Chromage par
Patrick BENABEN Docteur ingénieur Responsable du service Traitements de surface. Centre SMS École nationale supérieure des mines de Saint-Étienne
1. 1.1 1.2 1.3 1.4
Chrome et chromage .............................................................................. Propriétés du chrome.................................................................................. Propriétés chimiques et mécaniques des dépôts de chrome .................. Chromage..................................................................................................... Applications .................................................................................................
2. 2.1 2.2 2.3 2.4
Chromage avec électrolyte au chrome hexavalent ........................ Généralités ................................................................................................... Chromage décoratif..................................................................................... Chromage dur et épais................................................................................ Purification et recyclage des bains.............................................................
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3 3 6 8 17
3. 3.1 3.2 3.3
Chromage avec électrolyte au chrome trivalent ............................ Généralités ................................................................................................... Chromage décoratif..................................................................................... Chromage dur et épais................................................................................
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19 19 20 22
4. 4.1 4.2 4.3
Perspectives du chromage .................................................................... Chrome hexavalent ..................................................................................... Chrome trivalent .......................................................................................... Dépôts composites ......................................................................................
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27 27 27 28
5. 5.1
Hygiène et sécurité.................................................................................. Risques liés à l’utilisation de trioxyde de chrome ou de solutions d’acide chromique............................................................ Quelques recommandations quant à l’utilisation..................................... Quelques aspects de la réglementation pour les rejets ...........................
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28
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5.2 5.3
Pour en savoir plus ...........................................................................................
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e chromage est un procédé de revêtement par électrolyse permettant de déposer du chrome métallique sur les surfaces à traiter pour leur conférer les propriétés de ce métal. Ce traitement bien connu est effectué pour deux applications importantes : le chromage décoratif et le chromage dur, pour lesquelles, la couche déposée ne diffère essentiellement que par son épaisseur. Le chromage décoratif s’effectue sur des surfaces généralement revêtues au préalable d’une couche de nickel (ou éventuellement de couches de cuivre et de nickel) et il a pour but essentiel de donner au revêtement les caractéristiques de brillance du chrome. La résistance au ternissement de ce métal, associée à sa dureté, font que cette couche décorative de l’ordre du micromètre permet de donner un aspect brillant qui peut être entretenu pendant de longues années. Les chromes brillants des automobiles d’antan (toujours visibles à l’heure actuelle) et des motos de maintenant en sont un témoignage. Le chromage dur se distingue du précédent par le fait que son épaisseur est plus importante (de quelques micromètres à quelques dixièmes de millimètres). Ce revêtement procure au matériau sur lequel il est effectué un bon coefficient de frottement et lui assure de bonnes propriétés de résistance à l’usure et à la
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6 - 1997
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corrosion. Il est très visible par exemple sur les vérins des appareillages mécaniques (appareils de levage ou engins de travaux publics...). Ce type de traitement est le revêtement privilégié dans le domaine de la mécanique pour les pièces en rotation ou en translation qui ont à résister à l’usure et à avoir de bonnes qualités de frottement, et pour les domaines où l’adhérence pourrait être un handicap (plasturgie, cylindres de laminoir...).
1. Chrome et chromage 1.1 Propriétés du chrome Le chrome est un métal à reflet bleuté qui s’allie par voie thermique avec d’autres métaux tels que le fer, le nickel ou le cobalt permettant d’obtenir des alliages métalliques aux caractéristiques variées.
1.1.1 Constantes physiques du chrome Symbole : Cr. Isotopes stables : 50 Cr (4,35 % en masse), 52 Cr (83,79 %), 53 Cr (9,50 %), 54 Cr (2,36 %). Masse atomique : 52,01. Masse volumique : 7,2 g · cm–3. Température de fusion : 1 830 oC. Coefficient de dilatation : à 20 oC 7 × 10–6 / oC. Conductivité thermique du dépôt brut : 23 W · m–1 · k –1. Résistivité du dépôt brut : (30 à 65) × 10–8 Ω · m. Cristallisation : cubique centré. Structure électronique : 1s 2 2s 2 2p 6 3s 2 3p 6 3d 5 4s 1. En fait, il est admis que pour cet élément à l’état solide, il y a un échange continu entre les électrons 3d et 4s (on pourrait s’attendre à un remplissage du type 3d 4 4s 2 par exemple) et que par suite le nombre d’électrons moyens dans ces bandes d’énergie n’est pas un nombre entier ce qui peut, peut-être, expliquer les caractéristiques particulières du chrome d’un point de vue magnétique, température de fusion, etc.
Figure 1 – Diagramme d’équilibres tension – pH du système chrome / eau à 25 oC
1.1.2 Propriétés électrochimiques Le chrome peut se présenter sous plusieurs degrés d’oxydation : +II, +III, +VI (le chrome II, chrome chromeux, est très peu stable). Le métal est très peu noble (moins que le zinc), et les potentiels normaux sont : Cr → Cr 2+ + 2e– – 0,913/EHN Cr → Cr 3+ + 3e– – 0,744/EHN Nota : EHN électrode normale à hydrogène
Il y a là, au vu de ces potentiels normaux, une contradiction avec le comportement noble du chrome. Cependant, le chrome se passive très facilement en milieu oxydant (par création à la surface d’une couche d’oxydes ou d’hydroxydes insolubles). Cette faculté explique le comportement du chrome qui est à la fois attaquable en milieu acide et/ou réducteur, et qui résiste bien à la corrosion en milieu neutre, basique et/ou oxydant. Le diagramme tension-pH permet de se rendre compte de ce phénomène (figure 1).
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1.2 Propriétés chimiques et mécaniques des dépôts de chrome Dans le domaine chimique, la résistance des dépôts de chrome est bonne (à très bonne) à température ordinaire pour : — les acides : chromique, nitrique, sulfurique, gluconique, mandélique, oxalique, salycilique, stéarique ; — les gaz : ammoniac, dioxyde de carbone, oxygène, air ; — certains produits : les acides de fruit, le lait, le pétrole, les encres d’imprimerie, le sucre, les huiles lourdes. Pour les propriétés mécaniques, la caractéristique essentielle est le coefficient de frottement bas (qui dépend des conditions de température, nature du lubrifiant, force appliquée, nature de l’antagoniste... dans lequel il est mesuré) de ce matériau, comparativement à d’autres métaux lorsqu’il est électrodéposé.
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1.3 Chromage De manière générale, industriellement, le chromage des pièces à revêtir est réalisé au moyen de solutions dans lesquelles le chrome est au degré d’oxydation six. À ce degré d’oxydation, le chrome est toxique et a la réputation d’être cancérogène. Cette réputation est bien ancrée dans les esprits, à tel point que c’est elle qui motive en grande partie les décisions concernant les limitations éventuelles de l’utilisation du chrome hexavalent. Pourtant, d’après les résultats obtenus par l’INRS [1], « il n’est pas possible actuellement, au vu des résultats expérimentaux publiés, de se prononcer sur le potentiel cancérogène du produit ». Plus loin, cette même publication précise : « dans l’industrie du chromage électrolytique où les travailleurs sont exposés essentiellement à des aérosols de trioxyde de chrome, les études épidémiologiques réalisées ont donné des résultats contradictoires qui ne permettent pas de conclure avec certitude sur un éventuel effet du produit sur la fréquence des cancers pulmonaires ». Notre propos n’est pas de dire que le chrome hexavalent est inoffensif, malheureusement un certain nombre d’accidents et de maladies sont là pour démontrer les risques d’une utilisation sans précaution, nous voulons seulement mettre le lecteur en garde contre les conclusions hâtives qui sont tirées parfois par les détracteurs de ce type de traitement. Les dangers et les précautions d’emploi sont développés au paragraphe 5. Les ions de chrome hexavalent sont générés à partir du trioxyde de chrome CrO3 , anhydride chromique soluble dans l’eau sous forme d’acide chromique. CrO3 est produit à partir de la chromite (FeO, Cr2O3), dont les réserves mondiales ont été estimées à 2 700 millions de tonnes (2 000 en Afrique du Sud, 600 au Zimbabwe, le reste au Kazakhstan et autres pays tels que la Turquie, les États-Unis, la Finlande...) [2]. La consommation actuelle mondiale se situe aux alentours de 100 000 à 120 000 tonnes (42 % pour le traitement du bois, 38 % pour l’industrie du traitement de surface). À haute température (1 000 oC), on effectue la calcination par le carbonate de sodium sous courant d’oxygène selon la réaction : 4 FeO, Cr2O3 + 8 Na2CO3 + 7O2 → 8 Na2CrO4 + 2 Fe2O3 + 8 CO2 avec conversion par acidification en dichromate : 2 Na2CrO4 + H2SO4 → Na2Cr2O7 + Na2SO4 + H2O Pour obtenir le trioxyde de chrome à partir du dichromate, il existe deux possibilités : — la réaction avec l’acide sulfurique : Na2Cr2O7 + 2 H2SO4 → 2 CrO3 + 2NaHSO4 + H2O — la conversion électrolytique : par électrolyse d’une solution de Na2Cr2O7 , en présence d’une membrane échangeuse d’ions, les ions sodium Na+ migrent dans le compartiment cathodique alors que les ions Cr2O7– – restent dans le compartiment anodique. Le trioxyde de chrome est ensuite cristallisé au fur et à mesure en extrayant la solution anodique [3].
1.4 Applications En ne considérant uniquement que l’utilisation principale et essentielle pour laquelle le chromage est utilisé (en fait, il est appliqué pour bénéficier de plusieurs de ses propriétés), la répartition en fonction de l’application est donnée au tableau 1. (0)
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Tableau 1 – Répartition de l’utilisation du chromage Fonction
Pourcentage du total
Anti-usure (frottement, abrasion, érosion) .......... Anticorrosion (seul ou en bidépôts) .......................... Amélioration des caractéristiques de glissement ...................................... Amélioration de l’aspect .................... Autres (isolation, propriétés optiques) ..............................................
53 22 11 8 6
2. Chromage avec électrolyte au chrome hexavalent 2.1 Généralités Comme nous l’avons vu précédemment, le chrome peut se présenter au degré d’oxydation 6. La solution aqueuse du trioxyde de chrome (anhydride chromique) est appelée acide chromique. En solution dans l’eau, on peut trouver, suivant la concentration C en CrO3 , des composés différents [3] (figure 2) : Concentration (mol/L) Nature du complexe –
C < 10–2
HCrO 4
10–2 < C < 10–1
HCrO 4 ↔ Cr 4 O 7 + H 2 O
10–1
2– Cr 4 O 7 2– 3Cr 2 O 7 2– Cr 3 O 10 2– 4Cr 3 O 10
< C < 1,5
1,5 < C < 3,5 3,5 < C < 7,5 7,5 < C < 10
–
2–
2–
+ 2H + ↔ 2Cr 3 O 10 + H 2 O +
2–
+ 2H ↔ 3Cr 4 O 13 + H 2 O
Le dépôt électrolytique de chrome se fait par réduction des ions chrome à la cathode. La réduction à l’état métallique du chrome hexavalent par électrolyse ne se réalise qu’en présence d’ions cata–
lyseurs tels que SO 42– , SiF 62– , F , etc. Les solutions pures d’acide chromique soumises à électrolyse ne donnent lieu à la cathode qu’à un dégagement d’hydrogène et à un dépôt noirâtre.
2.1.1 Mécanismes réactionnels 2.1.1.1 Mécanisme général Les réactions globales aux électrodes peuvent être schématisées comme suit : ■ À la cathode, trois réactions principales : — dégagement d’hydrogène par la réaction : 2H+ + e – → H2 ; — réduction de chrome hexavalent en chrome trivalent (qui ne conduit pas un dépôt métallique) ; — réduction du chrome hexavalent en chrome métallique. ■ À l’anode : — dégagement d’oxygène par la réaction : 2H2O → O2 + 4H+ + 4e – ; — oxydation du chrome trivalent formé par la réaction cathodique en chrome hexavalent. L’ensemble de ces réactions permet de se rendre compte que l’équilibre électrochimique du processus réactionnel sera d’autant meilleur que l’augmentation du pH, provoquée par le dégagement cathodique d’hydrogène sera contrebalancé par la réaction anodique
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■ Il semble à peu près certain que cette réduction du chrome hexavalent ne se fait pas par l’intermédiaire du chrome trivalent : le chrome trivalent formé à la cathode se retrouve intégralement dans la solution s’il n’est pas oxydé en chrome hexavalent lors du processus anodique.
Figure 2 – Structures des différents chromates (d’après [10])
Historique À notre connaissance, les tout premiers travaux sur le chromage à partir de chrome hexavalent furent l’œuvre des Français E. Placet et J. Bonnet en 1890 [4], mais le premier à avoir introduit la notion d’influence de produits d’addition dans des solutions de chrome hexavalent pour réaliser un dépôt de chrome métallique fut G.J. Sargent [5], ensuite ce furent C.G. Fink [6] aux ÉtatsUnis et Liebreich [7] en Europe qui préconisèrent l’utilisation de solutions avec le rapport 100 entre la teneur en CrO3 et les ions sulfates. Depuis, de nombreux catalyseurs ont été proposés mais les seuls qui soient vraiment utilisés industriellement à l’heure actuelle sont les ions sulfates et fluosilicates. Depuis quelques années, un procédé utilisant un catalyseur organique est commercialisé par deux sociétés : ATOTECH, société américaine, et LPW, société allemande. Les propriétés de ces nouveaux procédés présentent des améliorations notables qui, on peut le supposer, vont permettre de donner de nouvelles applications au chromage (cf. § 2.3). avec formation d’oxygène et que la formation de chrome trivalent à la cathode sera, elle aussi, contrebalancée par l’oxydation anodique du chrome trivalent en chrome hexavalent.
■ Il est nécessaire d’introduire certains anions pour provoquer la réduction complète du chrome hexavalent, et généralement, si ces anions ne sont pas détruits par le processus anodique (dégagement de chlore pour les chlorures par exemple), ils se comportent en catalyseur. L’utilisation des traceurs radioactifs a permis de mettre en évidence de manière quasi certaine que le chrome trivalent, formé au cours de l’électrolyse, ne se déposait pas sous forme de chrome métallique. En effet, moyennant certaines précautions pour éviter les erreurs possibles par des phénomènes parasites, en utilisant le 51 Cr, un des isotopes radioactifs du chrome (émetteur gamma d’énergie 320,1 KeV, de période radioactive de 21 jours) et en introduisant ce radioisotope sous forme de chrome trivalent ou hexavalent, des essais [9] ont montré : — que le dépôt ne devenait radioactif que lors de l’introduction de chrome hexavalent radioactif ; — que le dépôt n’était pas radioactif quand c’était le chrome trivalent qui était introduit sous forme radioactive, cela, à condition d’éviter par une membrane ou une paroi poreuse l’oxydation anodique du chrome trivalent en chrome hexavalent. À l’heure actuelle, en ce qui concerne la modélisation du processus de réduction, il semble qu’un consensus se fasse sur l’approche proposée par J.P. Hoare [10]. Il propose une première étape qui est une réaction de réduction successive d’un des atomes Cr(VI) en Cr(III) dans le complexe – . HCr 3 O 10 On obtient ainsi en d’autres termes un atome de Cr(III) auquel se trouve attaché un ion dichromate. Cet ion dichromate prévient la formation autour de l’atome Cr(III) du complexe aqueux hexacoordonné très stable (on retrouvera cette notion lors de l’étude des solutions de chromage en chrome trivalent au paragraphe 3.1.1). Dans la suite de l’opération, il se produit une réduction cathodique en Cr(II) de ce complexe qui, d’après Hoare, peut se décomposer en hydroxyde chromeux et dichromate (lequel se recombine en trichromate par condensation avec d’autres chromates). ■ S’il n’y a pas d’additifs dans la solution, cet hydroxyde chromeux se décharge à la cathode sous forme de boues noires, mélange d’oxydes, d’hydroxydes et de métal. –
■ En présence d’ions du type HSO 4 , on a pu mettre en évidence la formation d’un complexe entre les ions sulfates et l’oxyde de chrome chromeux par pont hydrogène entre l’oxygène de l’oxyde – de chrome et l’hydrogène des ions sulfates HSO 4 . Ce complexe ainsi formé peut être ensuite réduit à la cathode pour donner un dépôt de chrome métallique et la libération des ions – HSO 4 (rôle de catalyseur). Il est clair que cette modélisation est encore sujette à pas mal d’évolution dans la mesure où l’expérimentation n’est pas encore venue en support de ces idées. Un travail important dans ce domaine fondamental reste à effectuer.
2.1.1.2 Approche de la modélisation du phénomène de dépôt Si, apparemment dans la littérature, l’accord se fait quant aux différentes réactions pouvant se produire sur les électrodes, il n’en est pas de même pour ce qui concerne le mécanisme de formation et de réaction permettant de passer du chrome hexavalent au chrome métallique. De nombreux auteurs se sont interrogés sur le mécanisme réactionnel permettant d’expliquer le phénomène [8]. Nous ne retiendrons des mécanismes proposés que quelques idées essentielles.
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2.1.2 Conditions opératoires De manière générale, les conditions opératoires pour le chromage, que l’on cherche à faire un chromage pour ses propriétés mécaniques, d’anticorrosion ou décoratives, sont les suivantes : — composition du bain : • acide chromique (CrO3) : de 250 à 400 g/L, • acide sulfurique : (H2SO4) : de 2,5 à 5 g/L ; — densité de courant : de 20 à 50 A/dm2 ; — température : de 45 à 60 oC.
