Université Paris I Panthéon – Sorbonne Master 2 Sciences du management Spécialité Logistique
Romuald Malblanc
Transport maritime et défi du gigantisme des navires
Mémoire de fin d’études
Maître de mémoire : Monsieur Francis Vallat
couverture Marine Beurier ® 2008 (Navigant, photographe et graphiste marine) –
[email protected]
2008
2
2
Remerciements
Dans le cadre de ma reconversion, après vingt et une années dans la Marine Nationale, et en cohérence avec mon projet professionnel, j’entreprenais de rédiger il y a neuf mois, afin de compléter et valider le master 2 Sciences du management spécialité Logistique de la Sorbonne, un mémoire sur le transport maritime et plus particulièrement sur un phénomène récent : le « Gigantisme » et les questions que soulève cet enjeu, espérant apporter ma modeste contribution à la réflexion. Bien que la Marine Nationale et le transport maritime, essentiellement la marine marchande, soient deux univers différents, ils n’en demeurent pas moins complémentaires sous bien des aspects. On y retrouve la même passion pour la mer et les océans. Ainsi, lors de mes recherches liées à la rédaction de ce mémoire, j’ai eu l’opportunité et la chance d’être reçu par des passionnés, des hommes de mer fiers de leurs métiers et très attachés à leurs entreprises, qui ont accepté de me faire part de leurs idées, de leurs réflexions, de leurs expériences et parfois de leurs doutes et interrogations. Sans l’aide de tous ces professionnels de la mer, sans le temps qu’ils m’ont très aimablement accordé, je n’aurais jamais pu accomplir ce travail de recherche et de réflexion dans de telles conditions. Je veux donc tout d’abord remercier mon maître de mémoire Monsieur Francis Vallat, Président de l’Institut Français de la Mer (IFM) et du Cluster Maritime Français (CMF) qui a su m’encourager, suivre la progression de mon travail et m’ouvrir bien des portes en même temps qu’il m’a associé en toute transparence à la demande de réflexions qu’il a suscité dans le milieu maritime français à ce sujet. Je souhaite également remercier l’Amiral Alain Oudot de Dainville, chef d’état-major de la marine de 2005 à 2008 (entretien effectué le 13 février 2008) qui m’a accordé un entretien au cours duquel il m’a fait f ait part de sa vision hautement stratégique de la France Maritime.
3
Mes sincères remerciements vont aussi à toutes les personnes qui m’ont reçu et qui ont bien voulu répondre à mes questions lors d’entretiens et qui m’ont ainsi apporté une aide plus que précieuse (par ordre alphabétique) : -
Monsieur Alain Michel de La Buharaye, Comité d’études et de services des assureurs maritimes et transport (CESAM) (entretien à Paris le 30 mai 2008) ;
-
Monsieur Pierre Besse, Bureau Veritas (entretien le 29 mai 2008 à Paris) ;
-
Monsieur Frédéric Brut, Business logistic manager Saint Gobain ;
-
Capitaine de frégate Philippe Courtin, Conférencier à l’Institut d’études politiques de Paris, spécialiste de la Chine (entretien le 19 mai) ;
-
Monsieur Patrick Decavèle, Président et Directeur exécutif de Brostrom Tankers France (entretien le 30 avril 2008 à Paris) ;
-
Monsieur Patrice Gilbert, Directeur Général du Comité d’études et de services des assureurs maritimes et transport (CESAM) (entretien à Paris le 30 mai 2008) ;
-
Monsieur Pierre Yves Larrieu, Professeur de l’enseignement maritime (le 05 mai 2008) ;
-
Monsieur Jean Claude Mameaux, Directeur du pole maritime Groupama Transport (entretien le 6 mars 2008 dans les locaux de Groupama Transport Le Havre);
-
Madame Françoise Odier, Institut Français de la mer (entretien le 7 avril 2008 à Paris) ;
-
Monsieur Antoine Person, Secrétaire Général de Louis Dreyfus Armateur (entretien le 1er mai 2008 à Paris) ;
4
-
Monsieur le Vice Amiral d’escadre Xavier Rolin, Préfet maritime de l’atlantique (entretien le 28 février 2008 à la préfecture maritime de Brest) ;
Je remercie enfin Monsieur Marc Chevallier, Président du groupe de travail sur le gigantisme, ainsi que tous les membres de cette « task force » (annexe 4) de très haut niveau (créée et animée par le Président de l’Institut Français de la Mer), pour avoir partagé avec moi leurs expertises et connaissances, ainsi que leurs réflexions sur le gigantisme et également de m’avoir permis en tant que rédacteur de ce groupe de travail, d’approfondir certains points évoqués dans ce mémoire.
5
6
SOMMAIRE INTRODUCTION
Page 10
PREMIERE PARTIE L’accroissement de la taille des navires : l’une des réponses
Page 13
à la mondialisation des échanges 1.1. Définition du gigantisme
Page 14
1.2. Le transport maritime : généralités et panorama
Page 15
1.2.1. Organisations majeures
Page 15
1.2.1.1. L’Organisation Maritime Internationale (OMI)
Page 15
1.2.1.2. L’Agence Européenne pour la Sécurité Maritime (EMSA)
Page 22
1.2.1.3. Le rôle du préfet maritime en France
Page 23
1.2.1.4. Autres acteurs
Page 23
1.2.2. Généralités sur le transport maritime
Page 24
1.2.2.1. Présentation générale
Page 25
1.2.2.2. Les acteurs principaux
Page 26
1.2.2.3. Les différents types de navire
Page 28
1.3. Evolution de l’économie mondiale
Page 32
1.3.1. Généralités
Page 32
1.3.2. 2007
Page 33
1.3.3. Perspectives pour 2008
Page 34
1.4. La part du commerce maritime dans les échanges mondiaux
Page 34
1.4.1. La part du trafic maritime en progression constante
Page 34
1.5. Evolution des capacités de transport
Page 37
1.5.1. Augmentation de la densité du trafic maritime
Page 37
1.5.2. Le boom des commandes de navires
Page 39
1.6. L’accroissement de la taille des navires
Page 40
1.6.1. Le constat actuel
Page 40
1.6.2. Des projets pharaoniques dans le transport de passagers ...
Page 43
1.6.3. ... et dans le transport de conteneurs
Page 44
1.7. Les scénarios possibles de l’évolution des échanges mondiaux
Page 44 7
DEUXIEME PARTIE Les contraintes liées à l’accroissement de la taille des navires
Page 46
2.1. L’exemple des U.L.C.C.
Page 47
2.1.1. L’exemple du Pierre Guillaumat et du Knock Nevis
Page 47
2.1.1.1. Le Pierre Guillaumat
Page 47
2.1.1.2. Le Knock Nevis
Page 48
2.1.2. Les raisons probables de l’échec
Page 49
2.2. Les contraintes liées au gigantisme dans le transport maritime
Page 50
2.2.1. Les contraintes techniques
Page 50
2.2.1.1. La conception des navires
Page 50
2.2.1.2. Des aides à la décision au profit des commandants de navire
Page 53
2.2.1.3. Les sous systèmes des navires (propulsion, énergie,...)
Page 53
2.2.1.4. L’âge des navires
Page 55
2.2.1.5. Les chantiers navals
Page 56
2.2.2. Les contraintes portuaires
Page 56
2.2.2.1. L’accès aux ports
Page 56
2.2.2.2. La manutention
Page 58
2.2.3. Evolution du nombre d’accidents
Page 59
2.2.3.1. Pertes totales de navires
Page 60
2.2.3.2. Pertes partielles
Page 60
2.2.3.3. Pertes en vies humaines
Page 61
2.2.4. La sécurité maritime
Page 62
2.2.4.1. L’assistance
Page 63
2.2.4.2. Risques liés aux navires
Page 64
2.2.4.3. Risques liés à l’objet (cargaison)
Page 65
2.2.4.4. Généralités sur la technologie RFID
Page 68
8
2.2.4.5. Une traçabilité spécialisée dans le transport conteneurisé ?
Page 69
2.2.5. Les contraintes financières
Page 71
2.2.5.1. Les coûts d’acquisition des navires
Page 71
2.2.5.2. La problèmatique importante et significative des assureurs
Page 73
2.2.6. L’impact des nouvelles routes maritimes
Page 76
2.2.6.1. Canal de Panama – Canal de Suez
Page 76
2.2.6.2. Les routes du Nord – La Banquise
Page 77
2.2.7. Le facteur humain
Page 79
2.2.8. L’impact sur l’environnement
Page 80
2.2.8.1. Pollution atmosphérique
Page 81
2.2.8.2. Pollution par hydrocarbure ou autres produits
Page 81
CONCLUSION
Page 85
BIBLIOGRAPHIE
Page 87
ANNEXES
Page 89
9
INTRODUCTION
10
INTRODUCTION
« Les océans sont comme le cyberespace, un des derniers espaces de liberté, dans lequel circulent toutes sortes de flux, flux d’informations, flux de matières premières, flux de personnes ».
Amiral Oudot de Dainville – chef d’état-major de la marine 2005 / 2008 Entretien du 13 février 2008
La première idée qui vient à l’esprit lorsque l’on parle des océans, c’est celle de la mondialisation, d’un univers non statique, hyper dynamique même, où se déroulent de multiples échanges. Ces échanges sont de diverses formes : échanges d’informations, échanges de matières premières ou de biens, « échanges » de personnes. L’ouverture du marché chinois en 2000 a transformé le paysage économique mondial, entrainant une forte augmentation des échanges de biens et de services, toujours plus importants entre l’Asie, l’Europe et les Etats-Unis. Elle a donc été accompagnée d’un développement notable du trafic maritime, en fait un véritable boom. Pour faire face à la demande toujours croissante en biens de consommation, en matières premières, en transport de passagers, le transport maritime, représentant 90 pour cent des échanges mondiaux, a vu son trafic se densifier, ces dernières années, et parallèlement, la taille des navires augmenter sans limite apparente. D’aucuns considèrent que le gigantisme dans le transport maritime est une partie importante de la réponse à la mondialisation. Il est toutefois important de se poser la question de la viabilité ou plutôt des limites d’une telle évolution dans un avenir à court et moyen terme. 11
Outre les évolutions du paysage économique mondial ces dernières années, il existe un nombre important de paramètres, de contraintes à prendre en compte pour déterminer si les limites du gigantisme dans le transport maritime sont en passe d’être atteintes voire repoussées. En effet, se pose la question de savoir si des éléments extérieurs autre qu’économiques, tels la sécurité et la sûreté 1 maritime, l’environnement, l’accès aux ports, les coûts d’exploitation, la technique et la technologie etc. viendront impacter durablement, voire remettre en cause cette tendance à l’accroissement de la taille des navires.
*** Tout d’abord, il est important de définir le « gigantisme » et les caractéristiques qui lui seront assignées dans le cadre de ce mémoire ; il en est de même pour la définition du transport maritime et des différents acteurs qui le composent. Enfin, l’économie mondiale semble être un facteur déterminant. Les premiers navires géants sont apparus dans les années 1970, et l’on peut citer en exemple le Pierre Guillaumat , pétrolier de 414 mètres de long, 30 mètres de tirant d’eau et plus de 500 000 tonnes de port en lourd 2, ou encore le Knock Nevis, navire de 600 000 tonnes de port en lourd, tous deux ayant très peu navigué dans les faits, et ayant disparu depuis. Quels sont les facteurs ayant conduit à l’échec de leur exploitation ? Y-a-t-il des similitudes entre la situation liée à cette période et la situation actuelle ? L’analyse des paramètres et contraintes inhérents au transport maritime et plus particulièrement au gigantisme permettra ensuite, si ce n’est d’apporter des réponses, du moins de poser les questions opportunes visant à susciter des réflexions et actions adaptées à l’émergence du gigantisme (situation ne touchant d’ailleurs pas que le transport maritime comme le montre par exemple le cas de l’Airbus A380 dans le transport aérien). 1
Sécurité : (safety) : protection contre les dangers, risques, défauts inhérents au navire ou au milieu marin. Sûreté : (security) : protection contre le danger ou les menaces venant de l’extérieur. 2 Tonnes de port en lourd (tpl) – ( Deadweight tons (dwt)) : Le port en lourd d'un navire représente le chargement maximum qu'il peut emporter ; il est égal au poids total du navire chargé au maximum (tirant d'eau milieu aux marques de franc-bord) moins son poids à vide ou déplacement lège. Le port en lourd inclut le personnel (équipage + passagers), les consommables, et les marchandises transportées, qui peuvent varier au cours du voyage. Le port en lourd est aussi un outil servant à classer les navires marchands (cargos, pétroliers...). (source wikipedia – www.fr.wikipedia.org)
12
PREMIERE PARTIE L’ACCROISSEMENT DE LA TAILLE DES NAVIRES : L’UNE DES REPONSES A LA MONDIALISATION DES ECHANGES
13
PREMIERE PARTIE L’accroissement de la taille des navires : l’une des réponses à la mondialisation des échanges Avant toute chose, le concept du gigantisme et ses limites doivent être définis.
1.1. Définition du « Gigantisme »
« … se dit pour le développement excessif d’un organisme quelconque : une entreprise atteinte de gigantisme. » Larousse de
la langue française.
« Gigantesque : gigantesco- (dérivé savant du latin gigas) – 1 - se dit d’un être animé, d’un objet extrêmement grand par rapport à l’homme : … 2 – se dit d’une chose (nom abstrait) qui dépasse toute mesure
: … » Larousse de la langue française.
La lecture des dictionnaires de la langue française ne donne que très peu d’éléments autre que « biologiques » sur le gigantisme, il est donc approprié de faire un rapprochement avec le mot gigantesque qui se dit d’un objet extrêmement grand par rapport à l’homme (mais sans qu’en matière de navigation il doive « dépasser toute mesure » !). Si actuellement, des dimensions sans précédent sont atteintes dans le transport maritime, il est à noter que les évolutions les plus significatives on eu lieu quelques décennies auparavant, comme par exemple dans les années 1960, la taille des navires de transport de vracs étant passée de 38 000 tonnes à plus de 150 000 tonnes en quelques années seulement (tandis que les gros pétroliers ne dépassaient pas 20 000 tonnes après la guerre !).
14
1.2. Le transport maritime : généralités et panorama
Afin de comprendre comment est régi le transport maritime d’un point de vue réglementaire et avant d’effectuer un tour d’horizon des principaux types de transport maritime, il importe de mentionner brièvement les instances internationales et nationales principales ayant pour objectif de concevoir, d’étudier, d’analyser et de faire évoluer les différentes réglementations liées au transport maritime. 1.2.1. Organisations majeures 1.2.1.1. L’Organisation maritime internationale (O.M.I.)
3
La mondialisation a entraîné de plus en plus d’échanges au niveau international. Le transport maritime est un de ces moyens d’échanges, d’où l’importance d’avoir une concertation au niveau mondial pour la sécurité des opérations maritimes. L’O.M.I fut créée en 1948, lors d’une conférence des nations unies ayant pour mission d’élaborer les dispositions universelles relatives à la sécurité en mer. D’autres problèmes relatifs à la sécurité apparurent ensuite, comme les risques de pollution de la mer par les navires et plus particulièrement par les pétroliers. Une convention internationale relative à cette question fut donc adoptée en 1954, et entra en vigueur en 1959.
