Revue Construction Métallique
RÉSISTANCE À LA FLEXION RÉSISTANCE DES POUTRES HYBRIDES À SECTION EN I par D. Bitar
1 – INTRODUCTION – LIMITATIONS
La résistance à la flexion des poutres à section en I est principalement assurée par les semelles. La contribution de l’âme à cette résistance est de l’ordre de 6 à 10%. Une des nuances courantes d’acier des tôles utilisées dans la fabrication des poutres reconstituées soudées (PRS) est la nuance S355 avec une limite d’élasticité de 355 N/mm2 (pour une épaisseur de tôle inférieure ou égale à 16 mm [7]). En remplaçant l’acier de nuance S355 par un acier de nuance S460, voir l’exemple des figures 1 à 3, on peut assurer le même moment de résistance, avec une réduction de l’épaisseur des semelles dans un rapport égal à 355/460. En revanche, la réduction de l’épaisseur de l’âme ne suit pas le même rapport. En effet, l’épaisseur de l’âme est fortement tributaire du voilement de cisaillement. Ainsi, pour un panneau de coefficient d’aspect égal à 2, une âme de 19 mm d’épaisseur en acier S460 permettrait d’avoir la même résistance au voilement de cisaillement dans l’exemple des figures ci-dessous.
850x80 2340x20
850x80 Fig. 1 – Section homogène Acier S355
850x60 Acier S460
850x60
2340x20 Acier S355
2340x19
850x60 Acier S460
850x60 Fig. 2 – Section homogène Acier S460
Dans l’hypothè l’hypothèse se purement économiq économique ue où le rapport :
Fig. 3 – Section hybride Acier S460/S355
prix d’acier S460 est inférieur à prix d’acier S355
460 , il est tout à fait intéressant d’optimiser l’utilisation de l’acier en adoptant un acier 355 de haute limite d’élasticité pour les semelles et un acier courant pour les âmes.
D. BITAR – Chef de Projet – CTICM CENTRE TECHNIQUE DE LA CONSTRUCTION
INDUSTRIEL MÉTALLIQUE
Domaine de Saint-Paul, 78471 Saint-Rémy-l Saint-Rémy-lès-Chevreuse ès-Chevreuse Cedex Tél.: 01-30-85-25-00 - Télécopieu Télécopieurr 01-30-52-75-38
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D’autres considérations sont aussi très importantes, par exemple : – Le comportement des tôles de fortes épaisseurs vis-à-vis de la rupture fragile; – la variation de la limite d’élasticité garantie avec l’épaisseur de la tôle; – le comportement à la fatigue des tôles en fonction de l’épaisseur, etc.
2
Donc, et aussi du point de vue mécanique, l’utilisation de l’acier de haute limite d’élasticité pour les semelles est très avantageuse. Les sections hybrides traitées dans cette rubrique possèdent des semelles dont la limite d’élasticité est supérieure à celle de l’âme. Regardons maintenant le comportement à l’état limite ultime (ELU) sous moment de flexion d’une section hybride dans les hypothèses suivantes : – La limite d’élasticité de l’âme est inférieure à celle des semelles; – la section reste plane (diagramme linéaire des déformations dans la section); – les contraintes normales longitudinales dans la section (âme et semelles) suivent un diagramme élasto-plastique idéal (voir fig. 4) ; – la ruine par instabilité est empêchée (déversement); – pas de voilement local par compression des parois de la section. Le comportement des sections hybrides est schématisé à la figure 4. La distribution linéaire des déformations sur la hauteur totale de la section implique l’atteinte en premier lieu de la limite d’élasticité de l’âme à la jonction âme-semelle marquant le seuil du comportement élastique de la section. L’accroissement de la déformation, avec l’hypothèse que la section reste plane, donne lieu à des zones de plastification dans l’âme et, en supposant des semelles inégales, un déplacement de l’axe neutre qu’il convient d’appeler axe neutre élasto-plastique (A.N.E.P.). Le seuil du comportement élasto-plastique correspond à l’atteinte de la plastification sur toute la hauteur de la section. Cet état de plastification généralisée est rendu possible par l’absence d’instabilité (voilement par compression) des parois comprimées. Les positions des axes neutres élastique (A.N.E) et plastique (A.N.P) résultent des caractéristiques géométriques et mécaniques de la section. Entre ces deux situations et à chaque accroissement de la déformation, il existe une situation d’équilibre donnant lieu à une position d’axe neutre élasto-plastique. σ= f yw Zones de plastification en (II)
f yf
σ= f yf Contraintes
A.N.E
f yw
Déformations
f yw
A.N.E.P.