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2.1.2.1 Anodes Lors des traitements de surface par dépôt électrolytique, les anodes conditionnent la qualité d’un bon dépôt. Dans le cas du chromage, les anodes utilisées sont du type anodes insolubles, le chrome consommé lors du dépôt est rajouté régulièrement sous forme de CrO3 (solide ou en solution aqueuse). De manière générale, les anodes utilisées pour le dépôt de chrome sont des anodes en plomb ou en alliage de plomb (tels que Pb-Sb, Pb-Sn). Toutefois, pour des applications bien particulières, il est possible d’utiliser des anodes en fer, en platine, ou en titane platiné. Dans ces applications, il est nécessaire de prendre en compte l’influence du métal de l’anode pour la bonne marche du bain. Au cours du processus anodique, le plomb métallique tend à s’oxyder : le dégagement gazeux d’oxygène et la présence de chrome hexavalent de la solution tendent à provoquer à la surface de l’anode des réactions d’oxydation qui conduisent à la formation d’oxydes de plomb (de couleur noire) et de chromates de plomb (de couleur jaune). Il semble que lors de l’électrolyse, la réaction de formation des oxydes soit préférentielle (les anodes sont alors de couleur brun noir). Si on laisse les anodes dans le bain sans passage de courant, elles se recouvrent d’une pellicule jaune orangée, signe de formation de chromate. Ces chromates sont de très mauvais conducteurs du courant, il convient donc de conditionner les anodes ayant séjourné dans un bain sans passage de courant, avant de démarrer un traitement. Un léger brossage ou une électrolyse primaire sous potentiel, permettent de remettre les anodes en état. Le rôle de ces anodes, outre les caractéristiques bien connues dans les processus électrolytiques, est primordial pour le bon fonctionnement dans le temps du bain de chromage. En effet, au cours de l’électrolyse, le chrome trivalent formé à la cathode s’oxyde en chrome hexavalent, permettant ainsi de maintenir la concentration de chrome trivalent à des valeurs correctes. Nous reviendrons par la suite sur l’influence des ions Cr 3+ sur la qualité du dépôt. Cette réaction d’oxydation du chrome trivalent en chrome hexavalent a été étudiée par de nombreux auteurs. Son rendement est fonction des potentiels réciproques des réactions pouvant se produire, potentiel qui est bien sûr fonction du matériau sur lequel se produit cette réaction (plomb, fer, platine...), mais aussi fonction de son état physique (massif, électrodéposé...) et de son état de la surface (polie, couche d’oxyde formée dans le bain...). Comme on peut le constater, un grand soin doit être apporté à la nature, la forme, l’entretien des anodes pour assurer un fonctionnement correct des bains. La recommandation qui est faite pour un bon fonctionnement est : — usage d’anodes en plomb (avec des éléments d’addition du type Sb, Sn,..) toutes les fois que les conditions d’utilisation le permettent (nature du bain, forme des pièces...) ; — surface anodique suffisante pour permettre une oxydation du Cr 3+ : en général, la surface anodique doit être au moins le double de la surface cathodique. 2.1.2.2 Appareillage ■ Cuves et le matériel annexe En ce qui concerne les cuves, la matière en contact avec la solution de chromage devra être en matériau résistant à l’agressivité à la fois acide et fortement oxydante de cette solution, d’autant plus que les traitements sont généralement réalisés à une température de l’ordre de 50 à 55 oC. De plus, pour éviter tout phénomène de modification dans la répartition du courant sur les pièces traitées, l’ensemble de la cuve devra être parfaitement isolée électriquement pour ne laisser en fonctionnement que les parties métalliques des anodes ou des pièces à revêtir. Les amenées de courant devront aussi être protégées.
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■ Ventilation Tout le matériel utilisé en complément de l’électrolyse (agitation, chauffage, refroidissement...) devra également être parfaitement résistant à l’agressivité de la solution et des vapeurs émises. Au cours de l’électrolyse, une grande quantité de gaz se dégage : à l’anode, c’est l’oxygène et à la cathode, l’hydrogène. Ces gaz entraînent avec eux de la solution de chromage sous la forme d’un brouillard chromique. Pour des raisons de sécurité et de santé, ces vapeurs doivent être parfaitement lavées avant d’être rejetées dans l’atmosphère. Un système d’aspiration très efficace et de lavage avec récupération de ces entraînements est donc nécessaire. L’ensemble aspiré passe dans un dévésiculeur dont le rôle est de retenir les particules d’acide chromique par condensation sur des parois solides. L’utilisation d’agents de type tensio-actifs ne réagissant pas chimiquement aux électrodes se développe de plus en plus. Ces agents agissent en diminuant la tension superficielle, en particulier aux électrodes, et permettent ainsi de diminuer la taille des bulles de gaz qui se dégagent, diminuant très sensiblement la quantité de solution entraînée. Dans certains ateliers on utilise aussi un rideau surnageant dans la cuve, rideau formé de boules d’un matériau organique (type polypropylène) de faible densité et résistant bien sûr à l’acide chromique. Lors de l’introduction des pièces, ces boules s’écartent facilement laissant pénétrer la pièce dans le bain, le rideau se reforme ensuite pour s’écarter à nouveau lors de la sortie du bain, des pièces traitées. Ce rideau permet aussi de diminuer les pertes par évaporation qui se produisent en raison de la température de fonctionnement des bains (50 oC). À ce sujet, il est utile de signaler que l’ajout de liquide pour ajuster le niveau des bains doit prendre en compte l’introduction toujours possible d’éléments ou d’ions contenus dans ce liquide ; par exemple, il faut se méfier de ne pas introduire d’eau contenant des ions sulfates ou chlorures qui, pour les premiers, viendraient s’ajouter au catalyseur, et qui, pour les seconds provoqueraient une dégradation des conditions de dépôt ainsi que la corrosion des anodes. Une attention toute particulière doit bien sûr être apportée à la qualité des contacts électriques pour éviter la création d’étincelles pouvant conduire à des accidents en raison de la nature des gaz qui se dégagent. 2.1.2.3 Contrôle des bains Dans ce paragraphe, nous ne traiterons pas des contrôles très classiques type température, agitation ou qualité de l’électrolyse mais plutôt de l’évolution des caractéristiques du bain au cours du temps. Au cours du chromage, la composition chimique des bains utilisés varie. Si tout phénomène admet un domaine d’utilisation, les valeurs des paramètres de l’opération doivent rester dans la plage d’utilisation optimale. Au cours de l’électrolyse et des différentes manipulations, la solution s’appauvrit en chrome hexavalent, et s’enrichit en cations métalliques (type fer, nickel, cuivre) et chrome trivalent. Il peut aussi y avoir variation de la concentration en catalyseur. Nous ne traiterons pas ici des cas particuliers de dégradation des différents composés d’addition pouvant être ajoutés dans le bain (type tensio-actifs)... Il faut cependant se méfier de certains composés organiques antimoussants qui pourraient, par dégradation anodique ou cathodique, relarguer des ions semblables au catalyseur utilisé (ions sulfates par exemple). Pour un bon fonctionnement, il est nécessaire de connaître les concentrations respectives des différents composants majeurs du chromage pour ajuster au mieux, quand cela est possible, leur concentration dans la zone adéquate. ■ Chrome hexavalent Sa concentration se situe entre 200 et 400 g/L, mais la variation autour de la valeur choisie ne doit guère dépasser 10 % en valeur relative. L’appauvrissement du bain en chrome hexavalent a pour causes essentielles d’une part, bien sûr, le chrome déposé, et d’autre
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part les entraînements de solution que ce soit par dégagement gazeux ou lors de la sortie hors du bain des pièces après traitement (nous supposons que le système fonctionne correctement et que, par conséquent, la concentration en chrome trivalent varie peu). Il est toutefois nécessaire de préciser que cette baisse de concentration est modérée par l’évaporation en raison de la température d’utilisation des bains. Un dosage de l’acide chromique est recommandé régulièrement, la qualité du dépôt en dépend : de nombreuses méthodes chimiques et instrumentales sont à la disposition des ateliers. ■ Cations métalliques Les cations métalliques, en quantité importante, provoquent des modifications dans le processus de dépôt, en particulier, cela se traduit par plusieurs phénomènes : — augmentation sensible de la résistivité du bain ; — perte de pouvoir de pénétration ; — diminution des qualités intrinsèques du dépôt. Il est recommandé (de manière empirique) que la somme des concentrations de tous les cations métalliques (y compris le chrome trivalent) n’excède pas 15 g/L. On pourrait s’attendre à pouvoir purifier le bain des électrolyses sélectives avec dépôt cathodique sur pièces perdues, il n’en est rien, la variation des concentrations des cations est insensible, même après des électrolyses de longue durée. Cette caractéristique a été vérifiée en utilisant des traceurs radioactifs : un certain nombre de cations (ceux du fer, du cuivre ou du nickel) ont été introduits sous forme de radio-isotopes dans une solution de chromage. Un fonctionnement à diverses densités de courant et à différentes températures a montré que le dépôt ne présentait pas la radioactivité des éléments étudiés et que la radioactivité spécifique du liquide, pour chaque radio-isotope, restait la même. La seule amélioration possible concerne la concentration en chrome trivalent qui peut être diminuée par oxydation anodique. ■ Le ou les catalyseurs Différents catalyseurs sont utilisés lors du dépôt de chrome. Des méthodes de dosage spécifique sont applicables pour chaque type. À titre d’exemple, nous pouvons citer le dosage des sulfates par centrifugation. Les sulfates contenus dans un volume connu de solution à analyser sont précipités par le chlorure de baryum (milieu acide chlorhydrique pour éviter la précipitation des chromates de baryum). Cette précipitation se fait directement dans des tubes à centrifuger dont la partie basse présente un appendice fin et gradué dans lequel, au cours de la centrifugation, le précipité vient se déposer. La lecture directe de la hauteur du précipité par la graduation atteinte après centrifugation permet de connaître la concentration en sulfate. 2.1.2.4 Prétraitements Préalablement au dépôt de chrome, les pièces à traiter doivent subir un traitement qui les rend aptes à recevoir cette couche. Il existe trois types essentiels de préparation des surfaces : mécanique, chimique ou électrochimique. Le lecteur consultera utilement pour plus de détails les articles spécialisés de ce traité [73]. La surface de la pièce à chromer doit permettre une bonne adhérence de la couche de chrome qui sera déposée : elle doit être exempte de graisses, d’oxydes et présenter une légère attaque pour être parfaitement saine. Le dégraissage est une préparation courante qui se pratique de manière classique soit par des solutions spécifiques, soit par électrolyse. Pour ôter les oxydes de surface, les solutions commercialisées par les sociétés spécialisées en traitement de surface conviennent parfaitement. On peut aussi avoir recours à un sablage, quoique dans certains cas, suivant la taille des grains projetés, le décrochage des points d’oxydation ne se fasse pas parfaitement, en particulier si ces points sont situés à l’intérieur de cavités de taille inférieure à la taille des grains projetés. Une attaque chlorhydrique peut aussi être utilisée dans ce but.
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Pour aviver la surface et la dépassiver, le traitement à appliquer dépend de la nature du métal et de sa composition chimique. Cependant, une méthode courante consiste en une attaque anodique, soit dans une solution d’acide sulfurique, soit dans une solution d’acide chromique (cf. § 2.3). Cette préparation de surface est aussi fonction de la nature du bain de chromage utilisé (par la nature du catalyseur utilisé) et de l’épaisseur de chrome finale. Il est clair qu’un chromage dur d’un alliage d’aluminium ne se fera pas de la même manière que le bain contienne comme catalyseur de l’acide sulfurique, ou des composés fluorés. De même, cette préparation de surface pour un dépôt de 15 µm d’épaisseur, ne sera pas la même que pour un dépôt de 200 à 500 µm. Nous conseillons aussi, au lecteur, dans des cas particuliers, de consulter le fournisseur du bain pour résoudre ce problème fondamental de la préparation de surface.
2.2 Chromage décoratif Nous avons précisé les différences entre chromage dur et chromage décoratif. Le chromage décoratif se fait toujours sur une sous-couche dont la nature peut varier selon les caractéristiques que l’on recherche. Généralement, cette sous-couche est du nickel (en couche unique ou bi-couche) avec éventuellement une couche de cuivre électrolytique entre le substrat et le nickel. Le chromage de faible épaisseur est réalisé pour produire des surfaces d’un aspect aussi brillant que possible, pour en augmenter la dureté et aussi pour éviter le ternissement (par oxydation) de la couche de nickel.
2.2.1 Préparation des surfaces Le dépôt de chrome pour réaliser un chromage décoratif étant d’épaisseur très faible, va donc reproduire l’état de surface avant chromage. Il est donc essentiel que la surface avant chromage soit aussi polie que possible. Il existe un certain nombre de combinaisons possibles pour produire la sous-couche avant chromage, elles dépendent essentiellement de la présence de cuivre ou de la nature du nickel, brillant ou duplex. Le choix de ces sous-couches est fonction principalement de l’utilisation prévue pour les pièces ainsi revêtues. Pour ce qui concerne les dépôts de cuivre et de nickel réalisés avant chromage, le lecteur trouvera dans les articles consacrés à ces métaux, les conditions de préparation des surfaces et de déposition pour obtenir les surfaces désirées [74] [75] [76]. Dans certains cas, si la pièce nickelée est restée trop longtemps à l’air ou s’il y a eu un polissage avant chromage, on peut se trouver devant une surface de nickel passivée. Le chromage ne pourra se faire qu’après dépassivation anodique, soit en milieu acide sulfurique, soit en milieu cyanuré alcalin (10 % NaCN) ou après une mise sous tension brutale après immersion, ou encore après une légère dépassivation par l’hydrogène en maintenant la pièce en cathode à un potentiel inférieur à celui correspondant au dépôt de chrome.
2.2.2 Composition des bains utilisables La formulation des bains de chrome pour effectuer le chromage décoratif est fonction des conditions d’exploitation. Généralement, les bains utilisés sont des bains avec, comme catalyseur, les ions sulfates. Ces bains peuvent fonctionner à différentes teneurs en CrO3 , cependant, le rapport des concentrations en masse entre CrO3 et les ions sulfates doit rester dans la fourchette de rapport massique 80/1 à 120/1 avec comme valeur optimale 100/1. Des bains avec, comme catalyseur, les ions SiF 62– sont aussi utilisés. L’avantage qu’ils procurent se situe dans la faculté plus nette de dépassivation des surfaces de nickel quand cela est nécessaire.
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Le tableau 2 donne quelques compositions et conditions d’exploitation de ces bains en chromage décoratif [11].
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La détermination du nombre de fissures sur un dépôt d’épaisseur faible n’est pas toujours aisée par observation microscopique, aussi un certain nombre de tests sont possibles. Le plus connu est celui appelé test de Dupbernell qui est réalisé en effectuant un dépôt cathodique de cuivre à partir d’une solution acide (150 g/ L de CuSO4, 5 H2O et 50 g/ L d’H2SO4 – 5 min, 1 à 2 A/dm2), le cuivre se dépose et adhère sur les zones non revêtues par le chrome et donc dans les fissures. (0)
Le strontium est apporté par SrSO4 et si nécessaire par SrCrO4 . Le potassium est apporté par K2SiF6 et si nécessaire par K2CrO4 .
2.2.3 Domaine de brillance et conduite des bains Les courbes présentées dans la figure 3 donnent les conditions d’exploitation pour l’obtention de chrome brillant pour deux compositions différentes de bain de chromage. Dans la mise au point et le contrôle des bains de chromage décoratif (mais cela peut aussi apporter de précieux renseignements dans le cas du chromage dur), l’utilisation des résultats obtenus dans une cellule de Hull sera très utile. Le principe de cet instrument de contrôle permet de relier directement à la densité de courant, l’aspect du dépôt obtenu sur une cathode dont la nature est fonction de l’étude entreprise, toutes choses étant égales par ailleurs [12].
2.2.4 Microfissuration et microporosité À l’exception des dépôts réputés non fissurés et spécialement formulés, les dépôts de chrome sont de manière générale microfissurés (cf. § 2.3.1.2), et le dépôt présente en surface un réseau uniforme (ou maillage) de fissures. Lors de l’attaque de la surface par corrosion, le nickel en sous-couche sera donc attaqué et, contrairement au cas où il n’y aurait que quelques microfissures (ce qui peut être le cas pour des dépôts non fissurés en cas de mauvaise préparation), cette attaque du nickel est répartie sur de nombreux sites. Pour éviter une attaque plus importante sur certains sites plutôt que d’autres, il apparaît normal d’essayer de répartir ces attaques de manière uniforme sur l’ensemble de la surface. En considérant que l’attaque du nickel en sous-couche se fait à travers la microfissure sous forme d’une demi-sphère (figure 4), les meilleurs résultats seront obtenus quand la distance entre les fissures sera du même ordre de grandeur que le diamètre de la sphère, et que l’épaisseur du nickel sera du même ordre que le rayon [11].
Figure 3 – Évolution de l’aspect avec les paramètres de chromage (d’après [17])
Si le nombre de fissures (effectives) est trop important, de trop nombreux sites d’attaque se produiront et la couche de chrome sera enlevée (par détachement) avant que le nickel soit lui-même consommé par la corrosion, si ce nombre de fissures est trop réduit, l’inverse se produira et l’on aura alors une attaque rapide du substrat. Dans ces conditions, pour une épaisseur de nickel de l’ordre de 25 µm, une densité de fissures effectives de 200 par cm paraît idéal. En fait, il apparaît que, pour diverses raisons, seulement le quart des fissures du chrome sont à l’origine de phénomènes de corrosion et par suite, pour des épaisseurs de dépôt classiques de nickel entre 20 et 40 µm, 800 fissures par centimètre paraît une bonne valeur.
Figure 4 – Attaque du nickel en sous-couche
Tableau 2 – Bains de chromage Composition (g/L) Type de bain CrO3 Bain concentré .................. Standard............................ Autorégulé ........................ Non-fissuré ....................... Microfissuré ......................
500 250 250 450 175
SO 42– 5 2,5 1 2,5 0,35
SiF 62–
2 1 3
Sr
2+
4
K
+
14
T
Densité de courant
(oC)
(A/dm2)
40 50 45 45 45
10 20 15 20 15
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Une méthode de production de chrome microfissuré [13] a été développée en provoquant cette microfissuration par un dépôt de nickel à forte contrainte résiduelle sur un dépôt de nickel classique. Le nickel, en se fissurant, provoque la microfissuration du chrome. Généralement, on utilise des solutions de chlorure de nickel, les ions chlorures donnant au dépôt de fortes contraintes. Exemple de composition : NiCl2, 6H2O : 250 g/L ; NaCH3COO, 3H2O : 100 g/L ; addition de produits classiques en nickelage du type saccharine et 2-butyne-1, 4-diol. Une autre méthode [14] consiste à introduire dans le nickel en sous-couche des particules fines qui vont provoquer un dépôt de chrome non pas microfissuré mais microporeux. Ce type de dépôt composite est réalisé avec des solutions de nickelage renfermant des particules non conductrices (par exemple de silice) de taille de l’ordre de 20 nm. Il est recommandé d’avoir une concentration en pores de l’ordre de 800 à 4 000 par mm2.
2.2.5 Applications Les applications du chrome décoratif se rencontrent dans de nombreuses industries, et plus particulièrement : — l’industrie automobile et équipements ; — les instruments d’optique, de précision et médicaux ; — les mobiliers métalliques ; — les articles de sport et les appareillages domestiques.
2.3 Chromage dur et épais 2.3.1 Principe et propriétés essentielles 2.3.1.1 Objectif Ce procédé de traitement des surfaces a pour objectif d’utiliser les caractéristiques fondamentales des dépôts de chrome, à savoir : — dureté élevée ; — résistance à l’usure ; — faible coefficient de frottement ; — bonne résistance à la corrosion. 2.3.1.2 Caractéristiques essentielles Le revêtement de chrome dur est généralement utilisé avec des épaisseurs pouvant varier de 5 à 500 µm. La couche déposée par électrolyse reproduit l’état de surface en amplifiant les rugosités de la surface de base. S’il est concevable de réaliser des dépôts à la cote pour des épaisseurs faibles (inférieures à 25 µm pour les bains classiques et 30 à 40 µm pour les bains fluorés ou à catalyseurs organiques), il est nécessaire de recourir à une mise en état de la surface (généralement par rectification) quand le dépôt dépasse cette épaisseur. L’utilisation des dépôts découle des caractéristiques décrites qui permettent de conférer à la surface revêtue une bonne résistance à l’usure, à l’abrasion et des propriétés antiadhérentes. Le chromage peut aussi être utilisé pour le rechargement des surfaces usées ou pour rattraper des erreurs lors de la réalisation de pièces. Les dépôts de chrome dur présentent comme caractéristiques importantes, outre bien sûr leur dureté, le fait qu’ils soient microfissurés, et qu’ils soient aussi le siège de contraintes résiduelles de traction qui sont, pour les dépôts brillants réalisés à 50 oC, de l’ordre de plusieurs centaines de MPa.