Siégeant au Royaume-Uni, composée de 166 Etats membres, l’O.M.I. est la seule institution spécialisée des nations unies. C’est un organe technique ; la plupart des travaux sont effectués par des comités ou sous-comités (tous les membres peuvent y siéger sur un même pied d’égalité), dont le plus ancien est le comité de la sécurité maritime ou maritime security committee
(MSC). On citera également Le comité de la protection des milieux
marins ou marine environnement protection committee (MEPC) : créé en 1973, il est chargé de coordonner les activités de l’organisation dans les domaines de la prévention et de la maîtrise de la pollution. 3
Sources Wikipedia : www.fr.wikipedia.org et site OMI : www.imo.org (IMO : International Maritime Organization)
15
Sous ces deux comités fonctionnent un certain nombre de sous-comités dont le nom fait référence aux domaines d’intervention concernés, quelques exemples : sécurité de la navigation (sous-comité NAV), radiocommunications, recherche et sauvetage (sous-comité COMSAR), formation et veille (sous-comité STW), transport des marchandises dangereuses, des cargaisons solides et des conteneurs (sous-comité DSC), conception et équipement du navire (sous-comité DE), … Un comité juridique a été constitué pour traiter des nouveaux problèmes juridiques et de responsabilité soulevés par l’accident du Torrey Canyon
(4)
en 1967 et il est devenu par la
suite un comité permanent chargé d’examiner toutes les questions juridiques liées aux différentes compétences de l’organisation. Conventions et protocoles
L’OMI a adopté une quarantaine de conventions et protocoles et plus de 800 recueils de règles, codes et recommandations ayant trait à la sécurité maritime, à la prévention de la pollution, etc. La Sécurité
Lors de la conférence de l’OMI, de 1960, fut adoptée, la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer ou International Convention for the Safety of Life at Sea
(Convention SOLAS), qui entra en vigueur en 1965. Une nouvelle Convention
SOLAS comportant de nombreux amendements fut adoptée en 1974 par l’OMI. Cette convention portait sur toute une série de mesures destinées à renforcer la sécurité de la navigation dans les domaines suivants : le compartimentage et la stabilité; les machines et les installations électriques; la prévention, la détection et l’extinction de l’incendie; les engins de sauvetage; la radiotélégraphie et la radiotéléphonie; la sécurité de la navigation; le transport de grains; le transport de marchandises dangereuses et les navires nucléaires.
4
Le pétrolier Torrey Canyon a fait naufrage le 18 mars 1967 entre les îles Sorlingues et la côte britannique. Plusieurs nappes de pétroles viendront toucher les côtes anglaises et françaises. Cet accident majeur donnera lieu aux premières politiques européennes, (françaises et anglaises) de prévention et lutte contre les marées noires.
16
La Convention SOLAS de 1974 est entrée en vigueur le 25 mai 1980 et a été modifiée depuis à plusieurs occasions pour prendre en compte des changements intervenus dans l’industrie des transports maritimes et des progrès techniques réalisés. Parmi les autres importantes conventions adoptées par l’OMI, qui traitent de questions de sécurité, figurent, entre autres, la Convention internationale de 1969 sur le jaugeage des navires; le Règlement international de 1972 pour prévenir les abordages en mer (COLREG), qui a rendu obligatoires les dispositifs de séparation du trafic et à réduit considérablement le nombre d’abordages dans bien des régions; et la Convention internationale de 1979 sur la recherche et le sauvetage maritimes. En matière de formation du personnel, l’OMI organisa en 1978, une conférence qui adopta la toute première Convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille ( International Convention on Standards of training, Certification and watchkeeping for Seafarers -
STCW). Cette convention est entrée en
vigueur en 1984 et établissait, pour la première fois, des normes minimales applicables aux équipages qui soient acceptables au niveau international. Elle a été révisée en 1995 et est entrée en vigueur en 1997, donnant à l’OMI le pouvoir de vérifier les méthodes de gestion, de formation et de délivrance des brevets appliqués par les parties à la Convention. Un texte très important, reprenant toutes les conventions antérieures (sur la formation et la condition des marins en général) et les homogénéisant, est en cours de ratification. Pollution et indemnisation
Bien que la Convention de 1954 pour la prévention de la pollution des eaux de la mer par les hydrocarbures ait été mise à jour en 1962, le naufrage du Torrey Canyon, en1967, donna lieu à une série de nouvelles conventions et autres instruments, y compris à l’apport de nouveaux amendements à la Convention de 1954, qui furent adoptés en 1969.
17
La Convention internationale de 1969 sur l’intervention en haute mer en cas d’accident entraînant ou pouvant entraîner une pollution par les hydrocarbures, qui confère aux états côtiers le droit d’intervenir lors d’évènements en haute mer risquant de causer une pollution par les hydrocarbures, est entrée en vigueur en 1975. La Convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures et la Convention a porté création d’un Fonds international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures et établit un régime d’indemnisation des victimes de pollution par les hydrocarbures provenant des navires. La Convention de 1954 pour la prévention de la pollution des eaux de la mer par les hydrocarbures fut modifiée de nouveau en 1971. En 1973, l’OMI convoqua une importante conférence pour débattre de l’ensemble du problème de la pollution des mers causée par les navires. Cette conférence aboutit à l’adoption de la convention antipollution la plus complète qui ait jamais été élaborée : la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (Convention MARPOL- International Convention for the Prevention of pollution from ships
).
La Convention MARPOL traite non seulement de la pollution par les hydrocarbures mais aussi de la pollution due aux produits chimiques, à d’autres substances nuisibles, aux ordures et aux eaux usées. Elle réduit considérablement la quantité d’hydrocarbures qui peut être rejetée à la mer par les navires et elle interdit totalement de tels rejets dans certaines zones écologiquement vulnérables. En 1978, l’OMI organisa la Conférence sur la sécurité des navires-citernes et la prévention de la pollution, laquelle adopta un protocole additif à la Convention MARPOL, instituant de nouvelles mesures y compris certaines méthodes d’exploitation et prescriptions en matière de construction des navires-citernes. Le Protocole de 1978 relatif à la Convention MARPOL de 1973 reprend en fait la convention antérieure et l’instrument combiné est communément appelé MARPOL 73/78. Il est entré en vigueur en octobre 1983 et a fait l’objet de plusieurs amendements.
18
En 1990, l’OMI adopta la Convention internationale sur la préparation, la lutte et la coopération en matière de pollution par les hydrocarbures (Convention OPRC – International Convention on oil Preparedness, Response and Co-operation ),
qui visait à
renforcer les moyens dont disposaient les nations pour faire face à une situation d’urgence. Cette convention entra en vigueur en mai 1995. En 1996, l’OMI adopta la Convention internationale sur la responsabilité et l’indemnisation pour les dommages liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses, qui établit un régime d’indemnisation accru et à deux niveaux concernant non seulement la pollution mais aussi d’autres risques, tels que les risques d’incendie et d’explosion. Enfin une convention créant un troisième niveau est en cours de ratification. L’OMI assure les fonctions de Secrétariat relatives à la Convention sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets 5, qui est entrée en vigueur en 1975. Cette convention interdit le rejet de certaines substances dont on sait qu’elles sont particulièrement nuisibles et comporte des règles particulières se rapportant à l’immersion de plusieurs autres matières susceptibles de présenter des risques pour le milieu marin et la santé de l’homme. En 1974, l’OMI adopta la Convention d'Athènes relative au transport par mer de passagers et de leurs bagages ( Athens Convention relating to the Carriage of passengers and their Luggage by Sea),
qui établissait un régime de responsabilité pour les dommages subis par
les passagers transportés à bord de navires océaniques. La question générale de la responsabilité des propriétaires de navires fit l’objet d’une convention adoptée en 1957. En 1976, l’OMI adopta une nouvelle Convention sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes, laquelle releva les limites antérieures de 300 % dans certains cas ( Convention on Limitation of Liability for Maritime Claims).
5
Convention de Londres entrée en vigueur en 1975.
19
Des limites étaient fixées pour deux types de créances, à savoir les créances pour mort ou lésions corporelles et les créances pour dommages matériels, tels que les dommages subis par les navires, les biens ou les installations portuaires. La Convention pour la répression d’actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime, qui vise à renforcer les mesures destinées à faire face à des incidents tels que des actes terroristes à l’encontre de navires de commerce, fut adoptée en 1988. Elle entra en vigueur en mars 1992. Recueil des règles, codes et recommandations
L’OMI a également adopté plusieurs centaines de recueils de règles, codes, directives et recommandations portant sur un très large éventail de questions qu’il n’a pas été jugé opportun de réglementer par des instruments conventionnels en bonne et due forme. Bien qu’en général, ces textes ne lient pas juridiquement les gouvernements, ils leur offrent des conseils sur la manière d’élaborer leurs propres règlements et prescriptions. Nombreux sont les gouvernements qui appliquent les dispositions des recommandations en les incorporant, en totalité ou en partie, dans leur législation ou leur règlementation nationale. Dans certains cas, des recueils de règles ou codes importants ont été rendus obligatoires en incorporant des renvois pertinents à une convention. A titre d’exemple, parmi les nombreux recueils de règles, codes et recommandations adoptés au fil des ans figurent les suivants : le Code maritime international des marchandises dangereuses (adopté pour la première fois en 1965) ; le Recueil de règles pratiques pour la sécurité du transport des cargaisons solides en vrac (Recueil BC 1965) ; le Code international de signaux ; les Recueils de règles relatives à la construction et à l’équipement des navires transportant des produits chimiques dangereux en vrac (Recueil BCH 1971) et des gaz liquéfiés en vrac (Recueil de règles sur les transporteurs de gaz 1975) ; le Recueil international de règles sur les transporteurs de gaz (Recueil IGC 1983) ; le Recueil international de règles sur les transporteurs de produits chimiques (Recueil IBC 1983) ; le Code international de gestion de la sécurité (Code ISM 1993) et le Recueil international de règles relatives aux engins de sauvetage (Recueil LSA 1996). 20
D’autres recommandations importantes complètent certaines règles telles que les dispositifs de séparation du trafic (qui consistent à séparer les navires faisant route dans des directions opposées grâce à la mise en place d’une zone d’interdiction centrale), l’adoption de manuels techniques, tels que le vocabulaire normalisé de la navigation maritime, le Manuel OMI de recherche et de sauvetage et le Manuel OMI sur la pollution par les hydrocarbures, la formation des membres des équipages, les normes de fonctionnement du matériel de navigation de bord, ainsi que de nombreux autres sujets. Le fonctionnement
Les comités et sous-comités spécialisés de l’OMI sont composés de représentants des états Membres. L’OMI a conclu des accords formels de coopération avec plus d’une trentaine d’organisations intergouvernementales; par ailleurs, elle a accordé le statut consultatif à près de cinquante organisations internationales non gouvernementales, lesquelles peuvent ainsi participer aux travaux de divers organes en qualité d’observateurs. Bien que ces organisations, qui représentent un large éventail d’intérêts maritimes, juridiques et environnementaux, apportent leur contribution aux travaux de l’OMI, en soumettant des documents et en fournissant des renseignements, ainsi que les conseils d’experts, aucune d’elle ne dispose du droit de vote. Un instrument adopté entre en vigueur lorsqu’il a été satisfait à un certain nombre de conditions énoncées dans ledit instrument, au nombre desquelles figure toujours sa signature puis sa ratification par un nombre déterminé de pays. Plus la convention est importante, plus les prescriptions relatives à son entrée en vigueur sont rigoureuses. Les pays qui sont parties à une Convention sont tenus d’en mettre les prescriptions en œuvre. En revanche, les recueils de règles, codes et recommandations adoptés par l’Assemblée de l’OMI n’ont pas force obligatoire pour les gouvernements, mais leur contenu peut être tout aussi important et, come déjà indiqué, les gouvernements les mettent souvent en œuvre dans le cadre de leur législation.
21
1.2.1.2. Agence Européenne pour la Sécurité Maritime (EMSA - European Maritime Safety Agency)
Les premières réelles prises de consciences des politiques au niveau européen sont intervenues après le naufrage du pétrolier Torrey Canyon . Par la suite, les naufrages de l’ Erika6 et du Prestige7 ont amené l'Union européenne à renforcer la sécurité maritime à travers différentes directives et autres réglementations. Parmi celles-ci figure la création de l’Agence européenne pour la Sécurité maritime (EMSA) qui assiste la Commission et les Etats membres en matière de sécurité maritime, sûreté maritime et prévention de la pollution causée par les navires. A cette fin, elle veille à la bonne application de la législation européenne et promeut la coopération entre les Etats membres. Dès ses débuts opérationnels, l'EMSA a contribué à l'évaluation des sociétés de classification reconnues par la Commission européenne et des centres de formation maritime dans les Etats tiers ainsi qu'à la vérification du respect des contrôles des navires par les pouvoirs publics dans les ports. De même, elle a amélioré les échanges d’informations entre Etats membres grâce à la tenue d’ateliers de travail. En 2004, l’EMSA s’est vue confier une tâche supplémentaire, parmi d’autres intervenues depuis, celle de prêter main forte aux Etats membres en cas de pollution majeure. A cette fin, elle a affrété des navires anti-pollution qui aux quatre coins de l’Europe, peuvent intervenir à la demande des Etats membres menacés par une pollution.
6 7
Lors d’un transit entre la France et l’Italie le pétrolier Erika a fait naufrage en 1999 au large des côtes de la Bretagne. Il transportait 37 000 tonnes de fuel lourd. Le 13 novembre 2002, lors d’un transit entre la Lettonie et Gibraltar, en pleine tempête au large du cap Finisterre, le pétrolier Prestige, signale une brèche dans son flanc droit. Alors que plus de 5 000 tonnes de fioul se sont déjà répandues polluant le littoral sur plusieurs dizaines de kilomètres, le 19 novembre 2002, le navire se brise en deux à 270 km des côtes de la Galice et coule par 3 500 mètres de fond. Pendant les opérations de remorquage, il a perdu de 5 à 10 000 tonnes de fioul lourd (sa cargaison est de 77 000 tonnes de fioul lourd). Une gigantesque marée noire va souiller gravement les côtes de Galice, du Portugal, du Pays basque, d'Aquitaine, de Vendée, et du sud de la Bretagne. (source Wikipedia – www.fr.wikipedia.org)
22
Depuis Avril 2007, l’Agence met en place un autre dispositif, dénommé CleanSeaNet 8, qui est un système de suivi des navires transportant des cargaisons dangereuses. Elle travaille aussi à un dispositif permettant d’harmoniser les enquêtes après accidents. Grâce à des images satellites, de prévenir très rapidement un Etat membre que des rejets polluants illégaux ou accidentels ont lieu près de ses côtes. Le sommet européen du 13 décembre 2003 a fixé le siège de l’EMSA à Lisbonne. L’installation dans la capitale portugaise est effective depuis mai 2006. 9
1.2.1.3. Le rôle du préfet maritime en France
Le préfet maritime est l'unique représentant de l'État en mer depuis les côtes de métropole jusqu'en haute mer. Il est d'abord le garant du respect de la souveraineté et de la défense des intérêts de notre pays. Il veille notamment au maintien de l'ordre public et à une utilisation juste et harmonieuse des richesses de la mer. En droit, le territoire français s'arrête à 12 milles marins (environ 22 kilomètres) des côtes ou des îles, mais les intérêts de la France vont bien au-delà, en particulier dans les zones économiques exclusives (ZEE) 10. La plupart des activités maritimes, le commerce, la pêche, l'exploitation des fonds marins entre autres, peuvent se dérouler dans ces zones, tout comme nombre d'activités et de trafics illicites. La France entend exercer en mer, par les préfets maritimes (via l’autorité et les pouvoirs qui leurs sont donnés en particulier en cas de crise, sur toutes les administrations concernées et leurs moyens) toutes les compétences que reconnaît aux états littoraux le droit international. Il y a trois préfets maritimes en métropole.
