ESDEP GROUPE DE TRAVAIL 10
CONSTRUCTION CONSTRUCTION MIXTE
Leçon 10.4.2 Poutres continues – 2ème partie
Fichier : L10-4-2.doc
OBJECTIF Décrire les effets de la fissuration du béton et de la plastification de l'acier sur la distribution des moments de flexion. Expliquer les méthodes d'analyse globale élastique prenant en compte ces effets ainsi que le voilement local du profilé en acier et examiner le déversement des poutres mixtes mixt es continues.
PREREQUIS Leçon 7.2 : Leçon 7.3 : Leçon 7.9.1 & 7.9.2 : Leçon 10.2 : Leçon 10.3 : Leçon 10.4.1 :
Classification des sections transversales Voilement local Poutres non maintenues latéralement Le comportement des poutres m Poutres isostatiques ère Poutres continues – continues – 1 1 partie
LEÇONS CONNEXES Leçon 10.5.1 & 10.5.2 : Leçon 10.6.1, 10.6.1 , 10.6.2 & 10.6.3 : Leçon 10.10 :
Calcul et conception à l'état de service Connexion acier-béton Ponts mixtes
EXEMPLE ASSOCIE Exemple 10.3 :
Calcul d’une poutre mixte continue
RESUME L'analyse élastique des sollicitations dans les poutres mixtes continues est de portée plus générale que l'analyse plastique. Une redistribution des moments est autorisée qui tient compte de la fissuration du béton et de la plastification de l'acier dans les zones de moments négatifs. L'importance de cette redistribution dépend de la Classe des sections aux appuis intermédiaires et des hypothèses adoptées concernant la rigidité de flexion en moment négatif. Pour des sections transversales de Classe 3 ou de Classe 4, il convient de calculer les contraintes par la théorie élastique, en utilisant la largeur participante de la dalle. Il est
Page 1
admis de tenir compte de fluage du béton comprimé par le biais d'un coefficient d'équivalence approprié. Le schéma habituel des moments fléchissants dans une poutre continue conduit à avoir la semelle inférieure en acier comprimée au droit des appuis intermédiaires. Comme la semelle supérieure du profilé en acier est maintenue par la dalle, le déversement de la semelle comprimée s'accompagne d'une distorsion de la forme de la section. Il est possible de prendre en compte la rigidité de distorsion pour réduire la valeur de l'élancement spécifique au déversement. Les méthodes de calcul présentées dans cette leçon sont illustrées par l’exemple 10.3.
Page 2
1. INTRODUCTION Les moments fléchissants dans une poutre mixte continue à l'état limite ultime (ELU) peuvent être déterminés par une analyse élastique ou, sous certaines conditions, par une analyse rigide-plastique ; cette deuxième méthode a été discutée dans la leçon 10.4.1. L'analyse élastique a l'avantage d'être d'une portée plus générale et elle convient d'autant plus qu'elle est également nécessaire pour effectuer les vérifications à l'état limite de service (voir les leçons 10.5.1 et 10.5.2). Dans les structures mixtes de bâtiment, les effets de la température ne sont généralement pas pris en considération dans les vérifications à l'ELU. De manière semblable, les effets du retrait peuvent être négligés, excepté dans le cas d'une analyse en présence de sections de Classe 4. Aussi ces effets ne sont-ils pas considérés dans cette leçon. Le domaine d'application de l'Eurocode 4 [1] n'inclue pas les éléments avec des assemblages semi-rigides. Par conséquent, cette leçon porte sur des poutres dans lesquelles la partie en acier est soit continue au passage d'appuis simples, soit solidarisée par des assemblages rigides. D'une manière générale, l'analyse élastique exige que les rigidités relatives de travées adjacentes soient connues. Comme ces rigidités dépendent des moments d'inertie des sections, il est nécessaire de connaître la largeur participante de la dalle et le module d'élasticité du béton vis-à-vis du module de l'acier (coefficient d'équivalence).
