besoin en fonds de roulement Investissements nets des désinvestissements Flux de Flux de trésorerie disponible
On raisonne au niveau de l'exploitation uniquement Égal au résultat d'exploitation multiplié par le taux taux moyen moyen de l'impôt sur les sociétés Pour pouvoir passer d'agrégats comptables à un flux flux de de trésorerie L'entreprise vit et se développe …
Une entreprise s'achète pour son avenir, et non pour son passé, aussi glorieux glorieux soit-il. soit-il. La prise en compte de ces flux se fait donc sur la base de projections. Ces flux flux étant étant différents selon les hypothèses de croissance retenues, il est prudent de construire plusieurs scénarios qui, sans sur prise, seront différents selon l'acheteur et le vendeur ! L'objet de la négociation sur le prix prix de de vente est, à l'évidence, de rapprocher ces deux points de vue ; notre expérience est que la méthode 1 Aussi appelée valeur finale
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Partie 3
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La valeur
« DCF » peut être un bon outil de dialogue en aidant le vendeur à se faire à l'idée de vendre et l'acheteur à mieux comprendre l'entreprise en vente. Notre lecteur a-t-il déjà rencontré un plan d'affaires pessimiste ? Quoi qu'il en soit, la prévision doit être cohérente : l'évolution de la concurrence pèse sur les marges et la croissance de la rentabilité ne peut être assurée durablement sans investir ou sans embaucher L'évaluateur entre donc dans l'intimité stratégique de l'entreprise en essayant de quantifier les grandes évolutions à venir. …
35:6
a) L'horizon des prévisions du plan d'affaires ou l'horizon explicite La durée du plan d'affaires dépendra de la « visibilité » de l'entreprise, c'est-à-dire de l'horizon raisonnable de prévision. En effet, dans 10 ans, les résultats dégagés par l'entreprise ne résulteront probablement qu'en faible partie de l'outil actuel. L'entreprise sera devenue un mélange hétérogène de ses caractéristiques actuelles et de ce qu'en aura fait l'acquéreur. La durée doit donc correspondre au temps durant lequel l'entreprise vivra sur sa lancée actuelle. Trop courte (2 à 3 ans), cette durée accorde une importance considérable à la valeur terminale et ne fait que repousser le problème posé. C'est malheureusement le cas le plus fréquent. Trop longue (au-delà de 10 ans dans la plupart des secteurs), elle se ramène à une simple extrapolation théorique sans grand intérêt. Confrontés à un plan d'affaires court (2 à 3 ans), certains l'extrapoleront sur quelques années supplémentaires, prolongeant les tendances qui se dessinaient. Reprenons l'exemple de Latécoère dont nous avons fait l'analyse financière (chapitres 4, 5, 9 à 15) et le tableau de bord boursier (chapitre 26). À titre illustratif, nous utilisons ici certaines données prévues par des analystes boursiers : 1
2
Chiffre d'affaires EBE Dotations aux amortissements Résultat d'exploitation Immobilisations + BFR Actif économique Marge d'exploitation après impôt de 25 % Rentabilité économique après impôt de 25 % –
2012
2013e
2014e
2015e
2016e
2017e
581 45 12 34 123 456 579 4,4 % 4,4 %
616 51 12 39 120 483 603 4,7% 4,9%
658 66 12 54 118 516 634 6,2 % 6,4 %
698 78 12 66 117 547 664 7,1 % 7,5 %
730 83 12 71 117 561 678 7,3 % 7,9 %
733 88 12 76 117 575 692 7,8 % 8,2 %
e : estimation.
Notre lecteur remarquera que les projections sont raisonnablement prudentes. Elles parient sur une poursuite du redressement assez lente puisque ce n'est qu'en 2015 que le chiffre d'affaires de 2008 est retrouvé. Même en fin de période (2017), Latécoère ne gagne pas encore son coût du capital de 10 %.
1 Le business plan des Anglo-Saxons 2 Extraites principalement de l'imagination des auteurs de cet ouvrage Il ne s'agit donc pas du plan d'affaires de Latécoère
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
Le calcul des flux de trésorerie prévisionnels après impôt s'établit de la façon suivante : En M €
2013e
2014e
2015e
2016e
2017e
39
54
66
71
76
Résultat d'exploitation –
Impôt sur les sociétés
+
Dotations aux amortissements
12
–
Investissements
–
–
Variation du BFR
–
–
10
–
14
–
12
17
–
12
18
–
12
19 12
9
–
10
–
11
–
12
–
12
27
–
33
–
31
–
14
–
14
Flux de trésorerie disponible
5
10
20
39
43
e : estimation.
Sur la base d'un coût moyen pondéré du capital de 10 %, la valeur actuelle à fin 2012 des flux de trésorerie après impôt de l'horizon prévisionnel explicite ressort à 81 M €. Notons que certains praticiens actualisent les flux sur des demi-années, la formule devenant alors : V ¼
1 X
i
FTDi i 1 ð1 þ kÞ
05 ;
Ceci suppose que le flux est « en moyenne » touché à mi-année et que l'évaluation est conduite en début ou en fin d'année.
b) La valeur terminale à retenir 35 7 :
Il est très difficile d'estimer la valeur terminale car elle est définie à la date où les prévisions de développement ne sont plus pertinentes. Aussi l'analyste considère-t-il souvent que l'entreprise entre en phase de maturité au terme de l'horizon explicite. La valeur terminale la plus couramment utilisée est fondée sur un taux (g) de croissance à l'infini d'un flux normatif (formule de Gordon-Shapiro, voir chapitre 19) : Valeur de l’entreprise en fin d’horizon explicite =
Flux normatif k–g
Toute la difficulté se concentre donc sur le choix du flux terminal et du taux de croissance à l'infini. Le flux normatif doit être cohérent avec les hypothèses retenues lors de l'étude du plan d'affaires. Il dépend de la croissance à long terme, de la politique d'investissements et de l'évolu tion du BFR de l'entreprise. Enfin, il peut ne pas être identique au dernier flux du plan d'affaires en particulier (i) dans des secteurs cycliques car il représente alors le flux moyen que l'entreprise devrait générer de l'horizon explicite jusqu'à l'infini, (ii) si la croissance prévue pour la dernière année de l'horizon explicite diffère sensiblement de la croissance à l'infini. Concernant le taux de croissance à l'infini, il faut garder la tête froide :
35 8 :
au-delà de la croissance à l'infini du flux de trésorerie normatif, c'est la croissance à long terme de la rentabilité économique et de l'activité sur laquelle il convient de s'interroger. Quelle est la pérennité de la rente ? La croissance du marché est-elle durable ? ▪
mais surtout, le taux moyen de croissance à l'infini d'une entreprise ne peut pas être significative ment supérieur au taux de croissance à long terme de l'économie. Ainsi, si le taux d'inflation anticipé à long terme est de 2 % et que la croissance réelle anticipée de l'économie à long terme est de 2 %, ▪
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La valeur
choisir un taux de croissance à l'infini supérieur à 4 % revient à dire que l'entreprise va prendre toujours plus de poids dans l'économie. Ceci est totalement irréaliste . Dans le cas de Latécoère, le flux normatif doit être calculé en 2018 car on souhaite obtenir la valeur actuelle à fin d'année 2017, de la période 2018 à l'infini. À titre d'exemple et compte tenu de la nécessité d'investir pour continuer à croître, l'évaluateur pourrait retenir les hypothèses sui vantes pour établir le flux normatif : 1
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+
–
–
Résultat d'exploitation normatif 2018 Impôt sur les sociétés à 25 % Dotations aux amortissements Investissements Variation du BFR Flux de trésorerie disponible normatif 2018
–
–
–
81 20 12 12 12 49
En retenant un taux de croissance à l'infini de 2 %, on calcule une valeur finale de 616 M € qui, actualisée sur 5 années , ressort à 382 M €. La valeur de l'actif économique de Latécoère s'établit donc à 81 382 soit 463 M €. Notons que la valeur finale de 616 M € à fin 2017 correspond à un multiple de 8,1 fois le résultat d'exploitation 2017. Ceci signifie que choisir dans cet exemple un multiple de 8,1 ou retenir une croissance à l'infini du flux normatif de 2 % par an sont deux hypothèses équivalentes compte tenu du taux de rentabilité exigé (10 %). Compte tenu d'un endettement bancaire et financier de 391 M €, la valeur des capitaux propres de Latécoère ressort, avec cette méthode, à 72 M €. Nous voyons des évaluateurs calculer la valeur terminale sur la base de multiples de soldes de gestion : multiple du chiffre d'affaires, de l'excédent brut d'exploitation et du résultat d'exploitation. Généralement, ce « multiple de sortie » est inférieur au multiple équivalent constaté aujourd'hui sur le marché. En effet, il est fait l'hypothèse que, toutes choses égales par ailleurs, les perspectives de croissance devraient décroître au fil du temps, ce qui induit une diminution du multiple. Nous 2
+
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déconseillons totalement cette méthode qui est par nature contradictoire avec la méthode intrinsèque et qui laisse une très large part d'arbitraire dans le choix du multiple à retenir.