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■ La microdureté La microdureté est, de manière générale, de l’ordre de 1 000 HV 0,1 pour les dépôts de chrome dur. Cette microdureté est fonction d’un certain nombre de paramètres, comme on le verra par la suite, et peut varier de 800 à 1 200 HV. Pour les dépôts obtenus à partir de chrome hexavalent, cette microdureté chute notablement en fonction de la température de traitement pour atteindre des valeurs de l’ordre de 300 HV 0,1 à 700 oC. ■ La fissuration Le dépôt de chrome dur est dans la majorité des cas microfissuré : le nombre et la taille des microfissures dépendent essentiellement de la nature des catalyseurs utilisés, de l’état du substrat, ainsi que de la forme du courant utilisé pour réaliser le dépôt. La figure 5 présente l’aspect du dépôt de chrome (épaisseur 70 µm) obtenu avec des solutions standards. Les photographies a et b montre l’aspect de surface en sortie de bain à différents grossissements, la c présente cette surface après polissage et légère attaque : on distingue nettement cette fissuration. Le taux de fissuration doit être quantifié sur une coupe polie du dépôt (figure 5d ). Il est déterminé par la densité linéïque (nombre de fissures interceptant un segment de longueur déterminée et parallèle au substrat) : il est exprimé en nombre de fissures par unité de longueur. Ce taux de fissuration est fonction : — de la nature du bain utilisé, en particulier, cette microfissuration est liée à la nature du catalyseur utilisé, elle est environ 10 fois plus importante pour les bains à catalyseur organique, que pour les bains catalysés avec des ions sulfates (bains standards) ; — mais aussi à une forte dépendance vis-à-vis de la température du bain comme le montre la figure 6 [15]. Des travaux de visualisation in situ du développement de cette fissuration ont été réalisés [16], permettant de montrer que le phénomène de création est discontinu. La fissuration se crée au cours de l’électrodéposition, libérant ainsi en partie les contraintes internes du dépôt, puis au niveau des bords des fissures, la densité de courant étant plus importante, le dépôt se fait plus rapidement, provoquant ainsi la fermeture de ces fissures jusqu’à ce qu’une nouvelle création vienne reproduire le phénomène. ■ Les contraintes résiduelles Les mécanismes de formation des contraintes résiduelles sont encore mal connus mais cette formation semble liée à la présence d’hydrogène au sein du dépôt. Deux modèles ont été proposés sans, pour l’instant, avoir été vérifiés expérimentalement. Le premier [17] fait l’hypothèse que ces contraintes seraient liées directement à la présence d’hydrogène piégé au cours de l’électrolyse et qui diffuserait par la suite en provoquant une contraction du dépôt. Cette contraction étant bloquée par le substrat, il s’ensuivrait l’apparition de contraintes résiduelles de traction. Le second modèle proposé [18] fait appel, au cours du dépôt, à la formation d’hydrures de chrome de structure hexagonale (possibilité due à la présence simultanée d’hydrogène atomique naissant et de chrome métallique), qui se transformeraient en chrome de structure cubique centrée de taille plus réduite que la structure hexagonale, provoquant par là des contraintes de traction. La figure 7 [19] donne la variation des contraintes résiduelles en fonction de la température de chromage. Les mesures des contraintes dans les dépôts peuvent être réalisées par plusieurs méthodes, en particulier celle du contractomètre à spirale de Brenner ou la diffraction des rayons X (variation de la distance interréticulaire d’une famille de plan provoquant une variation de l’angle de Bragg) comme le schématise le tableau 3. Il est intéressant de comparer l’allure des courbes donnant, en fonction de la température de chromage, la variation de la concentration linéïque des fissures avec la variation des contraintes résiduelles (figures 6 et 7). (0)
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Figure 5 – Dépôts de chrome dur et épais obtenus à partir de chrome hexavalent : mise en évidence des fissurations
2.3.1.3 Avantages et inconvénients La facilité de réalisation des dépôts, le faible coût d’application, comparé aux autres procédés concurrents, ainsi que le fait qu’il n’y ait pratiquement pas de modification des propriétés du substrat (il est nécessaire toutefois de prévenir la fragilisation du substrat par l’hydrogène) font que le chromage s’avère un traitement de choix dans de nombreuses applications.
Toutefois, le mauvais rendement cathodique (compris entre 10 et 25 % suivant la nature du catalyseur) ainsi que le médiocre pouvoir de pénétration et couvrant rendent délicate sa mise en œuvre sur des pièces de formes complexes. L’utilisation pour les dépôts de chrome, de composés de chrome hexavalent, produit réputé toxique, peut rendre ce procédé polluant si les mesures de prévention ne sont pas utilisées correctement.
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remplacer. On trouve des substituts différents pour certaines applications mais aucun procédé à l’heure actuelle ne peut contrebalancer le chromage dur dans ses multiples applications, et ceci pour des raisons ou techniques ou économiques. On constate même, à l’heure actuelle, que pour un certain nombre d’applications, après un détour par d’autres techniques, les utilisateurs retournent au chromage dur (moules, divers types de cylindres-laminage ou séchage) grâce aux progrès techniques réalisés récemment.
2.3.2 Préparation des surfaces avant chromage 2.3.2.1 Dégraissage, dépassivation
Figure 6 – Évolution de la fissuration avec la température de chromage (bain standard, 40 A/dm2) (d’après [15])
Figure 7 – Évolution des contraintes résiduelles avec la température de chromage (bain standard, 40 A/dm2) (d’après [19])
Tableau 3 – Principe de la détermination des contraintes résiduelles par diffraction des rayons X État de contraintes
Plans cristallins
Spectre de diffraction des RX
Les pièces à chromer doivent être exemptes de traces de graisse. Au cours des différentes opérations de préparation mécanique de la surface de la pièce (rectification, polissage...), la pollution de surface des pièces est importante. Il est donc nécessaire d’avoir recours à des dégraissages énergiques par voie chimique ou électrolytique (type solvants usuels, ou traitement anodique en solution alcaline) par exemple dans les conditions suivantes : NaOH : 50 g/L, NaCN : 300 g/L, température : 50 à 80 oC, densité de courant : 5 à 20 A/dm2. Pour permettre par la suite un bon accrochage de la couche de chrome sur le substrat métallique, l’état de surface doit être le plus sain possible, en particulier exempt d’oxydes ainsi que légèrement attaqué dans sa structure superficielle. En fonction de la nature du substrat et de l’épaisseur prévue pour le dépôt, il est recommandé de réaliser une étude préalable de préparation de surface. Toutefois, les deux meilleures méthodes pour l’activation des surfaces sont certainement l’attaque anodique chromique ou sulfurique. Bien que cette pratique soit répandue (et que la tentation soit forte), il est déconseillé pour des raisons de pollution des bains de chromage, d’effectuer de manière systématique l’attaque anodique des pièces dans les bains proprement dits. L’attaque anodique chromique se fera dans un bain identique en composition à celui du dépôt, mais dans une cuve différente. L’attaque anodique sulfurique nous paraît être la méthode la plus universelle (à quelques exceptions près) quelle que soit la nature du substrat : attaque anodique pendant 30 s à 2 min dans une solution d’acide sulfurique à 33 % en volume, à température de 20 à 25 oC (maximum), sous une densité de courant de 20 à 50 A/dm2, la cathode pouvant être en acier. Pour des applications particulières telles que le chromage de la fonte ou d’alliages d’aluminium, une préparation particulière est nécessaire. Par exemple pour la fonte (graphite sphéroïdal), une attaque anodique sulfurique risque de provoquer par le déchaussement des particules de graphite des trous dans le substrat et induire ainsi des piqûres dans le dépôt : on pourra avoir recours par exemple à une activation en milieu acide sulfurique dilué, au trempé. Le traitement de l’aluminium sera décrit plus loin.
Sans contrainte
La contrainte σ provoque une déformation uniforme des plans cristallins
Remarque : la fonte, matériau par définition hétérogène, introduit une difficulté supplémentaire du fait de la surtension différente de l’hydrogène sur les particules de graphite par rapport au métal. Pour que les particules de graphite puissent être recouvertes, il est recommandé d’appliquer un coup de courant (1,5 à 2 fois la densité de courant prévue pendant 30 s et ensuite revenir à la densité de courant prévue), ce qui permet de revêtir, dans de bonnes conditions, l’ensemble du substrat et par suite de réaliser un dépôt chrome sur chrome.
2.3.2.2 État de surface et forme Il est toutefois très utile de signaler que depuis de nombreuses années, ce procédé de traitements de surface est mis sous haute surveillance en raison de son impact environnemental. Malgré tous les efforts et les investissements qui ont été réalisés pour mettre au point des procédés de substitution, aucun n’a pu jusqu’à présent le
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L’état de surface du substrat est prépondérant sur l’aspect en sortie de bain du dépôt car le dépôt de chrome tend à amplifier les rugosités. Avant chromage, la surface devra donc le plus possible être exempte de piqûres, inclusions, arêtes vives. Pour obtenir des dépôts à la cote sans qu’il soit nécessaire d’effectuer une rectification, il sera utile d’avoir recours à des polissages de la surface avant chromage
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par polissage mécanique, chimique ou électrolytique. Ce dernier est certainement le plus efficace dans la mesure où il estompe, par son principe même, les arêtes vives et permet donc l’exploitation du dépôt dès la sortie du bain sans rectification. Un dépôt de qualité se traduit aussi par une régularité dans l’épaisseur du revêtement obtenu, qui, compte tenu des courbes de variation de vitesse de dépôt (et de rendement) en fonction de la densité de courant, implique que cette densité de courant se répartisse de façon aussi uniforme que possible sur la pièce à chromer. L’adaptation des pièces (bien sûr limitée par la fonction de la pièce ellemême) par la suppression des arêtes vives sur le substrat (le dépôt aura tendance à reformer ces arêtes) en concertation avec les bureaux d’études, et bien sûr tout l’art du chromeur dans la disposition des anodes et cathodes auxiliaires et des écrans sont les conditions de la qualité d’un bon dépôt (tableau 4). En langage courant, les cathodes auxiliaires sont appelées des voleurs de courant. En permettant de diminuer la densité de courant dans les zones terminales des pièces à revêtir, ils absorbent le surplus de courant, et
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par suite permettent d’obtenir des dépôts de bonne qualité, même sur les zones en pointe des pièces (tableau 4). 2.3.2.3 Épargne Afin de protéger les parties des pièces qui ne sont pas à chromer, il est nécessaire de revêtir ces surfaces par des matériaux qui permettent de retrouver, après traitement, la pièce à l’état initial. Ces procédés d’épargne peuvent être réalisés soit par une protection par cire ou vernis, soit par un revêtement avec des surfaces ou rubans adhésifs conducteurs ou isolants. Dans le cas où l’épargne est réalisée par une surface conductrice (ruban adhésif métallique par exemple), celle-ci intervient dans le processus de dépôt et doit être prise en compte pour le calcul de la surface à chromer : cela augmente la quantité de courant nécessaire pour effectuer le dépôt, mais dans les cas favorables, cette surface peut être utilisée comme voleur de courant. Là aussi, le choix du procédé d’épargne fait partie de l’art du professionnel. (0)
Tableau 4 – Aspect de surface et dépôts de chrome épais (d’après [17]) Surfaces
Formes de surfaces
Nature du dépôt
Surfaces planes ou cylindriques
Précautions à prendre Préparation et finition des surfaces
Opérations électrolytiques
Polissage des surfaces afin qu’elles soient exemples de défauts
La forme des anodes doit être adaptée à la forme des pièces à chromer
Exemple : chromage d’une surface cylindrique concave. L’anode tubulaire épouse la forme de la surface
Arêtes vives
Surfaces en retrait
Aucune difficulté si on prend en considération les remarques concernant les arêtes vives Chromage délicat parfois impossible Les voleurs de courant se recouvrent de chrome et régularisent le dépôt sur la pièce
Filetage
Rectification ou prévision avant usinage
Défaut de surface
Bords de dépôt
Exemple : chromage d’une section cylindrique. Le bourrelet est « créé » sur une surface Le fil prévient la formation non utile mécaniquement (surface non d’un bourrelet sur les arêtes soumise à l’usure par exemple) vives du cylindre et éliminé par rectification
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Les matériaux qui sont utilisés comme épargne doivent avoir les propriétés suivantes : — facilité d’application et d’enlèvement ; — bonne adhérence et inertie chimique lors des différents traitements postchromage et durant le chromage (ne pas se détériorer ou attaquer le métal à protéger) ; — inertie chimique vis-à-vis du bain. De la même façon, il est recommandé de protéger le plus possible les dispositifs d’accrochage et les amenées de courant, en particulier et de manière impérative les surfaces qui sont immergées. Pour cela, on utilise généralement des matières plastiques polymérisables le plus souvent à chaud qui évitent la corrosion lors de la préparation de surface ou le chromage lors du traitement proprement dit.
2.3.3 Différents types de bains À l’heure actuelle, trois grands types de bain sont utilisés pour le dépôt de chrome dur. Ces bains diffèrent entre eux essentiellement par la nature du catalyseur utilisé pour obtenir la réduction cathodique du chrome hexavalent. La nature du catalyseur permet d’obtenir des dépôts ou des conditions d’exploitation différentes : le choix du type de bain sera fonction des caractéristiques globales (y compris le prix de revient) que l’on recherche. ■ Bains au sulfate Ces bains, appelés plus généralement bains de chromage classique, standard ou de Sargent, ont la formulation suivante : — CrO3 : 250 g/L ; — SO 42– : 2,5 g/L. Les conditions d’exploitation de ce type de bain sont les suivantes : — anodes en alliage de plomb ; — température d’utilisation de 50 à 55 oC ; — densité de courant de 30 à 60 A/dm2. ■ Bains fluorés En général, ces bains ont comme catalyseur un mélange d’ions sulfates et d’ions fluosilicates. Les catalyseurs fluorures ou fluoborates, bien que donnant d’excellents résultats, sont moins utilisés. Cependant un des inconvénients de son utilisation, outre la corrosivité des ions fluorés, est la difficulté (tout au moins il y a quelques années) du dosage de ces ions fluorés car le maintien à la valeur correcte conditionne la qualité des dépôts. Ce problème a été résolu par l’introduction des bains SRHS (Self Regulated High Speed ) ou autorégulés car leur composition comprend des sels de solubilité réduite, maintenant la concentration des différents catalyseurs aux valeurs recommandables pour une bonne utilisation.
■ Éléments d’addition Un certain nombre d’éléments d’addition à concentration variable ont été proposés dont les objectifs sont de nature différente : — amélioration du pouvoir de pénétration et de la zone de brillance ; — amélioration de la vitesse de dépôt ; — amélioration des caractéristiques physiques (microdureté et résistance à l’usure). Une étude importante a été réalisée dans ce domaine par J. Doskar [21]. Tout récemment, une étude a montré l’intérêt de l’introduction de dimolybdate d’ammonium ((NH4)2Mo2O7) de 25 à 100 g/L [22] dans une solution de chromage standard avec une résistance à l’usure (test Taber) améliorée de 20 à 30 %. De la même façon, il a été préconisé, pour certaines applications, l’adjonction, à des bains standards, d’acides organiques tels que des acides halogéno-succiniques [23] ou à des bains fluorés de l’acide 2,2-dichloromalonique [24] pour améliorer à la fois la brillance et la microdureté. Certaines des caractéristiques des bains décrits dans ce paragraphe, sont données dans les figures 8, 9, 10, 11 et 12.
2.3.4 Anodage Par cette terminologie on désigne l’ensemble des opérations qui permettent de réaliser les montages anodiques pour obtenir le dépôt dans les meilleures conditions, d’une part en rapport avec les épaisseurs de chrome déposées sur la pièce, d’autre part pour assurer la bonne marche en continu du bain. ■ Nature, type, forme De manière générale, les anodes sont constituées d’un alliage de plomb. Cet alliage est formé de 7 % d’étain ou 6 % d’antimoine ou une combinaison des deux qui permet d’apporter à ces anodes une bonne résistance à la corrosion et une tenue mécanique suffisante. L’étain apporte une meilleure résistance à la corrosion et doit être au moins présent à 3 % en masse pour les anodes utilisées en bain fluoré, l’antimoine apporte une bonne tenue mécanique. Un bon compromis paraît être des anodes constituées de 93 % de plomb, 4 % d’étain, 3 % d’antimoine.
Une composition type est la suivante : — CrO3 : 250 g/L ; — SrSO4 : 2 à 4 g/L ; — K2SiF6 : 4 à 10 g/L ; — anodes en alliage de plomb ; — température d’utilisation de 50 à 55 oC ; — densité de courant de 30 à 80 A/dm2. ■ Bains à catalyseurs organiques Ces bains développés plus récemment utilisent comme catalyseur, outre les sulfates, un composé organique non fluoré de type sulfonate. Les caractéristiques de fonctionnement et des dépôts obtenus sont supérieures à celles des bains fluorés précédents. La vitesse de dépôt est de l’ordre de 1 µm/min à 50 A/dm2 et la microfissuration est de l’ordre de plusieurs milliers de fissures par centimètre. Une différence, importante aussi, est due à la disparition de l’aspect corrosif des bains fluorés qui évite en particulier l’utilisation d’épargne pour les zones à faible densité de courant (par exemple l’intérieur des cylindres dont l’extérieur est à chromer). Ces bains sont commercialisés essentiellement par deux sociétés sous la dénomination HEEF 25 (Atotech) ou ANKOR (LPW).
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Figure 8 – Influence de la teneur en acide chromique sur le rendement en fonction de la nature du catalyseur (d’après [25])
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Figure 11 – Évolution du rendement avec la densité de courant selon le catalyseur utilisé (d’après [20])
Figure 9 – Variation des caractéristiques des dépôts avec les paramètres de chromage (d’après [17])
Figure 12 – Évolution de la vitesse de déposition avec la densité de courant selon le catalyseur utilisé (d’après [20])
Figure 10 – Courbes d’isodureté en fonction des paramètres de chromage (d’après [17])
L’objectif d’une bonne répartition des anodes pour l’obtention d’un dépôt d’épaisseur la plus constante possible est d’obtenir une densité de courant la plus homogène possible sur l’ensemble de la pièce à recouvrir. Il faut donc se donner les moyens d’adapter cet anodage à la complexité éventuelle des pièces. Quelques exemples tirés de la littérature permettent de se rendre compte de la forme que doivent avoir les anodes (figure 13). Il existe à l’heure actuelle chez les fournisseurs toute une gamme de produits permettant de réaliser des anodes aux formes désirées (métal massique, plaques, tiges cylindriques, rubans...)