Page 3
2. PRINCIPES GENERAUX 2.1
Largeur participante de dalle
Le concept de largeur participante est utilisé pour tenir compte de la déformation d'une dalle vis-à-vis du cisaillement en plan (« traînage » de cisaillement). La valeur de la largeur participante peut être reliée à la distance, le long de la poutre, entre points de moment nul. Différentes valeurs peuvent être calculées, par conséquent, entre zones de moments positifs et zones de moments négatifs, comme cela a été décrit sur la figure 10 de la leçon précédente (tirée de la figure 4.3 de l'Eurocode 4 [1]). Toutefois, en ce qui concerne l'analyse globale, on a montré que le « traînage » de cisaillement n'a qu'un faible effet sur les résultats. Aussi, est-il admis de supposer constante la largeur participante sur toute une travée, ce qui simplifie grandement l'analyse. Vu qu'en général la plus petite partie de chacune des travées d'une poutre se trouve soumise à la flexion sous moment négatif, il convient d'adopter comme largeur participante celle définie à mi-travée. Cependant, pour une poutre en console, la largeur participante à considérer est celle définie au niveau de l'appui. Pour la détermination des propriétés élastiques d'une section transversale, le béton est généralement supposé non fissuré sous moment de flexion positif. Si la dalle est constituée avec une tôle profilée dont les nervures sont perpendiculaires à la poutre en acier, comme cela été présenté à la leçon 10.1, l'aire de béton situé dans la hauteur des nervures est négligée.
2.2
Coefficient d'équivalence
Les propriétés élastiques d'une section de poutre mixte peuvent être exprimées comme celle d'une section équivalente en acier en divisant la largeur participante de la dalle par un coefficient d'équivalence. Les effets du fluage du béton comprimé peuvent être pris en compte par le biais d'une valeur appropriée de ce coefficient, comme cela est expliqué aux leçons 10.5.1 et 10.5.2.
2.3
Dispositions de charges et combinaisons de charges
Pour les poutres mixtes de bâtiment, en l'absence de consoles, soumises essentiellement à des charges uniformément réparties, il est admis de ne considérer seulement que les dispositions suivantes de la charge d'exploitation : travées chargées en damier, travées adjacentes chargées ensemble.
Page 4
Dans les deux cas, la même valeur du coefficient partiel de sécurité
G propre à la charge permanente peut être adoptée pour chaque travée, que cette charge ait u ne action favorable ou une action défavorable dans une travée particulière.
Page 5
3. DISTRIBUTION DU MOMENT FLECHISSANT La perte de rigidité conséquente à la fissuration du béton dans les zones de moments négatifs a un effet plus important sur la distribution des moments fléchissants dans les poutres mixtes continues que dans les poutres continues en béton armé. La raison à cela est qu'il y a également perte de rigidité par fissuration pour les poutres en béton armé dans les zones à mi-travée. On a montré que dans les poutres mixtes continues le moment fléchissant au droit d'un appui intermédiaire, à l'état limite de service (ELS) peut être de l'ordre de 15 à 30 % plus faible que celui qui serait donné par une analyse élastique ne prenant pas en compte la fissuration. A l'état limite ultime (ELU), la distribution des moments va être également influencée par la plastification de l'acier. La redistribution des moments ne peut être prévue avec précision parce que les contraintes normales de traction dans la dalle, en zones de moments négatifs, sont influencées par le phasage de coulage du béton et les actions de la température et du retrait, ainsi que par les proportions entre les dimensions de l'élément mixte et entre la charge permanente et la charge variable. On peut rencontrer une large variation de la rigidité de flexion le long d'une poutre mixte de section constante, conduisant à une incertitude dans la distribution des moments fléchissants et, par conséquent, dans l'importance de la fissuration escomptée. Deux méthodes d'analyse globale élastique sont permises par l'Eurocode 4 [1] à l'état limite ultime : analyse avec sections fissurées, analyse avec sections non fissurées. Les deux analyses peuvent être utilisées en association avec une redistribution des moments aux appuis, le degré de redistribution dépendant de la sensibilité de la poutre en acier vis-à-vis du voilement local.
3.1
Analyse avec sections fissurées
On admet que sur un tronçon de 15 % de la portée de chaque côté de chaque appui intermédiaire, les propriétés des sections sont celles d'une section fissurée sous moment négatif. Cette hypothèse consistant à fixer d'emblée la proportion de la travée qui est fissurée constitue une simplification importante dans la mesure où elle permet l'utilisation de formules ou de programmes classiques de calcul pour effectuer l'analyse globale, sans avoir à passer par des itérations. Le moment d'inertie géométrique de la section fissurée se détermine en considérant une section qui comprend la poutre en acier et les barres d'armature, effectivement ancrées, situées à l'intérieur de la largeur participante de dalle au droit de l'appui (voir figure 1a). A l'extérieur des « tronçons de 15 % », les propriétés des sections sont celles de la section non fissurée. Elles sont
Page 6
calculées en utilisant la largeur participante de dalle à mi-travée et en négligeant l'armature longitudinale (figure 1b). L'influence de l'hypothèse d'une fissuration sur un tronçon différent de 15 % de la portée a été étudiée (voir figure 2). On a trouvé que les moments fléchissants calculés sur la base d'une longueur fissurée de 15 % restaient corrects à plus ou moins 5 % lorsque la proportion de portée effectivement fissurée variait entre 8 et 25 % ; l'hypothèse simplificatrice adoptée plus haut est par conséquent justifiée.