Calculer la valeur terminale comme l'actualisation d'un flux, et encore plus à partir d'un multiple, n'est pas sans danger car cela revient à faire l'impasse d'une réflexion sur le niveau de rentabilité économique atteint par l'entreprise à la fin de la période explicite et de la pérénité de cette rentabilité. Notre lecteur doit savoir que si la valeur terminale qu'il a calculée est une valeur supérieure au montant comptable de l'actif économique comptable en dernière année de l'horizon explicite, cela signifie qu'il anticipe le maintien pendant une certaine période, voire à l'infini, d'une rentabilité économique supérieure au coût moyen pondéré du capital. S'il retient une valeur inférieure, cela signifie qu'il considère que l'entreprise entre dans une phase de déclin au-delà de l'horizon explicite et qu'il pense qu'elle ne pourra pas gagner son coût du capital. Enfin, lorsque la valeur terminale est égale à l'actif économique comptable, ceci revient à supposer que cette rente s'arrête net. C'est le cas notamment dans le secteur minier lorsqu'on estime une valeur de liquidation égale à la somme 1 D'autant que l'on observe dans les secteurs à maturité une inflation inférieure à celle de l'économie en général 2 Pour nous ramener de 2017 à fin 2012
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La valeur
Notre lecteur devra faire plusieurs choix relativement arbitraires : durée de la période du cash flow fade , vitesse du retour de la rentabilité économique au niveau du coût du capital (forme de la courbe de rentabilité économique : convexe, concave, droite comme dans notre schéma). Il pourra aussi estimer, compte tenu de la position stratégique de l'entreprise, que celle-ci devrait être capable, à l'horizon de la valeur finale, de gagner 1 ou 2 points de plus que son coût du capital. Qu'il sache cependant qu'il n'a pas alors la théorie économique à ses côtés ! Notons enfin que ce modèle peut également être utilisé théoriquement pour une société qui, chroniquement, détruit de la valeur. Le raisonnement est alors de dire que le secteur ne peut durable ment rester dans cette situation et qu'une modification structurelle aura lieu tôt ou tard (soit par la faillite des concurrents les moins performants, soit par une concentration du secteur). Mais avant d'appliquer la méthode du cash flow fade « à l'envers » pour cette société (c'est-à-dire en prévoyant une croissance des flux se fondant sur une croissance de la rentabilité économique qui finit par rejoindre le coût du capital), notre lecteur devra impérativement se demander si la société qu'il est en train de valoriser fera bien partie des survivantes !
2 35:11
Le choix du taux d'actualisation
Comme nous l'avons vu, le taux d'actualisation est le coût moyen pondéré du capital (CMPC ou WACC en anglais), ou coût du capital. Son estimation est l'un des points les plus délicats de l'approche par les flux car les taux d'actualisation « analytiques » ou de convenance, utilisés par certains groupes industriels, ne permettent pas d'aboutir à une valeur de marché. Le coût moyen pondéré du capital est le taux de rentabilité minimal exigé par les pourvoyeurs de fonds (action naires, créanciers) pour financer les projets d'une entreprise. Toute la difficulté réside dans l'estimation pratique de ce coût moyen pondéré du capital. Nous renvoyons notre lecteur au chapitre 33 consacré à ce sujet.
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La valeur de l'endettement bancaire et financier net
De la valeur de l'actif économique obtenu avec la méthodologie décrite ci-dessus, il convient de retrancher la valeur de l'endettement net. Celui-ci se compose de l'ensemble des dettes bancaires et financières (à court, moyen ou long terme), de la valeur des instruments de couverture éventuellement mis en place sur ces dettes bancaires et financières, auxquels il faut retrancher les disponibilités et les valeurs mobilières de placement. La valeur de l'endettement net est théoriquement égale à la valeur actuelle des flux futurs à payer (les intérêts et le capital) actualisés au coût de marché de la dette. La valeur de marché des placements financiersvient en déduction.Lorsque tout ou partie de la dette est cotée ou échangéesur un marché de gré à gré (obligationscotées, crédit syndiqué),la valeur de marché de cette dette pourra être retenue . Il est fréquent d'utiliser le montant comptable de l'endettement net comme première approxima tion de sa valeur financière. Cependant, dans certains cas, la valeur de la dette peut s'écarter significativement de son montant comptable : lorsque l'entreprise s'est endettée à taux fixe (directement ou après l'effet d'un swap ) et que les taux d'intérêt ont varié depuis ; 1
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1 Elle peut aussi être calculée si des dérivés de crédit (CDS) existent pour cette entreprise
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
lorsque la solvabilité de l'entreprise a significativement évolué à la hausse ou à la baisse depuis la levée de la dette sans qu'il y ait eu réajustement de la marge d'intérêt payée ; lorsque le taux facial de la dette a été artificiellement minoré par l'adjonction de bons de souscrip tion ou d'autres produits détachables après l'émission de la dette (pour les comptes en normes françaises). Aussi conseillons-nous au lecteur, lorsque l'endettement est significatif et que l'écart entre la valeur de la dette et son montant comptable l'est aussi, de raisonner en valeur et non en montant comptable de la dette. Ainsi fin 2011, la dette de Pages Jaunes était en montant comptable de 1 925 M € pour une valeur financière de 1 299 M €, soit un écart de 626 M € représentant sa capitalisation boursière, ce qui n'est pas une paille ! Lorsque l'activité de l'entreprise à évaluer est saisonnière, le montant du besoin en fonds de roulement en fin d'année peut ne pas refléter le montant moyen du besoin en fonds de roulement. L'endettement apparaissant au bilan de clôture ne reflétera donc pas le niveau moyen d'endette ment tout au long de l'année. Le rapport entre les frais financiers affichés au compte de résultat et le montant de la dette fera apparaître un taux d'intérêt anormalement haut ou bas. L'évaluateur devra alors corriger le montant de la dette et retenir une moyenne (mensuelle par exemple). Par ailleurs certains éléments peuvent venir compliquer l'appréciation du niveau réel d'endet tement. Ainsi les actifs sortis du bilan par titrisation ou affacturage nécessitent d'être réintégrés dans l'endettement (voir chapitre 8). Enfin, certains vendeurs chercheront à « habiller le bilan » afin de faire apparaître un niveau très faible d'endettement net ! ▪
▪
1
4 35:13
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Les autres éléments de la valorisation
a) Les provisions Le traitement des provisions pour risques et pour charges doit être cohérent avec celui des flux : si le plan d'affaires utilisé n'intègre pas les dépenses futures qui ont déjà été provisionnées (restructura tion, fermeture d'un site ), le stock de provisions pour risques et pour charges correspondant doit être déduit de la valeur de l'actif économique pour leur valeur actuelle. La prise en compte des engagements de retraite représente un problème épineux (traité au paragraphe 8.28). Leur traitement dépendra de leur mode de comptabilisation et il convient d'ana lyser si le plan d'affaires prend en compte ou non les charges de retraite futures. Par ailleurs, il ne faut pas oublier la situation actuelle résultant des engagements passés et des actifs de couverture dont le solde doit être traité comme de la dette et donc soustrait de la valeur de l'actif économique. Sauf exception, les impôts différés sont généralement des montants relativement stables et ne sont en pratique jamais déboursés. Ils ne doivent pas être considérés comme de la dette ou comme un actif (voir paragraphe 8.54), modulo les reports fiscaux déficitaires traités au paragraphe 35.15. b) Les participations non consolidées ou mises en équivalence La valeur des participations financières ou des actifs non consolidés (ou mis en équivalence), dont les flux (dividendes) n'apparaissent pas dans les flux de trésorerie disponibles, s'ajoutera à la valeur de …
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1 Voir La Lettre Vernimmen net avril 2003, n 18 o
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La valeur
l'actif économique. On retiendra alors la valeur de marché de ces biens tout en tenant compte, le cas échéant , de la fiscalité sur les plus et moins-values. Pour les titres cotés, la valeur boursière est prise en compte. En revanche, pour les participations non cotées de faible importance, la valeur comptable est souvent retenue par souci de raccourci. Cependant, dans le cas où la société détient des participations importantes (ce sera notamment le cas pour certaines sociétés mises en équivalence), une analyse de valorisation spécifique devra être menée sur la filiale. Celle-ci pourra être simple, comme l'application d'un PER du secteur à la quote-part de résultat net, ou plus poussée avec une vraie analyse multicritères si l'informationest disponible. c) Les reports fiscaux déficitaires La valeur des éventuels reports fiscaux déficitaires utilisables pourra être estimée séparément en actualisant les économies d'impôts au coût du capital jusqu'à son utilisation intégrale. Alter nativement, leur utilisation pourra être simulée dans le calcul des flux de trésorerie disponibles en ne retenant l'impôt théorique que pour la période après que les reports fiscaux aient été épuisés. 1
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d) Les intérêts minoritaires Les flux de trésorerie disponibles calculés à partir du compte de résultat et du tableau de flux consolidés reviennent pour partie au groupe et pour partie aux intérêts minoritaires. La valeur ainsi calculée n'est donc pas seulement attribuable aux actionnaires de la maison mère. Pour remédier à ce biais, il convient de déduire de la valeur d'entreprise la valeur des intérêts minoritaires. Si les intérêts minoritaires sont importants, notre lecteur devra évaluer à part la valeur des capitaux propres de la filiale concernée et la retrancher à la valeur du groupe à hauteur de la quote-part des minoritaires. Mais ceci nécessite bien sûr d'avoir une information détaillée sur cette filiale. Sinon, il devra pour le moins déduire la valeur comptable des intérêts minoritaires.