8
http://cleanseanet.emsa.europa.eu/ Source : www.defense.gouv.fr/marine/ 10 La zone économique exclusive (ZEE) est un espace maritime sur lequel l’État côtier exerce des droits souverains en matière économique (exploration, exploitation, conservation et gestion des ressources naturelles etc). La notion de ZEE trouve son fondement juridique dans la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (ou Convention dite de Montego Bay, signée le 10 décembre 1982). La zone économique exclusive ne s'étend pas au-delà de 200 milles marins (370,4 km) des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale (article 57). 9
23
Les trois préfectures maritimes
Le préfet maritime de la Manche et de la Mer du Nord a son siège à Cherbourg. Le préfet maritime de l'Atlantique exerce ses fonctions depuis Brest, et le préfet maritime de la Méditerranée depuis Toulon. Outre-mer, le représentant de l'Etat en mer est le préfet ou le haut-commissaire, assisté du commandant local de la marine. 1.2.1.4. Autres acteurs
Le Secrétariat Général de la Mer (SGMER) 11
Sous l’autorité du Premier Ministre, le secrétariat général de la mer (SGMER) effectue un travail de coordination interministériel au quotidien afin d’amener les administrations (Intérieur, Défense, Economie, (douanes), Equipement, Transports, Mer, Affaires étrangères, outre-mer, Environnement, Recherche, Justice, agriculture et Pêche) à trouver ensemble les solutions optimales aux questions complexes qui leur sont soumises et qui relèvent de plusieurs d’entre elles. Le Secrétariat général de la mer joue aussi un rôle important de coordination, avec les préfets maritimes, en cas d’événements concernant la sécurité et / ou la sûreté maritimes. Divers
Il existe également d’autres institutions françaises non étatiques, qui en matière de réflexion et de conseil font référence dans le monde maritime. C’est le cas, par exemple de l’Institut Français de la Mer (IFM) 12 et du Cluster Maritime Français (CMF) 13. 1.2.2. Généralités sur le transport maritime
Le transport maritime représente 90 pour cent des échanges mondiaux de marchandises. Le transport de personnes par voie maritime dont la croisière, après quelques années de stagnation, semble parallèlement connaître un regain d’intérêt de la part de la population « vieillissante ». 11
Source site SGMER : www.sgmer.gouv.fr Institut Français de la Mer (IFM) : www.ifm.free.fr 13 Cluster Maritime Français (CFM) : www.cluster-maritime.fr 12
24
Le transport maritime est par nature international (sauf dans ses fonctions de cabotage 14 le long des côtes d'un pays). 1.2.2.1. Présentation générale
Le transport maritime consiste à déplacer des marchandises ou des hommes pour l'essentiel par voie maritime, même dans le cas où le transporteur maritime peut prendre en charge le pré-acheminement ou post-acheminement (positionnement d'un conteneur chez le chargeur et son acheminement au port, par exemple, on parle alors de « porte à porte »). Environ 7 milliards de tonnes de marchandises ont emprunté ainsi la mer en 2007, assurant 90% du trafic mondial.
Le mode de transport « en vrac » sec ou liquide couvre l'essentiel des matières premières (pétrole et produits pétroliers, charbon, minerai de fer, céréales, bauxite, alumine, phosphates, etc). À côté de ce transport en vrac, on trouve le transport de produits préalablement conditionnés se présentant sous forme de cartons, caisses, palettes, fûts, ce que l'on a coutume d'appeler de la marchandise diverse ou « divers » 15. Depuis le milieu des années soixante, un nouveau marché de transport par mer s'est développé : celui des conteneurs maritimes, qui est en train de devenir prépondérant. D'un format standardisé : 20 pieds (unité EVP : équivalent vingt pieds ou TEU : twenty-foot equivalent unit ) ou 40
pieds, ces « boîtes » ont connu un essor fulgurant, révolutionnant à
la fois le mode de transport mais également toute la chaîne logistique depuis le fournisseur jusqu'au client final (transport dit « de bout en bout »).
14
Cabotage : désigne un genre de navigation maritime qui consiste à se déplacer de port en port à proximité des côtes. (source WIKIPEDIA www.fr.wikipedia.com) 15 General cargo en anglais
25
Les autres modes de transport (routier, ferroviaire ou aérien) se sont adaptés pour faire de ces boîtes une « unité de transport intermodal ». La marchandise, une fois empotée en conteneur, ne subit plus d'autre manutention jusqu'à son destinataire final. Ce qui est manutentionné est ainsi le contenant et non le contenu. Il n'y a plus de rupture de charge. Le conteneur, spécialement conçu pour être facilement manutentionné, stocké, transporté, va rapidement présenter un certain nombre d'avantages telles que la diminution des casses ou la diminution des pertes et vols. La plus grande facilité de manutention de ces conteneurs entraine une réduction des coûts (amélioration de la productivité). Les navires passent moins de temps dans les ports. Le transport maritime de conteneurs se fait, de plus en plus, au moyen de porte-conteneurs intégraux, spécialisés. Les cales sont aménagées en cellules, véritables alvéoles, et un système de rails permet d'y guider par glissement les conteneurs. 1.2.2.2. Les acteurs principaux
L'armateur
C'est le premier acteur du transport maritime. Qu'il soit propriétaire, exploitant ou simple affréteur, c’est-à-dire loueur d'un navire, son rôle est de transporter les marchandises d'un point A à un point B par la mer, en temps et en bon état. NB : l’armateur « plein » est celui qui fait construire ou achète un navire, l’arme (c’est à dire recrute l’équipage), l’entretient, l’assure, l’opère. L’armateur est en relation avec d’autres acteurs tels que : - les transitaires ou commissionnaires ; - les chargeurs et réceptionnaires ; - les manutentionnaires qui effectuent les opérations portuaires ;
26
- les sociétés de remorquage, de pilotage , de lamanage16 ; - les assureurs maritimes qui assurent le navire et/ou la cargaison et/ou la responsabilité en cas d'accident (P&I 17 Protection and Indemnity club). Et encore quelques autres : L'agent maritime
C'est le représentant de l'armateur au port, il remplit les formalités administratives et s'occupe de tous les besoins d'un navire avant son arrivée et lors de son séjour au port (remorqueurs, pilote, réparations, relations avec l'administration maritime, etc), des besoins de l'équipage (relève, visite médicale, etc) et de la gestion de la cargaison. La réglementation oblige les navires à avoir un agent désigné sur place. Le commissionnaire de transport
C'est la personne qui organise le transport de l'usine au magasin. Il choisit les différents transporteurs, donc le navire dont il a besoin en fonction des marchandises que le chargeur lui confie. Il a des relations avec l'agent maritime pour la réservation des frets et la livraison des marchandises. Le shipchandler
C'est la compagnie qui avitaille les navires (approvisionnement en tabacs, alcools, produits alimentaires et toutes autres demandes spécifiques).
16
Lamanage : Ce terme désigne des opérations d'assistance à l'amarrage, au désamarrage des navires lors de leur arrivée, départ ou également de leur mouvement (changement de poste à quai) à l'intérieur des ports. 17 P&I clubs : les P&I clubs sont des mutuelles d’armateurs créées en Angleterre au milieu du XIX ème siècle pour couvrir la responsabilité civile des armateurs et des affréteurs de navire. Treize des principaux P&I clubs sont regroupés au sein de l’International P&I Clubs.
27
Le courtier maritime « shipbroker »
Le Shipbroker est un professionnel qui s'entremet entre deux entreprises, soit pour acheter/vendre un navire neuf (entre un armateur et un chantier) ou un navire d'occasion (entre deux armateurs), soit pour la location (l'affrètement) d'un navire entre celui qui a une marchandise à transporter et celui qui possède le navire susceptible de répondre à cette demande. Il facilite la partie négociation, aide à la conclusion du contrat et effectue un suivi de l’exécution du dit contrat. En France, il existe une deuxième sorte de Courtier Maritime. Créé par Colbert dont le « privilège » a été supprimé en 2001 18 pour des raisons de libre concurrence. C’est le courtier maritime, interprète et conducteur de navires, qui « conduit » les navires en douanes, donc effectue les différentes formalités douanières et fiscales relatives à l’escale d’un navire étranger dans un port français. Il s‘appelle à présent « conducteur en douanes de navires ». 1.2.2.3. Les différents types de navire
Depuis la seconde moitié du XXe siècle, les navires cargos se sont considérablement spécialisés au point de présenter des apparences caractéristiques selon leur type (cf cidessous). Ils présentent néanmoins un certain nombre de caractéristiques communes, par exemple : - l'immense majorité de ces navires possède une coque en acier soudé, souvent assez « pleine » afin de maximiser la quantité de marchandises transportées. La coque comprend plusieurs cales contenant la cargaison, divisées entre elles verticalement par des cloisons et parfois horizontalement par des ponts intermédiaires (encore appelés « faux ponts »). Les navires-citernes n'ont pas de cales mais des citernes ou cuves. Les cales ou cuves sont surmontées du pont principal (sauf sur les navires non pontés comme certains porte-conteneurs), sur lequel se trouvent les grues et autres apparaux. 18
Loi n°2001-43 du 16 janvier 2001 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports. (version consolidée au 01 janvier 2006)
28
Sauf exception, c'est à l'arrière du navire que l'on trouve la salle des machines renfermant les moteurs, surmontée par la superstructure dans laquelle loge et vit l'équipage ; - en haut de la superstructure, la passerelle permet de commander le navire ; - la propulsion est assurée le plus souvent par un ou plusieurs moteur(s) diesel. Les grands navires (plus de 10 000 tpl) n'ont souvent qu'un seul moteur diesel deux-temps à faible vitesse de rotation, entraînant une hélice unique ; la production d'électricité est alors assurée par plusieurs générateurs diesel quatre-temps indépendants. Sur les plus petites unités, on trouve plutôt un ensemble de moteurs diesel quatre-temps, entraînant une ou deux hélices via un réducteur. Les hélices sont parfois à pas variable (pales orientables) pour améliorer la manœuvrabilité. On trouve de plus en plus souvent un ou deux propulseurs transversaux pour faciliter les manœuvres portuaires. Les différents types de navires
On distingue différents types de navires cargos selon le type de marchandises qu'ils transportent, et leur façon de les transporter. La principale distinction se fait entre ceux qui transportent une cargaison « sèche » (vrac solide, caisses, conteneurs, voitures...) et ceux qui transportent une cargaison liquide, ceux-ci étant obligatoirement contenus dans des citernes. Cargaison sèche
Ces navires transportent des marchandises solides, sous différentes formes : caisses, conteneurs, vrac, etc. On y trouve, entre autre et essentiellement, le transport de porteconteneurs et le transport de vracs. Porte-conteneurs
Navires puissants et rapides, les porte boites, en jargon de marin. Leur taille s'évalue en quantité de conteneurs de 20 pieds (environ 6 m) qu'ils peuvent arrimer. Les plus gros actuels font plus de 350 m de long et transportent 10 000 à 13 000 EVP. La prochaine génération risque d’être encore plus grande.
29
Vraquiers
Classés parfois en O/O ou O/B/O. minerai ou pétrole. O/B/O minerai/vrac/pétrole. Ces navires indifféremment du grain, du minerai minéraliers)
Ro Ro
Roll on/roll off. Navires équipés de portes permettant de faire entrer et ressortir des véhicules, voitures et camions. Ils assurent ainsi le prolongement des réseaux terrestres.
Ron on Roll off
O/O ore/oil Ore/bulk/oil transportent (ce sont les
Cargaison liquide
Les navires-citernes sont destinés au transport de marchandises liquides tels que le transport de pétrole, le transport de produits chimiques et par extension le transport de certains gaz liquéfiés.
Pétrole Brut
Les plus grands navires jamais construits. Baptisés VLCC 19 ou ULCC20 jusqu’à 350 000 tonnes aujourd’hui, existent aussi dans des tailles plus modestes mais guère en dessous de 100.000 tonnes de port en lourd.
Pétrole, Produits
Transportent plutôt des produits raffinés, trois ou quatre différents en même temps, essence, gazole, kérosène, fuel domestique. Donc des navires de taille réduite, guère plus de 5 ou 10 000 tonnes de port en lourd jusqu’à 60 à 80 000 tonnes de port en lourd.
19
VLCC - Very Large Crude Carrier . Il s’agit de pétroliers dont le port en lourd est compris entre 150 000 tonnes (fin de la taille des Suezmax) à 320 000 tonnes. Pour les navires de transport de vracs on parle de VLBC (Very Large Bulk Carrier ) ou parfois VLOC ( Very Large Ore Carrier ). 20 ULCC - Ultra Large Crude Carrier. Désigne les pétroliers ayant un port en lourd supérieur à 320 000 tonnes. Il existe également le terme de ULBC (Ultra Large Bulk Carrier) pour les transports de vracs.
30
Cargaison liquide (suite)
Chimique
Navires sophistiqués transportant à peu près n'importe quel liquide chimique, à la pression atmosphérique. Chaque cuve est équipée d'une pompe et d'un tuyautage à part, ce qui leur permet de transporter autant de produits différents que de cuves, 30 ou 40.
Gaz
Avec des techniques de construction différentes, transportent des gaz à pression normale mais plus ou moins réfrigérés: butane, méthane, gaz naturel (LNG) ou gaz de pétrole liquéfiés (LPG).
Le transport de passagers
Le transport de passagers (ferries et paquebots de croisière) a connu un regain certain ces dernières années. En effet, avec le vieillissement de la population mondiale, ce mode de transport connaît une évolution favorable. Ferries
Transbordeurs en français. On appelle ferry aussi bien une vedette transportant 200 passagers de Groix à Lorient, qu'un navire transportant 2 000 passagers de France en Angleterre (en général, il s’agit de navires effectuant des liaisons régulières relativement courtes).
Paquebots de
Nombreux et luxueux, transportent des milliers de passagers, autour du monde, ou pour une nuit pour jouer au casino. En général grands navires, mais il existent aussi de petites unités de luxe, même à voile. Les plus gros (en construction à ce jour) auront jusqu’à 8500 personnes à bord (équipage et passagers).
croisières
Il existe également d’autres types tels que les navires réfrigérés les navires de « service » (câbliers, offshore, remorqueurs, recherche…), les flo flo, les transporteurs de colis lourds.
31
1.3. Evolution de l’économie mondiale 21
Le transport maritime, on l’a vu, représente 90 pour cent des échanges mondiaux. Son évolution est comparable voire supérieure à l’évolution de l’économie mondiale. 1.3.1. Généralités
L’économie mondiale a continué à tourner à plein régime en 2007 avec une croissance de 4,9 pour cent contre 5,0 pour cent en 2006 (fig.1).
(fig. 1 - Source : rapport BRS 2008 22)
La croissance du commerce mondial est tombée à 5,5 pour cent en 2007 contre 8,5 pour cent en 2006, pouvant encore se ralentir en 2008 à 4,5 pour cent. Selon les économistes de l’OMC, la forte décélération économique dans les principaux pays développés n’est que partiellement compensée par la croissance soutenue dans les pays émergents. Cela dit, et c’est très important, on reste sur des rythmes de croissance inconnus les décennies précédentes. Les échanges commerciaux sont d’ailleurs restés soutenus et ont encore crû de 6,6 pour cent (contre 9,2 pour cent en 2006), ce qui est considérable.