A.N.P.
f yf (I) Elastique
(II) Elasto-plastique
(III) Plastique
Fig. 4 – Comportement à la flexion d’une section hybride et plastification à la jonction âme-semelle
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L’utilisation des poutres hybrides est couverte par L’ENV 1993-1-5 [1]. Le présent article a pour but de montrer comment appliquer ce document et de donner des expressions simplifiées pour le calcul de la résistance à la flexion des sections hybrides. Le comportement idéalisé montré ci-dessus n’est pas toujours valable compte tenu de l’instabilité éventuelle des parois soumises à la compression et la nécessité de prendre en compte la plastification à la jonction âme-semelle, et pour cela deux principaux aspects seront traités ici : – le classement des sections hybrides; – et la résistance à la flexion de ces sections.
3
En outre, le présent article se place dans les limites suivantes : q
q
q
q
q
vérification à la flexion d’une section hybride en I sans interaction avec d’autres sollicitations. Les différentes situations d’interaction de sollicitations doivent être vérifiées selon les références [3] à [6] ; les sections hybrides sont mono-symétriques avec une semelle comprimée de Classe 1, 2 ou 3 et une âme de Classe 1, 2, 3 ou 4. La démarche pour la classification d’une section hybride est donnée au paragraphe 2; la limite d’élasticité de l’âme est inférieure à celle des semelles tout en étant supérieure à sa moitié : f yw f yf 2 f yw ; on précise également que l’on ne s’intéresse ici qu’à la résistance en section, nous n’avons pas évoqué la présence de traînage de cisaillement. Les largeurs des semelles utilisées dans la note ne tiennent pas compte de cet effet qu’il est cependant nécessaire de considérer dans les calculs d’exécution d’ouvrages; cette rubrique ne traite pas les aspects liés à la fatigue. Dans le cadre d’un projet de recherche européen [2], nous avons été amenés à étudier à la fatigue certains détails dans les poutres hybrides.
2 – CLASSIFICATION D’UNE SECTION HYBRIDE
Pour le classement de l’âme d’une section hybride, l’ENV 1993-1-5 recommande la prise en compte de la limite d’élasticité des semelles au lieu de celle de l’âme. En effet, le classement d’une paroi soumise à des contraintes normales dues à une compression combinée ou non avec une flexion est basée sur la capacité de la paroi à supporter des déformations plastiques ou élastiques sans risque de voilement local. C’est dans ce sens que l’ENV 1993-1-1 [3] définit les quatre classes suivantes : – Classe 1 : sections massives présentant une capacité de déformation suffisamment importante avant voilement local pour permettre une redistribution plastique des efforts dans le reste de la structure ; – Classe 2 : sections plastiques pour lesquelles la résistance plastique est atteinte sans problème, mais présentant une capacité de déformation avant voilement local beaucoup plus limitée; – Classe 3 : sections élastiques pour lesquelles la résistance élastique est atteinte sans problème, mais le risque de voilement local pouvant survenir avant la résistance plastique; – enfin la Classe 4, sections élancées pour lesquelles le voilement local peut survenir avant même d’avoir atteint la résistance élastique de la section.
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Dans les sections hybrides la conservation de l’hypothèse de Navier-Bernoulli implique des déformations dans l’âme près des jonctions, voir figure 5, égales à celles des semelles. Donc, il semble approprié de baser le classement de l’âme sur la limite d’élasticité des semelles.