3.2
Analyse avec sections non fissurées
Les propriétés de la section non fissurée sont utilisées pour l'ensemble de la poutre. Ainsi, l'analyse ne dépend pas du pourcentage d'armature au droit des appuis ; en effet, dans une poutre continue de section constante, l'analyse peut être effectuée sans avoir à calculer au préalable les propriétés de la section. Lorsque les travées sont égales, des coefficients classiques pour le calcul des moments fléchissants peuvent être tirés d'ouvrages de référence.
3.3
Redistribution des moments aux appuis pour l'analyse élastique
Les codes de calcul et de conception permettent habituellement de réduire les moments négatifs aux appuis par une redistribution vers les milieux de travée, excepté dans le cas des consoles. L'importance de la redistribution dépend, pour une part, de la méthode d'analyse utilisée, comme le montre le tableau 1 qui est extrait de l'Eurocode 4 (tableau 4.3 [1]). Le Tableau 1 montre également que le degré de redistribution dépend de la Classe de la section sur appui (les limites qui définissent les différentes classes de section mixte seront discutées plus en détail dans un paragraphe ultérieur de cette leçon). Considérons tout d'abord une section de Classe 4, c'est-à-dire une section dans laquelle le voilement local va empêcher d'atteindre la résistance de calcul en flexion. Si la redistribution réelle est plus faible que celle supposée par le projeteur, l'âme ou la semelle comprimée en acier au droit de l'appui peuvent voiler prématurément. Par conséquent, pour rester en sécurité, le pourcentage maximal de redistribution vers le milieu de travée ne doit pas dépasser la redistribution minimale susceptible de se produire en pratique. Une redistribution n'est pas permise alors si on utilise une analyse « fissurée ». Des études sur les poutres mixtes avec des sections critiques de Classe 3 ou de Classe 4 ont montré, sous réserve qu'un tronçon de 10 % au moins de la travée soit fissuré, comme cela est vraisemblable en pratique, que la réduction du moment sur appui due à la fissuration va dépasser 8 % (figure 2). Il est par conséquent raisonnable de supposer, en valeur arrondie, que la différence entre les analyses "fissurée" et "non fissurée" pour de telles poutres équivaut à 10 % de redistribution des moments "non fissurés" sur appuis, comme le laisse apparaître le tableau 1 pour les sections de Classe 3 ou de Classe 4.
Page 7
Il n'est pas nécessaire de montrer la même prudence à l'égard des sections de Classe 3 (dites parfois « semi compactes ») qui peuvent atteindre leur résistance de calcul, le voilement local interdisant seulement le développement du plein moment de résistance plastique. L'analyse numérique, utilisant des données expérimentales de la branche décroissante de la courbe « moment-rotation » traduisant le voilement local de consoles de Classe 3, confirme la possibilité de permettre une redistribution de 20 %, comme l'indique le tableau 1. Dans une section de Classe 2, le plein moment de résistance plastique peut être développé. La possibilité d'une redistribution de 30 % a été proposée à partir d'une analyse « non fissurée » pour prendre en compte la fissuration du béton et la plastification locale aux appuis. Des comparaisons avec des résultats d'essais effectués durant l'élaboration de l'Eurocode 4 ont confirmé ce dernier chiffre lorsque les sections sur appuis sont capables d'atteindre le moment de résistance plastique. Une poutre avec des sections de Classe 2 (ou de Classe 1) aux appuis doit présenter en général un axe neutre relativement bas, de sorte que les limites imposées à la hauteur d'âme comprimées soient satisfaites dans de telles sections. Par conséquent, seul un pourcentage faible d'armature tendue peut être introduit dans ces sections et le rapport I1 / I2 des rigidités de flexion « non fissurée » / « fissurée » peut dépasser 3. Avec de telles poutres, le