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Une approche simple par multiples pourra aussi être retenue. En simplifiant à l'extrême, le PER implicite du groupe pourra être appliqué au résultat net revenant aux minoritaires pour avoir une première idée de la valeur des intérêts minoritaires. Alternativement, le PBR implicite du groupe pourra être appliqué aux intérêts minoritaires apparaissant au bilan. Nous ne conseillons pas de retenir pour valeur des intérêts minoritaires le montant comptable qui figure au bilan, sauf si les montants en question sont faibles ou que la rentabilité économique est égale au coût du capital. e) Les instruments pouvant entraîner une dilution du capital Le lecteur pourra s'interroger sur la façon de traiter les instruments donnant accès à terme au capital (obligations convertibles, BSA, stock-options ). Nous lui conseillons de les soustraire en valeur de marché de la valeur de l'actif économique, au même titre que l'endettement net, pour aboutir à la valeur des capitaux propres. Le nombre d'actions à prendre en compte pour déterminer la valeur de l'action est alors le nombre d'actions en circulation aujourd'hui. L'évaluateur pourra utiliser la méthode des treasury shares (voir paragraphe 26.39) pour calculer le nombre d'actions qu'il utilise pour aboutir à la valeur par action. Elle présente l'inconvé nient d'ignorer l'impact de ces instruments actuellement hors de la monnaie. …
1 S'ils sont destinés à être vendus tôt ou tard
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
Intérêt et limites de l'approche par les flux
L'intérêt de cette méthode est de traduire concrètement en termes chiffrés les différentes hypo- thèses et prévisions, souvent implicites, des acheteurs et des vendeurs. Par ailleurs, elle permet de garder une grande sérénité face à des périodes d'euphorie, de surévaluations boursières et de fascination de multiples élevés. Elle ramène en effet à la réalité des performances économiques de l'entreprise.
Le lecteur pourrait penser que cette méthode ne concerne que l'évaluation majoritaire et qu'elle n'a rien à voir avec la valeur des flux actualisés des dividendes que perçoit l'actionnaire. Il pourrait même faire un pas supplémentaire et appliquer à la valeur actuelle des flux futurs, lorsqu'il évalue une participation minoritaire, une décote de minoritaire. Ceci est erroné ! Appliquer une décote de minoritaire à la méthode des flux actualisés implique que l'on considère que le majoritaire ne sera pas à même de gérer l'entreprise correctement . On estime donc qu'il y aura des « pertes en ligne » entre les flux de trésorerie disponibles et les dividendes du fait d'une mauvaise politique de dividendes, d'autofinancement, d'investissement et d'endettement Si l'on utilise cette méthode, on ne peut appliquer de décote de minoritaire, ce serait incohérent. De même, une majoration de la valeur trouvée ne peut se justifier que si l'investisseur peut faire valoir des synergies susceptibles d'accroître les flux disponibles. Pour conclure, soulignons que cette méthode théoriquement satisfaisante présente cependant trois inconvénients majeurs : …
elle est très sensible aux hypothèses retenues et à l'objectivité de celui qui les a établies. Dès lors, ses résultats sont très volatils. C'est une méthode rationnelle, mais ce problème peut la rendre biaisée ; ▪
elle dépend parfois trop de la valeur finale, sur laquelle le problème se trouve en définitive reporté. La valeur finale explique souvent plus de 50 % de la valeur de l'entreprise. Ceci peut remettre en cause la validité de la méthode, cependant c'est parfois la seule applicable (lorsque les résultats sont négatifs et que les multiples sont donc inapplicables) ; enfin, il n'est pas toujours aisé de réaliser un plan d'affaires sur une période suffisante : l'infor mation fait souvent défaut pour l'analyste externe. ▪
▪
6 Actualisation des flux de trésorerie disponibles pour l'actionnaire et actualisation des dividendes �
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Avant la généralisation de l'évaluation par les flux de trésorerie disponibles, l'entreprise était sou vent évaluée par l'actualisation des dividendes à un taux d'actualisation qui correspond au taux de rentabilité exigé par l'actionnaire qui reçoit le dividende, kcp (le coût des capitaux propres). Cette méthode est tombée en désuétude car elle est très difficile à mettre en uvre si la structure financière, et donc le coût des capitaux propres, varient au cours du temps, ce qui est le 1
œ
1 Technique que les Anglo-Saxons appellent Discounted Dividend Model (DDM)
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La valeur
cas le plus fréquent. C'est en revanche la méthode reine pour évaluer les banques dont la structure financière évolue peu compte tenu des contraintes réglementaires qui pèsent sur elles . Elle est aussi appliquée dans des cas très particuliers où l'entreprise à évaluer est dans un secteur mature et dispose d'une très bonne visibilité (secteur des services publics, concessions, sociétés foncières ) avec un taux de distribution des dividendes très élevé. Dans cette même logique, on peut aussi calculer la valeur des capitaux propres d'une entreprise en actualisant le flux de trésorerie disponible qui revient à l'actionnaire . Ce flux correspond aux flux de trésorerie disponibles du paragraphe 35.5, majorés de la variation de l'endettement bancaire et financier net et majorés de la différence entre les produits et les frais financiers après impôt. 1
2
…
3
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La méthode des multiples
Présentation
L'approche par les multiples est fondée sur trois grands principes : l'entreprise est évaluée globalement ; l'entreprise est évaluée pour un multiple de sa capacité bénéficiaire ; les marchés sont à l'équilibre et des comparaisons sont donc justifiées. Cette approche est globale parce qu'elle s'attache, non à la valeur des actifs et des passifs d'exploitation, mais à la rentabilité qui découle de leur utilisation. Elle se fonde sur la capitalisation de différents paramètres de rentabilité de l'entreprise. Comme nous l'avons vu au chapitre 26, le multiple dépend de la croissance attendue, du risque et du niveau des taux d'intérêt. ▪
▪
▪
Le multiple est d'autant plus élevé que les perspectives de croissance sont fortes, que le secteur d'activité de l'entreprise est peu risqué et que le taux d'intérêt exigé est faible. Cette approche est comparative : à un moment donné, et dans un pays donné, on achète une
entreprise à un prix plus ou moins élevé (par exemple multiple du résultat d'exploitation plus ou moins élevé) en fonction de ses paramètres internes et de la conjoncture boursière générale. Les acquisitions d'entreprises ne se sont pas effectuées en Europe aux mêmes prix en 2013, période à laquelle les multiples boursiers du résultat d'exploitation étaient faibles (de l'ordre 7 à 8), qu'en 1980 où ils étaient encore plus faibles (environ 4), ou en 2000, année caractérisée par des multiples élevés (12 à 15). Les multiples calculés peuvent être issus d'un échantillon d'entreprises cotées comparables ou d'un échantillon d'entreprises ayant été cédées récemment, et pour lesquelles une valeur de capi 1 Ratio de solvabilité 2 Voir l'article de J -P Colle et R Jacquemard disponible sur le site www vernimmen net 3 Free cash flow to equity
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
taux propres a donc été extériorisée. On parlera alors de multiples boursiers et de multiples de transactions. Les premiers sont à retenir pour évaluer les actions de l'entreprise sans changement de contrôle. Les seconds sont utiles pour déterminer la valeur des capitaux propres en cas de changement de contrôle.