21 22
Sources données OMC et CNUCED. (www.wto.org) Transport maritime et construction navale : revue annuelle Barry Rogliano Salles (BRS) sur le transport maritime et la construction navale pour l’année 2007 et perspectives pour les mois à venir. (www.brsparis.com)
32
23
1.3.2. 2007
C’est l’Amérique du Nord qui a affiché la plus faible croissance de la production, tandis que les pays en développement et les pays de la communauté des Etats indépendants (CEI) ont maintenu ou accéléré la croissance de leur production, contribuant ainsi à plus de 40 pour cent à la croissance de la production mondiale en 2007. La part des pays émergents dans le commerce mondial de marchandises s’est établie à 34 pour cent en 2007. La croissance de la production et des échanges mondiaux s’est ralentie en 2007. La baisse de la demande dans les pays développés a ramené la croissance économique mondiale de 3,7 à 3,4 pour cent (taux moyen des dix dernières années), taux encore très important, d’autant que d’une manière générale les échanges commerciaux générés par la croissance économique progressent plus que la croissance elle même, et les échanges maritimes encore plus que les échanges commerciaux. La croissance des régions en développement a été trois fois supérieure à celle des régions développées s’établissant à 7 pour cent. La contribution des pays émergents à la croissance de la production mondiale en 2007 a dépassé 40 pour cent. Stimulée par la forte hausse des recettes d’exportations et l’accroissement des investissement, la croissance économique de la Russie a été de 8 pour cent (taux le plus élevé depuis 2000). En Amérique du Sud et centrale, en Afrique et Moyen Orient et dans les pays émergents d’Asie, la croissance économique n’a montré aucun signe de décélération. La croissance du commerce des marchandises de la Chine est restée très vigoureuse en 2007, le ralentissement des exportations vers les Etats-Unis et le japon étant compensé par la croissance plus forte des exportations vers l’Europe et les pays exportateurs de pétrole.
23
Source Organisation mondiale du commerce (OMC) ou World Trade Organiztion (WTO) (www.wto.org)
33
1.3.3. Perspectives pour 2008
Les événements récents 24 assombrissent quelque peu les perspectives à court terme de l’économie mondiale. Une possibilité de récession existe aux Etats-Unis et la croissance de la demande devrait être plus faible en Europe et au Japon. Des nouvelles plus positives viennent des pays en développement et de la CEI. La question cruciale est de savoir combien de temps les pays émergents pourront maintenir un rythme de croissance économique élevé face à la faiblesse de la demande sur les principaux marchés développés ? Mais d’une manière générale, le tableau reste positif pour 2008 pour ces pays émergents. NB : Il est à noter que depuis 2001, année de son accession à l’OMC, la Chine a vu ses importations et exportations augmenter de 25 pour cent par an en moyenne, soit plus de deux fois plus que le commerce mondial. D’autre part, bien que l’on note une diminution de la production industrielle dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), le trafic maritime n’en n’a pas souffert, ce qui confirme l’adoption d’hypothèses relativement positives.
1.4. La part du commerce maritime dans les échanges mondiaux 1.4.1. La part du transport maritime 25 en progression constante
L’entrée de la Chine dans l’OMC a durablement désorganisé les transports maritimes 26, en particulier dans le secteur des matières premières, milieu dans lequel le taux d’affrètement a été multiplié par dix en dix ans. Le commerce maritime international dépasse les 7,4 milliards de tonnes, et si jusqu’en 2000, c’est le transport conteneurisé qui a porté la croissance, depuis 2000 c’est le flux de matières premières (vracs secs) qui a aussi « tiré » le commerce. 24
Crise des subprimes : c’est une crise financière et boursière mondiale, révélée en février 2007. Source : Revue annuelle BRS sur le transport maritime et la construction navale pour l’année 2007 et perspectives pour les mois à venir. 26 Selon la note numéro 100 de l’ISEMAR (ISEMAR : Institut Supérieur d’économie maritime). 25
34
(fig. 2 Source
)
L’ensemble du transport maritime a connu une croissance importante depuis le début des années 1980 (fig. 2). Sur la période, l’évolution du marché du transport conteneurisé est la plus significative. L’accroissement vertigineux des capacités d’emport des 10 premières compagnies mondiales de transport conteneurisé (fig. 3 et 4) s’explique également par un fort phénomène d’acquisition / fusion accroissant les capacités d’investissement des acteurs concernés.
(fig. 3 et 4 - Marché mondial du transport par conteneur en million TEU source Kuehne + Nagel)
35
Les tendances par types
Vrac sec
La croissance de la production d’acier en Chine a provoqué une augmentation rapide des importations de minerai de fer qui ont constitué le principal facteur de dynamisme des marchés. Les frets ont pulvérisé en 2007 tous les records. Porte-conteneurs
Les loyers des navires se sont appréciés tout au long de l’année 2007 même s’ils n’ont pas atteint les sommets de 2005. La crise américaine des crédits hypothécaires à risques (subprimes) a eu des effets sur l’économie mondiale, dont l’ampleur est assez difficile à apprécier pour le moment. Cependant, le risque existe que cela conduise à une baisse globale de la demande de transport, mais cela n’est pas encore véritablement vérifié. D’ailleurs, en prévision d’une croissance soutenue des échanges mondiaux, quelques transporteurs ont lancé en 2007 des programmes de construction, mettant l’accent sur les 13000 EVP (trafic Europe – Asie). Ces transporteurs devraient continuer à bénéficier d’économies d’échelles au fur et à mesure de l’arrivée des porte-conteneurs géants (8000 EVP à 13000 EVP).
En 2008, la capacité d’emport opérationnelle devrait être égale à la demande, l’équilibre devrait être atteint. (rapport Kuehne + Nagel)
Pétrole
36
Les frets sont restés à des niveaux élevés en 2006. Puis après une chute début 2007 probablement due à la crise des crédits aux Etats-Unis, au manque de liquidité et au surplus de navire, la tendance est repartie à la hausse en novembre 2007. En dépit des fortes hausses des prix du brut et d’un ralentissement notable de la croissance de certaines économies occidentales, les perspectives de consommation sont à la hausse, poussées en cela par les besoins énergétiques des pays en plein développement tels que la Chine, l’Inde et le brésil. Gaz naturel liquéfié 27
L’Asie reste le plus gros acheteur de gaz naturel liquéfié. Les Etats-Unis sont un puissant vecteur de croissance d’importation pour les années à venir. La demande nord-américaine représentant 50 pour cent de l’accroissement l’accroissement futur de la demande mondiale, les 20 millions de tonnes par an actuellement actuellement importées dans la zone pourraient être multipliées multipliées par 3 ou 4 dans les dix prochaines années.
1.5. Evolution des capacités de transport 1.5.1. Augmentation de la densité du trafic maritime
La mondialisation et la délocalisation des entreprises des Etats-Unis et l’Europe vers l’Asie (boom Chinois) ont entraîné une demande supérieure, en particulier en transport de biens (conteneurs) à la fois en nombre et taille.
les services du ministère de l’Energie, l a France importera en 2030 presque deux fois plus de gaz qu’en 2006, posant un double problème d’infrastructures d’infrastructures et d’origine géographique de ce gaz.
27Selon
37
Il est à noter également que la densité du trafic maritime conteneurisé a augmenté sur les principales routes maritimes mondiales 28 (fig. 5).
(fig. 5 - Source rapport Kuehne + Nagel)
Les routes principales d’exportation de pétrole devraient également connaître un accroissement accroissement significatif du volume transporté (fig. ci-dessous).
Source conférence Medium term oil market report (IEA Oil Market report) 28
Source rapport Kuehne + Nagel
38
1.5.2. Le « boom » des commandes de navires 29
Pour faire face à la demande à venir qui ne semble pas être à la baisse les carnets de commandes sont pleins. En effet, fin 2007, le carnet de commandes s’élevait à près de 530 millions de tpl, soit cinq fois le niveau de 2000 ! La moitié de ce carnet de commandes est constituée de navires vraquiers. Il est à noter également que le phénomène le plus nouveau de 2007 qui était assez inattendu est la multiplication des transformations de navires citernes à simple coque en vraquiers (l’utilisation (l’utilisation de pétroliers double coque devenant obligatoire obligatoire à partir de 2010, et rendant de ce fait l’utilisation des simple coque impossible). La demande a donc explosé (fig. 6 et 7), ce qui s’est encore vérifié avec plus de 300 millions de tpl de nouvelles commandes (4900 navires contre 169 millions en 2006). La production mondiale de navires atteint environ 90 millions (2300 navires) contre 75 millions en 2006. Les carnets de commandes s’étalent sur plusieurs années et on parle de livraisons pour 2013 au Japon. L’année 2006 avait été marquée par la vigueur des commandes de pétroliers, l’année 2007 a été dominée par une demande sans précédent de vraquiers et de porte-conteneurs.
(fig. 6)
29
Source revue annuelle BRS sur le transport maritime et la construction navale pour l’année 2007.
39
(fig. 7)
1.6. L’accroissement de la taille des navires
1.6.1. Le constat actuel
Parallèlement à l’augmentation de la densité du trafic maritime et au nombre de commandes de navires, les dimensions des navires de tout type n’ont cessé d’évoluer ces dernières années (fig. 8).
Suezmax (2006 - …)
(fig. 8 - Source : rapport Kuehne + Nagel)
40
Alors que la première génération de porte-conteneurs se « limitait » à 2000 conteneurs, 40 ans après environ, la capacité d’emport de 13000 conteneurs est devenue une réalité. Les nouvelles générations de porte-conteneurs (fig. 9) dépassent les 400 mètres de long (annexe 2).
(fig. 9 – rapport kuenhe + Nagel) ci-contre le dernier et plus gros porte conteneurs livré à la compagnie MAERSK
Le transport conteneurisé n’est pas le seul touché par le gigantisme, les autres modes de transport maritime voient leurs dimensions croître de manière significative (annexe 2 et 3). Le transport de gaz 30
En 1975, le plus gros méthanier avait une capacité de 130 000 m 3 et sa longueur était de 270 mètres. La capacité maximale d’une cuve était de 28 000 m 3. En 1995, le plus gros méthanier avait une capacité de 138 000 m 3 (fig. 10) et la capacité maximale d’une cuve était de 38 000 m 3. Les dimensions actuelles sont une capacité de 250 000 m 3 et 332 mètres de long, dimensions comparables à celle d’un VLCC.
(fig. 10)
30
Source - article « le gigantisme en construction navale et ses conséquences sur la sécurité des navires » par M.M. Pierre de Livois, directeur adjoint de la division marine du Bureau Veritas et Bernard Parizot, membres de l’académie de marine.
41
Le transport de pétrole
Le transport de pétrole a connu dans les années 1970, le gigantisme avec des navires de plus de 500 000 tonnes de port en lourd (ULCC). Suite à la crise pétrolière, la taille de ces navires est devenue plus raisonnable et s’est stabilisée aux environs de 300 000 tonnes de port en lourd, même s’il existe des navires plus importants. Les VLCC ont une capacité de port en lourd comprise entre 150 000 tonnes (fin de la taille des navires de type Suezmax) et 320 000 tonnes (début de la taille des ULCC). Ces navires ne peuvent passer ni par le canal de Suez (sauf allégement), ni par celui de Panama et doivent passer par les grands caps. Le transport de vracs
Le phénomène est identique au transport de pétrole, puisque la taille des plus grands navires vraquiers atteint la taille des VLCC ou des ULCC. Le transport de passagers
Les plus gros navires de transport de passagers peuvent atteindre une jauge de 160 000 tonneaux, une longueur de 339 mètres et une largeur de 38,6 mètres. Il peut transporter 4375 passagers et 1365 membres d’équipage. Le premier navire du type GENESIS, d’une jauge de 220 000 tonneaux devrait quitter les chantiers navals d’Aker Yards en 2009, avec plus de 8000 personnes à bord (équipage + passagers).
Crédits Aker Yards
42
1.6.2. Des projets pharaoniques dans le transport de passagers …
Les navires de type GENESIS à peine sorti des bureaux d’études et en construction depuis peu (livrables à partir de 2009), des projets encore plus ambitieux voient le jour sur les tables des concepteurs. C’est le cas du projet PINNACLE du chantier américain Carnival. D’une capacité de 6000 à 8000 passagers (sans compter les membres d’équipages), il serait le plus gros navire de croisière construit. Une navette permettrait le cas échéant de se déplacer sur les extérieurs. A noter cependant qu’il s’agit encore de projet sans signe de concrétisation.
(© : FINCANTIERI - vidéo diffusée sur You tube)
Il existe des projets de villes flottantes, “îles villes” effectuant des déplacements à faible vitesse. Ces “îles villes”, de 400 mètres de long et 300 de large, se déplaçant à 10 nœuds maximum, pourraient accueillir 10000 personnes plus l’équipage. Elles pourraient être présentées en 2010 à l’exposition universelle de Shanghai, même si beaucoup pense qu’il s’agit de rêves d’ingénieur. Toujours plus impressionnant, il existe un projet encore plus grand développé par la société FreedomShip Internationa31l de 1370 mètres de long, 229 de large et 100 mètres de haut pouvant transporter jusqu’à 100 000 personnes (taille de la ville de Nancy). Mais là aussi on est encore semble-t-il dans la fiction.
31
www.freedomship.com
43
1.6.3. … et dans le transport de conteneurs
Il en est de même pour les porte-conteneurs. Les capacités de transport allant jusqu’à 13000 EVP à peine atteintes, des projets de navires ayant des capacités supérieures voient le jour. C’est le cas, par exemple, d’un projet de porte-conteneurs de 22000 boites, présenté par le constructeur naval coréen STX. D’une taille de 460 mètres, 60 mètres de large et 30 mètres de profondeur, la vitesse de croisière serait de 24 à 26 nœuds. D’après le constructeur, les coûts d’exploitation baisseraient de 40 pour cent par transport par rapport à l’existant. Dans le domaine des navires de transport de pétrole, il est évoqué le retour possible des ULCC.
1.7. Les scénarios possibles de l’évolution des échanges mondiaux
Il existe plusieurs scénarios possibles, dans lesquels la croissance économique des pays développés reste quasi au niveau actuel, c’est à dire assez faible, tandis que la croissance économique des pays en développement continue à être forte voire très forte. Seule grande inconnue, la croissance économique de la Chine, qui, impressionnante depuis quelques années, est sujette à plusieurs scénarios. Scénario 1
La Chine poursuit sa croissance soutenue à deux chiffres, entraînant avec elle l’économie mondiale. Dans ce cas, les échanges de biens, de matières premières continueront de croître à un rythme élevé, l’offre de service de transport devant tout juste répondre à la demande en besoin de transport.
44
Scénario 2
La Chine connaît un ralentissement économique (demande de biens de consommation moindre) pouvant conduire le pays à se recentrer sur ses ressources intérieures et surtout en faisant ainsi diminuer les importations. Dans le même temps l’Inde et certains pays asiatiques conserveraient un taux de croissance économique toujours aussi soutenu, continuant à importer matières premières et biens de consommation, prenant ainsi au moins partiellement le relais de la Chine. Scénario 3
La baisse de la croissance économique de la Chine ne serait pas rattrapée par l’Inde et les différents pays asiatiques, entraînant cette région dans une crise économique assez importante, qui pourrait se répercuter dans les autres régions du monde. Dans cette hypothèse, le transport maritime pourrait connaître une baisse significative en terme d’échanges, les navires géants (principalement porte-conteneurs) pourraient non pas perdre de leur intérêt, mais être difficilement affectés à d’autres routes maritimes. En effet, pour l’heure, il parait difficile d’éviter les différents détroits de Malacca, le Canal de Suez etc… l’utilisation de route maritime dans le Nord que cela soit vers l’ouest ou vers l’est ne pourrait survenir que dans un horizon de quinze à vingt ans mais avec une utilisation plutôt saisonnière (été) assez limitée et dangereuse (dérive des glaces). Bien qu’il soit assez difficile de prédire l’évolution de l’économie mondiale, le scénario numéro deux servira de base de travail, étant au dire des spécialistes le scénario le plus probable. Hors il conduit à une croissance du transport maritime, avec tout au plus une certaine stagnation pendant une courte période.