moment fléchissant sur un appui intermédiaire, déduit de l'analyse « fissurée », peut être alors inférieur à 70 % de la valeur déduite de l'analyse « non fissurée » et pratiquement dans tous les cas inférieur à 85 % de cette valeur. Cette situation diffère de celle des études auxquelles il a été fait référence plus haut et qui sont résumées sur la figure 2, pour lesquelles le rapport I 1 / I2 était plus proche de 2 que de 3. Il en résulte que pour les sections de Classe 2 et de Classe 1, une différence de 15 % entre analyse « non fissurée » et analyse « fissurée » est plus appropriée que la différence de 10 % adoptée pour les poutres avec des sections de Classe 3 ou de Classe 4. Cette différence de 15 % apparaît dans le tableau 1 pour les sections de Classe 2 et de Classe 1. Enfin, une section de Classe 1 est une section capable, non seulement d'atteindre le moment de résistance plastique, mais aussi de supporter ce niveau de moment alors que la rotation se produit. Dans les structures en acier, les limites d'élancement d'âme et de semelle qui définissent une section comme « plastique » sont suffisamment sévères pour autoriser une analyse globale plastique sans avoir à effectuer d'autres vérifications sur la capacité de rotation. Ceci n'est plus vrai pour les poutres mixtes, à cause en partie du degré de redistribution nécessaire pour former un mécanisme de ruine par rotules plastiques ; ce degré va être plus élevé du fait d'un moment résistant plus élevé, en valeur relative, à mi-travée. Les exigences à satisfaire pour pouvoir appliquer l'analyse globale plastique ont été exposées dans la leçon précédente. La redistribution des moments aux appuis calculés par l'analyse élastique, que permet le Tableau 1 pour les sections de Classe 1, est basée sur la reconnaissance d'une certaine capacité de rotation existant pour ces sections.
Page 8
4. CLASSIFICATION DES SECTIONS TRANSVERSALES DE POUTRES Les limites d'élancement de semelle et d'élancement d'âme pour l es sections de Classe 1 et de Classe 2 ont été données dans la leçon précédente. Pour une section de Classe 1 ou de Classe 2, la résistance en flexion peut être calculée à l'aide du modèle de distribution rectangulaire des contraintes, comme cela a été expliqué aux leçons 10.3 et 10.4.1. La détermination du moment de résistance plastique ne sera pas examinée davantage dans cette leçon. Les limites d'élancement pour les sections de Classe 3 correspondent à celles au delà desquelles le voilement local se produit dans la poutre en acier avant que la limite d'élasticité ne soit atteinte. Il est par conséquent logique que ces limites pour les poutres mixtes, en l'absence d'un enrobage de l'âme par du béton, soient les mêmes que celles des poutres en acier. L'Eurocode 4 [1] a adopté cette position, comme le montrent les tableaux 1a et 1b de la leçon 10.4.1 ; une section de Classe 4 est une section qui ne satisfait pas à ces exigences d'élancement. On admet que l'enrobage de l'âme par du béton contribue à renforcer la résistance vis-àvis du voilement local, sous réserve que le béton soit armé et connecté à la poutre en acier par des dispositifs mécaniques. Une âme de Classe 3 qui est enrobée peut ainsi être traitée comme une âme efficace de Classe 2. Sous réserve que les semelles soient de Classe 1 ou de Classe 2, le moment résistant d'une section présentant une âme de Classe 3 non enrobée peut encore être déterminé par l'analyse plastique, en retirant une partie de l'âme. La section efficace qui en résulte sous flexion négative est montrée sur la figure 3. Sans l'introduction de cette possibilité, le simple changement de Classe de l'âme, de la Classe 2 à la Classe 3, dû à une petite variation du pourcentage d'armature longitudinale, interdirait l'utilisation de l'analyse plastique. En conséquence, le moment résistance calculé serait exagérément sensible aux variations du pourcentage d'armature.