2 35:21
�
La constitution d'un échantillon d'entreprises comparables
L'approche comparative ou analogique repose avant tout sur la constitution d'un échantillon d'entreprises cotées comparables qui présentent les mêmes caractéristiques sectorielles, voire géo graphiques, mais surtout d'exploitation : niveau de rentabilité économique, croissance attendue Étant donné que le multiple est généralement calculé sur des projections à court terme, les entre prises choisies devront en outre avoir des titres cotés liquides et être suivies par des analystes financiers de façon à pouvoir exploiter les prévisions disponibles. …
3 35:22
�
Les différents multiples
Deux grandes familles de multiples peuvent être distinguées : les multiples permettant d'établir la valeur de l'actif économique et ceux permettant d'établir directement la valeur des capitaux propres. Les multiples permettant d'établir la valeur de l'actif économique sont des multiples d'agrégats avant frais financiers. Le multiple le plus pertinent est le multiple du résultat d'exploitation (multiple d'EBIT en anglais), le multiple de l'excédent brut d'exploitation (multiple d'EBITDA en anglais) est aussi fréquemment utilisé. 1
Les multiples permettant d'établir la valeur des capitaux propres sont calculés sur des agrégats après frais financiers. Il s'agit principalement du multiple de résultat net (le PER), mais également le multiple de la capacité d'autofinancement, le multiple du résultat courant, et le multiple des capitaux propres (le PBR). 35:23
a) Les multiples permettant d'établir la valeur de l'actif économique Quel que soit le multiple retenu, il convient de déterminer une valeur d'actif économique pour chaque société cotée comparable. Cette valeur se calcule comme la somme de la capitalisation boursière et de la valeur de l'endettement net à la date de l'évaluation et des autres ajustements présentés aux paragraphes 35.12 à 35.16. En tout état de cause, il convient d'être cohérent : on ajoutera à la valeur de l'actif économique une participation minoritaire qui ne contribue pas au résultat d'exploitation ou à l'EBE. Si le déficit des plans de retraite est pris en compte dans le calcul de la valeur de l'actif économique, on s'assurera que ni l'EBE ni le résultat d'exploitation ne comprennent la fraction de la dotation aux provisions de retraite correspondant au passage du temps , etc. 2
1 Idéalement, il conviendrait de prendre un résultat d'exploitation après impôt Ceci est rarement fait et ne porte pas à conséquence dès lors que les taux d'impôt sont à peu près les mêmes pour toutes les sociétés de l'échantillon
2 L'interest cost des Anglo-Saxons
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Partie 3
�
La valeur
Il s'agit alors de calculer les multiples des sociétés comparables cotées sur 3 exercices (dernier exercice clos, exercice en cours, prochain exercice). Notons que l'on garde la même valeur de l'actif économique pour les 3 exercices car la valeur de marché des entreprises comparables à la date de l'évaluation résulte de l'anticipation de l'évolution des soldes d'exploitation dans le futur . Les multiples les plus souvent utilisés dans ce domaine sont : 1
▪
35:24
Le multiple du résultat d'exploitation
Le multiple du résultat d'exploitation rapporte la valeur de l'actif économique au résultat d'exploitation. Il permet de prendre en compte la capacité bénéficiaire d'exploitation des différentes entreprises.
Ce qui est évalué, en effet, c'est la capacité bénéficiaire d'exploitation de l'entreprise, hors charges ou produits non récurrents, hors prélèvements. Il s'agit de définir une rentabilité nor mative récurrente d'exploitation. Il peut s'avérer nécessaire de procéder à un ensemble de retraitements pour calculer ce résultat d'exploitation. Nous nous permettons de renvoyer notre lecteur au chapitre 10 où ces questions ont été étudiées. Safran, LISI, Zodiac et EADS sont des entreprises cotées comparables à Latécoère dont les caractéristiques 2013 sont les suivantes : En M €
Safran
LISI
Zodiac
EADS
Capitalisation boursière (valeur des capitaux propres) + Valeur de la dette et intérêts minoritaires Valeur de l'actif économique (A) Résultat d'exploitation 2013e (B) Multiple du résultat d'exploitation (A/B)
16 831 1 136 17 967 1 766 10,2
901 38 939 109 8,6
5 750 743 6 493 555 11,7
36 067 2 506 33 561 3 361 10,0
–
Le multiple moyen 2013 du résultat d'exploitation s'établit à 10,1 fois. Appliqué au résultat d'exploitation 2013 estimé de Latécoère qui est de 39 M €, on aboutit à une valeur de l'actif économique de 395 M € et de 4 M € pour la valeur des capitaux propres compte tenu d'un endettement net de 391 M €. ▪
35:25
Le multiple de l'excédent brut d'exploitation
Le multiple de l'excédent brut d'exploitation suit la même logique que le multiple du résultat d'exploi tation. Il permet de gommer les différences parfois très significatives qui peuvent exister en termes de choix de méthode et de durée d'amortissement des actifs ou de cycle d'investissement. Il est très fréquemment utilisé par les analystes boursiers, en particulier dans les industries à forte intensité capitalistique. Il convient cependant d'être précautionneux sur l'utilisation de ce multiple, en particulier lorsque l'échantillon et la cible présentent des niveaux de marges disparates. En effet, dans ce cas, il aboutit à sur-valoriser les entreprises à faibles marges et à sous-valoriser les entreprises à fortes marges et ce, indépendamment des choix de comptabilisation des amortissements. Prenons ainsi l'exemple suivant :
1 Pour approfondir ce point, voir La Lettre Vernimmen net février 2007, n 55 o
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
Chiffre d'affaires EBE Dotations aux amortissements Résultat d'exploitation Valeur de l'actif économique
�
Chapitre 35
Groupe A
Groupe B
100 20 10 10 60
100 10 10 0 ?
Les données du groupe A font apparaître un multiple d'EBE de 3. Si l'on applique ce multiple au groupe B, on obtient une valeur de l'actif économique de B de 30 (3 × 10). Mais si la structure du compte de résultat de B est pérenne, notre lecteur aura saisi que l'actif économique de B ne génère aucun résultat et que sa valeur devrait donc être nulle ! C'est le résultat auquel on aurait abouti en utilisant un multiple du résultat d'exploitation. ▪
35:26
Les autres multiples
Il est possible de calculer d'autres multiples d'exploitation comme le multiple du chiffre d'affaires ou des multiples plus spécifiques comme le multiple du nombre d'abonnés, de la tonne de ciment Ces multiples seront d'autant plus intéressants que l'échantillon présente une rentabilité économique normative, sinon la dispersion des résultats obtenus sera très forte. Ils ont beaucoup de sens pour les petits commerces (café-restaurant, blanchisserie ) pour lesquels les transactions sont nombreuses et où, de surcroît, le chiffre d'affaires est plus significatif de la profitabilité réelle que le résultat publié Ces multiples généralement utilisés pour valoriser des sociétés qui ne sont pas encore rentables conduisent, si les comparables sont rentables, à sur-valoriser très largement la société à évaluer. Nous recommandons donc de les éviter.
…
…
…
35:27
b) Les multiples permettant d'établir directement la valeur des capitaux propres Les multiples fondés sur des soldes après frais financiers peuvent également être calculés : multiple des capitaux propres comptables (PBR), multiple de la capacité d'autofinancement et PER, comme nous l'avons vu au chapitre 26. Ces multiples rapportent respectivement la capitalisation boursière à la date de l'évaluation au montant des capitaux propres comptables, à la capacité d'autofinan cement, ou au résultat net de l'entreprise. Le résultat net retenu par les analystes est un résultat retraité des éléments non récurrents et de la dépréciation de la survaleur de façon à privilégier une capacité bénéficiaire récurrente. En utilisant les mêmes comparables pour Latécoère que ceux du paragraphe 35.24, on note que le PER 2013 mi-2013 est de 15,8 : 1
En M €
Safran
LISI
Zodiac
EADS
Capitalisation boursière (valeur des capitaux propres) Résultat net 2013e PER 2013
16 831 1 012 16,6
901 69 13,1
5 750 350 16,4
36 067 2 118 17,0
e : estimation.
1 Ou de l'amortissement quand il est pratiqué (normes françaises)
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Partie 3
�
La valeur
Appliqué à la prévision de résultat net 2013 de Latécoère (19 M €), la valeur des capitaux propres ressort à 294 M €.