Figure 13 – Influence de l’anodage sur l’épaisseur de dépôt (d’après [25])
D’autre part, des logiciels de simulation permettent de prévoir et calculer la forme de l’anodage nécessaire pour obtenir des dépôts de qualité [26]. Dans le cas du chromage de pièces complexes, nous recommandons fortement aux utilisateurs d’avoir recours à cette aide qui permet de résoudre rapidement les problèmes importants liés au mauvais pouvoir de pénétration et couvrant des procédés de chromage même les plus performants.
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Dans cette préparation et adaptation des anodes à la surface de la cathode, il est nécessaire de ne pas perdre de vue que, outre son rôle de répartition du courant, l’anode joue aussi un rôle de maintenance du bain en particulier valable pour le maintien à une valeur correcte de la concentration en chrome trivalent. On préconise généralement d’utiliser une surface anodique double de la surface cathodique. Dans les cas où cela n’est pas possible, il sera obligatoire de provoquer artificiellement l’oxydation de ce chrome trivalent formé en excès en régénérant le bain avec une pièce perdue en maintenant un rapport des surfaces anode sur cathode le plus important possible : c’est ainsi le cas du chromage des intérieurs de tubes (canons, fusil...). ■ Anodes auxiliaires et protection Nous avons signalé l’existence à l’heure actuelle de logiciels permettant de résoudre des problèmes complexes de répartition du courant. Il est toutefois intéressant de dégager quelques aspects fondamentaux de cet anodage. L’objectif étant de réaliser sur la pièce à revêtir une répartition des lignes de champ ou une densité de courant la plus homogène possible, les considérations suivantes peuvent aider à obtenir les meilleures conditions : — la densité de courant est maximale sur les zones qui apparaissent en pointe par rapport aux anodes (aspérités, extrémités des pièces, parties saillantes...) ; — la densité de courant est minimale pour les parties en retrait par rapport aux anodes (creux, gorges, intérieur des pièces, zone centrale des parties planes...) (cf. tableau 3). Pour obtenir une bonne répartition de la densité de courant, il faut donc diminuer la densité de courant sur les zones en pointe (figure 13) écrans non conducteurs, voleurs de courant, anodes adaptées, qui prennent la place des zones terminales ou en pointe, ou augmenter cette densité de courant pour les zones en retrait : anodes auxiliaires qui apportent du courant (cf. tableau 3). ■ Disposition des pièces dans la cuve La distance séparant les pièces des anodes dépend bien sûr de la forme relative. Il n’y a pas de règles générales, sachant que cette distance interélectrodes est régie par plusieurs considérations : — la forme relative des anodes par rapport aux cathodes ; — la forme des pièces elle-même ; — l’agitation du bain. En règle générale, il est nécessaire que le dégagement gazeux aux électrodes puisse se faire correctement et éviter l’accumulation à certains endroits de la pièce à revêtir qui présenterait alors des défauts de revêtement (figure 14). Il faut aussi que le renouvellement de la solution dans la zone interélectrode puisse se faire correctement : ce renouvellement va dépendre de l’agitation et donc de la circulation de l’électrolyte dans la zone de traitement. En particulier, il apparaît que si l’électrolyte est mis en circulation forcée, son renouvellement va se produire très rapidement, ce qui permettra d’augmenter la quantité de courant passant par unité de surface et donc minimiser le risque de brûlure du dépôt. ■ Entretien des anodes Nous avons indiqué que les anodes se recouvrent d’oxydes dont la nature dépend de la présence ou non de courant. Dans le cas où les anodes sont laissées dans le bain sans courant, elles se recouvrent d’une pellicule de chromate de plomb (couleur jaune d’or) présentant un caractère d’isolant qui gêne considérablement le bon déroulement des opérations. Il est donc nécessaire de débarrasser (quand cela est le cas) les anodes de cette couche. Plusieurs méthodes sont possibles (mécaniques ou chimiques), il faut en tout cas éviter que ce nettoyage puisse perturber par la suite le fonctionnement du bain (entraînement de produits chimiques par exemple).
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Figure 14 – Positionnement des électrodes et de la pièce dans la cuve d’électrolyse (d’après [25])
2.3.5 Traitement postchromage À la sortie du bain après traitement de la pièce chromée, la surface présentera d’autant plus d’irrégularités importantes que la rugosité de la surface initiale et l’épaisseur du dépôt seront grandes. De plus, en raison du fort dégagement gazeux au cours de l’électrolyse, un important volume d’hydrogène est absorbé dans le dépôt. Il est donc nécessaire de remédier à ces inconvénients générateurs potentiels de problèmes lors de l’usage de ce traitement de surface. ■ Traitement thermique de dégazage Lors de la formation du dépôt de chrome, une grande quantité d’hydrogène peut être absorbée dans le dépôt (de l’ordre de 0,05 % masse), les conditions de dépôt conditionnant largement, comme pour l’oxygène, cette teneur. L’hydrogène peut aussi diffuser dans le métal de base (ou être déjà présent suite aux traitements antérieurs, par exemple le décapage) et provoquer une fragilisation aux conséquences qui peuvent être graves. Le dépôt de chrome doit être, dans la majorité des cas, traité thermiquement pour diminuer cette teneur en hydrogène. Les courbes (figure 15) donnent la variation relative de la teneur en hydrogène en fonction du temps et de la température. Ce traitement de dégazage sera à adapter aux conditions d’exploitation et on peut logiquement recommander d’effectuer ce traitement de dégazage avant tout traitement de rectification.
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■ Déchromage Il est nécessaire, dans certains cas, d’enlever la couche de chrome pour remettre le métal à nu : rechargement de pièces usagées, mauvais chromage. La méthode la plus rapide est l’attaque chimique du chrome par une solution d’acide chlorhydrique à 50 % en volume avec 4 % de formaldéhyde. Il faut toutefois éviter l’attaque en piqûre du substrat ainsi que l’absorption d’hydrogène (lors de l’attaque acide) qui peut fragiliser le matériau. On peut aussi avoir recours à l’attaque anodique du chrome en solution alcaline. Cette attaque peut être réalisée à température ordinaire, dans une solution de soude (40 à 50 g/L) avec une densité de courant de 15 à 40 A/dm2. Pour déchromer les alliages d’aluminium ou de zinc, on peut aussi avoir recours à une attaque anodique sulfurique (30 à 50 % en H2SO4) à température ordinaire avec une densité de courant de l’ordre de 20 A/dm2.
2.3.6 Quelques particularités 2.3.6.1 Chromage dur de l’aluminium et de ses alliages L’aluminium est connu pour être nettement plus mou que les aciers. Les pièces ainsi revêtues auront du mal à résister à des chocs ou à de fortes pressions. Ce type de revêtement sera donc essentiellement appliqué dans le cas où l’on désire améliorer les caractéristiques de frottement et de résistance à l’usure de certaines pièces fabriquées en aluminium (et alliage) en raison de la légèreté de ce type de matériau. Parmi les applications industrielles, on peut citer : l’intérieur de certains cylindres de moteur léger, des pièces dans l’aéronautique et dans l’industrie textile (pièces en mouvement à accélération élevée). L’aluminium et ses alliages présentent au contact de l’air une couche d’oxydation qui rend très difficile l’accrochage de couches de chrome.
Figure 15 – Variation de la teneur en hydrogène dans le dépôt de chrome en fonction du temps et de la température (d’après [25])
■ Polissage, rectification Un traitement postchromage s’impose quand le dépôt présente une rugosité de surface qui empêche son utilisation directe, en particulier pour des épaisseurs supérieures à 25 µm. Quand le dépôt atteint cette épaisseur, il se crée sur la surface des boutons (donnant à la surface du dépôt un aspect en peau d’orange (cf. figures 5a, b )) qui prennent très souvent naissance sur des imperfections de la surface du substrat. Les dépôts de chrome étant durs, il est très difficile de réaliser un usinage à l’outil. Ce traitement est généralement une rectification à la meule avec les précautions habituelles : dureté, grain et vitesse de meule adaptés, refroidissement abondant. Si nécessaire, il est toujours possible de réaliser ensuite un traitement de polissage et une superfinition. Un polissage chimique peut aussi être effectué avec des solutions proposées par des fournisseurs. On peut aussi utiliser des solutions pour le polissage à base d’acide perchlorique. Dans ce cas, il est fortement recommandé, en raison des risques d’explosion, de respecter les règles de concentration et de température imposées par l’utilisation de ce type d’acide.
Dans le cas où l’on désire obtenir un dépôt de chrome sur aluminium, la préparation de surface classique ne suffit pas pour obtenir un bon accrochage : il est nécessaire de mettre en œuvre une série de prétraitements. Outre le dégraissage et le décapage (par exemple en milieu fluonitrique), un traitement d’activation s’impose, en particulier pour permettre l’accrochage de la couche. Le principe général de ces procédés est de ramener le chromage dur sur aluminium à un chromage dur sur surface plus classique qu’elle soit de zinc, cuivre, nickel ou même paradoxalement d’aluminium anodisé (type particulier). Pour cela, de manière classique, on réalise un dépôt de zinc par déplacement en solution alcaline (double zingage) : — NaOH : 500 g/L ; — ZnO2 : 100 g/L ; — FeCl3 : 1 g/L ; — sel de rochelle : 10 g/L (tartrate de sodium et potassium). Une autre formulation [27] de bain de zingage (pour double zingage) est : — cyanure de zinc : 50 g/L ; — cyanure de sodium : 25 g/L ; — NaOH : 150 g/L ; — sel de seignette : 20 g/L ; — cyanure de cuivre : 4 g/L ; — nitrate de cuivre : 1 g/L. Cette dernière formulation est recommandée pour le cas de pièces aux formes complexes, car sa viscosité est nettement inférieure à la précédente en raison de la concentration plus faible en NaOH. Ce premier traitement est suivi, après décapage (acide fluonitrique) de la couche formée, par un deuxième zingage permettant d’obtenir un dépôt adhérent, de taille de grain plus fin et plus étanche. Le dépôt de chrome est ensuite réalisé sur sous-couches
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de cuivre et/ou nickel effectuées par électrolyse ou dépôt chimique. Ce type de traitement est recommandé dans le cas où l’on désire obtenir une bonne résistance à la corrosion. Le revêtement direct de l’aluminium après zingage est aussi possible en introduisant la pièce revêtue dans le bain de chromage : le zinc se dissout en partie lors de cette immersion et le dépôt peut alors être réalisé. Il existe d’autres possibilités de préparation de surface avant chromage où l’on réalise un décapage en milieu acide en présence d’un sel d’un métal type nickel, ou cuivre. On peut utiliser un bain du type : — NiCl2 : 400 g/L ; — HF (ou HBF4) : 2 % ; — H3BO3 : 4 %. Le dépôt métallique (très fin) qui se forme grâce aux micropiles est ensuite éliminé lors de la mise en place de la pièce pour le chromage par attaque dans le bain. Une autre méthode est de favoriser l’oxydation de l’aluminium par un traitement anodique en solution d’acide phosphorique à 30 %, durant 10 à 15 min, à environ 1,5 A/dm2 et 30 oC. Cette couche anodisée dont les pores sont plus gros que lors d’une anodisation sulfurique par exemple, permet la pénétration des solutions ultérieures pour les dépôts. Lors de l’électrolyse, le dépôt a lieu dans et sur le film d’oxyde rendant l’adhérence de la couche meilleure. On peut ainsi réaliser un dépôt de cuivre et/ou nickel, et se ramener au cas précédent. En résumé, il apparaît qu’un certain nombre de possibilités sont ouvertes quant au chromage de l’aluminium. Le principe général reste toujours le même : provoquer l’accrochage de la couche en déplaçant l’interface aluminium-chrome toujours difficile à réaliser à cause de la couche d’alumine qui se forme dès qu’on est en milieu oxydant. L’utilisation de bains fluorés peut aussi permettre, par l’impact de ces ions, de résoudre ce problème d’accrochage de couche. Il faut aussi se méfier, dans certains des cas précités, de la pollution du bain de chromage par le métal qui a servi à réaliser la sous-couche pour l’accrochage du chrome. 2.3.6.2 Bains au tétrachromate (ou Bornhauser) Ce sont des bains qui permettent d’obtenir des dépôts de bonne qualité sur de larges plages de densité de courant [28]. Cette caractéristique peut être importante pour des pièces de forme complexe. De plus, le dépôt est beaucoup plus ductile que dans le cas de chromage classique et est aussi plus résistant à la fatigue thermique. L’absence de microfissuration le rend intéressant dans des applications de résistance à la corrosion. Cependant, la microdureté de ce type de dépôt est plus faible (700 HV 0,1) mais sa résistance à l’usure n’est pas fondamentalement différente de celle des autres dépôts obtenus en bain standard. Une composition classique est la suivante : — CrO3 : 300 g/L ; — NaOH : 60 g/L ; — H2SO4 : 0,6 à 0,7 g/L. La température d’utilisation est de 16 à 22 oC, la densité de courant de 20 à 80 A/dm2, ce qui impose de refroidir en fonctionnement les solutions, et les anodes sont classiquement en alliage du type Pb-Sb et avec un rapport des surfaces anode-cathode très important. Dans ces conditions de dépôt, on peut obtenir un rendement faradique de l’ordre de 30 %. En sortie de bain, le dépôt est gris mat et il doit être poli si l’on désire des dépôts brillants. L’intérêt de ces bains est lié à leur vitesse de dépôt (1 µm/min à 40 A/dm2), au fait que la pénétration est bonne et que le pouvoir de répartition semble meilleur que celui des bains standards. Ce type
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de bain, peu développé à l’heure actuelle, mériterait que l’on s’y intéresse davantage, en particulier par l’apport des progrès récents des catalyseurs organiques. 2.3.6.3 Chromage au tonneau Bien que d’utilisation limitée, il est possible de réaliser le chromage au tonneau de petites pièces avec des bains de composition spéciale travaillant à froid. La composition et les conditions d’utilisation pour deux types de bain sont les suivantes : — CrO3 : 350 g/L et 1,5 g/L HF ; — CrO3 : 250 g/L et 5 à 10 g/L de H2SiF6 ; avec une densité de courant de 5 à 8 A/dm2 et une température de l’ordre de 15 à 25 oC. Le dépôt se fait à faible densité de courant et les interruptions de courant si préjudiciables pour les dépôts de chrome en solution standard sont très bien tolérées. Toutefois, en raison du principe même du chromage au tonneau où la surface cathodique est, en général, supérieure à la surface anodique, cette solution s’enrichit rapidement en chrome trivalent et il est nécessaire de maintenir cette concentration à des niveaux compatibles avec une bonne utilisation (< 10 g/L). Les dépôts de faible épaisseur sont brillants et deviennent noduleux quand l’épaisseur dépasse quelques micromètres. 2.3.6.4 Chromage par inversion périodique du courant Le principe de l’utilisation de courants périodiquement inversés a fait l’objet de nombreuses études en particulier par le CETIM [29] [30]. Ce type de procédé est utilisable avec différentes formulations de bain. En effectuant des cycles dans lesquels la pièce à revêtir est périodiquement placée en anode et en cathode grâce à un générateur de courant adapté et en faisant varier les principaux paramètres liés à la pièce à revêtir, qui sont : — la densité de courant cathodique ; — la densité de courant quand elle est en phase anodique ; — le temps durant lequel la pièce est cathode ; — le temps durant lequel la pièce est anode, on arrive à modifier de manière très sensible, en jouant sur les valeurs intrinsèques de ces paramètres et leurs rapports, les caractéristiques des dépôts obtenus. Une des hypothèses qui peut expliquer la variation de ces caractéristiques est que la teneur en hydrogène est plus réduite dans les dépôts obtenus par cette méthode qu’en courant continu, ce qui semble essentiellement dû, toutes choses égales par ailleurs, au fait que l’hydrogène est soit oxydé, soit évacué de la proximité cathodique par le cycle anodique. Pour des raisons liées au renouvellement de cette couche cathodique, il est possible d’afficher des densités de courant locales beaucoup plus importantes. En sortie de bain, le dépôt est gris mat, mais un simple avivage permet d’obtenir un dépôt très brillant. Le dépôt obtenu est très dense, et, à condition d’avoir une préparation de surface soignée, il n’est ni micro ni macrofissuré. Bien sûr, son application la plus importante est les dépôts durs résistant à la corrosion bien que l’on perde très légèrement en microdureté par rapport au même bain en courant continu (environ 100 points vickers). D’excellents résultats [31] ont été obtenus en tenue à la corrosion en effectuant le cycle : 2 s en cathodique, 10 ms en anodique avec une densité de courant de 30 A/dm2. Un dépôt de 35 µm a présenté une résistance au brouillard salin supérieure à 500 h, dans les mêmes conditions, la tenue au brouillard salin d’un dépôt en courant continu est, à titre de comparaison, inférieure à 96 h. Pour obtenir ces résultats, la nature du substrat et la préparation doivent conduire à des surfaces exemptes de tout défaut. Ce type de traitement un temps limité par les caractéristiques des générateurs devrait trouver des applications importantes dans le domaine des couches dures et résistantes à la corrosion.