εf contraintes
εw
plastification
4
déformations
Fig. 5 – Compatibilité des déformations à la jonction âme-semelle
Détermination de la classe d’une section hybride
La classe d’une section hybride est à déterminer sur la base des rapports largeur/épaisseur des parois comprimées qui la composent, ces parois étant elles-mêmes classées d’une classe Classe 1 à une Classe 4. Le diagramme des contraintes dans une paroi, ainsi que les conditions d’appui de celle-ci, interviennent également dans son classement. On se limite ici à une section en I soumise à la flexion. On commencera par le classement de la semelle comprimée : à partir du tableau ci-dessous, tiré de l’ENV 1993-1-1[3], on obtient la limite d’élancement pour déterminer la classe de la semelle en question en comparant le rapport largeur/épaisseur (élancement) de la paroi aux valeurs données dans le tableau 1. TABLEAU 1 Classe 1 :
Semelle comprimée tf c
c/tf ≤ 9εf Classe 2 : 9εf < c/tf ≤ 10εf
ε f
235 =
f yfc
f yfc : limite d ’élasticité de la semelle comprim ée [N/mm2].
Classe 3 : 10εf < c/tf ≤ 14 εf
Pour le classement de l’âme, la démarche est facilitée par l’adoption d’une hypothèse de distribution de contraintes compatibles avec la distribution qui a servi à classer la semelle. En d’autres termes on commencera par une distribution plastique si la semelle comprimée est de Classe 1 ou 2, et une distribution élastique si celle-ci est de Classe 3 ou 4.
Section hybride de Classe 1 ou 2
Dans ce cas, la semelle comprimée est de Classe 1 ou 2 et il faut déterminer la classe de l’âme.
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bfs x tfs
αd
f fs Fcomp
Zp d
f w
A.N.P
f w hw x tw
bfi x tfi
Ftrac
5
f yfi
Fig. 6 – Distribution des contraintes – Sections de Classe 1 ou 2
On détermine la position de l’axe neutre plastique Z p par rapport à la fibre supérieure à partir de l’équilibre : F comp = F trac où F comp est la résultante des contraintes de compression, F trac est la résultante des contraintes de traction. À noter que les limites d’élasticité des semelles f yfs et f yfi peuvent être de valeurs différentes (en fonction de l’épaisseur) mais de même nuance d’acier. Compte tenu de la variation de la limite d’élasticité en fonction de l’épaisseur des tôles, on pourra envisager de travailler avec trois valeurs de limites d’élasticité : f yfs pour la semelle supérieure, f yfi pour la semelle inférieure et f yw pour l’âme. La position de l’axe neutre plastique Z p est à calculer à partir de l’expression : Z p = [b fi . t fi . f yfi – b fs . t fs . f yfs + t w . f yw . (2 t fs + hw )] / (2 t w . f yw )
Soit d la hauteur de l’âme entre cordons de soudure et αd la hauteur comprimée de l’âme selon la figure 6. La classe de l’âme est à déterminer selon le tableau 2. TABLEAU 2
Âme de Classe 1 lorsque :
Âme de Classe 2 lorsque :
ε f =
235 f yfc
Pour α ≥ 0,5 :
d/tw ≤ 396 εf / (13 α -1)
Pour α < 0,5 :
d/tw ≤ 36 εf / α
Pour α ≥ 0,5 :
d/tw ≤ 456 εf / (13 α -1)
Pour α < 0,5 :
d/tw ≤ 41,5 εf / α
f yfc est la limite d’élasticité de la semelle comprimée en N/mm2 (égale f yfs dans la Figure 5)
ε f = 0,81 pour l'acier de limite d ’élasticité 355 N/mm2 ε f = 0,71 pour l'acier de limite d ’élasticité 460 N/mm2
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Section hybride de Classe 3 ou 4
Une distribution linéaire des contraintes normales sur la hauteur de la section est à considérer dans les cas où : – la semelle comprimée est de classe supérieure à 2, – lorsque la semelle comprimée est de Classe 1 ou 2, mais l’élancement de l’âme est supérieur aux valeurs limites de la Classe 2 du tableau 2. On peut déterminer la position de l’axe neutre élastique à partir de l’expression :
6
Z e =
∑ Ai Z i ∑ Ai
Après détermination de la position de l’axe neutre élastique, on note les hauteurs comprimées (d c ) et tendue (d t ) de l’âme et on calcule ψ = – d t / d c , voir figure 7.