Ces multiples valorisent indirectement la structure financière de l'entreprise ce qui crée des distorsions si les niveaux d'endettement sont différents. C'est exactement le cas de Latécoère dont la structure financière est bien différente de celle des sociétés qui lui sont comparables. Considé rons ainsi deux sociétés de taille proche, Solène et Aymeric, dans le même secteur et ayant les mêmes perspectives, avec les caractéristiques suivantes : Société
Solène
Résultat d'exploitation Frais financiers Impôt sur les sociétés (40 %) Résultat net
150 30 48 72
177 120 23 34
Valeur des capitaux propres Valeur de la dette (à 10 % l'an)
1 800 300
?
–
–
Aymeric
1 200
Le PER de Solène est de 25 (1 800/72). Les deux sociétés étant comparables, on pourrait être tenté d'appliquer le PER de Solène aux bénéfices de Aymeric pour obtenir la valeur des capitaux propres de Aymeric, ici 25 34 850. Ce raisonnement, qui a l'apparence de la justesse, est cependant erroné. En effet, en appliquant un PER de 25 au résultat net de Aymeric, c'est comme si l'on appliquait un PER de 25 au résultat d'exploitation après impôt de Aymeric (177 (1 40 %) 106), moins un PER de 25 appliqué aux frais financiers après impôt de Aymeric (120 (1 40 %) 72). En effet, le résultat net est bien égal au résultat d'exploitation après impôt moins les charges financières nettes après impôt. Le premier terme (25 le résultat d'exploitation après impôt) représenterait la valeur de l'actif économique de Aymeric, c'est-à-dire 25 106 2 650. Le second terme (25 les charges financières après impôt) devrait représenter la valeur de la dette qui vient en déduction de la valeur de l'actif économique pour donner la valeur des capitaux propres que nous cherchons. Or, 25 les charges financières après impôt valent 1 800, ce qui n'est pas la valeur de la dette qui n'est que de 1 200. Au cas présent, ce type de raisonnement aboutit à sur-valoriser la dette (1 800 contre 1 200) et, de là, à sous-évaluer la valeur des capitaux propres . Le raisonnement correct est le suivant : on utilise le multiple du résultat d'exploitation de Solène pour valoriser l'actif économique de Aymeric. Si la valeur des capitaux propres de Solène est de 1 800 et la valeur de sa dette est de 300, l'actif économique de Solène vaut 1 800 300, soit 2 100. Puisque le résultat d'exploitation de Solène est de 150, le multiple du résultat d'exploitation de Solène est de 2 100/150 14. L'actif économique de Aymeric vaut donc 14 fois son résultat d'exploitation, soit 14 177 2 478. On retranche alors la valeur de la dette (1 200) pour obtenir la valeur des capitaux propres, soit 1 278. Et ce n'est pas la même chose que 850 ! ×
=
×
=
–
×
=
–
×
×
=
×
×
1
+
=
×
=
1 Notons qu'appliquer un PER revient à surestimer la valeur de la société plus endettée si 1/PER > taux d'intérêt après impôt (ce qui est généralement le cas dans le contexte de taux d'intérêt faibles) et de sous-évaluer la société plus endettée dans le cas contraire
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Partie 3
5 35:29
�
�
La valeur
Médianes, moyennes et régressions
Plutôt que d'utiliser une moyenne ou une médiane des multiples de l'échantillon de comparables que l'on appliquerait au solde représentatif de l'entreprise dont on cherche la valeur, nous enga geons notre lecteur à comprendre l'origine des disparités éventuelles entre les multiples. Une ana lyse des multiples obtenus en fonction de la croissance attendue peut notamment être très utile pour positionner l'entreprise à évaluer au sein de l'échantillon. On peut ainsi calculer les régressions linéaires mettant en regard par exemple : le multiple du résultat d'exploitation et le taux de croissance annuelle du résultat d'exploitation, le multiple du chiffre d'affaires et la marge d'exploitation, le PBR et la rentabilité des capitaux propres (pour évaluer les banques), etc. Reste alors à trouver le critère le plus pertinent. Le R², c'est-à-dire le caractère significatif ou non de la droite de régression, permet de guider l'évaluateur sur les critères les plus pertinents dans l'industrie considérée. Il peut alors justifier un multiple de valorisation qui peut être dans le haut, le bas ou même en dehors de la fourchette des multiples des sociétés comparables si les paramètres de l'entreprise à évaluer le justifient. Ainsi les sociétés comparables à Latécoère ont des taux de croissance annuelle du résultat d'exploitation compris entre 15 et 35 % contre 15 % pour Latécoère. Il serait ainsi logique de prendre comme multiple de résultat d'exploitation 2013 celui de Zodiac qui présente le même taux de croissance de résultat d'exploitation 2015/2013. On trouverait alors une valeur des capitaux propres de 11,7 39 391 65 M € à comparer aux 78 M € de capitalisation boursière. ×
–
=
La méthode patrimoniale ou la somme des parties Section 4
35:30
�
La méthode patrimoniale revient concrètement à évaluer séparément les différents actifs, ou divisions, ou filiales, sous déduction des engagements de l'entreprise. On parlera également d'actif net réévalué ou de somme des parties . Elle est particulièrement adaptée pour les conglomérats ou les groupes diversifiés pour lesquels les comptes ou les projections financières agrégées ne peuvent pas être analysés en tant que tels. 1
La méthode patrimoniale est simple. Elle consiste à étudier systématiquement la valeur de chacun des actifs et des passifs inscrits au bilan d'une entreprise. En effet, les valeurs comptables sont souvent éloignées des valeurs « réelles » pour des raisons comptables, fiscales, historiques Ces valeurs comptables doivent donc être corrigées, réévaluées, pour déterminer un actif net réévalué. Pour les groupes aux activités multiples, les actifs évalués correspondent à des filiales entières pour leur quote-part de détention, ou à des branches d'activités, qui seront individuellement évaluées selon la méthode DCF ou la méthode des multiples. On retranchera de leur somme …
35:31
1 Sum of the parts (SOP) en anglais
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
�
Chapitre 35
l'endettement net de la maison mère et la valeur actuelle des frais de siège. Grâce à ces groupes, la méthode patrimoniale connaît une nouvelle jeunesse ! À titre d'exemple, Exane BNP Paribas valorisait ainsi Vinci début 2013 : 1
En M €
ASF (100 %) Cofiroute (83 %) Vinci Park A-19 Arcour Autres concessions consolidées Autres concessions non consolidées Construction Construction de routes Services énergie Immobilier Holding Valeur d'entreprise Endettement net ajusté Valeur des capitaux propres
35:32
Valorisation
Méthode de valorisation
20 009 6 764 2 015 596 605 381 4 140 1 723 3 630 287 200 39 950 11 905 28 045
Actualisation de flux Actualisation de flux Actualisation de flux Actualisation de flux Multiple des capitaux propres Multiple des capitaux propres Multiple de comparables Multiple de comparables Multiple de comparables Multiple de comparables
–
–
C'est donc au niveau de chaque actif et de chaque passif exigible que se pose le problème de l'évaluation. Il s'agit d'être cohérent dans les estimations, même si les méthodes appliquées peuvent être différentes. Sans vouloir philosopher, on peut dire qu'il existe plusieurs types de valeurs patrimoniales : la valeur de marché : c'est la valeur qu'on pourrait retirer d'un bien en le vendant. Si cette valeur peut paraître incontestable d'un point de vue théorique, elle suppose pratiquement que l'évaluateur se place dans une optique de cessation de l'activité ou de création d'une entreprise similaire ex nihilo ; la valeur liquidative : elle correspond à la valeur de marché minorée d'une décote pour tenir compte de l'impératif d'une réalisation rapide ; la valeur d'usage : elle représente la valeur d'un actif au sein du processus d'exploitation : une sorte de valeur de marché au coût de remplacement. La méthode patrimoniale sera d'autant plus facile à utiliser et d'autant moins contestable que les actifs ont une valeur sur un marché indépendamment de leur inclusion dans le processus d'exploitation d'une entreprise (marché de l'immobilier, avions ). Que vaut en effet une usine dans une nouvelle zone industrielle ? En revanche, la valeur des stocks et des vignes d'une entre prise de champagne est facile à déterminer, et relativement incontestable. Il existe donc toute une panoplie (non exhaustive) de valeurs, que l'on peut utiliser dans une approche patrimoniale. Puisque plusieurs optiques sont en effet possibles (cessation de l'activité brutale ou en douceur, poursuite de l'exploitation ), il s'agit de faire preuve de cohérence, en conservant la même approche tout au long de l'évaluation. ▪
▪
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…
…
1 Puisque celui des filiales aura été pris en compte à leur niveau
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Partie 3
1 35:33
Les actifs corporels
�
Les stocks
Dans le cas de sociétés industrielles, la valorisation des stocks ne pose en général pas de problème majeur, sauf s'ils contiennent des produits obsolètes ou en mauvais état, auquel cas il faudra appli quer une décote à leur valeur comptable, décote qu'un simple inventaire permettra d'estimer. Toutefois, il convient parfois de réévaluer les stocks de certaines entreprises dont le cycle de production est long, ce qui peut entraîner des plus-values sur stocks : champagne, cognac, etc. voire des pertes à terminaison non encore comptabilisées. Ici encore, les réévaluations opérées devront tenir compte de l'impact de l'impôt sur les bénéfices. En faisant ceci, il faut avoir conscience que l'on achète déjà les bénéfices des prochaines années.