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2.3.6.5 Circulation de l’électrolyte La méthode consistant à faire circuler l’électrolyte de chromage semble peu développée à l’heure actuelle de manière industrielle. Faire circuler l’électrolyte dans l’entre-électrode devrait pouvoir permettre de modifier de manière sensible les conditions d’exploitation et les caractéristiques des dépôts obtenus. Pour le chromage de pièces de forme particulière (alésage par exemple) la circulation de l’électrolyte permet son renouvellement. Dans le cas de grosses pièces ou de parties de pièces à revêtir, une adaptation de l’anode à la partie à revêtir et une circulation de l’électrolyte dans le volume défini par la pièce et son anode permet d’utiliser de faibles volumes. On peut même envisager de réaliser, sous certaines conditions d’isolation électrique et d’étanchéité, une cuve dont la forme complexe est faite de la partie cathodique et de la partie anodique avec circulation d’électrolyte. Le fait de mettre l’électrolyte en circulation autorise bien sûr de fortes densités de courant à cause du renouvellement de la solution qui évite l’appauvrissement. Mais les conséquences ne s’arrêtent pas là, et elles se retrouvent sur plusieurs caractéristiques : — meilleure homogénéité de la microdureté sur une même pièce (influence de la constitution de la couche cathodique plus constante) ; — domaine de brillance plus grand (gain d’environ 50 %) ; — influence de l’hydrogène réduite car il est plus rapidement évacué de la surface de la pièce traitée. Cette dernière conséquence n’est pas des plus négligeables, à la fois sur le phénomène de fragilisation du substrat par l’hydrogène, et sur le phénomène de création de piqûres dans le dépôt lorsqu’elles sont produites par la fixation sur le substrat de microbulles. Selon les caractéristiques que l’on cherche à accroître ou à modifier, une étude de la composition (en particulier le rapport CrO3 /SO4) est à prévoir ainsi qu’une adaptation de la température et de la vitesse de circulation. 2.3.6.6 Chromage noir La production de chrome noir qui présente des propriétés dans le domaine de l’absorption des rayonnements du visible, est très utilisée dans l’industrie des panneaux solaires, en optique, aussi bien que pour les appareils de rayons X. Les solutions de chromage noir travaillent, en général, à forte densité de courant. Des compositions possibles de solution sont les suivantes : — CrO3 : 250 à 400 g/L (en l’absence de sulfate) ; — CH3COOH : 5 à 10 ml/L ; — température de 30 oC ; — densité de courant : de 80 à 100 A/dm2. Il a été montré [32] que l’addition de nickel ou de vanadium pouvait améliorer de manière notable les conditions d’obtention de chrome noir. Ainsi, une solution à 250 g/L d’acide chromique, avec 20 g/L de vanadate d’ammonium et 6,5 ml/L d’acide acétique permet d’obtenir des dépôts de chrome noir à des densités de courant de 100 A/dm2 à une température de 40 oC. Une autre formulation [33] pour laquelle la teneur en sulfate doit aussi être la plus basse possible, est : — CrO3 : 250 g/L ; — H2SiF6 : 0,5 g/L ; — température de 20 à 25 oC ; — densité de courant : de 25 à 30 A/dm2.
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2.3.7 Préparation de chrome pur Un des procédés de préparation des métaux est le dépôt électrolytique à partir de sels en solution. Cela concerne l’obtention de chrome métallique, qu’il est possible de préparer par électrolyse d’une solution à 250-300 g/L en présence de sulfate comme catalyseur (de 2,5 à 5 g/L). Dans le paragraphe 2.1.2.3, il a été évoqué que lors de l’électrolyse de solutions d’acide chromique en présence de catalyseur au sulfate, les métaux contaminants présents dans la solution ne se codéposaient pas avec le chrome. Cette constatation est intéressante car elle permet d’obtenir des dépôts de chrome exempts d’impuretés, même si la solution utilisée n’est pas de haute pureté. En ce qui concerne les éléments polluants, l’oxygène et l’hydrogène sont ceux qui sont présents à la plus forte teneur (2 000 µg/g pour l’oxygène, 500 µg/g pour l’hydrogène) à la température habituelle de dépôt (50 à 55 oC). Un certain nombre d’études ont été réalisées sur l’influence de la température sur la teneur du dépôt en oxygène et hydrogène. Il apparaît que plus la température augmente, plus la teneur en ces deux éléments diminue pour atteindre des valeurs inférieures à 200 µg/g pour l’oxygène et 100 µg/g pour l’hydrogène à 90 oC. Un mode de préparation électrolytique sera donc de réaliser les dépôts à température élevée (supérieure à 85 oC) [34] : si cette température est favorable à la teneur en ces deux éléments, elle implique bien sûr une vitesse de dépôt très faible (rendement faradique de l’ordre de 3 % à 50 A/dm2). Le dépôt est réalisé sur des cathodes cylindriques creuses, en cuivre (bouchées à l’extrémité inférieure pour éviter l’attaque par le bain du cuivre), l’amenée de courant étant effectuée par le haut de la tige dépassant du bain de chromage. On récupère le chrome métallique par dissolution en bain d’acide nitrique du tube de cuivre : le chrome n’est pas attaqué par l’acide nitrique. Une analyse chimique a montré que cette dissolution était complète, le dépôt présentant une teneur inférieure à 1 µg/g en cuivre. L’ensemble des cathodes de chrome ainsi dégagées de leur substrat de cuivre est ensuite traité à 1 300-1 400 oC sous courant d’hydrogène pour permettre la réduction de la teneur en oxygène à des valeurs très basses pour ce type de métal. Une fusion sous argon après traitement permet d’obtenir du chrome de haute pureté [35]. Les analyses des échantillons fondus ont été réalisées par activation neutronique et spectrométrie gamma sauf pour ce qui concerne l’oxygène, le soufre, le carbone et l’azote qui ont été dosés par des méthodes du type fusion oxydante pour le carbone et le soufre et réductrice pour l’oxygène. Les résultats montrent qu’il est possible d’obtenir du chrome dont la pureté, pour la quasi-totalité des éléments, est inférieure à 1 µg/g (l’oxygène et le soufre ayant une teneur inférieure à 2 µg/g).
2.4 Purification et recyclage des bains Lors de son fonctionnement, la solution de chromage se charge en impuretés. Ces impuretés sont généralement des cations du type fer, nickel, cuivre... provenant soit d’une attaque du substrat au fur et à mesure du traitement des pièces (chromage dur), soit d’un entraînement de solution de traitements antérieurs (chrome décoratif), soit de pièces qui se sont décrochées (essentiellement là aussi en chromage décoratif). L’impact de l’accroissement des impuretés dans le bain de chromage se traduit rapidement par une dégradation des conditions d’électrolyse et des caractéristiques du bain. Il faut donc, au bout d’un certain temps, se résoudre à modifier le bain utilisé. La solution la plus facile bien sûr est de changer tout ou partie du bain utilisé... c’est aussi une solution très coûteuse et très pénalisante pour l’environnement.
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2.4.1 Généralités Les cations métalliques en quantité importante provoquent des modifications du processus de dépôt (cf. § 2.1.2.3). Bénéfices d’une purification des solutions d’acide chromique : — la qualité des dépôts est améliorée (diminution du risque de piqûres et d’arborescences aux fortes densités de courant) et davantage constante ; — on observe une diminution des coûts de retraitement pour les bains usagés (en théorie, ces coûts deviennent nuls) ; — une diminution de la consommation en courant (résistivité de la solution plus faible) ; — de même, une diminution des frais pour le renouvellement de l’acide chromique éliminé ; — et un accroissement de la productivité (solution plus conductrice, vitesse de dépôt plus grande).
L’efficacité des cellules de séparation par les méthodes électrochimiques dépend de plusieurs facteurs, en particulier de la nature des impuretés et de leur concentration mais aussi de la teneur en acide chromique de la solution à purifier. Suivant que l’impureté à éliminer est soit du cuivre soit du fer, la limite d’extraction peut varier de quelques milligrammes/litre (Cu) à quelques grammes par litre (Fe). On a aussi pu mettre en évidence : — que le taux d’oxydation de Cr3+ diminuait lorsque la concentration globale en impuretés métalliques augmentait ; — que le rendement de séparation pour un même métal (par exemple le fer) croît en raison inverse de la concentration en acide chromique [38]. Cette dernière constatation (figure 17) a conduit certains fabricants de purificateurs à conseiller d’utiliser un système dans lequel les bains à purifier sont dilués avec les eaux de rinçage.
2.4.2 Méthodes Il existe deux grands types de méthodes qui peuvent être utilisés pour la purification et le recyclage des solutions d’acide chromique : — les méthodes électrochimiques à compartiments séparés [36] ; — les résines échangeuses d’ions (procédés de séparation des cations ou anions, bien connus des chimistes). Les procédés qui en découlent sont actuellement développement industriel, chaque type de procédé ayant ses propres avantages techniques et économiques. Un troisième type de méthode par voie purement chimique a été étudié il y a quelques années. Il est actuellement à nouveau remis en étude pour des applications. 2.4.2.1 Méthodes électrochimiques Dans tous les cas, il y a séparation des compartiments anodiques et cathodiques pour maintenir la séparation effectuée par l’action du champ électrique. Pratiquement, la grande majorité de ces séparateurs se répartissent selon deux grands principes : — séparation des compartiments anodiques et cathodiques par un diaphragme (pots en céramique ou membrane plastique) ; — séparation des compartiments anodiques et cathodiques par des membranes échangeuses d’ions là aussi en matière synthétique (figure 16). En ce qui concerne le premier type (diaphragme), les cations métalliques migrent de l’anolyte vers le catholyte, tandis que les anions, en particulier ceux correspondant au chrome hexavalent, s’ils sont présents dans le catholyte, migrent du compartiment cathodique vers le compartiment anodique. En même temps, il peut y avoir oxydation dans le compartiment anodique du chrome trivalent en chrome hexavalent. Une bonne méthode consiste à placer la solution à purifier dans le compartiment anodique et à alimenter le compartiment cathodique avec, par exemple, les eaux de rinçage [37]. Si le pH de la solution cathodique est assez élevé (augmentation due à la réduction des ions H3O+ lors du processus cathodique), les métaux qui ont migré vont précipiter sous la forme d’hydroxydes et générer des boues que l’on pourra retirer au fur et à mesure du fonctionnement. Pour le second type, l’électrolyse à membrane combine les effets de la migration sous champ électrique et de l’effet sélectif d’une membrane échangeuse d’ions. Dans ce cas-là, l’utilisation d’une membrane échangeuse de cations empêche la migration des espèces anioniques et il est alors possible d’utiliser comme catholyte une solution autre que l’acide chromique, ce qui peut présenter certains avantages, en particulier, si l’on veut éviter une précipitation des cations métalliques en utilisant une solution cathodique très acide et autre que l’acide chromique.
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Figure 16 – Différents aspects des procédés de séparation des ions par les méthodes électrolytiques (d’après [26])
Figure 17 – Influence de la concentration en acide chromique sur le rendement de séparation pour le fer (d’après [36])
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2.4.2.2 Résines échangeuses d’ions Le principe de fonctionnement des résines échangeuses d’ions est basé sur la mobilité des ions H+ des composés organiques constitutifs de la résine. De manière très schématique, l’affinité des cations métalliques pour se fixer, en substitution des ions H+ dans certaines conditions de pH et de milieu, permet d’éliminer des solutions ces cations métalliques et de relarguer les ions H + à leur place dans la solution. Lorsque les résines sont à régénérer, un acide fort et de préférence concentré percole à travers la résine chargée en impuretés métalliques et l’on crée le phénomène inverse de celui de fixation des cations métalliques. Dans le cas de la purification de solutions d’acide chromique, il est important que les éléments constitutifs de la résine soient insensibles à l’acidité et au pouvoir oxydant de cet acide, d’autant plus que cette solution est, en général, à 50 oC ou même plus. Il est donc recommandé de diluer la solution par les eaux de rinçage, ce qui permet de diminuer d’autant l’agressivité de la solution chaude d’acide chromique concentré. En contrepartie, il sera très souvent nécessaire de concentrer le bain purifié pour pouvoir l’introduire à nouveau dans les cuves de dépôt, à moins que, par une adaptation des flux entrants et sortants, il soit possible de compenser l’évaporation des bains (température de travail de l’ordre de 50 à 55 oC) par l’opération de dilution [39]. Les deux méthodes que l’on vient de décrire sont des méthodes qui peuvent fonctionner en continu sur les cuves de chromage en disposant d’installations annexes telles que cuves tampon et système de pompes. L’avantage important est de pouvoir maintenir, dans le principe, une concentration constante des impuretés métalliques et du chrome trivalent dans le bain. Cela entraîne une qualité constante de haut niveau et évite ainsi en production les fluctuations dues aux variations du taux d’impuretés.
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— diminution de la consommation énergétique par l’amélioration du rendement faradique de l’électrodéposition du chrome et de la conductivité de la solution. Remarque : il a été démontré que, pour un même montage, toutes choses égales par ailleurs, le passage de 1 000 A nécessitait une différence de potentiel anode-cathode de 6 V pour un bain de chromage neuf et de 7,5 V pour un bain contenant 7,5 g/L d’impuretés.
À notre sens, il n’est pas possible de recommander un système d’épuration plutôt qu’un autre dans la mesure où le type d’appareillage va dépendre de l’environnement dans lequel on va l’implanter. Le tableau 5 extrait de la référence [39] propose un aperçu des avantages et inconvénients liés à chaque méthode. (0)
Tableau 5 – Comparaison des méthodes de purification et de recyclage des bains Méthode
Avantages Oxyde
Cr3+
en
Cr6+
Électrolytique Traitement en continu Principe en rapport avec l’expérience des ateliers
Résines échangeuses d’ions
Inconvénients Rendement faible pour les métaux autres que le Cr3+ Efficacité fonction de la concentration en Cr6+ Fragilité des membranes et coût de remplacement
Enlève toute la contami- Retraitement nation (bonne efficacité) des effluents lors du rinçage des résines Peut traiter les bains à catalyseur organique
Utilisation d’acide concentré pour la régénération des résines Maintenance des résines
2.4.2.3 Procédés chimiques Cette méthode s’applique, de préférence, à des solutions à retraiter par volumes déterminés à l’avance. Le principe de cette méthode de purification est basé sur la constatation que le chrome hexavalent en solution est sous forme anionique alors que la quasi-totalité des métaux polluants est sous forme cationique. En augmentant le pH de la solution chromique, ces cations vont avoir tendance à précipiter sous forme d’hydroxydes tandis que le chrome hexavalent restera en solution. Pratiquement, la précipitation est réalisée par adjonction dans le volume étudié d’une base type (A+, OH–). Après filtration, pour éliminer les hydroxydes qui ont précipité, la solution est traitée pour éliminer les cations A+ introduits et acidifier la solution au pH de départ [40]. Les ions de chrome trivalent sont éliminés par précipitation sous forme d’hydroxydes, mais peuvent aussi être oxydés préalablement à la réaction de précipitation. À titre d’exemple une solution qui contenait initialement entre autres cations 10,3 g/L de fer et 2,3 g/L de cuivre a été recyclée à 0,2 g/L en fer et 0,05 g/L en cuivre.
2.4.3 Impact environnemental et économique Les avantages environnementaux et économiques introduits par la régénération et le recyclage des solutions d’acide chromique dans le cas du chromage (dur et décoratif) apparaissent clairement : — meilleure utilisation de l’acide chromique ; — diminution de la consommation d’acide chromique pour remplacer le chrome évacué pour destruction et mise en décharge ; — diminution des frais liés au transport et au retraitement en station spécialisée des solutions inutilisables ; — amélioration de la qualité du dépôt dans la mesure où le maintien à un niveau bas et de préférence constant en teneur des impuretés métalliques permet d’éliminer les fluctuations des caractéristiques ;
L’ensemble de ces méthodes, malgré les résultats intéressants déjà obtenus, demande un effort de perfectionnement des systèmes disponibles. Étant donné le gaspillage de matière première, le coût de retraitement lors de la destruction de l’acide chromique, l’impact négatif sur l’environnement de ce type de polluant, il paraît essentiel qu’un gros effort soit accompli dans les domaines suivants : — fiabilité des systèmes ; — compétitivité économique ; — facilité de mise en œuvre.
3. Chromage avec électrolyte au chrome trivalent 3.1 Généralités 3.1.1 Complexes du chrome trivalent Le chrome, par ces degrés d’oxydation divers présente une chimie des plus complexes. Il existe, d’après la littérature, des milliers de composés qui, mis à part quelques rares exceptions, sont des complexes hexacoordonnées. L’ion de chrome trivalent, avec six molécules d’eau Cr ( H 2 O ) 63+ , de forme bipyramidale, est un des complexes de ce type les plus stables. Classiquement, les complexes aqueux formés avec les métaux ont une cinétique d’échange rapide entre une molécule d’eau de la sphère de coordination et de la solution. Cet échange est beaucoup plus lent pour les complexes du chrome. Une étude [48] a montré que la constante de vitesse d’échange pour une molécule d’eau dans le cas du complexe Ni ( H 2 O ) 62+ était 11 fois plus rapide que pour le complexe Cr ( H 2 O ) 3+ 6 .
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Historique Le chrome métallique a été obtenu pour la première fois par électrolyse, grâce à une solution de chrome trivalent. Cette réalisation est le fait d’un Français, Junot de Bussy (1848) [41] dans un travail beaucoup plus général d’obtention d’un certain nombre de dépôts par voie électrolytique. Il confirmait ainsi les travaux d’Antoine Becquerel [42] prédisant qu’il était possible d’obtenir du chrome par électrolyse en utilisant du chlorure de chrome ou éventuellement du sulfate ou nitrate. Dans un brevet français suivant [43], Junot de Bussy (1855) décrivit plus en détail le procédé en indiquant en particulier la méthode d’obtention du chlorure de chrome qu’il avait utilisé en 1848, par dissolution d’un oxyde de chrome hydraté dans l’acide chlorhydrique. Dans le même temps, Bunsen (1854) étudia l’influence de la densité de courant sur l’électrodéposition de chrome à partir d’une solution de chlorure concentré et chaud avec séparation par un vase poreux des compartiments anodiques et cathodiques [44]. Il réussit à obtenir des dépôts de chrome présentant des zones brillantes mais aussi très fragiles. Par la suite, un certain nombre de travaux furent conduits dans divers pays avec, en France, les travaux de Placet et Bonnet (1901) [45], J. Voisin (1910) [46], A. Recoura (1913) [47]. Dans tous ces travaux, il est apparu l’importance : — des ions chromeux très instables dans les conditions normales ; — de l’utilisation de solutions plutôt acides ; — ainsi que le rôle important que pouvaient jouer les sels d’ammonium. L’importance de l’utilisation de compartiments anodiques et cathodiques séparés par une membrane poreuse a aussi été mise en évidence mais, parallèlement à tout cela, il est apparu à ces chercheurs une abondance impressionnante de composés pouvant se former à partir du chrome trivalent, des molécules d’eau et des anions de la solution, découverte qui mettait au fur et à mesure à jour la complexité de la chimie (et donc de l’électrochimie) de cet élément à son degré d’oxydation 3. Au fur et à mesure de l’augmentation de pH se produisent d’une part des réactions complexes (olation, oxolation, polymérisation...) qui conduisent à la formation de composés très complexes, dont certains sont des molécules de grosses tailles, d’autre part la formation de colloïdes et de précipités d’hydroxydes. Dans le cas de l’électrodéposition du chrome à partir de chrome trivalent, ces composés et la stabilité du complexe Cr ( H 2 O )3+ font 6 que la réaction de réduction cathodique du chrome trivalent en chrome métallique est d’autant plus difficile et pose un certain nombre de problèmes pour l’obtention de chrome métallique dans de bonnes conditions.