bfs x tfs
L’âme est de Classe 3 lorsque : - Pour ψ > -1 d/tw ≤ 42ε /(0,67+0,33 ψ ) f
ψ = -d /d t c
Ze
compression
d
dt
- Pour ψ ≤ -1 d/tw ≤ 62εf (1 - ψ )
dc
σ = f yfs
hw x tw
A.N.E. traction
– ψ bfi x tfi
σ ≤ f yfi ou σ ≥ f yfi
Fig. 7 – Distribution des contraintes normales – Sections de Classe 3 ou 4
Si l’élancement de l’âme est supérieur aux limites ci-dessus, elle sera de Classe 4.
3 – RÉSISTANCE À LA FLEXION DE S SECTIONS HYBRIDES
Rappel : La présente rubrique est applicable sur les sections en I mono-symétriques où la semelle comprimée est de Classe 1, 2 ou 3 et l’âme de Classe 1, 2, 3 ou 4.
3,1. – Résistance à la flexion des sections hybrides de Classe 1 ou 2
Pour les sections de Classe 1 ou 2, le calcul de la résistance à la flexion ne pose pas de problème car la position de l’axe neutre plastique est déjà déterminée lors du classement de la section (équilibre ∑(Efforts de compression) = ∑(Efforts de traction)) en considérant une distribution plastique des contraintes, voir figure 6. Le coefficient partiel
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de sécurité sur le matériau acier est pris égal à γ M 0 = 1,0. Le moment de résistance à la flexion est à calculer à partir de l’expression : 0 ) . (Z p – t fs /2) + b fi . t fi . (f yfi / γM 0) . (t fi /2 + hw + t fs – Z p ) M c.Rd = M ply.Rd = b fs . t fs . (f yfs / γM 0 ) . [(Z p – t fs )2 / 2 + (hw + t fs – Z p )2 /2] + t w . (f yw / γM
3,2. – Résistance à la flexion des sections hybrides de classe 3
Pour les sections de Classe 3, le calcul du moment de résistance « hyper-élastique» doit prendre en compte la plastification à la jonction âme-semelle : Le calcul des hauteurs plastifiées hpc et hpt , voir figure 8, peut être effectué de la manière suivante : bfs x tfs
f fs hpc
Ze
compression
f w
h A.N.E.
hw x tw
f w hpt
traction
σi
bfi x tfi
Fig. 8 – Exemple de distribution de contraintes normales dans une section de Classe 3
I y
moment d’inertie de la section brute ;
W els = I y / Z e
module élastique de flexion relatif à la fibre supérieure;
W eli = I y / (h – Z e ) module élastique de flexion relatif à la fibre inférieure.
On définit les quatre niveaux de contraintes suivantes, voir figure 9 : σs_ext et σs_int : contraintes normales en fibres externe et interne de la semelle supé-
rieure.
σi_ext et σi_ext : contraintes normales en fibres externe et interne de la semelle inférieure.
σs_ext σs_int
tfs Ze h
A.N.E. tfi
σi_int σi_ext Fig. 9 – Notations
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Selon les valeurs de W eli . f yfi et W els . f yfs , on détermine facilement la distribution des contraintes normales et les hauteurs plastifiées hpc et hpt dans l’âme. Exemple :
Si W eli . f yfi W els . f yfs , la fibre extérieure de la semelle supérieure atteint sa limite d’élasticité en premier, voir figure 10, donc : bfs x tfs
8
f yfs hpc
Ze
Fpc f yw
h A.N.E.