Une croissance positive du transport maritime est dans ce cas, attendue.
45
DEUXIEME PARTIE LES CONTRAINTES LIEEES À L’ACCROISSEMENT DE LA TAILLE DES NAVIRES
46
DEUXIEME PARTIE Les contraintes liées à l’accroissement de la taille des navires
Après avoir abordé de manière synthétique les raisons qui ont conduit à l’augmentation de la taille des navires, il convient de s’intéresser, maintenant aux conséquences de cette évolution. L’idée de navire géant n’est pas récente. En effet, dans les années 1970, des projets de super pétroliers de 900 000 tonnes à 1 million de tonnes étaient élaborés et des pétroliers de 550 000 tonnes appelés ULCC étaient lancés. Cependant, dans les faits, ces super pétroliers ont très peu navigué, et certains ont même disparu très rapidement.
2.1. L’exemple des ULCC
Dans les années 1970, des navires dépassant les 500 000 tonnes devenaient une réalité. Les cinq plus grands ULCC Pierre Guillaumat et Prairial (Compagnie Française de Navigation du groupe Elf) ; Batillus et Ballamya (Shell France) ; un peu moins gros Esso Atlantic et Esso Pacific (Esso) furent construits dans les chantiers navals de Saint Nazaire et tous destinés à des compagnies pétrolières françaises. 2.1.1. L’exemple du Pierre Guillaumat et du Knock Nevis 32
2.1.1.1. Le Pierre Guillaumat
Le Pierre Guillaumat était un pétrolier géant, nommé ainsi en l'honneur de l’homme d’Etat Pierre Guillaumat.
32
Information WIKIPEDIA (www.fr.wikipedia.com)
47
Avec un port en lourd de 555 051 tonnes, il est le plus grand navire jamais construit ; seul le Knock Nevis a atteint un port en lourd supérieur, mais ce fut à la suite d’un agrandissement ou « jumboïsation 33 » et non dès sa construction. Le Pierre Guillaumat a eu trois sister-ships : le Batillus, le Prairial et le Bellamya. Mis en service en novembre 1977, le Pierre Guillaumat navigua avec la Compagnie Nationale de Navigation jusqu'en février 1983, puis il resta en attente à Fujaïrah ; mis en vente le 12 juillet de la même année, il fut acheté par Hyundai et renommé Ulsan Master , puis démoli en octobre 1983 à Ulsan en Corée du Sud. 2.1.1.2. Le Knock Nevis
Le Knock Nevis34 est un pétrolier géant de 458,45 mètres de long (annexe 3) et 69 mètres de large ce qui en fait non seulement le plus grand navire au monde mais également la plus grande structure mobile au monde ; toutefois, il n'a acquis ce titre qu'après un agrandissement. Le Knock Nevis a été construit entre 1979 et 1981 ; il a été endommagé durant la guerre Iran-Irak puis remis à flot en 1991. Il est actuellement utilisé comme station de stockage flottante. Son tirant d'eau est alors de 24,6 m ce qui restreint ses zones de navigation : il ne peut franchir les canaux de Panama ou de Suez, ni même la Manche. Doté d'un équipage de 40 personnes, il navigue sous pavillon de Singapour. Histoire Le Knock Nevis est construit au chantier naval Oppama au Japon (groupe Sumitomo Heavy Industries) pour l'armateur grec M.P.Nomikos. Ce dernier refuse finalement de prendre le navire après son lancement en 1975, en raison de problèmes techniques (vibrations excessives) et également en raison de la crise pétrolière.
33
La « jumboïsation » est une technique de construction navale consistant à agrandir substantiellement un navire déjà existant (par le rajout d’une « rondelle » au centre du navire). 34 Le Knock Nevis a porté précédemment les noms de Seawise Giant , Happy Giant et Jahre Viking.
48
Racheté en 1979 par le magnat du transport maritime Tung Chao Yung, de Hong Kong, il est allongé de 81 mètres en 1980, ce qui en fait le plus grand et gros navire au monde avec un port en lourd de 564 763 tonnes. Le Knock Nevis ou Seawise Giant à l’époque navigue peu. Il effectue deux voyages en 1981 dont un à charge partielle, puis est utilisé comme station de stockage flottante, à Aruba à partir de 1981, au Mexique en 1983 et en Iran en 1986. Le 14 mai 1988, durant la guerre Iran-Iraq, le navire est attaqué et gravement endommagé par des bombes irakiennes alors qu'il se trouve au terminal d'Ormuz, dans le détroit d'Ormuz. L'épave est alors remorquée à Brunei, puis rachetée en 1989 par une compagnie norvégienne. Elle est réparée au chantier Keppel à Singapour et renommée Happy Giant , puis Jahre Viking lorsque la compagnie est rachetée par Jørgen Jahre. Le navire effectue ensuite des traversées entre le golfe Persique et le golfe du Mexique, avec parfois des escales en Europe à Antifer 35. En mars 2004, il est envoyé en cale sèche à Dubaï afin d'être reconverti en FSO 36 (unité flottante de stockage et de déchargement) pour son nouveau propriétaire, Fred Olsen Production. C’est à cette époque qu’il fut baptisé Knock Nevis. Le navire est maintenant mouillé de façon permanente au champ pétrolier Al Shaheen, au Qatar. 2.1.2. Les raisons probables de l’échec
Les raisons qui expliquent l’échec de ces pétroliers géants sont d’ordre technique et économique. En effet les dimensions de ces navires ne permettaient qu’un accès restreint à certains ports, comme par exemple le port d’Antifer. Les contraintes de chargement des cargaisons de pétrole qui imposaient un maximum de 220 000 tonnes de pétrole par escale, obligeaient donc ces navires à effectuer plusieurs escales entraînant des surcoûts. De plus, l’immobilisation de telles quantités de pétrole devenait très difficile à assumer y compris financièrement pour les compagnies pétrolières, et enfin la consommation énorme de carburant de ces géants était trop importante (au regard du prix du pétrole). 35
Port d’Antifer : Le terminal pétrolier du Havre – Antifer se situe au nord du Havre et au sud d’Etretat. Il s’agit d’un port destiné à recevoir les superpétroliers. 36 FSO - flotting storage and offloading unit : station de stockage et de déchargement flottante.
49
2.2. Les contraintes liées au gigantisme dans le transport maritime
Les acteurs du transport maritime sont contraints d'adapter leurs outils à la concurrence (économie d’échelle) pour garder leur place face à une demande mondiale de plus en plus importante. Cette nécessaire adaptation soulève un certain nombre de questions liées aux contraintes d’exploitation des navires géants. 2.2.1. Les contraintes techniques
2.2.1.1. La conception des navires
La construction navale a bénéficié ces dernières années d’un effort important en matière de recherche et développement (R&D). Les nouvelles méthodes de calcul ainsi que les nouvelles technologies telles que la modélisation 3D (fig. 11) ou la simulation (fig. 12) utilisées pour étudier le comportement des navires face à la houle et effectuer des analyses très fines des différentes contraintes structurelles des navires en condition de navigation normale ou extrême (fonction de l’état de la mer…) ont permis, d’obtenir des gains en terme financier mais également en terme de temps de développement et de fiabilité.
(fig. 11 - Source Bureau Veritas)
A titre d’exemple, la modélisation 3D, moins performante à l’époque de la conception du Napoli 37, aurait permis d’éviter certaines de ses faiblesses structurelles.
37 Le
Napoli a été construit en 1991.
50
Ces dernières années, la réglementation internationale a imposé un certain nombre de systèmes tendant à améliorer la sécurité. Ainsi, certaines avancées techniques sont désormais intégrées aux navires dès la conception. Des efforts particuliers sont faits au niveau : -
de la visibilité de l’équipage en passerelle (sur un porte-conteneurs de plus de 400 mètres de long, il est difficile de surveiller tous les secteurs) ;
-
de l’emplacement des réservoirs de pétrole ;
-
de l’intégrité de la coque en cas de dommage ;
-
des systèmes de fixation des conteneurs ;
-
de la prévention de la perte de la cargaison mise en parallèle avec le temps nécessaire à la manutention de la cargaison, ainsi que de la prise en compte de la météorologie.
Des efforts sont également faits en matière de respect de l’environnement : -
la limitation des émissions de gaz d’échappement (CO2, NOX, SOX), du traitement des détritus et des eaux sales, de la prévention de la pollution par les hydrocarbures et le recyclage ;
-
de l’obtention d’un passeport “vert” ( green passeport ).
51
Source Bureau Veritas
52
La simulation permet également de valider les solutions obtenues avec l’aide de la modélisation 3D.
(fig. 12 - Source Bureau Veritas)
Les navires géants sont donc aussi sûrs que possible grâce à un effort de Recherche et Développement important visant à prendre en compte les phénomènes hydro élastiques, phénomènes également présents sur les autres types de navires. 2.2.1.2. Des aides à la décision au profit des commandants des navires
De nouveaux moyens techniques sont également mis à la disposition des commandants de navire sous forme de systèmes d’aides à la décision, afin d’optimiser les routes de navigation et d’éviter les situations extrêmes et de tension au sens propre du terme. Ils peuvent ainsi prendre des routes visant à éviter ces problèmes potentiels. 2.2.1.3. Les sous systèmes des navires (propulsion, énergie…)
Les progrès technologiques se retrouvent aussi lors de la conception et de la construction des systèmes qui composent le navire (appareil propulsif, énergie, gouvernail, etc).
53
Les plus grands porte-conteneurs d’une capacité d’environ 13000 conteneurs (Emma Maersk) sont équipés, aujourd’hui, d’un seul moteur de dimensions impressionnantes (piston de un mètre de diamètre). Bien que ces moteurs se montrent dans les faits très sûrs, il semble que les limites techniques soient atteintes. La construction d’un porte-conteneurs de plus grande capacité rendrait nécessaire l’utilisation de deux moteurs (schéma ci-dessous). L’utilisation d’un second appareil propulsif, de taille importante, viendrait diminuer la place disponible pour la cargaison, sans toutefois – très probablement – annuler l’économie d’échelle recherchée.
(fig. 1338 )
Les dimensions des navires, d’un point de vue purement technique et technologique n’ont donc, semble-t-il de limite que « l’imagination » des ingénieurs et architectes navals. Mais heureusement pour des raisons touchant à la sécurité, la prise en compte du facteur économique – ajoutée aux questions soulevées par les aspects sécurité – devrait venir limiter cette course en avant des dimensions de ces navires. Il est en effet important de se poser la question de l’opportunité d’investir lourdement (les plus grands navires de croisière coûtent plus de un milliard de dollars) dans la construction de tels navires. 38Source
- article « le gigantisme en construction navale et ses conséquences sur la sécurité des navires » par M.M. Pierre de Livois, directeur adjoint de la division marine du Bureau Veritas et Bernard Parizot, membres de l’académie de marine.
54
2.2.1.4. L’âge des navires
Un mouvement antagoniste ayant pour même cause la demande mondiale a vu le jour. D’un côté, la moyenne d’âge des navires des armateurs de premier plan n’a cessé de reculer ces dernières années et de l’autre, l’utilisation de navires vieillissants (occasions) se révèle également active et profitable. A titre d’exemple, l'âge moyen des navires sous pavillon français 39 est de 7,3 ans (baisse significative après l’adoption du G.I.E. fiscal 40), alors qu'il est encore de 16 ans en moyenne pour l'Union Européenne et de 19 ans pour la flotte mondiale.
NB : A noter qu’une directive de l’OMI rend obligatoire l’utilisation de pétroliers double coque en remplacement des pétroliers simple coque d’ici 2010 (d’où leurs éliminations du marché des tankers), mais en fait une « seconde vie » s’offre à ces pétroliers simple coque (ceux-ci étant pour certains transformés en vraquiers).
39
Informations armateurs de France (www.armateursdefrance.org) L'article 77 de la loi du 2 juillet 1998 a instauré le Groupement d'Intérêt Economique fiscal dit « GIE fiscal », venu modifier l'article 39 CA du Code général des Impôts. Cette loi vient en remplacement de celle du 5 juillet 1996 instituant le quirat, système d'aide d'état à l'investissement maritime (financement de la construction ou de l'acquisition de navires, sous pavillon français). Ce GIE a vocation à s'appliquer, notamment, au secteur maritime et est un des moyens de restaurer l'attractivité du pavillon français. Il permet aux sociétés de la marine marchande de bénéficier d'un amortissement exceptionnel et d'une exonération d'imposition sur les plus-values de cession. Il s'agit d'un moyen de gestion fiscal des déficits et d'une mesure d'allègement fiscal comme peuvent l'être les systèmes de la taxe au tonnage et du dégrèvement de la part maritime de la taxe professionnelle.
40
55
2.2.1.5. Les chantiers navals
La construction des navires géants nécessite des chantiers navals adaptés et disponibles. A l’heure actuelle, les délais d’attente pour un navire neuf sont de trois ans. Le temps de construction effectif n’étant que de huit mois. A noter que ce manque de disponibilité des chantiers navals augmente également les temps de réparation. Des sociétés de classification ont fait part de leurs craintes concernant l’arrivée sur le marché de la construction navale de navires « moins sûrs » construits par certains chantiers navals chinois manquant d’expérience 41. Autre paramètre pouvant venir amplifier ce phénomène, l’existence d’un sous effectif au niveau mondial de personnel qualifié, toutes catégories confondues, dans le monde du transport maritime (ingénieurs, architectes, autant que navigants…). 2.2.2. Les contraintes portuaires
D’un point de vue purement technique, l’accès aux ports par les navires est limité par un certain nombre de paramètres, tels que le tirant d’eau 42, le tirant d’air et l’évitage 43 ainsi que les conditions de dégagement liées aux possibilités offertes par les infrastructures (entreposage de conteneurs, véhicules etc). 2.2.2.1. L’accès aux ports
La France dispose d’un certain nombre de grands sites en eau profonde, ce qui n’est pas le cas pour la plupart des pays européens, voire dans le monde. De ce fait, actuellement, les ports capables d’accueillir les navires géants sont peu nombreux (fig. 14).
41
Article « arrivée d’une nouvelle génération de navires moins sûrs » - Le courrier – Chambre Syndicale des Chantiers navals (CSCN) 42 Tirant d’eau (draft) : c’est la hauteur de la partie immergée du navire qui varie en fonction de la charge transportée. Il correspond à la distance verticale entre la flottaison et le point le plus bas de la coque (la quille). 43 Evitage : manœuvre qui consiste à faire pivoter un navire sur lui-même dans un espace restreint en s’aidant de sa propulsion, de sa barre et éventuellement de remorqueurs et de pousseurs ou d’aussières sur un quai. Une zone d’évitage est une zone réservée dans un port pour cette manœuvre, et donc laissée libre de tout obstacle (source Wikipedia – www.fr.wikipedia.com).