3 35:35
La valeur
Les actifs de production peuvent, bien sûr, être évalués à partir de la valeur de remplacement, à partir de la valeur de liquidation, ou encore de toute autre valeur. Notre propos n'est pas de nous étendre sur ce point, mais plutôt de souligner que ce qui importe dans l'approche patrimoniale est la valeur globale de l'outil industriel et commercial. Il ne s'agit donc pas de chercher à décomposer les actifs en somme d'actifs unitaires, mais de raisonner globalement en considérant des ensembles d'actifs suffisamment importants et qui ont une valeur intrinsèque. S'interroger sur la valeur d'un terrain sur lequel est bâti un entrepôt n'a pas de sens. En revanche, il est beaucoup plus judicieux de s'intéresser à la valeur de l'ensemble du terrain et des constructions. Cet ensemble sera évalué par un expert compte tenu de son potentiel de production, et non à partir des valeurs individuelles des éléments qui le composent, sauf à déduire de la valeur du terrain le coût de la destruction des constructions.
2 35:34
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Les actifs dits « incorporels »
Il peut paraître paradoxal de retenir une valeur patrimoniale pour l'évaluation des actifs incorpo rels. Mais peu contestent que le patrimoine de l'entreprise se compose aussi d'actifs incorporels dont la valeur est loin d'être nulle (marque, fonds commercial, brevets ). Une valeur patrimoniale n'a de sens que si elle intègre l'évaluation des actifs incorporels de l'entreprise. …
On retiendra notamment : le droit au bail : il est égal à la somme actualisée des différences entre le loyer au prix du marché et le loyer effectivement payé ; les marques : il s'agit de valeurs particulièrement difficiles à évaluer, mais dont l'importance est croissante. Il existe principalement trois méthodes pour les estimer : la première méthode considère une valeur de reconstitution égale au montant des dépenses publicitaires après impôt nécessaires pour reconstituer la marque. C'est une méthode très rudimentaire, au mieux applicable pour des marques de création récente, qui conduit à survaloriser les marques dont le lancement est un échec (les yaourts Essensis par exemple) et à sous valoriser celles dont le lancement est un succès (Philosophie Magazine par exemple) ; ▪
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
la deuxième méthode consiste à actualiser les redevances touchées ou qui pourraient être touchées de l'exploitation de la marque par des tiers licenciés (souvent quelque pour-cent du chiffre d'affaires). Elle donne des résultats malheureusement très sensibles au taux de rede vance choisi et au périmètre auquel il s'applique ; la troisième méthode d'évaluation consiste à analyser le fondement même de la marque, dont l'utilité est principalement de faire vendre plus, et plus cher, moyennant des coûts supérieurs, notamment par rapport à un produit sans marque. La valeur actuelle de ce « super-bénéfice » sur une certaine durée permet d'approcher la valeur de la marque. Il ne faut pas cacher que cette approche, certes intellectuellement satisfaisante, est difficile à appliquer concrètement, notamment dès qu'on ne dispose pas de produit « sans marque » de référence. Les praticiens actualisent les flux différentiels de trésorerie imputables à l'exis tence d'une marque (marge d'exploitation supplémentaire moins coûts d'exploitation supplé mentaires, BFR et investissements supplémentaires) pour isoler la valeur d'une marque ; les brevets et les savoir-faire technologiques : ils s'évaluent avec les mêmes méthodes que les marques et avec les mêmes difficultés ; le fonds de commerce : pour les petites entreprises, il est souvent évalué à partir des barèmes qu'utilisent les experts et les tribunaux en pourcentage du chiffre d'affaires : 20 à 40 % du chiffre d'affaires annuel pour une épicerie, 70 à 110 % pour une laverie automatique, etc. Ces pourcen tages s'entendent matériel compris mais stocks exclus. Pour les plus grandes entreprises, la clientèle est évaluée en actualisant le surprofit qu'elle dégage par rapport au taux de rentabilité exigé sur l'actif économique en place et ce sur sa durée de vie probable compte tenu d'un taux naturel d'attrition. ▫
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4 35:36
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L'influence de la fiscalité
La prise en compte de la fiscalité rend nécessaire de savoir dans quelle optique on se place en cas d'utilisation d'une méthode d'évaluation patrimoniale : dans une optique liquidative, les actifs théoriquement vendus font apparaître des plus-values ou des moins-values. Les impôts théoriques viennent donc abaisser la valeur et les crédits d'impôts viennent l'accroître ; dans une optique de continuité, l'entreprise achète indirectement des actifs à travers l'acquisition de titres. De ce fait, elle ne peut réévaluer fiscalement ces actifs et les amortira donc sur la base d'une valeur fiscale plus faible que si elle avait pu les acheter directement. D'où des amortissements plus faibles entraînant des impôts supplémentaires en termes d'opportunités. Concédons que, générale ment, dans une optique de continuité, l'impact fiscal est négligé. ▪
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Utilité des valeurs patrimoniales
Nous voudrions mettre en garde le lecteur sur la fausse protection des valeurs patrimoniales qui, dans l'esprit de bon nombre, signifient valeurs plancher. Lorsqu'une entreprise a une forte valeur 1 Que l'on peut trouver dans le Mémento Transmission d'entreprise ou les Dossiers pratiques Évaluation Francis Lefebvre
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Partie 3
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La valeur
patrimoniale, cela signifie que, suivant la méthode des flux de trésorerie disponibles, la valeur finale est très importante par rapport aux flux intermédiaires. Par conséquent, plus une entreprise est « patrimoniale », plus sa valeur est spéculative et volatile. Sans doute, son risque industriel est limité, mais c'est une pure spéculation sur des valeurs de revente. Pour cette raison, la valeur patrimoniale est utile pour évaluer des petites entreprises sans valeur stratégique ou des entreprises industrielles qui disposent d'actifs pour lesquels il existe un marché secondaire (avions, salles de cinéma ). …
Section 5
1 35:38
35:39
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Comparaison des valorisations
Réconciliation des méthodes de valorisation
Dans un marché en équilibre, toutes les méthodes d'évaluation devraient normalement conduire à la même valorisation. Or, dans la réalité, on constate fréquemment des différences entre valeur patrimoniale et valeur par la méthode DCF ou par la méthode des multiples. Il faut alors analyser l'origine de ces écarts et renoncer à faire des moyennes !
a) Analyse de l'écart entre valeurs patrimoniales et valeurs de rentabilité Si la valeur patrimoniale est supérieure à la valeur DCF ou à celle issue des multiples, l'entreprise vaut plus par son passé (capitaux propres réévalués) que par ses perspectives futures de rentabi lité. Il convient donc, dans ce cas, non pas d'investir, mais plutôt de commencer à désinvestir, à liquider les actifs pour obtenir une meilleure rentabilité et une meilleure allocation des ressources. Ce genre de man uvre a connu son heure de gloire, notamment dans les années 1980 et a fait réapparition en 2007-2008 . Les entreprises sont rachetées en Bourse (OPA) et revendues « par appartements », en pièces détachées en quelque sorte. L'acheteur réalise alors une plus-value puisque la somme des parties est supérieure à la valeur d'ensemble de l'entreprise. Loin de constituer une résurgence du capitalisme débridé et sauvage du XIXe siècle, ces opérations purement financières permettent une meilleure allocation des ressources et sanctionnent des gestions trop laxistes. Si la valeur patrimoniale est inférieure à la valeur DCF ou celle issue des multiples (ce qui est le cas le plus fréquent dans une économie caractérisée par l'importance d'actifs incorporels), l'entre prise est alors fortement rentable et investit dans des projets dont la rentabilité est supérieure à son coût du capital. L'entreprise a un véritable savoir-faire, un positionnement stratégique fort avec des barrières à l'entrée. Pourra-t-elle résister longtemps à la pression de la concurrence ? Le goodwill a été utilisé pendant longtemps comme moyen privilégié de corriger les valeurs patrimoniales afin de tenir compte de la rentabilité économique anticipée de l'entreprise, notam ment par rapport à son coût moyen pondéré du capital et évaluer d'un coup l'ensemble du capital immatériel de l'entreprise. Le point de départ de ces méthodes dites « mixtes » est la détermination de l'actif économique de l'entreprise comme nous l'avons vu au chapitre 4, corrigé d'éventuelles plus ou moins-values. œ
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1 Démantèlement d'ABN-Amro, de Scottish and Newcastle, de Hagemayer
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
On calcule alors un résultat d'exploitation normatif, en appliquant un taux de rentabilité exigé sur l'actif économique. La différence entre le résultat d'exploitation anticipé dans le plan d'affaires et le résultat normatif fait apparaître, soit un « super-bénéfice », le goodwill , soit un déficit, le badwill . Conceptuellement, ce « super-bénéfice » correspond à une rente que l'acquéreur est prêt à acheter. Cette rente, appelée rente du goodwill , est alors actualisée sur une certaine durée. Notons que si l'on utilise comme taux de rentabilité cible et comme taux d'actualisation du « super-bénéfice » le coût moyen pondéré du capital de l'entreprise, on retrouve la notion de profit économique et donc la valeur actuelle des EVA. On rejoint alors le fondement conceptuel de la valeur par les flux qui provient de l'écart entre la rentabilité économique et le taux d'actualisation, en l'occurrence le coût moyen pondéré du capital de l'entreprise.