bfi x tfi
hw x tw
f yw Fpt
hpt
σi_ext Fig. 10
σs_ext = f yfs σs_int = f yfs (Z e – t fs ) / Z e σi_ext = f yfs (h – Z e ) / Z e σi_int = f yfs (h – t fi – Z e ) / Z e
Si σs_int et σi_int f yw , alors : hpc = Z e (1 – f yw / σs_ext ) – t fs hpt = (h – Z e ) (1 – f yw / σi_ext ) – t fi M c.Rd = M ely.Rd = W els . f yfs / γ M 0 – F pc . (Z e – t fs – hpc /3) – F pt . (h – Z e – t fi – hpt / 3)
avec : F pc = (1/2) . hpc . (σs_int – f yw ) . t w / γ M 0 et F pt = (1/2) . hpt . (σi_int – f yw ) . t w / γ M 0 Dans les expressions précédentes, nous avons calculé la position de l’axe neutre élastique Z e en nous basant sur la section brute sans prendre en compte la plastification. Comme nous l’avons expliqué au début de cet article, la section se trouve dans une situation élasto-plastique, en d’autres termes, il faut prendre en compte un équilibre élasto-plastique des contraintes normales. Pour les sections en I doublement symétriques, les trois axes neutres (élastique, élasto-plastique et plastique) sont confondus. En revanche, pour les sections mono-symétriques, un calcul selon l’axe neutre élastique peut être adopté malgré la plastification, à condition que le rapport des limites d’élasticités reste inférieur ou égal à deux (f yf / f yw 2,0), ce qui permettra de limiter les hauteurs hpc et hpt .
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En revanche, il est important de considérer l’axe neutre élasto-plastique dans les deux situations suivantes : – lorsque la contrainte s’exerçant dans une semelle est calculée en utilisant le module de résistance élastique en se rapportant au plan moyen de la semelle (ENV 1993-1-5, Clause 2.2.2.(5)); – lorsque la plastification de la semelle en traction intervient en premier, et la réserve plastique de la semelle tendue est utilisée pour le calcul de la résistance de la section de Classe 3 (prEN 1993-1-1, Clauses 6.2.1(10) [4]), voir figure 11.
9
f yfs
bfs x tfs
Semelle en compression
f yw A.N.E.P. h
f yw hw x tw Semelle en traction
bfi x tfi
f yfi
Fig. 11 – Section hybride de Classe 3 – Calcul selon la fibre moyenne des semelles et plastification de la semelle tendue
3,3. – Résistance à la flexion des sections hybrides de Classe 4
On se limite ici à des sections de Classe 4 où la semelle comprimée est de Classe 1, 2 ou 3 et l’âme de Classe 4. Au paragraphe 2 on a montré la démarche de classement d’une section hybride et les limites d’élancement de la Classe 3. On rappelle que l’âme est de Classe 4 lorsque : Pour ψ – 1 : d / tw 42 εf /(0,67 + 0,33ψ ) Pour ψ – 1 : d / tw – ψ 62 εf (1 – ψ )
3,21. – Détermination de la section efficace de l’âme – Référence [3]
Comme pour le classement de l’âme, le calcul de la – section efficace est à effectuer en se basant sur la limite d’élasticité des semelles. Soit λ p l’élancement réduit de l’âme donné par : –
λ p =
f yf ––––––
σcr
(σcr (en N/mm2) = 189 800 k σ /[t w / d] 2), k σ à partir du tableau 3.
La valeur de f yf à considérer est égale à la limite d’élasticité de la semelle comprimée (f yfs ou f yfi ).
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TABLEAU 3 A.N.E. Section Brute Compression
Traction
dc
dt
ψ < 0 : deff = ρdc = de1 + de2
de1 = 0,4 deff
de2
de1
de2 = 0,6 deff
d
10
Fig. 12
ψ = σ2 / σ1
+1
Coefficient de 4,0 voilement k σ
1 > ψ > 0 8,2
0 7,81
1,05 + ψ
0 > ψ > -1 2
7,81-6,29ψ +9,78ψ
-1
-1 > ψ > -2
23,9
5,98(1-ψ )
2
– À partir de la valeur de λ p , on calcule le coefficient de réduction ρ par l’expression : – λ – 0,22 ρ = p – 1,0 λ p
La valeur de la hauteur efficace de la partie comprimée de l’âme est donnée par l’expression suivante : d eff = ρ . d c d c est la hauteur comprimée notée à la figure 12 du tableau 3. Nous avons montré aussi dans le tableau 3 comment distribuer la partie efficace d eff de l’âme pour obtenir la sec-
tion efficace finale de la figure 13.