56
Exemple tirant d’eau 44 / capacités portuaires (fig. 14 - Source : Rapport Kuehne + NAGel)
Ces très grands ports deviennent alors des ports d’éclatement et le recours au « feedering »45 se généralise. Le coût du « feedering » peut contribuer à diminuer au bout du compte les économies d’échelles obtenues avec les « navires géants ». Le coût de réacheminement de ces cargaisons par voie terrestre se révèle également très important. A titre d’exemple, il y a actuellement, entre 15 et 20 pour cent des navires de transport de vracs (mais c’est souvent vrai pour d’autres types de navires) en attente à l’entrée des ports, les infrastructures portuaires ne pouvant répondre à la demande.
Navires en attente devant Newcasttle
Source 44 45
Le tirant d’eau des porte-conteneurs d’une capacité de 11400 boites est de 15,5 mètres. Le feedering : les trafics de feedering permettent, au niveau d’un port dit « hub », d’acheminer les marchandises conteneurisées et récupérées auprès d’un navire « mère » vers des ports secondaires ou, à l’inverse, d’alimenter en conteneurs ces mêmes navires « mères » qui ne peuvent pas se rendre dans les ports secondaires. (Internet : auteur Maud Lucas, collaboration transmanche, université de Caen).
57
2.2.2.2. La manutention
A l’heure actuelle les ports restent donc un goulot d’étranglement. Des extensions sont en cours de réalisation pour répondre au volume de conteneurs en constante augmentation. Des études46 montrent que la plupart des ports américains ne seront pas capables de gérer le volume de conteneurs (amplifié par le gigantisme) attendu à l’horizon 2010. Par ailleurs, outre la contrainte logistique des zones de stockage 47, deux facteurs de risques supplémentaires ont été identifiés, concernant les opérations portuaires, et auxquels il va falloir trouver une meilleure réponse : - la concurrence et donc la course au gain de temps (escales réduites en temps), engendre une pression importante sur les professionnels travaillant dans les ports et constitue un facteur potentiel ou réel d’augmentation des erreurs humaines pouvant être commises lors de l’arrimage, de la pesée, du placement des conteneurs, etc et ce malgré l’existence d’installations remarquables (cf, le port d’Amsterdam et ses darses 48 doubles permettant à huit portiques d’effectuer simultanément les opérations et la pesée automatique des conteneurs sur certaines grues). Concernant l’aspect chargement, les « ship planners » doivent donc être compétents (et contrôlés !) sur leurs connaissances du milieu, des contraintes liées aux terminaux, des contraintes liées à la conception des navires ainsi que des différentes interfaces avec les logiciels embarqués.
- les responsabilités opérationnelles et « juridiques » des différents acteurs (et leur sanction) ne sont pas suffisamment définies, pas toujours adaptées, et/ou ne sont parfois pas compatibles entre elles (facteur de confusion et d’augmentation des risques).
46
Source rapport Kuehne + Nagel. Le stockage de plusieurs milliers de conteneurs ou de véhicules demande une surface disponible extrêmement importante. 48 Darses : c’est un bassin rectangulaire destiné principalement à l’accostage des navires. 47
58
Les terminaux semblent être un des maillons faibles de la chaine logistique. Il semble donc nécessaire de renforcer la sécurité des opérations à terre, en effectuant une harmonisation des réglementations portuaires, peut être en s’inspirant de l’esprit des systèmes ISM 49 s’appliquant aux armateurs. 2.2.3. Evolution du nombre d’accidents
50
Les accidents de navires peuvent être classés en deux grandes catégories : ceux aboutissant à la perte totale du navire et ceux n’engendrant « que » des dommages matériels mais sans perte du navire. De manière générale, bien que le trafic du transport maritime soit en nette augmentation ces dernières années, la tendance du nombre d’accidents de navires est à la baisse.
N° d’accidents
‘000 ts pétrole répandues
Source conférence 27 mars 2008 « current and futur trends in global tanker market »
49
Code ISM ( International Safety Management ) : le code international de gestion pour la sécurité de l'exploitation des navires et la prévention de la pollution est rendu applicable par le Chapitre IX de la Convention SOLAS. 50Source : shippingfacts (www.shippingfacts.com)
59
2.2.3.1. Pertes totales de navires
Le nombre d’accidents conduisant à une perte totale (fig. 15 et 16) de navire est en baisse significative ces dernières années. Il est toutefois important de noter que le nombre de pertes réelles en mer est limité, la plupart des navires pris en compte ont été par la suite « interdits de navigation » en raison des coûts qu’auraient représentés leur réparation.
(fig.15) Tendance d’accidents maritime
(fig. 16) Causes probables
Les conditions météorologiques constituent la cause majeure des pertes totales de navires. Néanmoins les échouements et les collisions liés à des erreurs humaines sont en augmentation depuis cinq ans. 2.2.3.2. Pertes partielles
S’agissant des pertes dites partielles, c’est à dire celles entrainant des dommages plus ou moins importants mais non une perte totale du navire, elles semblent en augmentation tant en nombre qu’en implications financières (fig. 17 et 18).
60
(fig.17) Tendance d’accidents maritime
(fig. 18) Causes probables
Une démarche identique à l’analyse précédente, montre que les causes probables des dommages importants (60 à 75 pour cent) sont le résultat direct d’une erreur liée au facteur humain (cf schéma ci-dessous).
2.2.3.3. Pertes en vies humaines
Les pertes en vies humaines comme dans tous les types de transport résultent dans la grande majorité des cas, d’accidents. Dans le transport maritime, les chiffres sont relativement faibles. La tendance est à la baisse (fig. 19) et cela malgré l’augmentation constante du nombre de navires dans le monde. 61
Pertes en vie humaines 51 (fig. 19)
2.2.4. La sécurité maritime
Les effets combinés de la réglementation tant au niveau international que national et de l’implication de plus en plus importante des armateurs en terme de sécurité ont conduit à une diminution importante et continue du nombre d’accidents ces dernières années. Cependant, le monde économique est de plus en plus contraint en terme de fluidité des flux, ce qui avec le problème de manque de marins qualifiés est un risque nouveau. Le trafic maritime s’est densifié de façon générale, et de manière encore plus marquée dans certains goulets d’étranglement où les chenaux se rétrécissent et le trafic s’intensifie (cf, canal de Panama, canal de Suez, Manche…). C’est par exemple le cas de la Manche, où cohabitent dans le rail de navigation les navires de transport (600 à 700 par jour) et les navires de pêche dont les routes sont par nature erratiques. Les dangers inhérents aux navires, naturellement influencés (cf infra), par le gigantisme peuvent être classés en deux catégories : les risques liés au navire à proprement parler (dont celui de la « suffisance » des équipages) et les risques liés à la nature de la cargaison.
51
Source www.shippingfacts.com
62
2.2.4.1. L’assistance
Les Etats côtiers ne pourraient à l’heure actuelle traiter convenablement un accident impliquant un de ces nouveaux géants des mers. Il n’existe pas d’outils pour traiter des navires de 350 / 400 mètres de long (remorquage, assistance etc). Le MSV Napoli52 d’une capacité de 4500 conteneurs maximum a déjà été très difficile à remorquer malgré l’utilisation de deux remorqueurs de type Abeille 53. La conception des remorqueurs de type Abeilles a été imaginée alors, dans l’optique de l’arrivée prochaine des porte-conteneurs de capacité de 13000 conteneurs. A l’heure actuelle, la nouvelle génération de porte conteneurs peut atteindre théoriquement une capacité de 15000 conteneurs et l’on parle de projets de porte-conteneurs d’une capacité de 22000 conteneurs (cf supra projet coréen des chantiers navals STX). Concernant l’assistance aux personnes, il est difficile de déterminer le temps nécessaire à l’évacuation de tous les passagers et de tout l’équipage (8500 personnes en tout) et les moyens à mettre en œuvre pour les secourir (le temps d’embarquement des passagers d’un navire de type GENESIS est estimé à quatre ou cinq heures). Enfin les risques générés par les superminéraliers ou supergaziers ne sont pas encore bien cernés, mais ils ne peuvent qu’être accrus, au moins par événement de mer (ceux des VLCC’s et ULCC’s sont mieux maitrisés). 2.2.4.2. Risques liés au navire
Il existe une réelle difficulté pour un équipage réduit de contrôler en finesse les bâtiments de grande taille (problème d’inertie, de la capacité à manœuvrer dans les passages serrés, ralentir, ou freiner à proximité des flottilles de pêche, etc).
52
Le MSC Napoli est un porte-conteneurs britannique qui a dù être abandonné par son équipage en janvier 2007 dans la Manche suite à une fissure apparue dans la coque. Pris en charge par des remorqueurs, il fut volontairement échoué en baie de Lyme en Cornouailles. 53 Remorqueur de type Abeille : construit par les chantiers Myklebust, du groupe Kleven Maritime a pour mission d’assurer des opérations d’assistance dans les zones maritimes à fort trafic.
63
En matière de sécurité la prévention est essentielle. Pour certains, elle doit passer par une réglementation plus stricte : mesures visant à restreindre ou à rendre plus difficile l’utilisation des navires géants. Il s’agirait aussi de mettre en place les procédures permettant de saisir la justice en cas de non respect de la réglementation sur la sécurité. Cela nécessiterait notamment des pouvoirs de contrôle ou des lignes de responsabilités plus claires, par exemple pour la vérification des conteneurs. Enfin les risques potentiels liés à la navigation sont principalement rencontrés dans les zones où le trafic maritime est très dense, ce qui suppose une approche particulière supplémentaire. Les règles ou procédures développées ci-dessous pourraient peut être contribuer à faire diminuer le risque d’accident et le cas échéant en limiter les conséquences (au niveau de ce mémoire il ne peut s’agir que d’interrogations) : - classer les porte-conteneurs d’une capacité supérieure à 10000 conteneurs dans la catégorie des bâtiments dangereux (idem gaziers…) ? - limiter la vitesse dans les zones étroites où le trafic est dense (Manche, détroit de Malacca) ? (imposer une vitesse limite au dessus d’un certain tonnage ?) ; - imposer un pilotage hauturier 54 pour certains tonnages (par exemple en Manche) ? - imposer deux veilleurs en permanence en passerelle ? - imposer une redondance de certains systèmes vitaux des navires (système propulsif etc) ? - fixer un temps minimum de passage dans les ports (le temps minimum de chargement ou déchargement de 500 conteneurs (par exemple) serait le même pour tous dans un même port) ? NB : L’idée circule qu’afin de faire baisser la pression sur les équipages et le personnel portuaire, un temps minimum pourrait peut être, par exemple, être défini pour tous de la même manière en fonction du nombre de conteneurs à manipuler au cours de telle ou telle escale dans tel ou tel port (« minimum safety rate » ?). 54
Hauturier : qui a trait à la haute mer.
64
Un contrôle au niveau européen
L'Europe a les moyens de contrôler, d'assainir et d’homogénéiser les bonnes pratiques dans les mers qui bordent l'Europe en faisant ou en imposant par exemple de manière effective un contrôle des équipages (formation, qualifications...), ce qui d’ailleurs est en cours. Une concertation entre tous les acteurs du transport maritime à bon niveau pourrait, dans des délais acceptables, permettre des avancées rapides dans plusieurs domaines, dont celui – au niveau des Etats – de la responsabilité de l’Etat du pavillon (Etats complaisants), qui paraît irréversible malgré les retards actuels du paquet dit « Erika III » sur ce plan. Mais, il est essentiel que ces règles, codes ou règlements s’appliquent bien à tous de la même manière, pour la sécurité elle même et sous peine de créer une concurrence déloyale. 2.2.4.3. Risques liés à l’objet (cargaison)
Lorsque l’on parle de gigantisme, on évoque la concentration possible de « dangerosité » sur un même navire. Ceci y compris au niveau de la sécurité, voire par exemple le risque de terroristes s’attaquant à des gaziers ou à des pétroliers. La problématique des conteneurs
Au niveau de la sécurité, les risques liés par exemple, aux conteneurs sont multiples. Ils sont souvent de deux ordres : défauts de manutention ou défauts de déclaration de poids et / ou de contenu. - Manutention des conteneurs (saisissage)
Bien que le trafic maritime soit en constante augmentation chaque année, il ne semble pas y avoir d’évolution significative, à la hausse, de la perte de conteneurs (celle-ci toutefois n’est pas à la baisse). Ceci est probablement dû aux durcissements des conditions d’accès aux ports européens et aux conséquences judiciaires et financières importantes en cas de non respect des règlements. 65
Mais rien n’est vraiment garanti à l’heure actuelle, sachant que ces pertes de conteneurs peuvent être soit d’origine humaine avec un mauvais saisissage soit d’origine technique (défaillance, matériel abimé etc). Le saisissage des conteneurs est effectué par les dockers, puis contrôlé par l’équipage – qui ne peut d’ailleurs matériellement tout contrôler - qui a également la responsabilité d’appliquer le « cargo securing manuel » (CSM) approuvé par la société de certification. Lors du saisissage, il est nécessaire d’effectuer un contrôle des “ twist locks”55et de l’état des conteneurs. Il n’est pas rare de retrouver des barres tordues, des conteneurs abîmés, ou un empilement des conteneurs non ou pas assez solidaires. - Déclaration de poids et de contenu des conteneurs
Pour illustration, le cas du Napoli qui embarquait 2500 conteneurs à son bord a été très difficile à résoudre. En effet, il n’a pas été simple de déterminer quels conteneurs étaient dangereux, l’inventaire au chargement des conteneurs n’étant souvent pas conforme au contenu réel, ni d’ailleurs le poids. Les secours ont été d’autant plus retardés que les informations nécessaires n’étaient ni fiables ni disponibles rapidement. Ce défaut d’inventaire disponible rapidement peut être la conséquence d’une mauvaise déclaration par ignorance (cas de certains nouveaux venus) ou la conséquence de fraudes ayant pour objectif la recherche d’économie, ou la dissimulation de la nature des produits transportés (produits dangereux devant faire l’objet d’une déclaration particulière, ou assujettis à une taxe particulière). Dans tous les cas (saisissage, déclarations) il s’agit bien là des différentes lignes de responsabilités pour lesquelles les règles doivent être claires, réalistes et sanctionnables.
55
Twistlock : système permettant l’arrimage des conteneurs sur le porte-conteneurs.
66
- La traçabilité des conteneurs
Dans le cadre de l’assistance aux navires, a été évoquée, l’importance pour tous les acteurs impliqués dans les secours d’un navire d’obtenir rapidement des informations fiables concernant le navire ou la cargaison. Il est, également dans ce but, primordial d’améliorer la traçabilité des conteneurs. Avoir des informations précises du début (chargeur) à la fin de la chaîne logistique (déchargement et livraison des conteneurs au lieu d’arrivée) permettrait en outre une connaissance en quasi temps réel par les entreprises de la position de leurs marchandises et en cas d’accident, une connaissance par les sauveteurs du contenu exact et de la dangerosité de ces mêmes marchandises (facilitant ainsi le travail des secours). Ces mesures auraient également pour conséquence de conforter la chaîne de responsabilités (transparence) et d’améliorer la chaine de sûreté. Enfin, l’utilisation d’une technologie de géo localisation permettrait de connaître avec précision et de façon très rapide la position des conteneurs perdus en mer. Les assureurs coopèrent à la mise en place de bases de suivi des conteneurs en y intégrant aussi des données chiffrées de valeurs d’assurances en vue de faciliter les calculs de cumuls de risques et la gestion des réclamations sur les plus grands navires. Les nouvelles technologies telle que la RFID 56 (utilisée par exemple dans la traçabilité des aliments) pourraient peut être permettre de résoudre certains problèmes liés à l’utilisation de conteneurs et d’optimiser le flux logistique (gain de temps et financier).