b) Valeurs issues des multiples et valeur DCF 35:40
Si la valeur obtenue par la méthode des multiples est supérieure à la valeur issue de la méthode DCF, le moment peut être bon pour introduire l'entreprise en Bourse car les investisseurs financiers ont une appréciation du risque et de la rentabilité plus favorable à l'entreprise que son actionnaire actuel ou son management. A contrario si la valeur issue des multiples est en retrait par rapport à la valeur DCF et si l'on croit à son plan d'affaires, il vaut mieux attendre que l'entreprise concrétise dans ses états financiers son potentiel de croissance reflété dans la méthode DCF. Si les multiples de transaction aboutissent à une valeur nettement plus élevée que les multiples boursiers ou la valeur issue du DCF, les actionnaires vendeurs auront trouvé une bonne fenêtre pour passer à l'acte.
c) Méthodes de valorisation « vendeurs » et « acheteurs » 35:41
Conceptuellement, il n'y a pas de raison qu'un investisseur préfère telle ou telle méthode de valorisa tion selon qu'il soit acheteur ou vendeur. On peut cependant observer dans la pratique une certaine hiérarchie des méthodes de valorisation. Un vendeur préfère généralement la méthode d'actualisation des flux de trésorerie disponibles car cette méthode est fondée sur un plan d'affaires qui est rarement pessimiste … (et qui peut donc être sujet à caution). Le plan d'affaires a été établi par le management de la cible mais, le plus souvent, sur instruction de l'actionnaire vendeur dans l'unique but de « bien vendre » l'entreprise. Bien que le DCF soit mis en avant, le vendeur a en réalité toujours en tête la méthode des compa rables (boursiers ou de transaction) car il acceptera difficilement de se vendre moins cher que son concurrent et une introduction en Bourse représentera parfois une alternative à la cession pure et simple 1. L'acheteur fonde sa négociation sur les comparables pour justifier un prix plus bas que celui qui ressort du DCF. L'argument souvent avancé est que les autres acheteurs ont payé ce type de prix et non 130 ou 140 % de ce prix. Cependant il réfléchit à son DCF car c'est de son plan de bataille post-acquisition (synergies, nouveaux développements…) que dépend la rentabilisation future de son acquisition. Ainsi la valeur issue d'un DCF appliqué à un business plan qu'il jugera réaliste est effectivement le prix qu'il pourra payer sans détruire de la valeur pour ses action naires. 1 Au terme d'un
dual track process
Gracieusement mis à disposition par Dalloz dans le cadre du MOOC "Evaluation Financière de l'entreprise" de Pascal Quiry et HEC Paris 725
Partie 3
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La valeur
Un « cycle de vie » qui va jusqu'à la mort
Valeurs patrimoniales et valeurs de rentabilité peuvent différer tout au long du cycle de vie d'une entreprise qui a connu un certain succès. Au moment de la création d'une entreprise, valeurs patrimoniales et valeurs de rentabilité sont identiques dans la mesure où l'entreprise n'a pas encore investi. Après une année ou deux d'exploi tation, les valeurs patrimoniales peuvent diminuer en raison des pertes dues au démarrage de l'activité. Les valeurs de rentabilité, quant à elles, seront supérieures, car elles anticipent les flux futurs que l'on espère positifs. En phase de croissance, la valeur patrimoniale va augmenter en raison du réinvestissement partiel ou total des bénéfices et de la constitution du fonds de commerce (qui n'apparaît pas comptablement). Les valeurs de rentabilité continueront à augmenter et resteront supérieures à la valeur patrimoniale. Le savoir-faire de l'entreprise n'est pas encore devenu un véritable actif, il reste lié aux hommes qui l'ont créé. En phase de maturité, la croissance des valeurs de rentabilité va se réduire, voire s'arrêter, reflétant ainsi l'évolution normale des bénéfices. Par contre, la valeur patrimoniale continuera à croître, mais à un rythme plus ralenti, car l'entreprise augmentera son taux de distribution. Au total, valeurs de rentabilité et valeur patrimoniale pourront être confondues. Si l'entreprise entre dans une phase de déclin, ses bénéfices diminuent et les valeurs de rentabi lité deviennent alors inférieures à sa valeur patrimoniale. Celle-ci continue à croître, mais à un taux très faible, jusqu'à l'apparition des premières pertes. La valeur patrimoniale diminue. Quant aux valeurs de rentabilité, elles sont alors très faibles. La valeur patrimoniale apparaît donc comme une valeur particulièrement spéculative. Cycle de la valeur Valeur de rentabilité et valeur patrimoniale évoluent diffé remment tout au long de la vie de l'entreprise.
Valeur Valeur de rentabilité Valeur patrimoniale Temps Création
Lancement
Croissance
Maturité
Déclin
Disparition
Il est indispensable de comprendre à tout moment les raisons de l'écart entre valeurs patrimo niales et valeurs de rentabilité. Cette réflexion est en effet nécessaire pour comprendre la logique de l'entreprise achetée et son évolution à terme. 35:43
En conclusion, un lecteur novice pourrait se laisser égarer par une grande quantité d'approches qui aboutissent à autant de valeurs : valeur patrimoniale ; valeur par les multiples ; valeur intrinsèque ▪
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La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
Pour notre part, nous déconseillons de calculer un grand nombre de valeurs si ce n'est pour démontrer que l'on peut tout dire en matière d'évaluation. Il ne faut pas faire du nihilisme. Essayons donc de comprendre à quelle situation de l'entreprise chaque catégorie de valeurs correspondent-elles, quelles sont leurs hypothèses implicites. En fait, il s'agit plus de déterminer des fourchettes que d'aboutir à des chiffres précis, tâche qui est du ressort de la négociation puisqu'elle aboutit à un prix . Rappelons enfin qu'évaluer une entreprise : c'est spéculer fortement sur l'avenir de la société mais aussi sur les conditions de marché Les méthodes de flux et de multiples le démontrent ; c'est effectuer implicitement des prévisions à très long terme fondées sur une extrapolation des résultats passés ou d'un futur proche. De là, les excès ; c'est parfois oublier que les valeurs patrimoniales sont de fausses protections. Pour un financier, la décision de céder tout ou partie du capital d'une entreprise découle alors de la comparaison du prix que l'on peut en tirer par rapport aux valeurs obtenues. ▪
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Section 6 35:44
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Primes et décotes
Un lecteur novice pourrait croire que le marché de la vente et de l'achat d'entreprises est un marché spécifique, ayant sa propre logique de fonctionnement, ses propres équilibres, ses propres méthodes d'évaluation, ses propres intervenants. En réalité, il n'en est rien : le marché des entreprises n'est qu'un compartiment d'un marché financier beaucoup plus global. Et les méthodes d'évaluation utilisées ont le même fondement et la même logique que celles qui sont mises en œuvre pour l'évaluation d'un actif financier. Notre expérience nous prouve qu'une entreprise se vendra à un prix d'autant plus élevé entre industriels que la Bourse affiche des niveaux de valorisation élevés. Les intervenants sur ce marché ont la même logique que les investisseurs financiers en Bourse. Certes, plus la taille de la société est faible, plus ces règles s'estompent, la valeur d'un fonds de commerce (boucherie, boulangerie, tabac ) ayant peu à voir a priori avec les règles des marchés financiers. Mais seule l'apparence peut faire croire un instant qu'il s'agit d'un marché spécifique. …
1 Valeur stratégique et prime de contrôle �
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Il n'existe pas de véritable valeur de contrôle autre que la valeur stratégique que nous développe rons ultérieurement. Les temps où la prime de contrôle était réservée à l'actionnaire majoritaire et
où les actionnaires minoritaires en étaient privés sont révolus, au moins pour les sociétés cotées. Les marchés réglementés ont érigé l'égalité de traitement des actionnaires au rang de principe absolu : les actionnaires minoritaires ont droit au même prix de cession que celui obtenu par le majoritaire sur son bloc de contrôle.