bfs x tfs hws x tw
A.N.E – Section Brute
hwi x tw bfi x tfi Fig. 13 – Section efficace
3,22. – Détermination de la résistance à la flexion
On calcule : q
la position de l’axe neutre élastique de la section efficace : Z eff =
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∑ Ai,eff Z i,eff ∑ Ai,eff
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q
q
q
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le moment d’inertie de la section efficace : I y,eff le module élastique de flexion relatif à la fibre supérieure : W effs = I y,eff / Z eff le module élastique de flexion relatif à la fibre inférieure : W effi = I y,eff / (h – Z eff ).
On définit les six niveaux de contraintes suivantes, voir figure 14 : σs_ext et σs_int : les contraintes normales en fibre externe et interne de la semelle
supérieure ;
σi_ext et σi_ext : les contraintes normales en fibre externe et interne de la semelle
inférieure ;
σa_s et σa_i : les contraintes normales dans l’âme aux bords de la partie affectée par le
voilement local.
bfs x tfs
σs_ext σs_int
hws x tw
h
Partie affectée par le voilement local partie à négliger dans le calcul
Zeff
A.N.E
σa_s σa_i
Section efficace
hwi x tw
σi_int bfi x tfi
σi_ext
Fig. 14 – Contraintes de r éf é r ence – Section hybride de Classe 4
Pour simplifier la présentation, on donne ici les expressions de calcul pour le cas suivant : W effs . f yfs W effi . f yfi Donc :
σs_ext = f yfs / γ M 1 σs_int = σs_ext (Z eff – t fs ) / Z eff σi_ext = σs_ext (h – Z eff ) / Z eff σi_int = σs_ext (h – t fi – Z eff ) / Z eff σa_s = σs_ext (Z eff – t fs – hws ) / Z eff σa_i = σs_ext (Z eff – t fs – hw + hwi ) / Z eff
et on se place, en outre, dans la situation suivante (fig. 15) : σs_int et σa_s f yw / γ M 1 σa_i et σi_int f yw / γ M 1
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f yfs
bfs x tfs hws x tw
Fpc,eff f yw
Zeff A.N.E
12
Section efficace
hwi x tw
bfi x tfi Fig. 15 – Section hybride de classe 4 – Calcul de la r és istance à la flexion
Pour ce cas et avec un coefficient partiel de sécurité sur le matériau acier γ M 1 = 1,1 ou 1,0 voir références [4] et [5] le moment de résistance à la flexion est égal à : M c.Rd = M eff,y.Rd = W effs . f yfs / γ M 1 – F pc,eff . Z cg
avec :
1) . t w F pc,eff = (1/2) . hws .(σs_int + σa_s – 2 f yw / γM Z cg = Z eff – t fs –
1) . hws + (1/3)(σs_int – σa_s ) . hws 0,5(σa_s – f yw / γM 1) 0,5(σs_int + σa_s – 2f yw / γM
Le calcul pour d’autres configurations ne doit pas poser de difficultés particulières.