3.1.2 Problématique La stabilité du complexe hexa-aqueux du chrome trivalent et la complexité de la nature des composés susceptibles de se former, en fonction du solvant, du pH, de la température et de la concentration en chrome trivalent, ajouté au fait que la cinétique des réactions inverses à la polymérisation, oxolation et olation est très lente, mettent en évidence la difficulté d’obtenir des dépôts de chrome dans de bonnes conditions. Schématiquement, on peut indiquer les raisons qui peuvent expliquer le peu de succès du dépôt de chrome à partir de chrome trivalent : — le potentiel négatif de la réduction de Cr (III) en Cr (0) entraîne un dégagement important d’hydrogène à la cathode qui induit localement une élévation du pH ; — l’augmentation de pH augmente la formation d’espèces complexes par olation, oxolation, polymérisation et même hydrolyse ;
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— la stabilité des complexes du chrome trivalent étant très grande, la réduction à l’état métallique est plus difficile. Pour obtenir des dépôts de chrome à partir de solution de chrome trivalent, il est nécessaire : — d’éviter, si possible, la formation du complexe aqueux hexacoordonné ; — d’utiliser un agent tampon très actif pour permettre le maintien du pH (à proximité de la cathode) dans des valeurs évitant que la cinétique de formation des composés stables, décrits précédemment, soit trop rapide ; — d’ajouter un agent complexant qui donne des composés avec le chrome trivalent suffisamment forts pour résister le plus possible aux réactions précitées mais permettant, quand même, une réaction de réduction électrochimique dans des domaines compatibles avec une utilisation ; — de choisir un milieu permettant d’éviter le plus possible la formation anodique de chrome hexavalent par oxydation du chrome trivalent ; — d’introduire un surfactant pour améliorer les conditions de dépôt.
3.2 Chromage décoratif 3.2.1 Bains organiques Ils ont été introduits au début des années 70. L’utilisation des solvants organiques diminue le risque de formation des complexes aqueux. La diméthyl-formamide (solvant aprotique polaire) (DMF) s’est avérée le solvant le mieux adapté pour ce type d’utilisation [50] [51]. Pour améliorer la conductivité de ces bains, des additions de chlorures d’ammonium et de chlorures de sodium ont été proposées [52]. Cependant, pour des raisons de toxicité liées à l’utilisation de grandes quantités de DMF, à cause aussi de sa sensibilité aux impuretés (en particulier nickel) et de ses contraintes d’exploitation (dégagement de chlore ou séparation anode-cathode, et surtout la mauvaise conductivité), ce type de bain n’a pas eu le développement espéré par ses caractéristiques (meilleur pouvoir de répartition que pour les bains de chrome hexavalent et résistance à la corrosion comparable).
3.2.2 Solutions aqueuses Il existe actuellement en fonctionnement industriel des bains de chromage décoratif au moyen de solution de chrome trivalent. Ces solutions sont constituées dans la grande majorité par des complexes de chrome formés soit avec des ions du type formiate ou des ions type thiocyanate. Pour permettre le dépôt de chrome à partir de sels de chrome trivalent, il est nécessaire (on l’a vu précédemment), de réaliser un complexe suffisamment stable pour empêcher sa transformation en complexe aqueux hexacoordonné, mais qui puisse être facilement réduit électrochimiquement à la cathode. 3.2.2.1 Complexant formiate C’est le cas des complexes formés avec les ions formiates (ou acétates), et ce type de solution est actuellement utilisé pour les dépôts de chrome décoratif. Une composition possible est donnée : — chrome trivalent CrCl3 , 6 (H2O) : 0,4 M ; — formiate (par exemple acide formique) : 1 M ; — chlorure d’ammonium : 2 M ; — acide borique : 0,6 M ; — agent mouillant suivant la nature (lauryl sulfate de sodium, perfluorures de sels d’ammonium, Triton X...).
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Les conditions de fonctionnement sont les suivantes : — pH de 2 à 3 ; — température de 20 à 30 oC ; — densité de courant utilisable : large gamme allant de 0,5 à 100 A/dm2. L’avantage de ces solutions est de permettre d’obtenir des dépôts sur une large gamme de densité de courant sans avoir de risque de brûlures, en particulier aux fortes densités de courant. Pour éviter la formation de chrome hexavalent à l’anode, il est nécessaire d’avoir une séparation des compartiments anodiques et cathodiques. Depuis peu, il semble que l’utilisation d’anodes en titane revêtues d’oxyde d’iridium permette de s’affranchir de la séparation des compartiments. 3.2.2.2 Complexant type thiocyanate On peut aussi former des complexes de stabilité permettant un bon fonctionnement de ces solutions de chrome trivalent à partir d’ions thiocyanates, thiosulfates ou avec la thiourée. L’utilisation la plus répandue est celle avec les ions thiocyanates. Une composition peut être la suivante [48] : — chrome trivalent sous forme de sulfate alcalin : 5 à 6 g/L de Cr3+ ; — thiocyanate de sodium : 0,05 g/L ; — acide borique : 60 g/L ; — sulfate de potassium : 100 g/L ; — sulfate de sodium : 50 g/L. Les conditions d’utilisation sont les suivantes : — pH : environ 3 ; — température d’utilisation de l’ordre de 40 à 50 oC ; — la densité de courant utilisable est très large (quelques A/dm2 à 100 A/dm2). Dans ce cas aussi, il est nécessaire d’avoir une séparation des compartiments anodiques et cathodiques pour éviter la formation de chrome hexavalent à l’anode. Les caractéristiques des dépôts obtenus sont tout à fait semblables aux bains obtenus avec les complexants du type formiate.
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3.2.4 Principaux résultats La couleur des dépôts obtenus en chrome trivalent est légèrement plus sombre que celle du chrome hexavalent qui apparaît plus bleuté. On trouvera dans la courbe (figure 18) la réponse concernant la qualité de ces dépôts. En effet, comme on peut le constater, les courbes donnant la variation de la vitesse de dépôt en fonction de la densité de courant pour le chromage à partir de chrome trivalent et de chrome hexavalent sont assez caractéristiques : — d’une part, la densité de courant minimum permettant l’obtention de chrome métallique est plus faible pour le chrome trivalent que pour le chrome hexavalent ; — d’autre part, la vitesse de dépôt pour le chrome trivalent est à peu près constante en fonction de la densité de courant. Ces deux constatations permettent de dire que : — d’une part, le pouvoir couvrant du chrome à partir de solution de chrome trivalent sera meilleur que pour le chrome hexavalent ; — d’autre part, le pouvoir de répartition sera bon, l’on évitera ainsi les phénomènes de surépaisseur et les brûlures du dépôt aux fortes densités de courant. En ce qui concerne la porosité déterminée par le test de Dupbernell, il a été démontré qu’elle augmentait à la fois avec l’épaisseur du dépôt et avec la densité de courant. La résistance à la corrosion de ce type de procédé (chrome trivalent), comparée à celle obtenue par des dépôts réalisés au moyen de solution de chromage (catalyseur à base de sulfate) est du même ordre de grandeur (lors d’un essai du type CASS test). Pour les contraintes résiduelles, le dépôt présente des contraintes de traction qui diminuent de 20 MPa à 0 lors de l’augmentation d’épaisseur jusqu’à environ 1 µm [48]. Au-dessus de cette épaisseur, les contraintes résiduelles sont en compression et atteignent 20 MPa pour une épaisseur de 3 µm. Ces valeurs mesurées par la méthode du contractomètre à spirales sont très largement différentes de celles obtenues en chrome hexavalent (pour de faibles épaisseurs) et qui vont en augmentant pour atteindre des valeurs importantes (de l’ordre de plusieurs milliers de MPa pour des épaisseurs de 3 à 4 µm).
3.2.5 Utilisation industrielle 3.2.3 Installations Ces bains de chromage en chrome trivalent peuvent fonctionner en cuves matière plastique telles que le polypropylène, PVC, polythène, etc. Il convient, pour des raisons de pollution des bains, de nettoyer très soigneusement lors de la mise en service de ces installations les cuves et tout le matériel utilisé. En particulier, il est nécessaire d’être vigilant pour les installations ayant fonctionné avec de l’acide chromique.
Actuellement, en France et dans le monde, un certain nombre d’ateliers utilisent le dépôt de chrome décoratif au moyen de solutions de chrome trivalent en substitution du chromage décoratif à partir de solution de chrome hexavalent.
En ce qui concerne les générateurs, la conductivité plus faible de ces solutions, et l’interposition de membranes (ou pots poreux) pour séparer compartiments anodiques et cathodiques font qu’il est nécessaire d’utiliser des générateurs permettant d’atteindre 15 à 20 V (cette ddp dépend bien sûr de la densité de courant sous laquelle on veut travailler). La séparation des compartiments permet d’utiliser des anodes en plomb avec un électrolyte dans le compartiment anodique tel qu’une solution à 5 ou 10 % en volume d’acide sulfurique. En ce qui concerne les systèmes de ventilation et les extracteurs, il n’est pas nécessaire d’avoir des systèmes très performants. En effet, la faible toxicité de ce type de bain, associée à la nature des dégagements gazeux anodiques (essentiellement de l’oxygène) font de ces procédés des méthodes très propres vis-à-vis de l’environnement.
Figure 18 – Comparaison des vitesses de dépôt obtenues à partir de bains de chrome hexavalent et trivalent (d’après [48])
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Les aspects positifs environnementaux ne sont pas les seules raisons du choix de ce type de procédé, d’autres avantages sont décisifs : — il y a peu de risque de dépôts brûlés dans les zones à forte densité de courant (pouvoir de répartition amélioré par rapport au chrome hexavalent) ; — il est possible de réaliser un dépôt de chrome dans les zones en retrait (trous, anfractuosité...) ; — on constate une nette amélioration de la productivité par l’augmentation de la quantité de pièces pouvant être disposées sur un cadre de traitement (absence de brûlure ou de manque de dépôt) ; — l’interruption de courant est tolérée par les bains de chrome trivalent, permettant ainsi une reprise du chrome sur chrome, possibilité difficile voire impossible en chromage au chrome hexavalent. Dans le cas du chrome hexavalent, cette interruption conduit à des dépôts de mauvaise qualité pour l’utilisation en chromage décoratif (aspect blanc laiteux). Toutefois, quelques désagréments viennent diminuer cette panoplie d’avantages. En effet, l’aspect en tant que couleur des dépôts de chrome trivalent est plus sombre et moins bleuté que l’aspect habituel (chrome hexavalent). Cette tendance, très visible lors des premiers développements dans les années 1975-1985 de ces types de procédés, a gêné considérablement l’essor de cette technique. Actuellement, un gros effort a été réalisé par des formulations adaptées (en particulier, par la diminution de la concentration en chrome de la solution). Dans ces conditions, il est possible d’obtenir des dépôts dont la couleur est très proche de celle obtenue en chrome hexavalent. Il est toutefois nécessaire de maintenir à un niveau bas les teneurs en impuretés (type fer, nickel, cuivre, etc.) car ces impuretés affectent l’aspect coloration du dépôt : plus leur concentration est élevée, plus le dépôt devient sombre. Pour obtenir des dépôts de qualité, il sera donc nécessaire d’avoir recours à des systèmes de purification adaptés (résines échangeuses d’ions, additifs chimiques pour coprécipitation) qui augmentent d’autant le coût d’exploitation : la méthode de purification par électrolyse avec cathode perdue est trop lente pour être utilisée. Exemple À titre d’information on peut signaler les limites de tolérances de ces bains : Ni : 500 mg/L, Cr(VI) et Cu : 30 mg/L, Zn : 100 mg/L, Fe : 30 mg/L.
3.2.6 Chromage au tonneau La faculté de ce type de bains de supporter, sans inconvénient, l’interruption momentanée de l’alimentation, avec la possibilité de pouvoir effectuer des dépôts de chrome, même à faible densité de courant, permet d’envisager l’utilisation de telles solutions pour le chromage au tonneau de petites pièces. Cette possibilité est pour l’instant peu développée : il semble qu’un certain nombre de problèmes techniques non résolus (en particulier liés aux réactions anodiques) freine le développement de ce type de traitement. Ce serait pourtant là un domaine intéressant pour l’application de ces procédés, en particulier pour les petites pièces à traiter en chrome décoratif. Le gain de temps introduit par la suppression de l’accrochage et du décrochage des pièces, la qualité et reproductibilité des dépôts qui sont obtenus sur ces pièces par un revêtement au tonneau, pourraient permettre de gagner en productivité lors du chromage décoratif.
3.3 Chromage dur et épais À l’heure actuelle, il n’existe pas d’applications industrielles en France et dans le monde, de procédés permettant de déposer du chrome métallique dur à forte épaisseur (> à 20 µm) au moyen de solutions de chrome trivalent.
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Au stade laboratoire ou pilote, un certain nombre de formulations ont été proposées, chacune présentant ses particularités et ses avantages, mais des inconvénients d’exploitation gênent encore leur utilisation à l’échelle industrielle.
3.3.1 Aperçu des possibilités On peut considérer qu’il existe parmi ces formulations deux grandes classes de procédés permettant de déposer du chrome à forte épaisseur. La première classe correspond à l’utilisation de solutions aqueuses renfermant un complexe de chrome du type utilisé en chromage décoratif en milieu trivalent, l’autre est basée sur l’utilisation de chrome trivalent obtenu par réduction du chrome hexavalent. Dans les deux cas, le principe régissant le bon fonctionnement réside dans le fait que le chrome trivalent doit être lié ou complexé dans des ensembles dont la stabilité : — permet une réduction cathodique suffisamment aisée pour être réalisée dans des conditions classiques de potentiel, pH et température ; — soit suffisamment importante pour éviter la formation au cours du temps de complexes trop stables pour permettre une réduction cathodique (complexes aqueux hexacoordonnés, réactions de polymérisation...). 3.3.1.1 Chrome trivalent complexé Les agents complexants généralement utilisés sont essentiellement de trois types : — les ions thiocyanates (SCN–) ; — les ions hypophosphites ( H 2 PO 2– ) ; — les ions formiates (HCOO–). (avec l’adjonction éventuelle de produits tels que l’acide glycolique, l’acide citrique, la glycine ou des ions sulfamates). Dans tous les cas, le principe d’utilisation reste le même : — introduction dans la solution aqueuse d’un sel de chrome (pour des raisons économiques sulfate ou chlorure) permettant la complexation avec les ions ou molécules précédemment cités ; — apport d’énergie par chauffage pour permettre la complexation; — ajout de composés divers tels que des sels conducteurs (sulfates, chlorures de sodium et/ou potassium) afin d’obtenir une solution dont la conductivité soit compatible avec des installations existantes ; — des sels d’ammonium (chlorure ou sulfate) facilitant la complexation et jouant, comme l’acide borique (H3BO3), un rôle de tampon en particulier au voisinage de cathode ; — addition fréquente d’un tensio-actif permettant d’éviter la formation de piqûres. 3.3.1.2 Chrome trivalent obtenu par réduction de l’acide chromique Deux types de solutions ont été proposées : — l’une par réduction par SO2 du chromate de sodium (Na2CrO4) en solution, et adjonction à cette solution de sulfates de sodium et d’ammonium ; — l’autre par réduction directe de l’acide chromique par le méthanol en milieu chlorhydrique ou sulfurique. Les solutions obtenues permettent de déposer du chrome métallique à forte épaisseur avec des rendements électrochimiques élevés (25 à 40 % par rapport au chrome trivalent).
3.3.2 Préparation des surfaces Les propriétés acides et oxydantes des solutions de chrome trivalent sont nettement inférieures à celles de chrome hexavalent et le décapage ultime lors du trempé dans la solution avant électrolyse est moins efficace.
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Nous insistons sur cette préparation car trop souvent, et cela est très perceptible pour les solutions de chrome trivalent, on recherche les causes d’un mauvais dépôt dans la formulation ou les conditions d’utilisation du bain utilisé pour le revêtement, alors que dans la quasi-totalité des cas c’est la préparation de surface qui est à l’origine des défauts constatés. Cette préparation de surface peut être réalisée selon la séquence suivante : — dégraissage aux solvants organiques ; — dégraissage alcalin anodique à température élevée ; — décapage par trempé en milieu acide chlorhydrique ou par tout procédé permettant d’éliminer les oxydes de surface ; — décapage et dépassivation anodique en milieu sulfurique. Entre chaque nouvelle opération, un rinçage soigné doit être réalisé. Dans certains cas, pour diminuer l’influence de l’état de la surface avant le chromage, on peut recommander de réaliser une sous-couche de nickel sur le substrat à revêtir. Le nickel étant moins sensible aux imperfections des couches (en particulier en raison de ses pouvoirs couvrant et de répartition meilleurs que ceux du chrome, ainsi que sa capacité d’absorber les phénomènes introduits par la surtension de l’hydrogène sur les inclusions), son accrochage sera meilleur et on sera ramené par la suite à réaliser le dépôt sur cette couche.
3.3.3 Paramètres de fonctionnement 3.3.3.1 Compositions Quelques compositions de bains avec les principales caractéristiques de fonctionnement sont données dans l’encadré 1. 3.3.3.2 Cuves, anodes, matériel particulier De manière générale, comme pour le chromage décor en chrome trivalent, la matière des cuves ne présente pas de problème technique majeur. Les bains n’étant pas particulièrement corrosifs, des cuves en matière plastique (les cuves métalliques ne peuvent pas être utilisées) conviennent parfaitement pour ce type de traitement : type PVC, polyéthylène, PTFE... La contrainte maximale étant la résistance mécanique à la température, et éventuellement au dégagement gazeux de chlore lors de l’utilisation de certains bains à base de chlorures sans séparation des compartiments anodiques et cathodiques. La nature des anodes va dépendre en grande partie de la nature du bain (avec ou sans chlorure) et de la présence ou non d’une séparation des compartiments anodiques et cathodiques : — avec séparation, la nature de l’anode sera fonction de la nature de l’anolyte (des anodes en plomb pourront être utilisées avec un anolyte à base d’acide sulfurique) ; — sans séparation, les bains seront en règle générale à base de chlorures (pour éviter l’oxydation anodique du chrome trivalent en chrome hexavalent), l’oxydation anodique des chlorures conduira à un dégagement de chlore, et par suite le matériau constitutif de l’anode sera soit du graphite, soit du titane revêtu de platine (pour éviter la formation d’une couche isolante d’oxyde de titane). Cette dernière possibilité paraît la meilleure pour la tenue des anodes dans le temps car, soumis au balayage de chlore, les anodes en graphite ont une tendance certaine à se détériorer au bout de quelques semaines d’utilisation intensive. Des études récentes ont montré l’intérêt d’anodes type céramiques (oxydes d’iridium). Pour réaliser des dépôts en chrome épais, il sera plus avantageux de pouvoir réaliser les opérations sans séparation des compartiments car le pouvoir de répartition du chrome n’étant pas excellent, il faudra, dans la majorité des cas, avoir recours à un anodage : cela peut devenir complexe lors de l’utilisation de compartiments
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séparés. Comme précédemment, il est alors recommandé pour pouvoir adapter les anodes aux formes des pièces à revêtir, d’utiliser des anodes en titane revêtu à la place des anodes en graphite. En ce qui concerne les générateurs, les bains de chrome trivalent, malgré l’introduction de sels conducteurs à forte concentration, ont une conductivité plus faible que les autres bains électrolytiques. Il sera nécessaire de pouvoir travailler sous des tensions plus élevées que classiquement (de l’ordre de 8 à 15 V), et par suite pour des raisons de securité de travail, il faudra pouvoir disposer de générateurs permettant de travailler jusqu’à 20 ou 24 V (si l’on désire pouvoir effectuer des coups de courant). De plus, pour éviter tout phénomène de perte de vitesse de déposition (rendement faradique) et obtenir les meilleures caractéristiques du dépôt, il est recommandé d’utiliser des générateurs de courant continu dont le taux d’ondulation résiduelle est inférieur à 5 %.