56
RFID : Radio Frequency IDentification
67
2.2.4.4. Généralités sur la technologie RFID
La RFID est une technologie permettant d’identifier un objet à travers un identifiant physique, d’en suivre le cheminement et d’en connaître les caractéristiques à distance grâce à une étiquette émettant des ondes radio, attachée ou incorporée à l’objet. Cette technologie permet la lecture des étiquettes sans ligne de vue. Un système RFID s’articule autour : - de puces électroniques autonomes (étiquette, tag, transpondeur etc), à mémoire ou à processeur, voire dotées de capteurs (pression, température, etc.), reliées à une antenne qui leur permet de communiquer par radiofréquence ; - de lecteurs radio reliés à un système de traitement d’information ou à un réseau informatique (portiques). Les applications RFID s’appuient sur différents standards dépendant des fonctionnalités exigées par les processus métier et par certaines contraintes locales (ex. : bande de fréquence de transmission 57 ou puissance nécessaire). La RFID permet de répondre à un grand nombre de besoins. Elle se développe bien en intra entreprise et dans la logistique. Les principales difficultés auxquelles le standard RFID doit faire face sont en voie d’être surmontées : coût de l’étiquette (plus de 0,10 € pour les moins chères), gestion de l’anti-collision en cas de lecture de nombreuses étiquettes en simultané (pourrait être le cas des conteneurs), lecture au travers des fluides, problèmes de sécurité et d'éthique. Un système d’information efficace et de traitement performant est nécessaire. Il doit être complété par un logiciel de traitement et des logiciels applicatifs.
57
Pour des raisons historiques et de produits préexistants, différentes bandes de fréquences ont été retenues dans des zones fréquentielles libres de licences d’utilisation : <135 kHz (BF), 13,56MHz (HF), 433MHz (VHF), 850-960 MHz (UHF) et 2,45GHz (SHF).
68
L’utilisation d’Internet 58, accessible pour tous et partout, permettrait une consultation simple et rapide des informations par tous les acteurs. Evolution des normes et des standards
Les normes internationales sont déjà bien établies dans ce domaine. Les prochaines évolutions concerneront la publication des normes ISO 59 de conformité et de performance des tags RFID. Ces normes vont consacrer l'interopérabilité des systèmes RFID à l'échelon mondial. Des travaux sont en cours pour normaliser les tags avec capteurs ainsi que les systèmes de localisation en temps réel (RTLS – Real Time Location Systems). La traçabilité sortira des limites des étapes de la chaîne logistique pour être assurée tout au long du trajet d'un objet à l'échelon mondial 60. 2.2.4.5. Une traçabilité spécialisée dans le transport conteneurisé ?
L'information concernant le fret serait tout d'abord saisie sur ordinateur, le tag actif recevant un numéro d'identification unique et étant apposé sur le conteneur. Les mouvements de ce dernier seraient alors surveillés et enregistrés dans un lecteur RFID lorsqu'il passe à proximité de ce dernier. D'autres informations (ouverture du container en cours de transport, température, hygrométrie etc) pourraient également être inscrites dans le marqueur. Les puces RFID permettent d’enregistrer des informations en relativement grande quantité.
58
Sur la base d’un concept dénommé RFID standardisé EPC ( Electronic product code). Les différents utilisateurs au travers d’une organisation standardisée (et protégée) des données permet d’interroger les données sur Internet. Il s’appuie sur Internet comme moyen de communication entre toutes les composantes du système de traçabilité, et sur une organisation standardisée des données destinée notamment à permettre aux utilisateurs d’interroger, à partir du monde entier, les données attendues. 59 ISO : International Standardisation organisation : cette organisation a pour but de produire des normes internationales dans les domaines industriels et commerciaux appelés normes ISO. 60 La Chine semble vouloir faire cavalier seul et ne pas accepter l'ensemble des normes ISO sur les tags RFID. Des aménagements sur les gammes de fréquence et sur les puissances d'émissions ont été demandés. On peut craindre que la Chine ne tente, comme avec le WIFI, d'imposer une norme spécifique sur son territoire.
69
Lors de la phase de pesage et d’enregistrement du contenu, les puces RFID retiendraient toutes les informations nécessaires entrées par le premier acteur de la chaîne.
(fig.20 - Source : CESAM 61)
Des lecteurs installés à différents endroits stratégiques des ports serviraient à identifier les transpondeurs (puce RFID) et permettraient de transmettre en temps réel les informations sur un serveur sécurisé et accessible par tous les acteurs (fig.20) en fonction de leur besoin et habilitation (Système d’Information, Internet etc). La technologie permettrait également d’installer des capteurs en plus des puces RFID, afin de transmettre des informations sur la sûreté par exemple (ouverture non prévue du conteneur etc), température, hygrométrie etc L’exemple sino-américain
Le premier cargo chinois 62 chargé de conteneurs équipés de transpondeurs RFID a quitté Shanghai le 10 mars 2008, à destination de Savannah, aux Etats-Unis.
61
CESAM : Comité d'études et de services des assureurs maritimes et transports. Le correspondant FilRFID en Chine : Thibault B. de Hugo, d’après le Wenhui Ribao et le Savannah Morning News. Source www.filrfid.org
62
70
Le programme ainsi lancé prévoit une traçabilité online, puisqu’un site internet rendra compte de l’avancée des trajets, en précisant le nom des cargos, le nombre de containers, ainsi que les dates de chargement, déchargement et livraison. Des lecteurs ont été installés sur les grues des ports pour assurer l’identification des transpondeurs, qui transmettent ainsi en temps réel leur information à un serveur centralisant les données et préparant leur mise en ligne automatique. Le système inclut en outre une alarme en cas d’ouverture non prévue d’un container, pour contrecarrer les risques de trafic ou de vol. Les routes Chine Europe seront les prochaines à être ainsi équipées, pour progressivement standardiser la traçabilité sur l’ensemble de la chaîne logistique et conforter le crédit du transport international chinois. NB : Le volume en transit dans les ports chinois a augmenté de 30% en moyenne chaque année, au cours de la décennie écoulée. Les officiels de l’administration portuaire shanghaienne tablent sur l’expédition de 10 000 TEU taggés dans les deux à trois prochains mois, pour l’instant uniquement sur les échanges sino-américains. L’objectif affiché est de participer activement à la normalisation de cette utilisation des transpondeurs. Côté américain, on attend également beaucoup de cet ambitieux projet, qui semble annoncer la concrétisation de la green line, une ligne d’échange transparente, sécurisée et efficace. 2.2.5. Les contraintes financières
2.2.5.1. Les coûts d’acquisition des navires
Les sommes nécessaires aux armateurs pour l’acquisition des différents types de navires sont telles qu’il est nécessaire de faire appel à plusieurs banques comme à plusieurs assureurs.
71
En effet, les risques lors de l’engagement financier seraient trop importants pour une seule banque puis pour les assureurs et par conséquent la répartition des risques prévaut. Les exemples suivants montrent les sommes élevées pouvant entrer en jeu pour certains navires de charge :
Les navires de transport de passagers
Le Celebrity Solstice de chez Meyer Werft, d’une capacité de 2850 passagers (livré en 2008) de la série de 122 000 tonneaux a un prix de 798 millions de dollars. Le navire de type « GENESIS » en construction chez Acker Finland devrait être livré en 2010 a une valeur d’environ 900 millions 63 d’euros soit un milliard 260 millions de dollars. Les porte-conteneurs
Les porte-conteneurs d’une capacité évaluée à 13 000 EVP ont une valeur de l’ordre de 200 millions de dollars. Les transporteurs de gaz
La dernière génération de LNG 64 en commande qui atteindra 260 000 mètres cube, (soit quasiment le double des plus gros LNG actuels) a une valeur de l’ordre de 300 millions de dollars. 63
Informations Barry Rogliano Salles
72
Mais le coût d’acquisition des différents types de navires n’est pas le seul paramètre à prendre en compte par les assureurs. 2.2.5.2. La problématique importante et significative des assureurs
Entre mondialisation et demande en matières premières en constante augmentation, en biens de grande consommation, en transport de passagers, le trafic maritime se densifie d’une part et la taille des navires augmente d’autre part, conduisant à un accroissement des risques pour les assureurs. Il n’a certes pas encore été possible de faire le lien entre l’accroissement de la taille des navires et « accidentologie » (cf supra paragraphe 2.2.3.), mais il est toutefois possible de parler d’augmentation de la gravité des accidents (dommages occasionnés plus importants) par événement de mer individuel. Pour les assureurs, une des difficultés majeures rencontrées est l’évaluation des coûts. A l’époque des super pétroliers, des erreurs ont été commises dans cette évaluation, entraînant des frais importants (franchises sous-estimées etc). En la matière, les éléments à prendre en compte sont les suivants 65, sachant que la vision de l’assureur – par profession et nécessité – se doit d’intégrer les scénarios les plus pessimistes (voire leur cumul !) : - augmentation des capitaux assurés pour couvrir le navire (coût de construction plus élevé) ; - une augmentation des capitaux couverts au titre de la responsabilité civile de l’armateur vis-à-vis des tiers (montant calculé en fonction du tonnage et/ou du nombre de passagers) comme au titre de la responsabilité civile du transporteur vis-à-vis des marchandises. Si l’on tient compte de la future limitation de responsabilité vis-à-vis des passagers soit environ 640 000 dollars, le besoin en assurances des P&I clubs vis-à-vis des dits passagers atteindrait alors entre trois et quatre milliards de dollars. 64
LNG : transport de gaz naturel, Groupama Transport
65 Informations
73
Cette somme est à mettre en parallèle avec l’engagement maximum des P&I clubs (fig. 21) ; - une augmentation des capitaux couverts au titre des pertes d’exploitation (amortissement plus élevé) ; En effet, avec des coûts d’exploitation pouvant atteindre voire dépasser les 70 000 dollars par jour, la somme que représenterait l’immobilisation d’un tel navire pour l’armateur est importante. Et beaucoup d’autres paramètres sont à considérer : - des coûts de réparations plus élevés (difficultés de trouver les chantiers adaptés (cf paragraphe 2.2.1.5.) ; - des coûts d’assistance plus élevés (le déplacement des plus gros navires entraîne des besoins en moyens de remorquage / allégement etc. importants et la mise en œuvre de solutions techniques plus lourdes) ; - augmentation des risques de pollution (le volume des soutes d’un gros porte-conteneurs moderne est équivalent au volume de cargaison d’un avitailleur pétrolier) ; - aggravation des accidents alors que les infrastructures restent aux mêmes gabarits et que les navires grandissant approchent au plus juste les limites de ces gabarits réduisant à quasi néant la marge de sécurité entre le tirant d’eau d’un navire et la profondeur /sonde du chenal, etc… - certains relevés datent de plusieurs siècles alors que la taille des navires n’avait rien de commun avec les futurs géants. - les capitaux couverts nécessitent l’intervention d’un plus grand nombre d’assureurs sur des marchés plus diversifiés, augmentant ainsi les risques de défaillances ; - un grand nombre de passagers augmente le potentiel de maladies et de contagion épidémique ; - le prix des conteneurs cumulé, sachant que le prix d’un conteneur est de 4000 dollars.
74
Les sommes pouvant être engagées en cas d’accident d’un de ces navires géants seraient, même sans aller jusqu’au maximum du risque, tout juste couvertes par les P&I club, qui ont depuis longtemps abandonné l’idée d’engagement illimité (fig. 21) 66.
(fig. 21)
A titre d’exemple, sur un trafic Asie Europe, la valeur cumulée des cargaisons transportées dans les conteneurs d’un seul navire est évaluée à un milliard 500 millions de dollars. Une collision entre deux navires de ce type, en tenant compte des engagements « Corps » qui sont de trois fois la somme assurée, pourrait alors atteindre ( ((200 x 3) + 1 500) x 2) soit 4 milliards 200 millions de dollars !!! Heureusement il s’agit d’un cas extrême quelque peu théorique, une telle collision se soldant par deux « pertes totales » étant fort peu vraisemblable. Mais un tel scénario a le mérite d’alerter sur les « ordres de grandeur » !
66
Source : Protection and Indemnity Review 2007 edition by HSBC Insurance brokers & Global marine practice
75
NB : Afin de pouvoir couvrir les primes en cas d’accident, la répartition des risques entre assureurs prévaut. A noter enfin que malgré les sommes « importantes » en jeu à l’heure actuelle, une défaillance des assureurs en France, particulièrement organisés et contrôlés sur leur solvabilité n’est probablement pas à craindre. A contrario, la situation est plus délicate dans des pays tels que les Etats-Unis ou la Grande Bretagne. La réforme Solvency 2 67 qui est un renforcement des normes de solvabilité (initié par Bruxelles) devrait assainir la situation. 2.2.6. L’impact de nouvelles routes maritimes
La navigation dans certaines zones est très difficile voire impossible (contraintes liées aux caractéristiques techniques tel que le tirant d’eau). C’est le cas par exemple pour du canal de Panama ou du canal de Suez. 2.2.6.1. Canal de Panama – Canal de Suez
Le passage dans le canal de Panama ou le canal de Suez limite les dimensions des navires acceptables en transit. Les travaux d’élargissement du canal de Panama (fin prévue 2015/2020) pourraient à terme venir amplifier le phénomène du gigantisme en ouvrant le passage en moyenne à des navires de taille plus importante qu’aujourd’hui (sans pour autant permettre le passage des plus gros géants des mers !). A titre d’exemple, les travaux d’agrandissement de Panama et de Suez 68 permettraient le passage de porte-conteneurs d’une capacité de 12000 EVP contre 8000 EVP actuellement. 67
Solvency 2 : Les compagnies d'assurance sont des acteurs majeurs sur les marchés financiers en tant qu'investisseurs institutionnels (marchés action, marchés obligataires et monétaire...). Dans le prolongement de la réforme Bâle II pour les banques, l'Union européenne établit un nouveau cadre réglementaire en matière de gestion des risques pour les sociétés d'assurance. La version finalisée de cette réforme baptisée « Solvency II » (ou "Solvabilité II") est attendue courant 2007, pour une mise en application prévue en 2010. Par rapport à la directive Solvency I en place actuellement, cette deuxième mouture est beaucoup plus sensible aux risques réels supportés par la compagnie. (Source : SIA conseil). 68 Le canal de Panama permet actuellement un passage pour les navires d’une longueur maximale de 294,1 mètres et de 12 mètres de tirant d’eau (navire type Panamax). Les travaux d’agrandissement devraient permettre le passage de navires de 386 mètres de long et de 15 mètres de tirant d’eau (type Suezmax).