Page 9
5. RESISTANCE ELASTIQUE EN FLEXION Suite à l'analyse globale effectuée à l'ELU, il est nécessaire de s'assurer que les sections proposées présentent une résistance adéquate vis-à-vis des sollicitations. Pour une section de Classe 3 ou de Classe 4, il convient de calculer les contraintes par la théorie élastique. Dans la détermination des propriétés de section, il convient de tenir compte du « traînage » de cisaillement par le biais de la valeur appropriée de la largeur participante de dalle, sous flexion positive et sous flexion négative (voir figure 10 de la leçon 10.4.1). Dans cette analyse, on suppose que la déformation varie linéairement sur toute la hauteur de la section mixte. Ceci implique que le glissement soit négligeable à l'interface acier-béton. On utilise également la théorie des sections homogénéisées, en supposant que le béton comprimé et l'acier sont tous deux des matériaux élastiques linéaires. Cette hypothèse permet de remplacer, dans l'analyse, la section mixte sous flexion positive par une section équivalente entièrement en acier. La largeur de la dalle équivalente en acier dépend du coefficient d'équivalence e, défini par : e
où :
Ea 1
Ec
Ea / E1c
est le module d'élasticité de l'acier de construction, est un module d'élasticité approprié pour le béton.
La transformation de section est illustrée sur la figure 4a dans le cas où la dalle a été réalisée avec une tôle profilée. Les nervures de hauteur D p sont perpendiculaires à la poutre et tout le béton situé au-dessus des nervures est comprimé. L'aire de béton à l'intérieur des nervures est négligée. Lorsque la théorie élastique est utilisée, les calculs sont semblables à ceux qui sont à effectuer pour toutes les classes de section lors des vérifications de service ; on pourra donc se référer aux leçons 10.5.1 et 10.5.2 pour plus d'explications sur l'analyse d'une section homogénéisée. Par ailleurs, il convient de prendre en compte l'action du fluage du béton comprimé, due aux charges permanentes, en introduisant une valeur appropriée du coefficient d'équivalence. Sous flexion négative, la totalité de la dalle peut être supposée fissurée. La section efficace comprend par conséquent la section en acier de construction et l'armature effectivement ancrée, située à l'intérieur de la largeur participante de dalle sous moment négatif (figure 5a). La résistance ultime en flexion de l'élément est définie lorsque la contrainte atteint sa résistance limite dans l'un quelconque des composants de la section. Dans l'Eurocode 4 [1], les résistances limites à l'ELU sont les suivantes :
Page 10
1.
acier de construction en traction ou en compression :
f y / a
2.
acier d'armature en traction :
f sk / s
3.
béton en compression :
0,85f ck / c
Ces résistances limites sont portées sur la figure 4b pour une section sous flexion positive et sur la figure 5b pour une section sous flexion négative. A noter que dans les cas montrés ici, l'axe neutre se trouve dans la poutre en acier. Pour les sections de Classe 4, il convient de prendre en compte le voilement local, par exemple en utilisant des longueurs efficaces pour les parois comprimées, comme cela est précisé dans l'Eurocode 3 [2] et expliqué dans la leçon 7.3. Lorsque la construction est de type non étayé, les contraintes dues aux charges appliquées à l'élément en acier seul doivent être ajoutées aux contraintes dues aux charges appliquées à l'élément mixte. Lorsqu'un effort tranchant élevé coexiste avec un moment de flexion élevé, il est nécessaire de tenir compte de l'interaction qui en résulte. La manière selon laquelle l'effort tranchant influence le moment de résistance plastique a été décrite dans la leçon 10.3. Pour les sections de Classe 3 et de Classe 4, l'application du § 4.4.3 de l'Eurocode 4 conduit à réduire généralement la valeur du moment de résistance élastique en présence d'un effort tranchant.