3.3.4 Caractéristiques des dépôts Pour chaque type de bain et pour chaque condition d’exploitation, les conditions d’obtention (vitesse de déposition, pouvoir couvrant et de répartition) et les caractéristiques des dépôts obtenus (microdureté, contrainte résiduelle, structure cristalline...) sont différentes. Cela implique que pour chaque utilisation, une adaptation des conditions de dépôt doit être effectuée en fonction de la caractéristique essentielle correspondant à l’utilisation. Toutefois, de grandes lignes peuvent se dégager en ce qui concerne les caractéristiques : — le rendement électrochimique est de l’ordre de 25 à 40 % pour les bains obtenus par réduction de l’acide chromique, il est nettement inférieur pour les bains de chrome trivalent complexé ; — le pouvoir couvrant et de répartition est bon pour les bains complexés, mauvais pour les bains de chrome réduit ; — les dépôts sont noduleux à partir d’une épaisseur supérieure à 10 µm ; — les dépôts sont microfissurés et les valeurs des contraintes résiduelles (de l’ordre de 20 à 200 MPa) sont fonction des conditions d’obtention du dépôt (densité de courant, température...) ; — suivant la nature des bains, les dépôts sont réputés amorphes (Cr complexé), ou de texture (111) (Cr réduit) ; — la résistance à la corrosion est inférieure, à épaisseur égale, à celle des dépôts obtenus en chrome hexavalent ; dans le cas de dépôts obtenus en chrome trivalent on observe souvent des fissures traversantes, souvent dues à des imperfections de surface (figure 19) ; — la microdureté de ces dépôts varie de 700 à 1 100 HV sous une charge de 100 g en fonction de la nature des bains utilisés. La figure 19 présente les indentations Vickers sur des dépôts réalisés avec la formulation utilisant du chrome trivalent obtenu par réduction, par le méthanol, de l’acide chromique [59]. La résistance à l’usure passe pour être inférieure lors d’essais du type Taber à celle du chrome obtenu par des bains de chrome hexavalent. Il apparaît qu’une caractéristique non négligeable des dépôts obtenus en chrome trivalent est leur faculté à voir leur microdureté augmenter de manière considérable lors de traitements thermiques. Un certain nombre d’auteurs [60] [61] [62] [63] ont montré que cette microdureté pouvait atteindre des valeurs de 1 700 à 1 900 HV 100 lors d’un traitement thermique à 400 – 500 oC pendant quelques heures (figure 20). Cette caractéristique semble liée [60] [61] [62] [63] à la formation de carbures de chrome (Cr7C3 ou Cr23C6) en fonction de la température de traitement, en raison de la teneur en carbone des dépôts après sortie du bain (pouvant varier de 0,2 à quelques pour-cent suivant la composition du bain). La vitesse d’usure de dépôts de chrome trivalent (brut de dépôt), trois à quatre fois supérieure à celle obtenue pour des dépôts obtenus en chrome hexavalent est diminuée d’un facteur 8 à 10 après traitement thermique à 500 et 650 oC.
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Encadré 1 : Exemple de bains de chromage dur et épais à partir de chrome trivalent ■ Formiates [52] : — CrCl3 , 6H2O : 100 à 150 g/L ; — NH4Cl + NaCl : 70 à 100 g/L ; — Formiate (HCOO– ) : 50 à 80 g/L ; — H3BO3 : 10 à 30 g/L ; — température ambiante ; — pH : 0,1 à 1 ; — densité de courant : 20 à 125 A/dm2. ■ Thiocyanates [53] : — Cr2(SO4)3, 6H2O : 30 à 90 g/L ; — NaSCN : 24 à 80 g/L ; — Na2SO4 : 200 g/L ; — H3BO3 : 20 à 60 g/L ; — température : 22 à 40 oC ; — pH : 2 à 3 ; — densité de courant : 1,2 à 10 A/dm2. ■ Hypophosphites [54] : — CrCl3, 6H2O : 30 à 65 g/L ; — NaH2PO2 : 195 g/L ; — NH4Cl : 320 g/L ; — H3BO3 : 12 g/L ; — NaF : 4 g/L ; — température : 25 à 35 oC ; — pH : 2 à 5,5 ; — densité de courant : 2 à 50 A/dm2. ■ Formiates + additifs particuliers : ● Acide glycolique ou citrate [55] : — CrCl3, 6H2O : 100 g/L ; — KBr : 15 g/L ; — HCOOH : 30 ml/L ; — H3BO3 : 40 g/L ; — Acide glycolique 32 g/L ou citrate de sodium : 95 g/L ; — température : 20 à 50 oC ; — pH : 1,5 ; — densité de courant : 30 à 50 A/dm2. ● Sulfamates [56] : — CrCl3, 6H2O : 125 g/L ; — KCr (SO4)2, 12H2O : 25 g/L ; — NH4NH2SO3 : 178 g/L ; — NH4Cl : 80 g/L ; — HCOOH : 60 ml/L ; — tensio-actif : type éther polyéthylène glycol ; — température : 21 oC ; — pH : 1,5 ; — densité de courant : 10 à 20 A/dm2. ● Glycine [57] : — CrCl3, 6H2O : 0,8 M ; — glycine : 1,0 M ; — NaCl : 0,5 M ; — NH4Cl : 0,5 M ; — H3BO3 : 0,15 M ; — catalyseur particulier ; — température : 20 à 50 oC ; — pH de 0,1 à 0,3 ; — densité de courant : 30 à 70 A/dm2.
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Encadré 1 : Exemple de bains de chromage dur et épais à partir de chrome trivalent (suite) ■ Réduction acide chromique : Pour ce type de bain il a été proposé deux formulations différentes. ● Réduction par SO2 [58] : — Cr2(SO4)3 : 0,6 M (sulfate obtenu par réduction de Na2CrO4 par SO2) ; — (NH4)2SO4 : 42 g/L ; — Na2SO4 : 27 g/L ; — (NH4)2S2O8 : 100 à 200 mg/L (ajout continuel) ; — température : 27 à 42 oC ; — pH : 1,8 à 2,2 ; — densité de courant : 6 A/dm2 ; — séparation des compartiments anodiques et cathodiques. ● Réduction par le méthanol [59] : — CrCl3 : 1 à 1,5 M ; — NH4Cl : 0 à 100 g/L ; — H3BO3 : 30 à 50 g/L ; — température : 45 à 50 oC ; — pH voisin de 0 ; — densité de courant : 60 à 150 A/dm2. Cette caractéristique importante est à rapprocher de la variation de microdureté du nickel chimique (Ni-P par exemple) après traitement thermique à 400 oC. De plus : — cette microdureté peut être obtenue sur des dépôts épais (30 à 80 µm) réalisés avec une vitesse de croissance rapide (de l’ordre ou supérieure à 1 µm/min) ; — cette microdureté est voisine de celle obtenue par des procédés nécessitant des installations nettement plus complexes [type PVD (dépôt physique en phase vapeur) ou CVD (dépôt chimique en phase vapeur)] ; — il est possible de traiter de cette manière des pièces de taille importante ; — le coût de ce traitement est celui de traitements par voie électrochimique (réputé pour être un des plus bas). On perçoit aisément qu’il y a là une voie de développement très intéressante pour des applications nouvelles.
3.3.5 Avantages - Inconvénients L’utilisation du chrome trivalent pour le chromage dur, outre les avantages environnementaux qui seront developpés par la suite, permet d’espérer une amélioration des qualités des dépôts en particulier, on vient de le voir, lors de l’utilisation en température de ces revêtements. De plus, les rendements électrochimiques d’obtention qui sont plus élevés que pour le chrome hexavalent, d’une part, et d’autre part le fait que l’on n’utilise que trois électrons pour la réduction du chrome trivalent au lieu de six pour le chrome hexavalent, permettent d’espérer un gain de productivité et un coût plus faible pour la réalisation dans les mêmes conditions d’un dépôt de chrome dur. Il faut aussi bien réaliser que ce type de procédé n’est pas un substitut au chromage mais une autre voie que le chrome hexavalent pour obtenir des dépôts de chrome dur dont les caractéris-
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Figure 19 – Dépôts de chrome dur et épais obtenus à partir de chrome trivalent
tiques paraissent irremplaçables dans le domaine des traitements de surface de manière générale. Cependant, et pour l’instant l’état de la technique le montre, il n’existe pas sur le marché de procédés qui soient exploitables industriellement. Un long travail reste à faire !
3.3.6 Chromage au tampon et en courant pulsé 3.3.6.1 Chromage au tampon Ce procédé de traitement est décrit dans la référence [77]. Il est appliqué de manière courante pour un certain nombre d’applica-
Figure 20 – Effet des traitements thermiques sur les dépôts de chrome dur obtenus à partir du chrome trivalent
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tions, cependant, il est pour l’instant peu (ou pas) utilisé pour déposer du chrome dur à forte épaisseur à partir de solutions de chrome hexavalent. La possibilité de réaliser des dépôts de chrome au tampon a été proposée [64] à partir de solutions de chrome trivalent complexées (type oxalate d’ammonium), cependant la composition de cette solution n’est pas donnée dans le détail (concentration en chrome trivalent de 20 g/L). Le pH d’utilisation est presque neutre (5,5 à 6,8) et il n’y a pas de dégagement de chlore lors de l’électrolyse ; ce sont des conditions d’utilisation favorables pour le développement de ce type de procédé. Les caractéristiques du procédé et des dépôts obtenus sont résumées dans le tableau 6. Conditions d’utilisation : — température : de 25 à 60 oC ; — densité de courant : de 60 à 200 A/dm2 ; — tension : de 2 à 12 V en fonction de la forme des anodes et de la densité de courant, travail jusqu’à 160 A/L de bain. 3.3.6.2 Chromage en courant pulsé Cette méthode a été appliquée [65] pour le chromage en chrome trivalent dans une installation de 30 L pour chromer des tiges d’amortisseurs (1,2 cm de diamètre, 28 cm de long). Le bain de chromage utilisé est celui au sulfamate (encadré 1). L’utilisation de courant pulsé (Pulse Reverse Current - PRC) permet l’oxydation dans la phase anodique de l’hydrogène adsorbé, en ions + H , permettant ainsi d’abaisser le pH dans la couche cathodique, ce qui évite la précipitation d’hydroxydes. Cette caractéristique offre plusieurs avantages : — obtention de chrome métallique exempt d’hydroxydes provoquant une augmentation de la dureté ; — diminution de la teneur en hydrogène du dépôt évitant la fragilisation et les risques de piqûres.
Exemple Une étude systématique a permis de définir les meilleures conditions d’utilisation : densité de courant : 30 A/dm2, la pièce étant placée 80 % du temps en courant cathodique (20 % anodique) fréquence : 100 Hz. Les résultats obtenus sont les suivants : — rendement faradique : 31 à 35 % ; — microdureté sous 100 g : 845 ± 20 HV ; — résistance à la corrosion mauvaise : après 24 h de test au brouillard salin, les tiges chromées présentaient de nombreuses taches, après 48 h toute la tige était corrodée. Une amélioration importante de la tenue à la corrosion (toutefois ne permettant pas d’obtenir d’aussi bons résultats qu’en chrome hexavalent) a été observée après un traitement de grenaillage permettant une forme de colmatation des fissures traversantes. De l’ensemble de ces résultats obtenus par des traitements spéciaux, on peut constater qu’il est possible d’adapter aux solutions de chromage à partir de chrome trivalent les méthodes électrochimiques particulières développés pour d’autres métaux. Toutefois, il paraît nécessaire de développer techniquement et de fiabiliser l’application de ces méthodes pour pouvoir obtenir des résultats valables à l’échelle industrielle. On peut percevoir là un domaine susceptible d’être exploité dans la décade à venir. Bien sûr, les avantages de l’utilisation de solutions de chrome trivalent qui paraissent évidentes sont liés à la nature même des ions utilisés : la toxicité de l’ion trivalent en terme de concentration des rejets liquides a été jugée 10 fois plus faible que celle du chrome hexavalent et l’énergie électrique nécessaire pour la réduction du chrome trivalent par rapport au chrome hexavalent est théoriquement divisée par deux. Pourtant, il nous semble que les avantages de l’utilisation de solutions de chrome trivalent se situent, à l’heure actuelle, davantage dans le domaine technique plutôt qu’environnemental. En effet, les efforts réalisés depuis un certain nombre d’années dans le domaine de la prévention de la pollution par le chrome hexavalent rendent ce procédé de plus en plus performant dans ce domaine et les risques liés à l’utilisation de ce procédé deviennent, à condition de respecter la réglementation et d’utiliser les moyens de prévention, de plus en plus minimes. L’utilisation industrielle de bains de chrome trivalent pour la réalisation de dépôts de chrome dur pourrait apporter, en complément, un certain nombre de solutions aux problèmes techniques posés par l’utilisation de solutions de chrome hexavalent. (0)
Tableau 6 – Caractéristiques du chromage au tampon Chromage au tampon à partir de chrome trivalent Dureté HV....................................... Indice Taber (1).............................. Coefficient frottement ................... Effet du traitement thermique...... Vitesse de dépôt ............................
900 à 1 200 0,7 0,12 Microdureté : croît 1 à 3 µm/min
Chromage en cuve à partir de chrome hexavalent 900 à 1 200 2,0 à 2,8 0,12 Microdureté : décroît 0,5 à 1 µm/min
Nickelage au tampon 520 à 580 10,0 — Microdureté : inchangée très rapide
(1) Masse en mg de chrome perdue par le dépôt durant 1 000 cycles sous une charge de 1 000 g.
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4. Perspectives du chromage Dans ce paragraphe qui est davantage une approche prospective qu’une présentation de résultats scientifiques, nous montrons les possibilités futures de ce type de dépôt. Malgré de nombreux efforts réalisés pour trouver des substituts à ce revêtement de surface, aucun procédé n’est à l’heure actuelle susceptible, à court terme, de remplacer le chromage dur. Nous reprendrons la comparaison faite par Michael Murphy, éditeur en chef de la revue bien connue Metal Finishing, qui dans un éditorial récent (1995), comparant le chromage dur à un joueur de rugby de classe exceptionnelle, atteint par l’âge de la retraite, ne trouve pas de remplaçant mais plutôt un certain nombre de joueurs faisant aussi bien (voire mieux) dans certains domaines, cependant aucun d’eux n’étant susceptible de le remplacer. Cette image pourrait bien s’appliquer au chromage...
4.1 Chrome hexavalent 4.1.1 Positionnement Les dépôts de chrome sont largement utilisés dans des domaines où leurs caractéristiques combinées d’adhérence, dureté, résistance à la corrosion et à l’usure sont uniques. Par exemple, dans le domaine de l’aéronautique, de l’aérospatiale, de l’électronique et de l’automobile, son utilisation est largement répandue que ce soit pour les trains d’atterrissage ou les vérins de commande, dans les moteurs pour les composants en rotation, l’intérieur des tubes d’armes, les relais électroniques, les pistons de freins, les segments de moteurs thermiques, les vérins hydrauliques... cette liste étant non limitative. Le chromage décoratif, quoique davantage touché par les phénomènes de mode, en particulier dans le domaine de l’automobile (pare-chocs, enjoliveurs de roues ou décoration, phares...) et de l’ameublement (robinetterie, huisserie) est toujours utilisé et tend à retrouver une utilisation par la réhabilitation des standards anciens aux États-Unis (motos, automobiles).
4.1.2 Amélioration des caractéristiques des procédés et des propriétés des dépôts Une des contraintes majeures de l’utilisation du chromage est son faible pouvoir couvrant et le rendement électrochimique médiocre. L’introduction sur le marché de procédés aux caractéristiques nettement améliorées (catalyseur organique) qui permettent d’obtenir des dépôts brillants sur de larges gammes de densité de courant, avec des rendements faradiques de l’ordre de 25 %, permettant des vitesses de déposition de l’ordre de 1 µm/min, tout en évitant l’attaque chimique dans les zones non revêtues (par opposition aux solutions utilisant les catalyseurs fluorés) permet de redonner un élan important à ce type de traitement. De plus, les caractéristiques des dépôts obtenus sont améliorées dans la mesure où, par l’augmentation de la microdureté et de la microfissuration, les caractéristiques de résistance à l’usure et à la corrosion sont nettement accrues tout en conservant la qualité intrinsèque de faible coefficient de frottement du chrome. D’autre part il apparaît possible, à condition de soigner la préparation de surface avant chromage, de déposer à la cote, sans avoir recours à une rectification, des dépôts jusqu’à une épaisseur de 30 à 40 µm.
4.1.3 Développement des procédés limitant la pollution Il est clair aussi que le développement des procédés de chromage en chrome hexavalent, outre l’amélioration technique, doit passer par la continuation des efforts réalisés pour permettre le respect des mesures décrétées dans le domaine environnemental.
CHROMAGE
Depuis un certain nombre d’années, le chromage à partir de chrome hexavalent est sous haute surveillance, cela tient bien sûr aux dangers liés à son utilisation. À ce sujet, il apparaît que depuis les quelques lustres où le chromage en chrome hexavalent subit les assauts des défenseurs de l’environnement, on peut facilement concevoir que ce type de traitement, pour ne pas avoir été interdit, doit présenter des avantages non négligeables. Cela veut donc dire que, pour pouvoir profiter des caractéristiques de ce dépôt et des développements technologiques, un effort important doit être fait dans le domaine du recyclage des solutions et des vapeurs émises lors du traitement. Une des voies importantes pour permettre le développement de ce procédé est donc de s’astreindre à tendre vers le rejet zéro dans les ateliers, et par suite à utiliser et recycler au mieux les solutions. Dans cette optique de rejet zéro, un traitement des déchets liquides et gazeux doit pouvoir se faire dans des conditions techniques et économiques motivantes pour les applicateurs. Les efforts technologiques réalisés sur le thème du retraitement des solutions d’acide chromique doivent être amplifiés et ils prennent tout leur sens quand on sait que plus de la moitié de l’acide chromique entrant dans un atelier repart pour les centres de destruction et de retraitement. Un autre point important à développer et venant en complément, est l’utilisation des systèmes de traitement tendant à diminuer le volume utilisé pour la réalisation des dépôts. En ce sens, les systèmes tels que le traitement de surface au tampon, ou les procédés en circulation semblent se révéler intéressants puisque le volume utilisé est plus réduit, et par suite les risques sont minimisés.