4 – EXEMPLE D’APPLICATION
Calcul de la résistance à la flexion de la section suivante : 850x60 – S460
Ame 2340x20 – S355
850x60 – S460
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Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS
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– Classification Semelle comprimée : c / t = 405 / 60 = 6,8 9 . 0,74 = 6,7 10 . 0,74 = 7,4
405 850x60
Donc : Semelle de classe 2 Âme :
d t w
=
2340x20 0 2 3 2
2320 = 116 124 . 0,74 = 91,8 20
13
850x60
Donc : Âme de classe 4. (pour la classification de l’âme nous avons utilisé εf et non pas εw ) – Calcul de la section efficace 850x60
La section brute est symétrique donc : ψ = σ2 / σ1 = – 1
331x20
Coefficient de voilement k σ = 23,9
342x0
σcr = 189800 . 23,9 / (2340 /
20)2
= 331
2460
N/mm2
L’épaisseur de la semelle est égale à 60 mm. f yfs = f yfi = 430 N/mm2 [7]
–
λ p =
1667x20
f yf
σcr
=
430 = 1,14 331 850x60
1,14 – 0,22 ρ= = 0,708 1,142 d c = d t = 2340 / 2 = 1170 mm d eff = 0,708 . 1170 = 828 mm d e 1 = 0,4 . 828 = 331 mm
850x60
d e 2 = 0,6 . 828 = 497 mm
On obtient la section efficace de la figure suivante
331x20 Zeff
342x0 2460
– Calcul des caractéristiques de la section efficace Aire de la section brute = 2 . 850 . 60 + 2 340 . 20 = 148800 mm2 Aire de la section efficace = = 2 . 850 . 60 + (1667 + 331) . 20 = 141960 mm2
y
A.N.E
Section efficace
y
1667x20
850x60
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Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS
90
Z eff = [148 800 . 2 460/ 2 – 342 . 20 . (342 /2 + 331 + 60)]/ 141960 = 1262 mm I y,eff = 850 . 24603 /12 – 830 . 23403 /12 + 148 800 . 322 – 20 . 3423 /12
– 20 . 342 . (1262 – 342 × 0,5 – 331 – 60)2 = 1,65 . 1011 mm4 W effs = 1,65 . 1011 /1 262 = 131 . 106 mm3 W effi = 1,65 . 1011 /(2460 – 1262) = 138 . 106 mm3
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– Calcul et distribution des contraintes normales Limite d’élasticité de la semelle = 430 N/mm2 pour une épaisseur de 60 mm (Acier S460) Limite d’élasticité de l’âme = 345 N/mm2 pour une épaisseur de 20 mm (Acier S355) (Par référence à l’EN 10025, l’EN 10113 et l’EN 10137 [7] ) On considère γ M 1 = 1,0 dans cet exemple [4 et 5] W effs . f yfs W effi . f yfi
σs_ext = 430 N/mm2, σs_int = 430 . (1 262 – 60)/ 1 262 = 409,6 N/mm2. σi_ext = 430 . (2 460 – 1262)/ 1 262 = 408,2 N/mm2, σi_int = 430 . (2 460 – 60 – 1262)/ 1 262 = 387,7 N/mm2. σa_s = 430 . (1262 – 60 – 331)/1262 = 296,8 N/mm2, σa_i = 430 . (1262 – 60 – 2 340 + 1667) / 1262 = 180,2 N /mm2. 850x60 hpc = 190 mm
430 N/mm2 409,6 N/mm2 345 N/mm2 296,8 N/mm2
1202
1139 mm 180,2
y
Fpc,eff
A.N.E
Section efficace
N/mm2
y Traction
1138
1096 mm
345 N/mm2 387,7 N/mm2 850x60
hpt = 125 mm Fpt,eff
408,2 N/mm2
Calcul des hauteurs plastifiées : hpt = 1 138 . (1 – 345 / 387,7) = 125 mm hpc = 1 202 . (1 – 345 / 409,6) = 190 mm Efforts :
F pt,eff = 0,5 . (387,7 – 345) . 20 . 125 = 53,4 kN F pc,eff = 0,5 . (409,6 – 345) . 20 . 190 = 122,7 kN
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– Résistance à la flexion M c.Rd = M eff,y.Rd
= 131 . 106 . 430 – 53,4 . 103 . (1138 – 125/ 3) – 122,7 . 103 . (1202 – 190/ 3) = 56132 kN.m – Remarque Le moment de flexion de la section hybride sans prise en compte de la plastification à la jonction âme-semelle vaut : 131 × 106 × 430 = 56330 kN . m soit 0,4 % de plus de M eff,y.Rd . Le moment de flexion de la section supposée constituée de deux semelles sans l’âme est égal à : 850 . 60 . 430 . 2 400 = 52632 kN . m soit 7 % de moins par rapport à M eff,y.Rd . Ces valeurs montrent bien qu’au stade d’avant projet (pour une situation similaire à celle étudiée ici) l’effet de la plastification à la jonction âme-semelle peut être négligé.