Page 11
6. DEVERSEMENT DES POUTRES MIXTES Dans les poutres mixtes, la semelle supérieure de la poutre en acier se trouve maintenue vis-à-vis du déversement du fait de sa connexion à la dalle. Toutefois, la distribution type des moments fléchissants dans une poutre continue (voir figure 6a) conduit à avoir la semelle inférieure en compression au voisinage des appuis intermédiaires. La longueur de semelle inférieure comprimée peut devenir importante lorsque seule la charge permanente agit sur la travée en considération (figure 6b). Les méthodes pour vérifier les poutres en acier, non maintenues latéralement, vis-à-vis du déversement, telles qu'elles ont été exposées aux leçons 7.9.1 et 7.9.2, ne sont pas applicables aux zones de moments négatifs des poutres mixtes continues ; en effet, ces méthodes supposent que chaque section transversale de l'élément puisse avoir une rotation d'ensemble, sans distorsion de forme (voir figure 7a). Dans la région des moments négatifs d'un élément mixte, le maintien apporté par la semelle supérieure entraîne une distorsion de la section lorsque la semelle inférieure (comprimée) flambe latéralement (figure 7b). Ce maintien résulte de la rigidité en torsion de la dalle qui agit en association avec les poutres adjacentes en acier à la manière d'une ossature en U inversé (figure 8). L'efficacité du maintien dépend également de la rigidité de la connexion. Pour les poutres mixtes dont la partie métallique est constituée par un profilé laminé à chaud traditionnel, l'action d'ossature en U inversé peut assurer le maintien complet de la semelle inférieure (comprimée). Les conditions pour lesquelles cette situation peut être obtenue sont précisées au § 4.6.2 de l'Eurocode 4 [1] ; elles comprennent une certaine limitation de la hauteur du profilé, cette exigence devenant plus sévère lorsque la résistance de calcul de l'acier augmente. L'effet de maintien de la semelle comprimée résultant de la rigidité en distorsion de la section, ainsi que l'effet d'autres paramètres intervenant dans l'action d'ossature en U inversé, peuvent être traduits également en termes d'élancement réduit de la poutre pour calculer le moment de résistance au déversement. Malgré l'éventualité d'une plastification locale aux extrémités de la poutre, on ne considère pas que cette plastification modifie le mode d'instabilité élastique de la poutre (figure 9), par suite de la diminution du moment négatif sur le tronçon de poutre instable. Une méthode pour calculer l'élancement est fournie dans l'Annexe B de l'Eurocode 4 [1].
6.1
Maintien latéral
La méthode précédente a trait à la stabilité latérale d'un élément entre deux sections maintenues. Deux types possibles de maintien latéral ponctuel de la semelle inférieure comprimée sont montrés sur la figure 10. Il est nécessaire de s'assurer que de tels maintiens sont suffisamment résistants et rigides pour être efficaces et que l'on ne dépasse pas la résistance à l'arrachement des connecteurs. Il est courant de vérifier la
Page 12
résistance des éléments de maintien en considérant une force latérale égale à un faible pourcentage de la force de compression de la semelle. Cet aspect est présenté plus loin dans la leçon 10.10 sur les ponts mixtes.
Page 13
7. CONCLUSION Lorsqu'on utilise une analyse élastique pour déterminer les sollicitations (analyse globale), le moment peut être redistribué depuis les appuis intermédiaires afin de tenir compte de la fissuration du béton et de la plastifi cation de l'acier. L'importance de la redistribution dépend de la Classe de la section au droit de chaque appui intermédiaire et des hypothèses adoptées sur la rigidité de flexion dans les zones de moments négatifs. Les propriétés d'une section non fissurée peuvent être utilisées pour déterminer la rigidité de flexion de chaque section transversale le long de la poutre (« méthode des sections fissurées »). En alternative, on peut supposer que sur une longueur fixée, de part et d'autre des appuis intermédiaires, les propriétés sont celles d'une section fissurée (« méthode des sections fissurées »). La résistance ultime en flexion des sections de Classe 3 et de Classe 4 est déterminée par l'analyse élastique de la section efficace, sur la base d'un calcul de contraintes ne dépassant pas des résistances limites. Lors de la détermination de la section efficace, on tient compte du traînage en cisaillement, de la fissuration du béton dans les zones de moments négatifs et, pour les sections de Classe 4, du voilement des parois comprimées en acier. Un coefficient d'équivalence approprié est utilisé pour tenir compte du fluage du béton comprimé. Il est admis que la dalle empêche la semelle supérieure de la poutre en acier de se déplacer latéralement. Un maintien en torsion est apporté par l'action d'ossature en U inversé. Dans les zones de moments négatifs, la tendance de la semelle inférieure à flamber latéralement est en partie freinée par la rigidité en distorsion de la section transversale. Ces effets entraînent une réduction de la valeur de l'élancement réduit vis-à-vis du déversement et peuvent dans certains cas fournir un maintien suffisant vis-à-vis de cette forme d'instabilité. Un maintien latéral ponctuel peut être apporté à la semelle comprimée, par exemple au moyen d'un entretoisement ou de raidisseurs d'âme t ransversaux.
Page 14
8. BIBLIOGRAPHIE [1]
Eurocode 4 : "Design of Composite Steel and Concrete Structures" : ENV 1994-1-1 : Part 1.1 : General rules and rules for buildings, CEN (in press).