4.2 Chrome trivalent Dans ce domaine, toutes les perspectives sont ouvertes. Depuis de nombreuses années, des efforts de recherche sont effectués pour permettre de développer, en parallèle avec l’utilisation de solutions de chromage décor à partir de chrome trivalent, des procédés de revêtement de chrome épais. On l’a vu précédemment, suivant la caractéristique du dépôt que l’on cherche à privilégier et les conditions d’exploitation que l’on souhaite, un certain nombre de formulations sont disponibles. Cependant, il est nécessaire de fiabiliser et de stabiliser ces conditions d’exploitation et ces formulations en faisant porter les efforts dans une direction bien définie. C’est, semble-t-il là, le premier objectif que doivent se donner les partenaires (détenteur de procédés et exploitant potentiel) dans le cadre d’un projet de développement. Une synergie plus étroite devrait exister entre les laboratoires, les entreprises intéressées et les futurs utilisateurs. La définition de la caractéristique que l’on cherche à développer permet de faire évoluer la formulation dans le sens d’une meilleure adaptation, et il faudra faire des choix technologiques pour arriver à résoudre des problèmes qui surgissent au fur et à mesure dans la mise en œuvre de tels procédés. À titre d’exemple, l’introduction de sels conducteurs dans les bains de chrome trivalent, permet d’améliorer de manière notable la répartition et le pouvoir couvrant de ces bains, par contre cela se fait au détriment de la microdureté qui chute de 200 à 300 points Vickers. De même, l’utilisation de bains sans chlorures permet d’éviter, c’est une évidence, le dégagement anodique de chlore mais oblige d’effectuer la séparation des compartiments anodiques et cathodiques. Dans ce dernier cas, les derniers développements (stade laboratoire) de l’utilisation des céramiques comme matériau anodique, permettent d’envisager un progrès dans ce domaine. On peut le constater, les perspectives de développement du chromage passent par deux impératifs : le premier d’ordre environnemental, avec le développement de procédés utilisant des sels moins toxiques (sels de chrome trivalent) ou avec un rejet minimal (de préférence nul) des composés de chrome hexavalent, le deuxième d’ordre technique, avec l’amélioration des performances et des
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caractéristiques des dépôts obtenus. Dans cet ordre d’idée, une amélioration possible pourrait être les dépôts de chrome avec inclusion de particules.
4.3 Dépôts composites On trouve dans la littérature des publications décrivant des bains et des dispositifs expérimentaux pour tenter de réaliser la codéposition de chrome et de particules lubrifiantes ou dures [78].
4.3.1 Dépôts composites à partir de solutions de chrome hexavalent Un certain nombre d’essais ont été réalisés pour associer dans un même dépôt du chrome dur avec des particules dures (type Al2O3 , SiC, TiO2 , WC, B4C, diamant) ou des particules autolubrifiantes (type PTFE, Graphite, MoS2...) au moyen de solutions de chrome hexavalent. Peu de ces procédés ont pu donner des résultats positifs, et comme règle générale, les dépôts ne comportaient de manière reproductible qu’environ 1,0 à 1,5 % de particules. Une étude systématique [65] entreprise en faisant varier les conditions expérimentales (position relative de l’anode et de la cathode, méthode d’agitation, concentration des particules d’Al2O3 jusqu’à 500 g/L) n’a pas permis de dégager de méthode fiable pour l’obtention de tels dépôts, et de manière générale, les dépôts ne contenaient qu’une très faible proportion de particules. Dans cette étude, seule l’introduction de cations monovalents du type thallium, cerium ou rubidium a permis d’obtenir des inclusions de particules significatives. Avec des concentrations de 400 g/L en Al2O3 et 1 g/L de sulfate de thallium (solubilité maximale dans les solutions d’acide chromique), il a été possible d’obtenir des dépôts contenant 5 % en masse d’alumine. Cependant, ces dépôts obtenus étaient très poreux et friables, et donc inutilisables pour caractériser les performances dues à l’introduction de ces particules. Un procédé mis au point en Russie et qui paraît être développé à l’échelle industrielle dans les pays de l’Est permettrait de codéposer avec des solutions de chrome hexavalent des particules de diamant de très faible granulométrie (de l’ordre de quelques nanomètres). Une étude de caractérisation a été menée sur ces dépôts [65]. Cependant, malgré les bons résultats obtenus dans certains cas (tests d’usures avec des résultats comparables à des dépôts TiN ou TiC obtenus par PVD et CVD), il semble que la dispersion des résultats obtenus montre l’hétérogénéité des couches et ne permet pas pour l’instant de se prononcer sur l’intérêt de ce type de dépôt. Des procédés utilisant le principe des dépôts en courant périodiquement inversé permettent d’inclure des particules type alumine dans les dépôts de chrome dur [68] [69]. La solution de chromage utilisée est une solution d’acide chromique à 250 g/L avec 2,5 g/L d’acide sulfurique dans lequel on a introduit environ 50 g/L de particules type alumine. La taille de ces particules est variable entre 0,5 et 5 µm et les particules sont maintenues en suspension par agitation. La phase cathodique dure environ 30 min à une densité de courant de 65 A /dm 2 , puis on réalise une inversion anodique pendant 30 s avec une densité de courant de 150 A/dm2. Durant cette phase anodique, les microfissures naturelles du dépôt de chrome s’ouvrent par attaque anodique et permettent d’inclure les particules, le processus cathodique est ensuite repris, permettant ainsi d’obtenir des dépôts avec des particules incluses dans les fissures et réparties sur l’épaisseur entière du dépôt. Les caractéristiques tribologiques de ces dépôts semblent très intéressantes mais les applications pratiques ont été peu développées. Ce procédé, dans ses résultats, va plus loin que les procédés développés il y a quelques années et qui consistaient à inclure par des moyens thermiques et/ou mécaniques des composés type PTFE dans les fissures de la surface des dépôts en les dilatant. Toutefois, dans les deux cas, la répartition des particules est hétérogène, et ne se fait que dans les fissures, laissant le dépôt dans sa partie massive exempt de renforts.
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Un développement est donc de pouvoir obtenir des dépôts de chrome avec répartition homogène des particules.
4.3.2 Dépôts de chrome composite avec des bains de chrome trivalent Il est possible de réaliser la codéposition de particules avec des solutions de chromage au moyen de chrome trivalent. Cependant, comme nous l’avons déjà montré, les bains de chromage épais à partir de chrome trivalent, demandent un développement pour que leur application dans le domaine industriel soit possible. Différents types de bains ont été proposés, ils utilisent la diméthylformamide ou le formiate, des exemples de formulations figurent dans l’encadré 2.
5. Hygiène et sécurité Nous présenterons, dans ce paragraphe, les aspects en rapport directement avec l’utilisation de l’acide chromique, l’utilisation de solutions de chrome trivalent étant nettement moins à risques.
5.1 Risques liés à l’utilisation de trioxyde de chrome ou de solutions d’acide chromique Une note (fiche toxicologique no 1) de l’INRS dresse les risques inhérents à l’utilisation du trioxyde de chrome [1]. Ces risques se situent dans les domaines liés à ces propriétés chimiques (réaction violemment exothermique) et à ses risques pathologiques chez l’homme.
5.1.1 Risques chimiques Le trioxyde de chrome n’est pas directement inflammable, mais il peut donner lieu à des réactions violentes avec d’autres composés en raison de son fort pouvoir oxydant. Cependant, le trioxyde de chrome chauffé sans ménagement au-dessus de 330 oC peut produire, par le dégagement d’oxygène dû à sa décomposition, une déflagration. Son action en tant que trioxyde ou acide chromique sur des composés qui sont susceptibles d’être oxydés (soufre, phosphore, ammoniac, sulfure d’hydrogène, produits organiques, alcool...) peuvent générer des réactions avec explosion ou incendie. Son utilisation, dès qu’il y a possibilité d’une réaction chimique, doit être faite avec précaution, en particulier, une étude préalable sur de faibles quantités est à recommander.
5.1.2 Risques pathologiques Nous envisagerons dans ce cas uniquement la toxicité sur l’homme. Le contact avec le trioxyde de chrome qui est envisagé est celui soit chronique, soit exceptionnellement important. Dans le cas de contact chronique, les troubles sont essentiellements du type ulcération sur les mains (pigeonnaux ou eczéma sur la peau), œsophagites, gastro-entérites sur les voies digestives et sur les voies respiratoires, rhinites, laryngites, bronchites. Des perforations des cloisons nasales ont été signalées, cependant, depuis le développement des moyens de protection (aspirations efficaces, masques protecteurs), ce genre de trouble ne semble plus avoir cours dans les ateliers de chromage. Dans le cas d’un contact exceptionnellement important, les pathologies sont celles qui sont liées au contact avec des agents très oxydants et acides.
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Encadré 2 : Exemple de bains de dépôts composités chrome-particules ■ Bain avec la diméthyl formamide : Pour ce type de dépôt, il y a lieu d’effectuer les électrolyses avec séparation des compartiments anodiques et cathodiques : ● Bain diméthyl formamide et chlorure [66] : — CrCl3, 6H2O : 270 g/L ; — NH4Cl : 10 g/L ; — NaCl : 50 g/L ; — H3BO3 : 2 g/L ; — DMF : 420 g/L ; — bain travaillant à température ambiante ; — pH 1 à 2 ; — pour des teneurs en alumine variant de 25 à 150 g/L, la concentration en particules (taille 1 à 2 µm) du dépôt augmente de 5 à 10-12 % pour atteindre 15 % à des concentrations en alumine de 300 g/L ; — densité de courant de 7 à 10 A/dm2 ; — vitesse de dépôt de l’ordre de 0,3 µm/min. ● Bain diméthyl formamide et sulfate [66] : — Cr2(SO4)3 , 15H2O : 180 g/L ; — (NH4)2SO4 : 50 g/L ; — Na2SO4 : 50 g/L ; — H3BO3 : 2 g/L ; — DMF : 100 mL/L ; — bain travaillant à température ambiante ; — pH 1 à 2 ; — dans le cas des bains sulfates, la concentration en alumine doit être plus élevée : pour une concentration de 150 g/L, la teneur du dépôt est de l’ordre de 5 % et devient voisine de 15 % pour des teneurs approchant 300 g/L ; les dépôts sont réalisés à une densité de courant de 7 à 10 A/dm2 ; — vitesse de dépôt de l’ordre de 0,3 µm/min. Les résultats obtenus par ces procédés sont cependant limités en épaisseur (maximum 25 µm) et les dépôts sont dans tous les cas traversés par des fissures larges ou des crevasses, qui ne permettent pas d’exploiter au mieux ces procédés. ■ Bains au formiate : Des essais ont été réalisés [70] pour déposer des particules de SiC et de diamant à partir de bains au chrome trivalent complexé par des ions formiates. La composition des bains testés est la suivante : — Cr2(SO4)3 , 18H2O : 138 g/L ; — KCl : 76 g/L ; — NH4Cl : 54 g/L ; — NH4Br : 10 g/L ; — H3BO3 : 40 g/L ; — KCOOH : 30 à 80 g/L ; — bain travaillant à 28 oC ; — pH : 2,5-3 ; — densité de courant : 3 à 12 A/dm2 ; — anodes en graphite ; — concentration en particules SiC et diamant du bain de 50 g/L (taille 0,5 µm).
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Encadré 2 : Exemple de bains de dépôts composités chrome-particules (suite) Des essais de résistance à l’usure sur des dépôts de 20 µm d’épaisseur et contenant 2 % en masse de particules de SiC et diamant ont été effectués en mesurant la perte de masse par cycle (800 sous charge de 2 kg). Les résultats obtenus sont les suivants : Dépôt
Type de bain
chrome ................. hexavalent classique chrome ................... trivalent chrome ................... trivalent Cr + 2 % SiC ........... trivalent Cr + 2 % SiC ........... trivalent Cr + 2 % diamant trivalent Cr + 2 % diamant trivalent
Traitement thermique
Perte de masse/ cycle (mg)
sans
8,6
sans 400 oC, 1 h sans 400 oC, 1 h sans 400 oC, 1 h
22,2 11,1 7,1 3,3 10,7 3,0
Les résultats obtenus montrent de manière claire tout l’intérêt de l’inclusion de particules, d’autant plus si ce dépôt est suivi d’un traitement thermique. L’inconvénient majeur est la faible épaisseur des dépôts que l’on peut obtenir, qui ne peuvent guère dépasser 20 µm, et la vitesse de dépôt qui reste faible (de l’ordre de 0,1 à 0,2 µm/min). ■ Bains au chrome trivalent obtenu par réduction [71] : Par ce type de procédé, il est possible d’effectuer la codéposition de particules d’alumine avec du chrome jusqu’à des teneurs du dépôt en alumine voisines de 20 %. La répartition est homogène et l’on peut obtenir des dépôts d’épaisseur supérieure à 100 µm avec des vitesses de dépôt supérieures à 3 µm/min. Ce procédé est en cours de développement.
5.2 Quelques recommandations quant à l’utilisation 5.2.1 Du point de vue général Il convient de stocker le trioxyde de chrome à l’abri de l’humidité et des produits pouvant réagir. Pour la manipulation du solide ou des solutions, il est nécessaire d’éviter le contact du produit avec la peau, d’éviter aussi les risques d’inhalation. L’usage de gants, de lunettes, de vêtements de protection et, dans les cas difficiles, de masque paraît nécessaire, comme l’installation de douches et de fontaines oculaires seront très utiles en cas de projection de produit. Il est évident qu’il faut s’astreindre à ne pas fumer, ni boire, ni manger pendant la durée des travaux de manipulation de ces produits, et dans les ateliers de chromage, il est nécessaire de procéder régulièrement à des contrôles d’atmosphère à hauteur des voies respiratoires.
5.2.2 Mesures d’ordre médical Il est recommandé de signaler au personnel les risques associés à l’utilisation de ce produit. Ces mesures relèvent là aussi du bon sens : — éloigner des postes comparant un risque d’exposition les sujets atteints d’affections cutanées, cardio-pulmonaires ou autres pouvant donner lieu à un accroissement des lésions par contact avec ce type de produit ;
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— en cas d’inhalation massive, retirer le sujet de la zone polluée et prévenir rapidement un médecin ; — en cas de contact oculaire ou cutané, laver la zone souillée à grande eau ; — appeler le médecin dans tous les cas où le contact est sérieux ; — et bien sûr, dans tous les cas ou il y a risque de conséquences, consulter le centre antipoison dont relève l’établissement.
5.3 Quelques aspects de la réglementation pour les rejets Pour les rejets sous forme gazeuse, la norme de concentration maximale admissible a été fixée à 0,1 mg/m3 dans les conditions normales de pression et température. Dans le domaine des effluents liquides, la réglementation en France en matière de pollution des eaux est fixée pour le présent par l’arrêté du 26 septembre 1985, complété par l’arrêté du 1er mars 1993. Selon ces directives, les normes pour les rejets sont celles données au tableau 7. (0) En ce qui concerne le mercure et l’argent, une prévision de réglementation pourrait se faire au niveau de 0,05 mg/L pour le premier et 0,1 mg/L pour le second. À partir de ces mêmes prévisions [71],
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Tableau 7 – Normes de rejets (arrêté du 26.9.1985) Élement
Teneur (mg/L)
Élément
Cr VI Cr III Cd Ni Cu Zn Fe Al
0,1 3,0 0,2 5,0 2,0 5,0 5,0 5,0
Hg
–
Pb Sn MES CN– F– – NO 2 P DCO (1) Hydrocarbures totaux
Ag
–
Teneur (mg/L) 1,0 2,0 30,0 0,1 15 1,0 10 150 5,0
(1) DCO demande chimique en oxygène.
il y aurait une modification importante pour les normes en ce qui concerne les métaux usuels, le nickel serait ramené à 0,5 mg/L, le cuivre à 0,5 mg/L, le zinc à 0,5 mg/L, le fer à 2 mg/L, l’aluminium à 2 mg/L et le plomb à 0,5 mg/L. Pour le chrome, cette norme prévisionnelle pourrait introduire la notion de chrome total (inférieur à 0,5 mg/L en Cr VI + Cr III) en maintenant pour le chrome hexavalent la teneur maximale de 0,1 mg/L.
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P O U R
Chromage par
E N
Patrick BENABEN Docteur ingénieur Responsable du service Traitements de surface. Centre SMS École nationale supérieure des mines de Saint-Étienne
Données économiques Marché Les chiffres publiés en 1995 [Guillais (J.C.) : Chromage, le marché, les techniques concurrentes 10-12 mai 1995] par le SATS au sujet du chromage dur sont les suivants : le marché du chromage dur représente en France un chiffre d’affaires total (façonniers, prestataires de services, ateliers intégrés) de 700 millions de francs. Le tableau ci-contre donnant les chiffres d’affaires des différents types de revêtements pour les façonniers, permet de situer la technique du chromage. D’après ces valeurs, et en extrapolant aux traitements en général, le chromage dur représente un marché presque équivalent au marché des traitements par projection thermique et PVD + CVD réunis, et le chromage de manière générale (dur et décoratif) représente plus de 5 % (420 à 500 millions de francs) de l’ensemble des traitements de surface (environ 7 000 millions de francs pour les façonniers) y compris les traitements de peinture, laquage conversion...
Consommation La consommation globale en France de CrO3 est de l’ordre de 2 500 tonnes par an, dont 900 tonnes pour le chromage dur, et environ 100 à 200 tonnes pour le chromage décoratif. À titre d’information, le coût actuel du CrO3 est de l’ordre de 10 à 15 kF la tonne, ce qui représente un marché pour le chromage d’environ 10 à 15 MF/an.
à 5 ou 7 MF/an uniquement pour le chromage en France, auquel il faut ajouter le gain correspondant à la destruction de l’acide chromique évacué qui n’est plus à effectuer). (0)
Type de revêtements
Chiffre d’affaires en millions de francs
Revêtements électrolytiques............................................. dont chrome dur (1)........................................................... Dépôts chimiques .............................................................. Immersion en métal fondu................................................ Projection thermique ......................................................... Dépôt sous vide (PVD + CVD) ........................................... Traitements de conversion ............................................... (dont oxydation anodique)................................................ Traitements thermochimiques diffusion et superficiels. Peintures industrielles ....................................................... Laquage aluminium...........................................................
2 000 (320) 180 1 100 180 190 900 (600) 1 050 1 040 360
(1) Les chiffres concernant le chromage décoratif ne sont pas disponibles, on peut toutefois raisonnablement penser qu’ils se situent aux alentours de 100 à 200 millions de francs.
On pourra noter à ce sujet, qu’il est admis par les chromeurs, que plus de la moitié du chrome hexavalent rentrant dans les ateliers en ressort pour être mis en décharge et détruit. On peut ainsi se rendre compte du marché potentiel des systèmes de régénération des solutions d’acide chromique (supérieur
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