76
Les taxes de passage sont (et seront toujours) calculées en fonction du tonnage et il est donc évident que pour des navires de tonnage important, l’utilisation de routes alternatives permettrait d’effectuer des économies d’échelle. 2.2.6.2. Les routes du Nord – La banquise 69
A l’heure actuelle, il est trop risqué d’emprunter les routes du nord. En général il est nécessaire d’être accompagné par un brise glace 70 et de naviguer à des vitesses réduites (5 nœuds). Selon le National Snow and Ice Data Center (NSIDC), la fonte de la banquise est de plus en plus rapide chaque année. Selon les spécialistes, la banquise estivale devrait disparaître d’ici vingt ans et l’océan arctique pourrait même être libre de glace à partir de 2050. Ceci conduira à l’apparition de deux nouvelles routes. La route du Nord-Ouest ouvre un passage entre l’Arctique et le Canada. La route du Nord Est ouvre un passage au nord de la Russie, entraînant des gains de temps et d’argent. D’après les projections climatiques ce seront les routes du Nord est qui seront libres les premières, la route du Nord ouest ne se libérant qu’une dizaine d’années plus tard. Ces nouvelles routes n’imposent pas de limite de gabarit ni de tirant d’eau. De plus, ces trajets permettraient d’éviter le canal de Panama et le canal de Suez (passages coûteux), réduiraient la distance à parcourir et entraineraient donc des économies d’exploitation non négligeables. Distance entre ports en km selon les routes maritimes
Itinéraire
Londres - Yokohama
New York - Yokohama
Hambourg - Vancouver
Panama
23300
18560
17310
Suez et Malacca
21200
25120
29880
Cap Horn
32289
31639
27200
Passage du Nord ouest
15930
15220
14970
(source : le monde maritime mars/avril 2008) Le canal de Suez permet actuellement le passage de navires ayant un tirant d’eau maximum de 16 mètres. Les travaux devraient permettre le passage des navires ayant un tirant d’eau maximum de 22 mètres (correspond à la catégorie des VLCC). 69 Source : article du monde Maritime mars/avril 2008 « Vers l’ouverture d’un passage stratégique du nord ouest stratégique ? ». 70 Des projets d’utilisation de pods brise glace sont actuellement étudiés.
77
Une fois que les glaces commenceront à disparaître, ces routes pourront commencer à être empruntées principalement pendant les périodes estivales (entre 2 et 3 mois) puis à l’horizon 2050 selon certains spécialistes avec la disparition complète des glaces quasiment toute l’année. Cependant, les dangers de navigation ne disparaîtront pas totalement (existence de blocs de glace). De plus, l’impact de la fonte des glaces sur le climat de la région n’a pas encore été défini mais une augmentation du nombre de tempêtes est envisagée. Le réchauffement de cette zone pourrait entraîner une diminution du coût d’exploitation des matières premières, rendant cette zone attractive et pourrait, par conséquent induire une augmentation de trafic maritime. La route du Nord Ouest
Un trafic non négligeable a toujours existé sur cette route maritime. A moyen terme, d’ici une dizaine d’années, le passage du nord ouest devrait être praticable au moins un mois pendant l’été. Le passage du nord ouest deviendra le plus court chemin entre l’Europe et le Japon. Le trajet Europe - Asie du sud est sera le raccourci de : - 26 % par rapport au passage par le canal de suez ; - 31% par rapport au passage du canal de panama ; - 60 % par rapport au Cap Horn, emprunté notamment par les très gros navires qui ne peuvent emprunter le canal de Panama. L’intérêt pour ces nouvelles routes dépend du type de transport concerné 71. Le transport conteneurisé fonctionnant en « juste à temps », dont la navigation se fait au rythme d’escales, ne semble pas intéressé dans l’immédiat. Le transport de vracs quant à lui, pourrait être plus concerné. 71
Dans un article de M Frédéric Lasserre (institut québécois des hautes études internationales université laval, Québec), faisant part d’une enquête auprès de 80 armateurs, il apparaît que les compagnies maritimes de conteneurs ne semblent pas intéressées par le passage du Nord Ouest ou du Nord Est et à contrario les compagnies de transport de vrac a priori, semblent avoir un plus grand intérêt pour le développement à moyen terme d’une route future (exploitation minière dans l’antarctique ;..).
78
L’utilisation de ces routes ne serait pas sans poser des problèmes juridiques et diplomatiques, c’est tout l’enjeu des « batailles » diplomatiques actuelles dans la région entre les Etats-Unis, le Canada et la Russie. 2.2.7. Le facteur humain
Les accidents importants ont en grande partie pour origine le facteur humain (cf paragraphe 2.2. ). La conduite des navires géants demande une certaine expérience et de la technicité (installations sophistiquées 72). En conséquence, le recrutement, la formation des équipages ainsi que leur qualification sont primordiaux. Cette problématique est déjà prise en compte par les armateurs de premier rang. Le recrutement, la formation et le contrôle des connaissances des équipages sont une priorité, c’est le cas pour la CMA / CGM, troisième armateur mondial, qui a créé une « université maritime », comme d’une manière ou d’une autre l’ont fait ou le font d’autres armateurs de premier rang dans le monde entier. La pénurie avérée de personnel toutes catégories confondues (navigants, architectes et ingénieurs navals etc) vient amplifier l’importance de ce phénomène, et inquiète sur le plan de la sécurité. Dans un cadre international, l’utilisation de « manning agents », pour pallier ce manque de main d’œuvre dans le transport maritime, s’est généralisée (par apport de personnels formés dans des pays à moindres coûts). Une amélioration des connaissances et des compétences de ces équipages a été notée dans les dernières années, mais la pénurie actuelle – amplifiée par l’augmentation de la flotte mondiale – crée de nouvelles inquiétudes. La politique de sélection et de formation (utilisation de la simulation 73, entraînement des commandants au management des risques etc) à terre des équipages doit être scrupuleuse 74. 72
Les évolutions technologiques notamment sur les appareils de propulsion des gaziers avec récupération de l’évaporation de la cargaison impliquent des installations de plus en plus sophistiquées.
79
Au cours de la carrière, une vérification régulière du niveau de compétences doit être effectuée, afin de les valider mais également afin d’évaluer les commandants et en retenir que les meilleurs pour armer les plus grands navires. Des processus pour « garantir » ces mesures existent et sont en cours de renforcement. 2.2.8. L’impact sur l’environnement 75
Le réchauffement climatique et la pollution sont devenus une des préoccupations majeures des populations. Le transport maritime est le plus petit contributeur de pollution en comparaison des autres modes de transport.
Source : site internet shippingfacts
73
D’après un article de monsieur Xavier de salins, Président du pilotage du port du Havre, l’utilisation de la simulation (installation d’un simulateur en 2004) aurait permis d’obtenir une baisse notable de problèmes engendrés par le facteur humain 74 Dans ce cadre, la compagnie CMA CGM a créé une « université » interne. 75 Source site internet shippingfacts ( www.shippingfacts.com)
80
L’amélioration significative des technologies de propulsion et de conception (design) des coques de navires combinée avec l’utilisation de cargos ayant de plus grandes capacités de transport, a conduit à une diminution des émissions de gaz polluant et une meilleure efficacité dans l’utilisation du carburant. 2.2.8.1. Pollution atmosphérique
Les pollutions provenant des industries terrestres et des activités humaines représentent 77 pour cent de la pollution maritime. Le transport maritime, quant à lui, représente environ 12 pour cent du total de la pollution. Il est donc très minoritaire malgré la visibilité des gros naufrages de type « Erika » ou « Prestige » (cf infra). Entre 1991 et 2006, le transport maritime a vu une augmentation de son trafic d’environ 70 pour cent, passant de 17 973 milliards de tonnes à 30 686 milliards de tonnes. Le transport de pétrole et de produits pétroliers a augmenté sur la même période d’environ 45 pour cent passant de 8,3 milliards de tonnes à 12 milliards de tonnes. En terme de tonnage, la quantité de pétrole transportée par voie maritime est passée de 1,5 milliards de tonnes en 1991 à environ 2,3 milliards de tonnes en 2006. Un total de 30 milliards de tonnes a été transporté lors des 15 dernières années. Inversement, la quantité de pétrole répandue en mer (de façon volontaire ou non) pendant la même période est en baisse constante et significative (fig. 17). A titre d’exemple, les moteurs les plus modernes des navires arrivent à une baisse de 30 à 40 pour cent des émissions de gaz polluants avec une prévision de baisse à 60 pour cent dans le futur. 2.2.8.2. Pollution par hydrocarbure ou autres produits
Bien qu’il y ait encore quelques accidents sérieux (Erika et Prestige), la tendance est donc à l’amélioration, tant en fréquence d’accidents qu’en quantité répandue de pétrole dans les océans.
81
L’entrée en vigueur de la convention MARPOL 73/78 qui rendit obligatoire des pratiques tel que le « crude crude oil washing ”76 (COW) pour les pétroliers a été créditée d’un impact plus que positif sur le niveau de pétrole qui est rejeté à la mer (de façon volontaire ou non).
1000 ts perdues
bn-tonnes miles
(fig. 17 - Source conférence 27 mars 2008 « current and futur trends in global tanker market »)
Le transport maritime est de loin le mode de transport le moins polluant (à la tonne transportée). Cependant, il est tout de même nécessaire de rappeler que le transport maritime représente 90 pour cent des échanges mondiaux et que l’on ne peut donc se satisfaire de la situation (d’autant que – on l’a vu – il s’agit du mode de transport le plus destiné à s’accroître).
76
COW « crude oil washing » : rendue obligatoire par la convention MARPOL 73/78, le système COW utilise le pétrole brut du navire pour le nettoyage des soutes à pétrole et non plus de l’eau comme c’était le cas auparavant. Le rinçage final se fait toujours avec de l’eau, mais la quantité utilisée est vraiment très faible. (site www.imo.org)
82
Bien que la différence ne soit pas très significative, la pollution découlant des navires de tonnage important (supérieur à 8000 tpl) est légèrement inférieure à celle des navires d’un tonnage inférieur (fig. 22), et il est tout à fait raisonnable d’estimer sur ce plan que le gigantisme ne consituera pas une aggravation significative (le volume de pollution « par événement de mer » pouvant certes être plus important mais étant largement compensé par la réduction du nombre d’événements, puisqu’un seul très gros navire équivaut à cinq ou dix navires voire plus, de taille « habituelle »). Emissions de CO2 comparaison des différents modes de transports.
(fig.22 - Source: NTM (Swedish Network for Transport and the Environment))
Le coût du carburant n’est pas forcément en faveur des gros bâtiments ayant des vitesses importantes, la tendance est plutôt à la réduction de vitesse. Cette diminution en capacité de transport sur une route maritime donnée est compensée par l’ajout d’un navire sur cette même ligne. A titre d’exemple, en baissant la vitesse d’un navire géant de 25 à 20 nœuds, la consommation diminue alors de 300 tonnes par jour à 140 tonnes par jour.
83
Il existe actuellement une réflexion sur la révision de l’annexe V de la convention MARPOL 77 qui devrait voir le jour fin 2008. Cette révision devrait conduire à une diminution des émissions atmosphériques (diminution de la teneur en souffre du carburant ou/et utilisation de technologie de traitement des gaz d’échappement (phase d’étude)).
77
Le transport maritime et les émissions de soufre (article le monde maritime avril / mai 2008.
84
CONCLUSION La mondialisation est l’un des facteurs principaux ayant conduit à l’augmentation des échanges de flux entrainant un double effet sur le transport maritime : l’augmentation de la densité du trafic et l’augmentation de la taille des navires. Cette nécessaire adaptation des armateurs de qualité à une situation économique de plus en plus contrainte (demande des populations en constante augmentation et rentabilité en baisse) sous peine de perdre leur rang au profit d’acteurs moins scrupuleux investissant dans des unités moins coûteuses, est devenue un sujet de réflexion majeur parmi tous les acteurs du transport maritime. Comme on l’a vu, il ne semble pas y avoir de limite technique ou technologique à l’augmentation de la taille des navires autre que celle de l’imagination des ingénieurs et architectes navals. Il est toutefois primordial de se poser la question quant à la rentabilité financière de tels projets. D’une part les sommes investies peuvent en effet conduire, en cas de retournement des marchés, à une catastrophe beaucoup plus importante que celle ayant frappé les ULCC, et d’autre part la mise à niveau des infrastructures portuaires, si elle n’est pas faite, limitant ainsi le nombre de ports disponibles, peut venir amplifier ce phénomène. Sur le plan si important de la sécurité maritime, la réglementation internationale tant au niveau de l’OMI que de l’Europe, devra s’adapter de manière à prendre en compte cette nouvelle donne que constitue le gigantisme. Il faudra en outre veiller à ce que les réglementations nouvelles s’appliquent à tous de la même manière sous peine de créer une concurrence déloyale. Les délais d’application de ces nouvelles règles peuvent enfin s’avérer importants, il pourrait donc être judicieux de favoriser rapidement une certaine auto régulation dans le milieu. Maillons faibles de la chaine logistique, les ports et opérations portuaires doivent impérativement s’adapter ou être adaptés à ce nouveau phénomène, tant sur le plan réglementaire (clarté de la chaîne des responsabilités) qu’au niveau des infrastructures. 85
A noter que cette adaptation est d’autant plus nécessaire sur le plan national français, que des ports étrangers sont en passe de devenir des plateformes d’échanges adaptées et incontournables au détriment de nos ports. Au plan plus particulier, de l’assistance en cas de crise (naufrages), les Etats côtiers ne pourraient gérer seuls, actuellement, un accident impliquant un navire géant. Une action doit être entreprise sur le plan de la prévention en intégrant des systèmes de secours et d’aide à l’assistance dès la conception des navires, et sur le plan de l’action en donnant les outils ad hoc aux unités participant aux secours, dont la possibilité de disposer d’informations fiables et en quasi temps réel sur le navire et les cargaisons. Pour résumer, le gigantisme est indubitablement une des réponses du transport maritime à la mondialisation et aux besoins grandissants des populations. Il convient « seulement » mais vraiment de se poser la question de l’équilibrage des impératifs financiers et commerciaux d’une part et de la sécurité de tous d’autre part. A cet égard, le comportement responsable des grands armateurs ne fait guère de doute, mais l’enjeu est si important qu’on ne peut s’en contenter. C’est donc avec eux qu’il faut améliorer le présent et préparer l’avenir. La réflexion à mener sera ainsi moins de savoir si l’on doit limiter, voire interdire l’utilisation de ces navires géants comme le souhaiteraient les partisans du tout sécuritaire (attitude irréaliste), que de la cadrer au niveau international (en accompagnant les acteurs du transport maritime) de façon à rendre les océans encore plus sûrs tout en répondant à la demande globale irréversible née de la mondialisation.
86
BIBLIOGRAPHIE
Revues et notes spécialisées
- Note ISEMAR n° 99 – 1997 – 2007 : d’un monde à un autre ; - Note ISEMAR n° 100 – Le feedering, marché spécifique de la conteneurisation ; - Note ISEMAR n° 101 – conteneurs et porte-conteneurs : nouvel enjeu de la sécurité maritime ; - La revue maritime n°480 – Article de M. Xavier de Salins – « la simulation électronique, un outil indispensable pour le maritime » ; - Le monde maritime mars/avril 2008 – « vers l’ouverture d’un passage stratégique Nord Ouest ; - Le monde maritime janvier / février – « quelle responsabilité pour les sociétés de classification ? » et « la croisière s’amuse, les professionnels investissent » ; - Le journal de la marine marchande n° 4601 – article « les conteneurs ne tombent pas à l’eau que par hasard » par M. Michel Neumeister ; - Le journal de la marine marchande n° 4603 – article « alerte du DNV : doublement de la fréquence des accidents » par M. Michel Neumeister ; - La revue maritime n° 481 – article « les émissions atmosphériques du transport maritime » par Mme Anne-Sophie Avé et Patrick Rondeau. - Le courrier du 24 avril 2008 (Chambre Syndicale des chantiers navals – CSCN) - Les fiches d’actualité scientifique de l’INRETS (Institut National de Recherche sur les Transports et leur Sécurité) - fiche n° 24 : Conteneurisation et mondialisation. Les logiques des armements des lignes régulières.
87