[2]
Eurocode 3 : "Design of Steel Structures" : ENV 1993-1-1 : Part 1.1 : General rules and rules for buildings, CEN, 1992
Page 15
9. LECTURES COMPLEMENTAIRES 1.
Johnson R.P., “Composite Structures of Steel and Concrete : Volume 1 : Beams, Columns, Frames and Applications in Building”, Granada 1975.
2.
Johnson R.P. and Buckby R.J., “Composite Structures of Steel and Concrete : Volume 2 : Bridges”, Second edition, Collins, 1986.
3.
Brett P.R., Nethercot D.A. and Owens G.W., “Continuous Construction in Steel for Roofs and Composite Floors”, Structural Engineer, Volume 65A, October 1987, pp. 355-368.
4.
Lawson R.M. and Rackham J.W., “Design of Haunched Composite Beams in Buildings”, Steel Construction Institute, Ascot, England 1989.
Les références données à la leçon 10.1 sont à consulter également.
Page 16
Tableau 1 : Pourcentages limites de réduction de la valeur initiale du moment fléchissant, pour la redistribution des moments Classe de section en zone de moment négatif
1
2
3
4
Cas de l'analyse élastique « non fissurée »
40
30
20
10
Cas de l'analyse élastique « fissurée »
25
15
10
0
Page 17
TRADUCTION DES LEGENDES DES FIGURES
a) Sur appui intermédiaire ................................................................ a) At internal support b) A mi-travée .............................................................................................. b) At midspan Figure 1 - Sections efficaces
Longueur fissurée adjacente à l'appui (en pourcentage de travée)...... Cracked length adjacent to support (as % of span) Redistribution .............................................................................................. Redistribution Figure 2 - Redistribution du moment sur appui due à la fissuration
Nouvel A.N.P. .................................................................................................. New P.N.A. A.N.P. initial ................................................................................................. Initial P.N.A. Négligé ............................................................................................................... Neglected A.N.P. = Axe neutre plastique ............................................. P.N.A. = Plastic neutral axis * Sous réserve que l'axe neutre plastique soit dans l'âme * Provided that the P.N.A. is in the web Distributions rectangulaires de contraintes .................................................... Stress blocks Traction .................................................................................................................. Tension Compression ................................................................................................. Compression Figure 3 - Utilisation d'une âme efficace pour une section sous flexion négative avec une âme de Classe 3
a) Section homogénéisée .............................................................. a) Transformed section b) Distribution élastique de contraintes ................................ b) Elastic stress distribution Aire équivalente en acier ................................................................. Equivalent steel area Contrainte .................................................................................................................. Stress
Page 18
Axe neutre élastique ............................................................................ Elastic neutral axis Figure 4 - Résistance élastique sous flexion positive
a) Section efficace ................................................................................ a) Effective section b) Distribution élastique de contraintes ................................ b) Elastic stress distribution Contrainte .................................................................................................................. Stress Axe neutre élastique ............................................................................ Elastic neutral axis Figure 5 - Résistance élastique sous flexion négative, en présence d'une section de Classe 3
a) Deux travées chargées ................................................................. a) Both spans loaded Moment négatif ...................................................................................... Negative moment b) Charge permanente appliquée seule sur une travée b) Dead load only on one span Chargement complet ...................................................................................... Full loading Charge permanente seule ........................................................................... Dead load only Figure 6 - Distributions du moment fléchissant
a) Déversement sans maintien latéral ............ a) Unrestrained lateral-torsional buckling b) Déversement avec distorsion de forme .................................... b) Distortional buckling Figure 7 - Déversement Figure 8 - Portique en U inversé
Point de moment nul ....................................................................... Point of contraflexure Support d'un poteau .................................................................................. Support column Vue en élévation ................................................................................................. Side view Vue en plan au niveau de la semelle inférieure ...................... Plan view of bottom flange Diagramme du moment fléchissant .......................................... Bending moment diagram Section A-A .................................................................................................... Section A-A
Page 19
Déplacement v le long de la poutre ....................................... Displacement v along beam Figure 9 - Déversement avec distorsion d'une poutre mixte en zone de moments négatifs
Bracon assemblé à la dalle ....................................................................... Strut tied to slab Raidisseurs plans ............................................................................................... Stiff plates Figure 10 - Maintien latéral ponctuel
Page 20