5 – ÉTATS LIMITES DE SERVICE (ELS)
Dans cette rubrique nous avons montré comment prendre en compte la plastification à la jonction âme-semelle pour calculer à l’ELU la résistance d’une section hybride soumise à la flexion. Nous avons quantifié aussi à partir d’un exemple l’effet de cette plastification. À l’état limite de service la clause 4.3.(8) de la référence [5] admet une plastification dans l’âme des poutres hybrides, ce document indique aussi la possibilité de négliger l’effet de cette plastification sur l’accroissement des contraintes dans les semelles et l’accroissement des flèches à l’ELS. En outre, la clause ci-dessus indique aussi la possibilité de négliger l’accroissement des contraintes dû à cette plastification pour les vérifications à l’état limite de fatigue. Il est à noter que ces indications sont en bonne concordance avec les conclusions des travaux effectués dans la référence 2 sur les poutres hybrides. Par ailleurs, pour le calcul des poutres d’un ouvrage d’art il faut faire référence à l’Eurocode 3 – 2 [6] où le non-dépassement de la limite d’élasticité à l’ELS est exigée (Chapitre 7 de la référence 6).
6 – RÉFÉRENCES
[1] ENV 1993-1-5 – Calcul de structures en acier – Règles générales-Règles supplémentaires pour les plaques planes, raidies ou non, chargées dans leur plan. Édition AFNOR : XP ENV 1993-1-5-décembre 2000 – indice de classement P22-315.
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[2] Composite bridge design for small and medium spans – European Commission – Report EUR 20583 EN – 2003 – Chapitre 2 (p29-79) : Strength and fatigue of hybrid girders – D. BITAR, Y. GALEA et M. LUKIC. [3] EUROCODE 3 – ENV 1993 – Calcul des structures en Acier. Partie 1.1 : Règles générales et règles pour les bâtiments EC3 DAN. Norme expérimentale française P22311 - Calcul des structures en Acier. Partie 1.1. : Règles générales et règles pour les bâtiments – Décembre 1992. [4] EUROCODE 3 – Design of steel structures – Part 1-1 – General rules and rules for buildings – Stage 34 draft – prEN 1993-1-1 : 2003 – Février 2003.
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[5] EUROCODE 3 – Design of steel structures – Part 1.5 : Plated structural elements – Stage 34 draft – prEN 1993-1-5-20xx – Février 2003. [6] EUROCODE 3 – Design of steel structures – Part 2 : Steel Bridges – Stage 34 draft – prEN 1993-2-20xx – Février 2003. [7] NF EN 10025 – Produits laminés à chaud en aciers de construction non alliés-conditions techniques de livraison – Décembre 1993 – Indice de classement : A35-501. NF EN 10113 : Produits laminés à chaud en aciers de construction soudable à grains fins : Partie 1 : conditions générales de livraison : Juin 1993 - Indice de classement : A35-505-1 Partie 2 : conditions de livraison des aciers à l’état normalisé/laminage normalisant : Juin 1993 - Indice de classement : A35-505-2 Partie 3 : conditions de livraison des aciers obtenus par laminage thermomécanique : Juin 1993 - Indice de classement : A35-505-3 NF EN 10137 : Tôles et larges plats en aciers de construction à haute limite d’élasticité à l’état trempé et revenu ou durci par précipitation : Partie 1 : conditions générales de livraison : Décembre 1995 - Indice de classement : A36-204-1 Partie 2 : conditions de livraison des aciers à l’état trempé et revenu : Décembre 1995- Indice de classement : A36-204-2 Partie 3 : conditions de livraison des aciers durcis par précipitation : Décembre 1995 - Indice de classement : A36-204-3.
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