Gracieusement mis à disposition par Dalloz dans le cadre du MOOC "Evaluation Financière de l'entreprise" de Pascal Quiry et HEC Paris 727
Partie 3
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La valeur
Les pactes d'actionnaires et les clauses statutaires (en particulier dans les sociétés anonymes simplifiées) permettent de mettre en uvre ce principe dans les sociétés non cotées. œ
En cas de changement de contrôle d'une société cotée, l'actionnaire minoritaire touche la même prime que celle payée au majoritaire. Nous avons souvent croisé des entrepreneurs ayant un tout autre raisonnement Pour eux, les actionnaires minoritaires s'enrichissent en dormant alors que le dirigeant majoritaire donne toute son énergie à son entreprise. Il est alors très difficile de les convaincre qu'il faut dissocier direction et actionnariat en termes de rémunération et surtout que le risque pris par l'actionnaire minoritaire doit être rémunéré. Si l'on fait l'hypothèse que les marchés sont à l'équilibre, l'existence de la prime de contrôle ne peut être justifiée que par le fait que le nouvel acquéreur obtiendra plus de valeur de la société que les anciens propriétaires. La prime de contrôle ne s'explique donc que par les synergies indus trielles, commerciales ou administratives que le nouveau majoritaire espère mettre en place. Il espère améliorer les résultats de l'entreprise par sa propre gestion, par la mise en commun de ressources, d'activités, par le développement d'économies d'échelle, et a pris cela en compte dans son évaluation. L'investisseur dit « industriel » souhaite acquérir l'entreprise pour agir sur sa gestion et créer de la valeur. …
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Primes payées en cas de changement de contrôle et niveau des cours boursiers en Europe 600
30%
500
25% Prime moyenne payée (échelle de droite, %)
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20%
300
15%
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10% Cours moyen Eurostoxx 600 (échelle de gauche)
100
5%
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2001
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2008
2009
2010
2011
2012
Source : Exane BNP Paribas, Datastream
Les primes payées lors de prise de contrôle de sociétés cotées par rapport au cours de Bourse sont d'autant plus élevées que les cours sont bas. La valeur d'un industriel diffère donc de celle d'un investisseur financier qui analyse l'acquisi tion d'une action comme une simple opportunité d'investissement parmi d'autres, et indépendam ment de telles synergies. Les professionnels parlent alors d'une valeur stand-alone . Les flux espérés par l'investisseur industriel ne sont donc pas les mêmes que pour l'investisseur financier et peuvent conduire à une valorisation différente de l'entreprise, que nous appellerons valeur stratégique. Gracieusement mis à disposition par Dalloz dans le cadre du MOOC "Evaluation Financière de l'entreprise" de Pascal Quiry et HEC Paris 728
La pratique de l'évaluation de l'entreprise
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Chapitre 35
La valeur stratégique est la valeur qu'un investisseur industriel est prêt à payer pour une entre prise. Elle résulte de la projection des flux de trésorerie disponibles, augmentés des gains dus aux synergies résultant du rapprochement de cette entreprise avec celle(s) de l'investisseur industriel ou des espoirs d'amélioration de rentabilité future. Alors que nous avons démontré que la valeur d'un titre financier était indépendante du porte feuille auquel il appartenait, nous constatons ici l'inverse de cette règle puisqu'une entreprise n'a pas la même valeur selon qu'elle est incluse dans tel ou tel ensemble. Entendons-nous bien : cette différence de valeur provient de flux prévisionnels différents et non d'un taux d'actualisation qui, lui, est propre à l'entreprise, et donc le même pour tout acheteur. Contrairement à la valeur qui est universelle, la valeur stratégique est propre à chaque investisseur industriel. Elle est fonction du niveau des synergies dont il espère tirer profit et de sa capacité à mieux gérer les actifs que les dirigeants en place.
De ce fait, la valeur stratégique d'une entreprise est généralement supérieure à sa valeur stand-alone . Toute la négociation consistera donc à partager entre l'acheteur et le vendeur cette espérance de rentabilité supérieure imputable aux synergies, puisque le vendeur s'efforcera bien entendu d'obtenir le prix maximum. Notre lecteur ne doit pas s'emballer pour autant et faire comme certains groupes industriels qui achètent chaque entreprise au double de sa valeur stand-alone sous prétexte que sa valeur straté gique est importante ou qu'une implantation dans telle zone géographique est stratégique ! Le réveil sera dur ! En effet, si une entreprise est déjà bien valorisée par le marché, il peut arriver que sa valeur stand-alone soit supérieure à sa valeur stratégique, même si toutes les synergies se réalisent, notam ment lorsqu'elles sont anticipées par le marché (spéculation sur une opération). C'est le cas d'une entreprise déjà bien gérée où les synergies apportées par tout industriel sont faibles, voire négatives.
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Décote ou prime de minoritaire ?
Nous avons vu des valorisations de participations minoritaires agrémentées d'une décote de minori taire. Comme notre lecteur l'aura compris, nous n'adhérons pas à cette pratique. L'application d'une décote sous-entendrait que, pour un pourcentage donné, le minoritaire a un droit sur les flux de trésorerie de l'entreprise plus faible que le majoritaire. Ceci est inexact ! Ainsi, si la prime de contrôle observée a posteriori peut (et doit) être justifiée par des syner gies, la décote de minoritaire n'a pas de fondement. Pour pousser plus loin, on peut observer qu'un actionnaire détenant déjà la majorité d'une société cotée est obligé de payer une prime aux minoritaires pour racheter leurs actions. En moyenne, en Europe, cette prime payée pour « sortir » des minoritaires est de l'ordre de 10 à 20 %, un peu plus faible que celle payée lors d'une prise de contrôle. Notre lecteur pourra se demander ce qui justifie une telle prime. Elle s'explique par le fait que pour mettre des synergies en place, ou pour restructurer une entreprise, le majoritaire aura besoin d'avoir le contrôle plein et entier de l'entre prise. Dans certains cas, la capacité à mettre en place une intégration fiscale (pour laquelle la détention de 95 % du capital est nécessaire) peut justifier tout ou partie de la prime payée.
Gracieusement mis à disposition par Dalloz dans le cadre du MOOC "Evaluation Financière de l'entreprise" de Pascal Quiry et HEC Paris 729
Partie 3
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La valeur
L'absence de liquidité attachée à certaines participations minoritaires (soit que l'entreprise ne soit pas cotée, soit que la liquidité du titre soit trop faible au regard de la taille de la participation) peut justifier une décote. Mais il ne s'agira pas réellement d'une décote de minoritaire, on parlera plutôt de décote d'illiquidité que subira l'actionnaire minoritaire qui veut vendre. Nous avons connu des cas où elle dépassait 50 % pour un actionnaire minoritaire qui voulait céder ses titres pour lesquels le majoritaire n'a fait cette offre qu'au bout de 3 ans. Mais nous avons aussi connu des décotes nulles quand la cession d'une petite participation pouvait modifier l'équi libre du contrôle. En effet, un minoritaire, conscient de la valeur de la participation qu'il détient, ne pourra l'extérioriser que si le majoritaire décide également de vendre. On retrouve le même phénomène dans une société cotée au flottant réduit et dont le capital est verrouillé par un ou plusieurs investisseurs : la sortie ne pourra se faire qu'au cours de Bourse, qui dépend de la politique de communication du principal actionnaire Des sociétés cotées peuvent ainsi souffrir d'une sous-valorisation chronique en raison d'une liquidité insuffisante du titre ; les analystes ne publient pas alors de recherches et le phénomène s'auto-alimente. Dans une société cotée au capital dispersé, les choses sont différentes et le minoritaire est en quelque sorte secouru par les autorités boursières qui sont vigilantes sur la défense de ses intérêts. …
Le seul chiffrage rationnel de la décote de liquidité est la décote d'introduction en Bourse que le vendeur aurait à supporter. Mais le degré d'urgence de la cession et les rapports de force entre acheteur(s) et vendeur(s) peuvent affecter cette belle rationalité.
Gracieusement mis à disposition par Dalloz dans le cadre du MOOC "Evaluation Financière de l'entreprise" de Pascal Quiry et HEC Paris 730